Dis-moi ce que tu manges, je te dirai à quelle religion tu - UEJF
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Numéro 2 : Avril-Mai 2005<br />
Rédaction : Charlot<strong>te</strong> Lazimi et Coralie Palti<br />
• Edito<br />
• Chroni<strong>que</strong> : Historiens français sous le regard de Tel-aviv<br />
• Proche-Orient : L’in<strong>te</strong>rview de l’ambassadeur Nessim Zvili<br />
• Judaïsme : Modes<strong>te</strong> introduction <strong>à</strong> la mystérieuse Kabbale<br />
• Ouver<strong>tu</strong>re : « <strong>Dis</strong> <strong>moi</strong> <strong>ce</strong> <strong>que</strong> <strong>tu</strong> <strong>manges</strong>, <strong>je</strong> <strong>te</strong> <strong>dirai</strong>s <strong>à</strong> <strong>que</strong>lle <strong>religion</strong> <strong>tu</strong><br />
appartiens »<br />
• Points de vue :<br />
Abat les in<strong>te</strong>llec<strong>tu</strong>els ?<br />
Histoire de chiens- La dhimmi<strong>tu</strong>de dans le conflit israélo-palestinien<br />
• Point histoire : Le génocide Cambodgien<br />
• Conféren<strong>ce</strong> : Conféren<strong>ce</strong> de Claude Lanzmann <strong>à</strong> Bordeaux<br />
• Re<strong>ce</strong>t<strong>te</strong> : le Strudel, dessert typi<strong>que</strong> ashkénaze !!<br />
Pour tout renseignement, réactions, propositions de rédaction d’articles, n’hési<strong>te</strong>z pas <strong>à</strong><br />
nous contac<strong>te</strong>r : charlot<strong>te</strong>.iris@caramail.com ou coraliepalti@hotmail.com.
Depuis <strong>que</strong>l<strong>que</strong>s <strong>te</strong>mps, <strong>je</strong> retrouve<br />
un sentiment qui était enfoui en <strong>moi</strong>:<br />
l’espoir. Je sais qu’aujourd’hui la<br />
si<strong>tu</strong>ation est loin d’être idylli<strong>que</strong> : l’affaire<br />
Dieudonné et les élucubrations de Tariq<br />
Ramadan sont encore trop présen<strong>te</strong>s dans<br />
notre ac<strong>tu</strong>alité. Pourtant, beaucoup de<br />
choses ont évolué positivement. La<br />
si<strong>tu</strong>ation au Proche Orient qui ne <strong>ce</strong>ssait<br />
de se dégrader, semble retrouver la voie de<br />
la négociation. Les relations entre la<br />
Fran<strong>ce</strong> et d’Israël connaissent aussi une<br />
amélioration tangible.<br />
Je ne ferai pas preuve d’un <strong>te</strong>l<br />
optimisme si <strong>je</strong> n’avais pas assisté <strong>à</strong> une<br />
scène encore impensable il y a seulement<br />
<strong>que</strong>l<strong>que</strong>s <strong>moi</strong>s. L’ambassadeur d’Israël en<br />
Fran<strong>ce</strong> et le ministre des affaires<br />
étrangères palestinien assis co<strong>te</strong> <strong>à</strong> co<strong>te</strong> <strong>à</strong><br />
l’insti<strong>tu</strong>t du monde arabe lors d’une<br />
réunion sou<strong>te</strong>nant le pro<strong>je</strong>t « The Building<br />
Business Bridges Program ». Se<br />
réunissaient pendant une semaine de<br />
<strong>je</strong>unes entrepreneurs Israéliens et<br />
Palestiniens. Leur volonté commune est de<br />
construire des par<strong>te</strong>nariats solides et ainsi<br />
de préparer ensemble un avenir meilleur<br />
dont <strong>ce</strong>t<strong>te</strong> réunion marquait l’apogée.<br />
Comme l’expliquait dans son discours Ofer<br />
Brons<strong>te</strong>in, l’organisa<strong>te</strong>ur et le créa<strong>te</strong>ur de<br />
<strong>ce</strong> pro<strong>je</strong>t : « Si l’argent est le nerf de la<br />
guerre, l’économie est le nerf de la paix !».<br />
Le but est d’encourager la compréhension<br />
et le dialogue entre des professionnels<br />
israéliens et palestiniens. Fa<strong>ce</strong> <strong>à</strong> <strong>ce</strong>t<strong>te</strong><br />
entreprise courageuse, <strong>je</strong> n’ai pu<br />
té<strong>moi</strong>gner tou<strong>te</strong> mon admiration et mon<br />
respect pour les protagonis<strong>te</strong>s de <strong>ce</strong> pro<strong>je</strong>t.<br />
Les conférenciers n’ont pas <strong>te</strong>nu de<br />
discours angéli<strong>que</strong>s ou volontairement<br />
inno<strong>ce</strong>nts. Mais <strong>ce</strong> fut un moment magi<strong>que</strong><br />
pendant le<strong>que</strong>l on pouvait croire <strong>à</strong> la paix.<br />
Pour ci<strong>te</strong>r Nessim Zvili qui nous accorde<br />
une in<strong>te</strong>rview ex<strong>ce</strong>ptionnelle dans <strong>ce</strong><br />
numéro « Il faut y croire ! ». Le chemin<br />
sera encore long et difficile, mais le <strong>je</strong>u en<br />
vaut la chandelle.<br />
Charlot<strong>te</strong> Lazimi
L’historiographie française<br />
débat<strong>tu</strong>e la semaine du 16 mai en Israël<br />
lors d’un collo<strong>que</strong> franco-israélien <strong>à</strong><br />
l’université de Tel-Aviv. Le thème :<br />
« Guerre, collaboration, résistan<strong>ce</strong> ».<br />
La réalité de l’occupation française<br />
a été long<strong>te</strong>mps faussée par le mythe de la<br />
« Fran<strong>ce</strong> résistan<strong>te</strong> ». Dans les années 50,<br />
la priorité des hommes politi<strong>que</strong>s français<br />
était d’unir la population derrière les défis<br />
<strong>que</strong> présentaient la reconstruction,<br />
l’Europe et la Guerre froide. Pendant <strong>ce</strong>t<strong>te</strong><br />
période, les archives de la guerre n’étaient<br />
pas encore disponibles. Ainsi, l’historien<br />
n’avait pas les moyens de dévoiler la tris<strong>te</strong><br />
vérité : la collaboration de Vichy<br />
pleinement conscien<strong>te</strong> et responsable.<br />
Ainsi, l’ouvrage de l’historien américain<br />
Robert Paxton, La Fran<strong>ce</strong> de Vichy, publié<br />
dans les années 60, est arrivé comme une<br />
bombe (puisqu’il met la responsabilité de<br />
l’Etat français au <strong>ce</strong>ntre de sa thèse). Le<br />
mythe du « maréchal Pétain le bouclier et<br />
De Gaulle le glaive » a été dès lors révolu.<br />
Les in<strong>te</strong>llec<strong>tu</strong>els français furent<br />
déstabilisés, divisés et commencèrent les<br />
recherches (ou les approfondirent pour<br />
<strong>ce</strong>ux qui avaient déj<strong>à</strong> commencé). Au<br />
niveau du politi<strong>que</strong>, même si F. Mit<strong>te</strong>rrand<br />
a ouvert les archives dans les années 80,<br />
aucun président français n’avait encore<br />
reconnu la responsabilité de la Fran<strong>ce</strong>.<br />
C’est en 1995 <strong>que</strong> Jac<strong>que</strong>s Chirac fit l’ac<strong>te</strong><br />
symboli<strong>que</strong> tant at<strong>te</strong>ndu : au mémorial du<br />
Vel d’Hiv, il reconnu la culpabilité de la<br />
Fran<strong>ce</strong> pour les crimes commis pendant la<br />
guerre et entres autres il reconnu la<br />
collaboration active et volontaire de la<br />
poli<strong>ce</strong> française dans la déportation des<br />
juifs. La rétrospection était en marche.<br />
Les historiens français travaillent<br />
depuis, sur <strong>ce</strong>t<strong>te</strong> mé<strong>moi</strong>re pesan<strong>te</strong>. Ils y<br />
arrivent très bien (Raymond Aron, Serge<br />
Bers<strong>te</strong>in, Pierre Milza, Jean-Pierre<br />
Historiens français sous le regard de Tel-Aviv<br />
Azéma, Michel Winock…) mais avec un<br />
grand souci de nuan<strong>ce</strong>s. En voici <strong>que</strong>l<strong>que</strong>s<br />
exemples : <strong>ce</strong> n’est pas la Fran<strong>ce</strong> qui a<br />
collaboré mais l’Etat de Vichy et une<br />
minorité de la population (la majorité de la<br />
population étant restée passéis<strong>te</strong>,<br />
silencieuse), si il y a eu « 40 millions de<br />
Maréchalis<strong>te</strong>s » en 1940 selon la formule<br />
d’Henri Amouroux,, il n’y a jamais eu « 40<br />
millions de Pétainis<strong>te</strong>s » (qui adhéraient,<br />
au-del<strong>à</strong> de la figure charismati<strong>que</strong> du<br />
maréchal, <strong>à</strong> l’idéologie), il y a un tournant<br />
important dès 1942 qui mar<strong>que</strong> la fin de la<br />
popularité du régime de Vichy… Ces<br />
nuan<strong>ce</strong>s sont indispensables pour ne pas<br />
simplifier l’histoire en disant <strong>que</strong> la<br />
Fran<strong>ce</strong> a été dans son ensemble<br />
collaborationnis<strong>te</strong>, dans son ensemble<br />
antisémi<strong>te</strong>, dans son ensemble hon<strong>te</strong>use…<br />
En effet, un nombre important de<br />
« Jus<strong>te</strong>s » ont sauvé des juifs et il y a eu<br />
une infinité d’ac<strong>te</strong>s de bravoure<br />
individuelle provenant de résistants mais<br />
aussi d’anonymes.<br />
Pourtant, il demeure <strong>que</strong>l<strong>que</strong>s<br />
<strong>que</strong>stions délica<strong>te</strong>s : La Fran<strong>ce</strong> a-t-elle été<br />
fascis<strong>te</strong> ? Pourquoi la Fran<strong>ce</strong> semble<br />
toujours mêler, depuis l’affaire Dreyfus, un<br />
penchant moderne humanis<strong>te</strong> et un<br />
penchant archaï<strong>que</strong> antisémi<strong>te</strong> ?<br />
Un rapport <strong>à</strong> l’histoire qui diverge<br />
entre Fran<strong>ce</strong> et Israël<br />
Les dissensions sont grandes et les<br />
malen<strong>te</strong>ndus profonds surtout, lors<strong>que</strong><br />
dans les années 80, un historien israélien<br />
se met <strong>à</strong> dos tous les historiens français !<br />
En effet, Zeev S<strong>te</strong>rnhell, é<strong>tu</strong>diant français<br />
fraîchement sorti de Scien<strong>ce</strong>-po, décide de<br />
faire son alya, devient en Israël historien<br />
et publie un ouvrage révolutionnaire, Ni<br />
droi<strong>te</strong> ni gauche. C’est la deuxième bombe<br />
après <strong>ce</strong>lle de l’ouvrage de Robert Paxton.<br />
Cet<strong>te</strong> fois-ci, il s’agit de considérer la
Fran<strong>ce</strong> comme la matri<strong>ce</strong> idéologi<strong>que</strong> du<br />
fascisme, comme le laboratoire des idées<br />
fascis<strong>te</strong>s avant 1914. Il est vrai <strong>que</strong> le<br />
