forcez la chance ! Gros sandres : - FOX Rage

Carnassiers
Gros sandres :
forcez
la chance !
Texte : J.-M. Brison
Photos : J.-M. Brison, F. de Greef et P. Neuville
10 Le Pêcheur Belge - Avril 2012

S’il y a un bien un carnassier d’eau douce au portrait mystique qui se voit affubler
de nombreux qualificatifs diabolisant sa personnalité et son comportement, c’est bien
le sandre…
Considérons les poissons « trophée » de cette espèce, dont les mensurations dépassent
les 90 cm (et pouvant exceptionnellement atteindre les 110 cm) pour des
poids excédant les 10 kg. La capture d’un de ces spécimens communément appelés
« gros sandres » constitue sans aucun doute l’objectif principal de tout pêcheur de
sandres digne de ce nom.
De nombreuses théories, stratégies ou
autres conseils visant à favoriser la prise
de ces spécimens imposants foisonnent
dans les écrits et sur le web. Malgré cela,
et à ma grande satisfaction d’ailleurs, la
pêche n’étant pas une science exacte, il est
toujours aussi téméraire pour un pêcheur
de proclamer avant sa journée de pêche :
« Aujourd’hui, je vais prendre un gros
sandre ! »
En effet, de nombreux pêcheurs, dont
je fais partie d’ailleurs, ayant pourtant tout
mis en œuvre pour augmenter leurs chances
de capturer un ou
plusieurs sandres
de belle taille,
se sont
« cassé les dents » et sont rentrés bredouille
de ces journées dédiées à la traque des gros
sandres.
Je ne vais pas ici, comme d’aucun, faire
l’apogée d’une marque de leurre, d’attractant,
de sondeur ou encore d’une gamme
de cannes bien particulière ; car selon moi,
la capture de gros sandres relève davantage
d’un ensemble de critères inhérents
à plusieurs facteurs bien plus subtils que le
matériel utilisé… Toutefois, comme le dit le
dicton : « on ne tue pas une mouche avec
un canon » ; il est donc primordial et nécessaire
de s’équiper d’un matériel adapté, sans
pour autant tomber dans l’exagération, sous
peine de réduire à néant ses chances de leurrer
ne fusse qu’un sandre de modeste taille.
L’analyse du milieu
Le biotope, aussi appelé milieu de vie,
est constitué de 5 éléments qui interagissent
entre eux à différents niveaux et qui ont une
influence directe sur les êtres vivants. Les
poissons n’y échappent pas. Bien que l’équilibre
au sein de chaque biotope soit unique,
on y retrouve immanquablement ces 5 éléments
indispensables à la vie que sont l’eau,
l’air, le sol, la lumière et la température.
L’influence du biotope sur le comportement
des êtres vivants qui y évoluent est un
des principaux critères à prendre en compte
pour tenter de déterminer le meilleur moment,
voire la période la plus propice à la
capture de gros spécimens. Il va falloir jongler
avec ces éléments et se baser sur les
expériences concrètes d’autrui, ou sur ses
propres expériences passées, afin de se
constituer une sorte de vade-mecum reprenant
les paramètres mesurables au cours
desquels des prises de belle taille ont été
répertoriées. Au fur et à mesure de l’évolution
de vos statistiques sur ces éléments clés,
vous allez réaliser que, bien qu’il existe toujours
une part de hasard dans la pratique de
la pêche, la conjugaison de plusieurs critères
similaires dans une période donnée, tels
que la température et la teinte de l’eau, les
données hydrologiques, la pression atmosphérique,
la direction et la force du vent ou
encore les conditions météorologiques en
terme de luminosité, va vous permettre de
déterminer des périodes propices à la capture
de poissons-trophée sur une eau donnée.
Il est clair que tous les biotopes aquatiques
ne recèlent pas la même propension
à héberger les mêmes quantités de poissons
de taille record. Il ne tient donc qu’à
vous d’augmenter vos chances
de succès en pratiquant des
eaux réputées pour leurs
grosses prises régulières.
Mais une fois encore, il faudra
veiller à le faire au bon
moment tout en étant attentif
au biotope…
Les périodes de crues en fleuve constituent
malheureusement des moments privilégiés
pour la prise de sandres « trophée ».
Je dis malheureusement parce que c’est
aussi souvent à ces moments que sévissent
des pêcheurs peu scrupuleux, bien plus inté-
Le Pêcheur Belge - Avril 2012
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essés par le prix du sandre au kilo que par
la satisfaction de combattre un spécimen
mythique et de lui rendre la liberté une fois
l’instant magique immortalisé.
