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Katz - Alain Robillard - Scénariste & Réalisateur

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Thalia Rebinsky,<br />

le rêve à bout portant<br />

A 34 ans, elle vient d’écrire <strong>Katz</strong>, une série pour<br />

France 2, avec Julie Depardieu, Claire Maurier et<br />

Catherine Jacob. Le thème? Une famille hilarante,<br />

dysfonctionnelle et barrée. Rencontre avec une<br />

jeune auteure mordante. Par Linn Levy<br />

Un frottement. Léger. Un grain de sable.<br />

Juste ce qu’il faut pour que la roue ne<br />

tourne plus rond, que le cours des choses<br />

dévie singulièrement, que l’insoupçonné<br />

survienne enfin. Une friction jouissive<br />

donc, de laquelle finit par jaillir l’étincelle.<br />

La scénariste Thalia Rebinsky a la famille<br />

en ligne de mire. Et, sous sa plume acérée,<br />

ces liens-là prennent (et perdent) tout leur<br />

sens, la descendance s’affole, les parents<br />

déconnent, on s’aime en hurlant et, hérédité<br />

oblige, chaque membre du clan coupe<br />

la parole à l’autre pour tenter d’exister.<br />

Thalia Rebinsky a 34 ans, un passé<br />

de psy, un avenir étincelant d’écrivain,<br />

un amour immodéré pour le théâtre et,<br />

plus encore, pour l’esprit de troupe.<br />

Elle est née à Genève, habite à Paris<br />

depuis dix ans et a passé ces trois dernières<br />

années à écrire le scénario<br />

de <strong>Katz</strong>*, une série sur une famille<br />

«terriblement humaine, incroyablement<br />

excessive».<br />

Une histoire déjantée et attendrissante,<br />

avec des dialogues ultra affûtés<br />

et des personnages forts – dès les premiers<br />

instants le grand-père, Samuel<br />

<strong>Katz</strong>, sorte de Charles Ingalls friqué et<br />

sous acide, meurt déguisé en père Noël<br />

dans les bras d’une fille de joie –, qui a<br />

tout de suite plu à l’une des productrices<br />

les plus puissantes du paysage audiovisuel<br />

français, Pascale Breugnot, à la tête<br />

de la société de production Ego.<br />

Les premiers épisodes seront diffusés<br />

dès la rentrée sur France 2, avec un casting<br />

dément (Julie Depardieu, Catherine<br />

Jacob, Serge Hazanavicius, Claire Maurier<br />

notamment). Un succès fulgurant<br />

donc, étourdissant même, mais la jeune<br />

Suissesse au caractère bien trempé refuse<br />

les auréoles et garde les pieds sur terre.<br />

«Certes, tout est allé très vite pour moi,<br />

mais j’ai eu de la chance: les choses<br />

se sont tout de même faites par étapes<br />

Société 48<br />

edelweiss<br />

Jean-Luc Martin


et, surtout, grâce à un travail d’équipe»,<br />

glisse-t-elle en ouvrant la porte de<br />

son grand loft joyeusement bordélique et<br />

baigné de soleil. Au cœur de la pièce principale,<br />

à portée de main, des livres – Jung,<br />

Emmanuel Carrère, John Irving, Isaac<br />

Bashevis Singer –, des tonnes de DVD<br />

– Haneke, les frères Dardenne et toutes<br />

les séries possibles et imaginables –, sur<br />

les murs des œuvres d’art contemporain,<br />

des photos de famille – la sienne, celle de<br />

Bobby Ewing et celle du Parrain aussi –, et<br />

une jolie vue sur les toits de Paris.<br />

Dès que la jeune femme évoque la gestation<br />

de <strong>Katz</strong>, un nom revient sans cesse<br />

dans sa bouche, celui du scénariste et réalisateur<br />

<strong>Alain</strong> <strong>Robillard</strong>. «J’étais encore<br />