blanquisme, le boulangisme, l’affaire<br />
Dreyfus, le nationalisme exclusif de<br />
Maurras, le racisme anthropologi<strong>que</strong> de<br />
Vacher de la Ponge, l’antisémitisme de<br />
Drumont et l’action direc<strong>te</strong> de George<br />
Sorel, ont joué une grande influen<strong>ce</strong> sur la<br />
formation idéologi<strong>que</strong> des fascismes italien<br />
et allemand avant la Seconde guerre<br />
mondiale. Le fascisme provient,<br />
effectivement, d’un savant mélange d’idées<br />
d’extrême droi<strong>te</strong> et d’extrême gauche. Ce <strong>à</strong><br />
quoi les historiens français répondent<br />
NON. Non, car pour René Rémond dans<br />
son livre Les droi<strong>te</strong>s en Fran<strong>ce</strong>, les trois<br />
droi<strong>te</strong>s sont le boulangisme, l’orléanisme<br />
et le bonapartisme et il n’exis<strong>te</strong> pas de<br />
fascisme en Fran<strong>ce</strong>. Non, car pour Pierre<br />
Milza, il y a une distinction <strong>à</strong> faire entre le<br />
fascisme de « mouvement » et le fascisme<br />
de « régime » et il estime qu’en Fran<strong>ce</strong> on<br />
est resté au stade du « mouvement »<br />
(ligues d’extrêmes droi<strong>te</strong> et in<strong>te</strong>llec<strong>tu</strong>els<br />
dispersés). Pour conclure, il dit qu’ « il y a<br />
eu une fascination en Fran<strong>ce</strong> mais non une<br />
fascisation » !<br />
Mais finalement, où est la <strong>que</strong>relle<br />
histori<strong>que</strong> ? Il n’y en a pas : la Fran<strong>ce</strong> a<br />
connu un embryon de fascisme <strong>à</strong> travers<br />
des écrits immondes et des nébuleuses<br />
d’extrêmes droi<strong>te</strong> mais l’hexagone n’a<br />
jamais connu un fascisme de masse. Il<br />
semblerait <strong>que</strong> les historiens se blessent<br />
mu<strong>tu</strong>ellement (dans le con<strong>te</strong>x<strong>te</strong> <strong>te</strong>ndu du<br />
conflit du Proche-Orient et de la<br />
résurgen<strong>ce</strong> de l’antisémitisme en<br />
Fran<strong>ce</strong>)…sur la base de pas grand-chose.<br />
En réalité l’orgueil national res<strong>te</strong> grand :<br />
ne pas toucher <strong>à</strong> l’humanisme français, fils<br />
de la révolution de 1789, ne pas toucher au<br />
noble sionisme, <strong>ce</strong>lui des pionniers, des<br />
kibboutzim et de la gauche israélienne !!<br />
Pourtant, un collo<strong>que</strong> d’historiens<br />
français et israéliens a bel et bien été<br />
organisé <strong>à</strong> Tel-Aviv <strong>ce</strong> week-end dans le<br />
cadre d’un accord scien<strong>ce</strong>s-po**/<br />
université de Tel-Aviv. Zeev S<strong>te</strong>rnhell et<br />
Elie Barnavi étaient bien sûr au rendezvous<br />
ainsi <strong>que</strong> Henry Rousso, Jean-Pierre<br />
Rioux, Carré de Malberg, René Rémond<br />
coté français. Il s’agit d’une no<strong>te</strong> d’espoir<br />
caractéristi<strong>que</strong> du ré<strong>ce</strong>nt rapprochement<br />
cul<strong>tu</strong>rel dont parle l’ambassadeur d’Israël<br />
dans l’in<strong>te</strong>rview. En effet, le dialogue<br />
semble reprendre entre les universitaires<br />
des deux pays après la crise en 2003 du<br />
boycott de Paris VII et Grenoble des<br />
universités israéliennes. Alain-Gérard<br />
Slama dit dans Le Figaro du 23 mai <strong>à</strong> <strong>ce</strong><br />
propos : « <strong>ce</strong>r<strong>te</strong>s, le mur des désaccords<br />
n’est pas totalement tombé » (…) des deux<br />
cotés « deux traumatismes taraudent la<br />
conscien<strong>ce</strong> nationale : l’antijudaïsme pour<br />
le premier, la violation des droits<br />
Palestiniens pour le second. »<br />
**A no<strong>te</strong>r <strong>que</strong> Scien<strong>ce</strong>s-po n’est<br />
pas un par<strong>te</strong>nariat anodin : tous les<br />
historiens cités (R. Rémond, P. Milza, S.<br />
Bers<strong>te</strong>in, M. Winock…) sont professeurs<br />
dans la prestigieuse école de la rue Saint<br />
Guillaume, l<strong>à</strong> même par où le <strong>je</strong>une Zeev<br />
S<strong>te</strong>rnhell est passé !<br />
Coralie Palti
L’in<strong>te</strong>rview de Nissim Zvili, l’ambassadeur d’Israël en Fran<strong>ce</strong> effec<strong>tu</strong>é<br />
le 28 Avril dernier<br />
1 er thème : les relations entre la Fran<strong>ce</strong> et Israël<br />
- Réflex-Sion : Y a-t-il un sentiment anti-français qui se<br />
développe en Israël comme en té<strong>moi</strong>gne les sifflements de l’hymne<br />
française lors du match amical opposant la Fran<strong>ce</strong> <strong>à</strong> Israël ?<br />
- Si on essaie de décrire le développement des relations entre la<br />
Fran<strong>ce</strong> et Israël, il y a eu des hauts et des bas. La Fran<strong>ce</strong> a sou<strong>te</strong>nu la<br />
création de l’Etat d’Israël et <strong>ce</strong>, pendant les périodes les plus criti<strong>que</strong>s de<br />
son histoire. La capacité de dissuasion d’Israël est une capacité qu’on<br />
doit <strong>à</strong> la Fran<strong>ce</strong>. C’est après la guerre des 6 jours <strong>que</strong> les relations ont<br />
commencé <strong>à</strong> se dégrader. Dans nos analyses, il exis<strong>te</strong> trois domaine très<br />
différents : le politi<strong>que</strong>, les médias et l’opinion publi<strong>que</strong>. Nous avons<br />
travaillé très dur pendant <strong>ce</strong>s dernières années pour faire redémarrer les<br />
relations politi<strong>que</strong>s. Aujourd’hui, <strong>je</strong> peux dire très clairement qu’il y a<br />
une amélioration tangible des relations entre la Fran<strong>ce</strong> et Israël : on a<br />
réussi <strong>à</strong> identifier des domaines et des intérêts communs surtout dans notre région et en Europe. L’élargissement<br />
de l’Europe est très favorable <strong>à</strong> l’Etat d’Israël. Parmi les 10 nouveaux membres, pres<strong>que</strong> tous soutiennent Israël,<br />
même s’ils ne sont pas encore très présents au niveau in<strong>te</strong>rnational.<br />
Sur trois su<strong>je</strong>ts la Fran<strong>ce</strong> et Israël ont des positions très proches :<br />
• l’indépendan<strong>ce</strong> du Liban et l’évacuation de l’armée syrienne (même si il y a encore un petit point de<br />
divergen<strong>ce</strong> sur le rôle du Hezbollah).<br />
• la mena<strong>ce</strong> iranienne.<br />
• la volonté de la Fran<strong>ce</strong> de rebâtir ses relations outre-Atlanti<strong>que</strong> qui passent un peu par le Proche Orient,<br />
par Israël.<br />
Aujourd’hui il y a une nouvelle donne dans notre région. La Fran<strong>ce</strong> doit avouer <strong>que</strong> Arafat a joué un<br />
rôle négatif pendant <strong>ce</strong>s dernières années. Aujourd’hui, lors<strong>que</strong> Mahmoud Abbas avan<strong>ce</strong> dans un pro<strong>ce</strong>ssus de<br />
négociation, le gouvernement Israélien est prêt <strong>à</strong> avan<strong>ce</strong>r aussi. Désormais on discu<strong>te</strong>, le dialogue est plus<br />
ouvert. Des ministres israéliens arrivent pres<strong>que</strong> cha<strong>que</strong> semaine en Fran<strong>ce</strong> pour renouveler des anciennes<br />
relations. Tout ça crée une dynami<strong>que</strong> très positive!<br />
- Réflex-Sion : On parle de réchauffement des relations franco israélienne depuis 2003, mais les<br />
efforts diplomati<strong>que</strong>s de la Fran<strong>ce</strong> ne se con<strong>ce</strong>ntrent-ils pas uni<strong>que</strong>ment sur la mé<strong>moi</strong>re de la Shoah avec par<br />
exemple la visi<strong>te</strong> de J.P. Raffarin <strong>à</strong> Yad Vashem ?<br />
- Je crois qu’on a énormément apprécié en Israël la dé<strong>te</strong>rmination du gouvernement français dans sa<br />
lut<strong>te</strong> contre l’antisémitisme. On sent qu’il y a une vraie prise de conscien<strong>ce</strong> en Fran<strong>ce</strong> de <strong>ce</strong> danger. On a<br />
apprécié énormément le travail de mé<strong>moi</strong>re : les 60 ans n’étaient <strong>que</strong> le sommet de <strong>ce</strong>t<strong>te</strong> évolution. Que la<br />
Fran<strong>ce</strong> décide <strong>que</strong> le 27 janvier devienne un jour national de l’é<strong>tu</strong>de de la Shoah dans les écoles française et<br />
finan<strong>ce</strong> le nouveau musée en mé<strong>moi</strong>re de la Shoah, est un pas très important. Ce sont de <strong>te</strong>ls ac<strong>te</strong>s qui ont créé<br />
une <strong>te</strong>rre fertile pour rebâtir de nouvelles relations. Je ne suis pas un romanti<strong>que</strong> des relations in<strong>te</strong>rnationales. Je<br />
crois <strong>que</strong> les relations in<strong>te</strong>rnationales sont basées sur les intérêts. J’étais très fier, il y a quinze jours de participer<br />
<strong>à</strong> la signa<strong>tu</strong>re d’un accord de coopération entre les agen<strong>ce</strong>s spatiales israéliennes et françaises pour le<br />
développent d’un mini sa<strong>te</strong>lli<strong>te</strong>. C’est une coopération entre les i-<strong>te</strong>ch français et israéliens. Il y a deux ans,<br />
personne n’aurait pu l’imaginer. Je crois qu’au niveau politi<strong>que</strong> on est sur le bon chemin. Pourtant, tout peut se<br />
bouleverser du jour au lendemain : c’est comme une peti<strong>te</strong> plan<strong>te</strong> qui vient de germer et qu’il faut protéger et<br />
arroser. Au niveau des médias, on criti<strong>que</strong> Israël mais on le fait de manière plus équilibrée. Les médias français<br />
s’intéressent davantage <strong>à</strong> la complexité de <strong>ce</strong> qui se passe. Ils ont pris conscien<strong>ce</strong> <strong>que</strong> <strong>ce</strong> n’est pas toujours nous
qui avons eu tort. Mais <strong>ce</strong> qui s’est le plus détérioré, <strong>ce</strong> sont les opinions publi<strong>que</strong>s. Un déficit énorme exis<strong>te</strong><br />
dans les images en Israël et en Fran<strong>ce</strong> : ça mettra des années pour se rebâtir, se reconstruire. Le président Chirac<br />
