Kinetica - Extrait sur l'atelier MTK
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une laiterie<br />
Saint-Martin-le-Vinoux / France<br />
ÉPICENTRE<br />
Si nous n’avions pas rencontré Gaëlle<br />
Rouard (qui aujourd’hui a créé son<br />
laboratoire dans le Trièves) et Étienne<br />
Caire de l’Atelier <strong>MTK</strong> <strong>sur</strong> le parking<br />
d’une cinémathèque il y a dix ans, nous<br />
serions aujourd’hui moins heureux et<br />
moins libres.<br />
Des bassines, des bidons, des heures dans<br />
le noir à fixer le chronomètre, jouer au<br />
petit chimiste, s’émerveiller de réussir<br />
sa première solarisation, jauger, juger<br />
longuement chaque photogramme…<br />
Cet atelier vous donne accès au concret<br />
du cinématographe, son artisanat, sa<br />
fantaisie, ses accidents. On lèche la<br />
pellicule. On goûte à l’émulsion. On<br />
accouche soi-même ses images. Et puis<br />
les perspectives économiques s’inversent:<br />
si vous n’avez que deux ou trois sous en<br />
poche, l’accès au film à faire ne vous est<br />
pas fermé, bien au contraire.<br />
Alors en route, mauvaise troupe.<br />
Le laboratoire a vu le jour en 1991-1992<br />
au 102, un squat grenoblois organisant<br />
concerts et projections. Créé par des<br />
cinéastes pour leurs propres besoins<br />
et envies, il a très rapidement accueilli<br />
de nombreux réalisateurs attirés par la<br />
possibilité de développer et tirer leurs<br />
films eux-mêmes, à des prix dérisoires.<br />
En 1995, l’Atelier <strong>MTK</strong> était saturé. Il<br />
impulsa et proposa de soutenir la création<br />
de nouveaux laboratoires indépendants.<br />
Ce fut alors l’éclosion en chaîne de<br />
nombreux ateliers en France, en Suisse, en<br />
Belgique… un réseau fondé <strong>sur</strong> le partage<br />
du savoir et des expérimentations, relié<br />
par une revue, L’Ébouillanté.<br />
De 1996 à 1998, l’Atelier <strong>MTK</strong> s’installa<br />
dans un espace beaucoup plus grand, et<br />
proposait <strong>sur</strong> quatre cents mètres carrés<br />
trois laboratoires « humides » et un vaste<br />
laboratoire « sec ».<br />
Fin 1998, l’atelier déménage dans ses<br />
locaux actuels. Il est toujours un outil au<br />
service tant des cinéastes qui l’animent<br />
que de créateurs d’images venus d’ailleurs.<br />
ENTRETIEN<br />
Première étape: le bâtiment<br />
« Nous sommes installés dans un ancien<br />
dépôt de fromages et de produits laitiers,<br />
un bâtiment des années 1950 sous une<br />
belle toiture en voile de béton. Le lieu<br />
se trouve <strong>sur</strong> l’ancien jardin exotique de<br />
La Casamaures, une maison construite<br />
au début du 20 e siècle par un richissime<br />
personnage qui, comme dans les contes de<br />
fées, a construit une maison pour sa belle<br />
et qui est mort ruiné avant de la terminer<br />
complètement. L’autoroute qui passe à côté<br />
a été construite pour les jeux Olympiques<br />
de 1968. Voilà pour l’histoire du lieu.<br />
De 1996 à 1998, on était dans un autre<br />
bâtiment, l’ancienne fonderie Bouvier<br />
Darling. À la fin de notre convention,<br />
l’adjoint à la culture de la mairie de Grenoble<br />
nous a proposé celui-ci. Il venait d’être<br />
racheté par la communauté de communes<br />
en réserve foncière dans le but de faire<br />
un tunnel juste à côté. Donc le bâtiment a<br />
destination d’être rasé même si aujourd’hui<br />
la construction du tunnel est abandonnée.<br />
Nous avons une convention avec la Ville de<br />
Grenoble depuis dix ans.<br />
On a fait trois mois de travaux et<br />
d’installation, mis des vitres <strong>sur</strong> les<br />
grandes ouvertures qui étaient des quais<br />
de déchargement de camions et installé les<br />
laboratoires dans les anciens frigos (qui sont<br />
bien isolés). De la plomberie, des cloisons…<br />
Q: Le bâtiment vous a-t-il plu tout de suite ?<br />
Oui, c’était la bonne taille pour nos activités<br />
avec le nombre de gens qu’on était. Un lieu<br />