en cours lorsque j’ai exposé le projet de<br />

la série <strong>Katz</strong> devant des producteurs, explique-t-elle.<br />

J’avais l’histoire, les arches<br />

narratives, le ton et la trame. J’ai reçu plusieurs<br />

propositions, dont celle de Pascale<br />

Breugnot, qui m’a très vite présenté <strong>Alain</strong><br />

en me disant: «Travaillez ensemble pour<br />

développer ce projet.» Cette rencontre<br />

sera décisive. «On s’est d’abord vus dans<br />

un resto et la complicité a été immédiate.<br />

Puis on s’est mis à travailler comme des<br />

fous, presque tous les jours pendant trois<br />

ans, dans un immense respect mutuel.<br />

Boire des cafés avec <strong>Alain</strong>, discuter des<br />

heures durant, tout décortiquer, travailler,<br />

et écrire, écrire, écrire, c’est un rêve.<br />

Dans cet univers-là, avec ce travail-là,<br />

je me sens enfin à ma place.»<br />

Une jolie place qu’elle doit à son<br />

talent, à son énergie bouillonnante, mais<br />

sûrement aussi à un conseil judicieux.<br />

«J’avais 23 ans, je venais d’achever<br />

des études de psychologie à Londres,<br />

fait une équivalence en Suisse, mais je ne<br />

me trouvais pas, dévoile Thalia. Puis,<br />

Jacques Boudet et Claire Maurier dans <strong>Katz</strong><br />

un soir, je dînais chez ma tante Noga<br />

(ndlr: chanteuse, auteur-compositeur et directrice<br />

de l’association genevoise Catalyse),<br />

qui m’a simplement demandé: «Si tu pouvais<br />

faire exactement ce que tu voulais,<br />

que ferais-tu? Oui, quel est ton rêve?»<br />

Instinctivement, j’ai répondu: «Faire du<br />

théâtre à Paris.» Le lendemain, je partais<br />

et m’inscrivais au cours Jean Périmony.»<br />

Là, la Genevoise trouve un monde<br />

dans lequel elle se sent instantanément<br />

bien. «J’ai toujours été la grande gueule<br />

de service et, dans ce cours, il n’y avait<br />

que ça, des grandes gueules, des gens<br />

comme moi, c’était comme une famille.<br />

Je rencontrais enfin les personnes que<br />

j’avais attendues toute ma vie…» Pourtant,<br />

malgré sa passion pour la scène,<br />

la jeune fille ne sent pas vraiment l’âme<br />

d’une comédienne. «Je me trouvais assez<br />

nulle par rapport à mes potes, mais j’étais<br />

heureuse, je comprenais que j’étais au<br />

plus près de ce que j’aimais. C’est un peu<br />

plus tard, lorsque je me suis mise à écrire,<br />

que je me suis véritablement trouvée.»<br />

Avec une amie, Frédérique Würz, elles<br />

écrivent, montent et jouent leur première<br />

pièce, VLAD, qui reçoit le prix d’Encouragement<br />

aux jeunes auteurs du Ministère<br />

français de la culture 2005 (DMDTS).<br />

Puis elles fondent la compagnie Vienne<br />

la Nuit et produisent Talk to Me, une pièce<br />

de Dimitri Klockenbring, qui restera plusieurs<br />

mois à l’affiche à Paris. «On faisait<br />

tout, de la distribution de tracts dans<br />

la rue au montage du décor, au boulot<br />

administratif puis, le soir, on était<br />

sur scène. C’était intense.»<br />

Et c’est après cette expérience-là que<br />

Thalia Rebinsky s’inscrit – «pour faire<br />

une pause» (!) – à un atelier de trois mois<br />

au Conservatoire européen d’écriture<br />

Juin 2013 49<br />

audiovisuelle. Atelier durant lequel elle<br />

élabore la première version de <strong>Katz</strong>,<br />

rencontre Pascale Breugnot, puis <strong>Alain</strong><br />

<strong>Robillard</strong>, et trouve définitivement<br />

