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« Critique d'art et journalisme » 1 Rappel historique Retour aux ...

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« <strong>Critique</strong> d’art <strong>et</strong> <strong>journalisme</strong> »<br />

1 <strong>Rappel</strong> <strong>historique</strong><br />

R<strong>et</strong>our <strong>aux</strong> sources de la critique d’art <strong>et</strong> du <strong>journalisme</strong> : le XIXe siècle<br />

Le concept de « Salon de peinture » s’est développé après la création en 1648<br />

de l’Académie française de peinture <strong>et</strong> de sculpture. Pour la première fois, on<br />

y présente des œuvres à un public élargi.<br />

Dès le début les Salons font l’obj<strong>et</strong> de commentaires dans « Le Mercure<br />

galant » (1672) <strong>et</strong> qui deviendra « Le Mercure de France ».<br />

On r<strong>et</strong>ient surtout le nom de Diderot (1713-1784) comme commentateur avisé<br />

des Salons de l’Académie pendant plus de 20 ans.<br />

Après la Révolution de 1789, le musée du Louvre est créé <strong>et</strong> le règlement de<br />

l’Académie est modifié : son Salon est désormais ouvert à tous les artistes,<br />

français ou étrangers.<br />

À partir de la deuxième moitié du XIXe siècle, la liberté de la presse <strong>et</strong> les<br />

progrès techniques de l’imprimerie perm<strong>et</strong>tent le développement des journ<strong>aux</strong><br />

<strong>et</strong> revues illustrées.<br />

De nouve<strong>aux</strong> Salons apparaissent, comme le célèbre « Salon des Refusés »<br />

de 1863.<br />

Dans le même temps, le cercle des ach<strong>et</strong>eurs s’élargit <strong>et</strong> de plus en plus de<br />

personnes recherchent de l’information pour se forger une opinion.<br />

Au début du XIXe siècle, ce sont surtout des écrivains qui se font de l’argent<br />

de poche en publiant leurs commentaires.<br />

Exemple : la revue L’Artiste, fondée en 1831, qui publie les textes d’auteurs<br />

comme Charles Baudelaire, Théophile Gautier, les frères Jules <strong>et</strong> Edmond de<br />

Goncourt…<br />

Au cours du siècle, la critique d’art s’affirme sous sa forme moderne avec<br />

Émile Zola (en parallèle à sa relation avec Paul Cézanne).<br />

Mais il faut attendre la fin du XIXe siècle pour voir apparaître des journalistes<br />

spécialisés dans ce domaine.


XXe siècle : apparition de la presse spécialisée <strong>et</strong> apogée de la critique<br />

d’art dans la presse écrite<br />

L’apparition de l’art moderne <strong>et</strong> de l’art contemporain s’accompagne de la<br />

prise d’importance croissante des critiques dans le rapport entre des œuvres<br />

parfois difficiles à décrypter <strong>et</strong> le public.<br />

Les mouvements d’art, souvent accompagnés de manifestes (tel le Manifeste<br />

du surréalisme de Br<strong>et</strong>on), transforment les revues spécialisées : elles<br />

deviennent les accessoires indispensables de ces démarches à fort contenu<br />

intellectuel.<br />

XXIe siècle : la critique d’art <strong>et</strong> le <strong>journalisme</strong> sur les nouve<strong>aux</strong> supports<br />

multimédias<br />

Aujourd’hui, la figure du critique d’art tend à disparaître. Elle est remplacée par<br />

la promotion publicitaire de l’art <strong>et</strong> des artistes.<br />

De plus, il faut compter avec le développement d’intern<strong>et</strong> <strong>et</strong> de la photographie<br />

numérique, qui perm<strong>et</strong>tent à des amateurs de diffuser commentaires, textes <strong>et</strong><br />

images sans passer par le filtre des médias.<br />

La professionnalisation des rése<strong>aux</strong> d’exposition <strong>et</strong> de vente d’art<br />

contemporain a rendu le rôle des critiques fondament<strong>aux</strong> pour la viabilité<br />

économique des artistes, qui bénéficient également de la couverture<br />

médiatique assurée par les attachés de presse des galeries où ils sont<br />

représentés.<br />

La survie de l’artiste dépend désormais de c<strong>et</strong>te relation triangulaire entre le<br />

galeriste, l’ach<strong>et</strong>eur (<strong>et</strong> collectionneur) <strong>et</strong> le journaliste-critique d’art.<br />

2 Notions fondamentales de la critique d’art<br />

Qu’est-ce qu’un critique d’art ?<br />

Définitions :<br />

La critique d’art est l’art de juger les œuvres de l’esprit.<br />

Le critique d’art agit ainsi comme « guide du goût du public ».