trop grand va t’épuiser rapidement, un<br />
lieu trop petit, ça ne marche pas non plus.<br />
Sa situation va déterminer qui va venir, à<br />
quelle fréquence. Ici il y a quand même<br />
beaucoup de monde qui passe parce qu’on<br />
est assez proche du centre de Grenoble, les<br />
gens peuvent venir nous voir facilement à<br />
pied ou à vélo et travailler ».<br />
Seconde étape: l’aménagement<br />
« Au premier étage, il y a une salle qu’on<br />
partage avec toutes les associations du<br />
lieu, qui nous sert <strong>sur</strong>tout à répéter avec<br />
des musiciens ou d’autres cinéastes pour<br />
préparer des performances.<br />
Au rez-de-chaussée, nous avons deux labos<br />
de développement qui sont vraiment au<br />
milieu de notre espace. Autour, il y a des<br />
machines pour faire le tirage (tireuses<br />
contact ou optique), des tables de montage<br />
et une petite salle de projection pour<br />
regarder tout de suite ce qu’on a fait.<br />
On a une tireuse tchèque qu’on est allé<br />
chercher en Pologne. Elle a un nom de<br />
sous-marin: K5. On l’a achetée au poids<br />
de la ferraille. Jusque dans les années 1980,<br />
le film était utilisé partout, par les labos<br />
de médecine, l’industrie, l’armée ou les<br />
compagnies aériennes. Et tout ça a disparu.<br />
On a un peu récupéré tout ce matériel.<br />
Les labos industriels disparaissent un à un.<br />
Le réseau de labos deviendra peut-être le<br />
garant d’un savoir <strong>sur</strong> les capacités de la<br />
pellicule ou les méthodes de traitement.<br />
Q: Comment définis-tu l’esthétique de ce lieu ?<br />
On ne passe pas beaucoup de temps aux<br />
fioritures, à part que le labo est parsemé de<br />
squelettes, de crânes, d’affiches cinéma de<br />
lieux redoutables. Les murs sont couverts<br />
du sol au plafond de matos divers dont<br />
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on a besoin, de boîtes de film. Notre plus<br />
belle décoration, c’est peut-être cette patine<br />
propre aux vieux bars bruxellois, le jaune<br />
clope ».<br />
Co-habitation<br />
« Dans ce bâtiment, il y a six associations<br />
qui font toutes un travail autour de l’image<br />
d’une manière ou d’une autre: Christophe<br />
Cardoën fabrique des machines à lumière,<br />
Richard et Florence s’occupent d’Octobre,<br />
un atelier de graphisme, Culture Ailleurs<br />
fait des performances son et lumière et<br />
Cinex travaille plus particulièrement le<br />
‘documentaire de création’.<br />
Il n’y a qu’une clé à l’entrée du bâtiment<br />
et après, tous les espaces sont ouverts.<br />
Les échanges informels sont permanents.<br />
À chaque fois que l’un des groupes a une<br />
proposition à faire à l’autre, on travaille<br />
ensemble sans problèmes. Depuis dix ans,<br />
sans s’engueuler, c’est admirable. Peut-être<br />
que cela tient justement au fait qu’on n’ait<br />
pas à faire des réunions politiques <strong>sur</strong> les<br />
directions à prendre et à s’occuper des<br />
affaires des autres. Du coup, les rapports<br />
restent amicaux ».<br />
Et… le fonctionnement<br />
« Nous sommes principalement tournés<br />
vers l’accueil de cinéastes qui désirent<br />
développer eux-mêmes leur film et<br />
travailler la physique de la pellicule via la<br />
chimie. Le but est d’apprendre à essayer de<br />
maîtriser l’étape du développement et de<br />
la copie car c’est vraiment associé. Notre<br />
façon de travailler correspond à nos outils,<br />
donc on ne peut pas tout faire ; un film<br />
couleur avec le son synchrone, c’est pas ici<br />
ou alors d’une manière qui ne correspond<br />
pas forcément à tout le monde. Cet accueil<br />
va de la personne qui veut développer du<br />
Super 8, avec qui on va passer une journée<br />
pour la rendre autonome, aux personnes<br />
qui ont des projets plus mûrs et qui<br />
savent ce qu’ils viennent faire ici ou qui<br />
veulent essayer des choses. C’est déjà plus<br />
