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Le transfert d'eau de la Narmada - Cerna

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1.2. <strong>Le</strong>s régions déficitaires : le nord <strong>de</strong> l’état du Gujarat et l’extrémité sud du Rajasthan<strong>Le</strong>s zones qui vont bénéficier <strong>de</strong> ces <strong>transfert</strong>s d’eau se situent essentiellement dansl’état du Gujarat. L’extrémité sud du Rajasthan en bénéficiera aussi mais très légèrement.L’état du Gujarat est l’un <strong>de</strong>s plus puissants d’In<strong>de</strong>, il possè<strong>de</strong> <strong>de</strong> vastes terres agricoles ainsiqu’une industrie chimique très importante. Il peut être subdivisé en 3 unités géographiques : <strong>la</strong>partie péninsu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> Saurashtra, Kutch au nord-est qui contient le désert <strong>de</strong> Kutch et une 3 epartie s’étendant <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> Rann <strong>de</strong> Kutch jusqu’à <strong>la</strong> rivière <strong>de</strong> Damanganga. <strong>Le</strong> climat esttrès disparate entre le nord très sec et le sud plus humi<strong>de</strong>, mais reste globalement plutôt semiari<strong>de</strong>.<strong>Le</strong>s précipitations sont elles aussi très inégales mais, dans les zones concernées par lefutur p<strong>la</strong>n d’irrigation, celles-ci sont faibles, notamment dans cette région <strong>de</strong> Kutch qui, tousles 2 ou 3 ans doit faire face à <strong>de</strong> graves sécheresses. La situation est donc difficile dans leszones rurales, mais <strong>de</strong> nombreuses gran<strong>de</strong>s villes <strong>de</strong> cet état (qui se trouvent dans <strong>la</strong> futurzone <strong>de</strong>sservie par le <strong>transfert</strong> d’eau) comme Ahmedabad (qui est <strong>la</strong> plus grosse ville duGujarat avec 3 millions d’habitants), Rajkot, Dhora, Surendagar ou Jetpur connaissent aussi<strong>de</strong> graves problèmes <strong>de</strong> pénuries d’eau. En 2000 par exemple, Ahmedabad a du faire face àune crise grave, et un pipeline <strong>de</strong> 34km a du être construit en urgence en 6 mois pour fairevenir <strong>de</strong> l’eau <strong>de</strong>puis le canal <strong>de</strong> Mahi à Raska pour un coût <strong>de</strong> 26 millions d’euros. Maisétant donné l’évolution <strong>de</strong> <strong>la</strong> croissance <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en eau <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville, ce projet mis enp<strong>la</strong>ce en catastrophe pourrait ne plus être suffisant dans cinq ans ! Un autre exemple marquantest celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Surendagar qui, toujours en 2000, ne recevait d’eau dans ses réservoirsque tous les quatre à cinq jours, même en pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> mousson. Là encore, un projet d’urgencea du être mis en p<strong>la</strong>ce avec un système <strong>de</strong> puits construits en 40 jours 3 .<strong>Le</strong>s ressources actuelles en eau <strong>de</strong> ces régions sont multiples mais peu abondantes. Parexemple, dans le district <strong>de</strong> Kutch, l’eau <strong>de</strong> pluie est collectée, <strong>de</strong>s puits permettent aussi <strong>de</strong>récupérer un peu d’eau dans les aquifères supérieurs, mais nombre d’entre eux s’assèchent aufil <strong>de</strong>s ans, et quelques forages gouvernementaux permettent d’aller chercher l’eau <strong>de</strong>s nappesplus profon<strong>de</strong>s (mais 66% <strong>de</strong> l’état du Gujarat est constitué <strong>de</strong> zones rocailleuses, peuadéquates à <strong>la</strong> rétention d’eau et donc à <strong>la</strong> formation d’aquifères). Mais globalement, il n’y apas <strong>de</strong> source importante d’eau facilement accessible, <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s rivières ne sont paspermanentes et <strong>la</strong> géologie locale rend difficile <strong>la</strong> construction <strong>de</strong> barrages.2. Dimensions