Les critiques d’art sont des publicistes qui traitent de l’art sous forme<br />

évaluative <strong>et</strong> classifient l’art au sens large du terme : la critique d’œuvres d’art,<br />

de livres, de films, d’événements culturels.<br />

La présentation de rapports culturels <strong>et</strong> la critique culturelle font partie de leurs<br />

tâches.<br />

Ils décrivent <strong>et</strong> jugent le travail de créateurs artistiques.<br />

Les critiques d’art ont pour la plupart une spécialité, par exemple arts<br />

plastiques, art cinématographique, musique classique ou théâtre moderne.<br />

À quoi sert-il ?<br />

Le critique d’art est une sorte « d’intermédiaire éclairé » entre les artistes <strong>et</strong> le<br />

public, lecteurs, auditeurs ou spectateurs.<br />

Le critique d’art s’occupe de l’actualité, canalise l’information, perm<strong>et</strong> de définir<br />

une œuvre, de situer le travail de l’artiste.<br />

Contrairement à l’historien d’art, il est toujours un militant qui réagit à chaud.<br />

Le critique d’art désigne, condamne, légitime, choisit, parfois il fonde ou il<br />

soude un mouvement artistique.<br />

Les critiques d’art ont souvent contribué à forger de nouve<strong>aux</strong> mots, tels<br />

fauvisme ou trans-avant-garde, pour désigner un courant ou un mouvement<br />

artistique.<br />

Quelles sont les qualités d’un bon critique d’art ?<br />

Le critique d’art, c’est d’abord un passionné d’art sous toutes ses formes.<br />

Il doit savoir tirer le meilleur du travail de l’artiste <strong>et</strong> le rendre accessible.<br />

Le critique d’art doit être près de l’univers <strong>et</strong> des intentions de l’artiste afin d’en<br />

révéler l’intérêt <strong>et</strong> la richesse.<br />

3 Notions fondamentales du <strong>journalisme</strong><br />

Qu’est-ce qu’un journaliste ?<br />

Revenons au statut de journaliste professionnel qui est contenu dans la loi<br />

Brachard <strong>et</strong> la loi Cressard :


« Est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale,<br />

régulière <strong>et</strong> rétribuée, l’exercice de sa profession dans une ou plusieurs<br />

entreprises de presse, publications quotidiennes <strong>et</strong> périodiques ou agences de<br />

presse <strong>et</strong> qui en tire le principal de ses ressources. »<br />

À quoi sert-il ?<br />

Le journaliste recueille, vérifie <strong>et</strong> commente des faits pour les porter à<br />

l’attention du public dans les médias en respectant une même déontologie du<br />

<strong>journalisme</strong>.<br />

En théorie <strong>et</strong> en résumé, l'« information de presse » doit présenter 3<br />

caractéristiques :<br />

– être d’actualité <strong>et</strong> d’intérêt général<br />

– avoir été sélectionnée <strong>et</strong> mise en forme par une conscience libre<br />

– être diffusée par un média garantissant l’indépendance du journaliste par<br />

rapport à tout pouvoir.<br />

Quelles sont les qualités d’un bon journaliste ?<br />

Des connaissances techniques <strong>et</strong> culturelles sont de plus en plus souvent<br />

nécessaires (quand elles ne sont pas exigées), en raison de la complexité<br />

croissante des suj<strong>et</strong>s traités.<br />

Un journaliste doit alors posséder une capacité à comprendre <strong>et</strong> à r<strong>et</strong>ranscrire<br />

en termes intelligibles par le plus grand nombre une information a priori<br />

« difficile », afin qu’elle ne demeure pas réservée à un cercle d’initiés.<br />

Nous reviendrons sur « l’art de la rédaction » plus tard.<br />

4 La synthèse de deux métiers<br />

En résumé, un bon journaliste-critique d’art doit posséder un savoir sur l’art <strong>et</strong><br />

un savoir-faire (savoir écrire, avoir un style) puisque son travail se traduit par<br />

la rédaction d’articles dans presse (revues spécialisées ou journ<strong>aux</strong><br />

généralistes), des chroniques en télévision ou en radio.


