Les Echos, 17 mars 2008 - Le blog de l'agence Angie
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Veille stratégique _ Avril <strong>2008</strong><br />
Sommaire<br />
1 La nouvelle physionomie <strong>de</strong>s dirigeants<br />
(<strong><strong>Le</strong>s</strong> <strong>Echos</strong>, <strong>17</strong> <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
2 Ressources humaines : les priorités <strong>de</strong>s patrons<br />
(<strong><strong>Le</strong>s</strong> <strong>Echos</strong>, 21 avril <strong>2008</strong>)<br />
3 Comment les agences gèrent la pression ?<br />
(Stratégies, <strong>17</strong> avril 2007)<br />
4 <strong><strong>Le</strong>s</strong> agences doivent-elles créer une offre développement<br />
durable ?<br />
(Stratégies, 10 avril <strong>2008</strong>)<br />
5 La communication financière <strong>de</strong>s entreprises passée au crible<br />
(L’expression d’entreprise, 10 avril <strong>2008</strong>)<br />
6 L'info économique 2.0<br />
(Stratégies, 13 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
7 Out of Print : The <strong>de</strong>ath and life of the American newspaper.<br />
(The New Yorker, 31 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
8 Livre : le numérique à l'assaut <strong>de</strong> l'édition<br />
(<strong><strong>Le</strong>s</strong> <strong>Echos</strong>, 13 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
9 Texte sur écran<br />
(Courrier International, 13 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
10 <strong><strong>Le</strong>s</strong> quatorze qualités que j’attends d’un e-book<br />
(Courrier international, 13 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
11 Écrire une histoire à 1500 mains<br />
(Courrier International, 13 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
12 Cinq outils <strong>de</strong>rnier cri à savoir maîtriser<br />
(Stratégies, 27 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
13 <strong>Le</strong> son, un nouvel élément d'expérience sensorielle sur le Net<br />
(<strong><strong>Le</strong>s</strong> <strong>Echos</strong>, 18 avril <strong>2008</strong>)<br />
1
1) La nouvelle physionomie <strong>de</strong>s dirigeants<br />
(<strong><strong>Le</strong>s</strong> <strong>Echos</strong>, <strong>17</strong> <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> mutations technologiques et les pressions multiples exercées<br />
par les actionnaires ont considérablement changé les qualités <strong>de</strong>s<br />
PDG.<br />
La bataille entre le Me<strong>de</strong>f et l'Union <strong>de</strong>s industries <strong>de</strong>s métiers <strong>de</strong> la<br />
métallurgie (UIMM), dont <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>s anciens hauts dirigeants sont mis en<br />
examen, illustre le fossé qui sépare les tenants d'une conception ancienne<br />
<strong>de</strong> la direction d'entreprise et les « mo<strong>de</strong>rnes », issus d'une génération<br />
montante <strong>de</strong> nouveaux dirigeants.<br />
Ces <strong>de</strong>rnières années, la conjonction <strong>de</strong> la mondialisation, du rythme<br />
soutenu <strong>de</strong>s évolutions technologiques et <strong>de</strong>s pressions multiples exercées<br />
sur eux par les actionnaires a considérablement changé la physionomie<br />
<strong>de</strong>s « CEO ». Ces <strong>de</strong>rniers doivent - selon le franglais <strong>de</strong> rigueur - toujours<br />
davantage « délivrer » <strong>de</strong>s résultats rapi<strong>de</strong>s. Conséquence : faute <strong>de</strong><br />
performances à court terme, un nombre grandissant d'entre eux sont<br />
poussés vers la porte. De 15 % en 2006, le pourcentage est passé à 16,2<br />
% à la fin <strong>de</strong> 2007, selon Weber Shandwick Worldwi<strong>de</strong> (15 % pour<br />
l'Europe et l'Amérique du Nord contre 21 % en région Asie-Pacifique). Et<br />
quand les durées <strong>de</strong>s mandats raccourcissent (6 ans aujourd'hui contre 6<br />
ans et 5 mois en 2005 et 2006, toujours selon la même source), les<br />
caractéristiques requises pour atteindre le sommet <strong>de</strong> la hiérarchie<br />
évoluent aussi.<br />
Rajeunissement <strong>de</strong>s lea<strong>de</strong>rs<br />
L'une <strong>de</strong>s toutes premières, la plus flagrante, est le rajeunissement. Ce<br />
qui sous-entend aussi l'ouverture internationale et la réactivité. En France,<br />
<strong>de</strong>s Jean-Pascal Tricoire (Schnei<strong>de</strong>r Electric), Franck Riboud (Danone),<br />
Arnaud Lagardère (Lagardère), Patrick Kron (Alstom), José Luis Duran<br />
(Carrefour) sont sensiblement plus jeunes que la génération précé<strong>de</strong>nte.<br />
Outre-Manche aussi, où le patron <strong>de</strong> HMV, par exemple, n'a pas 50 ans et<br />
où celui <strong>de</strong> BP est tout juste quinquagénaire. Ou encore aux Etats-Unis,<br />
où Uli Becker (44 ans) s'apprête à remplacer Paul Harrington (46 ans) à la<br />
tête <strong>de</strong> Reebok à partir du 1er avril. L'autre tendance - propre à la France<br />
cette fois-ci et confirmée par <strong>de</strong>s chasseurs <strong>de</strong> têtes - est que désormais<br />
appartenir à un grand corps (Polytechnique, les Mines, l'ENA) peut<br />
apparaître nécessaire mais ne suffit plus à conférer illico la stature <strong>de</strong><br />
grand lea<strong>de</strong>r. Comme ses homologues anglo-saxons, le patron français<br />
tend à ne plus être jugé que sur ses seuls résultats.<br />
Autres qualités requises : une appétence pour l'innovation (sans perdre<br />
pour autant <strong>de</strong> vue le principe <strong>de</strong> précaution) et une plus forte conscience<br />
2
<strong>de</strong> la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s problématiques qui lient l'entreprise à la société. L'art<br />
<strong>de</strong> raconter la « bonne » histoire se fait aussi crucial pour motiver les<br />
équipes, d'après Rosabeth Moss Kanter, professeur à l'université <strong>de</strong><br />
Harvard. Et, comme dans le milieu politique, le « storytelling » se propage<br />
aussi en entreprise. Il revient donc au PDG <strong>de</strong> trouver les phrases et les<br />
mots clefs pour susciter l'enthousiasme, insuffler <strong>de</strong> l'énergie, donner du<br />
sens au travail, traduire la stratégie en résultats et insérer les valeurs<br />
clefs du groupe dans les comportements quotidiens.<br />
Plus <strong>de</strong> transparence<br />
Un exercice délicat car il s'agit <strong>de</strong> trouver LE thème mobilisateur pour<br />
l'avenir ou <strong>de</strong> se gargariser <strong>de</strong> succès passés. « L'histoire doit être simple,<br />
courte et mémorisable à coups d'images visuelles et/ou via un maximum<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ou trois personnages », explique un expert du « storytelling » à la<br />
« Harvard Business Review ».<br />
Enfin, le « CEO », qui désormais ne peut plus vivre dans un superbe<br />
isolement, doit montrer plus <strong>de</strong> transparence et avoir l'art <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>r<br />
tout en donnant un sentiment <strong>de</strong> proximité et d'intimité. Une gageure, là<br />
encore, à l'heure où certains font la une <strong>de</strong>s journaux du mon<strong>de</strong> entier en<br />
raison <strong>de</strong> leurs rémunérations toujours plus élevées, que les milieux<br />
économiques justifient par la guerre mondiale <strong>de</strong>s talents et le désir <strong>de</strong>s<br />
entreprises <strong>de</strong> s'attacher les meilleurs éléments. Des dirigeants qui<br />
doivent savoir jongler avec une toujours plus gran<strong>de</strong> complexité, et<br />
surtout savoir anticiper. D'où l'émergence <strong>de</strong> quantités <strong>de</strong> plans « Visions<br />
2010 », <strong>de</strong> « Cap 2015 » et autres « Ambitions 2020 » alors que tout - les<br />
marchés, le comportement <strong>de</strong>s consommateurs, l'exposition médiatique,<br />
etc. - reste impalpable et empreint d'incertitu<strong>de</strong>.<br />
Résultat : dotés <strong>de</strong> davantage <strong>de</strong> responsabilités que <strong>de</strong> pouvoir, les PDG<br />
ont tendance à entourer leur prise <strong>de</strong> mandat <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>s garanties<br />
juridiques. Ils sont en effet conscients <strong>de</strong> naviguer à vue, <strong>de</strong> n'avoir<br />
quasiment plus droit à l'erreur et <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir restaurer une image, ces<br />
<strong>de</strong>rniers temps, partout mise à mal. En France, par les déboires entre<br />
Me<strong>de</strong>f et l'UIMM. Outre-Rhin, par les perquisitions au domicile du patron<br />
<strong>de</strong> la Deutsche Post soupçonné <strong>de</strong> frau<strong>de</strong> fiscale. Ou encore aux Etats-<br />
Unis, par les limogeages fracassants <strong>de</strong> nombre <strong>de</strong> « CEO » <strong>de</strong>s secteurs<br />
<strong>de</strong> la finance, <strong>de</strong> la santé et <strong>de</strong>s nouvelles technologies.<br />
2) Ressources humaines : les priorités <strong>de</strong>s patrons<br />
(<strong><strong>Le</strong>s</strong> <strong>Echos</strong>, 21 avril <strong>2008</strong>)<br />
La gestion <strong>de</strong>s talents figure en tête <strong>de</strong> liste <strong>de</strong>s agendas <strong>de</strong>s<br />
sociétés du mon<strong>de</strong> entier. La France, elle, privilégie la mesure <strong>de</strong><br />
la performance RH.<br />
3
Tout le mon<strong>de</strong> le dit : la gestion <strong>de</strong>s talents est la priorité <strong>de</strong>s priorités <strong>de</strong>s<br />
entreprises. Et <strong>de</strong> fait, elle figure en tête <strong>de</strong> liste <strong>de</strong>s agendas <strong>de</strong>s sociétés<br />
du mon<strong>de</strong> entier. <strong>Le</strong> contexte <strong>de</strong> concurrence mondiale acharnée n'a en<br />
effet jamais autant nécessité non seulement d'attirer et <strong>de</strong> développer <strong>de</strong><br />
nouveaux talents, mais surtout <strong>de</strong> les retenir. <strong><strong>Le</strong>s</strong> entreprises doivent<br />
désormais mieux communiquer sur les opportunités <strong>de</strong> carrière et la<br />
gran<strong>de</strong> quantité <strong>de</strong> packages sur mesure qu'elles proposent. Tout comme<br />
contribuer au rééquilibrage <strong>de</strong>s vies professionnelle et privée (autre<br />
gran<strong>de</strong> priorité). Il leur faut aussi <strong>de</strong> plus en plus tôt i<strong>de</strong>ntifier <strong>de</strong>s<br />
candidatures <strong>de</strong> valeur en vue <strong>de</strong> la constitution en amont <strong>de</strong> pools <strong>de</strong><br />
talents.<br />
Développement du lea<strong>de</strong>rship<br />
Mais, contrairement à leurs homologues étrangers, les groupes français<br />
n'inscrivent la gestion <strong>de</strong>s talents qu'au quatrième rang <strong>de</strong> leurs priorités,<br />
<strong>de</strong>rrière - préoccupation numéro 1 - la mesure <strong>de</strong> la performance RH, les<br />
mesures <strong>de</strong> déploiement <strong>de</strong> l'engagement <strong>de</strong>s salariés et la gestion <strong>de</strong>s<br />
problématiques démographiques (*). <strong><strong>Le</strong>s</strong> Etats-Unis, le Royaume-Uni, le<br />
Japon, l'Espagne mais aussi l'In<strong>de</strong>, Singapour et l'Afrique du Sud la<br />
placent, eux, au tout premier rang <strong>de</strong> leurs préoccupations, d'après une<br />
enquête exclusive - et non encore diffusée - menée par The Boston<br />
Consulting Group et World Fe<strong>de</strong>ration of Personnel Management<br />
Association. Corollaire <strong>de</strong> la gestion <strong>de</strong>s talents, le développement du<br />
lea<strong>de</strong>rship joue, lui aussi, au jour le jour un rôle crucial dans la<br />
performance <strong>de</strong>s entreprises. Car ce sont les lea<strong>de</strong>rs qui servent <strong>de</strong><br />
modèle, incarnent la mission du groupe, et qui, par leur action, donnent<br />
du sens aux orientations choisies, participent au développement <strong>de</strong>s<br />
talents en interne.<br />
Diffuser les connaissances<br />
Autre chantier <strong>de</strong> taille : le changement. Une transformation qui tient aux<br />
écarts démographiques, aux modifications culturelles et à la<br />
mondialisation. Majeures, les questions démographiques vont notamment<br />
amener <strong>de</strong>ux fois plus d'entreprises - hors pays émergents d'Asie - à<br />
modifier leur politique <strong>de</strong> santé et <strong>de</strong> prévention <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts. Enfin,<br />
l'organisation elle-même se modifie pour se faire continuellement<br />
apprenante. Autrement dit, pour développer et diffuser les connaissances<br />
en interne (bases <strong>de</strong> données, universités d'entreprise, réseaux d'experts,<br />
organisation <strong>de</strong> transferts <strong>de</strong> savoir-faire, etc.) Et replacer la fonction RH<br />
au sein d'un partenariat stratégique global d'entreprise. Il n'empêche<br />
cependant. Seulement 40 % <strong>de</strong>s entreprises interviewées ont commencé à<br />
s'investir <strong>de</strong> façon sérieuse dans l'une <strong>de</strong>s priorités recensées.<br />
4
La raison ? « Cela nécessite une remise en cause fondamentale, car il faut<br />
lever <strong>de</strong>s freins culturels et organisationnels », explique Jean-Michel Caye,<br />
directeur associé au Boston Consulting Group. Et les choses ne sauraient<br />
changer sans prise <strong>de</strong> conscience sérieuse et urgente à leur plus haut<br />
niveau. Des groupes aussi divers que Daimler, E.ON ou encore Tata Group<br />
dont le développement est soutenu, l'ont parfaitement compris. Tout,<br />
comme en France, <strong>de</strong>s Danone, L'Oréal, Schnei<strong>de</strong>r Electric ou encore<br />
Véolia. Tous ceux-là ont fini par tisser un lien étroit entre stratégie<br />
d'entreprise et stratégie RH. Et, parce que la compétence est <strong>de</strong> toute<br />
évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>venue la ressource la plus rare et la plus convoitée au mon<strong>de</strong>,<br />
les autres entreprises sont tôt ou tard condamnées à suivre leur exemple.<br />
*) Au sein d'une liste <strong>de</strong> préoccupations pas forcément <strong>de</strong>s plus<br />
prioritaires mais bien hexagonales où figurent aussi l'engagement <strong>de</strong>s<br />
salariés, la responsabilité sociale d'entreprise et l'individualisation du<br />
traitement.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> 8 chantiers <strong>de</strong>s entreprises du mon<strong>de</strong> entier :<br />
· Développer et retenir les talents<br />
1. Gérer les talents<br />
2. Améliorer le développement du lea<strong>de</strong>rship<br />
3. Gérer l'équilibre vie professionnelle/vie privée<br />
· Anticiper le changement<br />
4. Gérer les écarts démographiques<br />
5. Gérer le changement et la transformation culturelle<br />
6. Gérer la mondialisation<br />
· Optimiser l'organisation<br />
7. Devenir une organisation apprenante<br />
8. Faire <strong>de</strong>s RH un partenaire stratégique<br />
3) Comment les agences gèrent la pression ?<br />
(Stratégies, <strong>17</strong> avril 2007)<br />
Horaires élastiques, recours aux free-lances, travail dans<br />
l'urgence... les agences <strong>de</strong> communication doivent jongler avec les<br />
exigences croissantes <strong>de</strong> leurs clients.<br />
Journaux d'entreprises, sites Web et créations publicitaires se ven<strong>de</strong>nt<br />
toujours bien. Mais les directions <strong>de</strong>s achats exigent d'en avoir toujours<br />
plus pour le même prix. Une tendance que l'évolution récente du paysage<br />
médiatique vient renforcer. « Depuis le tournant numérique <strong>de</strong> 2006,<br />
l'offre <strong>de</strong> supports s'est multipliée, constate Éric Trousset, directeur<br />
marketing <strong>de</strong> TNS Media Intelligence. Aujourd'hui, un annonceur a le choix<br />
entre une centaine <strong>de</strong> chaînes <strong>de</strong> télévision pour lancer une campagne<br />
5
plus ou moins ciblée, sans parler d'Internet et du téléphone mobile. »<br />
Difficile dans ces conditions <strong>de</strong> résister à la tentation <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r plus,<br />
et toujours plus vite, à <strong>de</strong>s équipes <strong>de</strong> prestataires réputées corvéables<br />
à merci.<br />
« Il y a une accélération <strong>de</strong>s exigences, confirme Cécile Roger, éditriceconseil<br />
chez Euro RSCG C & O, qui pilote la confection <strong>de</strong> plusieurs<br />
magazines internes <strong>de</strong> grands groupes. Désormais, tout se fait en<br />
parallèle et non plus consécutivement. Il faut sans cesse réinjecter <strong>de</strong> la<br />
méthodologie. » Résultat : nombre <strong>de</strong> validations se font sur la maquette<br />
finale, les retards s'accumulent et tout se précipite vers la fin du parcours.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> origines du mal sont pourtant parfaitement i<strong>de</strong>ntifiées : tout découle<br />
d'un manque <strong>de</strong> réflexion en amont . Pour Élisabeth Coutureau, viceprési<strong>de</strong>nte<br />
<strong>de</strong> TBWA Corporate, le client qui met les budgets sous pression<br />
n'est « pas un cas fréquent ». La solution rési<strong>de</strong> dans un savant mélange<br />
d'anticipation et <strong>de</strong> formation : « La question budgétaire doit être réglée<br />
en amont pour garantir au client que chaque euro sera investi au mieux.<br />
Et lors <strong>de</strong>s discussions avec les acheteurs, nous nous fondons sur <strong>de</strong>s<br />
grilles tarifaires précises issues <strong>de</strong> la comptabilité analytique et nous<br />
expliquons pourquoi telle mission exige tel profil. Dans ce domaine, je<br />
crois beaucoup à la pédagogie. » Louable, le remè<strong>de</strong> présente néanmoins<br />
un défaut majeur dans les petites agences : ses effets s'estompent<br />
rapi<strong>de</strong>ment et il est toujours nécessaire d'en rajouter une dose.<br />
Car les structures légères n'ont souvent pas d'autres choix, pour satisfaire<br />
leurs clients, que <strong>de</strong> rallonger les horaires. « Avant, je faisais <strong>de</strong>s<br />
semaines <strong>de</strong> 45 à 50 heures. Maintenant, je suis dans une moyenne <strong>de</strong><br />
55-60 heures et je finis tous les soirs à 21 heures », témoigne une<br />
salariée. À ce temps désormais « normal » viennent régulièrement se<br />
greffer <strong>de</strong>s « rushs » qui entraînent le compteur au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> minuit et<br />
dévorent les week-ends. Difficilement compatible avec une vie <strong>de</strong> mère <strong>de</strong><br />
famille, notamment. La fatigue s'accumule et les arrêts maladie<br />
<strong>de</strong>viennent la soupape <strong>de</strong> sécurité, quand ce n'est pas la seule<br />
échappatoire possible. Quant à la vie sociale, elle s'étiole : « <strong><strong>Le</strong>s</strong> gens ne<br />
m'en veulent pas, mais ils ne comprennent pas et, à force, ils finissent par<br />
se passer <strong>de</strong> moi. » Quand le management fait la sour<strong>de</strong> oreille ou <strong>de</strong><br />
simples promesses, un véritable ras-le-bol s'installe et pousse les talents<br />
au départ.<br />
Sous-traitance et partenariat<br />
Soucieuse <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r leur potentiel, la plupart <strong>de</strong>s agences préfèrent faire<br />
appel à la sous-traitance plutôt que d'assister à une hémorragie<br />
continuelle <strong>de</strong> leurs salariés. Simple et rapi<strong>de</strong> à mettre en œuvre, le<br />