techniques et économiques du projet2.1. Un gigantesque système <strong>de</strong> canaux s’appuyant sur <strong>de</strong> nombreux barrages le long <strong>de</strong><strong>la</strong> <strong>Narmada</strong>Chronologie d’un chantier sans cesse remis en cause<strong>Le</strong> chantier <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Narmada</strong> a commencé dès 1961 sous l’impulsion <strong>de</strong> Nehru, et aujourd’huien 2003, il est encore bien loin d’être fini. <strong>Le</strong> projet a ensuite réellement démarré avec <strong>la</strong>commission <strong>de</strong> Khos<strong>la</strong> chargée <strong>de</strong> p<strong>la</strong>nifier les projets d’irrigation <strong>de</strong> cette vallée <strong>de</strong> <strong>la</strong><strong>Narmada</strong>. En 1965, <strong>la</strong> commission propose <strong>la</strong> construction d’un barrage <strong>de</strong> 154 mètres àBharuch, mais le gouvernement <strong>de</strong> Madhya Pra<strong>de</strong>sh ne donne pas son accord. <strong>Le</strong>s travauxcommencent dès 1973 avec <strong>la</strong> construction <strong>de</strong>s barrage <strong>de</strong> Tawa et Chhoti à côté <strong>de</strong>Hoshangbad. <strong>Le</strong> <strong>Narmada</strong> Water Dispute Tribunal (NWDT) est mis en p<strong>la</strong>ce en 1969 pourtenter <strong>de</strong> trouver une issue à ces problèmes <strong>de</strong> discor<strong>de</strong>s entre les différents états (qui sont3 voir le site : www.ahmedabad.com/cgi-bin/refer.cgi2


essentiellement <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> répartition <strong>de</strong> l’eau et <strong>de</strong> hauteur <strong>de</strong>s barrages). Un accor<strong>de</strong>ntre les différents états est finalement conclu 10 ans plus tard, en 1979 allouant à chaque étatles quantités d’eau suivantes : 22,63 km 3 pour Madhya Pra<strong>de</strong>sh ; 11,16 km 3 pour Gujarat ;0,62 km 3 pour le Rajasthan; 0,31km 3 pour le Maharashtra. <strong>Le</strong>s hauteurs <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux plus grosbarrages sont aussi fixées : à 173m pour le barrage Sardar Sarovar (situé dans le Gujarat) et à265m pour le <strong>Narmada</strong> Sagar (dans le Madhya Pra<strong>de</strong>sh).A partir <strong>de</strong>s années 1980, <strong>de</strong>s mouvements d’opposition commencent à se mettre en p<strong>la</strong>ce,avec notamment le mouvement <strong>Narmada</strong> Bachao Ando<strong>la</strong>n, sous l’impulsion <strong>de</strong> MedhaPatkher. <strong>Le</strong>s travaux seront par <strong>la</strong> suite régulièrement interrompus.Une étape importante dans le déroulement <strong>de</strong> ce projet est l’étu<strong>de</strong> indépendante menée par <strong>la</strong>commission Morse, à <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Banque Mondiale, qui publie un rapport en 1992, trèscritique sur <strong>de</strong> nombreux points, notamment sur les dép<strong>la</strong>cements massifs <strong>de</strong> personnes et lesdégâts environnementaux. La banque se retire finalement du projet en 1993. <strong>Le</strong>s <strong>de</strong>rnièresannées ont vu une décision <strong>de</strong> <strong>la</strong> Cour suprême en 1995 qui a stoppé les travaux sur le SardarSarovar (barrage le plus controversé) à une hauteur <strong>de</strong> 80,3 mètres, contrairement aux 138mètres initialement prévu. Cette même cour autorisa en 1999 <strong>de</strong> monter le barrage à 88mètres, puis à 93 mètres, et enfin à 110 mètres aujourd’hui.Un complexe <strong>de</strong> barrages sur le cours <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Narmada</strong> et <strong>de</strong> ses affluents<strong>Le</strong> projet d’aménagement <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Narmada</strong> est pharaonique, avec <strong>la</strong> construction <strong>de</strong> près <strong>de</strong>3000 petits barrages, 135 moyens, et 30 grands. Il repose en outre sur <strong>de</strong>ux barragesconsidérables que sont le Sardar Sarovar et le <strong>Narmada</strong> Sagar. <strong>Le</strong> Sardar