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Bilinguisme chez les enfants de migrants, mythes et réalités

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BILINGUISME CHEZ LES ENFANTS<br />

DE MIGRANTS, MYTHES ET RÉALITÉS<br />

Par Dalila REZZOUG 1 , Sylvaine DE PLAËN 2 ,<br />

Malika BENSEKHAR-BENNABI 3 & Marie Rose MORO 4<br />

1 2 3 4<br />

En exerçant dans une consultation <strong>de</strong> pédopsychiatrie qui s’inscrit dans un<br />

environnement marqué par une gran<strong>de</strong> hétérogénéité culturelle <strong>et</strong> linguistique<br />

dans un service <strong>de</strong> psychiatrie <strong>de</strong> l’enfant <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’ado<strong>les</strong>cent en<br />

banlieue parisienne 5 , <strong>et</strong> par conséquent très largement ouverte à la clinique<br />

transculturelle, nous avons pu constater que la question du bilinguisme <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> la langue maternelle <strong>chez</strong> <strong>les</strong> <strong>migrants</strong> <strong>et</strong> leurs <strong>enfants</strong> constitue un<br />

point sensible à plus d’un titre, pour <strong>les</strong> pays d’accueil, en particulier pour<br />

la société française, comme vont le montrer rapi<strong>de</strong>ment <strong>les</strong> faits suivants.<br />

L’actualité <strong>de</strong> l’automne 2006 (lois Sarkozy sur l’immigration <strong>et</strong> l’intégration)<br />

nous a rappelé que parler français pour <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> étrangers<br />

pouvait faciliter l’accès au droit à séjourner en France. De même, le <strong>de</strong>rnier<br />

rapport parlementaire sur la prévention <strong>de</strong> la délinquance (rapport Benisti,<br />

janvier 2005) incitait clairement <strong>les</strong> mères <strong>de</strong> très jeunes <strong>enfants</strong> à utiliser<br />

le français avec eux, même si el<strong>les</strong> ne maitrisaient pas bien c<strong>et</strong>te langue, ce<br />

qui <strong>de</strong> fait dévalorise la langue <strong>de</strong> la famille <strong>et</strong> déprécie le statut <strong>de</strong> ces<br />

<strong>enfants</strong>.<br />

C<strong>et</strong>te situation <strong>et</strong> d’autres semblab<strong>les</strong> nous amènent à questionner <strong>les</strong><br />

représentations collectives construites sur le bilinguisme <strong>et</strong> <strong>les</strong> avatars qui<br />

en résultent. Ces représentations ren<strong>de</strong>nt plus diffici<strong>les</strong> pour <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>migrants</strong> la construction harmonieuse d’une i<strong>de</strong>ntité métisse qui concilie<br />

<strong>de</strong>ux appartenances culturel<strong>les</strong> ancrées dans une bonne estime <strong>de</strong> soi <strong>et</strong> qui<br />

intègre <strong>de</strong>ux systèmes <strong>de</strong> représentations du mon<strong>de</strong>.<br />

L’école, quant à elle, semble surtout voir dans le bilinguisme <strong>les</strong> troub<strong>les</strong><br />

du langage <strong>et</strong> <strong>de</strong>s apprentissages réputés en résulter, sans parvenir à prendre<br />

en compte <strong>de</strong> manière positive la bilingualité, c’est-à-dire la situation qui<br />

caractérise un suj<strong>et</strong> porteur <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux langues <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux univers culturels<br />

distincts, d’où une situation <strong>de</strong> stigmatisation <strong>et</strong> <strong>de</strong> minoration.<br />

À l’aune <strong>de</strong> ces questions, on essaiera <strong>de</strong> comprendre ce qu’est le bilinguisme,<br />

<strong>de</strong> décrire la diversité <strong>de</strong>s profils bilingues <strong>et</strong> <strong>de</strong> préciser <strong>les</strong> béné-<br />

1. D. Rezzoug, pédopsychiatre, hôpital Avicenne, Bobigny.<br />

2. S. De Plaën, pédopsychiatre, hôpital Sacré Cœur, Montréal.<br />

3. M. Bensekhar-Bennabi, maitre <strong>de</strong> conférences en psychologie interculturelle, université<br />

<strong>de</strong> Picardie Ju<strong>les</strong> Verne, Amiens.<br />

4. M.R. Moro, professeur en pédopsychiatrie, hôpital Avicenne, Bobigny.<br />

5. CHU Avicenne, Bobigny, www.clinique-transculturelle.org


Le Français aujourd’hui n° 158, Enseigner <strong>les</strong> langues d’origine<br />

fices ou <strong>les</strong> problèmes qui en découlent. Ainsi, il sera possible <strong>de</strong> cerner<br />

