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Interview-felixM1

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Dimanche, 16h30. Nous rejoignions Felix Moati qui nous attend place de la Bastille, devant<br />

une de ces grandes terrasses parisiennes typiques. Il nous salue chaleureusement,<br />

et nous le remercions pour l’entretien. Il nous apprend que le bistro est complètement<br />

plein, fin de week-end oblige. Il nous propose d’aller discuter à l’Industrie, un café-restaurant<br />

sympathique non loin de là. Le temps gris se gâte et des gouttelettes commencent à tomber du<br />

ciel. « Quel temps de merde ». Nous lui faisons remarquer que c’est un temps à aller au cinéma,<br />

et à aller découvrir À Trois On Y Va, le film de Jérôme Bonnell dans lequel il joue et donne la<br />

réplique à Anaïs Demoustier et Sophie Verbeeck, formant avec elles un triangle amoureux qui<br />

offre des situations délicieusement burlesques et émouvantes.<br />

La discussion commence, sans qu’on s’en rende vraiment compte, sur le chemin de l’Industrie,<br />

et se poursuit un moment. L’industrie, une autre, sans italique, celle du cinéma français, sera<br />

un des sujets que nous allons aborder à bâtons rompus dans ce qui ressemble finalement plus<br />

à un dialogue qu’à une interview classique. C’est autour de bières et de cafés, au détour de réflexions<br />

sur sa filmographie, mais aussi sur son rapport à son métier de comédien, à l’état actuel<br />

du cinéma français, à l’état de la cinéphilie, à la crise de la critique ou à François Truffaut, que<br />