Sarovar est situédans l’état du Gujarat et représente sans aucun doute le barrage le plus controversé <strong>de</strong> tout leprogramme. Il était prévu initialement d’une hauteur <strong>de</strong> 138 mètres, mais a été bloqué en 1999à 93m. Mais les travaux ont repris et le barrage <strong>de</strong>vrait atteindre sa hauteur finale <strong>de</strong> 138,68d’ici 2005. <strong>Le</strong> <strong>Narmada</strong> Sagar se trouve quand à lui dans l’état <strong>de</strong> Madhya Pra<strong>de</strong>sh et a unehauteur <strong>de</strong> 265 mètres. L’une <strong>de</strong>s fonctions premières <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier est <strong>de</strong> fournir enpermanence 5 km 3 au Sardar Sarovar. Certains barrages sont déjà construits (Tawa, Choti en1975, Bargi en 1989 par exemple) et d’autres sont encore en construction.L’intérêt <strong>de</strong> ces barrages rési<strong>de</strong> essentiellement dans <strong>la</strong> production d’électricité, uneaugmentation <strong>de</strong>s terres irriguées, une source d’eau potable (les chiffres seront présentés plusbas), et <strong>la</strong> contrôle <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Narmada</strong>.Un <strong>transfert</strong> d’eau colossal <strong>de</strong>puis le réservoir du Sardar Sarovar vers le nord duGujaratUn autre chantier est en cours <strong>de</strong> construction, parallèlement à l’édification <strong>de</strong> tous cesBarrages : un immense réseaux <strong>de</strong> canaux visant à irriguer différentes régions plus ari<strong>de</strong>s duGujarat. Ce système se compose d’un canal principal qui part <strong>de</strong>puis le réservoir du SardarSarovar au sud du Gujarat, pour aller jusqu’à <strong>la</strong> frontière avec le Rajasthan au niveau <strong>de</strong> ville<strong>de</strong> Silu dans le district <strong>de</strong> Jalore sur 458 km, en traversant <strong>de</strong>s rivières comme <strong>la</strong> Mahi ou <strong>la</strong>Sabarnati. Ce canal principal fait 250 mètres <strong>de</strong> <strong>la</strong>rge près du réservoir et 100 mètres à <strong>la</strong>frontière avec le Rajahstan, ce qui en fait le canal le plus <strong>la</strong>rge au mon<strong>de</strong>. Sur ce canalprincipal se greffent neuf branches secondaires, dont <strong>la</strong> branche <strong>de</strong> Kutch qui va amener <strong>de</strong>l’eau dans <strong>la</strong> partie sud du District <strong>de</strong> Kutch ou bien encore <strong>la</strong> branche <strong>de</strong> Saurashtra qui vaelle-même se subdiviser en six autres branches. On a au final un réseau <strong>de</strong> canaux secondaires<strong>de</strong> 66000 km <strong>de</strong> longueur, couvrant essentiellement <strong>la</strong> partie sud du district <strong>de</strong> Kutch, <strong>la</strong> partieest <strong>de</strong> <strong>la</strong> péninsule <strong>de</strong> Saurashtra, <strong>la</strong> partie plus vers l’est <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> gujarat, ainsi qu’uneinfime partie du Rajasthan (cf cartes en annexe). <strong>Le</strong>s difficultés climatiques et l’aridité <strong>de</strong> ces3


zones ont été présentées précé<strong>de</strong>mment. D’autre part, ce réseau ne fonctionne pas uniquementpar gravité mais quelques pompes sont mises en p<strong>la</strong>ce. Et <strong>la</strong> construction <strong>de</strong> ce réseau ne<strong>de</strong>vrait s’achever qu’en 2025.2.2. Avantages et coûts annoncés officiellement : les chiffres (fournis par <strong>la</strong> <strong>Narmada</strong>Control Authority)Puissance hydroélectrique<strong>Le</strong>s 29 barrages situés dans le Madhya Pra<strong>de</strong>sh <strong>de</strong>vraient fournir une puissance <strong>de</strong> 2000 MW.