<strong>les</strong> difficultés spécifiques que rencontrent <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> <strong>migrants</strong> notamment<br />

en creusant la notion <strong>de</strong> mutisme extra familial. Ce symptôme peut<br />

être observé <strong>chez</strong> quelques <strong>enfants</strong> allophones qui cessent toute expression<br />

langagière dès lors qu’ils sont immergés dans un milieu linguistique<br />

différent.<br />

Le bilinguisme<br />

On insistera d’abord sur le fait que le bilinguisme est relatif. La difficulté<br />

à préciser le seuil à partir duquel on peut considérer que le bilinguisme est<br />

effectif souligne que, <strong>de</strong> fait, la maitrise <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux langues est inégale. De<br />

multip<strong>les</strong> facteurs propres à l’histoire du suj<strong>et</strong>, à la place <strong>et</strong> aux fonctions<br />

<strong>de</strong>s langues dans son environnement, contribuent à c<strong>et</strong>te inégalité <strong>de</strong><br />

compétence dans <strong>les</strong> <strong>de</strong>ux langues.<br />

Le bilingue sera finalement le suj<strong>et</strong> qui est placé dans une configuration<br />

familiale ou sociale l’incitant à développer <strong>et</strong> à entr<strong>et</strong>enir <strong>de</strong>s compétences<br />

linguistiques doub<strong>les</strong> jusqu’à possé<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s compétences minima<strong>les</strong> dans <strong>les</strong><br />

<strong>de</strong>ux langues qui lui sont données à apprendre (J.F. Hamers & M. Blanc,<br />

1983 ; H. Bialystok, 1991 ; F. Grosjean, 1982).<br />

Pour J. F. Hamers <strong>et</strong> M. Blanc (Ibid.), il convient <strong>de</strong> distinguer la bilingualité<br />

du bilinguisme. Le bilinguisme inclut la bilingualité. La bilingualité,<br />

elle, réfère à l’individu (c’est un bilinguisme individuel). La<br />

bilingualité est comprise comme « un état psychologique <strong>de</strong> l’individu qui<br />

a accès à plus d’un co<strong>de</strong> linguistique » (J.F. Hamers <strong>et</strong> M. Blanc, Ibid.).<br />

Dans ce cas, le <strong>de</strong>gré d’accès aux co<strong>de</strong>s varie selon un certain nombre <strong>de</strong><br />

dimensions, entre autres d’ordre cognitif, sociologique, culturel <strong>et</strong> linguistique.<br />

Dans la situation idéale, le bilinguisme est équilibré (J.F. Hamers <strong>et</strong><br />

M. Blanc, Ibid.), ce qui recouvre une notion d’équivalence <strong>de</strong> compétence<br />

dans <strong>les</strong> <strong>de</strong>ux langues. Dans c<strong>et</strong>te situation, la maitrise <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux idiomes<br />

linguistiques est telle qu’elle perm<strong>et</strong> une expression flui<strong>de</strong> <strong>et</strong> en même<br />

temps suffisamment riche dans <strong>les</strong> registres factuel, émotionnel <strong>et</strong> symbolique.<br />

Lorsque le bilinguisme est considéré comme dominant lorsque la<br />

compétence dans une langue est supérieure par rapport à l’autre. La dominance<br />

ne profite pas toujours à la langue maternelle, ce qui est souvent le<br />

cas <strong>chez</strong> <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> issus <strong>de</strong> la migration lorsque l’acculturation <strong>et</strong> la scolarisation<br />

dans le pays d’accueil finissent par restreindre <strong>les</strong> compétences en<br />

langue maternelle, alors même que <strong>les</strong> professionnels persistent à <strong>les</strong> considérer<br />

comme <strong>de</strong>s allophones. Bien entendu, une multiplicité <strong>de</strong> facteurs<br />

comme l’intensification <strong>de</strong>s échanges linguistiques dans une langue secon<strong>de</strong><br />

<strong>et</strong> la régression <strong>de</strong>s stimulations médiatisées par la langue maternelle contribuent<br />

à ce déséquilibre du rapport entre <strong>les</strong> <strong>de</strong>ux. Notre pratique professionnelle<br />

dans le domaine <strong>de</strong> la santé mentale, dans un contexte d’hétérogénéité<br />

culturelle nous a permis <strong>de</strong> constater qu’ à ces <strong>de</strong>ux facteurs s’ajoute celui <strong>de</strong><br />

la dévalorisation <strong>de</strong>s langues dites « d’origine ». C’est <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te expérience<br />

qu’il s’agit ici.<br />

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« <strong>Bilinguisme</strong> <strong>chez</strong> <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> <strong>migrants</strong>, <strong>mythes</strong> <strong>et</strong> <strong>réalités</strong> »<br />