recours accru aux free-lances constitue une option efficace pour absorber<br />
la pression <strong>de</strong>s clients. Chez Verbe, agence <strong>de</strong> communication éditoriale<br />
du groupe Publicis, c'est une « pratique significative », reconnaît Laurent<br />
6
Borrell, directeur <strong>de</strong> la stratégie et <strong>de</strong>s nouvelles offres. <strong>Le</strong> partenariat est<br />
une autre possibilité. Souple et pratique, il assure une mutualisation <strong>de</strong>s<br />
moyens qui permet d'amortir le choc budgétaire tout en répondant à<br />
l'ensemble <strong>de</strong>s <strong>de</strong>si<strong>de</strong>rata du client. Verbe s'est ainsi associée à Lonely<br />
Planet pour injecter <strong>de</strong>s contenus « tourisme » dans les intranets <strong>de</strong> ses<br />
clients et collabore régulièrement avec d'autres structures <strong>de</strong> Publicis pour<br />
proposer une offre globale. Moins avouable, le recours aux juniors ou aux<br />
stagiaires. Contre toute attente, la qualité est souvent au ren<strong>de</strong>z-vous. <strong>Le</strong><br />
problème, c'est qu'elle ne dure jamais longtemps. « <strong><strong>Le</strong>s</strong> stagiaires restent<br />
<strong>de</strong>ux ou trois mois. Après, c'est la roulette russe », confie une responsable<br />
<strong>de</strong> projet d'une agence parisienne coutumière du fait.<br />
Utile, le recours à <strong>de</strong>s ressources humaines supplétives ne peut cependant<br />
servir que d'appoint et l'essentiel <strong>de</strong> la réponse provient encore et<br />
toujours <strong>de</strong> l'intérieur. Deux stratégies sont alors possibles, qui peuvent<br />
être mises en œuvre complémentairement. La première consiste à jouer la<br />
transparence totale en interne. Chez By The Way-Créacom, agence <strong>de</strong><br />
communication corporate, les chefs <strong>de</strong> projet et le « middle management<br />
» ont tous les chiffres une ou <strong>de</strong>ux fois par semaine. Budgets, marges,<br />
rentabilité, tout est mis sur la table. « Il vaut mieux qu'ils aient <strong>de</strong>s<br />
repères et qu'on en discute plutôt que <strong>de</strong>s bribes qui les amènent à se<br />
faire une fausse opinion », assure Patrick Miot, vice-prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> cette<br />
agence d'une cinquantaine <strong>de</strong> collaborateurs. Une transparence qui<br />
s'accompagne d'une politique <strong>de</strong> rémunération et <strong>de</strong> gestion du temps<br />
luci<strong>de</strong>s : « Il faut savoir récompenser les collaborateurs qui mouillent la<br />
chemise et faire preuve <strong>de</strong> souplesse quand ils ont besoin <strong>de</strong> temps... »<br />
<strong>Le</strong> conseil au lieu <strong>de</strong> la quantité<br />
Deuxième stratégie : sortir <strong>de</strong> la quantité pour s'orienter vers le conseil.<br />
Chez By The Way-Créacom, l'organigramme parle <strong>de</strong> lui-même : si une<br />
moitié <strong>de</strong>s collaborateurs se consacre à la création, l'autre planche<br />
uniquement sur le conseil et le suivi <strong>de</strong>s clients. <strong>Le</strong> système est d'autant<br />
plus efficace que les équipes sont renforcées en profils « seniors ». Plus<br />
cher ? Un argument que Patrick Miot écarte sans hésiter : « Même s'il<br />
coûte 30 % plus cher, un senior sera plus efficace. Il boucle le dossier<br />
<strong>de</strong>ux fois plus rapi<strong>de</strong>ment parce qu'il est plus pertinent et plus rapi<strong>de</strong>. »<br />
Une logique imparable que Verbe a décidé <strong>de</strong> porter à son terme en<br />
reformatant complètement équipes et métiers. La centaine <strong>de</strong><br />
collaborateurs <strong>de</strong> <strong>l'agence</strong> a donc été invitée à participer à six chantiers<br />
qui doivent bousculer tous les a priori et mener à <strong>de</strong>s formations sur<br />
mesure. « Nous sommes en train <strong>de</strong> basculer du statut <strong>de</strong> prestataire vers<br />
celui <strong>de</strong> partenaire », confirme Laurent Borrell. Discrète, la manœuvre a<br />
cependant peu <strong>de</strong> chance d'échapper aux directions <strong>de</strong>s achats. Même en<br />
changeant d'objet, les discussions budgétaires resteront donc encore très<br />
serrées.<br />
7
4) <strong><strong>Le</strong>s</strong> agences doivent-elles créer une offre développement<br />
durable ?<br />
(Stratégies, 10 avril <strong>2008</strong>)<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> annonceurs sont <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong>man<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> conseil en<br />
développement durable. Pour autant, créer <strong>de</strong>s offres et <strong>de</strong>s<br />
entités spécifiques au sein <strong>de</strong>s agences pose question : est-ce un<br />
simple alibi ou un réel argument <strong>de</strong> vente ?<br />
<strong>Le</strong> développement durable est <strong>de</strong>venu une préoccupation majeure <strong>de</strong>s<br />
annonceurs. En témoigne la vague <strong>de</strong> nominations <strong>de</strong> directeurs ou<br />
directrices chargés d'y veiller. « Il n'y a plus un brief où le développement<br />
durable ne soit pas un présupposé », constate un professionnel.<br />
Au sein <strong>de</strong>s agences, c'est donc le branle-bas <strong>de</strong> combat. Depuis la<br />
rentrée 2007, l'Association <strong>de</strong>s agences-conseils en communication leur<br />
propose une série <strong>de</strong> formations sur le sujet. De même, l'Anaé, qui<br />
regroupe les agences événementielles, a lancé un grand chantier « DD »,<br />
sous la houlette <strong>de</strong> Benoît Desveaux, directeur général du Public Système,<br />
qui vient <strong>de</strong> créer Namaska, une agence événementielle solidaire et<br />
durable. D'autres agences ont nommé <strong>de</strong>s responsables du<br />
développement durable : Olivia Grégoire chez DDB France, Alice Audouin,<br />
membre du collectif Adwiser, chez Havas, Quitterie Delmas, ancienne <strong>de</strong><br />
l'association Déclic Solidarité, chez Heaven. Et Publicis Groupe a acheté en<br />
février Act Now, pionnier américain du conseil en développement durable.<br />
Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s bonnes volontés affichées, est-il vraiment nécessaire <strong>de</strong> créer<br />
<strong>de</strong>s entités et <strong>de</strong>s offres consacrées au développement durable ? La<br />
plupart <strong>de</strong>s agences reconnaissent qu'elles n'en sont encore qu'au début<br />
du processus. « Dès lors que les annonceurs sont <strong>de</strong>man<strong>de</strong>urs, il faut<br />
anticiper », affirme Catherine Michaud, prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> K Agency 360, qui a<br />
créé en janvier <strong>de</strong>rnier K Développement durable (KDD), une structure<br />
proposant <strong>de</strong>s campagnes écoconçues et écoréalisées. A contrario, Benoît<br />
Héry, prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> Draft-FCB, estime que « placer le développement<br />
durable à part alors qu'il ne fait déjà plus débat, c'est prendre le train en<br />
retard et s'acheter une étiquette verte qui ne recouvre aucune offre<br />
véritable. » L'agence, qui avait annoncé il y a un an une série <strong>de</strong> mesures<br />
en la matière, avait recruté un Monsieur développement durable,<br />
Stéphane Pocrain. Celui-ci a quitté <strong>l'agence</strong>, mais le chantier se poursuit<br />
au quotidien, assure-t-on chez Draft-FCB.<br />
Changer les habitu<strong>de</strong>s<br />
Reste, enfin, à appliquer concrètement dans les agences les<br />
recommandations faites aux clients. Bilan carbone, mesure <strong>de</strong> l'impact<br />
écologique, plan <strong>de</strong> formation aux « écogestes », changements d'attitu<strong>de</strong><br />
au travail : là aussi, le chantier est en marche. Même si, à ce jour, les<br />
conseilleurs ne sont pas (encore) les payeurs.<br />
8
5) La communication financière <strong>de</strong>s entreprises passée au crible<br />
(L’expression d’entreprise, 10 avril <strong>2008</strong>)<br />
L’uniformisation <strong>de</strong>s supports <strong>de</strong> communication favorise une<br />
meilleure compréhension <strong>de</strong> l’information. L’IFop a mené une<br />
étu<strong>de</strong> auprès <strong>de</strong>s analystes financiers et <strong>de</strong>s actionnaires<br />
individuels pour mesurer leurs attentes en matière <strong>de</strong> rapport<br />
annuel.<br />
« <strong>Le</strong> rapport annuel est un support-clef dans la communication<br />
institutionnelle et financière <strong>de</strong>s entreprises cotées. Il doit séduire et<br />
convaincre », déclare Jean-François <strong>Le</strong> Rochais, prési<strong>de</strong>nt-directeur<br />
général <strong>de</strong> l’agence en communication Terre <strong>de</strong> Sienne. Pour cela, il doit<br />
être le plus clair possible. La multiplication <strong>de</strong>s supports <strong>de</strong><br />
communication en facilitant pas la compréhension <strong>de</strong> l’information. L’IFop<br />
a mené l’enquête auprès d’analystes financiers et d’actionnaires<br />
majoritaires. Il en ressort une forte adhésion à un regroupement <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />
documents, rapport financier et rapport annuel, en un seul. <strong><strong>Le</strong>s</strong> analystes<br />
financiers à 78 % et les actionnaires à 75 % sont favorables à cette issue.<br />
Outre ce premier constat, l’aspect esthétique joue aussi un rôle. Près<br />
d’une personne interrogée sur <strong>de</strong>ux estime y être très sensible. <strong><strong>Le</strong>s</strong><br />
analystes financiers avouent y être attentifs à 66 % et les actionnaires<br />
individuels à 64 %. Une attention particulière est portée sur la partie<br />
institutionnelle. En troisième lieu, viennent les informations dites « extra<br />
financières ». Elles se glissent dans la communication financière et<br />
institutionnelle <strong>de</strong>s entreprises cotées. L’éthique, la présentation <strong>de</strong> la<br />
stratégie, le mot du prési<strong>de</strong>nt… sont donc autant d’éléments qui entrent<br />
en compte dans la rédaction <strong>de</strong>s rapports. Près <strong>de</strong> neuf analystes<br />
financiers et actionnaires individuels sur dix y sont vigilants (85 % <strong>de</strong>s<br />
sondés). Enfin, pour se faire une idée <strong>de</strong> la performance <strong>de</strong>s entreprises,<br />
ces mêmes financiers et actionnaires s’appuient sur les textes, les<br />
commentaires, les données chiffrées… Ils affirment (à 49 %) être très<br />
sensibles aux ratios, aux chiffres clefs, aux textes et commentaires.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> visuels et les schémas remportent aussi leurs intéressés puisque près<br />
<strong>de</strong> sept sondés sur dix y sont attentifs.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> entreprises doivent donc être soucieuses <strong>de</strong> leur communication<br />
financière d’autant plus que l’uniformisation <strong>de</strong> la législation européenne,<br />
par la directive transparence du 8 <strong>mars</strong> 2007, leur impose <strong>de</strong> fournir un<br />
rapport financier annuel rigoureusement normé.<br />
6) L'info économique 2.0<br />
(Stratégies, 13 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
Pour la presse économique et financière, le web est une priorité.<br />
Entre information en continu et interactivité avec les internautes,<br />
9
les journaux et magazines montent en puissance sur le net. Reste<br />
à inventer un modèle économique viable.<br />
L'info économique 2.0<br />
Jeudi 24 janvier <strong>2008</strong>. Branle-bas <strong>de</strong> combat dans la presse économique<br />
et financière : un jeune tra<strong>de</strong>r aurait fait perdre 5 milliards d’euros à la<br />
Société générale. <strong><strong>Le</strong>s</strong> journalistes financiers du figaro.fr sont sur le pont :<br />
interviews exclusives, rebondissements, décryptages. « <strong>Le</strong> len<strong>de</strong>main, <strong>Le</strong><br />
Figaro papier a pris le relais avec <strong>de</strong>s analyses. Résultat, au bout <strong>de</strong><br />
quatre jours, nous avions déjà trente articles sur l’affaire Kerviel : <strong>de</strong> quoi<br />
monter un dossier sur le Web », raconte Christophe Mazzoleni, directeur<br />
<strong>de</strong> la « chaîne Finance » (rubriques Bourse, Patrimoine, Placement, etc.)<br />
du figaro.fr. Rue Galvani, chez Capital, on peste : « Nous avions bouclé<br />
le mensuel l’avant-veille !, raconte Jean-Joël Gurviez, éditeur du pôle<br />
économique <strong>de</strong> Prisma Presse. Heureusement, grâce à notre site, nous<br />
avons pu couvrir l’événement au quotidien. Avant l’ère Internet, Capital<br />
serait passé à côté <strong>de</strong> cette info cruciale. »<br />
La presse économique et financière l’a bien compris : exister sur le Web<br />
est désormais une priorité. Mais comment trouver le bon accord entre une<br />
info très ciblée, parfois pointue, et un média qui ouvre le champ <strong>de</strong>s<br />
possibles ? <strong><strong>Le</strong>s</strong> sites <strong>de</strong> journaux économiques tâtonnent… mais vont<br />
plutôt dans le bon sens. La preuve : <strong>de</strong>s chiffres plus qu’encourageants.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong>echos.fr reste lea<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s sites économiques, avec 1,148 million <strong>de</strong><br />
visiteurs uniques, juste <strong>de</strong>vant la « chaîne Finance » du figaro.fr (1,138<br />
million). Latribune.fr affiche 800 000 visiteurs uniques, quand<br />
challenges.fr a quadruplé ses visites en un an (450 000). <strong>Le</strong>xpansion.com<br />
a, lui, gagné 30 % <strong>de</strong> fréquentation <strong>de</strong>puis sa nouvelle formule. Autre<br />
signe <strong>de</strong> bonne santé : <strong>de</strong>s rénovations <strong>de</strong> sites prévues avant l’été chez<br />
Challenges et chez Capital, le lancement du journal<strong>de</strong>sfinances.fr par <strong>Le</strong><br />
Figaro et celui <strong>de</strong> BFM News, portail d’information généraliste et<br />
économique, prévu pour mai prochain au sein <strong>de</strong> Nextradio TV.<br />
Transversalité<br />
Quel est le modèle économique <strong>de</strong> ces sites <strong>de</strong> presse ? <strong>Le</strong> tout publicité<br />
et la gratuité s’imposent, même si le print reste comme partout ultra<br />
majoritaire dans les recettes publicitaires (lire en page 42). À<br />
lexpansion.com, on aimerait développer les partenariats et le commerce<br />
en ligne pour diversifier les revenus, « mais l’accès à l’information restera<br />
gratuit », précise Yves Adaken, rédacteur en chef. Du côté <strong>de</strong>s magazines,<br />
seul capital.fr a lancé une offre payante, il y a <strong>de</strong>ux ans. « L’abonné reçoit<br />
chaque semaine la lettre boursière par courriel et sous forme papier, ainsi<br />
que la newsletter First Morning par courrier chaque matin, détaille Jean-<br />
Joël Gurviez. Il a aussi accès à <strong>de</strong>s conseils boursiers sur plus <strong>de</strong> 130<br />
valeurs. » Une offre qui plaît… mais qui reste chère : 39 euros par mois.<br />
10
« <strong>Le</strong> cas <strong>de</strong> la presse économique est particulier : sa cible (les entreprises<br />
et les cadres) a les moyens <strong>de</strong> se payer un abonnement sur le Net et veut<br />
<strong>de</strong>s informations sérieuses provenant d’une marque média reconnue,<br />
explique Patrick Eveno, spécialiste <strong>de</strong>s médias et maître <strong>de</strong> conférences à<br />
la Sorbonne. Voici en théorie le cercle vertueux du modèle payant. » Côté<br />
quotidiens, seul lesechos.fr a pris le parti d’un modèle mixte, où 30 % <strong>de</strong>s<br />
contenus sont payants (journal du jour, archives, microéconomie). « Nous<br />
avons 20 000 abonnés, dont la moitié sont <strong>de</strong>s entreprises, et notre<br />
chiffre d’affaires est parfaitement équilibré », affirme Philippe Janet,<br />
directeur général Internet <strong>de</strong> DI Group (qui a racheté <strong><strong>Le</strong>s</strong> Échos à<br />
Pearson).<br />
Pour garantir une info continue <strong>de</strong> qualité, les sites se sont tous dotés <strong>de</strong><br />
rédactions Web à part entière… avec plus ou moins <strong>de</strong> moyens.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong>echos.fr, pionnier <strong>de</strong>puis 1996, dispose d’une équipe <strong>de</strong> 24<br />
journalistes. <strong><strong>Le</strong>s</strong> rédactions financières du figaro.fr, <strong>de</strong> latribune.fr et <strong>de</strong><br />
capital.fr comptent chacune une dizaine <strong>de</strong> journalistes, alors qu’à<br />
lexpansion.com et à challenges.fr, on en recense <strong>de</strong>ux fois moins.<br />
« Certes, mais la rédaction du magazine est entièrement bimédia et<br />
fournit six à sept papiers quotidiens au Web », précise Pierre-Henri <strong>de</strong><br />
Menthon, rédacteur en chef <strong>de</strong> Challenges. « BFM News aura évi<strong>de</strong>mment<br />
sa rédaction propre, précise Alain Weill, PDG <strong>de</strong> Nextradio TV. Mais, pour<br />
moi, le modèle idéal, ce serait quelques journalistes se consacrant à un<br />
seul support et <strong>de</strong>s experts transversaux intervenant aussi bien sur BFM,<br />
BFM TV, BFM News ou La Tribune. » <strong>Le</strong>figaro.fr peut quant à lui compter<br />
sur le soutien <strong>de</strong>s 70 journalistes économiques du quotidien. Quant aux<br />
rédacteurs du mensuel Capital, ils alimentent les « indiscrétions » du site,<br />
qui se veut aussi le prolongement <strong>de</strong> certaines enquêtes papier.<br />
La culture bimédia semble donc mieux intégrée que lors <strong>de</strong>s débuts du<br />
Web. L’intérêt premier étant évi<strong>de</strong>mment <strong>de</strong> pouvoir informer en temps<br />
réel, quand le temps du papier est, lui, figé. « En économie plus<br />
qu’ailleurs, on est sur une problématique <strong>de</strong> marchés. Plus on est informé<br />
tôt, plus on est efficace », lance Joël Ronez, consultant en stratégie Web<br />
pour les médias au cabinet Cup of Tea. Pour beaucoup, c’est là qu’est la<br />
valeur ajoutée : « Notre ambition est d’apporter une hiérarchisation<br />
journalistique <strong>de</strong> l’info à instant “t”», précise Pierre-Henri <strong>de</strong> Menthon.<br />
Pour Yves Adaken, cette exigence <strong>de</strong> vitesse et <strong>de</strong> direct est à mêler avec<br />
« le gène premier <strong>de</strong> L’Expansion : celui <strong>de</strong> la pédagogie ». « Expliquer<br />
une information complexe, c’est l’un <strong>de</strong> nos axes <strong>de</strong> développement sur la<br />
chaîne finances, renchérit Christophe Mazzoleni. Sur la partie Bourse,<br />
nous avons une vertu pédagogique. Nous allons par exemple expliquer ce<br />
que veut dire une augmentation <strong>de</strong> capital, ce qu’elle peut changer pour le<br />
portefeuille <strong>de</strong> l’internaute, etc. »<br />
11
Ouverture à l’interactivité<br />
Si le Web 2.0 permet d’être en flux continu, il ouvre aussi les portes <strong>de</strong><br />
l’interactivité. Comment les sites économiques gèrent-ils le lien avec les<br />
internautes ? « Informer sur l’économie requiert <strong>de</strong>s compétences, <strong>de</strong>s<br />
contacts. <strong>Le</strong> journalisme citoyen est moins possible que dans la presse<br />
généraliste », analyse Joël Ronez. <strong><strong>Le</strong>s</strong> sites hésitent donc à lancer <strong>de</strong>s<br />
forums. « Au début, nous étions réticents à accueillir les réactions <strong>de</strong>s<br />
