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<strong>didon</strong> <strong>et</strong> <strong>énée</strong><br />
opéra de Henry Purcell<br />
livr<strong>et</strong> Nahum Tate<br />
direction musicale<br />
Sébastien d’Hérin<br />
mise en scène Bernard Lévy<br />
5 › 8 mai 2o11
<strong>didon</strong> <strong>et</strong> <strong>énée</strong><br />
La renommée acquiert<br />
des forces dans sa course.<br />
Virgile, L’Énéide, Livre IV<br />
Si l’apanage des chefs-d’œuvre est de soustraire<br />
à toute définition, à toute mise en cellule, on se<br />
trouve avec Didon <strong>et</strong> Énée devant un cas de figure<br />
assez amusant : on pense pouvoir y arriver… <strong>et</strong> on n’y arrive pas. Quel que soit<br />
le qualificatif que l’on emploie pour caractériser c<strong>et</strong> obj<strong>et</strong> pourtant si familier,<br />
on a immédiatement au bout des lèvres son contraire : grande œuvre – mais<br />
courte, elle reste la plus ancienne <strong>et</strong> la plus moderne, si simple mais si complexe,<br />
intime <strong>et</strong> grandiose, sombre <strong>et</strong> lumineuse, emblématiquement anglaise<br />
<strong>et</strong> pourtant universelle, <strong>et</strong>c. Sans doute vaut-il mieux renoncer <strong>et</strong> tenter plutôt<br />
de comprendre ce qui rend l’opéra de Purcell si évident <strong>et</strong> si mystérieux tout<br />
ensemble.<br />
Tout d’abord, un certain nombre d’énigmes subsistent sur sa genèse, sur<br />
les buts de son écriture, sur la date de sa création, que ne font qu’obscurcir<br />
autant de semi-vérités ou de simplifications avancées pour tout éclaircir.<br />
Commençons par couper court à la rumeur tenace qui voudrait faire de Didon<br />
<strong>et</strong> Énée le premier opéra anglais – alors que, nul ne le conteste, c’est Le Siège<br />
de Rhodes écrit par William Davenant, mis en musique par cinq compositeurs<br />
différents, <strong>et</strong> présenté chez l’auteur sur permission spéciale de l’austère<br />
gouvernement Cromwell en 1656. On pourra certes arguer que Le Siège<br />
de Rhodes est encore un assemblage de préludes, de scènes de masques<br />
<strong>et</strong> d’interludes plutôt qu’un véritable opéra, <strong>et</strong> décider que le premier opéra<br />
anglais est le Vénus <strong>et</strong> Adonis de John Blow, créé autour de 1683 à la cour<br />
de Charles II. Mais on n’aura rien établi pour autant, puisque dans les esprits<br />
<strong>et</strong> dans les cœurs, Didon <strong>et</strong> Énée demeure le premier opéra anglais…<br />
Passons maintenant à un autre mythe increvable : Didon <strong>et</strong> Énée aurait été<br />
composé par Purcell pour un pensionnat de jeunes filles nobles de Chelsea,<br />
nommément celui de M. Josias Priest, ma tre de ball<strong>et</strong>. Cela expliquerait<br />
la prépondérance des rôles féminins, le fait que le rôle du marin ait été<br />
initialement chanté par une femme… <strong>et</strong> jusqu’à la brièv<strong>et</strong>é de l’œuvre.<br />
Or pour séduisante qu’elle soit, c<strong>et</strong>te thèse est probablement fausse. L’œuvre,<br />
un programme l’atteste, a bien été représentée au pensionnat en 1689, mais<br />
elle pourrait être bien antérieure <strong>et</strong> avoir été créée auparavant à la cour.<br />
Quid de la partition originale ? Poser c<strong>et</strong>te innocente question, c’est pénétrer<br />
dans plusieurs siècles de querelles <strong>et</strong> d’argumentations entre musicologues,<br />
découvrir l’existence d’un manuscrit dit “de Tenbury”, composé entre 1660<br />