<strong>Bilinguisme</strong> <strong>et</strong> acquisition : <strong>les</strong> eff<strong>et</strong>s cognitifs positifs du bilinguisme<br />

Dès la vie intra-utérine <strong>les</strong> bébés enten<strong>de</strong>nt bien. Ils disposent d’une<br />

remarquable sensibilité auditive qui leur perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> distinguer tous <strong>les</strong> sons<br />

<strong>de</strong>s langues. On pourrait presque parler d’oreille universelle. Exposés à une<br />

gran<strong>de</strong> diversité <strong>de</strong> sons <strong>et</strong> <strong>de</strong> langues à c<strong>et</strong>te époque <strong>de</strong> la vie, ils pourraient<br />

reproduire n’importe quel son. En étudiant l’acquisition <strong>de</strong> la phonologie<br />

<strong>chez</strong> un enfant qui acquiert le langage dans un milieu bilingue, on a pu<br />

m<strong>et</strong>tre en évi<strong>de</strong>nce que la capacité à distinguer à quelle langue appartiennent<br />

<strong>de</strong>s signaux acoustiques différents émerge très tôt. Cela indique que<br />

l’enfant est capable <strong>de</strong> différencier sa langue maternelle d’une autre dans la<br />

pério<strong>de</strong> prélinguistique, c’est à dire avant un an, lorsque <strong>les</strong> phonèmes du<br />

langage commencent à se m<strong>et</strong>tre en place (R. Bijeljac-Babic, 2000).<br />

Ainsi, indiscutablement, plus l’exposition à une langue est précoce, plus son<br />

apprentissage est aisé. Il est donc préférable <strong>de</strong> favoriser la mise en place d’un<br />

système langagier double dans la pério<strong>de</strong> où l’enfant structure son système<br />

langagier. La gran<strong>de</strong> plasticité au plan <strong>de</strong>s apprentissages favorise l’accès aux<br />

langues. De plus, <strong>les</strong> bilingues précoces bénéficient <strong>de</strong> leur condition<br />

d’enfant ; ils sont moins inhibés <strong>et</strong> peu influencés par la crainte <strong>de</strong> se tromper<br />

qui opère davantage à l’ado<strong>les</strong>cence. Il y aurait donc un bénéfice social indéniable<br />

à promouvoir le bilinguisme <strong>et</strong> <strong>les</strong> langues familia<strong>les</strong> <strong>de</strong>s <strong>migrants</strong>, à<br />

partir du moment où on adm<strong>et</strong> que le plurilinguisme est un atout.<br />

Avant <strong>les</strong> années 60, <strong>les</strong> recherches sur le bilinguisme tendaient plutôt à<br />

démontrer <strong>les</strong> désavantages cognitifs du bilinguisme. Ces étu<strong>de</strong>s s’inscrivaient<br />

en particulier aux États-Unis, dans le contexte <strong>de</strong> la migration hispanique<br />

provenant <strong>de</strong> milieux socioculturels très défavorisés (voir dans ce<br />

numéro l’article <strong>de</strong> S. Le Bars sur ce point). Depuis plusieurs années, <strong>les</strong><br />

avantages du bilinguisme sur le plan cognitif ont été n<strong>et</strong>tement soulignés.<br />

Une recherche récente d’E. Bialystok (2004) a montré <strong>les</strong> eff<strong>et</strong>s positifs<br />

du bilinguisme sur le contrôle cognitif <strong>chez</strong> <strong>les</strong> suj<strong>et</strong>s âgés, qui perm<strong>et</strong>trait<br />

d’atténuer <strong>les</strong> eff<strong>et</strong>s négatifs du vieillissement sur <strong>les</strong> fonctions cognitives.<br />

En eff<strong>et</strong>, c’est à partir <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> ces recherches que J. Cummins<br />

(1979) a proposé son hypothèse <strong>de</strong> seuil minimal <strong>de</strong> compétence linguistique.<br />

C<strong>et</strong>te hypothèse stipule qu’un premier seuil <strong>de</strong> compétence doit être<br />

atteint pour perm<strong>et</strong>tre d’éviter le handicap cognitif lié au fait d’un apprentissage<br />

bilingue <strong>et</strong> qu’un <strong>de</strong>uxième niveau <strong>de</strong> compétence langagière doit<br />