nous allons brosser le portrait d’un jeune acteur de 2015.<br />

Felix Moati dans Lol<br />

de Lisa Azuelos, 2009<br />

Tu commences à être une tête connue du paysage<br />

cinématographique français ; on t’a découvert<br />

massivement dans Lol de Lisa Azuelos<br />

en 2009. Trois ans plus tard tu transformais<br />

l’essai avec Télé Gaucho de Michel Leclerc et<br />

aujourd’hui tu es à l’affiche de À Trois On Y<br />

Va qui fait un joli démarrage critique et public.<br />

On peut dire que ta carrière de comédien est<br />

définitivement lancée. Le cinéma, ça a toujours<br />

été ta vocation ?<br />

Le cinéma a toujours été présent dans ma<br />

tête, mais ce qui m’intéressais à la base c’était<br />

la mise en scène, l’écriture aussi. Mais le métier<br />

d’acteur, je n’y avais jamais pensé. Sauf<br />

en me disant que c’était un bon moyen pour<br />

draguer des filles, cette idée m’avait effleuré<br />

[Rires]. Donc dans cette optique là, et plus<br />

par curiosité qu’autre chose, un après-midi<br />

on a décidé de s’inscrire à un cours de<br />

théâtre dans le Marais avec des potes. On a<br />

suivi quelques cours, et en fait le prof nous a<br />

tous inscrits au casting de Lol. Du coup on<br />

a passé les essais et j’ai été retenu. Et c’est<br />

vrai que sur le plateau j’ai pris un immense<br />

plaisir à jouer…<br />

Au fond je pense que ça m’a toujours un peu<br />

travaillé même si ce n’était pas vraiment formulé,<br />

pas dit, pas exprimé. J’ai toujours été<br />

le mec à qui on demandait de raconter des<br />

histoires à table. Il y a toujours eu en moi un<br />

plaisir du déguisement, vraiment depuis tout<br />

petit.<br />

En plus, tu as vraiment baigné dans une atmosphère<br />

de cinéma, puisque ton père n’est autre que<br />

Serge Moati. J’imagine que tu as grandi dans un<br />

temple de cinéphilie, ce qui doit avoir contribué à<br />

ton intérêt pour ce métier ?<br />

C’est sûr. Disons que ce n’était pas un monde<br />

qui m’était étranger. Là où d’autres peuvent le<br />

percevoir comme un milieu très lointain qu’on<br />

ne sait pas vraiment comment approcher, moi<br />

je le connaissais, il m’était familier. Je n’étais<br />

pas intimidé par ça, c’était atteignable, même<br />

si mes parents ne voulaient pas jusqu’à il y a<br />

deux ou trois ans que je fasse acteur, par inquiétude.<br />

Tu n’as jamais fais de théâtre à ma connaissance ?<br />

En fait, j’avais commencé à faire des répétitions<br />

avec la troupe de Philippe Découflé,<br />

un grand chorégraphe qui fait le spectacle<br />

de David Bowie en ce moment. Il a fait un<br />

grand spectacle à Chaillot qui s’appelait<br />

Contact. J’avais commencé à répéter avec lui,<br />

mais j’ai dû partir en tournage pour le film de<br />

Jérôme Bonnell. Il a fallu que j’arrête les répétitions<br />

et que j’abandonne le projet. Mais<br />

le théâtre m’intéresse, je lis parfois quelques<br />

pièces qu’on m’envoie mais il faut vraiment<br />

se sentir prêt.<br />

Tu as été révélé par Lol, qui est, qu’on aime ou<br />

qu’on déteste, véritablement un film générationnel.<br />

Comment tu expliques l’impact énorme de ce<br />

film sur toute une jeunesse ?<br />

C’est toujours difficile de répondre à ces questions<br />

parce que ce qui fait le succès ou l’insuccès<br />

d’un film est complètement arbitraire.<br />

L’insuccès surtout est difficilement explicable.<br />

Le succès énorme et surprise d’un film comme<br />

Intouchables est aussi difficilement analysable…<br />

Je pense que ce qui a fait le succès de Lol, qui<br />

a fait cinq millions d’entrées et qui a embrasé<br />

toute une génération, c’est avant tout la simplicité<br />

du propos. Qu’on aime ou qu’on n’aime<br />

pas, c’est un film franc, honnête, qui ne prétend<br />

pas être quelque chose d’autre que ce qu’il est.<br />

Ce qui est assez étonnant c’est que ça dépeint<br />

un milieu plutôt très bourgeois du XVIème<br />

arrondissement, qui moi par exemple m’était<br />

complètement étranger, mais qui a su parler à<br />

des gens de classes sociales extrêmement variées<br />

; je pense que le succès énorme du film<br />

est en partie du au fait que les problématiques<br />

des adolescents soulevées par le film ne sont<br />

pas teintées socialement, c’est un canevas très<br />

classique et n’importe qui avait la possibilité de<br />

s’identifier aux personnages.<br />

Il y a aussi le fait que le film arrivait peut-être au<br />

bon moment. Il y a des films à l’ambition très populaire<br />

qui sont comme ça élus et portés par toute<br />

une génération de manière un peu mystérieuse ; je<br />

pense à La Boum pour la génération de nos parents.<br />

Ces films arrivent à capter, consciemment<br />

ou pas, l’état d’esprit d’une jeunesse à un moment<br />

donné, ou bien la façon dont elle veut se regarder.<br />

Bien sûr, il y a une question de timing. Je n’ai<br />

pas énormément de recul sur ce film parce<br />

que je suis dedans mais je pense que la vision<br />

glamour de la jeunesse a parlé aux gens à ce<br />

moment là. C’était une jeunesse idéalisée qui<br />

était montrée, une vision clinquante, qui attirait<br />

l’oeil. C’était très différent de la jeunesse<br />

présentée par exemple dans Les Beaux Gosses<br />

(Riad Satouf, 2009).<br />

« [Michel Leclerc] m’a<br />

vraiment inventé en tant<br />

qu’acteur, il m’a donné le<br />

goût de ça »<br />

Après Lol, on te retrouve dans une série télévisée<br />

sur Canal + appelée Sweet Dreams, puis trois ans<br />

plus tard dans Télé Gaucho de Michel leclerc.<br />

Après Lol j’ai fait cette série, et je pensais vraiment<br />

que ça allait s’arrêter là. Je continuais mes<br />

études, je voulais peut-être passer la Fémis,

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