La formation en tant que critique d’art ne relève pas d’études concrètes, mais<br />

plutôt d’un « apprendre en faisant » sur les bases d’études de sciences<br />

humaines ou d’une formation dans les domaines de l’histoire de l’art, de la<br />

muséologie, du cinéma ou de la littérature (diplômes de troisième cycle en<br />

histoire de l’art <strong>et</strong> en esthétique).<br />

Sur le fond, l’émotion, qui est toujours subjective, ne peut pas être le seul<br />

critère d’appréciation.<br />

Le critique d’art est un théoricien <strong>et</strong> un spécialiste. Il s’appuie sur des éléments<br />

objectifs : une culture approfondie <strong>et</strong> des connaissances spécialisées…<br />

Soulignons que le critère d’appréciation ne peut pas non plus n’être<br />

qu’objectif, car cela reviendrait à dire qu’il existerait un beau en soi.<br />

5 Méthodologie du journaliste spécialisé en art<br />

Collecte & sources d’informations<br />

Un journaliste spécialisé en art doit porter une attention toute particulière à ses<br />

sources d’informations.<br />

Il doit suivre la carrière des artistes, les côtoyer, assister souvent en avant<br />

première à toutes les présentations de ses nouveautés, se procurer les<br />

catalogues raisonnés…<br />

Il arpente galeries, musées, bibliothèques spécialisées, foires <strong>et</strong> expositions…<br />

Les pièges à éviter<br />

Ils sont nombreux !<br />

Nous n’allons pas les répertorier tous, mais nous pouvons citer, parmi les plus<br />

évidents :<br />

− le copier/coller de communiqués de presse imprécis,<br />

− le recours à des informations erronées <strong>et</strong>/ou de mauvaise qualité qu’on<br />

ne prend pas le temps de vérifier.


Attention, les journalistes-critiques d’art ne travaillent pas uniquement sur l’art<br />

au sens strict du terme.<br />

Le critique commente des thèmes culturels percutants, réalise des recherches<br />

sur les scandales <strong>et</strong> intrigues (exemple : art spolié, pratique déloyale des<br />

établissements de vente <strong>aux</strong> enchères, implications économiques de<br />

mécènes).<br />

Résister à la tentation du sensationnel <strong>et</strong> du sensationnalisme !<br />

6 Rédaction : public cible, angle, style…<br />

Quelques rappels de base :<br />

Il existe trois nive<strong>aux</strong> de lecture<br />

Le 1er niveau de lecture : titraille, photos (illustrations) <strong>et</strong> légendes, sommaire,<br />

rubriquage, signature<br />

Le 2e niveau de lecture : les chapôs, les attaques <strong>et</strong> les chutes<br />

Le 3e niveau de lecture : l’écriture proprement dite<br />

Première question à se poser avant d’écrire : pour qui est-ce que<br />

j’écris ?<br />

Public cible : il faut d’abord se préoccuper de son avant-angle, c’est-à-dire<br />

connaître son journal, celui pour lequel on publie <strong>et</strong> son lectorat.<br />

On ne s’adresse évidemment pas de la même manière à des spécialistes <strong>et</strong><br />

au grand public !<br />

Angle : un bon angle, c’est d’abord une bonne question posée dans un<br />

contexte donné : en termes de moments, de valeurs <strong>et</strong> de lectorats.


