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54<br />
namurce que les lieux disent<br />
Hastedon<br />
Les Aduatiques, Jules<br />
César et Napoléon III …<br />
Quelle<br />
histoire !<br />
Un <strong>de</strong>s chapitres les plus lus, et les plus passionnément commentés,<br />
chez nous, <strong>de</strong> la Guerre <strong>de</strong>s Gaules <strong>de</strong> César est incontestablement<br />
le récit du siège <strong>de</strong> l’oppidum <strong>de</strong>s Aduatiques, en 57 avant Jésus-<br />
Christ (Livre II, 29 à 33). Rappelons-en brièvement la teneur et le<br />
contexte. S’enfonçant chez les Nerviens, qui avaient pris la tête d’une<br />
coalition belge, les légions leur livrèrent un âpre combat, dont l’issue<br />
resta longtemps indécise et dont elles ne sortirent victorieuses qu’à<br />
l’intervention <strong>de</strong> César lui-même. La tribu voisine <strong>de</strong>s Aduatiques avait<br />
envoyé <strong>de</strong>s troupes en renfort. A cette nouvelle, celles-ci rebroussèrent<br />
chemin et se réfugièrent avec femmes et enfants dans leur place<br />
forte principale, <strong>de</strong>vant laquelle César vint bientôt mettre le siège.<br />
Après quelques manœuvres d’intimidation mutuelle, les Aduatiques<br />
firent mine <strong>de</strong> se rendre, César leur ayant promis la vie sauve, moyennant<br />
la reddition <strong>de</strong> leurs armes. Mais ils en dissimulèrent une partie,<br />
à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>squelles ils tentèrent <strong>de</strong> nuit une sortie, qui resta vaine.<br />
S’emparant alors <strong>de</strong>s survivants, les Romains les vendirent "à l’encan",<br />
selon l’expression consacrée. On en dénombra 53.000 et les<br />
Aduatiques disparurent pratiquement <strong>de</strong> l’Histoire.<br />
Au 19e siècle, tous les théâtres <strong>de</strong> ces événements firent l’objet <strong>de</strong><br />
tentatives <strong>de</strong> localisation, qui suscitèrent <strong>de</strong>s débats passionnés. Ce<br />
fut presque une <strong>de</strong>uxième "Guerre <strong>de</strong>s Gaules" ! On mit à contribution<br />
la toponymie, l’archéologie alors balbutiante et <strong>de</strong> savants calculs<br />
<strong>de</strong> distances. On compara les caractéristiques topographiques <strong>de</strong>s<br />
sites proposés et leur plus ou moins gran<strong>de</strong> conformité aux <strong>de</strong>scriptions<br />
césariennes. Parmi ceux qui pouvaient prétendre au titre envié<br />
d’oppidum <strong>de</strong>s Aduatiques figurèrent, sans surprise, la Cita<strong>de</strong>lle <strong>de</strong><br />
<strong>Namur</strong>, mais aussi, à quelques encablures <strong>de</strong> là, le beaucoup plus mo<strong>de</strong>ste<br />
promontoire d’Hastedon dans la vallée du Houyoux, aux confins<br />
<strong>de</strong> Saint-Servais et <strong>de</strong> Saint-Marc. Il ne manquait pourtant pas d’arguments.<br />
Ce petit plateau n’est facilement accessible que d’un côté,<br />
par un isthme étroit qui le rattache à Saint-Marc. Ailleurs, une levée<br />
<strong>de</strong> terre et <strong>de</strong> pierres, qui n’est autre que le vestige d’un ancien<br />
namur<strong>06</strong>/2011magazine<br />
Denier en argent<br />
frappé à l’effigie<br />
<strong>de</strong> Jules César, coll. SAN<br />
<strong>Namur</strong> Magazine <strong>n°70</strong> – juin 2011<br />
Editeur responsable : <strong>Ville</strong> <strong>de</strong> <strong>Namur</strong><br />
Secrétaire communal : Jean-Marie Van Bol<br />
Hôtel <strong>de</strong> <strong>Ville</strong> - 5000 <strong>Namur</strong><br />
Rédactrice en chef : Valérie Sacchi<br />
Tél : 081 24 63 22 – fax : 081 24 63 31<br />
namurmagazine@ville.namur.be<br />
www.ville.namur.be<br />
Casse-tête en bronze<br />
provenant d’Hastedon<br />
rempart effondré sur<br />
lui-même par vétusté, en<br />
épouse presque exactement les<br />
contours et en renforce l’abrupt <strong>de</strong>s<br />