<strong>et</strong> 1670 <strong>et</strong> fort différent de l’œuvre que nous connaissons. Les hypothèses<br />
de datation <strong>et</strong> leurs diverses correspondances avec les remous politiques<br />
d’une période agitée ont ouvert la voie à toutes les spéculations <strong>et</strong> à une<br />
pléthore de lectures allégoriques qu’on ne pourra résumer ici 1 : on aurait
voulu flatter tel couple royal (ou tel autre), représenter<br />
telle trahison (ou telle autre)… Reste qu’une fois toutes<br />
les intrigues royales de l’Angl<strong>et</strong>erre du XVII e siècle oubliées,<br />
on ne r<strong>et</strong>ient qu’une histoire – une reine dit à son amant :<br />
“Ne pars pas, j’en mourrais.” Il part. Et elle en meurt. A-t-on,<br />
pour comprendre cela, vraiment besoin d’un contexte ?<br />
Quant à la familiarité de l’œuvre, elle ne vient sans doute<br />
pas, avouons-le, de notre connaissance de L’Énéide<br />
de Virgile, dont elle tire son suj<strong>et</strong>, avec quelques notables<br />
adaptations. Chez le poète préoccupé d’établir les liens<br />
entre la gloire d’Auguste <strong>et</strong> le monde grec, Didon n’est<br />
qu’une péripétie sur le chemin de la fondation de Rome.<br />
Comme ses sœurs, d’un amour blessé, elle mourût aux<br />
rives où elle fût laissée, tandis que le héros troyen s’en<br />
allait accomplir sa mission. On tend à l’oublier, Énée<br />
est, excusez du peu, le fils de Vénus – chez Virgile, ses<br />
amours sont contrariées par l’intervention divine d’une<br />
Junon courroucée. Dans le livr<strong>et</strong> de Nahum Tate, elles<br />
sont anéanties par des sorcières tout droit sorties<br />
de Macb<strong>et</strong>h, aux pouvoirs surnaturels mais à l’appétit<br />
de destruction bien temporel.<br />
Autre <strong>et</strong> dernière raison qui nous rend c<strong>et</strong>te œuvre<br />
si proche <strong>et</strong> si immédiate : si Purcell, comme Mozart,<br />
est mort à 36 ans, il aura façonné des siècles de musique<br />
anglaise. On pense à Britten, bien sûr, mais on aurait tort<br />
de s’arrêter en si bon chemin : les Beatles, ou les Who<br />
ont fièrement porté Purcell comme un bijou à leur<br />
boutonnière. P<strong>et</strong>e Townshend, qui revendique de s’être<br />
copieusement inspiré de la Fantasia upon one note<br />
de Purcell pour l’un des premiers opéras-rock, Tommy,<br />
décrit c<strong>et</strong>te influence comme un vertige : “J’ai réalisé un<br />
jour à quel point mon travail était connecté à une époque<br />
où la musique était liée à l’Église, à l’État <strong>et</strong> à la spiritualité.<br />
Et pour moi, tout cela vient directement de Purcell.” 2<br />
Pensait-on trouver feu l’organiste de Westminster, compositeur<br />
d’hymnes de couronnement, au cœur de la<br />
contre-culture de la fin des années 1960 ? Allez savoir…<br />
Les voies de la musique sont impénétrables. texte Lola Gruber<br />
1 On renverra plutôt aux articles de Marielle Khoury, Pierre Michot <strong>et</strong> Olivier<br />
Rouvière publiés dans le nº 247 de l’Avant-Scène Opéra, qui ont grandement<br />
facilité la rédaction de ce programme. | 2 “Baroque and roll, Townshend on<br />
Purcell”, BBC Radio 4, 2009
les grands<br />
esprits<br />
conspirent<br />
souvent<br />
contre<br />
eux-mêmes
opéra de Henry Purcell<br />
livr<strong>et</strong> Nahum Tate<br />
direction musicale<br />
Sébastien d’Hérin<br />
mise en scène Bernard Lévy<br />
assistante à la mise en scène Bérangère Gros<br />
scénographie Giulio Lichtner | costumes Elsa<br />