intéressant parce qu’on va les guider <strong>sur</strong><br />
différentes techniques suivant le résultat<br />
recherché.<br />
Enfin, il y a ceux qu’on invite en résidence,<br />
après une rencontre. Là, c’est encore<br />
mieux ; on essaye d’offrir tout ce qu’on a de<br />
disponible et une petite somme d’argent ; il<br />
s’agit de suivre la personne et se mettre à<br />
son service pour développer son idée.<br />
Q: Comment ça se passe ici quand les gens<br />
viennent ?<br />
On vit ensemble pendant plusieurs jours,<br />
les douze à quinze heures de travail<br />
par jour s’étirent jusque tard la nuit.<br />
Généralement, les gens ne sortent pas, ils<br />
sont complètement immergés là-dedans, ils<br />
n’ont rien d’autre à penser.<br />
Q: Comment arrivez-vous à faire autant<br />
avec si peu ?<br />
Personne n’est payé, tout est bénévole donc<br />
il ne reste plus que la pellicule à payer et la<br />
chimie, qui ne coûte quand même pas une<br />
fortune. Pour tout ce qui est du travail <strong>sur</strong><br />
l’image, on arrive à faire les choses pour pas<br />
cher. Est-ce que c’est une hérésie et qu’on<br />
vit totalement à côté de la plaque ? C’est<br />
comme ça que j’ai envie de fonctionner. Les<br />
gens viennent parce qu’ils ont envie, il n’y a<br />
pas à parler d’autre chose ».<br />
Allo ?<br />
« Intervenir comme centre de ressources,<br />
ça ne se voit pas mais c’est une des<br />
choses qui occupe presque le plus. Le<br />
milieu professionnel ne donne pas les<br />
informations, tu les payes. Ici, nous n’avons<br />
pas d’intérêt financier à privilégier une<br />
technique ou une autre. Il y a au moins une<br />
personne par jour à qui je vais donner un<br />
conseil, une adresse, un bouquin à lire. Il<br />
m’arrive très souvent de guider les gens: où<br />
louer un projecteur, où trouver tel type de<br />
film, avec quoi tourner, comment coller du<br />
son <strong>sur</strong> la pellicule… ».<br />
L’émulation<br />
Q: Pourquoi Grenoble ? Qu’est-ce qu’il y a<br />
à Grenoble ?<br />
« Le déclencheur, je crois que ça a vraiment<br />
été les gens de Metamkine, Christophe<br />
Auger, Xavier Quérel, cinéastes, et Jérôme<br />
Noetinger, musicien, qui travaillaient la<br />
pellicule dans leur salle de bains et qui<br />
ont eu très tôt cette volonté d’ouvrir un<br />
laboratoire pour eux mais aussi pour<br />
partager ces connaissances.<br />
Et puis le 102, où ils ont d’ailleurs<br />
organisé une première séance de cinéma<br />
expérimental que j’ai vue par hasard :<br />
des films d’Oskar Fischinger, de Walter<br />
Ruttmann, je me suis dit ‘l’animation<br />
abstraite, c’est ça que je veux faire’.<br />
Lorsque j’ai rencontré Christophe Auger<br />
et Xavier Quérel, ils m’ont directement<br />
prêté une caméra Super 8 et une cartouche<br />
et m’ont dit de venir la développer. C’était<br />
parti. On rigolait beaucoup, il y avait un<br />
bouquin d’Agfa — ‘toutes les erreurs à ne<br />
pas faire’ — qui nous plaisait beaucoup.<br />
Ils ont réussi à fédérer une dizaine de<br />
personnes, à monter un labo au 102 qui<br />
s’est rapidement avéré trop petit. On était<br />
plein à chercher du matos, à développer,<br />
à regarder des films. Cela a créé un noyau<br />
dur de cinéastes qui perdure ; aucun n’a<br />
arrêté, même si maintenant tout le monde<br />
s’est un peu ventilé, ils ont fait des labos<br />
dans leur maison.<br />
Ce qui se passait au 102 était vraiment<br />
déterminant, en tous cas pour moi. À<br />
l’affiche, il n’y avait que de la musique<br />
dite expérimentale (ce sont des termes<br />
qui ne veulent pas dire grand-chose,<br />
je dirais plutôt des gens qui faisaient<br />
des choses très personnelles) et des<br />
films et des cinéastes qui n’étaient<br />
programmés nulle part ailleurs. Avec<br />
une débrouillardise incroyable, l’œil et<br />
les oreilles aux aguets, énormément de<br />
choses étaient possibles. Par exemple,<br />
Michel Chion est venu présenter une<br />
pièce électroacoustique au 102 et nous<br />