pentes. C’est bien <strong>de</strong> cette enceinte<br />
qu’Hastedon tire son nom puisque le suffixe<br />
"don" dérive <strong>de</strong> dunum qui, en gaulois,<br />
signifie « fortification » (comme dans Verdun,<br />
Châteaudun, Dun-sur-Meuse, par exemple).<br />
Au milieu du 19e siècle, c’était encore un site champêtre au centre<br />
duquel ne s’élevait qu’un petit castel <strong>de</strong> briques, entouré <strong>de</strong><br />
cultures. L’antiquité du lieu était connue <strong>de</strong>puis longtemps. Au 18e<br />
siècle, une gran<strong>de</strong> quantité d’armes, présentées alors comme "gauloises",<br />
fut découverte dans le vallon en contrebas. Au 19e siècle, on<br />
y ramassait les silex travaillés par brouettes entières, ce qui témoigne<br />
d’une fréquentation intense au Néolithique. Les partisans d’Hastedon<br />
firent aussi valoir <strong>de</strong>s étymologies fantaisistes, comme Hastae donum,<br />
le "don <strong>de</strong> la lance", censé rappeler l’épiso<strong>de</strong> <strong>de</strong>s armes remises.<br />
À la même époque, un certain Napoléon III, Empereur <strong>de</strong>s Français<br />
et passionné d’histoire, mettait l’armée française, ses hommes et ses<br />
moyens, à la recherche <strong>de</strong>s sites césariens. On sait qu’il fit fouiller<br />
Alésia. On sait beaucoup moins qu’en 1863, il envoya une mission,<br />
sous les ordres du commandant <strong>de</strong> Loqueyssie, mener <strong>de</strong>s fouilles à<br />
Hastedon. Entrepris dans l’isthme, les travaux ne donnèrent sans<br />
doute pas <strong>de</strong> résultats concluants, puisque dans l’édition <strong>de</strong> la Guerre<br />
<strong>de</strong>s Gaules qu’il publia en 1865, Napoléon III place l’oppidum <strong>de</strong>s<br />
Aduatiques sur le site <strong>de</strong> la Cita<strong>de</strong>lle <strong>de</strong> <strong>Namur</strong>. Mais le Musée<br />
archéologique <strong>de</strong> <strong>Namur</strong> possè<strong>de</strong> encore quelques tessons <strong>de</strong> céramique<br />
grossière provenant d’Hastedon et offerts par <strong>de</strong> Loqueyssie.<br />
Depuis, le site a fait l’objet <strong>de</strong> nombreuses autres campagnes <strong>de</strong><br />
fouilles. L’une d’entre elles, en 1872, a établi que le rempart était renforcé<br />
intérieurement par une structure <strong>de</strong> poutres entrecroisées, mais<br />
sans les gran<strong>de</strong>s fiches métalliques qui caractérisent le murus<br />
gallicus tel que le définit César. Une analyse au carbone 14 <strong>de</strong> charbons<br />
<strong>de</strong> bois prélevés dans cette enceinte en 1969 a donné la date <strong>de</strong><br />
± 450 av. J.-C. avec une marge d’erreur <strong>de</strong> ± 110 ans. Bien que<br />
d’époque celtique et à l’origine d’un toponyme celtique, elle a donc<br />
été élevée bien avant la Guerre <strong>de</strong>s Gaules.<br />
Aucun vestige contemporain <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong> n’y a jamais été<br />
découvert et la superficie du site est sans doute trop petite pour<br />
correspondre à celui décrit par César.<br />
Quoiqu’il en soit, l’intérêt archéologique d’Hastedon transcen<strong>de</strong>, sans<br />
nul doute, le cadre namurois. Il convient, à ce titre, <strong>de</strong> le protéger et<br />
<strong>de</strong> le faire connaître. On s’y emploiera au sein du futur Musée<br />
archéologique, en chantier sur le site <strong>de</strong>s Bateliers.<br />
Collaborateurs : Jean-Louis Antoine, Jacques<br />
Leurquin (photos)<br />
Réalisation : Caudaliecommunication<br />
Production / Régie publicitaire : Sponsor<br />
One (081/ 73 68 90)<br />
Tirage 57.000 exemplaires distribués gratuitement<br />
dans tous les foyers namurois.<br />
Jean-Louis Antoine<br />
merci Valérie pour ton fabuleux<br />
travail durant ces nombreuses<br />
années [69 numéros]<br />
l’équipe du namurmagazine