Le savoir-faire du journaliste se fonde d’abord sur la formulation d’une bonne<br />

question.<br />

Angle <strong>et</strong> à propos : le bon angle est aussi la bonne question formulée au bon<br />

moment.<br />

Style : le journaliste se doit d’avoir un style.<br />

Cela passe en particulier par le choix d’un vocabulaire riche <strong>et</strong> adapté <strong>et</strong> par le<br />

travail sur la construction de la phrase.<br />

Il faut limiter au maximum l’emploi des adjectifs<br />

« Une phrase c’est suj<strong>et</strong>, verbe, complément. Pour l’adjectif, prière de passer<br />

par mon bureau » avait pour habitude de dire Georges Clémenceau, rédacteur<br />

en chef de L'Aurore<br />

Message essentiel : « écrire, c’est choisir » : on ne peut pas tout dire dans un<br />

article.<br />

Dans les 10 premières secondes, le lecteur doit avoir capté un message<br />

essentiel.<br />

Les 6 questions essentielles sont, dans l’ordre d’importance :<br />

1) qui ?<br />

2) quoi ?<br />

3) où ?<br />

4) quand ?<br />

5) comment ?<br />

6) pourquoi ?<br />

Idéalement le titre répond <strong>aux</strong> questions = qui, quoi, quand<br />

Et le surtitre répond <strong>aux</strong> questions = comment ou pourquoi<br />

Le choix d’un plan adapté<br />

Il faut proscrire :


1) plan chronologique : on privilégie le passé au détriment du présent<br />

proche<br />

2) plan universitaire : introduction, développement, conclusion<br />

Un article ne comprend ni introduction ni conclusion mais une attaque, un<br />

développement pyramidal, une chute.<br />

Les princip<strong>aux</strong> types de plans<br />

Plan de la pyramide inversée<br />

Pour les articles de genre informatif<br />

Plan reportage ou cinématographique en 3 temps<br />

pour les enquêtes de terrain, les articles longs<br />

1) zoom sur une image forte<br />

2) flash-back avec message essentiel <strong>et</strong> éléments informatifs annexes<br />

3) alternance d’éléments « chauds » (citations…) <strong>et</strong> « froids » (rappel<br />

<strong>historique</strong>, élément technique, données chiffrées…)<br />

Plan descriptif<br />

Un peu lourd, il peut éventuellement servir pour un dossier<br />

Il répond à une logique globale : on développe les causes, les eff<strong>et</strong>s, les<br />

conséquences…<br />

Plan démonstratif<br />

On argumente à partir d’une position annoncée au début, c’est le principe de<br />

l’éditorial.<br />

C’est le plan le plus délicat à utiliser, il suppose une excellente plume<br />

L’interview<br />

Revenons aussi sur les grands principes de l’interview.<br />

Il en existe 2 types :


– l’interview traditionnelle : questions / réponses<br />

– l’interview portrait, genre très vivant<br />

3 étapes :<br />

1) avant<br />

– bien se documenter sur le suj<strong>et</strong><br />

– bien se renseigner sur la personne que l’on va interviewer<br />

– caler soi-même son rendez-vous pour se présenter (soi <strong>et</strong> son journal) <strong>et</strong><br />

pour fixer la durée de l’interview (minimum 30 minutes)<br />

– préparer une grille de questions<br />

si la personne demande les questions avant l’interview <strong>et</strong> demande à relire<br />

avant publication, ne pas refuser = je n’ai rien à cacher<br />

2) pendant<br />

– commencer par les questions anodines<br />

– prendre des notes<br />

– partager du temps avec l’interlocuteur<br />

3) après<br />

Il faut se relire immédiatement pour s’assurer de la lisibilité des notes <strong>et</strong> pour<br />

avoir une idée de l’article.<br />

Ne pas hésiter en cas de doute à se faire confirmer une information, un chiffre,<br />

une valeur…<br />

En guise de conclusion, j’ai envie de citer Wassily Kandinsky qui déclarait en<br />

1912 : le critique est « le pire ennemi de l’art ».<br />

Il faut dire qu’à l’époque, des critiques réputés intervenaient souvent sous<br />

forme dirigiste sur les évolutions de l’art pour influer sur l’opinion publique <strong>et</strong><br />

lancer des tendances.<br />

C’est vrai que la critique d’art a perdu ce « pouvoir » depuis longtemps.


Mais, les médias (dans toute leur diversité) commentent aujourd’hui les<br />

événements artistiques actuels plus que jamais. La critique d’art demeure une<br />

institution indispensable <strong>et</strong> les besoins en information sont toujours plus<br />

grands.<br />

En résumé, vous faites un métier extrêmement important, m<strong>et</strong>tez-y du cœur !

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