<strong>Le</strong> seul barrage <strong>de</strong> Sardar Sarovar <strong>de</strong>vrait quant à lui fournir 1450 MW, répartis entre leMadhya Pra<strong>de</strong>sh (57%), le Maharashtra (27%) et le Gujarat (16%).Superficie <strong>de</strong>s terres irriguées<strong>Le</strong>s barrages du Madhya Pra<strong>de</strong>sh <strong>de</strong>vraient fournir suffisamment d’eau pour irriguer 15000km2. <strong>Le</strong> Sardar Sarovar à lui seul irriguerait 21000 km2, quasiment uniquement dans l’état duGujarat (1,8 millions d’hectares) et un petit peu au Rajahstan (75000 hectares).Eau potable<strong>Le</strong> Sardar Sarovar <strong>de</strong>vrait fournir en eau potable 8215 vil<strong>la</strong>ges et 136 villes du Gujarat et131 vil<strong>la</strong>ges dans le district <strong>de</strong> Barmer au Rajasthan.CoûtsA l’heure actuel, le projet <strong>de</strong> Sardar Sarovar seul est estimé à 4,6 milliards US$, et le projetglobal coûterait autour <strong>de</strong> 9 milliard US$, ce qui représente <strong>la</strong> moitié du budget <strong>de</strong> l’irrigation<strong>de</strong> l’In<strong>de</strong> sur les 50 <strong>de</strong>rnières années. 20% du projet a été financé par <strong>de</strong>s investisseursétrangers comme <strong>la</strong> Banque Mondiale ou <strong>de</strong>s agences <strong>de</strong> crédit japonaises.3. Limites d’un projet <strong>de</strong> plus en plus controversé3.1. Une opposition forte et organiséeUne réelle opposition à tous ces chantiers a commencé à se mettre en p<strong>la</strong>ce à partir <strong>de</strong>1985 avec le mouvement <strong>Narmada</strong> Bachao Ando<strong>la</strong>n (NBA). <strong>Le</strong>ur métho<strong>de</strong> repose sur <strong>de</strong>smouvements contestataires non-violents comme les sit-in, <strong>de</strong>s grèves <strong>de</strong> <strong>la</strong> faim ou <strong>de</strong>smanifestations pacifiques. Ils agissent à tous les niveaux : local en informant directement lespopu<strong>la</strong>tions concernées, et en les mobilisant ; national organisant <strong>de</strong>s pétitions pour <strong>la</strong> courtsuprême, ou bien en participant à l’Alliance nationale <strong>de</strong>s mouvements du peuple qui est unecoalition <strong>de</strong> différents mouvements sociaux s’opposant à <strong>la</strong> libéralisation <strong>de</strong> l’économieindienne ; et international, en établissant <strong>de</strong>s liens avec d’autres groupes à l’extérieure <strong>de</strong>l’In<strong>de</strong> comme le International Rivers network (IRN) ou bien en diffusant leurs revendicationsdans le mon<strong>de</strong> entier par l’intermédiaire entre autre d'un site web. Ils commencent à se faireentendre vers <strong>la</strong> fin <strong>de</strong>s années 80, avec notamment l’une <strong>de</strong> leurs représentantes (MedhaPatkar) qui a été entendue par <strong>la</strong> Banque Mondiale à Washington. <strong>Le</strong>s actions et incroyablescombats menés par <strong>la</strong> NBA ont déjà été reporté dans <strong>de</strong> nombreux articles et ne feront doncpas ici l’objet <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> détails.4


3.2. Critiques du projet 4Des dép<strong>la</strong>cements massifs et <strong>de</strong>s réinstal<strong>la</strong>tions mal organisées<strong>Le</strong> remplissage <strong>de</strong>s réservoirs inon<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s superficies considérables et imposentd’importants dép<strong>la</strong>cements <strong>de</strong> personnes. Pour le Sardar Sarovar par exemple, 137000 ha <strong>de</strong>forêts ainsi que 11000 ha <strong>de</strong> terres agricoles seront submergées, contenant quelque 245vil<strong>la</strong>ges regroupant environ 152000 personnes au moins. <strong>Le</strong> réseau <strong>de</strong> canaux quant à luiimposera le dép<strong>la</strong>cement <strong>de</strong> 140000 personnes (chiffres officiels). La NBA annonce quand àelle un chiffre <strong>de</strong> 400000 personnes dép<strong>la</strong>cées pour le seul barrage du Sardar Sarovar. Sur leprojet dans son ensemble, on estime le nombre <strong>de</strong> personnes dép<strong>la</strong>cées aux alentours d’unmillion. <strong>Le</strong>s conditions <strong>de</strong> leur réinstal<strong>la</strong>tion sont ensuite fortement discutées. Au Gujarat,officiellement, les personnes