sa voie. Aujourd’hui, la jeune auteure<br />

caresse un ventre joliment rond, vit<br />

la moitié de l’année à Ibiza avec son compagnon<br />

musicien et continue d’écrire sur<br />

la famille. «C’est LE lieu où tout se passe,<br />

glisse-t-elle en souriant. Ce sont les gens<br />

qui se connaissent le mieux et le plus mal,<br />

j’aime cette ambivalence, je suis passionnée<br />

par le déterminisme familial. Peut-on<br />

s’en extraire ou est-on condamné à<br />

ressembler aux siens?»<br />

On murmure que la saison 2 de <strong>Katz</strong><br />

serait déjà en route et que, avec son<br />

compère <strong>Alain</strong> <strong>Robillard</strong>, Thalia écrirait<br />

d’autres scénarios aussi mordants…<br />

avec la famille en ligne de mire, bien sûr.<br />

* <strong>Katz</strong>, le pitch:<br />

Tout commence le jour où Samuel <strong>Katz</strong><br />

rend son dernier souffle, dans une<br />

posture pour le moins embarrassante.<br />

Il laisse derrière lui: une veuve plutôt<br />

énervée, une femme suicidée, quatre<br />

enfants abandonnés, un vieillard<br />

tyrannique, son épouse tyrannisée<br />

et une petite fille à l’air très japonais…<br />

Dès lors, plusieurs générations et autant<br />

de cultures différentes vont devoir<br />

cohabiter dans un mélange corsé de rire,<br />

de larmes et de confrontations musclées.<br />

A voir dès la rentrée sur France 2, <strong>Katz</strong> une série<br />

en six épisodes de cinquante-deux minutes.<br />

Créée par Thalia Rebinsky en collaboration avec<br />

<strong>Alain</strong> <strong>Robillard</strong>, produite par Pascale Breugnot,<br />

réalisée par Arnauld Mercadier. Avec Julie<br />

Depardieu, Catherine Jacob, Serge Hazanavicius,<br />

Claire Maurier, Jacques Boudet, <strong>Alain</strong> Bouzigues,<br />

Natacha Lindinger…<br />

Société


1. Un air de famille<br />

Un film de Cédric Klapisch, adapté d’une pièce de Jaoui-Bacri. Avec Agnès Jaoui,<br />

Jean-Pierre Bacri, Catherine Frot, Jean-Pierre Darroussin, Claire Maurier (1996).<br />

«Oh, j’ai fait un drôle de rêve cette nuit: on était tous là, comme<br />

ça, autour d’une table. Moi, j’avais un gros poisson dans la main<br />

et je donnais des coups sur la tête de maman avec.» Bienvenue<br />

dans la famille Ménard. Tout le monde est réuni au Père Tranquille,<br />

le café tenu par Henry, le fils aîné (la citation est de lui),<br />

mal-aimé par la mère, veuve polynévrosée et écrasante. C’est<br />

l’anniversaire de Yolande, la femme faussement nunuche de<br />

Philippe, le fils préféré, grand patron, fierté de maman et emmerdeur<br />

de première. A table aussi, Betty, la petite sœur, rebelle<br />

trentenaire et tête à claque, qui sort en secret avec Denis, le serveur<br />

philosophe du café. Chose exceptionnelle ce soir-là: Henry<br />

n’est pas accompagné d’Arlette, sa femme depuis quinze ans.<br />

Elle vient de le quitter, par téléphone. Mais il va tenter de garder<br />

cet échec secret le temps du dîner. Un huis clos lourdissime, des<br />

dialogues incisifs, un film jouissif aujourd’hui devenu culte et<br />

qui demeure l’un des plus grands succès du duo Jaoui-Bacri.<br />

2. six Feet Under<br />

Série américaine de 63 épisodes créée par Alan Ball (le réalisateur du film American<br />

Beauty) en 2001 sur HBO et diffusée jusqu’en 2005. Avec Peter Krause.<br />

Michael C. Hall, Frances Conroy, Lauren Ambrose, Rachel Griffiths, Jeremy Sisto.<br />