être dépassé pour que la bilingualité influence <strong>de</strong> façon positive le développement<br />

cognitif. C<strong>et</strong>te hypothèse, simplifiée, a donné à penser qu’il n’était<br />

pas possible <strong>de</strong> faire l’apprentissage d’une <strong>de</strong>uxième langue avant d’avoir<br />

au préalable un ancrage soli<strong>de</strong> dans la première, donc d’apprendre <strong>de</strong>ux<br />

langues en même temps.<br />

Dans le milieu éducatif, elle a eu pour conséquence <strong>de</strong> conseiller aux<br />

parents <strong>de</strong> ne plus parler leur langue d’origine afin <strong>de</strong> faciliter l’accession<br />

au français, comme si la langue maternelle constituait un frein pour la<br />

bonne acquisition <strong>et</strong> maitrise d’une <strong>de</strong>uxième langue. Dans ce cas précis,<br />

<strong>de</strong>s enseignants bien intentionnés ont quelquefois recommandé aux<br />

parents <strong>de</strong> maintenir la langue d’origine sans s’enquérir <strong>de</strong>s pratiques<br />

linguistiques familia<strong>les</strong>.<br />

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Le Français aujourd’hui n° 158, Enseigner <strong>les</strong> langues d’origine<br />

En 1962, l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> E. Peal <strong>et</strong> W.E. Lambert a été la première à proposer<br />

une méthodologie rigoureuse comparant bilingues <strong>et</strong> monolingues avec un<br />

appariement sur l’âge, le sexe, le niveau socio-économique <strong>et</strong> avec une définition<br />

claire du bilinguisme. Depuis, la plupart <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s ont permis <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre<br />

en évi<strong>de</strong>nce la meilleure flexibilité cognitive liée à l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> passer d’un<br />

système <strong>de</strong> symbo<strong>les</strong> à un autre (H. Bialystok <strong>et</strong> al., 2004).<br />

E. Bialystok (1991) a montré que <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> bilingues développaient<br />

davantage <strong>les</strong> processus <strong>de</strong> contrôle cognitif que <strong>les</strong> monolingues. Cela<br />

signifie que <strong>les</strong> tâches impliquant une analyse <strong>de</strong>s informations <strong>et</strong> leur mise<br />

en lien sont mieux traitées par <strong>les</strong> bilingues. Les étu<strong>de</strong>s s’accor<strong>de</strong>nt pour<br />

conclure (J.F. Hamers <strong>et</strong> M. Blanc, 2003 ; E. Bialystok, 1991) que la<br />

coexistence <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux systèmes linguistiques génère <strong>de</strong>s connaissances d’un<br />

troisième ordre avec <strong>de</strong> meilleures capacités métalinguistiques, c’est-à-dire<br />

une meilleure conscience phonologique <strong>et</strong> <strong>de</strong> meilleures aptitu<strong>de</strong>s dans <strong>les</strong><br />

jugements <strong>de</strong> grammaticalité ou encore dans <strong>les</strong> tâches <strong>de</strong> catégorisation.<br />

Ces avantages peuvent-ils être transposés aux <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> <strong>migrants</strong> qui<br />

nous occupent ici ? En eff<strong>et</strong>, notre pratique clinique porte sur <strong>de</strong>s <strong>enfants</strong><br />

qui ont la particularité d’avoir pour parents <strong>de</strong>s <strong>migrants</strong> issus <strong>de</strong> pays<br />

divers, qui appartiennent pour la plupart aux catégories <strong>les</strong> moins favorisées.<br />

Beaucoup d’entre eux viennent <strong>de</strong> pays qui sont confrontés au multilinguisme.<br />

Dans ce cas, <strong>les</strong> famil<strong>les</strong> que nous rencontrons, lorsqu’el<strong>les</strong> ne sont<br />

pas déjà bilingues, ont au moins une langue à transm<strong>et</strong>tre à leurs <strong>enfants</strong> qui<br />

doivent par ailleurs apprendre le français à partir <strong>de</strong> l’école maternelle.<br />

Le bilinguisme <strong>de</strong>s <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> <strong>migrants</strong><br />

Réalité du bilinguisme<br />

Il apparait comme une évi<strong>de</strong>nce que <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> grandissant dans un<br />

contexte bilingue sont bilingues. Ce constat ne rend pas compte, en revanche,<br />

<strong>de</strong> l’existence effective du bilinguisme <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa qualité (compréhension,<br />

production, contexte d’utilisation d’une langue ou l’autre : champs<br />

affectif, champs <strong>de</strong>s apprentissages…) De fait, <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> détenant véritablement<br />

une compétence langagière double ne représenteraient que 5 à<br />

15 % <strong>de</strong>s <strong>enfants</strong> perçus comme étant bilingues.<br />