et notre gouvernement essayent de renfor<strong>ce</strong>r ainsi la rencontre des deux sociétés civiles. C’est très dur mais il<br />
faut y croire. Les échanges cul<strong>tu</strong>rels sont très encourageants. C’est très impressionnant de voir en une semaine la<br />
sortie en salle de quatre films israéliens en Fran<strong>ce</strong>.<br />
- Réflex-Sion : Comment avez vous vécu en tant qu’Israélien et ambassadeur d’Israël le parti pris<br />
radical des médias français fa<strong>ce</strong> au conflit israélo-palestinien ?<br />
- Quand <strong>je</strong> suis arrivé il y a deux ans et demi, j’étais en état de choc, <strong>je</strong> dois l’avouer. En Israël <strong>je</strong> voyais<br />
de <strong>te</strong>mps en <strong>te</strong>mps la télévision, les journaux français, mais <strong>je</strong> n’avais pas l’impression qu’on en était arrivé <strong>à</strong><br />
une si<strong>tu</strong>ation si grave dans les médias. Mon premier combat a été de lut<strong>te</strong>r contre la diabolisation. Ce n’était pas<br />
une criti<strong>que</strong> normale d’une politi<strong>que</strong> gouvernementale, c’était la diabolisation d’une société tou<strong>te</strong> entière. Mais il<br />
y a eu une amélioration qui s’expli<strong>que</strong>, en partie, par la politi<strong>que</strong> du gouvernement israélien qui a beaucoup<br />
changé. Je crois <strong>que</strong> sans l’initiative du désengagement présentée par Sharon, l’évolution n’aurait pas eu lieu.<br />
Cet<strong>te</strong> initiative est perçue en Fran<strong>ce</strong> comme très courageuse car on connaît la si<strong>tu</strong>ation du premier ministre<br />
israélien. Et <strong>je</strong> suis heureux de tomber de <strong>te</strong>mps en <strong>te</strong>mps sur un journal français où il n’y a rien <strong>à</strong> propos d’Israël<br />
!<br />
2 eme thème : Israël aujourd’hui<br />
- Réflex-Sion : Est-<strong>ce</strong> <strong>que</strong> vous per<strong>ce</strong>vez un redressement de l’économie israélienne jus<strong>te</strong>ment causé<br />
par les changements diplomati<strong>que</strong>s ?<br />
- Tout d’abord, <strong>ce</strong>s quatre années furent les années les plus sensibles qu’on a connu depuis des dé<strong>ce</strong>nnies.<br />
On a perdu 80% de notre tourisme. Puis, on a eu pendant <strong>ce</strong>s mêmes années l’explosion de la bulle des i-<strong>te</strong>ch (un<br />
monde dans le<strong>que</strong>l on était très avancé). Enfin, nous avons été obligé d’augmen<strong>te</strong>r nos budgets de sécurité et de<br />
défense dans la lut<strong>te</strong> contre le <strong>te</strong>rrorisme. Ce fut une des guerres les plus difficiles jamais menée en 57 ans<br />
d’exis<strong>te</strong>n<strong>ce</strong> par les for<strong>ce</strong>s de sécurité. Il y avait une si<strong>tu</strong>ation de décroissan<strong>ce</strong> économi<strong>que</strong> dont l’état d’Israël a<br />
pu difficilement faire fa<strong>ce</strong>. Les servi<strong>ce</strong>s sociaux ont commencé <strong>à</strong> se dégrader pour les familles monoparentales,<br />
pour les vieux, pour les enfants, et pour les couches les plus défavorisées. Le chômage a at<strong>te</strong>int <strong>à</strong> 11 %. Cet<strong>te</strong><br />
année, on a réussi <strong>à</strong> prouver <strong>que</strong> l’économie israélienne est très puissan<strong>te</strong>. Elle a la capacité de surmon<strong>te</strong>r des<br />
crises : on est passé d’une si<strong>tu</strong>ation de décroissan<strong>ce</strong> <strong>à</strong> une croissan<strong>ce</strong> de 4%. Main<strong>te</strong>nant la ré<strong>ce</strong>ssion est finie. Le<br />
chômage a baissé : on est passé en dessous des 10 %. Dans <strong>ce</strong> domaine, le peuple juif du monde entier a joué un<br />
rôle très important avec la contribution de tou<strong>te</strong>s les communautés du monde. La Fran<strong>ce</strong> a été une des aides les<br />
plus précieuses car elle ne nous a pas seulement sou<strong>te</strong>nu en envoyant de l’argent, elle a aussi sauvé le tourisme<br />
israélien. Ce fut une aide psychologi<strong>que</strong> très importan<strong>te</strong>. Etant donné le po<strong>te</strong>ntiel énorme de notre peti<strong>te</strong><br />
économie, nous avons besoin d’un niveau de croissan<strong>ce</strong> d’au <strong>moi</strong>ns 5 % pour assurer des emplois <strong>à</strong> la nouvelle<br />
génération.<br />
- Réflex-Sion : Le jour du désengagement de la bande de Gaza, l’armée israélienne est-elle sus<strong>ce</strong>ptible<br />
de désobéir ? Moshé Katsav, in<strong>te</strong>rviewé par le Jerusalem Post le 26 Avril, disait : « <strong>je</strong> ne pense pas qu’il y ait<br />
un danger de guerre civile. Mais il y a le danger des appels violents incitant <strong>à</strong> désobéir aux ordres. Je suis<br />
conscient d’une escalade ».<br />
- Ca a déj<strong>à</strong> existé, il y a déj<strong>à</strong> eu des déclarations, des appels de groupes de rabbins fanati<strong>que</strong>s aux <strong>je</strong>unes<br />
qui étaient é<strong>tu</strong>diants dans les yéshivot... Ce qui est en danger aujourd’hui en Israël, <strong>ce</strong> sont les valeurs de base<br />
comme la liberté, la démocratie, la capacité de prendre des décisions sou<strong>te</strong>nues par une majorité. L’ambian<strong>ce</strong><br />
ac<strong>tu</strong>elle me rappelle énormément les jours et les semaines qui ont précédé l’assassinat de Yitzhak Rabin : <strong>ce</strong> sont<br />
les mêmes slogans, les mêmes discours, les même incitations <strong>à</strong> la haine… Je partage tout <strong>à</strong> fait l’analyse du<br />
président Moshé Katsav : on frôle une guerre civile. Mais <strong>je</strong> ne pense pas qu’il y en aura une. La composition de<br />
la minorité opposan<strong>te</strong> est dangereuse : <strong>ce</strong> n’est pas une minorité marginale, elle représen<strong>te</strong> environ 25% de la<br />
population. D’autre part, elle est composée, au niveau politi<strong>que</strong>, d’un cocktail qui ris<strong>que</strong> d’être explosif : une<br />
majorité d’Israéliens qui vivent dans les <strong>te</strong>rritoires, l’extrême droi<strong>te</strong> qui habi<strong>te</strong> en Israël représentant 6% de la<br />
population et qui n’ac<strong>ce</strong>p<strong>te</strong> pas une solution politi<strong>que</strong>, enfin les groupes de rabbins fanati<strong>que</strong>s qui font le lien<br />
entre la <strong>religion</strong> et le servi<strong>ce</strong> militaire. Ils n’ont pas de ligne rouge et on n’est incapable de raisonner comme eux.<br />
Cela peut amener Israël non pas <strong>à</strong> une crise d’identité mais <strong>à</strong> une crise d’exis<strong>te</strong>n<strong>ce</strong>. Selon <strong>moi</strong>, c’est plus<br />
dangereux <strong>que</strong> tou<strong>te</strong>s les guerres qu’on a eues avec les Arabes car <strong>ce</strong> sont des déchirures qui s’approfondissent et<br />
on ne sait pas où ça va s’arrê<strong>te</strong>r. Quand j’ai été en Israël, j’ai senti le désarroi de la société israélienne. En effet,
la majorité israélienne res<strong>te</strong> silencieuse tandis <strong>que</strong> la minorité est très active, très virulen<strong>te</strong> et on a le sentiment<br />
des fois, <strong>que</strong> tout le pays est la minorité. Mais <strong>je</strong> crois qu’en fin de comp<strong>te</strong>, la démocratie est assez enracinée<br />
dans la société israélienne pour <strong>te</strong>nir le coup. Les opposants de la politi<strong>que</strong> du gouvernement veulent transformer<br />
l’évacuation de la bande de gaza et du nord de la Cisjordanie (8000 juifs) en un événement si traumatisant<br />
qu’Israël ne sera jamais prêt <strong>à</strong> franchir les prochaines étapes (le retrait des implantations de Cisjordanie : 200<br />
000 juifs). Il sera très difficile de mettre un <strong>je</strong>une soldat de 18 ans devant <strong>ce</strong>t<strong>te</strong> al<strong>te</strong>rnative : choisir entre les<br />
ordres de son rabbin qui l’a éduqué pendant 10 ans et les ordres de son officier ou du gouvernement.<br />
- Réflex-Sion : On parle souvent du man<strong>que</strong> de renouvellement politi<strong>que</strong> de la classe politi<strong>que</strong><br />
israélienne. Pensez-vous qu’une nouvelle génération de politiciens doit naître?<br />
- Pendant 6 ans, on a essayé de permettre <strong>à</strong> la <strong>je</strong>une génération de prendre le pouvoir. Benyamin<br />
Netanyahu et Ehud Barak ont été élus par une majorité impressionnan<strong>te</strong>. Mais on a été <strong>te</strong>llement déçu par le<br />
résultat de leur gouvernan<strong>ce</strong>, <strong>que</strong> l’on a décidé de revenir <strong>à</strong> l’ancienne génération et de comp<strong>te</strong>r un peu plus sur<br />
les « vieux » avec leur sagesse et leur expérien<strong>ce</strong>. Si on doit connaître une si<strong>tu</strong>ation de crise comme on en<br />
connaît aujourd’hui, on préfère être dans les mains de Pérez et de Sharon plutôt <strong>que</strong> dans <strong>ce</strong>lles de la <strong>je</strong>une<br />
génération qui a <strong>te</strong>llement déçu. Moi, comme Israélien, <strong>je</strong> préfère <strong>que</strong> les prochaines étapes, qui seront très<br />
difficiles, très pénibles et très douloureuses pour l’Etat d’Israël, soient appliquées par des leaders qui ont<br />
l’expérien<strong>ce</strong> et la sagesse de l’ancienne génération afin de créer une <strong>ce</strong>rtaine stabilité en Israël.<br />
3 ème thème : Le conflit israélo palestinien<br />
- Réflex-Sion : Est-<strong>ce</strong> <strong>que</strong> vous considérez <strong>que</strong> le retrait de la bande de Gaza est un premier pas vers la<br />
création d’un Etat palestinien ou plutôt, comme <strong>ce</strong>rtaines personnes mal in<strong>te</strong>ntionnées disent, un moyen de<br />
garder la main mise sur la Cisjordanie ?<br />