internautes. Qu’est-ce qu’elles apportaient ? Depuis la refonte du site en<br />
septembre, nous avons lancé la rubrique “Café <strong>de</strong> l’économie”, où les<br />
internautes commentent les papiers. Et le résultat est intéressant »,<br />
détaille Yves Adaken. <strong>Le</strong> site du Journal <strong>de</strong>s finances <strong>de</strong>vrait bientôt leur<br />
permettre d’envoyer leur propre analyse économique. La meilleure sera<br />
publiée dans l’édition papier. « Notre public est une nouvelle source<br />
d’information », constate Christophe Mazzoleni.<br />
Pour le directeur général du groupe Nouvel Observateur, Louis Dreyfus, «<br />
le secteur <strong>de</strong> l’économie se prête davantage à une interactivité avec <strong>de</strong>s<br />
spécialistes qu’à du participatif pur ». D’où le développement <strong>de</strong>s <strong>blog</strong>s<br />
d’experts et <strong>de</strong> journalistes sur <strong>de</strong> nombreux sites. L’étu<strong>de</strong> réalisée par<br />
Think out pour la marque L’Expansion le montre : les internautes<br />
atten<strong>de</strong>nt du participatif qu’il « donne <strong>de</strong> la valeur au lecteur », et qu’il<br />
« valorise les éclairages d’experts ». Autre ren<strong>de</strong>z-vous interactif très suivi<br />
: le tchat quotidien avec un invité du mon<strong>de</strong> économique organisé par la<br />
rédaction <strong>de</strong>s echos.fr. Pour Joël Ronez, « l’autre enjeu du 2.0, c’est qu’il<br />
permet aux internautes <strong>de</strong> jouer sur l’ergonomie du site, <strong>de</strong> choisir ses<br />
infos ». Créer sa propre page, avec ses rubriques préférées et son<br />
portefeuille boursier, est déjà possible sur lesechos.fr, via un partenariat<br />
avec Netvibes.<br />
Cap sur la vidéo<br />
C’est l’atout supplémentaire <strong>de</strong>s sites économiques : les services offerts à<br />
l’internaute. Avec en tête la gestion du portefeuille boursier. Aucun site<br />
n’échappe à cet outil : cours en direct, graphiques, points Bourse matin et<br />
soir, conseils d’analystes internationaux, etc. « Notre objectif est d’être<br />
aussi performant que Boursorama », affirme Christophe Mazzoleni. « Nous<br />
pouvons même alerter nos internautes par courriel quand l’une <strong>de</strong> leurs<br />
actions dépasse un seuil. C’est un outil <strong>de</strong> fidélisation formidable »,<br />
poursuit Philippe Janet. Pour Jean-Joël Gurviez, <strong>de</strong> Capital, ces services<br />
doivent rester liés à l’information : « Nous mettons en ligne <strong>de</strong>s annonces<br />
immobilières, <strong>de</strong>s offres d’emploi, <strong>de</strong>s conseils en placements, etc. Mais il<br />
faut du contenu autour pour donner un sens éditorial à tout cela. »<br />
D’autres services sont-ils en développement ? <strong><strong>Le</strong>s</strong> acteurs du Web<br />
avouent qu’il ne s’agit pas pour l’instant <strong>de</strong> leur priorité en termes<br />
d’investissements.<br />
12
C’est plutôt le développement <strong>de</strong> la vidéo qui <strong>de</strong>vient prioritaire. Après<br />
une tendance à l’achat, comme les Points Bourse <strong>de</strong> l’agence New York<br />
French Press qu’on retrouve sur lefigaro.fr et lexpansion.com, les sites<br />
se mettent à produire leurs propres contenus. Dans l’entresol du Figaro,<br />
un studio télé vient d’être inauguré. Loge <strong>de</strong> maquillage, fond bleu,<br />
lumière rouge… rien ne manque : « J’ai hâte que mon équipe puisse<br />
réaliser <strong>de</strong>s vidéos », se réjouit Christophe Mazzoleni. <strong><strong>Le</strong>s</strong>echos.fr et<br />
latribune.fr (qui « bénéficiera bientôt <strong>de</strong> toutes les vidéos <strong>de</strong> BFM TV »,<br />
précise Alain Weill) ont déjà leur studio <strong>de</strong>puis quelques années.<br />
« Ce qui fonctionne bien, ce sont les interviews ou les petits magazines,<br />
comme les font les journalistes d’Enjeux », témoigne Philippe Janet.<br />
Difficile pourtant d’être créatif sur <strong>de</strong>s sujets économiques ou financiers.<br />
Un journaliste sur un fond gris qui débite les infos éco <strong>de</strong> la journée…<br />
Rien <strong>de</strong> très original. La vidéo apporte-t-elle réellement une valeur<br />
ajoutée ? « Nous savons que les internautes valorisent beaucoup les<br />
contenus vidéo. C’est ce qui les fidélise sur un site, estime Louis Dreyfus.<br />
Mais nous <strong>de</strong>vons inventer un langage. » <strong>Le</strong>xpansion.com a déjà tenté<br />
<strong>de</strong> petits sketchs vidéo en partenariat avec Théâtre à la carte. Ils<br />
décrivaient <strong>de</strong>s métiers <strong>de</strong> manière décalée. « Des prestataires nous<br />
proposent <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> petits <strong>de</strong>ssins animés pour expliquer les<br />
rouages <strong>de</strong> la gestion <strong>de</strong> patrimoine », note Christophe Mazzoleni.<br />
Développer l’outil vidéo, c’est aussi miser sur la mobilité qu’offre le 2.0.<br />
Aux echos.fr, on se positionne dès à présent sur la télévision mobile<br />
personnelle, prévue pour la fin <strong>de</strong> l’année, bien que le site dispose déjà<br />
d’une version mobile. Même stratégie chez Nextradio TV : « Il faut être<br />
présent sur tous les supports, radio, télévision, Web, mobile, pour suivre<br />
le lecteur en <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’infos économiques dans sa journée », analyse<br />
Alain Weill. « La forme graphique du journal<strong>de</strong>sfinances.fr se prête très<br />
bien au <strong>de</strong>sign <strong>de</strong> l’Iphone », avance Christophe Mazzoleni. « L’info<br />
économique sur mobile ? C’est du gadget, proteste Patrick Eveno. Ces<br />
sites n’ont aucun intérêt à imiter ce que font les autres sur le Net. <strong>Le</strong>ur<br />
valeur ajoutée, c’est ce qu’ils savent faire <strong>de</strong> mieux, leur compétence<br />
première : l’analyse journalistique. » L’un et l’autre sont-ils incompatibles<br />
? Peut-être pas.<br />
Télévision : LCI en pointe<br />
BFM TV, seule chaîne à se présenter comme économique, ne propose aux<br />
internautes que les pod-casts <strong>de</strong>s émissions et une fenêtre pour regar<strong>de</strong>r<br />
la chaîne en direct. <strong>Le</strong> site d’I-Télé est encore plus minimaliste. L’entrée<br />
«économie» permet seulement <strong>de</strong> poser <strong>de</strong>s questions par courriel aux<br />
émissions. Y a pas que le CAC et <strong>Le</strong> Journal <strong>de</strong> l’économie. Dans ce<br />
paysage, lci.fr fait figure <strong>de</strong> précurseur, surfant sur l’expertise <strong>de</strong> son<br />
grand frère TF1. La rubrique économique se veut pédagogique: on y<br />
13
trouve <strong>de</strong>s infographies explicatives, comme «le prix <strong>de</strong> l’essence<br />
décortiqué», <strong>de</strong>s vidéos insolites, mais aussi <strong>de</strong>s <strong>blog</strong>s d’experts hightech<br />
et auto. La rubrique Bourse n’a rien à envier à celle <strong>de</strong>s sites <strong>de</strong><br />
quotidiens: accès aux cours en temps réel, indices, vidéos et gestion <strong>de</strong><br />
portefeuille.<br />
Radio : BFM se distingue<br />
Du côté <strong>de</strong>s on<strong>de</strong>s, on reste timi<strong>de</strong> sur le Web, surtout en matière<br />
d’information économique. <strong>Le</strong> site <strong>de</strong> BFM, radiobfm.com, est le plus<br />
abouti, avec les podcasts <strong>de</strong>s émissions, une rubrique Bourse, <strong>de</strong>s<br />
informations économiques et <strong>de</strong>s dossiers. Mais une gran<strong>de</strong> partie du<br />
contenu provient <strong>de</strong>… capital.fr. Ouvrez la page d’accueil -d’eu-rope1.-fr,<br />
et vous ne verrez le mot «économie» nulle part. La rubrique financière <strong>de</strong><br />
rtl.fr propose, elle, <strong>de</strong>s interviews, <strong>de</strong>s portraits et une rubrique<br />
«décryptage» par un expert. Quant au site <strong>de</strong> RMC, il mise sur la<br />
pédagogie, avec une galerie <strong>de</strong> photos et d’infographies offrant <strong>de</strong>s<br />
tableaux explicatifs plutôt réussis sur la hausse.<br />
7) Out of Print : The <strong>de</strong>ath and life of the American newspaper.<br />
(The New Yorker, 31 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
The American newspaper has been around for approximately three<br />
hundred years. Benjamin Harris’s spirited Publick Occurrences, Both<br />
Forreign and Domestick managed just one issue, in 1690, before the<br />
Massachusetts authorities closed it down. Harris had suggested a<br />
politically incorrect hard line on Indian removal and shocked local<br />
sensibilities by reporting that the King of France had been taking liberties<br />
with the Prince’s wife.<br />
It really was not until <strong>17</strong>21, when the printer James Franklin launched the<br />
New England Courant, that any of Britain’s North American colonies saw<br />
what we might recognize today as a real newspaper. Franklin, Benjamin’s<br />
ol<strong>de</strong>r brother, refused to adhere to customary licensing arrangements and<br />
constantly attacked the ruling powers of New England, thereby achieving<br />
both editorial in<strong>de</strong>pen<strong>de</strong>nce and commercial success. He filled his paper<br />
with crusa<strong>de</strong>s (on everything from pirates to the power of Cotton and<br />
Increase Mather), literary essays by Addison and Steele, character<br />
sketches, and assorted philosophical ruminations.<br />
Three centuries after the appearance of Franklin’s Courant, it no longer<br />
requires a dystopic imagination to won<strong>de</strong>r who will have the dubious<br />
distinction of publishing America’s last genuine newspaper. Few believe<br />
that newspapers in their current printed form will survive. Newspaper<br />
companies are losing advertisers, rea<strong>de</strong>rs, market value, and, in some<br />
cases, their sense of mission at a pace that would have been barely<br />
14
imaginable just four years ago. Bill Keller, the executive editor of the<br />
Times, said recently in a speech in London, “At places where editors and<br />
publishers gather, the mood these days is funereal. Editors ask one<br />
another, ‘How are you?,’ in that sober tone one employs with friends who<br />
have just emerged from rehab or a messy divorce.” Keller’s speech<br />
appeared on the Web site of its sponsor, the Guardian, un<strong>de</strong>r the headline<br />
“NOT DEAD YET.”<br />
Perhaps not, but trends in circulation and advertising––the rise of the<br />
Internet, which has ma<strong>de</strong> the daily newspaper look slow and<br />
unresponsive; the advent of Craigslist, which is wiping out classified<br />
advertising––have created a palpable sense of doom. In<strong>de</strong>pen<strong>de</strong>nt,<br />
publicly tra<strong>de</strong>d American newspapers have lost forty-two per cent of their<br />
market value in the past three years, according to the media entrepreneur<br />
Alan Mutter. Few corporations have been punished on Wall Street the way<br />
those who dare to invest in the newspaper business have. The McClatchy<br />
Company, which was the only company to bid on the Knight Rid<strong>de</strong>r chain<br />
when, in 2005, it was put on the auction block, has surren<strong>de</strong>red more<br />
than eighty per cent of its stock value since making the $6.5-billion<br />
purchase. <strong>Le</strong>e Enterprises’ stock is down by three-quarters since it bought<br />
out the Pulitzer chain, the same year. America’s most prized journalistic<br />
possessions are sud<strong>de</strong>nly looking like corporate millstones. Rather than<br />
compete in an era of merciless transformation, the families that owned<br />
the Los Angeles Times and the Wall Street Journal sold off the majority of<br />
their holdings. The New York Times Company has seen its stock <strong>de</strong>cline by<br />
fifty-four per cent since the end of 2004, with much of the loss coming in<br />
the past year; in late February, an analyst at Deutsche Bank<br />
recommen<strong>de</strong>d that clients sell off their Times stock. The Washington Post<br />
Company has avoi<strong>de</strong>d a similar fate only by rebranding itself an<br />
“education and media company”; its testing and prep company, Kaplan,<br />
now brings in at least half the company’s revenue.<br />
Until recently, newspapers were accustomed to operating as high-margin<br />
monopolies. To own the dominant, or only, newspaper in a mid-sized<br />
American city was, for many <strong>de</strong>ca<strong>de</strong>s, a kind of license to print money. In<br />
the Internet age, however, no one has figured out how to rescue the<br />
newspaper in the United States or abroad. Newspapers have created Web<br />
sites that benefit from the growth of online advertising, but the sums are<br />
not nearly enough to replace the loss in revenue from circulation and print<br />
ads.<br />
Most managers in the industry have reacted to the collapse of their<br />
business mo<strong>de</strong>l with a spiral of budget cuts, bureau closings, buyouts,<br />
layoffs, and reductions in page size and column inches. Since 1990, a<br />
quarter of all American newspaper jobs have disappeared. The columnist<br />
Molly Ivins complained, shortly before her <strong>de</strong>ath, that the newspaper<br />
companies’ solution to their problem was to make “our product smaller<br />
and less helpful and less interesting.” That may help explain why the<br />
15
dwindling number of Americans who buy and read a daily paper are<br />
spending less time with it; the average is down to less than fifteen hours a<br />
month. Only nineteen per cent of Americans between the ages of eighteen<br />
and thirty-four claim even to look at a daily newspaper. The average age<br />
of the American newspaper rea<strong>de</strong>r is fifty-five and rising.<br />
Philip Meyer, in his book “The Vanishing Newspaper” (2004), predicts that<br />
the final copy of the final newspaper will appear on somebody’s doorstep<br />
one day in 2043. It may be unkind to point out that all these parlous<br />
trends coinci<strong>de</strong> with the opening, this spring, of the $450-million<br />
Newseum, in Washington, D.C., but, more and more, what Bill Keller calls<br />
“that lovable old-fashioned bundle of ink and cellulose” is starting to feel<br />
like an artifact ready for display un<strong>de</strong>r glass.<br />
Taking its place, of course, is the Internet, which is about to pass<br />
newspapers as a source of political news for American rea<strong>de</strong>rs. For young<br />
people, and for the most politically engaged, it has already done so. As<br />
early as May, 2004, newspapers had become the least preferred source<br />
for news among younger people. According to “Abandoning the News,”<br />
published by the Carnegie Corporation, thirty-nine per cent of respon<strong>de</strong>nts<br />
un<strong>de</strong>r the age of thirty-five told researchers that they expected to use the<br />
Internet in the future for news purposes; just eight per cent said that they<br />
would rely on a newspaper. It is a point of ironic injustice, perhaps, that<br />
when a rea<strong>de</strong>r surfs the Web in search of political news he frequently ends<br />
up at a site that is merely aggregating journalistic work that originated in<br />
a newspaper, but that fact is not likely to save any newspaper jobs or<br />
increase papers’ stock valuation.<br />
Among the most significant aspects of the transition from “<strong>de</strong>ad tree”<br />
newspapers to a world of digital information lies in the nature of “news”<br />
itself. The American newspaper (and the nightly newscast) is <strong>de</strong>signed to<br />
appeal to a broad audience, with conflicting values and opinions, by virtue<br />
of its commitment to the goal of objectivity. Many newspapers, in their<br />
eagerness to <strong>de</strong>monstrate a sense of balance and impartiality, do not<br />
allow reporters to voice their opinions publicly, march in <strong>de</strong>monstrations,<br />
volunteer in political campaigns, wear political buttons, or attach bumper<br />
stickers to their cars.<br />
In private conversation, reporters and editors conce<strong>de</strong> that objectivity is<br />
an i<strong>de</strong>al, an unreachable horizon, but journalists belong to a remarkably<br />
thin-skinned fraternity, and few of them will publicly admit to betraying in<br />
print even a trace of bias. They discount the notion that their beliefs could<br />
interfere with their ability to report a story with perfect balance. As the<br />
venerable “<strong>de</strong>an” of the Washington press corps, David Bro<strong>de</strong>r, of the<br />
Post, puts it, “There just isn’t enough i<strong>de</strong>ology in the average reporter to<br />
fill a thimble.”<br />
16
Meanwhile, public trust in newspapers has been slipping at least as quickly<br />
as the bottom line. A recent study published by Sacred Heart University<br />
found that fewer than twenty per cent of Americans said they could<br />
believe “all or most” media reporting, a figure that has fallen from more<br />
than twenty-seven per cent just five years ago. “<strong><strong>Le</strong>s</strong>s than one in five<br />
believe what they read in print,” the 2007 “State of the News Media”<br />
report, issued by the Project for Excellence in Journalism, conclu<strong>de</strong>d.<br />
“CNN is not really more trusted than Fox, or ABC than NBC. The local<br />
paper is not viewed much differently than the New York Times.” Vastly<br />
more Americans believe in flying saucers and 9/11 conspiracy theories<br />
than believe in the notion of balanced—much less “objective”—<br />
mainstream news media. Nearly nine in ten Americans, according to the<br />
Sacred Heart study, say that the media consciously seek to influence<br />
public policies, though they disagree about whether the bias is liberal or<br />
conservative.<br />
No less challenging is the rapid transformation that has taken place in the<br />
public’s un<strong>de</strong>rstanding of, and <strong>de</strong>mand for, “news” itself. Rupert Murdoch,<br />
in a speech to the American Society of Newspaper Editors, in April, 2005—<br />
two years before his five-billion-dollar takeover of Dow Jones & Co. and<br />
the Wall Street Journal—warned the industry’s top editors and publishers<br />
that the days when “news and information were tightly controlled by a few<br />
editors, who <strong>de</strong>igned to tell us what we could and should know,” were<br />
over. No longer would people accept “a godlike figure from above”<br />
presenting the news as “gospel.” Today’s consumers “want news on<br />
<strong>de</strong>mand, continuously updated. They want a point of view about not just<br />
what happened but why it happened. . . . And finally, they want to be able<br />
to use the information in a larger community—to talk about, to <strong>de</strong>bate, to<br />
question, and even to meet people who think about the world in similar or<br />
different ways.”<br />
One month after Murdoch’s speech, a thirty-one-year-old computer whiz,<br />
Jonah Peretti, and a former A.O.L. executive, Kenneth <strong>Le</strong>rer, joined the<br />
ubiquitous commentator-candidate-activist Arianna Huffington to launch a<br />
new Web site, which they called the Huffington Post. First envisaged as a<br />
liberal alternative to the Drudge Report, the Huffington Post started out by<br />
aggregating political news and gossip; it also organized a group <strong>blog</strong>, with<br />
writers drawn largely from Huffington’s alarmingly vast array of friends<br />
and connections. Huffington had accumulated that network during years<br />