Dans notre pratique clinique auprès d’<strong>enfants</strong> qui se développent dans<br />

<strong>de</strong>s contextes <strong>de</strong> diversité linguistique, nous observons que le groupe<br />

culturel d’appartenance, le rang dans la fratrie, l’histoire familiale <strong>et</strong> migratoire<br />

sont autant <strong>de</strong> paramètres qui font varier non seulement le désir <strong>de</strong>s<br />

parents <strong>de</strong> transm<strong>et</strong>tre leur langue mais aussi la capacité pour <strong>les</strong> <strong>enfants</strong><br />

<strong>de</strong> la recevoir. Il est classique d’observer que l’ainé <strong>de</strong> la fratrie parle mieux<br />

la langue maternelle que <strong>les</strong> puinés, car il y est plus exposé, dans la mesure<br />

où ses parents ne maitrisent pas encore la langue du pays d’accueil. Quant<br />

aux autres <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> la fratrie, ils seront exposés au français plus précocement,<br />

par le biais <strong>de</strong> leur ainé.<br />

L’ancienn<strong>et</strong>é <strong>de</strong> la migration <strong>et</strong> le fait <strong>de</strong> vivre ou non au contact d’une<br />

communauté migratoire ancrée dans sa culture d’origine influencent la<br />

pratique <strong>et</strong> <strong>les</strong> représentations liées à la langue maternelle.<br />

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« <strong>Bilinguisme</strong> <strong>chez</strong> <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> <strong>migrants</strong>, <strong>mythes</strong> <strong>et</strong> <strong>réalités</strong> »<br />

Les représentations culturel<strong>les</strong> généra<strong>les</strong> <strong>et</strong> cel<strong>les</strong> relatives aux langues<br />

sont liées à l’histoire singulière, familiale <strong>et</strong> collective <strong>de</strong>s <strong>migrants</strong> dans<br />

leur pays d’origine. El<strong>les</strong> sont marquées par d’éventuel<strong>les</strong> ruptures, en<br />

particulier traumatiques survenues avant la migration <strong>et</strong> pouvant être à<br />

l’origine <strong>de</strong> celle-ci. Ces représentations peuvent être aussi l’expression<br />

d’une intériorisation <strong>de</strong>s représentations du pays d’accueil à l’égard <strong>de</strong>s<br />

<strong>migrants</strong> d’ou l’importance <strong>de</strong> l’histoire migratoire <strong>et</strong> <strong>de</strong>s liens entre le pays<br />

d’origine <strong>et</strong> celui qui accueille. Le phénomène d’acculturation qui se m<strong>et</strong><br />

en place progressivement métisse <strong>les</strong> manières <strong>de</strong> faire <strong>et</strong> modifie ce qui<br />

pourrait être considéré par <strong>les</strong> parents comme digne d’une transmission ou<br />

superflu.<br />

<strong>Bilinguisme</strong> actif, passif <strong>et</strong> attrition<br />

Lorsque le bilinguisme est actif, le suj<strong>et</strong> bilingue est capable <strong>de</strong> comprendre<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> produire <strong>de</strong>s actes <strong>de</strong> langage dans ses <strong>de</strong>ux langues (M. Bensekhar-<br />

Bennabi & G. Serre, 2005).<br />

On observe cependant <strong>chez</strong> certaines famil<strong>les</strong> migrantes <strong>de</strong>s modalités<br />

d’échanges croisés : <strong>les</strong> parents s’expriment avec leurs <strong>enfants</strong> dans leur langue<br />

d’origine, ceux-ci la comprennent, mais ne répon<strong>de</strong>nt qu’en français.<br />

La communication est néanmoins possible, elle se maintient lorsque <strong>les</strong><br />

<strong>de</strong>ux partenaires <strong>de</strong> l’échange ont une compréhension suffisante dans leur<br />

langue secondaire. Chez <strong>les</strong> <strong>enfants</strong>, si la compréhension passive a un<br />

intérêt certain (forme passive <strong>de</strong> bilinguisme), elle n’empêchera pas le<br />

phénomène d’attrition <strong>de</strong> survenir ; c’est-à-dire l’extinction progressive <strong>de</strong><br />

la langue maternelle au profit <strong>de</strong> celle enseignée à l’école.<br />

L’attrition est la réduction ou le tassement <strong>de</strong>s connaissances linguistiques<br />

initialement acquises. Ce phénomène, qui est non seulement soumis à un<br />

eff<strong>et</strong> d’âge mais également à la fréquence <strong>et</strong> à la qualité <strong>de</strong>s sollicitations<br />

verba<strong>les</strong>, peut aller jusqu’à l’extinction d’une langue initialement acquise.<br />