Pavanel | assistante aux costumes Séverine<br />
Thiébault | lumières Christian Pinaud<br />
vidéo Romain Vuill<strong>et</strong> <strong>et</strong> Jérôme Tuncer<br />
maquillages <strong>et</strong> coiffures Fabienne Robineau<br />
réalisation des décors Atelier du Théâtre<br />
musical de Besançon, Pascal Doudement<br />
(écorce de l’arbre) | réalisation des costumes<br />
Atelier du Théâtre musical de Besançon<br />
<strong>et</strong> Atelier Lilas en scène<br />
production : Le Théâtre musical de Besançon | coproduction :<br />
Les Nouveaux Caractères, Chœur AEdES | coréalisation :<br />
Ath<strong>énée</strong> Théâtre Louis-Jouv<strong>et</strong><br />
avec<br />
Isabelle Dru<strong>et</strong> Didon<br />
Arnaud Guillou Énée<br />
Camille Poul Belinda<br />
Edwige Parat la seconde suivante<br />
Sarah Jouffroy l’enchanteresse<br />
Agathe Boud<strong>et</strong> <strong>et</strong> Fiona Mc Gown<br />
les sorcières<br />
François Rougier le marin<br />
Antoine Strub l’esprit<br />
le Chœur AEdES<br />
direction Mathieu Romano<br />
sopranos Agathe Boud<strong>et</strong>,<br />
Antonine Bacqu<strong>et</strong>, Judith Derouin,<br />
Angélique Pourreyron<br />
altos Fiona Mc Gown, Julia Beaumier,<br />
Pauline Leroy, Antoine Strub<br />
ténors Florent Thioux, Anthony<br />
Lo Papa, Victor Jacob /Camillo<br />
Angarita, Marc Valéro<br />
basses David Pergaud,<br />
Jérémie Delvert, Julien Guilloton,<br />
Nicolas Brooymans<br />
Les Nouveaux Caractères<br />
direction <strong>et</strong> clavecin<br />
Sébastien d’Hérin<br />
violon 1 Benjamin Chenier<br />
violon 2 Françoise Duffaud<br />
alto David Glidden<br />
théorbe André Henrich<br />
violes de gambe Martin Bauer<br />
<strong>et</strong> Michel Chanu
log<br />
de l’Ath<strong>énée</strong><br />
venez tous les<br />
jours au théâtre<br />
blog.athene<strong>et</strong>heatre.com<br />
autour du spectacle<br />
d’abord<br />
Avant la représentation, le musicologue Jacques Amblard vient donner<br />
son éclairage sur l’œuvre de Purcell.<br />
foyer-bar de l’Ath<strong>énée</strong> | entrée libre<br />
vendredi 6 mai 2o11 18 h 3o › 19 h<br />
prochainement<br />
fondation royaumont récital complaintes <strong>et</strong> berceuses<br />
Britten, Duparc, Montsalvatge, Zemlinsky, Chausson<br />
avec la mezzo-soprano Isabelle Dru<strong>et</strong> <strong>et</strong> la pianiste Anne Le Bozec<br />
samedi 21 mai 2o11 › 15 h<br />
récit de la servante zerline texte Hermann Broch<br />
mise en scène Yves Beaunesne avec Marilù Marini<br />
12 › 28 mai 2o11<br />
<strong>et</strong> l’année prochaine ?<br />
Découvrez les spectacles de la saison 11.12, lors de la présentation<br />
de saison avec les artistes <strong>et</strong> Patrice Martin<strong>et</strong>, directeur<br />
du théâtre ou sur le site Intern<strong>et</strong> athenee-theatre.com<br />
réservation › 01 53 05 19 02 du mardi au vendredi 15 h › 17 h<br />
samedi 14 mai 2o11 › 15h entrée libre<br />
Square de l’Opéra Louis-Jouv<strong>et</strong> 7 rue Boudreau 75009 Paris<br />
Mº Opéra, Havre-Caumartin, RER A Auber<br />
ecrire@athenee-theatre.com | réservations 01 53 05 19 19 | athenee-theatre.com<br />
L’Eden-bar de l’Ath<strong>énée</strong>, situé au premier étage, vous propose des boissons<br />
<strong>et</strong> une restauration légère une heure avant <strong>et</strong> après chaque représentation.<br />
Le personnel d’accueil est habillé par les créations un été en automne<br />
malte martin atelier graphique | assisté par adeline goy<strong>et</strong> | impression moutot | licence nº 19125