dép<strong>la</strong>cées, même celles qui ne possédaient pas <strong>de</strong> terrainprécé<strong>de</strong>mment, sont censées recevoir un terrain d’au moins <strong>de</strong>ux ha dans <strong>la</strong> zone futured’irrigation ainsi qu’une maison et <strong>de</strong> l’argent en compensation. Au Maharashtra, le terrain seréduit à un ha au minimum et au Madhya Pra<strong>de</strong>sh, aucun terrain n’est attribué à ceux qui n’enavaient pas précé<strong>de</strong>mment. Mais par exemple, certaines personnes dép<strong>la</strong>cées il y a 30 ansn’ont toujours pas été relogées, et les terrains alloués sont le plus souvent <strong>de</strong> mauvaise qualité,parfois inondables ou bien encore sans accès à l’eau potable. De plus, les programmes <strong>de</strong>réinstal<strong>la</strong>tions se sont apparemment créés très tard, sous <strong>la</strong> pression <strong>de</strong> groupes activistescontre ces barrages. Il existe aussi une richesse ethnique au niveau <strong>de</strong> <strong>la</strong> vallée <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Narmada</strong>avec <strong>de</strong> nombreuses tribus différentes exerçant toutes sortes d’artisanat ou <strong>de</strong> métiers poursubsister. On mé<strong>la</strong>nge ainsi différentes tribus aux origines et coutumes complètementdifférentes; on rep<strong>la</strong>ce aussi parfois par exemple <strong>de</strong>s tribus <strong>de</strong> pêcheurs au milieu <strong>de</strong> terresagricoles. Près <strong>de</strong> 60% <strong>de</strong>s personnes dép<strong>la</strong>cées pour le Sardar Sarovar n’ont ainsi jamais eu<strong>de</strong> réels contacts avec <strong>la</strong> civilisation mo<strong>de</strong>rne et ont été réinstallés dans <strong>de</strong>s univers qui leursont inconnus (Roy, 1999). Il n’y a donc que très peu <strong>de</strong> respect vis-à-vis <strong>de</strong> <strong>la</strong> richesseethnique <strong>de</strong> ces tribus, mais les pressions importantes exercées par les ONG semblent faireévoluer <strong>la</strong> situation. <strong>Le</strong>s résultats <strong>de</strong>s réinstal<strong>la</strong>tions déjà effectuées sont peu encourageants.Par exemple, <strong>de</strong>s personnes dép<strong>la</strong>cées <strong>de</strong> 19 vil<strong>la</strong>ges au Gujarat ont été réinstallés dans 175sites différents où le plus souvent, leur arrivée a été mal perçue et ils ont pu subir <strong>de</strong>sviolences socialement, et même physiquement ! (Daud, 1994 et Parasuram, 1994).<strong>Le</strong>s dégâts environnementauxDe nombreux écosystèmes sont détruits par l’inondation <strong>de</strong> ces terres (par exemple,pour le barrage <strong>de</strong> Sardar Sarovar, 13700 ha <strong>de</strong> forêts ainsi que 11000 ha <strong>de</strong> terres agricolesdont les terres fertiles <strong>de</strong> <strong>la</strong> zone <strong>de</strong> Nimad seront submergées). De nombreuses zoneshumi<strong>de</strong>s, écosystèmes particulièrement fragiles, sont elles aussi détruites. Des forêts sontaussi rasées afin <strong>de</strong> rep<strong>la</strong>cer les personnes dép<strong>la</strong>cées (par exemple, pour le Sardar Sarovar,4200 ha <strong>de</strong> forêt <strong>de</strong> bonne qualité à To<strong>la</strong>da ont été rasés). La construction du barrage vaentraîner <strong>de</strong>s conséquences même à l’aval <strong>de</strong> celui-ci pour <strong>la</strong> faune, le crocodile <strong>de</strong>s maraisest par exemple fortement menacé. Tous les canaux construits dans le désert <strong>de</strong> Kutch vontgravement endommager cet écosystème fragile. L’estuaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Narmada</strong> risque <strong>de</strong> voir sasalinité augmenter, annonçant le déclin <strong>de</strong> toute son industrie <strong>de</strong> pêche. Enfin, ce choix <strong>de</strong>type d’irrigation intensive a <strong>de</strong>s conséquences sur <strong>la</strong> biodiversité (car on donne priorité à <strong>la</strong>4 <strong>Le</strong>s chiffres avancées dans <strong>la</strong> suite ont pour l’essentiel été fournis par NBA5