M. Bensekhar <strong>et</strong> G. Serre (Ibid.) considèrent cependant que le maintien<br />

d’une bonne compréhension passive ralentit le processus d’attrition ; celuici<br />

est d’autant plus effectif que l’exposition à la langue maternelle est interrompue<br />

tôt dans la vie <strong>de</strong> l’enfant. Après un certain seuil, qui peut être<br />

situé au moment <strong>de</strong> l’ado<strong>les</strong>cence, on considère que le risque d’attrition est<br />

très faible. Ceci signifie donc que c’est au moment <strong>de</strong> la scolarisation <strong>et</strong><br />

plus encore lors <strong>de</strong> l’entrée dans <strong>les</strong> apprentissages (à partir du cours préparatoire)<br />

que le risque d’attrition est le plus grand si l’on considère en même<br />

temps que c’est à ce moment-là que <strong>les</strong> apprentissages sont <strong>les</strong> plus <strong>de</strong>nses.<br />

En eff<strong>et</strong>, il semble assez naturel <strong>et</strong> d’ailleurs souhaitable qu’au moment <strong>de</strong><br />

la mise en place <strong>de</strong>s apprentissages, avec en particulier le passage à l’écrit,<br />

<strong>les</strong> <strong>enfants</strong> investissent la langue <strong>de</strong> l’école <strong>et</strong> ce qu’elle véhicule en termes<br />

<strong>de</strong> connaissances sur la société dans laquelle ils vivent. De fait, c<strong>et</strong>te étape<br />

constitue une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> fragilité pour la langue maternelle si celle ci n’est<br />

pas représentée <strong>et</strong> portée par <strong>les</strong> parents comme un outil <strong>et</strong> un obj<strong>et</strong><br />

culturel vali<strong>de</strong>, stable <strong>et</strong> précieux à transm<strong>et</strong>tre. C<strong>et</strong> investissement <strong>de</strong>s<br />

parents aura parfois à résister au mouvement <strong>de</strong> l’enfant qui voudra s’en<br />

défaire, s’en démarquer. D’autre part, si <strong>les</strong> parents sont eux-mêmes dans<br />

65


Le Français aujourd’hui n° 158, Enseigner <strong>les</strong> langues d’origine<br />

un processus d’apprentissage <strong>de</strong> la langue française, elle sera surinvestie par<br />

l’ensemble <strong>de</strong> la famille au détriment <strong>de</strong> la langue d’origine.<br />

Le mutisme extrafamilial<br />

Le mutisme extrafamilial ou mutisme sélectif constitue une autre situation<br />

particulière qui reflète la complexité du rapport à la langue <strong>et</strong> au<br />

langage pour <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> <strong>migrants</strong>. Il s’agit ici davantage <strong>de</strong> la capacité<br />

pour <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> concernés à utiliser <strong>les</strong> compétences linguistiques développées<br />

antérieurement, dès qu’ils se r<strong>et</strong>rouvent à l’extérieur du milieu<br />

familial ; qu’il s’agisse <strong>de</strong> la langue maternelle ou encore <strong>de</strong> la langue<br />

secon<strong>de</strong>. Typiquement, ces <strong>enfants</strong> parlent sans difficulté quand ils sont à<br />

la maison <strong>et</strong> avec leurs parents, mais ils <strong>de</strong>viennent mu<strong>et</strong>s dès qu’ils sortent<br />

<strong>de</strong> la maison ou qu’ils doivent prendre la parole en présence d’étrangers.<br />

Si le mutisme sélectif se r<strong>et</strong>rouve également dans la population autochtone<br />

(non soumise aux conditions du bilinguisme ou <strong>de</strong> la biculturalité), il<br />

semble que, dans ce cas, il est davantage associé à la présence concomitante<br />

<strong>de</strong> fragilités neuro-développementa<strong>les</strong> (troub<strong>les</strong> primaires du langage ou<br />

encore r<strong>et</strong>ards <strong>de</strong> développement). C<strong>et</strong>te causalité est moins occurrente<br />

<strong>chez</strong> <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> <strong>migrants</strong> pour <strong>les</strong>quels la prévalence <strong>de</strong> mutisme est<br />

cependant 3 à 4 fois plus élevée que dans le reste <strong>de</strong> la population. Un<br />

facteur anxieux est souvent r<strong>et</strong>rouvé dans <strong>les</strong> situations <strong>de</strong> mutisme sélectif,<br />

ce qui peut perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> proposer l’hypothèse d’un mutisme sélectif qui ne<br />

serait en fait qu’une variante <strong>de</strong> la phobie sociale <strong>chez</strong> <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>migrants</strong> (M. Bensekhar-Bennabi & G. Serre, Ibid.)<br />