- Je suis parmi <strong>ce</strong>ux qui pensent <strong>que</strong> Sharon a une idée très claire de l’avenir de notre région et des<br />
frontières permanen<strong>te</strong>s de l’Etat israélien et du fu<strong>tu</strong>r Etat palestinien. Il a partagé <strong>ce</strong>t<strong>te</strong> vision avec le président<br />
Bush : dans une lettre, il s’est engagé <strong>à</strong> créer un Etat palestinien au côté d’Israël. Le président américain lui a dit<br />
<strong>que</strong> <strong>ce</strong>t Etat devra être basé sur une continuité <strong>te</strong>rritoriale. Le désengagement de la bande de Gaza et du Nord de<br />
la Cisjordanie consti<strong>tu</strong>e une première étape. Si elle réussit, <strong>ce</strong> sera l’ouver<strong>tu</strong>re d’un pro<strong>ce</strong>ssus de négociation<br />
mais si elle échoue, <strong>ce</strong> sera la première et la dernière étape pendant long<strong>te</strong>mps. L’opinion publi<strong>que</strong> a<br />
énormément changé : pendant les accords d’Oslo, 70 % de la population ne voyait pas la né<strong>ce</strong>ssité de créer un<br />
Etat palestinien. La communauté in<strong>te</strong>rnationale ne comprend pas suffisamment <strong>ce</strong>t<strong>te</strong> évolution. Je suis convaincu<br />
<strong>que</strong> notre premier ministre a une vision très claire de la si<strong>tu</strong>ation.<br />
- Réflex-Sion : Vous semble-t-il <strong>que</strong> le nouveau dirigeant palestinien, Mahmoud Abbas, ait assez de<br />
charisme et de moyens pour rendre sa lut<strong>te</strong> contre le <strong>te</strong>rrorisme effective et efficien<strong>te</strong> ?<br />
- Le plus important dans nos analyses politi<strong>que</strong>s, c’est <strong>que</strong> Mahmoud Abbas a la dé<strong>te</strong>rmination de le<br />
faire. Il a surtout reconnu depuis long<strong>te</strong>mps <strong>que</strong> le <strong>te</strong>rrorisme et la violen<strong>ce</strong> étaient contre les intérêts du peuple<br />
palestinien. C’est la grande différen<strong>ce</strong> entre lui et son prédé<strong>ce</strong>sseur qui a toujours cru le contraire et qui a<br />
manipulé les opinions publi<strong>que</strong>s. Main<strong>te</strong>nant, autour de <strong>ce</strong>t<strong>te</strong> volonté et de <strong>ce</strong>t<strong>te</strong> prise de conscien<strong>ce</strong>, il doit bâtir,<br />
il doit exer<strong>ce</strong>r son pouvoir. Jusqu’<strong>à</strong> présent l’Etat d’Israël a décidé de lui permettre d’utiliser tout l’espa<strong>ce</strong> de<br />
manœuvre né<strong>ce</strong>ssaire pour réussir. Il a choisi une politi<strong>que</strong> assez intéressan<strong>te</strong>, courageuse, d’après <strong>moi</strong>, et<br />
in<strong>te</strong>lligen<strong>te</strong> (<strong>ce</strong> n’est pas exac<strong>te</strong>ment la position de mon gouvernement) : il s’agit d’intégrer les mouvements<br />
<strong>te</strong>rroris<strong>te</strong>s dans le système politi<strong>que</strong>. Il ris<strong>que</strong> d’échouer mais il fallait essayer de le faire. Ainsi, les élections<br />
législatives palestiniennes du 17 juillet sont très importan<strong>te</strong>s. Pour la première fois, le peuple palestinien devra<br />
s’exprimer et choisir entre les 2 voies qui lui sont présentées : la voie des modérés de Mahmoud Abbas et la voie<br />
du Hamas qui œuvre contre la reconnaissan<strong>ce</strong> d’Israël. Le 17 juillet est la prochaine échéan<strong>ce</strong> la plus importan<strong>te</strong><br />
pour l’avenir de notre région.<br />
- Réflex-Sion : Lors de l’en<strong>te</strong>rrement du Pape Jean-Paul II, Moshé Katsav a serré la main du<br />
président iranien qui a ensui<strong>te</strong> ignoré <strong>ce</strong>t ac<strong>te</strong> une fois retourné au pays, construisant ainsi un double <strong>je</strong>u.<br />
Quelles sont donc les relations entre Israël et l’Iran ?<br />
- Il n’y a aucune relation entre Israël et l’Iran. Israël a une vision très claire de la mena<strong>ce</strong> <strong>que</strong> représen<strong>te</strong><br />
l’Iran s’il devient une puissan<strong>ce</strong> nucléaire. La combinaison entre le régime d’Ayatollah et l’arme nucléaire peut<br />
être <strong>te</strong>rrible. Cela expli<strong>que</strong> les positions communes qui exis<strong>te</strong>nt entre les Etats-Unis, l’Europe, et Israël <strong>à</strong> <strong>ce</strong> su<strong>je</strong>t,
même si nous ne pensons pas, contrairement <strong>à</strong> d’autres, <strong>que</strong> l’Iran renon<strong>ce</strong>ra un jour <strong>à</strong> son ambition de se do<strong>te</strong>r<br />
de l’arme nucléaire. L’Iran veut devenir une puissan<strong>ce</strong> régionale. D’après nous, le grand danger vient aussi<br />
d’autres grands pays de la région, comme la Turquie, qui pourraient suivre le même schéma. Il y aurait ainsi un<br />
<strong>ce</strong>rcle de développement nucléaire très inquiétant pour Israël et la stabilité de la région.<br />
4ème thème : être ambassadeur d’Israël en Fran<strong>ce</strong><br />
- Réflex-Sion : Il y a ac<strong>tu</strong>ellement un gouvernement d’Union national. N’offrant plus de véritable<br />
al<strong>te</strong>rnative <strong>à</strong> la politi<strong>que</strong> d’Ariel Sharon, les travaillis<strong>te</strong>s ne sont-ils pas discrédités fa<strong>ce</strong> <strong>à</strong> l’opinion<br />
publi<strong>que</strong> ?<br />
- J’étais, <strong>je</strong> suis et <strong>je</strong> serai toujours un homme de gauche, mais <strong>je</strong> ne représen<strong>te</strong> pas la gauche israélienne<br />
ni le parti travaillis<strong>te</strong>. La car<strong>te</strong> politi<strong>que</strong> israélienne a énormément bougé. Aujourd’hui, le gouvernement d’Union<br />
nationale consti<strong>tu</strong>e le courant <strong>ce</strong>ntral qui représen<strong>te</strong> 70% de la population israélienne (50% du Likoud, des<br />
libéraux du <strong>ce</strong>ntre et une partie de la gauche). La création de l’Union nationale est né<strong>ce</strong>ssaire pour l’application<br />
du plan de désengagement et s’il n’y avait pas eu d’Union, Sharon aurait été incapable de le faire. C’est pour<br />
<strong>ce</strong>la <strong>que</strong> le parti travaillis<strong>te</strong> est entré dans le gouvernement. De la même façon, Menahem Begin était minoritaire<br />
dans son propre parti. Pour signer la paix avec l’Egyp<strong>te</strong>, la gauche lui a donné des voix pour qu’il ait la majorité.<br />
J’aurais été énormément déçu si la gauche n’avait pas sou<strong>te</strong>nu le plan seulement par<strong>ce</strong> qu’il était proposé par<br />
Sharon. Un parti doit se sentir responsable de l’avenir de son pays. Lorsqu’on aura <strong>te</strong>rminé <strong>ce</strong>t<strong>te</strong> première étape,<br />
cha<strong>que</strong> parti israélien proposera ses solutions politi<strong>que</strong>s... L’Union nationale n’est pas artificielle, elle est<br />
véritable car elle sert les intérêts d’Israël. L’élément le plus important demeure la stabilité politi<strong>que</strong>. Et <strong>ce</strong>t<strong>te</strong><br />
stabilité doit reposer sur une majorité suffisan<strong>te</strong> pour pouvoir avan<strong>ce</strong>r….<br />
- Réflex-Sion : Vous ê<strong>te</strong>s un homme de gauche, n’est-<strong>ce</strong> pas difficile de représen<strong>te</strong>r un gouvernement<br />
dirigé par Ariel Sharon ?<br />
- Encore une fois, <strong>je</strong> ne représen<strong>te</strong> pas la gauche israélienne, <strong>je</strong> représen<strong>te</strong> l’Etat d’Israël. Et comme<br />
ambassadeur <strong>je</strong> représen<strong>te</strong> le courant <strong>ce</strong>ntral, dont <strong>je</strong> vous ai parlé tout <strong>à</strong> l’heure. Je n’ai eu aucun problème <strong>à</strong><br />
sou<strong>te</strong>nir mon gouvernement dans sa lut<strong>te</strong> contre le <strong>te</strong>rrorisme. Je crois <strong>que</strong> l’on a fait le né<strong>ce</strong>ssaire pour qu’il y<br />
ait le déclenchement d’un pro<strong>ce</strong>ssus de négociation. Je suis un homme de gauche, mais <strong>je</strong> n’ai jamais été un<br />
homme d’extrême gauche. C’est toujours le courant <strong>ce</strong>ntral, dans mon parti, qui a reconnu le peuple palestinien.<br />
J’ai eu un grand débat avec Shimon Pérez un jour, <strong>je</strong> lui ai dit : « <strong>tu</strong> fais une grande erreur avec Yasser Arafat, on<br />
ne peut pas arriver <strong>à</strong> un accord avec lui, <strong>ce</strong> n’est pas un homme fiable ». Quand on m’a demandé de représen<strong>te</strong>r<br />
Sharon en Fran<strong>ce</strong>, j’ai cru <strong>que</strong> j’étais capable de le faire et <strong>je</strong> l’ai fait. Si <strong>je</strong> sens un jour <strong>que</strong> <strong>je</strong> ne suis plus<br />
capable de représen<strong>te</strong>r la politi<strong>que</strong> de mon gouvernement, <strong>je</strong> retourne dans ma ferme. Ca ne me pose aucun<br />
problème : <strong>je</strong> ne suis pas né diploma<strong>te</strong>, <strong>je</strong> ne suis pas né ambassadeur d’Israël en Fran<strong>ce</strong>, <strong>je</strong> suis avant tout un<br />
très bon agricul<strong>te</strong>ur !<br />
Propos re<strong>ce</strong>uillis par Coralie Palti et Charlot<strong>te</strong> Lazimi
La kabbale dans la pensée juive<br />
La Kabbale est un courant<br />
mysti<strong>que</strong> et philosophi<strong>que</strong> juif de <strong>te</strong>ndan<strong>ce</strong><br />
ésotéri<strong>que</strong> (= peu compréhensible par le<br />
commun des mor<strong>te</strong>ls; herméti<strong>que</strong>, obscur).<br />
Ce courant se cristallisa dans la Proven<strong>ce</strong><br />
et l’Espagne du XIIIème siècle autour du<br />
Sefer-Ha-Zohar (livre de la splendeur) qui<br />
donna ensui<strong>te</strong> naissan<strong>ce</strong> <strong>à</strong> tous les<br />
mouvements mysti<strong>que</strong>s du judaïsme. Pour<br />
les kabbalis<strong>te</strong>s, les lettres de l’alphabet<br />