monoculture). <strong>Le</strong> problème est que pour l’instant, aucun budget n’a été attribué précisémentpour gérer ces problèmes environnementaux, et <strong>la</strong> politique environnementale autour duprojet<strong>Le</strong>s bénéfices apportés par ces <strong>transfert</strong>s d’eau ont été fortement surestimés<strong>Le</strong>s projets déjà réalisés comme le barrage <strong>de</strong> Bagi montrent un déca<strong>la</strong>ge important entre cequi était annoncé officiellement et <strong>la</strong> réalité. Ce barrage est terminé <strong>de</strong>puis 1990, et atteint unehauteur <strong>de</strong> 69 mètres créant un <strong>la</strong>c artificiel <strong>de</strong> 75km <strong>de</strong> long et 4,5km <strong>de</strong> <strong>la</strong>rge. Dans le p<strong>la</strong>noriginel, 437000 ha <strong>de</strong> terres <strong>de</strong>vaient être irriguées, 105 MW d’électricité produits et <strong>la</strong> ville<strong>de</strong> Jabalpur <strong>de</strong>vait recevoir 577 millions <strong>de</strong> litres par jour d’eau potable. A l’heure actuelle,24000 ha <strong>de</strong> terrains sont irrigués soit un peu plus <strong>de</strong> 5% <strong>de</strong> ce qui était prévu! De même,seulement 90 MW d’électricité sont produits. Ce cas particulier semble pouvoir se généraliser.En effet, bien que le Sardar Sarovar ne soit pas terminé, les prévisions <strong>de</strong>s concepteurss’avèreraient erronées, avec une quantité d’eau délivrée qui serait <strong>de</strong> 23% moins importanteque prévu. De même, <strong>la</strong> capacité effective hydroélectrique serait révisée fortement à <strong>la</strong> baisse.De plus, <strong>la</strong> rentabilité du projet dans son ensemble semble loin d’être assurée avec un prixmultiplié par quatre en 20 ans.Un projet marqué par <strong>de</strong> nombreuses inégalitésDeux points semblent révéler un caractère inégalitaire dans <strong>la</strong> construction <strong>de</strong> ces barrages.D’abord dans l’origine <strong>de</strong>s popu<strong>la</strong>tions dép<strong>la</strong>cées, en effet, 62% <strong>de</strong>s popu<strong>la</strong>tions affectées parles dép<strong>la</strong>cements seraient d’origine tribale ou <strong>de</strong>s intouchables alors que ceux-ci nereprésentent 27% <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion indienne. Ensuite, il semble que <strong>la</strong> répartition <strong>de</strong> l’eau nesoit pas très équitable, favorisant les riches et les industriels par rapport aux plus pauvres. Il setrouve même, qu’à l’origine, délivrer <strong>de</strong> l’eau potable n’était pas un objectif. Mais ce<strong>la</strong> <strong>de</strong>vintpar <strong>la</strong> suite un argument émotionnel <strong>de</strong> poids. De plus, malgré ce qui est annoncé, Saurashtraet Kutch, dont les popu<strong>la</strong>tions ont réellement <strong>de</strong> graves problèmes <strong>de</strong> pénurie d’eau, seraitcensé ne recevoir que 2% <strong>de</strong> l’eau totale du réservoir, et pas avant 2025 ! Il faut rappeler aussique seulement 1,6% <strong>de</strong>s terrains cultivables <strong>de</strong> Kutch se situent dans <strong>la</strong> zone concernée par lep<strong>la</strong>n d’irrigation De plus, ce <strong>de</strong>ux districts ont très peu <strong>de</strong> chance <strong>de</strong> recevoir quoi que ce soit,à cause <strong>de</strong>s villes industrielles <strong>de</strong> Vadodara et Ahmedabad qui obtiendront <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong> l’eaudisponible. On a même p<strong>la</strong>nifié autour <strong>de</strong> ces villes <strong>de</strong>s cultures très consommatrice en eaucomme <strong>la</strong> canne à sucre 5 . Il est difficile alors dans ce contexte <strong>de</strong> penser que fournir lesdistricts <strong>de</strong> Kutch et Saurashtra en eau potable soit une nécessité pour les constructeurs(rapport Morse). <strong>Le</strong>s zones sans système d’irrigation préexistant ne sont apparemment pasfavorisées. En effet, dans le district <strong>de</strong> Kutch