Classiquement, c’est dans le passage <strong>de</strong> l’école maternelle à l’école<br />

primaire que le mutisme sélectif est déclaré. Cela coïnci<strong>de</strong> avec l’introduction<br />

dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s apprentissages <strong>et</strong> le début <strong>de</strong> l’investissement <strong>de</strong><br />

l’école, lieu par excellence <strong>de</strong> socialisation <strong>et</strong> creus<strong>et</strong> <strong>de</strong> la culture dominante.<br />

Le processus migratoire (S. Akhtar, 1995) peut être associé à une troisième<br />

phase <strong>de</strong> séparation-individuation (la première se situant dans la<br />

toute p<strong>et</strong>ite enfance, <strong>et</strong> la <strong>de</strong>uxième à l’ado<strong>les</strong>cence), c’est-à-dire à une<br />

importante phase <strong>de</strong> réorganisation i<strong>de</strong>ntitaire venant potentiellement<br />

réactiver <strong>les</strong> enjeux <strong>de</strong>s phases antérieures du développement. Dans ce<br />

processus, le migrant doit accepter <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s <strong>de</strong>uils divers, <strong>et</strong> également<br />

accepter d’intégrer <strong>de</strong> nouveaux idéaux, <strong>de</strong> nouveaux modè<strong>les</strong> d’i<strong>de</strong>ntification<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> nouvel<strong>les</strong> valeurs. Le résultat en est une i<strong>de</strong>ntité réorganisée,<br />

renouvelée <strong>et</strong> fondamentalement hybri<strong>de</strong>.<br />

J. Mirsky (1991) considère qu’un <strong>de</strong>s enjeux majeurs <strong>de</strong> ce processus <strong>de</strong><br />

séparation-individuation associé à l’immigration concerne l’acquisition<br />

d’une nouvelle langue. Apprendre une nouvelle langue implique notamment<br />

l’acquisition <strong>de</strong> nouveaux obj<strong>et</strong>s internes <strong>et</strong> <strong>de</strong> nouvel<strong>les</strong> représentations<br />

<strong>de</strong> soi ; <strong>de</strong> la même façon, la perte <strong>de</strong> la langue maternelle est associée<br />

à un sentiment <strong>de</strong> perte d’une partie importante <strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité.<br />

La situation <strong>de</strong>s <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> <strong>migrants</strong> est à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> particulière à plus d’un<br />

titre. Souvent, ces <strong>enfants</strong> ont une plus gran<strong>de</strong> facilité que leurs parents à<br />

apprendre une nouvelle langue. Comme leur i<strong>de</strong>ntité n’est pas encore<br />

66


« <strong>Bilinguisme</strong> <strong>chez</strong> <strong>les</strong> <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> <strong>migrants</strong>, <strong>mythes</strong> <strong>et</strong> <strong>réalités</strong> »<br />

fixée, ils sont à la fois plus perméab<strong>les</strong> <strong>et</strong> plus ouverts à la possibilité <strong>de</strong><br />

nouvel<strong>les</strong> imitations <strong>et</strong> <strong>de</strong> nouvel<strong>les</strong> i<strong>de</strong>ntifications. Ils sont également<br />

animés par un grand désir <strong>de</strong> ressembler aux autres <strong>enfants</strong>. Ce désir<br />

stimule leur processus d’apprentissage <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième langue. Mais <strong>de</strong>s<br />

écueils peuvent survenir dans le processus, notamment lorsque <strong>les</strong> <strong>enfants</strong><br />

ne peuvent recevoir le support émotionnel nécessaire <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> leurs<br />

parents pour investir c<strong>et</strong>te nouvelle langue avec sécurité <strong>et</strong> confiance. Ils<br />

peuvent alors se trouver en conflit avec leur désir d’autonomie <strong>et</strong> d’investissement<br />

du mon<strong>de</strong> extérieur <strong>et</strong> leur besoin parallèle <strong>de</strong> consoli<strong>de</strong>r leurs<br />

liens d’attachement <strong>et</strong> <strong>de</strong> sécurité avec leur famille. C<strong>et</strong>te impasse peut<br />

mener soit à une appropriation massive <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième langue <strong>et</strong> <strong>de</strong> ses<br />

repères socioculturels (ce qui risque <strong>de</strong> se faire aux dépens <strong>de</strong> la langue<br />

maternelle), soit à une inhibition importante <strong>de</strong>s processus d’apprentissage<br />