hébreu sont aussi les matériaux de la<br />
création du monde. La connaissan<strong>ce</strong> de<br />
leurs règles de combinaison permet donc<br />
d’accéder au monde divin.<br />
La période anti<strong>que</strong><br />
La mysti<strong>que</strong> juive apparaît au<br />
même moment <strong>que</strong> les grands courants<br />
théosophi<strong>que</strong>s et gnosti<strong>que</strong> (gnose =<br />
révélation intérieure permettant <strong>à</strong> ses<br />
adep<strong>te</strong>s d'accéder <strong>à</strong> la connaissan<strong>ce</strong> du<br />
divin) des premiers siècles après JC. On<br />
distingue deux courants : la Mysti<strong>que</strong> du<br />
Trône (IIe-IIIe siècles) qui se développa en<br />
Palestine et la Mysti<strong>que</strong> de Merkeba (IIIe-<br />
Ve siècles) dont le principal <strong>ce</strong>ntre fut<br />
Babylone. La première décrit le lieu où se<br />
manifes<strong>te</strong> la gloire divine, le monde du<br />
trône (l’organisation hiérarchi<strong>que</strong> des<br />
différen<strong>te</strong>s catégories d’anges et<br />
d’archon<strong>te</strong>s) tandis <strong>que</strong> la deuxième se<br />
penche sur la vision du char divin<br />
(merkeba). L’uni<strong>que</strong> traité théori<strong>que</strong> de<br />
<strong>ce</strong>t<strong>te</strong> période est le Sefer Yetsirah (« Livre<br />
de la création ») composé entre le II ème et<br />
le Vème. On y trouve la première<br />
formulation de la doctrine des sephirot.<br />
Les sephirot sont les dix nombres<br />
élémentaires qui consti<strong>tu</strong>ent, avec les 22<br />
lettres de l’alphabet hébraï<strong>que</strong>, les<br />
éléments premiers de la création.<br />
La période médiévale<br />
Modes<strong>te</strong> introduction <strong>à</strong> la mystérieuse Kabbale<br />
Les recherches ésotéri<strong>que</strong>s<br />
reprennent de la vigueur <strong>à</strong> partir du<br />
XIIème siècle en Europe. Les principaux<br />
<strong>ce</strong>ntres d’é<strong>tu</strong>de kabbalisti<strong>que</strong> sont en<br />
Allemagne et en Espagne. Le <strong>te</strong>x<strong>te</strong> Seferha-Bir<br />
développe une con<strong>ce</strong>ption gnosti<strong>que</strong><br />
de l’univers et introduit un élément<br />
féminin, la Présen<strong>ce</strong> ou Shehina, qui relie<br />
le monde divin et le monde <strong>te</strong>rrestre. En<br />
Allemagne, la Kabbale fut représentée par<br />
le mouvement des hassidim qui se<br />
développa au XIIe et au XIIIe siècle et dont<br />
les fonda<strong>te</strong>urs sont Samuel de Kalonymos,<br />
Judas le Hassid et Eléazar de Worms. Le<br />
<strong>te</strong>x<strong>te</strong> ma<strong>je</strong>ur de <strong>ce</strong> courant est le Sefer<br />
hassidim. Un des aspects importants de <strong>ce</strong><br />
courant est qu’il ancre les con<strong>ce</strong>pts<br />
mysti<strong>que</strong>s dans la vie quotidienne.<br />
Qu’est-<strong>ce</strong> <strong>que</strong> le Zohar ?<br />
Eliet<strong>te</strong> Abécassis, dans Le Monde<br />
des <strong>religion</strong>s de janvier-février 2005, nous<br />
introduit de façon simple et synthéti<strong>que</strong> le<br />
Zohar et Moïse de Léon, son fonda<strong>te</strong>ur.<br />
Nous sommes dans l’Espagne du<br />
XIIIème siècle. Moïse de Léon vit au Nord-<br />
Ouest de l’Espagne et travaille avec un<br />
groupe de kabbalis<strong>te</strong>s castillans : Moïse de<br />
Burgos, Isaac Hacohen de Soria, Joseph<br />
Gikatilla. C’est avec eux qu’il aurait<br />
élaboré in<strong>te</strong>llec<strong>tu</strong>ellement le Zohar ha<br />
kadosh (comme le nomme les religieux<br />
traditionalis<strong>te</strong>s), même si on s’accorde <strong>à</strong><br />
dire qu’il en est le principal rédac<strong>te</strong>ur. Il<br />
se détache alors du courant rationalis<strong>te</strong> du<br />
XIIème siècle principalement représenté<br />
par les penseurs musulmans Al-Farabi,<br />
Averroès, Avicienne et le célèbre penseur<br />
juif Maïmonide, tous con<strong>ce</strong>ntrés en<br />
Andalousie.<br />
Le Zohar est le livre fondamental<br />
de la Kabbale, la mysti<strong>que</strong> juive. Pour son<br />
au<strong>te</strong>ur, Moïse de Léon, il y a une urgen<strong>ce</strong> <strong>à</strong><br />
écrire au regard de la si<strong>tu</strong>ation précaire
des juifs en exil. Il se donne alors pour<br />
mission de révéler au plus grand nombre<br />
les secrets cachés qui étaient jus<strong>que</strong> l<strong>à</strong><br />
transmis seulement de maître <strong>à</strong> disciple.<br />
«On sent (…) l’inquié<strong>tu</strong>de profonde d’un<br />
homme convaincu de posséder la clef du<br />
sens de la Torah fa<strong>ce</strong> <strong>à</strong> une génération<br />
sédui<strong>te</strong> par la philosophie<br />
aristotélicienne » expli<strong>que</strong> Eliet<strong>te</strong><br />
Abécassis. Il s’agit ainsi de rendre la<br />
mysti<strong>que</strong> ac<strong>ce</strong>ssible <strong>à</strong> tous. L’au<strong>te</strong>ur du<br />
Zohar adop<strong>te</strong> donc une position<br />
paradoxale fa<strong>ce</strong> <strong>à</strong> la tradition ésotéri<strong>que</strong><br />
qui a toujours cherché <strong>à</strong> cacher les secrets<br />
de la mysti<strong>que</strong> juive plutôt qu’<strong>à</strong> les révéler.<br />
Moïse de Léon a menti tou<strong>te</strong> sa vie<br />
en attribuant son ouvrage <strong>à</strong> un autre rabbi<br />
du II ème siècle, Rabbi Shimon Bar Yohaï,<br />
dont il aurait retrouvé le manuscrit. Mais<br />
les universitaires s’accordent <strong>à</strong> dire qu’il y<br />
a de for<strong>te</strong>s chan<strong>ce</strong>s pour <strong>que</strong> <strong>ce</strong> soit lui qui<br />
l’ait écrit dans son intégralité.<br />
Cet ouvrage mystérieux trai<strong>te</strong> de la<br />
relation de l’homme <strong>à</strong> D.ieu <strong>à</strong> travers<br />
l’environnement, le monde. Il est composé<br />
de trois parties : le livre de la splendeur<br />
(Zohar), la Restauration de la splendeur<br />
(le Tiqqoun Zohar) et le nouveau Zohar<br />
(Zohar Hadash).<br />
La mysti<strong>que</strong> et l’arbre sefiroti<strong>que</strong><br />
L’exploration de l’alphabet hébreu<br />
consti<strong>tu</strong>e la 1 ère étape du travail de Moïse<br />
de Léon. Après la découver<strong>te</strong> de la<br />
mysti<strong>que</strong> des lettres, l’au<strong>te</strong>ur cherche<br />
l’essen<strong>ce</strong> de la tradition juive dans la<br />
pureté du courant spiri<strong>tu</strong>el. Il y a alors des<br />
relations étroi<strong>te</strong>s entre la gnosti<strong>que</strong> et les<br />
kabbalis<strong>te</strong>s qui affirment la continuité<br />
d’une tradition cachée qui aurait perdurée<br />
depuis Moïse ou même, selon <strong>ce</strong>rtaines<br />
légendes, depuis Adam conversant avec<br />
des anges.<br />
Le <strong>te</strong>x<strong>te</strong> célèbre tourne autour la<br />
description de dix sefirot : <strong>ce</strong> sont des<br />
émanations de D.ieu représentant la<br />
struc<strong>tu</strong>re du monde et la destinée humaine.<br />
Si D.ieu est trans<strong>ce</strong>ndant, innommable,<br />
impensable et irreprésentable, on peut<br />
trouver dans la vie quotidienne et<br />
matérielle un accès <strong>à</strong> son exis<strong>te</strong>n<strong>ce</strong><br />
manifes<strong>te</strong>. Les lettres et les mots hébreux<br />
contiennent une for<strong>ce</strong> spiri<strong>tu</strong>elle tandis <strong>que</strong><br />
les noms de D.ieu ont un pouvoir secret. Le<br />
sage contrôlant ainsi <strong>ce</strong>s for<strong>ce</strong>s spiri<strong>tu</strong>elles<br />
accède aux voies de la pénétration de<br />
l’émanation divine.<br />
L’arbre séfiroti<strong>que</strong> qui est exposé<br />
dans l’ouvrage de Moïse de Léon a connu<br />
plusieurs lec<strong>tu</strong>res et donc plusieurs<br />
in<strong>te</strong>rprétations différen<strong>te</strong>s. Charles Mopsik<br />
le perçoit comme un pro<strong>ce</strong>ssus<br />
d’explication et d’avènement du Divin <strong>à</strong><br />
travers la pensée alors <strong>que</strong> Armand<br />
Abécassis le décrit comme « les dix<br />
sphères de signification qui représen<strong>te</strong>nt<br />
les relations <strong>que</strong> peut entre<strong>te</strong>nir un<br />
individu avec l’absolu ». Selon <strong>ce</strong>t<strong>te</strong><br />
in<strong>te</strong>rprétation, l’arbre formé par les sefirot<br />
est la clef de compréhension de la na<strong>tu</strong>re<br />
mais également du cosmos. La première<br />
triade représen<strong>te</strong> <strong>ce</strong> qui est au-del<strong>à</strong> de la<br />
per<strong>ce</strong>ption, con<strong>ce</strong>ption et expérien<strong>ce</strong><br />
(volonté, sagesse, dis<strong>ce</strong>rnement) et la<br />
deuxième (amour-rigueur, amour-justi<strong>ce</strong>)<br />
et la troisième triades (victoire-é<strong>te</strong>rnité,<br />
gloire, ac<strong>te</strong> moral) représen<strong>te</strong>nt l’ordre de<br />
l’immanent.<br />
Sui<strong>te</strong> au prochain numéro…<br />
Coralie Palti
appartiens... »<br />
L'Homme est ainsi fait qu'il est doté<br />
d'une âme mais aussi d'un corps dont les<br />
besoins doivent donc être assouvis par des<br />
nourri<strong>tu</strong>res spiri<strong>tu</strong>elles et <strong>te</strong>rrestres. Il est<br />
intéressant de remar<strong>que</strong>r <strong>que</strong> les <strong>religion</strong>s<br />
les articulent de manière étroi<strong>te</strong>. Elles<br />
instrumentalisent les aliments <strong>à</strong> travers des<br />
prati<strong>que</strong>s alimentaires intégrées dans les<br />
pré<strong>ce</strong>p<strong>te</strong>s religieux, qui deviennent des<br />
mar<strong>que</strong>urs identitaires. Ces prati<strong>que</strong>s<br />
favorisent des logi<strong>que</strong>s de groupe et de<br />
partage qui donnent une dimension<br />
collective <strong>à</strong> un besoin vital initialement<br />