as a writer on topics from Greek philosophy to the life of Picasso, as the<br />
spouse of a wealthy Republican congressman in California, and now, after<br />
a divorce and an i<strong>de</strong>ological conversion, as a Los Angeles-based liberal<br />
commentator and failed gubernatorial candidate.<br />
Almost by acci<strong>de</strong>nt, however, the owners of the Huffington Post had<br />
discovered a formula that capitalized on the problems confronting<br />
newspapers in the Internet era, and they are convinced that they are<br />
<strong>17</strong>
eady to reinvent the American newspaper. “Early on, we saw that the key<br />
to this enterprise was not aping Drudge,” <strong>Le</strong>rer recalls. “It was taking<br />
advantage of our community. And the key was to think of what we were<br />
doing through the community’s eyes.”<br />
On the Huffington Post, Peretti explains, news is not something han<strong>de</strong>d<br />
down from above but “a shared enterprise between its producer and its<br />
consumer.” Echoing Murdoch, he says that the Internet offers editors<br />
“immediate information” about which stories interest rea<strong>de</strong>rs, provoke<br />
comments, are shared with friends, and generate the greatest number of<br />
Web searches. An Internet-based news site, Peretti contends, is therefore<br />
“alive in a way that is impossible for paper and ink.”<br />
Though Huffington has a news staff (it is tiny, but the hope is to expand in<br />
the future), the vast majority of the stories that it features originate<br />
elsewhere, whether in print, on television, or on someone’s vi<strong>de</strong>o camera<br />
or cell phone. The editors link to whatever they believe to be the best<br />
story on a given topic. Then they repurpose it with a catchy, often liberalleaning<br />
headline and provi<strong>de</strong> a comment section beneath it, where rea<strong>de</strong>rs<br />
can chime in. Surrounding the news articles are the highly opinionated<br />
posts of an apparently endless army of both celebrity (Nora Ephron, Larry<br />
David) and non-celebrity <strong>blog</strong>gers—more than eighteen hundred so far.<br />
The <strong>blog</strong>gers are not paid. The over-all effect may appear chaotic and<br />
confusing, but, <strong>Le</strong>rer argues, “this new way of thinking about, and<br />
presenting, the news, is transforming news as much as CNN did thirty<br />
years ago.” Arianna Huffington and her partners believe that their mo<strong>de</strong>l<br />
points to where the news business is heading. “People love to talk about<br />
the <strong>de</strong>ath of newspapers, as if it’s a foregone conclusion. I think that’s<br />
ridiculous,” she says. “Traditional media just need to realize that the<br />
online world isn’t the enemy. In fact, it’s the thing that will save them, if<br />
they fully embrace it.”<br />
It’s an almost comically audacious ambition for an operation with only<br />
forty-six full-time employees—many of whom are barely old enough to<br />
rent a car. But, with about eleven million dollars at its disposal, the site is<br />
poised to break even on advertising revenue of somewhere between six<br />
and ten million dollars annually. What most impresses advertisers—and<br />
<strong>de</strong>presses newspaper-company executives—is the site’s growth numbers.<br />
In the past thirty days, thanks in large measure to the excitement of the<br />
Democratic primaries, the site’s “unique visitors”—that is, individual<br />
computers that clicked on one of its pages––jumped to more than eleven<br />
million, according to the company. And, according to estimates from<br />
Nielsen NetRatings and comScore, the Huffington Post is more popular<br />
than all but eight newspaper sites, rising from sixteenth place in<br />
December.<br />
18
Arthur Miller once <strong>de</strong>scribed a good newspaper as “a nation talking to<br />
itself.” If only in this respect, the Huffington Post is a great newspaper. It<br />
is not unusual for a short <strong>blog</strong> post to inspire a thousand posts from<br />
rea<strong>de</strong>rs—posts that go off in their own directions and lead to arguments<br />
and conversations unrelated to the topic that inspired them. Occasionally,<br />
these comments present original perspectives and arguments, but many<br />
resemble the graffiti on a bathroom wall.<br />
The notion that the Huffington Post is somehow going to compete with,<br />
much less displace, the best traditional newspapers is arguable on other<br />
grounds as well. The site’s original-reporting resources are minuscule. The<br />
site has no regular sports or book coverage, and its entertainment section<br />
is a trashy grab bag of unverified Internet gossip. And, while the<br />
Huffington Post has successfully positioned itself as the place where<br />
progressive politicians and Hollywood liberal luminaries post their anti-<br />
Bush Administration sentiments, many of the original <strong>blog</strong> posts that it<br />
publishes do not merit the effort of even a mouse click.<br />
Additional oddities abound. Whereas a newspaper tends to stand by its<br />
story on the basis of an editorial process in which professional reporters<br />
and editors attempt to vet their sources and check their accuracy before<br />
publishing, the <strong>blog</strong>osphere relies on its rea<strong>de</strong>rship—its community—for<br />
quality control. At the Huffington Post, Jonah Peretti explains, the editors<br />
“stand behind our front page” and do their best to insure that only trusted<br />
<strong>blog</strong>gers and reliable news sources are posted there. Most posts insi<strong>de</strong> the<br />
site, however, go up before an editor sees them. Only if a post is <strong>de</strong>emed<br />
by a rea<strong>de</strong>r to be false, <strong>de</strong>famatory, or offensive does an editor get<br />
involved.<br />
The Huffington Post’s editorial processes are based on what Peretti has<br />
named the “mullet strategy.” (“Business up front, party in the back” is<br />
how his trend-spotting site BuzzFeed glosses it.) “User-generated content<br />
is all the rage, but most of it totally sucks,” Peretti says. The mullet<br />
strategy invites users to “argue and vent on the secondary pages, but<br />
professional editors keep the front page looking sharp. The mullet strategy<br />
is here to stay, because the best way for Web companies to increase<br />
traffic is to let users have control, but the best way to sell advertising is a<br />
slick, pretty front page where corporate sponsors can admire their<br />
brands.”<br />
This policy is hardly without its pitfalls. During the Hurricane Katrina crisis,<br />
the activist Randall Robinson referred, in a post, to reports from New<br />
Orleans that some people there were “eating corpses to survive.” When<br />
Arianna Huffington heard about the post, she got in touch with Robinson<br />
and found that he could not support his musings; she asked Robinson to<br />
post a retraction. The alacrity with which the correction took place was<br />
19
admirable, but it was not fast enough to prevent the false information<br />
from being repeated elsewhere.<br />
The tensions between the lea<strong>de</strong>rs of the mainstream media and the<br />
challengers from the Web were presaged by one of the most instructive<br />
and heated intellectual <strong>de</strong>bates of the American twentieth century.<br />
Between 1920 and 1925, the young Walter Lippmann published three<br />
books investigating the theoretical relationship between <strong>de</strong>mocracy and<br />
the press, including “Public Opinion” (1922), which is credited with<br />
inspiring both the public-relations profession and the aca<strong>de</strong>mic field of<br />
media studies. Lippmann i<strong>de</strong>ntified a fundamental gap between what we<br />
naturally expect from <strong>de</strong>mocracy and what we know to be true about<br />
people. Democratic theory <strong>de</strong>mands that citizens be knowledgeable about<br />
issues and familiar with the individuals put forward to lead them. And,<br />
while these assumptions may have been reasonable for the white, male,<br />
property-owning classes of James Franklin’s Colonial Boston,<br />
contemporary capitalist society had, in Lippmann’s view, grown too big<br />
and complex for crucial events to be mastered by the average citizen.<br />
Journalism works well, Lippmann wrote, when “it can report the score of a<br />
game or a transatlantic flight, or the <strong>de</strong>ath of a monarch.” But where the<br />
situation is more complicated, “as for example, in the matter of the<br />
success of a policy, or the social conditions among a foreign people—that<br />
is to say, where the real answer is neither yes or no, but subtle, and a<br />
matter of balanced evi<strong>de</strong>nce,” journalism “causes no end of <strong>de</strong>rangement,<br />
misun<strong>de</strong>rstanding, and even misrepresentation.”<br />
Lippmann likened the average American—or “outsi<strong>de</strong>r,” as he tellingly<br />
named him—to a “<strong>de</strong>af spectator in the back row” at a sporting event: “He<br />
does not know what is happening, why it is happening, what ought to<br />
happen,” and “he lives in a world which he cannot see, does not<br />
un<strong>de</strong>rstand and is unable to direct.” In a <strong>de</strong>scription that may strike a<br />
familiar chord with anyone who watches cable news or listens to talk radio<br />
today, Lippmann assumed a public that “is slow to be aroused and quickly<br />
diverted . . . and is interested only when events have been<br />
melodramatized as a conflict.” A committed élitist, Lippmann did not see<br />
why anyone should find these conclusions shocking. Average citizens are<br />
hardly expected to master particle physics or post-structuralism. Why<br />
should we expect them to un<strong>de</strong>rstand the politics of Congress, much less<br />
that of the Middle East?<br />
Lippmann’s preferred solution was, in essence, to junk <strong>de</strong>mocracy<br />
entirely. He justified this by arguing that the results were what mattered.<br />
Even “if there were a prospect” that people could become sufficiently wellinformed<br />
to govern themselves wisely, he wrote, “it is extremely doubtful<br />
whether many of us would wish to be bothered.” In his first attempt to<br />
20
consi<strong>de</strong>r the issue, in “Liberty and the News” (1920), Lippmann suggested<br />
addressing the problem by raising the status of journalism to that of more<br />
respected professions. Two years later, in “Public Opinion,” he conclu<strong>de</strong>d<br />
that journalism could never solve the problem merely by “acting upon<br />
everybody for thirty minutes in twenty-four hours.” Instead, in one of the<br />
od<strong>de</strong>st formulations of his long career, Lippmann proposed the creation of<br />
“intelligence bureaus,” which would be given access to all the information<br />
they nee<strong>de</strong>d to judge the government’s actions without concerning<br />
themselves much with <strong>de</strong>mocratic preferences or public <strong>de</strong>bate. Just what,<br />
if any, role the public would play in this process Lippmann never<br />
explained.<br />
John Dewey termed “Public Opinion” “perhaps the most effective<br />
indictment of <strong>de</strong>mocracy as currently conceived ever penned,” and he<br />
spent much of the next five years countering it. The result, published in<br />
1927, was an extremely ten<strong>de</strong>ntious, <strong>de</strong>nse, yet important book, titled<br />
“The Public and Its Problems.” Dewey did not dispute Lippmann’s<br />
contention regarding journalism’s flaws or the public’s vulnerability to<br />
manipulation. But Dewey thought that Lippmann’s cure was worse than<br />
the disease. While Lippmann viewed public opinion as little more than the<br />
sum of the views of each individual, much like a poll, Dewey saw it more<br />
like a focus group. The foundation of <strong>de</strong>mocracy to Dewey was less<br />
information than conversation. Members of a <strong>de</strong>mocratic society nee<strong>de</strong>d<br />
to cultivate what the journalism scholar James W. Carey, in <strong>de</strong>scribing the<br />
<strong>de</strong>bate, called “certain vital habits” of <strong>de</strong>mocracy—the ability to discuss,<br />
<strong>de</strong>liberate on, and <strong>de</strong>bate various perspectives in a manner that would<br />
move it toward consensus.<br />
Dewey also criticized Lippmann’s trust in knowledge-based élites. “A class<br />
of experts is inevitably so removed from common interests as to become a<br />
class with private interests and private knowledge,” he argued. “The man<br />
who wears the shoe knows best that it pinches and where it pinches, even<br />
if the expert shoemaker is the best judge of how the trouble is to be<br />
remedied.”<br />
Lippmann and Dewey <strong>de</strong>voted much of the rest of their lives to addressing<br />
the problems they had diagnosed, Lippmann as the archetypal insi<strong>de</strong>r<br />
pundit and Dewey as the prophet of <strong>de</strong>mocratic education. To the <strong>de</strong>gree<br />
that posterity can be said to have <strong>de</strong>clared a winner in this argument, the<br />
future turned out much closer to Lippmann’s i<strong>de</strong>al. Dewey’s confi<strong>de</strong>nce in<br />
<strong>de</strong>mocracy rested in significant measure on his “faith in the capacity of<br />
human beings for intelligent judgment and action if proper conditions are<br />
furnished.” But nothing in his voluminous writings gives the impression<br />
that he believed these conditions—which he <strong>de</strong>fined expansively to inclu<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>mocratic schools, factories, voluntary associations, and, particularly,<br />
newspapers—were ever met in his lifetime. (Dewey died in 1952, at the<br />
age of ninety-two.)<br />
21
The history of the American press <strong>de</strong>monstrates a ten<strong>de</strong>ncy toward<br />
exactly the kind of professionalization for which Lippmann initially argued.<br />
When Lippmann was writing, many newspapers remained committed to<br />
the partisan mo<strong>de</strong>l of the eighteenth- and nineteenth-century American<br />
press, in which editors and publishers viewed themselves as appendages<br />
of one or another political power or patronage machine and slanted their<br />
news offerings accordingly. (Think of Thomas Jefferson and Alexan<strong>de</strong>r<br />
Hamilton battling each other through their competing newspapers while<br />
serving in George Washington’s Cabinet.) The twentieth-century mo<strong>de</strong>l, in<br />
which newspapers strive for political in<strong>de</strong>pen<strong>de</strong>nce and attempt to act as<br />
referees between competing parties on behalf of what they perceive to be<br />
the public interest, was, in Lippmann’s time, in its infancy.<br />
As the profession grew more sophisticated and respected, in part owing to<br />
Lippmann’s example, top reporters, anchors, and editors naturally rose in<br />
status to the point where some came to be consi<strong>de</strong>red the social equals of<br />
the senators, Cabinet secretaries, and C.E.O.s they reported on. Just as<br />
naturally, these same reporters and editors sometimes came to i<strong>de</strong>ntify<br />
with their subjects, rather than with their rea<strong>de</strong>rs, as Dewey had<br />
predicted. Asi<strong>de</strong> from biennial elections featuring smaller and smaller<br />
portions of the electorate, politics increasingly became a business for<br />
professionals and a spectator sport for the great unwashed—much as<br />
Lippmann had hoped and Dewey had feared. Beyond the publication of the<br />
occasional letter to the editor, the role of the rea<strong>de</strong>r was <strong>de</strong>fined as purely<br />
passive.<br />
The Lippmann mo<strong>de</strong>l received its initial challenge from the political right.<br />
Many conservatives regar<strong>de</strong>d the major networks, newspapers, and<br />
newsweeklies—the mainstream media—as liberal arbiters, incapable of<br />
covering without bias the civil-rights movement in the South or Barry<br />
Goldwater’s Presi<strong>de</strong>ntial campaign. They respon<strong>de</strong>d by building think<br />
tanks and media outlets <strong>de</strong>signed both to challenge and to bypass the<br />
mainstream media. The Reagan revolution, which brought conservatives<br />
to power in Washington, had its roots not only in the candidate’s personal<br />
appeal as a “great communicator” but in a <strong>de</strong>ca<strong>de</strong>s-long campaign of<br />
i<strong>de</strong>ological spa<strong>de</strong>work un<strong>de</strong>rtaken in magazines such as William F.<br />
Buckley, Jr.,’s National Review and Norman Podhoretz’s Commentary and<br />
in the pugnacious editorial pages of the Wall Street Journal, edited for<br />
three <strong>de</strong>ca<strong>de</strong>s by Robert Bartley. The rise of what has come to be known<br />
as the conservative “counter-establishment” and, later, of media<br />
phenomena such as Rush Limbaugh, on talk radio, and Bill O’Reilly, on<br />
cable television, can be viewed in terms of a Deweyan community<br />
attempting to seize the reins of <strong>de</strong>mocratic authority and information from<br />
a Lippmann-like élite.<br />
22
A liberal version of the Deweyan community took longer to form, in part<br />
because it took liberals longer to find fault with the media. Until the late<br />
nineteen-seventies, many in the mainstream media did, in fact, exhibit<br />
the “liberal bias” with which conservatives continue to charge them,<br />
regarding their unquestioned belief both in a strong, activist government<br />
and in its moral responsibility to insure the expansion of rights to women<br />
and to ethnic and racial minorities. But a concerted effort to recruit<br />
pundits from the new conservative counter-establishment, coupled with<br />
investment by wealthy right-wing activists and businessmen in an<br />
interlocking web of counter-establishment think tanks, pressure groups,<br />
periodicals, radio stations, and television networks, operated as a kind of<br />
rightward gravitational pull on the mainstream’s reporting and helped to<br />
create a far more sympathetic context for conservative candidates than<br />
Goldwater supporters could have imagined.<br />
Duncan Black, a former economics professor who writes a popular<br />
progressive <strong>blog</strong> un<strong>de</strong>r the name Atrios, explains that he, too, believed in<br />
what he calls “the myth of the liberal media.” He goes on, “But watching<br />
the press’s collective behavior during the Clinton impeachment saga, the<br />
Gore campaign, the post-9/11 era, the run-up to the Iraq war, and the<br />
Bush Administration’s absurd and dangerous claims of executive power<br />
ren<strong>de</strong>red such a belief absurd. Sixty-five per cent of the American public<br />
disapproves of the Bush Administration, but that perspective, even now,<br />
has very little representation anywhere in the mainstream media.”<br />
The birth of the liberal <strong>blog</strong>osphere, with its ability to bypass the big<br />
media institutions and conduct conversations within a like-min<strong>de</strong>d<br />
community, represents a revival of the Deweyan challenge to our<br />
Lippmann-like un<strong>de</strong>rstanding of what constitutes “news” and, in doing so,<br />
might seem to revive the philosopher’s notion of a genuinely <strong>de</strong>mocratic<br />
discourse. The Web provi<strong>de</strong>s a powerful platform that enables the creation<br />
of communities; distribution is frictionless, swift, and cheap. The old<br />