Nombre de prix sont venus récompenser cette série mythique<br />

au fur et à mesure de la diffusion de ses 63 épisodes. Oui,<br />

Six Feet Under raconte la vie de la famille Fischer, à la tête<br />

d’une entreprise familiale de pompes funèbres à Los Angeles,<br />

Fischer&Sons. Dès les premières minutes du premier épisode,<br />

Nathaniel Fischer, le patriarche et fondateur de l’entreprise<br />

familiale, meurt, percuté par un bus. Désormais, Fischer&Sons<br />

devra donc être dirigé conjointement par les deux fils, Nate et<br />

David. Dans la famille (et dans la même maison!), il y a aussi<br />

Ruth, la veuve cinquantenaire, tiraillée entre culpabilité et désir,<br />

Claire, 17 ans, ado rebelle et, bien sûr, le macchabée du jour,<br />

systématiquement pris en main au début de chaque épisode par<br />

Rico, l’employé de l’entreprise. Bien que mort, Nathaniel revient<br />

épisodiquement hanter les siens. Anticonformiste, subtile<br />

et décapante, la série aborde brillamment les thèmes souvent<br />

tabous de la société américaine: mort, homosexualité, fidélité.<br />

Les quatre<br />

familles<br />

cultes<br />

de Thalia<br />

50<br />

3. sonate d’automne<br />

Un film suédois d’Ingmar Bergman (Höstsonaten). Avec Ingrid Bergman, Liv<br />

Ullmann, Lena Nyman, Halvar Björk (1978).<br />

Le non-dit plane comme un vautour sur la trame de ce film<br />

époustouflant qui a valu au réalisateur suédois plusieurs récompenses<br />

internationales, parmi lesquelles le Golden Globe du<br />

meilleur film étranger en 1979. Sonate d’automne est un sidérant<br />

face-à-face entre une mère, Charlotte, pianiste renommée<br />

mais à la carrière finissante, et sa fille, Eva, mariée à Viktor,<br />

un pasteur, avec lequel elle vit dans une maison isolée dans la<br />

forêt. Sept ans qu’elles ne se sont pas vues lorsque Charlotte<br />

rend enfin visite à sa fille, après que cette dernière lui a envoyé<br />

une invitation écrite. Ce que Charlotte ignore, c’est qu’Helena,<br />

sa deuxième et plus jeune fille, lourdement handicapée depuis<br />

l’enfance, vit maintenant chez sa sœur, qui lui est entièrement<br />

dévouée. Un soir d’insomnie, mère et fille se retrouvent au salon,<br />

pour une longue nuit d’explications et d’affrontements. «J’étais<br />

ta poupée que tu prenais, que tu laissais», souffle la timide jeune<br />

femme. «Laisse-moi finir. Je suis un peu ivre. (…) Plus tard,<br />

quand je n’oserai plus ou quand j’aurai honte, tu pourras t’expliquer.<br />

J’écouterai et je comprendrai, comme je l’ai toujours fait.»<br />

Et la mère de répondre: «Je vais tout te dire une fois pour toute.»<br />

4. Modern Family<br />

Série américaine (2009) réalisée par Christopher Lloyd II et Steven Levitan. Avec<br />

Ed O’Neill, Sofía Vergara, Julie Bowen, Ty Burrell, Jesse Tyler Ferguson.<br />

Depuis sa création, une pluie d’Emmy Awards s’est abattue sur<br />

les réalisateurs et les acteurs de cette série au succès planétaire.<br />

Tournée dans la veine d’un faux documentaire humoristique,<br />

Modern Family présente trois familles radicalement différentes<br />

et pourtant parentes. Jay, le patriarche, s’est récemment remarié<br />

avec la volcanique Gloria, une Colombienne sexy, un brin<br />

hystérique et mère ultrapossessive de Manny. Jay a deux grands<br />

enfants: Mitchell, gay et en couple avec Cameron – les deux<br />

hommes viennent d’adopter Lily, une petite fille vietnamienne<br />

– et Claire. Cette dernière tente vainement de former la famille<br />

parfaite avec Phil, son mari, middle class et faux cool, et Haley,<br />

Alex et Luke, leurs trois enfants préadolescents. Drôlissimes et<br />

parfois allégrement politiquement incorrects, les personnages<br />

se confient régulièrement à la caméra.<br />

edelweiss<br />

Dukas, AFP/Photo12

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