individuel. Ces codes prennent tout leur<br />
sens dans la différenciation qu'ils<br />
établissent entre le sacré et le profane<br />
(selon la distinction utilisée par Emile<br />
Durkheim). Ainsi, l'ensemble des in<strong>te</strong>rdits<br />
alimentaires sont qualifiés de "négatifs"<br />
quand ils préservent le monde sacré du<br />
contact du monde profane. Les sacrifi<strong>ce</strong>s<br />
sont quant <strong>à</strong> eux présentés comme des ri<strong>te</strong>s<br />
"positifs" puis<strong>que</strong> le croyant communie par<br />
<strong>ce</strong>t<strong>te</strong> voix avec son dieu.<br />
Tou<strong>te</strong>s les <strong>religion</strong>s présen<strong>te</strong>nt <strong>ce</strong><br />
rapport particulier <strong>à</strong> la nourri<strong>tu</strong>re, le<br />
judaïsme bien sûr avec la cacherout mais<br />
aussi les <strong>religion</strong>s asiati<strong>que</strong>s comme<br />
l'hindouisme et le jaïnisme. En effet, leur<br />
rapport <strong>à</strong> la nourri<strong>tu</strong>re est marqué par<br />
l'obsession de la pureté et le respect du<br />
principe de non-violen<strong>ce</strong>. Dans l'une<br />
comme dans l'autre, les espè<strong>ce</strong>s vivan<strong>te</strong>s<br />
sont classées afin de dé<strong>te</strong>rminer leur degré<br />
de pureté. Pour l'hindouisme, la vache -<br />
ancien animal sacrificiel du védisme- est<br />
un animal sacré qui ne doit donc pas, <strong>à</strong> <strong>ce</strong><br />
titre être abat<strong>tu</strong>e ou consommée. C'est<br />
l'une des différen<strong>ce</strong>s avec le judaïsme qui<br />
in<strong>te</strong>rdit la consommation des aliments<br />
considérés comme impurs. Pour le<br />
jaïnisme, les êtres vivants sont purs ou<br />
impurs selon le nombre de sens qu'ils<br />
partagent avec l'homme. Plus ils diffèrent<br />
« <strong>Dis</strong>-<strong>moi</strong> <strong>ce</strong> <strong>que</strong> <strong>tu</strong> <strong>manges</strong>, <strong>je</strong> <strong>te</strong> <strong>dirai</strong> <strong>à</strong> <strong>que</strong>lle <strong>religion</strong> <strong>tu</strong><br />
de <strong>ce</strong> dernier, plus ils sont propres <strong>à</strong> la<br />
consommation.<br />
Le système des cas<strong>te</strong>s (déj<strong>à</strong> présent<br />
dans les <strong>te</strong>x<strong>te</strong>s sacrés anciens sous une<br />
autre forme) ac<strong>ce</strong>n<strong>tu</strong>e l'exigen<strong>ce</strong> de pureté<br />
: le partage des repas n'est possible qu'au<br />
sein d'une même cas<strong>te</strong>, d'autre part, la<br />
nourri<strong>tu</strong>re provenant de cas<strong>te</strong>s inférieures<br />
est perçue comme souillée. La fabrication<br />
des aliments étant souvent le résultat de<br />
plusieurs cas<strong>te</strong>s, <strong>ce</strong>s derniers sont<br />
consommés cuits par les hau<strong>te</strong>s cas<strong>te</strong>s qui<br />
leur rendent ainsi leur pureté. Un jaïn est<br />
pur et peut espérer le salut s'il respec<strong>te</strong> le<br />
vœu de non-violen<strong>ce</strong> et préserve tou<strong>te</strong><br />
forme de vie. La volonté de ne pas nuire<br />
s'é<strong>te</strong>nd <strong>à</strong> la quasi totalité des faits et ges<strong>te</strong>s<br />
quotidiens. Pour la nourri<strong>tu</strong>re, <strong>ce</strong>rtaines<br />
plan<strong>te</strong>s ne peuvent être consommées dans<br />
la mesure où, croissant dans la <strong>te</strong>rre, les<br />
bulbes, <strong>tu</strong>bercules et racines foisonnent de<br />
vies, les consommer occasionnerait alors<br />
la destruction d'êtres vivants. De même, on<br />
ne peut manger d'un fruit imparfai<strong>te</strong>ment<br />
mûr arraché d'un arbre car on y détruit la<br />
vie qui y siège et de l'autre, on ne peut<br />
consommer un fruit avarié car la<br />
pourri<strong>tu</strong>re y laisse proliférer des<br />
organismes vivants. Un délai de<br />
consommation est donc fixé. L'eau est<br />
filtrée, la vaisselle purifiée. L'in<strong>te</strong>rdiction<br />
des repas noc<strong>tu</strong>rnes découle aussi du souci<br />
de ne pas détruire des êtres vivants attirés<br />
par la lumière.<br />
Ainsi, cha<strong>que</strong> <strong>religion</strong> appréhende <strong>à</strong><br />
sa manière la nourri<strong>tu</strong>re selon les valeurs<br />
qu'elle souhai<strong>te</strong> promouvoir. Soumis <strong>à</strong> des<br />
ri<strong>te</strong>s de préparation, de purification, la<br />
nourri<strong>tu</strong>re <strong>te</strong>rrestre se rapproche du divin<br />
et participe alors <strong>à</strong> l'essen<strong>ce</strong> même de la<br />
<strong>religion</strong>.<br />
M.L.
A bas les in<strong>te</strong>llec<strong>tu</strong>els ?<br />
En compagnie de Franz Olivier Giesbert et ses chroni<strong>que</strong>urs, assis<strong>te</strong>z <strong>à</strong> 90 minu<strong>te</strong>s de polémi<strong>que</strong>s et de débats, d'échanges et de<br />
contradictions, de provocation et d'humour !<br />
Cet<strong>te</strong> in<strong>te</strong>rrogation semble couler de<br />
sour<strong>ce</strong> après la diffusion de l’émission « Cul<strong>tu</strong>re et<br />
Dépendan<strong>ce</strong>s » le 4 mai dernier, où manifes<strong>te</strong>ment<br />
le présenta<strong>te</strong>ur confondait in<strong>te</strong>llec<strong>tu</strong>els et sophis<strong>te</strong>s.<br />
Le thème de l’émission était : « y a t il un racisme<br />
anti- blanc ? ». J’étais scandalisée de voir <strong>que</strong> des<br />
personnalités aussi controversées puissent être<br />
invitées et écoutées au même titre qu’un véritable<br />
philosophe. Au del<strong>à</strong> de <strong>ce</strong>s multiples contradictions,<br />
Tariq Ramadan y était érigé en penseur digne de <strong>ce</strong><br />
nom, en homme de principe tout comme<br />
Finkielkraut.<br />
Ce dernier assistait <strong>à</strong> sa diabolisation voir<br />
<strong>à</strong> sa condamnation notamment par le présenta<strong>te</strong>ur<br />
Franz Olivier Giesbert. Ce brillant journalis<strong>te</strong>,<br />
au<strong>te</strong>ur de multiples ouvrages et ayant travaillé au<br />
Nouvel Observa<strong>te</strong>ur, au Figaro et au Point<br />
m’étonna par sa complaisan<strong>ce</strong> envers Ramadan.<br />
Celui-ci se félicitait de l’avoir invité contrairement<br />
<strong>à</strong> d’autres journalis<strong>te</strong>s. (Je lui conseille vivement la<br />
lec<strong>tu</strong>re du livre de Caroline Fourest sur <strong>ce</strong><br />
personnage dangereux).<br />
L’émission avait fait en sor<strong>te</strong> <strong>que</strong> les deux<br />
invités, Finkielkraut et Ramadan, soient les deux<br />
figures principales en opposition, comme si la<br />
pensée de Tariq<br />
Ramadan était valable, ac<strong>ce</strong>ptable. Il était<br />
mis sur un pied d’égalité avec Finkielkraut. On<br />
retrouvait parmi ses acoly<strong>te</strong>s, Calix<strong>te</strong> Beyala,<br />
au<strong>te</strong>ur de la Plantation. Celle-ci sou<strong>te</strong>nait<br />
notamment qu’il existait une différen<strong>ce</strong> de na<strong>tu</strong>re<br />
entre la trai<strong>te</strong> négrière et l’esclavage<br />
in<strong>te</strong>rcontinental africain et l’esclavage organisé<br />
par les Arabes. Les victimes furent de plus de 31<br />
millions contre 14 pour la trai<strong>te</strong> négrière. Les deux<br />
n’étaient pas <strong>à</strong> mettre sur le même plan moral<br />
assurait- elle.<br />
Il est dangereux d’invi<strong>te</strong>r des personnalités si<br />
controversées. En les laissant s’exprimer sur des<br />
su<strong>je</strong>ts si sensibles, ils se présen<strong>te</strong>nt comme les<br />
por<strong>te</strong>- paroles d’une cause qu’ils déforment. Mais<br />
surtout aucune contrepartie n’est apportée sur <strong>ce</strong><br />
qui est dit. Entre Ramadan et Finkielkraut, l’un<br />
était l<strong>à</strong> pour plaire, séduire, enrôler et tromper les<br />
âmes bien pensan<strong>te</strong>s ; l’autre était l<strong>à</strong> pour aler<strong>te</strong>r,<br />
dénon<strong>ce</strong>r, prévenir. Le<strong>que</strong>l eût le plus de succès ?<br />
La réponse ne fait pas de dou<strong>te</strong>. C’est peut être le<br />
grand problème de la Fran<strong>ce</strong> aujourd’hui : le<br />
mépris des in<strong>te</strong>llec<strong>tu</strong>els. Ils sont l<strong>à</strong> pour nous aider<br />
<strong>à</strong> nous prémunir des dangers présents et fu<strong>tu</strong>rs.<br />
Pourtant, ils sont re<strong>je</strong>tés car leurs discours sont<br />
loin d’être <strong>ce</strong> <strong>que</strong> nous aimerions en<strong>te</strong>ndre. La<br />
prise de conscien<strong>ce</strong> en est d’autant plus brutale.<br />
Les récriminations <strong>à</strong> leurs égards sont nombreuses.<br />
Ces in<strong>te</strong>llec<strong>tu</strong>els sont soit trop médiati<strong>que</strong>s, trop<br />
mondains (confère le dossier du Point était<br />
consacré <strong>à</strong> BHL du <strong>moi</strong>s d’avril), soit trop présents<br />
par le nombre ou la qualité de leurs œuvres<br />
(reproche principale fait <strong>à</strong> Finkielkraut lors de<br />
l’émission).<br />
Tou<strong>te</strong>s les raisons sont bonnes pour<br />
ignorer les in<strong>te</strong>llec<strong>tu</strong>els. Le danger serait, en effet,<br />
qu’on les rempla<strong>ce</strong> par des Tariq Ramadan pour le<br />
plaisir de l’audimat. Mon avis s’est nuancé sui<strong>te</strong> <strong>à</strong><br />
la diffusion de l’émission « Cul<strong>tu</strong>re et<br />
dépendan<strong>ce</strong>s » du 18 mai sur le thème : « Les<br />
<strong>religion</strong>s, ennemies des femmes ? ». Fadela Amara<br />
et Malika Mokeddem répondaient <strong>à</strong> Abdellali<br />
Baghezza. Celui-ci, <strong>à</strong> l’instar de Ramadan se<br />
voulait modéré mais il <strong>te</strong>nait un discours des plus<br />
extrémis<strong>te</strong>s .Il s’attaquait sans <strong>ce</strong>sse avec Mélanie<br />