<strong>de</strong>mocratic mo<strong>de</strong>l was a nation of New England towns filled with wellmeaning,<br />
well-informed yeoman farmers. Thanks to the Web, we can all<br />
join in a Deweyan <strong>de</strong>bate on Presi<strong>de</strong>nts, policies, and proposals. All that’s<br />
necessary is a <strong>de</strong>cent Internet connection.<br />
What put the Huffington Post on the map was a series of pieces during the<br />
summer and autumn of 2005, in which Arianna Huffington relentlessly<br />
attacked the military and foreign-affairs reporting of the Times’ Judith<br />
Miller. Huffington was fed by a steady stream of leaks and suggestions<br />
from Times editors and reporters, even though much of the newspaper<br />
world consi<strong>de</strong>red her journalistic cre<strong>de</strong>ntials highly questionable.<br />
The Huffington Post was hardly the first Web site to stumble on the<br />
technique of leveraging the knowledge of its rea<strong>de</strong>rs to challenge the<br />
mainstream media narrative. For example, conservative <strong>blog</strong>gers at sites<br />
23
like Little Green Footballs took pleasure in helping to bring down Dan<br />
Rather after he broadcast dubious documents allegedly showing that<br />
George W. Bush had received special treatment during his service in the<br />
Texas Air National Guard.<br />
Long before the conservatives forced out Dan Rather, a liberal freelance<br />
journalist named Joshua Micah Marshall had begun a site, called Talking<br />
Points Memo, inten<strong>de</strong>d to take stories well beyond where mainstream<br />
newspapers had taken them, often by relying on the voluntary research<br />
and well-timed leaks of an avid rea<strong>de</strong>rship. His site, begun during the<br />
2000 Florida-recount controversy, ultimately spawned several related<br />
sites, which are collectively known as TPM Media, and which are financed<br />
through a combination of rea<strong>de</strong>r donations and advertising. In the<br />
admiring judgment of the Columbia Journalism Review, Talking Points<br />
Memo “was almost single-han<strong>de</strong>dly responsible for bringing the story of<br />
the fired U.S. Attorneys to a boil,” a scandal that ultimately en<strong>de</strong>d with<br />
the resignation of Attorney General Alberto Gonzales and a George Polk<br />
Award for Marshall, the first ever for a <strong>blog</strong>ger. Talking Points Memo also<br />
played a lead role in <strong>de</strong>feating the Bush Social Security plan and in<br />
highlighting Trent Lott’s praise for Strom Thurmond’s 1948 segregationist<br />
Presi<strong>de</strong>ntial campaign. Lott was eventually forced to step down as Senate<br />
Majority <strong>Le</strong>a<strong>de</strong>r.<br />
According to Marshall, “the collaborative aspect” of his site “came about<br />
entirely by acci<strong>de</strong>nt.” His original intention was merely to offer his rea<strong>de</strong>rs<br />
“transparency,” so that his “strong viewpoint” would be distinguishable<br />
from the facts that he presented. Over time, however, he found that the<br />
enormous response that his work engen<strong>de</strong>red offered access to “a huge<br />
amount of valuable information”––information that was not always<br />
available to mainstream reporters, who ten<strong>de</strong>d to <strong>de</strong>al largely with what<br />
Marshall terms “professional sources.” During the Katrina crisis, for<br />
example, Marshall discovered that some of his rea<strong>de</strong>rs worked in the<br />
fe<strong>de</strong>ral government’s climate-and-weather-tracking infrastructure. They<br />
provi<strong>de</strong>d him and the site with reliable reporting available nowhere else.<br />
Marshall’s un<strong>de</strong>niable achievement notwithstanding, traditional newspaper<br />
men and women tend to be unimpressed by the style of journalism<br />
practiced at the political Web sites. Operating on the basis of a Lippmannlike<br />
reverence for insi<strong>de</strong> knowledge and contempt for those who lack it,<br />
many view these sites the way serious fiction authors might view the<br />
“novels” tapped out by Japanese commuters on their cell phones. Real<br />
reporting, especially the investigative kind, is expensive, they remind us.<br />
Aggregation and opinion are cheap.<br />
And it is true: no Web site spends anything remotely like what the best<br />
newspapers do on reporting. Even after the latest round of new cutbacks<br />
and buyouts are carried out, the Times will retain a core of more than<br />
24
twelve hundred newsroom employees, or approximately fifty times as<br />
many as the Huffington Post. The Washington Post and the Los Angeles<br />
Times maintain between eight hundred and nine hundred editorial<br />
employees each. The Times’ Baghdad bureau alone costs around three<br />
million dollars a year to maintain. And while the Huffington Post shares<br />
the benefit of these investments, it shoul<strong>de</strong>rs none of the costs.<br />
Despite the many failures at newspapers, the vast majority of reporters<br />
and editors have <strong>de</strong>voted years, even <strong>de</strong>ca<strong>de</strong>s, to un<strong>de</strong>rstanding the<br />
subjects of their stories. It is hard to name any <strong>blog</strong>gers who can match<br />
the professional expertise, and the reporting, of, for example, the Post ’s<br />
Barton Gellman and Dana Priest, or the Times’ Dexter Filkins and Alissa<br />
Rubin.<br />
In October, 2005, at an advertisers’ conference in Phoenix, Bill Keller<br />
complained that <strong>blog</strong>gers merely “recycle and chew on the news,”<br />
contrasting that with the Times’ emphasis on what he called “a ‘journalism<br />
of verification,’ ” rather than mere “assertion.”<br />
“Bloggers are not chewing on the news. They are spitting it out,” Arianna<br />
Huffington protested in a Huffington Post <strong>blog</strong>. Like most liberal <strong>blog</strong>gers,<br />
she takes exception to the assumption by so many traditional journalists<br />
that their work is superior to that of <strong>blog</strong>gers when it comes to ferreting<br />
out the truth. The ability of <strong>blog</strong>gers to find the flaws in the mainstream<br />
media’s reporting of the Iraq war “highlighted the absurdity of the knee<br />
jerk comparison of the relative credibility of the so-called MSM and the<br />
<strong>blog</strong>osphere,” she said, and went on, “In the run-up to the Iraq war, many<br />
in the mainstream media, including the New York Times, lost their veneer<br />
of unassailable trustworthiness for many rea<strong>de</strong>rs and viewers, and it<br />
became clear that new media sources could be trusted—and in<strong>de</strong>ed are<br />
often much quicker at correcting mistakes than old media sources.”<br />
But Huffington fails to address the parasitical relationship that virtually all<br />
Internet news sites and <strong>blog</strong> commentators enjoy with newspapers. The<br />
Huffington Post ma<strong>de</strong> a gesture in the direction of original reporting and<br />
professionalism last year when it hired Thomas Edsall, a forty-year<br />
veteran of the Washington Post and other papers, as its political editor. At<br />
the time he was approached by the Huffington Post, Edsall said, he felt<br />
that the Post had become “increasingly driven by fear—the fear of<br />
<strong>de</strong>clining rea<strong>de</strong>rship, the fear of losing advertisers, the fear of diminishing<br />
revenues, the fear of being swamped by the Internet, the fear of<br />
irrelevance. Fear drove the paper, from top to bottom, to corrupt the<br />
entire news operation.” Joining the Huffington Post, Edsall said, was akin<br />
to “getting out of jail,” and he has written, ever since, with a sense of<br />
liberation. But such examples are rare.<br />
25
And so even if one agrees with all of Huffington’s jabs at the Times, and<br />
Edsall’s critique of the Washington Post, it is impossible not to won<strong>de</strong>r<br />
what will become of not just news but <strong>de</strong>mocracy itself, in a world in<br />
which we can no longer <strong>de</strong>pend on newspapers to invest their unmatched<br />
resources and professional pri<strong>de</strong> in helping the rest of us to learn,<br />
however imperfectly, what we need to know.<br />
In a recent episo<strong>de</strong> of “The Simpsons,” a cartoon version of Dan Rather<br />
introduced a <strong>de</strong>bate panel featuring “Ron <strong>Le</strong>har, a print journalist from the<br />
Washington Post.” This inspired Bart’s nemesis Nelson to shout, “Haw<br />
haw! Your medium is dying!”<br />
“Nelson!” Principal Skinner admonished the boy.<br />
“But it is!” was the young man’s reply.<br />
Nelson is right. Newspapers are dying; the evi<strong>de</strong>nce of diminishment in<br />
economic vitality, editorial quality, <strong>de</strong>pth, personnel, and the over-all<br />
number of papers is everywhere. What this portends for the future is<br />
complicated. Three years ago, Rupert Murdoch warned newspaper editors,<br />
“Many of us have been remarkably, unaccountably complacent . . . quietly<br />
hoping that this thing called the digital revolution would just limp along.”<br />
Today, almost all serious newspapers are scrambling to adapt themselves<br />
to the technological and community-building opportunities offered by<br />
digital news <strong>de</strong>livery, including individual <strong>blog</strong>s, vi<strong>de</strong>o reports, and “chat”<br />
opportunities for rea<strong>de</strong>rs. Some, like the Times and the Post, will likely<br />
survive this moment of technological transformation in different form,<br />
cutting staff while increasing their <strong>de</strong>pth and presence online. Others will<br />
seek to focus themselves locally. Newspaper editors now say that they<br />
“get it.” Yet traditional journalists are blinkered by their emotional<br />
investment in their Lippmann-like status as insi<strong>de</strong>rs. They tend to dismiss<br />
not only most <strong>blog</strong>osphere-based criticisms but also the messy <strong>de</strong>mocratic<br />
ferment from which these criticisms emanate. The Chicago Tribune<br />
recently felt compelled to shut down comment boards on its Web site for<br />
all political news stories. Its public editor, Timothy J. McNulty, complained,<br />
not without reason, that “the boards were beginning to read like a<br />
community of foul-mouthed bigots.”<br />
Arianna Huffington, for her part, believes that the online and the print<br />
newspaper mo<strong>de</strong>l are beginning to converge: “As advertising dollars<br />
continue to move online—as they slowly but certainly are—HuffPost will be<br />
adding more and more reporting and the Times and Post mo<strong>de</strong>l will<br />
continue with the kinds of reporting they do, but they’ll do more of it<br />
originally online.” She predicts “more vigorous reporting in the future that<br />
will inclu<strong>de</strong> distributed journalism—wisdom-of-the-crowd reporting of the<br />
kind that was responsible for the exposing of the Attorneys General firing<br />
scandal.” As for what may be lost in this transition, she is untroubled: “A<br />
26
lot of reporting now is just piling on the conventional wisdom—with<br />
important stories dying on the front page of the New York Times.”<br />
The survivors among the big newspapers will not be without support from<br />
the nonprofit sector. ProPublica, fun<strong>de</strong>d by the liberal billionaires Herb and<br />
Marion Sandler and hea<strong>de</strong>d by the former Wall Street Journal managing<br />
editor Paul Steiger, hopes to provi<strong>de</strong> the mainstream media with the<br />
investigative reporting that so many have chosen to forgo. The Center for<br />
In<strong>de</strong>pen<strong>de</strong>nt Media, hea<strong>de</strong>d by David Bennahum, a former writer at<br />
Wired, recently hired Jefferson Morley, from the Washington Post, and<br />
Allison Silver, a former editor at both the Los Angeles Times and the New<br />
York Times, to oversee a Web site called the Washington In<strong>de</strong>pen<strong>de</strong>nt. It’s<br />
one of a family of news-<strong>blog</strong>ging sites meant to pick up some of the slack<br />
left by <strong>de</strong>clining staffs in local and Washington reporting, with the hope of<br />
expanding everywhere. But to imagine that philanthropy can fill all the<br />
gaps arising from journalistic cutbacks is wishful thinking.<br />
And so we are about to enter a fractured, chaotic world of news,<br />
characterized by superior community conversation but a <strong>de</strong>ci<strong>de</strong>dly<br />
diminished level of first-rate journalism. The transformation of<br />
newspapers from enterprises <strong>de</strong>voted to objective reporting to a cluster of<br />
communities, each engaged in its own kind of “news”––and each with its<br />
own set of “truths” upon which to base <strong>de</strong>bate and discussion––will mean<br />
the loss of a single national narrative and agreed-upon set of “facts” by<br />
which to conduct our politics. News will become increasingly “red” or<br />
“blue.” This is not utterly new. Before Adolph Ochs took over the Times, in<br />
1896, and issued his famous “without fear or favor” <strong>de</strong>claration, the<br />
American scene was dominated by brazenly partisan newspapers. And the<br />
news cultures of many European nations long ago embraced the notion of<br />
competing narratives for different political communities, with individual<br />
newspapers reflecting the views of each faction. It may not be entirely<br />
coinci<strong>de</strong>ntal that these nations enjoy a level of political engagement that<br />
dwarfs that of the United States.<br />
The transformation will also engen<strong>de</strong>r serious losses. By providing what<br />
Bill Keller, of the Times, calls the “serendipitous encounters that are hard<br />
to replicate in the quicker, rea<strong>de</strong>r-driven format of a Web site”—a<br />
difference that he compares to that “between a clock and a calendar”—<br />
newspapers have helped to <strong>de</strong>fine the meaning of America to its citizens.<br />
To choose one date at random, on the morning of Monday, February 11th,<br />
I picked up the paper-and-ink New York Times on my doorstep, and, in<br />
addition to the stories one could have found anywhere—Obama <strong>de</strong>feating<br />
Clinton again and the Bush Administration’s <strong>de</strong>cision to seek the <strong>de</strong>ath<br />
penalty for six Guantánamo <strong>de</strong>tainees—the front page featured a unique<br />
combination of articles, stories that might disappear from our collective<br />
consciousness were there no longer any institution to generate and<br />
publish them. These inclu<strong>de</strong>d a report from Nairobi, by Jeffrey Gettleman,<br />
27
on the effect of Kenya’s ethnic violence on the country’s middle class; a<br />
dispatch from Doha, by Tamar <strong>Le</strong>win, on the growth of American<br />
university campuses in Qatar; and, in a scoop that was featured on the<br />
Huffington Post’s politics page and excited much of the <strong>blog</strong>osphere that<br />
day, a story, by Michael R. Gordon, about the existence of a study by the<br />
RAND Corporation which offered a harsh critique of the Bush<br />
Administration’s performance in Iraq. The juxtaposition of these disparate<br />
topics forms both a baseline of knowledge for the paper’s rea<strong>de</strong>rs and a<br />
picture of the world they inhabit. In “Imagined Communities” (1983), an<br />
influential book on the origins of nationalism, the political scientist<br />
Benedict An<strong>de</strong>rson recalls Hegel’s comparison of the ritual of the morning<br />
paper to that of morning prayer: “Each communicant is well aware that<br />
the ceremony he performs is being replicated simultaneously by<br />
thousands (or millions) of others of whose existence he is confi<strong>de</strong>nt, yet of<br />
whose i<strong>de</strong>ntity he has not the slightest notion.” It is at least partially<br />
through the “imagined community” of the daily newspaper, An<strong>de</strong>rson<br />
writes, that nations are forged.<br />
Finally, we need to consi<strong>de</strong>r what will become of those people, both at<br />
home and abroad, who <strong>de</strong>pend on such journalistic enterprises to keep<br />
them safe from various forms of torture, oppression, and injustice.<br />
“People do awful things to each other,” the veteran war photographer<br />
George Guthrie says in “Night and Day,” Tom Stoppard’s 1978 play about<br />
foreign correspon<strong>de</strong>nts. “But it’s worse in places where everybody is kept<br />
in the dark.” Ever since James Franklin’s New England Courant started<br />
coming off the presses, the daily newspaper, more than any other<br />
medium, has provi<strong>de</strong>d the information that the nation nee<strong>de</strong>d if it was to<br />
be kept out of “the dark.” Just how an Internet-based news culture can<br />
spread the kind of “light” that is necessary to prevent terrible things,<br />
without the armies of reporters and photographers that newspapers have<br />
traditionally employed, is a question that even the most ar<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>mocrat<br />
in John Dewey’s tradition may not wish to see answered.<br />
8) Livre : le numérique à l'assaut <strong>de</strong> l'édition<br />
(<strong><strong>Le</strong>s</strong> <strong>Echos</strong>, 13 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> éditeurs ne savent pas encore précisément quand le marché<br />
décollera. Mais tous se préparent activement à l'arrivée du<br />
numérique. Après les industries musicale et cinématographique,<br />
c'est l'ensemble <strong>de</strong> la chaîne du livre qui va <strong>de</strong>voir s'adapter à la<br />
dématérialisation <strong>de</strong>s contenus. Simple évolution ? Ou plus<br />
probablement révolution ? Cette industrie, dont les acteurs se<br />
retrouvent à partir <strong>de</strong> <strong>de</strong>main au Salon du livre <strong>de</strong> Paris, va <strong>de</strong>voir<br />
trouver <strong>de</strong> nouveaux modèles.<br />
28
<strong>Le</strong> jour <strong>de</strong> son lancement aux Etats-Unis, le 19 novembre 2007, le lecteur<br />
<strong>de</strong> livres numériques d'Amazon, baptisé « Kindle », a été épuisé en<br />
quelques heures. L'effet <strong>de</strong> curiosité pour la petite machine blanche<br />
capable d'emmagasiner l'équivalent d'une bibliothèque <strong>de</strong> 200 livres a<br />
joué à plein. Ce d'autant que, sur Amazon.com, <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> titres<br />
étaient prêts à être téléchargés. Pour l'instant, l'américain se montre peu<br />
disert au sujet <strong>de</strong>s chiffres <strong>de</strong> vente <strong>de</strong> son Kindle. Et, en apparence, le<br />
marché n'a pas changé en profon<strong>de</strong>ur... Mais toute l'édition mondiale se<br />
prépare désormais d'arrache-pied à l'émergence du livre dématérialisé.<br />
Aux yeux <strong>de</strong>s différents maillons <strong>de</strong> la chaîne, le moment où le lecteur<br />
découvrira sur une tablette électronique le <strong>de</strong>rnier Michael Connelly se<br />
rapproche...<br />
Nouvelle concurrence pour les libraires<br />
L'avenir s'annonce plutôt sombre pour la librairie en France. La Toile est<br />
en effet en train <strong>de</strong> s'imposer comme un acteur majeur dans le circuit <strong>de</strong><br />
la distribution <strong>de</strong> livres. En 2007, sa part <strong>de</strong> marché est estimée à 5 %.<br />
Mais, avec un taux moyen <strong>de</strong> progression supérieur à 25 % par an, la<br />