a révélé que c’était la première fois que<br />
cette œuvre était diffusée en entier, en<br />
France, sans être coupée…<br />
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Le labo et le 102 en tant que lieu de diffusion<br />
s’entraînaient mutuellement, s’alimentaient<br />
l’un l’autre. Plusieurs artistes sont venus<br />
travailler et sont restés à Grenoble parce<br />
qu’ils appréciaient énormément l’ambiance<br />
qu’il y avait ici et voulaient participer ».<br />
Jouer<br />
« Nous sommes de grands consommateurs<br />
de projecteurs Eiki qui sont particulièrement<br />
pratiques pour jouer et résistent assez bien<br />
à nos mauvais traitements.<br />
Nous, on dit jouer. Comme un musicien<br />
joue de son instrument, on joue du<br />
projecteur, on joue du film. Comment<br />
transformer la partition qu’est la pellicule ?<br />
Je peux arrêter et mettre en marche<br />
le projecteur, le ralentir, jouer <strong>sur</strong> la<br />
luminosité et puis placer d’autres objectifs<br />
ou des prismes devant l’objectif, jouer <strong>sur</strong> le<br />
flou, le net, la taille du cadre. Tout ça, c’est<br />
jouer pour moi avec toutes les dimensions<br />
de la projection. Une petite image ou une<br />
grande, on n’en a pas la même lecture, c’est<br />
pas la même intensité. En ralentissant le<br />
projecteur, en s’approchant d’une vitesse<br />
très lente, l’obturateur devient acteur dans<br />
la perception de l’image, un nouveau type<br />
de flicker naît, qui a son propre rythme.<br />
La lampe va chauffer le film, l’image va<br />
commencer à gonfler jusqu’à la brûlure<br />
si on traîne trop. Ce sont un peu les<br />
paramètres de jeu.<br />
Ma manière de travailler le cinéma est<br />
proche des méthodes de la musique<br />
électroacoustique : j’ai une banque<br />
d’images dans laquelle je puise en fonction<br />
de la personne avec qui je joue et de ce qui<br />
se construit. Je n’ai pas de film fini, c’est un<br />
montage permanent. Il y a des sons, des<br />
images que tu abandonnes et que tu vas<br />
reprendre cinq ans plus tard dans un autre<br />
contexte parce que tu es différent. C’est<br />
très marrant de vouloir transformer cet<br />
art du support qu’est le cinéma et d’en faire<br />
quelque chose de vivant qui est capable à<br />
chaque projection d’être transformé.<br />
La performance nous permet de nous<br />
adapter, de jouer dans des endroits<br />
abracadabrants, jusque dans la forêt…<br />
Selon l’espace, notre installation a un<br />
rapport différent avec le public et la<br />
perception qu’ils peuvent avoir de ce qu’on<br />
projette ».<br />
La pellicule, le cinéma : fétichisme ?<br />
« En travaillant la pellicule, on n’arrive pas<br />
au même endroit qu’en travaillant la vidéo.<br />
Lors d’une tournée en Nouvelle-Zélande,<br />
des gens nous ont dit ‘ça fait longtemps<br />
qu’on n’avait plus vu de pellicule’. Ils avaient<br />
du mal à mettre des mots là-dessus, à part<br />
‘c’est beau’ ; ils étaient un peu choqués,<br />
ils avaient oublié les qualités du film. Les<br />
gens bouffent de la vidéo et se foutent des<br />
conditions de projection et là, ils se rendent<br />
compte que ce n’est pas pareil, il y a une<br />
autre splendeur. C’est comme la peinture<br />
et la photo ; ce n’est pas parce qu’il y a eu<br />
la photo qu’on s’est arrêté de peindre. Peutêtre<br />
que cela deviendra une niche, les gens<br />
rigolent avec nos antiquités mais pour moi<br />
cela reste d’actualité, ça marche. Et puis c’est<br />
indestructible ».<br />
Ouvrir un lieu<br />
Q: Y a-t-il quelque chose que tu retrouves<br />
dans tous ces espaces qui ne sont pas faits<br />
pour le cinéma ?<br />
« On existe parce qu’il y a une industrie à<br />
côté, qu’elle vit et qu’il y a plein de trucs<br />
qui meurent et qu’on récupère. On est dans<br />
une société riche qui a beaucoup de déchets<br />
de bâtiments, même s’il y a un droit de<br />
propriété infernal <strong>sur</strong> lequel tu butes tout<br />