Mar<strong>te</strong>aux aux deux femmes. Celles-ci se sont<br />
illustrées par la for<strong>ce</strong> et la pertinen<strong>ce</strong> de leurs<br />
arguments. Franz Olivier Giesbert fut beaucoup<br />
<strong>moi</strong>ns complaisant avec Mélanie Mar<strong>te</strong>au et<br />
Abdellali Baghezza dont il dénonçait la virulen<strong>ce</strong><br />
injusifiée envers Fadela Amara . Je regret<strong>te</strong><br />
simplement qu’il n’y ait pas eu de Fadela Amara ou<br />
de Malika Mokeddem pour répondre <strong>à</strong> Ramadan<br />
lors de l’émission précéden<strong>te</strong>.<br />
Charlot<strong>te</strong> Lazimi
Histoire de chiens- La dhimmi<strong>tu</strong>de dans le conflit israélo-palestinien<br />
Ouvrage de Nathan Weinstock - Ed. Mille et Une Nuits<br />
Le hasard d'une recherche m'a emmené sur un<br />
forum où il était <strong>que</strong>stion d'ac<strong>tu</strong>alité, et <strong>je</strong> suis<br />
tombé sur un message assez "révéla<strong>te</strong>ur" dont la<br />
<strong>te</strong>neur était <strong>à</strong> peu près la suivan<strong>te</strong>, le style<br />
carica<strong>tu</strong>ral en <strong>moi</strong>ns :<br />
"Je suis un <strong>je</strong>une communis<strong>te</strong> catholi<strong>que</strong>.<br />
Aujourd'hui, <strong>je</strong> viens de découvrir <strong>que</strong> les Juifs<br />
n'étaient pas les monstres sanguinaires <strong>que</strong><br />
j'imaginais, la preuve, il y a même des Juifs contre<br />
le sionisme, et <strong>je</strong> tiens <strong>à</strong> vous le faire savoir."<br />
S'ensuivait une in<strong>te</strong>rprétation de la Bible visant<br />
<strong>à</strong> démontrer qu'en définitive, le judaïsme était, par<br />
na<strong>tu</strong>re, contraire au sionisme. Bref, après des<br />
années de propagande ravageuse du bloc<br />
soviéti<strong>que</strong>, de ses alliés arabes et de ses<br />
sympathisants (qui culmine en 1975 avec l'adoption<br />
par l'ONU de la résolution tris<strong>te</strong>ment célèbre<br />
assimilant, par 72 voix contre 35 et 32 abs<strong>te</strong>ntions,<br />
le sionisme au racisme), <strong>ce</strong>rtaines visions sont<br />
profondément déformées. Finalement, bien peu de<br />
personnes connaissent avec précision l'histoire du<br />
conflit israélo-palestinien, ou israélo-arabe de<br />
manière plus générale, mais aujourd'hui tout le<br />
monde en parle. D’ailleurs, dans l'émission qui<br />
por<strong>te</strong> le même nom, samedi soir tard sur Fran<strong>ce</strong> 2,<br />
j'ai ré<strong>ce</strong>mment vu Leïla Shahid, la déléguée<br />
générale de l'Autorité Palestinienne en Fran<strong>ce</strong>*,<br />
van<strong>te</strong>r les méri<strong>te</strong>s de son livre ou plutôt du livre<br />
qu'elle a écrit pour sa mère, et qui rela<strong>te</strong> la dou<strong>ce</strong><br />
en<strong>te</strong>n<strong>te</strong> régnant entre les différen<strong>te</strong>s communautés<br />
dans la Jérusalem de la fin du XIX e et du début du<br />
XX e siècle, loin de l'antisémitisme** de l'Europe<br />
(sic). Sur le pla<strong>te</strong>au, personne pour lui rappeler,<br />
par exemple, les slogans hurlés par des émeutiers<br />
armés de bâtons et de cou<strong>te</strong>aux, <strong>à</strong> Jérusalem, le 2<br />
Novembre 1921, jour anniversaire de la<br />
Déclaration Balfour, lors d'une manifestation<br />
sanglan<strong>te</strong> dirigée contre la population juive : "La<br />
Palestine est <strong>à</strong> nous, les Juifs sont nos chiens" ("al-<br />
Yahoud klabna" pour rafraîchir la mé<strong>moi</strong>re de<br />
mesdames Shahid). Personne non plus pour<br />
rappeler les émeu<strong>te</strong>s anti-juives ayant ensanglanté<br />
le quotidien des Juifs de Palestine en 1909, 1910 et<br />
1929 lors du massacre des Juifs de Hébron, dont la<br />
présen<strong>ce</strong> était deux fois millénaire, et <strong>que</strong> l'on<br />
nomme aujourd'hui "colons" (sic).<br />
A mesdames Shahid, <strong>à</strong> messieurs Timsit, Youn<br />
et Ardisson, et bien sûr <strong>à</strong> tous <strong>ce</strong>ux qui refusent de<br />
se con<strong>te</strong>n<strong>te</strong>r des reportages du journal télévisé de<br />
20h (entre la Nouvelle Star et les pitreries de<br />
Lagaffe sur la grille des programmes), <strong>je</strong> propose<br />
d'enlever un peu de malheur au monde en nommant<br />
bien les choses, et <strong>je</strong> recommande chaudement la<br />
lec<strong>tu</strong>re de <strong>ce</strong>t ex<strong>ce</strong>llent livre de Nathan Weinstock,<br />
Histoire de chiens, qui présen<strong>te</strong> un aspect du conflit<br />
parfois occulté, jamais clairement défini, et qui<br />
con<strong>ce</strong>rne les représentations du Juif dans le monde<br />
arabe et chez les palestiniens en particulier. Avant<br />
de vous en dire un peu plus, <strong>je</strong> vous propose de<br />
vous faire découvrir son au<strong>te</strong>ur.<br />
Autrefois trotskis<strong>te</strong> (personne n'est parfait...), et<br />
alibi Juif de la gauche antisionis<strong>te</strong>, Nathan<br />
Weinstock avoue avoir du mal <strong>à</strong> relire <strong>ce</strong>rtains des<br />
passages qu'il a pourtant lui-même publiés il y a<br />
une trentaine d'années, et reconnaît qu'ils étaient<br />
plus le produit d'un esprit déformé par une<br />
idéologie peu recommandable <strong>que</strong> par un<br />
<strong>que</strong>lcon<strong>que</strong> sens criti<strong>que</strong>. Son propos dans le livre<br />
dont il est <strong>que</strong>stion ici, est de briser les schémas<br />
préconçus communément admis, con<strong>ce</strong>rnant entre<br />
autres l'ob<strong>te</strong>ntion de <strong>te</strong>rres et leur exploitation par<br />
les Juifs, les premiers affron<strong>te</strong>ments entre Juifs et<br />
Arabes, l'émergen<strong>ce</strong> du nationalisme arabe<br />
palestinien et sa na<strong>tu</strong>re. Pour <strong>ce</strong> faire, il retra<strong>ce</strong> les<br />
grands évènements et leurs consé<strong>que</strong>n<strong>ce</strong>s, de la<br />
Déclaration Balfour jusqu'<strong>à</strong> nos jours.<br />
Je m'arrê<strong>te</strong> l<strong>à</strong>, et vous laisse découvrir les 200<br />
pages de <strong>ce</strong> livre <strong>à</strong> posséder absolument.<br />
J. B.<br />
* : no<strong>te</strong> pour les journalis<strong>te</strong>s : Leïla Shahid est en<br />
tou<strong>te</strong> rigueur la représentan<strong>te</strong> de l'Autorité<br />
Palestinienne en Fran<strong>ce</strong>, voire de l'OLP, mais en<br />
aucun cas de la "Palestine".<br />
** : cf. La Nouvelle Judéophobie ou Prêcheurs de<br />
Haine - Traversée de la judéophobie planétaire<br />
(sur les<strong>que</strong>ls <strong>je</strong> reviendrai peut-être dans un<br />
prochain numéro de notre rubri<strong>que</strong>...) de Pierre-<br />
André Taguieff pour une meilleure compréhension<br />
de <strong>ce</strong> <strong>te</strong>rme au<strong>que</strong>l il préfère judéophobie, <strong>te</strong>rme <strong>à</strong><br />
comprendre comme une peur-re<strong>je</strong>t-haine du Juif,<br />
mais <strong>ce</strong>la dépasse le cadre de notre é<strong>tu</strong>de.
Tris<strong>te</strong> bilan du XX eme siècle, le génocide cambodgien<br />
Section 1.01 Les photos de<br />
prisonniers tor<strong>tu</strong>rés au S-21<br />
Photos de l’exposition sur le génocide Cambodgien<br />
<strong>à</strong> Lyon au musée de la résistan<strong>ce</strong> et de la<br />
déportation jusqu’au 28 août 2005<br />
« Plus jamais ça ! »<br />
Ce cri de hon<strong>te</strong>, d’indignation fa<strong>ce</strong><br />
<strong>à</strong> l’horreur, <strong>à</strong> l’indicible est aujourd’hui<br />
devenu une simple rengaine. A l’aube du<br />
XXI eme siècle le monde a-t-il tiré les leçons<br />
du passé ? En <strong>moi</strong>ns d’un an, quatre<br />
commémorations de génocides ont été<br />
célébrées. Quatre sordides anniversaires :<br />
le 7 avril 2004 le génocide des <strong>tu</strong>tsis, le 17<br />
janvier 2005 le début de la libération des<br />
camps, le 24 avril 2005 le génocide<br />
arménien, le 17 avril 2005 le génocide<br />
cambodgien qui té<strong>moi</strong>gnent de la banalité<br />
du mal.<br />
Malgré plus de 10 millions de<br />
victimes, la mise en pla<strong>ce</strong> d’une Cour<br />
pénale in<strong>te</strong>rnationale, la convention des<br />
Nations Unies de 1948 (qui définit
clairement un génocide et punit les<br />
coupables de <strong>ce</strong> crime), rien n’a changé.<br />
Les coupables ont pour la<br />
plupart échappé <strong>à</strong> tou<strong>te</strong> sanction.<br />
Au Cambodge, la prise du pouvoir<br />
par Pol Pot, « le frère numéro un » le 17<br />
avril 1975 annon<strong>ce</strong> l’ex<strong>te</strong>rmination de 1,7<br />
millions de personnes. Dès son arrivée, il<br />
en<strong>te</strong>nd mettre en pla<strong>ce</strong> <strong>à</strong> l’image de la<br />
Chine de Mao un nouvel Etat communis<strong>te</strong>.<br />
Les villes sont vidées de leurs habitants<br />
menacés soit disant de bombardements<br />
américains. Le peuple est divisé en deux<br />
catégories de populations :<br />
• le peuple ancien composé des<br />
Khmers Rouges et de la population<br />
rurale<br />
• le peuple nouveau souillé,<br />
contaminé par l’impérialisme et le<br />
monde extérieur. Celui ci doit en<br />
permanen<strong>ce</strong> expier <strong>ce</strong>s péchés.<br />
Près de 8 millions de personnes<br />
sont <strong>je</strong>tées sur les rou<strong>te</strong>s.<br />
Dès lors durant quatre ans,<br />
commen<strong>ce</strong> une len<strong>te</strong> ex<strong>te</strong>rmination<br />
organisée par l’Angkar , organisation des<br />
Khmers rouges dont les cibles sont le<br />
peuple nouveau particulièrement<br />
les « por<strong>te</strong>urs de lunet<strong>te</strong>s », c’est dire les<br />
in<strong>te</strong>llec<strong>tu</strong>els ainsi <strong>que</strong> les minorités<br />