Ces captures massives de gros sandres se
font sur des biefs où, durant l’année, aucun
ou très peu de gros individus sont pris malgré
une pression de pêche certaine, excepté
lors de ces fameuses périodes de crue. Pourtant,
les gros sandres n’apparaissent pas
par magie et se nourrissent tout au long
de l’année sur ce même cours d’eau. En
période de crue, ce sont les gros sandres
qui viennent vers les pêcheurs car le biotope
les y contraint, et non l’inverse. N’y aurait-il
donc pas un moyen ou une technique pour
les capturer en d’autres temps Plutôt que
d’être attentiste, allez vers ces imposants
poissons plus expérimentés – et surtout plus
rares que leurs congénères juvéniles – et
extirpez-les de leur poste.
Le succès dans la traque des
gros sandres requiert une
très bonne connaissance
du plan d’eau pratiqué,
afin de décoder
son mode de fonctionnement
tout en
tenant compte des
5 éléments du
biotope.
Les gros sandres sont généralement des femelles, qu’il est aisé de reconnaître à la forme prononcée de leur
ventre contenant le précieux « caviar » qui garantit la prospérité de l’espèce sur nos eaux de prédilection.
Cette « règle » est applicable à toutes les
espèces peuplant ledit plan d’eau, aussi,
dans la quête d’un carnassier, il n’est pas
négligeable de s’intéresser également au
comportement des autres poissons
ou créatures évoluant à
ses côtés, car ceux-ci constituent
sa source principale
de nourriture. Localiser
la source de nourriture
d’un carnassier à une
période définie, c’est
déjà faire la moitié
du chemin ; en
déterminant ensuite
les tranches horaires
d’activité et de
chasse, il ne manque
plus grand-chose pour
espérer pouvoir le combattre
au bout de sa
ligne.
Les postes à gros sandres :
zones de confort
Combien de fois ai-je entendu dire : « Rien
pris ! Pourtant ici, c’est un bon poste ! » Eh
bien, beaucoup plus de fois que je n’ai capturé
un sandre trophée…
Il n’est pas facile de déterminer le poste
typique à gros poissons, ce fameux poste si
cher à chaque pêcheur, celui dont il garde
le secret et sur lequel, la plupart du temps,
il enregistre la capture de poissons de belle
taille ou de taille record. Pourtant, ces postes
existent bel et bien, et il y en a bien plus que
l’on ne l’imagine.
Les ponts, les écluses, les arbres immergés,
les éboulis de pierre, les cassures importantes,
les bancs de moules ou de sable et j’en
passe, constituent d’excellents postes à gros
poissons, mais on n’y capture pas que du gros
non plus… C’est justement cela qui est inté-
Il m’arrive régulièrement de prospecter avec minutie
une zone à « petits sandres », car non loin de ceux-ci
se trouve très souvent un de leurs « patriarches ».
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essant dans la recherche d’un poste à gros
sandres : si, sur le plan structurel, ce poste
dispose de tous les éléments nécessaires à la
présence de sandres, c’est au pêcheur qu’incombe
la détermination du moment et de la
manière dont il va l’aborder pour réaliser son
objectif : prendre un gros sandre !
En outre, la technologie actuelle des sondeurs
disposant du « Side Imaging » permet
de répertorier et de localiser les nombreux
postes que recèlent les différents plans
d’eaux, ainsi que de les visualiser avec précision.
On ne va pas se voiler la face, cela
nous facilite grandement la tâche, d’autant
que ces appareils permettent également la
visualisation du poisson par ordre de forme
et de taille. Pour le pêcheur du bord, la tâche
est plus ardue et, dans son cas, faire preuve
d’observation est primordial afin de débusquer
le gros sandre souhaité. Il devra non
seulement observer la berge, le courant, la
présence de poisson-fourrage et surtout interpréter
au mieux ce que sa canne lui transmet
en action de pêche, comme la dureté et
le type de fond ou encore la présence d’une
structure assez prononcée.
Les gros sandres culminent au sommet
de la pyramide de leur espèce, ce sont les
patriarches ou les matriarches (pour ne pas
paraître sexiste) des lieux. Trêve de plaisanterie
: les gros sandres sont généralement
des femelles, qu’il est aisé de reconnaître à
la forme prononcée de leur ventre contenant
le précieux « caviar » qui garantit la prospérité
de l’espèce sur nos eaux de prédilection.