vente en ligne d'ouvrages <strong>de</strong>vrait très vite s'approcher du niveau atteint<br />
aux Etats-Unis, soit 12 %. <strong><strong>Le</strong>s</strong> grands gagnants ? Pour l'instant,<br />
l'américain Amazon, Fnac.com ou Alapage, filiale <strong>de</strong> France Télécom. <strong><strong>Le</strong>s</strong><br />
libraires, en revanche, risquent à terme <strong>de</strong> se retrouver affaiblis par cette<br />
concurrence nouvelle, qui empiète sur leur territoire et commence à<br />
utiliser leur arme <strong>de</strong> prédilection, le conseil. Ainsi, grâce à <strong>de</strong>s algorithmes<br />
puissants, un site comme Amazon.fr indique-t-il désormais lui aussi au<br />
lecteur <strong>de</strong> « L'Elégance du hérisson », <strong>de</strong> Muriel Barbery, d'autres romans<br />
susceptibles <strong>de</strong> lui plaire.<br />
Autre défi pour la librairie : l'arrivée du livre téléchargeable. Sur ce<br />
marché également, <strong>de</strong> nouveaux acteurs ont commencé à s'installer.<br />
Mobipocket, la librairie en ligne d'Amazon, Cyberlibris ou Numilog. Pour ne<br />
rien arranger, avec la dématérialisation, les libraires risquent <strong>de</strong> perdre<br />
l'une <strong>de</strong> leur principale protection : la loi Lang sur le prix unique du livre.<br />
En effet, elle ne s'applique pas aux supports numériques. Sur Numilog,<br />
par exemple, on peut télécharger « <strong>Le</strong> Théâtre <strong>de</strong>s opérations », <strong>de</strong><br />
Maurice Dantec, pour 6,40 euros, soit 12,66 euros <strong>de</strong> moins que son prix<br />
dans la collection blanche <strong>de</strong> Gallimard. Et pourtant, le taux <strong>de</strong> TVA est <strong>de</strong><br />
19,6 % pour le fichier numérique, contre 5,5 % pour le livre papier. La<br />
Commission sur le livre numérique confiée par la ministre <strong>de</strong> la Culture,<br />
Christine Albanel, à Bruno Patino, prési<strong>de</strong>nt du Mon<strong>de</strong> interactif, <strong>de</strong>vra<br />
sans doute dire s'il convient ou non <strong>de</strong> légiférer pour harmoniser les<br />
régimes du livre papier et du livre dématérialisé. Face au nouveau<br />
paysage qui s'esquisse, les libraires cherchent à organiser une riposte.<br />
Avec quelles chances <strong>de</strong> succès ? Aux Etats-Unis, la chaîne Barnes and<br />
Noble vend désormais <strong>de</strong>s livres papier et <strong>de</strong>s livres dématérialisés...<br />
29
L'offre gratuite <strong>de</strong>s bibliothèques virtuelles<br />
Grâce aux bibliothèques numériques, l'internaute aura bientôt accès<br />
gratuitement aux millions d'oeuvres tombées dans le domaine public, à<br />
savoir celles dont les auteurs sont morts <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> soixante-dix ans.<br />
« <strong>Le</strong> numérique affranchit <strong>de</strong> la contrainte physique. Depuis Valparaiso,<br />
par exemple, il sera possible <strong>de</strong> consulter tous les textes libres <strong>de</strong> droits<br />
<strong>de</strong> la Bibliothèque nationale <strong>de</strong> France », reconnaît Bruno Racine, le<br />
prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la BNF. L'énorme trafic qu'une telle disponibilité est<br />
susceptible <strong>de</strong> générer a donné <strong>de</strong>s idées à <strong>de</strong>s géants comme Microsoft<br />
ou le moteur <strong>de</strong> recherche Google. Face au comportement mercenaire <strong>de</strong><br />
ce <strong>de</strong>rnier, qui scanne sans autorisation <strong>de</strong>s textes protégés, les éditeurs<br />
sont allés en justice. Pour le reste, ils évaluent mal encore l'impact sur les<br />
ventes <strong>de</strong> classiques <strong>de</strong> toute cette offre dématérialisée et gratuite. D'un<br />
clic, « <strong><strong>Le</strong>s</strong> Mémoires d'outre-tombe », <strong>de</strong> Chateaubriand, « La Chartreuse<br />
<strong>de</strong> Parme », <strong>de</strong> Stendhal, ou « <strong><strong>Le</strong>s</strong> Essais », <strong>de</strong> Montaigne, pourront être<br />
téléchargés dans leur intégralité. « <strong><strong>Le</strong>s</strong> éditions récentes <strong>de</strong> ces textes,<br />
annotés et commentés, elles, ne seront pas accessibles gratuitement »,<br />
relativise Bruno Racine.<br />
Sans attendre, ce <strong>de</strong>rnier avance ses pions pour bâtir Gallica 2, une<br />
bibliothèque virtuelle proposant à la fois le fonds numérisé <strong>de</strong> la BNF et<br />
<strong>de</strong>s oeuvres d'éditeurs encore sous droits. <strong><strong>Le</strong>s</strong> plus grands noms français<br />
<strong>de</strong> la profession ont accepté <strong>de</strong> participer à l'expérience, qui va être<br />
menée pendant un an, et au travers <strong>de</strong> laquelle un internaute pourra<br />
accé<strong>de</strong>r, moyennant finances, à <strong>de</strong>s textes protégés. Pour les quelque<br />
2.000 à 3.000 titres qui seront apportés par les éditeurs, tous les modèles<br />
existants, <strong>de</strong> la vente à la location, seront proposés. Un test qui permettra<br />
<strong>de</strong> mesurer l'attractivité <strong>de</strong> cette offre nouvelle.<br />
Des ouvrages imprimés à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />
Pour les éditeurs, c'est le premier grand changement annoncé :<br />
bouleversant toutes les techniques traditionnelles, le numérique va<br />
favoriser le développement <strong>de</strong> l'impression à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Une véritable<br />
innovation grâce à laquelle les maisons pourront exploiter les livres <strong>de</strong><br />
leur fonds sans limite dans le temps. Jusqu'à présent, un éditeur n'avait<br />
pas intérêt financièrement à réimprimer un ouvrage s'il n'était pas certain<br />
d'écouler dans un délai raisonnable l'intégralité du tirage, soit entre 1.500<br />
et 2.000 exemplaires. De ce fait, <strong>de</strong>s milliers d'ouvrages n'ont jamais été<br />
réédités. « Au risque pour l'éditeur <strong>de</strong> perdre les droits sur l'ouvrage «<strong>de</strong><br />
jure» », explique l'un d'entre eux. Avec <strong>de</strong>s prix en baisse régulière,<br />
l'impression à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> va remédier à cette situation. <strong>Le</strong> public <strong>de</strong>vrait<br />
y trouver son compte : le lecteur <strong>de</strong> Marcel Jouhan<strong>de</strong>au, qui, s'il voulait<br />
avoir une chance <strong>de</strong> mettre la main sur les « Journaliers », épuisé dans le<br />
commerce, <strong>de</strong>vait s'en remettre aux bouquinistes ou à <strong>de</strong>s sites<br />
spécialisés dans les livres introuvables, sera désormais assuré <strong>de</strong> se le<br />
30
procurer, neuf qui plus est. La notion même <strong>de</strong> rupture <strong>de</strong> stock<br />
disparaîtra. <strong><strong>Le</strong>s</strong> auteurs <strong>de</strong>vraient en être les grands bénéficiaires, puisque<br />
leurs titres se vendront beaucoup plus longtemps. En revanche, les sites<br />
spécialisés dans les livres épuisés risquent <strong>de</strong> souffrir <strong>de</strong> cette évolution.<br />
Seule ombre au tableau pour les maisons qui ont pignon sur rue : avec le<br />
développement <strong>de</strong> l'impression à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, le secteur <strong>de</strong> l'autoédition<br />
va prospérer. La Toile a déjà suscité <strong>de</strong> multiples initiatives.<br />
Emblématique, le site Lulu.com a réservé cette année un espace au Salon<br />
du livre <strong>de</strong> Paris. « Avec 80.000 manuscrits publiés en 2007 en France,<br />
nous sommes <strong>de</strong>venus les premiers éditeurs français », claironne son PDG<br />
fondateur, Bob Young.<br />
<strong>Le</strong> marketing migre sur Internet<br />
Pour toutes les maisons <strong>de</strong> Saint-Germain-<strong>de</strong>s-Prés, la Toile est <strong>de</strong>venue<br />
l'un <strong>de</strong>s lieux où promouvoir un ouvrage, un auteur. Depuis plusieurs<br />
années déjà, Internet capte une partie <strong>de</strong> la vie littéraire. Entre les <strong>blog</strong>s -<br />
outils mo<strong>de</strong>rnes <strong>de</strong> la critique -, les clubs <strong>de</strong> lecture virtuels et les revues<br />
spécialisées, un espace culturel nouveau s'est développé dans lequel se<br />
sont engouffrés les éditeurs. « Une partie <strong>de</strong> nos dépenses <strong>de</strong> promotion<br />
et <strong>de</strong> marketing a migré vers le Net », reconnaît Stéphanie Van Duin,<br />
directrice <strong>de</strong> la stratégie et du développement d'Hachette Livre. Des sites<br />
comme Babelio, le réseau social <strong>de</strong>stiné aux amateurs <strong>de</strong> littératures en<br />
tous genres, alimentent le « buzz » sur Internet. Et se révèlent <strong>de</strong><br />
puissants générateurs <strong>de</strong> trafic pour les sites officiels <strong>de</strong>s éditeurs. Toutes<br />
les maisons en possè<strong>de</strong>nt désormais un. Elles y présentent leurs<br />
nouveautés, y publient <strong>de</strong>s interviews <strong>de</strong> leurs auteurs, quand elles ne<br />
renvoient pas vers leurs sites. La plupart <strong>de</strong>s « plumes » d'Albin Michel<br />
ont ainsi créé leur espace sur le Net, qui le plus souvent permet à<br />
l'internaute d'engager un dialogue avec eux. Par ailleurs, le « teasing »<br />
sur la Toile est couramment utilisé lors du lancement d'un ouvrage. Ou,<br />
plus simplement, pour faire découvrir un livre. Sur le Web <strong>de</strong> la collection<br />
Pocket (groupe Editis), on peut ainsi lire gratuitement le premier chapitre<br />
du roman « L'Art <strong>de</strong> la joie », <strong>de</strong> Goliarda Sapienza. Un avant-goût qui<br />
doit inciter l'internaute à passer à l'étape suivante : la comman<strong>de</strong> d'un clic<br />
chez l'un <strong>de</strong>s cyberlibraires référencés par le site.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> éditeurs en voie <strong>de</strong> conversion<br />
<strong>Le</strong> numérique a déjà fait <strong>de</strong>s ravages dans au moins un secteur <strong>de</strong><br />
l'édition française, les encyclopédies. Gratuite, l'encyclopédie en ligne<br />
Wikipédia a balayé <strong>de</strong>s marques aussi connues qu'Universalis ou le Quid.<br />
Même le célèbre Petit Larousse s'interroge sur son avenir. Heureusement,<br />
les effets <strong>de</strong> la dématérialisation ne sont pas aussi dévastateurs pour tous<br />
les pans du marché. L'édition médicale et juridique ainsi que le livre<br />
technique et scientifique, grâce à d'importants efforts d'adaptation, ont<br />
31
mieux négocié leur virage. Ils proposent désormais <strong>de</strong>s contenus<br />
numériques. Et le passage au Net s'accompagne <strong>de</strong> nouvelles formes <strong>de</strong><br />
rémunérations : vente d'ouvrages à l'unité, à la page, formules<br />
d'abonnement, etc. Enfin, <strong>de</strong> leur côté, les livres scolaires et universitaires<br />
ont commencé à migrer sur le Net.<br />
N'empêche, même chez les grands éditeurs américains tels Harper &<br />
Collins ou Random House, le chiffre d'affaires réalisé avec <strong>de</strong>s contenus<br />
dématérialisés est marginal : moins <strong>de</strong> 1 % pour l'instant. En France,<br />
l'existence <strong>de</strong> centaines <strong>de</strong> milliers <strong>de</strong> titres disponibles sous forme<br />
numérique n'a pas jusqu'ici créé un marché. A un horizon mal défini<br />
encore, la percée du livre téléchargeable paraît pourtant inévitable. Des<br />
domaines comme les ouvrages pratiques (livres <strong>de</strong> cuisine, <strong>de</strong> bricolage),<br />
les gui<strong>de</strong>s touristiques, mais aussi la ban<strong>de</strong> <strong>de</strong>ssinée, que les Japonais et<br />
les Coréens dévorent déjà sur téléphone mobile, n'y échapperont pas. «<br />
Une <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s difficultés est <strong>de</strong> faire payer pour tous ces contenus »,<br />
reconnaît Stéphanie Van Duin. Restent la littérature, le livre pour la<br />
jeunesse ou les essais qui, ensemble, représentent un bon tiers du chiffre<br />
d'affaires <strong>de</strong> l'édition tricolore. Un jour, les amoureux du papier se<br />
convertiront-ils à l'écran pour lire Patricia Cornwell ou Simone Veil ? Aux<br />
Etats-Unis, Amazon fait ce pari et propose près <strong>de</strong> 100.000 livres à<br />
télécharger à <strong>de</strong>s prix variant <strong>de</strong> 80 cents pour une pièce <strong>de</strong> théâtre à<br />
quelques dollars pour <strong>de</strong>s classiques <strong>de</strong> la littérature, et jusqu'à 10 dollars<br />
pour un best-seller récent !<br />
Encore sceptiques il y a <strong>de</strong>ux ans, les acteurs du marché hexagonal se<br />
préparent à ce bouleversement, convaincus que l'échéance se rapproche.<br />
« <strong>Le</strong> livre numérique décollera le jour où un support <strong>de</strong> lecture<br />
convaincant aura émergé sur le marché », pronostique Gilles Haéri, chez<br />
Flammarion. Dans une belle unanimité, les éditeurs estiment que le livre<br />
numérique ne supprimera pas le papier. En revanche, son arrivée va<br />
obliger les maisons à une gran<strong>de</strong> créativité pour inventer <strong>de</strong>s formats<br />
nouveaux : ouvrages avec bonus, comme pour les DVD, formats courts,<br />
etc.<br />
Trois menaces pour l'industrie<br />
<strong>Le</strong> sujet est tabou, ou presque, mais chacun y pense. La dématérialisation<br />
du livre risque <strong>de</strong> bousculer l'économie <strong>de</strong>s éditeurs français. Trois<br />
menaces pèsent sur eux. Première d'entre elles : la déstabilisation <strong>de</strong> la<br />
distribution. <strong><strong>Le</strong>s</strong> grands groupes sont tous à la tête d'importantes platesformes<br />
<strong>de</strong> distribution, très rentables - c'est par exemple plus <strong>de</strong> 35 % <strong>de</strong><br />
la marge opérationnelle d'Editis -, car elles perçoivent <strong>de</strong>s commissions<br />
sur l'acheminement du livre en librairie, et sur son retour en cas <strong>de</strong><br />
mévente. Or, avec le livre dématérialisé, il n'y a plus <strong>de</strong> stockage ni <strong>de</strong><br />
transport. D'où un manque à gagner prévisible pour les éditeurs. Il faudra<br />
cependant <strong>de</strong>s distributeurs numériques pour assurer la gestion <strong>de</strong>s<br />
32
fichiers. Un <strong>de</strong>s enjeux est <strong>de</strong> savoir qui gérera la relation avec le client :<br />
l'éditeur ? <strong>Le</strong> libraire ? <strong>Le</strong> fournisseur <strong>de</strong> technologie ?<br />
Deuxième menace : le piratage. Dès lors que le marché du livre<br />
numérique existera bel et bien, le fléau du téléchargement illicite sera<br />
inévitable, quels que soient les systèmes <strong>de</strong> protection imaginés. Avec, à<br />
la clef, une perte <strong>de</strong> chiffre d'affaires pour les maisons.<br />
Enfin, troisième menace pour les éditeurs : le brouillage <strong>de</strong> la relation<br />
avec les auteurs. A court terme, l'objectif est <strong>de</strong> clarifier à qui<br />
appartiennent les droits numériques <strong>de</strong>s oeuvres publiées sous forme<br />
papier. Sont-ils propriété à parité <strong>de</strong> l'auteur et <strong>de</strong> l'éditeur, ou seulement<br />
celle <strong>de</strong> l'auteur ? <strong><strong>Le</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux écoles s'affrontent. Autre sujet à venir : sur<br />
quelles bases les auteurs <strong>de</strong>s oeuvres écrites collectivement (les manuels<br />
scolaires, par exemple) seront-ils rémunérés ? Ces questions sont d'autant<br />
plus sensibles que l'édition française veut éviter à tout prix le scénario du<br />
pire : celui où <strong>de</strong>s écrivains à succès déci<strong>de</strong>raient un beau jour <strong>de</strong> se<br />
passer d'éditeur pour publier directement leurs textes sur la Toile...<br />
9) Texte sur écran<br />
(Courrier International, 13 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
Après le cinéma, la photographie et la musique, est-ce au tour du livre<br />
d’entrer dans la révolution numérique ? L’usage d’Internet et <strong>de</strong>s<br />
nouvelles technologies oblige à repenser les pratiques d’écriture, d’édition<br />
et <strong>de</strong> lecture. C’est l’objet <strong>de</strong> notre dossier.<br />
Des écrivains débutants n’ayant pas la moindre chance d’être publiés<br />
trouvent désormais leur public sur le Net et finissent souvent par attirer<br />
l’attention <strong>de</strong>s éditeurs par ce biais. Quant aux romanciers reconnus, ils<br />
sont toujours plus nombreux- à l’instar <strong>de</strong> la Prix Nobel Elfrie<strong>de</strong> Jelinek – à<br />
investir le web pour en explorer les possibilités <strong>de</strong> création et d’interaction<br />
avec les lecteurs, posant les jalons d’une « littérature numérique ».<br />
Grâce aux progrès <strong>de</strong> l’encre électronique, <strong>de</strong> nouveaux appareils <strong>de</strong><br />
lecture portables enfin en mesure <strong>de</strong> concurrencer le papier ont vu le jour<br />
ces <strong>de</strong>rniers mois. La tablette Kindle, lancée en novembre 2007 aux Etats-<br />
Unis par la librairie en ligne Amazon – qui en a vendu près <strong>de</strong> 10 000<br />
exemplaires-, est aujourd’hui en rupture <strong>de</strong> stock. Et, au Japon, la lecture<br />
sur écran est à l’origine d’un <strong>de</strong>s phénomènes culturels les plus étonnants<br />
<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rnières années, le keitai shosetsu, roman écrit et diffusé sur<br />
téléphone portable. Bonne lecture.<br />
La fin du livre n’est pas pour <strong>de</strong>main<br />
Blogs, papier électronique, librairies en ligne, impression à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>…<br />
Autant <strong>de</strong> nouveautés qui bouleversent l’économie du livre et modifient les<br />
rapports entre ses principaux acteurs.<br />
33
D’aussi loin que s’en souviennent les observateurs du fait littéraire, il y a<br />
toujours eu <strong>de</strong>s Cassandre pour prédire la fin du livre : la radio allait<br />
supplanter la lecture ; ensuite ce fut le cinéma, puis la télévision, et les<br />
jeux vidéo. Aujourd’hui, nous dit-on, c’est l’objet livre lui-même qui est<br />
appelé à sombrer dans l’obsolescence. Mais le livre se d ébat comme un<br />
beau diable. <strong><strong>Le</strong>s</strong> ventes continuent <strong>de</strong> progresser. Certains ouvrages (la<br />
série Harry Potter, les autobiographies <strong>de</strong> célébrités) battent même<br />
records. Et, la fiction littéraire, ce genre qu’on dit démodé et élitiste<br />
continue <strong>de</strong> trouver un vaste électorat. Cette résilience du livre n’est<br />
guère surprenante au vu <strong>de</strong>s avantages qu’il présente comme moyen <strong>de</strong><br />
divertissement : on peut l’emporter avec soi, le lire au lit, feuilleter ses<br />
pages dans tous les sens, sans avoir à se soucier d’une batterie qui se<br />
décharge ou d’une défaillance électronique.<br />
On s’intéresse moins, en revanche, au livre comme source d’information.<br />
Dans ce domaine, les nouvelles technologies ont une inci<strong>de</strong>nce<br />
considérable sur les modèles traditionnels <strong>de</strong> l’édition. <strong><strong>Le</strong>s</strong> ventes <strong>de</strong><br />
dictionnaires et <strong>de</strong> gui<strong>de</strong>s pratiques ont chuté <strong>de</strong> 40 % <strong>de</strong>puis 2003, et la<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong> faiblit également pour les cartes, atlas et encyclopédies. Dans le<br />
secteur encore moins glamour <strong>de</strong> l’édition scientifique et technique, la<br />