le temps. Je crois qu’on est complémentaire.<br />
Le fonctionnement en collectif, quand on<br />
a commencé, c’était ultra-rare et les gens<br />
étaient étonnés. On représente une partie<br />
du cinéma, je n’ai aucune prétention à dire<br />
que tout doit être comme ça, tout le monde<br />
ne vit pas d’amour et d’eau fraîche. Même<br />
un multiplexe me réjouit, au moins, ça vit.<br />
Que veux-tu faire contre ou pour ?<br />
Dans les années 1970, tout le monde s’est<br />
mis à transformer sa salle unique pour en<br />
faire sept salles, on s’est retrouvé dans des<br />
boîtes d’allumettes à mater la télé, puis<br />
dans les années 1990, c’est le multiplexe<br />
en banlieue et les cinémas du centre qui<br />
ferment ; on peut s’apitoyer, c’est peut-être<br />
encore un nivellement par le bas, mais c’est<br />
comme ça.<br />
Heureusement, il y a toujours des gens qui<br />
ont envie de dire qu’autre chose existe. Des<br />
lieux hors-normes qui proposent une autre<br />
forme de cinéma adaptée à l’œuvre.<br />
Au départ, ce sont des lieux souvent mal<br />
commodes ou qui nécessitent un boulot<br />
de forçat pour les rendre adaptables. La<br />
plupart du temps, c’est une activité qui ne<br />
rentre pas dans une économie classique,<br />
c’est pas le pognon qui gouverne, c’est le<br />
désir. J’ai l’impression d’une nécessité. Des<br />
gens ont une envie très forte de faire ou de<br />
montrer des films. L’envie, c’est le cinéma, le<br />
reste, ils s’en foutent un peu. Ces gens, leurs<br />
convictions, leurs nécessités vont donner<br />
une personnalité au lieu au-delà de son<br />
architecture ».<br />
……………………………………………<br />
Étienne Caire<br />
51
The mother of European artisan laboratories<br />
was the obvious first stop on our journey<br />
to meet Etienne Caire aka Riojim, the<br />
cowboy cineast. It was born in the Grenoble<br />
home of experimental arts, the artist-run<br />
squat Le 102, in 1991 and was quickly<br />
made available to all. Resulting overpopulation<br />
prompted <strong>MTK</strong> to encourage others<br />
to start their own labs, so forming the first<br />
lab network.<br />
After leaving the 102, they spent two years<br />
in an ex-foundry before moving to the<br />
present building, once used to store dairy<br />
products. Here they have an agreement with<br />
the city of Grenoble. It took 3 months to<br />
renovate. In all, 6 arts associations occupy<br />
the premises. Relationships between them<br />
are informal and productive. <strong>MTK</strong> shares<br />
the 1st floor with them, using it for music<br />
and cinema rehearsals. Their lab is on<br />
the ground floor: development facilities in<br />
the centre are <strong>sur</strong>rounded by contact and<br />
optical printers, editing tables and a small<br />
screening space to check work. Apart from<br />
sundry skeletons, cinema posters of dubious<br />
taste and a nicotine yellow patina, no particular<br />
effort has been made to decorate<br />
the place. As they say, it is people who give<br />
places their character.<br />
<strong>MTK</strong> continue to introduce users to the art<br />
of hand-crafted film, providing equipment<br />
and advice, if required, throughout the<br />
fabrication process. They find helping to<br />
try things out enjoyable. They also offer<br />
residencies to artists whose work they know<br />
along with some financial support. There<br />
are no paid employees. People are here<br />
because they want to be. And it doesn’t<br />
cost a lot to function with the discards of a<br />
wealthy society.<br />
They continue to take to the road in various<br />
guises, performing cinema as a live art form.<br />
They are fully convinced of the complementary,<br />
and necessary, function they perform.<br />
While professional labs continue to close<br />
down, for <strong>MTK</strong> the artist lab network is<br />
where cinematographic knowledge and<br />
techniques will continue to be passed on in<br />
the future.