ethni<strong>que</strong>s .Morts de faim,de<br />
soif,d’épuisement ou abat<strong>tu</strong>s le bilan ne<br />
<strong>ce</strong>sse de s’alourdir jusqu’en 1979. Pol Pot<br />
de son véritable nom Saloth Sar a fait <strong>ce</strong>s<br />
é<strong>tu</strong>des en Fran<strong>ce</strong> de 1949 jusqu’en 1953.<br />
Après sa chu<strong>te</strong>, il anima la résistan<strong>ce</strong> et ne<br />
quitta officiellement l’Etat qu’en 1985.Il ne<br />
fut jamais véritablement jugé et mourut<br />
dans son lit le 15 avril 1998.<br />
L’invasion par le Vietnam du<br />
Cambodge ne fut pas la victoire des<br />
victimes sur leurs bourreaux ou l’annon<strong>ce</strong><br />
de la justi<strong>ce</strong>. Ceci mar<strong>que</strong> l’arrêt du<br />
génocide et le début d’une nouvelle<br />
dicta<strong>tu</strong>re. Le film S21, machine de mort<br />
camps dans le<strong>que</strong>l 17 000 personnes furent<br />
<strong>tu</strong>ées et tor<strong>tu</strong>rées et qui ne comp<strong>te</strong>nt <strong>que</strong><br />
trois survivants illustre l’horreur. Il<br />
té<strong>moi</strong>gne pour les millions de disparus.<br />
Le Cambodge malgré les accords signés,<br />
les promesses fai<strong>te</strong>s <strong>à</strong> la communauté<br />
in<strong>te</strong>rnationale refuse de mettre en pla<strong>ce</strong> un<br />
procès équitable. Aujourd’hui encore<br />
d’anciens Khmers rouges occupent des<br />
pos<strong>te</strong>s au sommet de l’Etat. Pour des<br />
raisons juridi<strong>que</strong>s de nombreuses actions<br />
en justi<strong>ce</strong> semblent impossibles <strong>à</strong> mettre en<br />
œuvre notamment en raison de la si<strong>tu</strong>ation<br />
géopoliti<strong>que</strong>. La Chine membre du Conseil<br />
de sécurité de l’ONU soutient<br />
implici<strong>te</strong>ment le gouvernement<br />
Cambodgien. Reconnaître ses tords<br />
impli<strong>que</strong>rait né<strong>ce</strong>ssairement sa<br />
responsabilité dans le génocide puis<strong>que</strong> la<br />
Chine a activement sou<strong>te</strong>nu les Khmers<br />
rouges lorsqu’ils étaient au pouvoir.<br />
La commémoration du 17 avril<br />
2005 a réuni prés d’un millier de<br />
personnes <strong>à</strong> Paris en l’honneur des<br />
victimes. Composée principalement de<br />
<strong>je</strong>unes, la foule a marché silencieusement.<br />
Les anciens se sont recueillis le matin<br />
même <strong>à</strong> la Pagode ou ils étaient beaucoup<br />
plus nombreux. L’en<strong>je</strong>u est <strong>que</strong> justi<strong>ce</strong> soit<br />
fai<strong>te</strong>. Commen<strong>ce</strong>r par adop<strong>te</strong>r la<br />
proposition de loi n°318 déposée au sénat<br />
le 10 mai 2001 qui reconnaît en Fran<strong>ce</strong> le<br />
génocide Cambodgien et appeler <strong>à</strong> une<br />
diplomatie plus présen<strong>te</strong> et plus effica<strong>ce</strong><br />
serait déj<strong>à</strong> un pas dans la bonne direction.<br />
C’est pour <strong>ce</strong>t<strong>te</strong> raison qu’il faut<br />
sou<strong>te</strong>nir notre effort de mé<strong>moi</strong>re pour<br />
qu’aucune nouvelle commémoration ne<br />
vienne s’ajou<strong>te</strong>r <strong>à</strong> la longue lis<strong>te</strong><br />
précéden<strong>te</strong>. Il est peut être un peu<br />
tard .Cet<strong>te</strong> colère légitime est vaine.<br />
Cependant le jour où plus personne ne<br />
s’indignera les victimes seront<br />
définitivement vaincues.<br />
Charlot<strong>te</strong> Lazimi
« Rencontres Montaigne » du 19 Avril / Claude Lanzmann<br />
Présentation<br />
Claude Lanzmann, écrivain et<br />
cinéas<strong>te</strong>, a travaillé 12 ans sur le film<br />
Shoah. Il aurait voulu ne pas donner de<br />
nom <strong>à</strong> son œuvre. Mais il a fini par en<br />
donner un et Shoah, le nom du film, est<br />
devenu le nom de l’événement. L’au<strong>te</strong>ur<br />
souhai<strong>te</strong> <strong>que</strong> le mot susci<strong>te</strong> <strong>à</strong> cha<strong>que</strong> fois<br />
une in<strong>te</strong>rprétation différen<strong>te</strong> selon le<br />
regard de chacun. Il s’agit d’une œuvre<br />
qui veut transmettre l’innommable. Les<br />
défis rencontrés par le cinéas<strong>te</strong> ont été<br />
multiples : la défiguration des lieux mais<br />
aussi la destruction des tra<strong>ce</strong>s qui rendent<br />
le té<strong>moi</strong>gnage encore plus difficile.<br />
Mé<strong>moi</strong>re et douleurs sont enfouies au plus<br />
profond de l’être.<br />
Shoah est main<strong>te</strong>nant une œuvre <strong>à</strong><br />
renommée in<strong>te</strong>rnationale. Le film exis<strong>te</strong> en<br />
DVD en six sé<strong>que</strong>n<strong>ce</strong>s. Pour Claude<br />
Lanzmann, la sé<strong>que</strong>n<strong>ce</strong> la plus importan<strong>te</strong><br />
est la 35ème minu<strong>te</strong> sur les chambres <strong>à</strong><br />
gaz. Selon l’au<strong>te</strong>ur, les survivants sont des<br />
« revenants » ; ils disent « nous » et non<br />
« <strong>je</strong> ». Ils sont faciles <strong>à</strong> trouver mais durs <strong>à</strong><br />
faire parler. Les nazis qui parlent dans<br />
Shoah sont un miracle car ils ne parlaient<br />
jamais.<br />
Une délica<strong>te</strong> entreprise<br />
Claude Lanzmann avait un refus<br />
profond d’aller en Pologne : il a travaillé<br />
plus de cinq ans avant de s’y résoudre,<br />
l’hiver 1978. C’était le premier homme <strong>à</strong><br />
retourner sur les lieux du crime. Le<br />
« chan<strong>te</strong>ur de Relmo » consti<strong>tu</strong>e son<br />
premier té<strong>moi</strong>gnage sur pla<strong>ce</strong>. Lanzmann<br />
avait mis le rescapé fa<strong>ce</strong> <strong>à</strong> un plan du<br />
camp dessiné. Progressivement, le rescapé<br />
racon<strong>te</strong> qu’il chantait <strong>à</strong> coté de la rivière.<br />
Lanzmann lui a dit de chan<strong>te</strong>r, il a su alors<br />
<strong>que</strong> ça serait le début de son film.<br />
Un autre té<strong>moi</strong>gnage marquant fut<br />
le premier nazi <strong>que</strong> le cinéas<strong>te</strong> a fait<br />
parler. Lanzmann avait vu le nom du nazi<br />
sur les ac<strong>te</strong>s des procès et dans un livre :<br />
gradé SS, il avait participé <strong>à</strong> un<br />
programme d’euthanasie dans des<br />
châ<strong>te</strong>aux allemands. D’abord il a refusé de<br />
té<strong>moi</strong>gner, puis, après plusieurs <strong>moi</strong>s, il a<br />
craqué vers quatre heures du matin. C.<br />
Lanzmann consti<strong>tu</strong>e en hâ<strong>te</strong> une équipe. En<br />
échange, il lui avait promis de l’argent,<br />
beaucoup d’argent. Le rendez vous secret<br />
a lieu dans un hô<strong>te</strong>l, en Autriche, dans la<br />
ville natale d’Hitler. Lanzmann était venu<br />
trois jours avant pour préparer la chambre<br />
en collant un plan de Treblinka sur le mur<br />
et en s’équipant d’une canne <strong>à</strong> pêche et<br />
d’une baguet<strong>te</strong> pour désigner les endroits.<br />
Lors<strong>que</strong> le nazi est arrivé, en voyant la<br />
car<strong>te</strong>, il a failli repartir… mais l’au<strong>te</strong>ur de<br />
Shoah lui a rapidement <strong>te</strong>ndu la baguet<strong>te</strong><br />
en lui disant « instruisez-<strong>moi</strong> ». Il utilisa<br />
alors sa <strong>te</strong>chni<strong>que</strong> habi<strong>tu</strong>elle : poser une<br />
pléthore de <strong>que</strong>stions <strong>te</strong>chni<strong>que</strong>s de<br />
géographe, d’arpen<strong>te</strong>ur, de géomètre.<br />
Le nazi pris peu <strong>à</strong> peu confian<strong>ce</strong>. Il<br />
a eu une pause dé<strong>je</strong>uner. Lanzmann réussit<br />
<strong>à</strong> lui faire chan<strong>te</strong>r la chanson de Tréblinka<br />
puis <strong>à</strong> la fin, il l’a payé. Cet homme est<br />
mort quatre ans avant la fin du film.<br />
Un travail éprouvant<br />
Les 12 années de travail furent<br />
difficiles et éprouvan<strong>te</strong>s, « j’ai pensé <strong>à</strong><br />
plusieurs reprises d’arrê<strong>te</strong>r » avoue<br />
Claude Lanzmann. Cet<strong>te</strong> conféren<strong>ce</strong> m’a<br />
semblé d’autant plus importan<strong>te</strong> <strong>à</strong><br />
en<strong>te</strong>ndre et <strong>à</strong> transmettre <strong>que</strong> l’au<strong>te</strong>ur est<br />
apparu fatigué, vieilli, cherchant <strong>à</strong><br />
canaliser ses pensées…<br />
Coralie Palti d’après les no<strong>te</strong>s prises par<br />
Ludwine L. M.
Le strudel aux pommes<br />
Ingrédients :<br />
Pâ<strong>te</strong> :<br />
250g de farine<br />
3 oeufs<br />
80g de beurre<br />
Garni<strong>tu</strong>re :<br />
500g de pommes<br />
50g de raisins secs<br />
80g d'amandes hachées<br />
150g de sucre<br />
1 Cs de cannelle en poudre<br />
Re<strong>ce</strong>t<strong>te</strong> :<br />
Dans une jat<strong>te</strong>, travaillez la farine,<br />
le beurre, 2 oeufs et un verre d'eau<br />
tiède.<br />
Fouet<strong>te</strong>z le mélange avec une<br />
fourchet<strong>te</strong> afin de former une pâ<strong>te</strong>.<br />
Couvrez-la d'une serviet<strong>te</strong> et<br />
laissez-la reposer 1/2 heures.<br />
Déposez de la farine sur un<br />
torchon, étalez la pâ<strong>te</strong> dessus <strong>à</strong><br />
l'aide d'un rouleau pâtisserie puis<br />
étirez-la comme une feuille de<br />
papier.<br />
<strong>Dis</strong>posez sur la pâ<strong>te</strong> les pommes<br />
épluchées et coupées en fines<br />
lamelles, les raisins et les amandes,<br />
saupoudrez de sucre parfumé de<br />
cannelle.<br />
Roulez la pâ<strong>te</strong> bien serrée, retirez<br />
le torchon, dorez le dessus d'un<br />
jaune d'oeuf puis passez au four <strong>à</strong><br />
feu modéré 180°C (th.7) pendant<br />
45 minu<strong>te</strong>s.<br />
Conseils :<br />
Vous pouvez décorer l'aplestrudel<br />
avec de la chantilly. Boisson<br />
conseillé : café viennois, chocolat<br />
viennois