par exemple, sur cinq zones concernées par lep<strong>la</strong>n d’irrigation (Rapar, bachau, Anjar, Mundra et Mandvi), seules <strong>de</strong>ux (Rapar et Bachau)sont considérées en situation critique, les autres possédant <strong>de</strong>s ressources souterraines en eauimportantes, et ayant déjà un niveau <strong>de</strong> développement re<strong>la</strong>tivement élevé.3.3. Une « bataille d’arguments »On a finalement une bataille entre <strong>de</strong>ux camps, à coup d’arguments plus ou moinsfondés. <strong>Le</strong> discours entre Arhundati Roy et Verghese en est une bonne illustration. Ce <strong>de</strong>rnier,dans le magasine Outlook, a en effet répondu point par point à une critique faiteprécé<strong>de</strong>mment par A. Roy, qui pour lui n’est rien d’autre qu’une bonne poète. Par exemple,5 ceci est affirmé par <strong>la</strong> NBA mais Verghese affirme que ces usines <strong>de</strong> canne à sucre ne se trouvent pas dans <strong>la</strong>zone couverte par l’irrigation du Sardar Sarovar6


elle affirme qu’aucun projet au départ <strong>de</strong> fourniture en eau potable n’était prévu, or pourVerghese, le <strong>Narmada</strong> Tribunal avait prévu 1,06 km 3 pour l’eau potable à l’état du Gujarat, cequi représente moins <strong>de</strong> 10% <strong>de</strong> l’eau d’irrigation délivrée au Gujarat par le Sardar Sarovar.De même, officiellement, le Sardar Sarovar recouvrerait 4523 ha <strong>de</strong> forets contenant 981000arbres, contrairement aux 13000 ha évoqués précé<strong>de</strong>mment. De même, il est prévu <strong>de</strong>rep<strong>la</strong>nter 11 millions d’arbres. <strong>Le</strong> problème plus globalement rési<strong>de</strong> dans le fait, selonVerghese, que les ingénieurs et les concepteurs <strong>de</strong> ce programme sont présentés comme <strong>de</strong>sprofiteurs qui exploitent <strong>la</strong> pauvreté avec pour seul objectif le profit. On voit donc qu’au final,tous les chiffres dans cette étu<strong>de</strong> sont à prendre avec précaution et qu’il y a sans doute <strong>de</strong>sexagérations <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux côtés.4. Synthèse et conclusions4.1. Un état du Gujarat en crise réelle par rapport aux problèmes d’eau…<strong>Le</strong> <strong>transfert</strong> d’eau, dans l’idée, peut paraître bon. En effet, <strong>la</strong> <strong>Narmada</strong> représente <strong>la</strong> seulevéritable source d’eau dans l’état du Gujarat. Aucun autre fleuve notable n’est présent, et lesressources souterraines sont faibles, et déjà surexploitées. Et contrairement à ce qui est avancépar les opposants aux barrages, <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s précises concernant l’évolution <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> eneau auraient été réalisées et on annonce que les ressources en eau seront déficitaires <strong>de</strong> 10 à25% par rapport aux besoins entre 2020 et 2050 (Y.K. A<strong>la</strong>gh). Donc finalement, <strong>la</strong> croissanceéconomique <strong>de</strong> <strong>la</strong> région semble <strong>de</strong>voir passer par ce <strong>transfert</strong> d’eau. Après certes, <strong>la</strong> politiqued’aménagement <strong>de</strong> <strong>la</strong> vallée et l’ampleur du projet restent fort discutables.4.2. …mais qui n’a pas besoin <strong>de</strong> ces <strong>transfert</strong>s pour <strong>de</strong>s besoins en eau potableL’un <strong>de</strong>s problèmes est que l’une <strong>de</strong>s justifications <strong>de</strong> ce projet qu’est l’eau potable estcomplètement disproportionnée. En effet, les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s en eau potable ne nécessitent pas <strong>de</strong> sigrand projet et représentent <strong>de</strong>s volumes ridicules par rapport à l’agriculture. Et à <strong>la</strong> limite,l’état du Gujarat, qui pourtant subit <strong>de</strong> graves sécheresses, semble en mesure d’êtreautosuffisant par rapport à l’eau potable.4.3. Un projet qui se justifie donc pour sa quasi-totalité comme un projet