révolution technologique est d’ores et déjà en marche. <strong><strong>Le</strong>s</strong> ventes<br />
électroniques du groupe d’édition professionnelle Reed Elsevier ont atteint<br />
3,7 milliards <strong>de</strong> dollars en 2006. « En 2000, explique son PDG Crispi Davis<br />
au quotidien The Times, Reed Elsevier était avant tout un éditeur papier,<br />
qui fournissait du contenu par le biais <strong>de</strong> livres, <strong>de</strong> revues et <strong>de</strong><br />
magazines. En 2004, nous étions déjà largement passés à la diffusion en<br />
ligne <strong>de</strong> ces mêmes contenus. »<br />
On comprend aisément pourquoi les ouvrages professionnels et <strong>de</strong><br />
référence se prêtent bien à la diffusion numérique et pas le <strong>de</strong>rnier roman<br />
D’Ian McEwan ( du moins dans l’état actuel <strong>de</strong>s choses). En octobre 2006,<br />
Sony a lancé en fanfare son Rea<strong>de</strong>r, le lecteur <strong>de</strong> livres électroniques, le<br />
plus avancé du moment. Il repose sur la technologie <strong>de</strong> l’encre et du<br />
papier électroniques, qui offre un plus grand confort <strong>de</strong> lecture que les<br />
écrans normaux rétro éclairés ; il peut stocker <strong>de</strong>s centaines d’ouvrages et<br />
a une longue autonomie. En novembre 2007, la librairie en ligne Amazon<br />
a lancé à son tour aux Etats-Unis son propre appareil <strong>de</strong> lecture, le Kindle.<br />
Pour l’instant leurs ventes restent mo<strong>de</strong>stes mais, avec le temps, ces<br />
appareils <strong>de</strong> lecture vont se perfectionner et seront <strong>de</strong> plus en plus prisés,<br />
et il est plus que probable que les lecteurs du futur trouveront tout naturel<br />
<strong>de</strong> lire sur un écran. Au Japon, il y a <strong>de</strong>s auteurs spécialisés dans la fiction<br />
à lire sur les téléphones portables. Un roman écrit sous le nom <strong>de</strong> plume<br />
<strong>de</strong> Chaco a ainsi été téléchargé plus d’un million <strong>de</strong> fois. Ces expériences<br />
<strong>de</strong>vraient toutefois rester un phénomène éditorial marginal encore<br />
quelque temps.<br />
Si les nouvelles technologies ne bouleversent pas encore nos habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />
lecture, elles transforment déjà le secteur qui y pourvoit. La manifestation<br />
34
la plus visible en est la croissance du commerce électronique <strong>de</strong> livres.<br />
Amazon représente aujourd’hui 10 % <strong>de</strong>s ventes <strong>de</strong> livres en Gran<strong>de</strong>-<br />
Bretagne. Ce site propose un nombre <strong>de</strong> titres comme personne n’en a<br />
jamais proposé. Il a aussi, avec la gran<strong>de</strong> distribution (dont les ventes <strong>de</strong><br />
livres ont progressé <strong>de</strong> 70 % entre 2003 et 2007), fait perdre <strong>de</strong>s ventes<br />
aux chaînes et aux librairies indépendantes. Et, toujours avec les<br />
supermarchés, il a contribué à l’essor d’une culture <strong>de</strong> prix réduit qui<br />
creuse l’écart entre le nombre record d’exemplaires vendus par les bestsellers<br />
et celui <strong>de</strong> titres dit <strong>de</strong> « midlist », qui mettent plus <strong>de</strong> temps à<br />
trouver un public.<br />
<strong>Le</strong> chiffre d’affaires colossal que génèrent ces livres à prix réduit a<br />
accentué la concurrence pour en acheter les droits et les commercialiser.<br />
Cela s’est traduit par une concentration du secteur, qui a rendu la<br />
concurrence plus ru<strong>de</strong> encore. Aujourd’hui, seuls les plus gros éditeurs<br />
peuvent débourser les avances qu’il faut verser pour ces titres et se payer<br />
les budgets <strong>de</strong> marketing qui vont avec ; et seuls les plus gros<br />
distributeurs peuvent se permettre <strong>de</strong> pratiquer les rabais auxquels le<br />
consommateur s’attend désormais. Ces distributeurs sont Amazon et les<br />
supermarchés. La chaîne <strong>de</strong> librairies américaine Bor<strong>de</strong>rs a ainsi annoncé<br />
début 2007 qu’elle mettait en vente ses magasins au Royaume-Uni, et<br />
même Waterstone’s, le plus grand libraire britannique spécialisé,<br />
commence à faire grise mine.<br />
Mais, dans le secteur <strong>de</strong> l’édition, chaque tendance (ou presque)<br />
s’accompagne d’une autre qui la contrebalance. Tandis que le secteur<br />
poursuit sa concentration, l’optimisme prévaut chez <strong>de</strong>s éditeurs<br />
indépendants et dynamiques comme Atlantic Books et Profile Books,<br />
convaincus <strong>de</strong> pouvoir proposer <strong>de</strong>s titres dont les géants <strong>de</strong> l’édition ne<br />
font aucun cas, obnubilés comme ils le sont par le marché <strong>de</strong> masse. Et<br />
même si nombre <strong>de</strong> libraires indépendants ont mis la clé sous la porte,<br />
beaucoup d’autres n’ont pas <strong>de</strong> souci à se faire.<br />
<strong>Le</strong> progrès technologique donne lieu à un phénomène semblable. Si les<br />
coûts d’édition d’auteurs comme Dawn French (actrice comique très<br />
célèbre en Gran<strong>de</strong>-Bretagne) s’envolent (l’éditeur Random House aurait<br />
payé 2 millions <strong>de</strong> libres 2,64 millions d’euros pour publier ses mémoires<br />
a paraître cette année), diffuser un livre ne coûte en revanche presque<br />
plus rien. Il fut un temps où ceux qui aspiraient à <strong>de</strong>venir écrivains et qui<br />
ne trouvaient pas d’éditeur <strong>de</strong>vaient débourser jusqu'à 6 000 livres (un<br />
peu moins <strong>de</strong> 8000 euros) pour publier à compte d’auteur ; aujourd’hui,<br />
ils peuvent mettre leur texte sur Lulu.com, site spécialisé dans<br />
l’autoédition en ligne, et cela ne leur coûte pas un sou. Et, grâce au<br />
numérique, les coûts d’impression et <strong>de</strong> reliure ont eux aussi chuté.<br />
Par ailleurs, <strong>de</strong>s sites comme MySpace ou YouTube offrent un moyen <strong>de</strong><br />
faire <strong>de</strong> la promotion à moindre coût, comme s’en sont rendu compte les<br />
gros éditeurs. La biographie Kate Williams évoquait ainsi <strong>de</strong>rnièrement ses<br />
prouesses sur MySpace, où elle échange avec ses lecteurs potentiels à la<br />
fois sous sa propre i<strong>de</strong>ntité et sous celle <strong>de</strong> Lady Emma Hamilton (la<br />
35
maîtresse <strong>de</strong> l’amiral Nelson), à qui elle a consacré son livre England’s<br />
Mistress. Dans la même veine, un clip faisait la promotion <strong>de</strong> Quirkology,<br />
le livre du psychologue britannique Richard Wiseman, s’est classé en 2007<br />
parmi les vidéos les plus regardées sur YouTube.<br />
Et puis, il y a bien sûr le <strong>blog</strong>, la forme d’autoédition la plus en vogue. Si<br />
certains lui reprochent d’être souvent un moyen <strong>de</strong> plus pour empêcher<br />
les auteurs <strong>de</strong> gagner <strong>de</strong> l’argent, il arrive aussi qu’il débouche sur la<br />
signature d’un contrat d’édition. L’éditeur The Friday Project est ainsi<br />
spécialisé dans les livres tirés <strong>de</strong> textes publiés en ligne, et certaines<br />
<strong>blog</strong>ueuses très lues, comme Petite Anglaise, Wife in the North et Belle <strong>de</strong><br />
Jour, se sont vu verser <strong>de</strong>s avances conséquentes par <strong>de</strong>s éditeurs<br />
traditionnels.<br />
Mais il y a plus significatif que ces signatures <strong>de</strong> contrats : c’est l’effet<br />
qu’ont sur la culture littéraire les <strong>blog</strong>s et autres formes <strong>de</strong> commentaires<br />
sur Internet. <strong>Le</strong> discours culturel n’est plus élaboré exclusivement par un<br />
petit groupe <strong>de</strong> critiques professionnels et d’auteurs écrivant dans les<br />
quotidiens et les revues ; d’autres acteurs exercent désormais une<br />
influence. <strong><strong>Le</strong>s</strong> rubriques littéraires n’en ont pas encore pris acte. Ainsi,<br />
quotidiens et revues se sont largement fait l’écho <strong>de</strong> la biographie récente<br />
d’Edith Warton par Hermione <strong>Le</strong>e. À juste titre, car il s’agit d’un ouvrage<br />
important. Mais il ne s’est probablement pas vendu à plus <strong>de</strong> quelques<br />
milliers d’exemplaires. <strong>Le</strong> marché dictant sa loi dans l’édition comme<br />
partout ailleurs, pendant combien <strong>de</strong> temps encore le contenu <strong>de</strong>s pages<br />
littéraires pourra - t - il être si peu en phase avec ce qui se vend ? Sans<br />
compter que ces lecteurs qui souhaitent lire <strong>de</strong>s critiques éclectiques et<br />
écrites <strong>de</strong> façon plus accessible sont aussi ceux que les journaux<br />
courtisent à coups <strong>de</strong> clubs du livre et invitent à poster <strong>de</strong>s commentaires<br />
en ligne. <strong>Le</strong> passage à une critique littéraire moins élitiste semble<br />
inéluctable.<br />
La numérisation <strong>de</strong> l’écrit est la plus gran<strong>de</strong> révolution à l’oeuvre dans<br />
l’édition, mais pas tant parce qu’elle permet la lecture à l’écran. À l’heure<br />
actuelle, environ 150 000 nouveaux titres paraissent chaque année en<br />
Gran<strong>de</strong>-Bretagne, et ce chiffre est en progression. Beaucoup <strong>de</strong> ces<br />
ouvrages ne sont <strong>de</strong>stinés qu’à un public extrêmement ciblé. Pourtant<br />
tous sont imprimés sur papier, reliés, expédiés dans <strong>de</strong>s entrepôts puis<br />
aux librairies – avant d’en repartir très souvent pour aller au pillon. C’est<br />
une activité qui implique beaucoup <strong>de</strong> gaspillage, mais jusqu’ici c’était le<br />
seul moyen d’assurer la variété qui fait la prospérité <strong>de</strong> l’édition.<br />
Eviter à tout prix le sort <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> disques<br />
Tout cela est appelé à changer. Comme nous l’avons dit, le fossé entre les<br />
livres à succès et les autres se creuse. <strong><strong>Le</strong>s</strong> grands éditeurs et libraires<br />
voudront toujours publier et vendre <strong>de</strong>s auteurs comme Dawn French ou<br />
(le célèbre biologiste darwinien ) Richard Dawkins, car la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> est<br />
36
plus forte que jamais. Ils voudront aussi continuer à publier et vendre <strong>de</strong>s<br />
ouvrages s'adressent à un public plus restreint pour toute une série <strong>de</strong><br />
raisons (avoir un large vivier <strong>de</strong> talents, attirer une clientèle variée...).<br />
Mais ils vont chercher <strong>de</strong> nouvelles façons <strong>de</strong> diffuser ces titres. <strong><strong>Le</strong>s</strong><br />
technologies d'impression à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sont en passe d'atteindre un<br />
niveau <strong>de</strong> qualité qui permettra aux lecteurs <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que <strong>de</strong>s livres<br />
soient imprimées spécialement pour eux et <strong>de</strong> les obtenir en quelques<br />
minutes, le temps d'une courte attente dans une librairie. Une évolution<br />
qui pourrait bien sonner le glas <strong>de</strong> gros libraires aux stocks importants,<br />
qui sont déjà à la peine. <strong>Le</strong> lecteur n'aura plus la possibilité <strong>de</strong> fureter<br />
dans les rayons, ni <strong>de</strong> manipuler les livres avant <strong>de</strong> les acheter, mais il<br />
aura accès à un choix <strong>de</strong> titres plus vaste que jamais.<br />
Avec l'arrivée <strong>de</strong>s technologies d'impression à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et, dans une<br />
moindre mesure, du livre électronique, le contrôle <strong>de</strong>s contenus<br />
numériques s'annonce comme la gran<strong>de</strong> bataille <strong>de</strong> l'édition ces<br />
prochaines années. <strong><strong>Le</strong>s</strong> éditeurs ont vu ce qui est arrivé aux maisons <strong>de</strong><br />
disques une fois que la diffusion électronique <strong>de</strong> la musique s'est<br />
répandue – et ils tiennent à ne pas connaître le même sort. Beaucoup<br />
prennent déjà <strong>de</strong>s mesures, tel Bloomsbury, qui a lancé la construction<br />
d'un « entrepôt numérique », comme l'ont fait avant lui Harper Collins et<br />
Random House. Mais ils sont confrontés à un rival potentiel, Google, déjà<br />
attelé au projet pour le moins titanesque <strong>de</strong> mettre en ligne toute<br />
l'information <strong>de</strong> la planète. <strong><strong>Le</strong>s</strong> premiers résultats sont visibles sur<br />
« Google Recherche <strong>de</strong> livres ». A terme, l'objectif <strong>de</strong> Google est <strong>de</strong> bâtir<br />
une bibliothèque numérique contenant tous les livres publiés; pour<br />
l'heure, il en aurait numerisé plus d'un million.<br />
Certains éditeurs se méfient <strong>de</strong>s ambitions <strong>de</strong> Google. Nigel Newton, PDG<br />
<strong>de</strong> Bloomsbury, y voit une politique d'« annexion absolument indécente »<br />
et craint que Google ne s'érige en diffuseur concurrent <strong>de</strong> textes<br />
numériques sur lesquels il s'arrogerait son propre droit d'auteur. Pour<br />
l'heure, le moteur <strong>de</strong> recherche se contente <strong>de</strong> fournir <strong>de</strong> courts extraits<br />
encore protégés par le droit d'auteur. Mais si les fichiers numériques lui<br />
appartiennent, pourquoi ne se jugerait-il pas autorisé à l'avenir à diffuser<br />
<strong>de</strong>s extraits plus longs, voire l'intégralité <strong>de</strong> ces oeuvres ? Google aurait<br />
affirmé qu'il sera le titulaire <strong>de</strong>s droits d'auteur sur les fichiers numériques<br />
qu'il produit (information qu'il n'a jamais confirmée ni infirmée).<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> années à venir ne seront pas faciles pour l'industrie du livre. Beaucoup<br />
d'éditeurs n'ont pas encore trouvé le modèle qui leur permettra <strong>de</strong> gagner<br />
<strong>de</strong> l'argent avec la fourniture <strong>de</strong> contenus en ligne, et ne savent toujours<br />
pas comment ils s'adapteront à la distribution électronique <strong>de</strong> leurs titres<br />
qui marchent le mieux. <strong><strong>Le</strong>s</strong> libraires, eux, constatent déjà que les<br />
changements induits par les nouvelles technologies condamnent les<br />
gran<strong>de</strong>s librairies, où les livres qui s'écoulent lentement sont aussi ceux<br />
qui occupent le plus <strong>de</strong> place. Quant au livre lui-même, les nouvelles<br />
technologies ne l'ont pas mis en danger mais l'ont renforcé.<br />
37
10) <strong><strong>Le</strong>s</strong> quatorze qualités que j’attends d’un e-book<br />
(Courrier international, 13 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
Avec beaucoup d’humour et un peu <strong>de</strong> mauvaise foi, un journaliste<br />
britannique raconte pourquoi il n’est pas encore prêt à adopter le<br />
livre électronique.<br />
N’allez pas imaginer que je suis un <strong>de</strong> ces réacs ronchons qui font preuve<br />
d’un fétichisme irrationnel à l’égard <strong>de</strong> l’objet livre. Bien au contraire !<br />
Dans l’espoir <strong>de</strong> hâter l’avènement <strong>de</strong> l’excitante révolution du livre<br />
électronique, je liste ci-<strong>de</strong>ssous les caractéristiques minimales que <strong>de</strong>vra<br />
possé<strong>de</strong>r un lecteur <strong>de</strong> livre électronique pour avoir du succès. Lui<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r qu’il ait les mêmes fonctionnalités que le livre papier est une<br />
exigence somme toute raisonnable. Voici donc à quoi ressemblera le livre<br />
électronique du futur :<br />
1. Il disposera d’une source d’énergie inépuisable et n’aura jamais<br />
besoin d’être rechargé.<br />
2. Sa lisibilité sera aussi bonne que celle <strong>de</strong> la page imprimée. ( Non,<br />
Amazon, vraiment aussi bonne que la page imprimée !)<br />
3. Il <strong>de</strong>vra pouvoir résister à du vin ou à du café renversés, à<br />
l’exposition au soleil, à l’eau <strong>de</strong> mer, et tomber en morceaux tout en<br />
restant parfaitement lisible.<br />
4. On <strong>de</strong>vra pouvoir y griffonner <strong>de</strong>s annotations ou <strong>de</strong>s gribouillis<br />
dans la marge, au crayon <strong>de</strong> papier ou au stylo noir à pointe fibre.<br />
(NB : Ecrire dans la marge à l’ai<strong>de</strong> d’un clavier pouce minable n’est<br />
pas une solution satisfaisante.)<br />
5. On <strong>de</strong>vra pouvoir en feuilleter les pages afin <strong>de</strong> se faire une idée<br />
rapi<strong>de</strong> du fil argumentatif ou narratif du texte.<br />
6. On <strong>de</strong>vra pouvoir déchirer un coin <strong>de</strong> page pour y noter son numéro<br />
<strong>de</strong> téléphone (ou celui <strong>de</strong> quelqu’un d’autre).<br />
7. <strong>Le</strong> titre <strong>de</strong> ce que l’on est en train <strong>de</strong> lire <strong>de</strong>vra apparaître <strong>de</strong> façon<br />
très visible, afin qu’on puisse faire étalage <strong>de</strong> son érudition ou <strong>de</strong><br />
son sens <strong>de</strong> l’humour dans les cafés et les transports publics.<br />
8. Ce <strong>de</strong>vra être un bel objet, pas un machin hi<strong>de</strong>ux. (Note à<br />
l’attention d’Amazon : par pitié, la prochaine fois, essayez <strong>de</strong><br />
débaucher <strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> chez Sony ou Apple.)<br />
9. <strong><strong>Le</strong>s</strong> livres qu’il contiendra <strong>de</strong>vront continuer à être conçus par <strong>de</strong>s<br />
typographes et <strong>de</strong>s graphistes afin <strong>de</strong> satisfaire notre plaisir<br />
esthétique.<br />
10. On <strong>de</strong>vra pouvoir encore prêter <strong>de</strong>s livres ou en donner à ses amis,<br />
ou bien en prendre et en abandonner dans ces bibliothèques <strong>de</strong><br />
cafés <strong>de</strong> bord <strong>de</strong> mer alimentées par les clients.<br />
11. On <strong>de</strong>vra pouvoir utiliser l’e-book comme support stable pour<br />
rouler une cigarette ou toute autre gâteries à base <strong>de</strong> feuilles sans<br />
craindre que les débris n’endommagent la carte mère.<br />
38
12. Lorsqu’on on recevra la nouvelle édition mise à jour du dictionnaire<br />
Oxford <strong>de</strong> philosophie, on <strong>de</strong>vra pouvoir utiliser l’édition précé<strong>de</strong>nte<br />
pour rehausser l’enceinte gauche sur son bureau.<br />
13. L’e-book <strong>de</strong>vra, en outre, faire office <strong>de</strong> tapette à insectes et <strong>de</strong><br />
chapeau improvisé. A la plage, posé sur le visage, il fera un parfait<br />
pare-soleil.<br />
14. On <strong>de</strong>vra pouvoir lancer violemment un livre débile comme « Print<br />
Is Dead » [ le texte imprimé est mort ], <strong>de</strong> Jeff Gomez, sans pour<br />
autant se priver <strong>de</strong> la possibilité <strong>de</strong> lire d’autres livres. Voilà. Juste<br />
Quatorze petites conditions à remplir pour que nous puissions<br />
renoncer au papier. Ce n’est pas trop <strong>de</strong>mandé, non ?<br />
11) Écrire une histoire à 1500 mains<br />
(Courrier International, 13 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
Une expérience <strong>de</strong> roman collaboratif menée en 2007 par l’éditeur<br />
britannique Penguin a tourné en eau <strong>de</strong> boudin. La preuve que<br />
l’imagination a besoin <strong>de</strong> rigueur et <strong>de</strong> structure.<br />
La créativité collective est un concept séduisant. Si l’imagination d’une<br />
seule personne est capable <strong>de</strong> produire une œuvre d’art, que peuvent<br />