Comme dans la majorité des écosystèmes, la
hiérarchie veut que les êtres plus imposants
aient l’ascendant sur leurs congénères et le
sandre ne déroge pas à cette règle. Toutefois,
la théorie du gros sandre « solitaire » éloigné
de tous et se terrant dans les abysses,
La théorie du gros sandre « solitaire » éloigné de tous et se terrant dans les abysses, posté tel un ermite
à attendre sa proie, ne m’a jamais réellement convaincu. Ici, un superbe spécimen à la morphologie
presque parfaite.
posté tel un ermite à attendre sa proie ne
m’a jamais réellement convaincu, hormis
peut-être pour les sujets dépassant le mètre
en fin de vie ! Je m’explique : il m’est arrivé,
à de nombreuses reprises, de constater
la présence de gros spécimens parmi des
bancs de sandres de taille modeste. Mon
raisonnement est simple sur ce point : soit
ces gros spécimens profitent des restes de
chasse de leurs congénères plus petits et plus
impétueux, soit ces derniers constituent leurs
proies ! Il m’arrive donc régulièrement de
prospecter avec minutie une zone à « petits
sandres », car non loin de ceux-ci se trouve
très souvent un de leurs « patriarches », bien
décidé à ne pas laisser passer sa chance de
trouver pitance. Il va de soi qu’il faut veiller à
adapter sa manière de pêcher en variant son
animation et la taille de son leurre pour tenter
de sélectionner au mieux ses prises. Lesquelles
ne sont pas toujours légion, car les
petits sandres « tapent » parfois violemment
sur des leurres proches de leur propre taille,
alors que leurs aînés le font sur des leurres
qui n’atteignent pas les 8 cm…
De plus, si les sandres de taille plus modeste
sont présents dans cette zone, c’est
bien évidemment parce que cet endroit
leur procure le confort requis et qu’ils y retrouvent
les conditions (éléments du biotope)
qui leur conviennent au mieux à ce moment
précis. Pourquoi en serait-il autrement avec
les gros sujets Pourquoi devraient-ils se tenir
totalement à l’écart de leurs semblables
Une zone peuplée en sandres recèle toujours
de gros spécimens qui vont et viennent
parmi les autres à des
moments précis et
selon leur besoin
en nourriture.
Combattre un poisson
de belle taille constitue
du bonheur à l’état pur !
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Il faut présenter aux sandres ce qu’ils veulent, pas
ce que vous voudriez qu’ils veulent…
Le sandre est également connu pour
l’agressivité qu’il peut déverser sur tout intrus
venu briser sa paisible quiétude. Ce comportement
est très prononcé en période de frai
et les gros spécimens n’y dérogent évidemment
pas. On peut également retrouver ce
comportement tout au long de l’année et il
est donc primordial, lors de la prospection
d’un poste, de varier la présentation et l’animation
des leurres que vous proposez : cela
peut s’avérer redoutable pour déclencher la
réaction du « big zander » qui pendant les 10
minutes précédentes observait vos leurres
avec désintérêt, avant d’aspirer soudain
ce leurre de petite taille
mais possédant une vibration
très prononcée ; ou ce gros
leurre sans réelle vibration
constituant à ses yeux et,
surtout, « à son estomac »,
un mets de choix.
Cette réflexion sur la
pêche des gros sandres peut
paraître minimaliste, voire
même quelque peu généraliste.
Toutefois, loin des
grands conseilleurs et spécialistes en la matière,
le but de celle-ci est simplement d’attirer
votre attention sur le fait que la prise de
Ce beau poisson a peut-être réagi par agressivité
vis-à-vis de l’intrus (le leurre) qui est
venu briser sa paisible quiétude.
Un geste qui honore le pêcheur :
la remise à l’eau du poisson qui vient
de lui procurer tant de joie.
poissons-trophée ne s’improvise pas
et que sa préparation nécessite de
la précision. Cette préparation
incombe à tout pêcheur qui se
respecte et ne se limite que
très peu au matériel, la
compréhension de ses
adversaires halieutiques
et, surtout, du
milieu dans lequel ils
évoluent étant primordiales.
En conclusion, je vous dirais que pour
prendre un gros sandre, il faut être présent
au bon endroit, au bon moment et lui
proposer ce qu’il recherche. Evitez de lui
soumettre ce que vous, vous aimeriez qu’il
veuille, en gardant à l’esprit que le « boss »,
c’est lui, car il est dans son élément ! A vous
alors de le décoder, de le combattre, de le
vaincre avec votre propre feeling et de lui
accorder, dans les meilleures conditions possible,
le retour dans son élément pour la joie
qu’il vient de vous procurer !
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