<strong>et</strong> du fonctionnement en milieu scolaire. C<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière situation constitue<br />

un terreau fertile pour le développement <strong>de</strong> troub<strong>les</strong> d’apprentissage ou<br />

encore pour le mutisme sélectif. D’un point <strong>de</strong> vue transculturel, le<br />

mutisme sélectif peut être vu comme une difficulté à gérer le contact entre<br />

le mon<strong>de</strong> du <strong>de</strong>dans (celui <strong>de</strong> la famille) <strong>et</strong> le mon<strong>de</strong> du <strong>de</strong>hors (celui <strong>de</strong><br />

l’école, <strong>de</strong> la société extérieure), difficulté associée à une fragilité <strong>de</strong> la<br />

représentation <strong>de</strong> soi <strong>et</strong> <strong>de</strong> la famille. Des mécanismes <strong>de</strong> clivage entre <strong>les</strong><br />

univers culturels en présence sont alors fortement mis à contribution :<br />

l’inhibition qui porte sur la parole dans le mutisme sélectif vient limiter<br />

symboliquement <strong>les</strong> échanges entre le mon<strong>de</strong> extérieur <strong>et</strong> le mon<strong>de</strong> intérieur,<br />

empêchant une rencontre qui apparait chargée <strong>de</strong> menaces, d’incertitu<strong>de</strong>s<br />

<strong>et</strong> d’angoisse (M.R. Moro, 1994). Dans ce contexte, la prise en<br />

charge implique alors obligatoirement un travail qui prend en compte <strong>les</strong><br />

enjeux culturels <strong>et</strong> i<strong>de</strong>ntitaires en cause (à la fois sur <strong>les</strong> plans individuel,<br />

familial <strong>et</strong> collectif). La reconnaissance <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s difficultés rencontrées<br />

ainsi que le renforcement <strong>de</strong>s repères <strong>et</strong> <strong>de</strong>s liens intrafamiliaux apparaissent<br />

indispensab<strong>les</strong> afin que la rencontre <strong>de</strong>s langues <strong>et</strong> <strong>de</strong>s cultures<br />

<strong>de</strong>vienne non seulement pensable mais aussi possible.<br />

Conclusion<br />

La question du bilinguisme est d’actualité. En eff<strong>et</strong>, <strong>les</strong> représentations<br />

concernant <strong>les</strong> bienfaits <strong>de</strong> la transmission <strong>de</strong> la langue native (langue<br />

d’origine) sont variées. Ces représentations sont du reste au centre du discours<br />

éducatif <strong>et</strong> <strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong> soins en santé mentale dans <strong>les</strong> contextes <strong>de</strong> diversité<br />

culturelle. Or transm<strong>et</strong>tre sa langue ne se justifie pas uniquement sur le<br />

plan linguistique ; cela se justifie également d’un point <strong>de</strong> vue ontologique car<br />

cela revient à transm<strong>et</strong>tre sa culture <strong>et</strong> son histoire personnelle.<br />

Ces transmissions sont nécessairement liées à la construction <strong>de</strong> la parentalité<br />

<strong>et</strong>, du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’enfant, à la structuration <strong>de</strong> sa personnalité<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> ses affiliations.<br />

À la lumière <strong>de</strong> notre expérience, acquise auprès <strong>de</strong> patients <strong>migrants</strong> <strong>et</strong><br />

auprès <strong>de</strong> leurs <strong>enfants</strong>, il nous apparait important d’encourager la transmission<br />

<strong>et</strong> la pratique <strong>de</strong> la langue maternelle. En eff<strong>et</strong>, la bonne maitrise<br />

<strong>de</strong> la langue maternelle <strong>et</strong> la structuration <strong>de</strong> savoirs sur le mon<strong>de</strong> physique<br />

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Le Français aujourd’hui n° 158, Enseigner <strong>les</strong> langues d’origine<br />

<strong>et</strong> social à travers elle, facilite l’acquisition <strong>de</strong> la langue du pays d’accueil <strong>et</strong><br />

perm<strong>et</strong> ainsi aux <strong>enfants</strong> <strong>de</strong> bénéficier <strong>de</strong>s avantages cognitifs inhérents au<br />

bilinguisme.<br />

De même la pratique <strong>de</strong> la langue maternelle renforce l’ancrage <strong>de</strong>s<br />

<strong>enfants</strong> dans leur filiation <strong>et</strong> dans leurs affiliations culturel<strong>les</strong> qui se trouvent<br />

faites <strong>de</strong> diversité. C<strong>et</strong>te pratique a l’avantage <strong>de</strong> promouvoir également<br />

<strong>les</strong> ressources créatives qui fabriquent du métissage.<br />

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Dalila REZZOUG, Sylvaine DE PLAËN,<br />

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