donner plusieurs cerveaux travaillant <strong>de</strong> concert ? On retrouve sur<br />
Internet plusieurs phénomènes fondés sur le savoir collectif, le plus<br />
célèbre étant l’encyclopédie en ligne Wikipédia, dont le contenu est crée et<br />
modifié par <strong>de</strong>s milliers d’internautes. Et pourtant, alors que les<br />
expériences littéraires abon<strong>de</strong>nt sur Internet, aucune œuvre <strong>de</strong> fiction [en<br />
anglais] n’avait encore été écrite par la collectivité <strong>de</strong>s internautes avant<br />
que quelques petits futés <strong>de</strong> la maison d’édition britannique Penguin<br />
n’aient l’idée <strong>de</strong> s’associer à <strong>de</strong>s spécialistes <strong>de</strong>s nouveaux médias <strong>de</strong><br />
l’université De Monfort, à <strong>Le</strong>icester [au Royaume-Uni].<br />
Utilisant la métho<strong>de</strong> Wikipédia, ils ont lancé en février 2007 un<br />
« wikiroman » intitulé A Million Penguins. Tout le mon<strong>de</strong> pouvait y<br />
apporter sa contribution, tout le mon<strong>de</strong> pouvait le modifier – c’était une<br />
expérience d’écriture collective sans restriction aucune. <strong>Le</strong> projet s’est<br />
étalé sur plusieurs semaines, et on peut lire le résultat sur<br />
amillionpenguins.com.<br />
Jeremy Ettinghausen, responsable <strong>de</strong>s éditions numériques chez Penguins,<br />
a été le premier à repérer le filon. « ça semblait être une bonne idée car<br />
on n’arrête pas <strong>de</strong> parler <strong>de</strong> toutes ces communautés qui se créent sur<br />
Internet. Nous voulions voir s’il était possible d’appliquer cette mise en<br />
commun <strong>de</strong>s idées et <strong>de</strong>s technologies à la rédaction d’un roman. » Mais<br />
Ettinghausen a eu la sagesse <strong>de</strong> ne pas en attendre trop : « La qualité ne<br />
dépend pas <strong>de</strong> moi. Elle dépend <strong>de</strong>s gens qui écrivent. » Il reconnaît<br />
toutefois qu’il est rarement impressionné par ce qu’il lit sur Internet.<br />
John Sutherland, professeur émérite <strong>de</strong> littérature anglaise au University<br />
College <strong>de</strong> Londres, est plus désabusé. <strong>Le</strong> roman collectif, « ça ne marche<br />
39
jamais », assène-t-il, rappelant plusieurs expériences ratées datent<br />
d’avant Internet.<br />
Indépendamment <strong>de</strong> leurs attentes, les initiateurs du projet n’ont pu<br />
qu’être surpris.<br />
Des centaines <strong>de</strong> bonnes idées mais aucune cohérence<br />
L’écho rencontré par ce wikiman, qui a attiré près <strong>de</strong> 1500 contributeurs.<br />
<strong>Le</strong> résultat esr un texte fleuve assez surréaliste et partant dans tous les<br />
sens. A un moment, l’histoire se divise en « roman A » et « roman B », le<br />
site propose <strong>de</strong>s liens vers <strong>de</strong>s fins alternatives. Personnages et intrigues<br />
apparaissent et disparaissent dans une masse <strong>de</strong> textes parfois<br />
incompréhensibles.<br />
Kate Pullinger, une romancière qui anime un atelier d’écriture et a<br />
collaboré au projet, souligne son caractère novateur : « C’est la première<br />
fois que j’étais confrontée à un projet d’écriture collective ouvert au<br />
mon<strong>de</strong> entier. » Mais le résultat vaut-il quelque chose ? « Mon sentiment,<br />
c’est que cela n’a aucune valeur en tant que livre. Sans vouloir être snob,<br />
je ne vois pas comment les gens auraient envie <strong>de</strong> lire ça », juge Scott<br />
Pack, un ancien <strong>de</strong> la chaîne <strong>de</strong> librairies Waterstone qui dirige la maison<br />
d’édition en ligne The Friday Project. Difficile <strong>de</strong> dire le contraire.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> possibilités infinies du net ne font pas forcément éclore <strong>de</strong>s romans.<br />
L’imagination a besoin <strong>de</strong> discipline ? <strong>de</strong> limites et <strong>de</strong> structures. Dans le<br />
wikiroman, <strong>de</strong> nombreuses imaginations travaillent en même temps, mais<br />
pas ensemble. Il y a <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> bonnes idées et <strong>de</strong> personnages<br />
convaincants, mais aucune cohérence. Comme chacun pouvait apporter sa<br />
contribution, petite ou gran<strong>de</strong>, il s’est trouvé un trop grand nombre <strong>de</strong><br />
personnes un petit bout sans songer à l’ensemble.<br />
Des utilisations plus structurées d’Internet peuvent donner <strong>de</strong> meilleurs<br />
résultats, par exemple quand <strong>de</strong>s écrivains proposent <strong>de</strong>s ébauches <strong>de</strong><br />
textes pour avoir les réactions d’experts ou d’internautes. <strong>Le</strong> chercheur<br />
Charles <strong>Le</strong>adbeater, spécialiste <strong>de</strong>s innovations, a mis son <strong>de</strong>rnier livre,<br />
We-think, en ligne et autorisé les lecteurs à y apporter ajouts et<br />
modifications. Sur le site youwriteon.com, les premiers chapitres <strong>de</strong> livres<br />
écrits par <strong>de</strong>s auteurs débutants sont notés par les lecteurs. Un<br />
professionnel <strong>de</strong> l’écriture fait mois la critique <strong>de</strong>s cinq chapitres les mieux<br />
notés, et les <strong>de</strong>ux textes les plus apprécies sont publiés chaque année.<br />
Désormais, il n’y a pas <strong>de</strong> texte que les gens ne puissent commenter,<br />
modifier, récrire à leur façon ou auquel ils ne puissent imaginer une suite.<br />
Cette créativité foisonnante peut parfois prendre un tour bizarre, mais<br />
c’est aussi quelque chose <strong>de</strong> salutaire et stimulant.<br />
40
12) Cinq outils <strong>de</strong>rnier cri à savoir maîtriser<br />
(Stratégies, 27 <strong>mars</strong> <strong>2008</strong>)<br />
L'entreprise s'ouvre aux nouveaux usages <strong>de</strong> ses salariés et <strong>de</strong> ses<br />
clients. Avec <strong>de</strong>s supports qui visent à créer du lien, mais qu'il faut<br />
apprendre à utiliser à bon escient.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> usages privés ont fini par influencer le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'entreprise.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> salariés et les consommateurs sont en effet <strong>de</strong>venus <strong>de</strong> grands<br />
utilisateurs, à titre personnel, <strong>de</strong> <strong>blog</strong>s, <strong>de</strong> vidéos ou du téléphone mobile.<br />
Appliqués à l'entreprise, ces outils s'appuyant sur le modèle collaboratif<br />
servent à créer du lien et du dialogue. Résultat, les budgets <strong>de</strong><br />
nombreuses agences d'édition se partagent à présent entre 70 % pour le<br />
papier et 30 % pour les nouveaux médias. Et ce n'est qu'un début.<br />
Nicolas Cheyrouze, directeur associé <strong>de</strong> <strong>l'agence</strong> Because, met toutefois<br />
les marques en gar<strong>de</strong> : « Il ne faut pas penser sa communication<br />
éditoriale en termes <strong>de</strong> support, mais en termes <strong>de</strong> contenu. Ce <strong>de</strong>rnier<br />
doit rester au cœur du dispositif <strong>de</strong> communication. Peu importe sur quels<br />
médias il sera décliné. » Un refrain repris en chœur par l'ensemble <strong>de</strong>s<br />
agences <strong>de</strong> communication éditoriale. « Avant <strong>de</strong> s'intéresser aux outils,<br />
il faut d'abord penser à ce que l'on a à dire, au message <strong>de</strong> la marque.<br />
Et pour cela, il faut d'abord l'écrire », ajoute par exemple Olivier Breton,<br />
directeur <strong>de</strong> <strong>l'agence</strong> All Contents. La charte éditoriale remplace<br />
désormais la charte graphique et influence le discours <strong>de</strong> l'entreprise en<br />
interne comme en externe. Tour d'horizon <strong>de</strong>s nouveaux outils <strong>de</strong><br />
communication éditoriale.<br />
<strong>Le</strong> <strong>blog</strong><br />
Premier avantage pour un usage professionnel : un <strong>blog</strong> d'entreprise ne<br />
coûte pas cher. Il permet aussi <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rniser l'image <strong>de</strong> la marque. La<br />
banque Accord a ainsi récemment tenté l'expérience. Son objectif : «<br />
Créer une communauté <strong>de</strong> passionnés <strong>de</strong> cartes bancaires », explique<br />
Édouard –Rencker, PDG <strong>de</strong> Sequoia, qui a également développé <strong>de</strong>s <strong>blog</strong>s<br />
internes pour La Poste et –Bouygues Construction, à l'instar <strong>de</strong> My SFR, le<br />
<strong>blog</strong> interne collaboratif lancé par SFR (lire page 62). Autre point fort du<br />
<strong>blog</strong> : sa simplicité d'usage, qui en fait une sorte d'Internet pour les nuls.<br />
Certains patrons français se sont laissé tenter par ce nouveau canal <strong>de</strong><br />
communication, souvent avec succès. Comme Michel-Édouard <strong>Le</strong>clerc, qui<br />
tient régulièrement son <strong>blog</strong>, De quoi je me MEL. En 2005, Guillaume<br />
Pepy, alors numéro <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> la SNCF, lançait le sien, accessible aux<br />
cheminots <strong>de</strong>puis l'intranet <strong>de</strong> l'entreprise publique. Seul vraie contrainte :<br />
le patron ou l'entreprise doit –accepter <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong>s commentaires<br />
critiques. « Il ne faut pas en avoir peur car tout cela se modère. En<br />
s'ouvrant aux commentaires, les entreprises permettent <strong>de</strong> casser le<br />
schéma unique d'une communication <strong>de</strong>scendante, <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong><br />
l'entreprise vers les salariés », estime Édouard Rencker. Mais publier<br />
41
égulièrement une note ou un article est un exercice astreignant. Car pour<br />
que le <strong>blog</strong> fonctionne, il faut l'alimenter –régulièrement.<br />
La web-TV<br />
Cela fait longtemps que la vidéo a du succès dans la sphère <strong>de</strong><br />
l'entreprise. En diminuant le temps nécessaire à sa réalisation et le coût<br />
<strong>de</strong> production, le Web l'a rendue plus accessible. Habitués à regar<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s<br />
vidéos sur You Tube ou Daily Motion, les salariés sont <strong>de</strong>venus<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong>urs. <strong>Le</strong> groupe BNP Paribas a ainsi mis au point Starlight, un<br />
journal TV interne diffusé en trois langues (français, anglais et italien). Un<br />
ren<strong>de</strong>z-vous bimestriel adressé aux 150 000 collaborateurs du groupe.<br />
Audi a également innové avec myaudi.fr, un site privatif pour les clients<br />
<strong>de</strong> la marque. Il s'agit concrètement <strong>de</strong> quatre chaînes TV en ligne<br />
(sports, <strong>de</strong>sign, cinéma et actualité <strong>de</strong> l'entreprise). « La mondialisation a<br />
accéléré le besoin, pour les grands groupes, d'outils leur permettant <strong>de</strong><br />
parler instantanément à toutes leurs équipes disséminées sur la planète »,<br />
constate Yannick <strong>Le</strong> Bourdonnec, directeur général <strong>de</strong> <strong>l'agence</strong> Verbe<br />
(Publicis).<br />
La web-TV est aussi un excellent moyen <strong>de</strong> mettre en valeur les métiers<br />
<strong>de</strong> l'entreprise. C'est ce qu'a choisi <strong>de</strong> faire Ubisoft en réalisant <strong>de</strong>s<br />
reportages en interne sous l'impulsion <strong>de</strong> <strong>l'agence</strong> Textuel (TBWA).<br />
Accenture, elle, s'apprête à diffuser début avril une web-TV, réalisée avec<br />
Entrecom, à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s directions <strong>de</strong>s services informatiques (DSI).<br />
« <strong>Le</strong> métier <strong>de</strong>s DSI subit <strong>de</strong> profonds changements, justement sous<br />
l'impulsion <strong>de</strong>s nouvelles technologies. Nous voulions les ai<strong>de</strong>r à vivre<br />
cette mutation », explique Caroline Tanguy, directrice marketing et<br />
communication chez Accenture. My DSI TV balaiera peut-être les<br />
<strong>de</strong>rnières réticences <strong>de</strong> ces services quant au développement <strong>de</strong>s<br />
nouveaux médias dans l'entreprise. « Il y a encore un gros travail à faire<br />
auprès d'eux, mais aussi <strong>de</strong>s directions générales, pour les convaincre <strong>de</strong><br />
l'utilité <strong>de</strong>s outils multimédias dans l'entreprise », remarque Xavier<br />
Cazard, directeur associé d'Entrecom. Cela va d'ailleurs <strong>de</strong> pair avec le<br />
renouvellement du matériel informatique. Ainsi, beaucoup <strong>de</strong> salariés ne<br />
disposent pas encore d'un ordinateur muni d'une carte son.<br />
L’intranet 2.0<br />
Vidéos, <strong>de</strong>rniers posts du <strong>blog</strong> <strong>de</strong> l'entreprise, tchats internes... Bienvenue<br />
dans l'ère <strong>de</strong> l'intranet 2.0. « Pour sortir <strong>de</strong> l'intranet 1.0, il faut désormais<br />
créer <strong>de</strong>s ren<strong>de</strong>z-vous avec ses salariés », estime François Vogel,<br />
responsable du développement nouveaux médias chez Textuel. Cela<br />
n'empêche pas <strong>de</strong> conserver sur ce portail interne les informations<br />
essentielles à la vie <strong>de</strong> l'entreprise. Exemple réussi d'intranet nouvelle<br />
génération : My News, du groupe L'Oréal. « La marque voulait instaurer<br />
un dialogue permanent entre ses collaborateurs autour <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers<br />
42
événements <strong>de</strong> la planète L'Oréal », précise Alain Roussel, associé <strong>de</strong><br />
<strong>l'agence</strong> La Chose, qui a mené ce lourd projet à bien. <strong><strong>Le</strong>s</strong> responsables<br />
<strong>de</strong> communication alimentent <strong>de</strong> façon autonome le contenu éditorial du<br />
site. <strong>Le</strong> plus <strong>de</strong> My News ? Chaque salarié est symbolisé par un avatar.<br />
« Attention toutefois à ne pas basculer dans la surinformation, ce qui<br />
rendrait votre intranet illisible. L'éditorialiser reste nécessaire », souligne<br />
Éric Camel, <strong>de</strong> <strong>l'agence</strong> <strong>Angie</strong>.<br />
<strong>Le</strong> réseau social<br />
Un Facebook interne pour mieux communiquer au sein <strong>de</strong> l'entreprise ?<br />
L'idée peut sembler pertinente. Xavier Cazard, <strong>de</strong> <strong>l'agence</strong> Entrecom,<br />
confirme : « La <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sur les réseaux sociaux est toute récente, mais<br />
elle va croissant. » <strong>Le</strong> souhait <strong>de</strong>s entreprises est, par ce biais, <strong>de</strong> faire<br />
communiquer plus facilement les métiers entre eux. Because vient par<br />
exemple tout juste <strong>de</strong> lancer pour un client un mini-Facebook fédérant<br />
une communauté <strong>de</strong> 1 200 personnes. « Ce projet fera office <strong>de</strong> test pour<br />
nous. Ce qui est sûr, c'est que l'on est désormais loin du simple annuaire<br />
en ligne », souligne Nicolas Cheyrouze, <strong>de</strong> Because.<br />
<strong>Le</strong> wiki<br />
À la différence d'un <strong>blog</strong>, un wiki est un site écrit et géré par les<br />
internautes eux-mêmes. L'exemple le plus célèbre est bien sûr<br />
l'encyclopédie en ligne Wikipédia. Cet espace <strong>de</strong> partage d'information<br />
peut aussi servir la communication <strong>de</strong>s marques, en interne comme en<br />
externe. « Ce n'est pas un outil adapté à toutes les entreprises.<br />
Il est surtout pertinent pour <strong>de</strong>s marques référentes dans leur secteur »,<br />
avertit François Vogel, <strong>de</strong> Textuel. Ou pour <strong>de</strong>s marques qui fédèrent une<br />
importante communauté. Comme Rip Curl, qui a lancé en 2006<br />
wikiri<strong>de</strong>rs.com, un outil à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s passionnés <strong>de</strong> glisse. Pour ses<br />
clients tentés par l'expérience, Textuel propose ainsi l'appui d'un<br />
« manager <strong>de</strong> communauté » pour animer l'outil, clé du succès du wiki.<br />
13) <strong>Le</strong> son, un nouvel élément d'expérience sensorielle sur le Net<br />
(<strong><strong>Le</strong>s</strong> <strong>Echos</strong>, 18 avril <strong>2008</strong>)<br />
Emotion. <strong>Le</strong> son est à la Toile ce que le goût est à la gastronomie. Avec<br />
les images irréprochables, c'est le nouvel enjeu <strong>de</strong>s sites <strong>de</strong> marque les<br />
plus pointus du moment. Celui d'Hermès, là encore, innove, avec un<br />
orchestre dont chaque instrument permet <strong>de</strong> reproduire le son d'un <strong>de</strong>s<br />
outils <strong>de</strong> l'artisan façonnier. Libre à l'internaute <strong>de</strong> composer sa<br />
symphonie en sélectionnant ses préférés. De même, l'image <strong>de</strong> la vitrine<br />
<strong>de</strong> la boutique <strong>de</strong> New York s'accompagne du bruit <strong>de</strong>s sirènes <strong>de</strong> police<br />
caractéristiques <strong>de</strong> Manhattan ou celle <strong>de</strong> la carte <strong>de</strong> postale du Taj Mahal<br />
laisse percevoir l'imperceptible frémissement <strong>de</strong> l'eau.<br />
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Plus amusant : les fermetures Eclair d'une pochette en cuir jouent à « zip<br />
et zap » en s'ouvrant et se fermant dans un joyeux bruit. « C'est un peu<br />
comme si l'on faisait ce que l'on ne s'autoriserait pas dans un magasin »,<br />
s'amuse Menehould <strong>de</strong> Bazelaire, directrice du patrimoine culturel<br />
d'Hermès.<br />
<strong><strong>Le</strong>s</strong> professionnels <strong>de</strong>s sites Web sont formels : « L'essentiel est <strong>de</strong> rester<br />
dans l'émotion tout en délivrant un message hyperprécis », souligne Ilan<br />
Haddad, « sound <strong>de</strong>signer » chez Duke, agence conseil en stratégie<br />
Internet dotée d'un studio son. Ainsi, pour le joailler Van Cleef, <strong>l'agence</strong> a<br />
créé <strong>de</strong>s mélodies que l'on découvre par le biais d'une boîte à musique, et<br />
sur le site <strong>de</strong> McDonald's, elle s'est servie du son comme levier comique<br />
pour rendre le produit plus attrayant. Ainsi chaque sauce est<br />
accompagnée d'un style musical, du R'N'B pour le fromage, du rock pour<br />
le poivre, etc. « <strong>Le</strong> type <strong>de</strong> son correspond à ce que les jeunes écoutent,<br />
pour maintenir le lien entre la cible et la marque », ajoute Branislav Peric,<br />
directeur <strong>de</strong> clientèle chez Duke. L'importance prise par la musique et les<br />
sites <strong>de</strong> vidéo comme YouTube ou MySpace auprès <strong>de</strong>s jeunes y sont bien<br />
sûr pour quelque chose. Mais pas seulement. « Sur Internet, les individus<br />
font <strong>de</strong>s choses utiles, s'informent, parlent avec <strong>de</strong>s amis, donc il est très<br />
important <strong>de</strong> bien rester dans la réalité. Un son ne doit pas être gratuit, il<br />
faut offrir quelque chose <strong>de</strong> vrai », poursuit Ilan Haddad. Ainsi à un clic<br />
droit <strong>de</strong>vra répondre un son à droite <strong>de</strong> l'écran, s'il s'agit d'un événement<br />
important le volume <strong>de</strong>vra être en conséquence assez fort, ou<br />
inversement, enfin les graves proviennent plutôt du haut <strong>de</strong> l'écran et les<br />
aigus du bas, comme dans un orchestre traditionnel. Autant <strong>de</strong> subtilités<br />
qui participent à la cohérence du discours.<br />
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