d’irrigationLa principale orientation <strong>de</strong> ce projet est donc l’irrigation, ce qui crée un problème importantau niveau économique. En effet, l’eau pour l’irrigation est gratuite, donc <strong>la</strong> seule chose quipeut justifier, d’un point <strong>de</strong> vue purement économique, <strong>la</strong> construction <strong>de</strong> tels projets est <strong>la</strong>distribution d’eau à <strong>de</strong> grosses villes qui peuvent elles acheter cette eau et rendre le projetrentable. La discussion ici peut être incluse dans une réflexion plus globale à l’échellemondiale sur <strong>la</strong> justification <strong>de</strong>s grands barrages pour l’irrigation. Il y a d’abord ce problèmedu fait que l’eau est gratuite que nous avons évoqué ci-<strong>de</strong>ssus, mais il y a aussi une critiqueplus profon<strong>de</strong> qui est le fait que l’on veuille à tout prix faire d’un désert une oasis, et que l’onn’adapte pas par exemple du tout le type <strong>de</strong> culture.D’autre part, ce projet risque d’assurer, au sein <strong>de</strong>s campagnes, un développement à <strong>de</strong>uxvitesses. En effet, <strong>la</strong> répartition <strong>de</strong> l’eau, comme nous l’avons discuté précé<strong>de</strong>mment, sembleêtre très inégalitaire, et un fossé risque <strong>de</strong> se creuser entre les riches agriculteurs <strong>de</strong>s castes lesplus puissantes qui risquent <strong>de</strong> monopoliser <strong>la</strong> ressource par rapport à <strong>de</strong>s agriculteurs pluspauvres, garantissant un développement à <strong>de</strong>ux vitesses où ce sont les plus riches qui enprofitent le plus. On retrouve ainsi <strong>la</strong> dualité entre les uns qui considèrent l’eau comme une7


marchandise (industries, villes et riches agriculteurs) et les autres pour qui l’eau est uneressource vitale, et considérée plutôt comme un droit universel.4.4. Des alternatives envisagées qui diminueraient <strong>la</strong> rentabilité du projetAfin <strong>de</strong> diminuer l’importance <strong>de</strong>s aménagements <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Narmada</strong>, différentes ONG ontessayé <strong>de</strong> montrer que <strong>de</strong>s systèmes alternatifs pouvaient apporter <strong>de</strong>s quantités considérablesd’eau. Ceux-ci passent par une optimisation <strong>de</strong> l’utilisation <strong>de</strong>s ressources en eau à un niveauplus local. Ce<strong>la</strong> peut se faire d’une part au niveau <strong>de</strong>s réseaux <strong>de</strong> distribution où, très souvent,une mauvaise maintenance aboutit à <strong>de</strong>s gaspil<strong>la</strong>ges considérables, ainsi qu’au niveau <strong>de</strong>ssystèmes d’irrigation dont l’efficacité peut, très souvent, être amélioré en limitant lesquantités d’eau évaporées. Et d’autre part au niveau <strong>de</strong> <strong>la</strong> captation <strong>de</strong>s eaux. La mise en p<strong>la</strong>ce<strong>de</strong> réservoirs et <strong>de</strong> petits barrages afin <strong>de</strong> collecter les eaux <strong>de</strong> pluie s’avère être <strong>de</strong> plus enplus intéressant et <strong>de</strong> nombreuses étu<strong>de</strong>s ten<strong>de</strong>nt à montrer l’efficacité <strong>de</strong> cette métho<strong>de</strong>.Mccully (1996) a ainsi calculé que <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> collectes <strong>de</strong>s eaux <strong>de</strong> pluie avec <strong>de</strong> petitsbarrages associé à une protection <strong>de</strong>s sols pourrait permettre <strong>de</strong> collecter 1/5 <strong>de</strong>s précipitationsau Gujarat, soit 50% <strong>de</strong> l’eau supposé être délivrée par le Sardar Sarovar. <strong>Le</strong>s conséquencessur le cycle hydrologique restent cependant inconnues, avec notamment un impact sur le débit<strong>de</strong>s rivières qui serait susceptible <strong>de</strong> diminuer à considérer. D’autre part, une prise <strong>de</strong>conscience sur le long terme est nécessaire, notamment au niveau <strong>de</strong> <strong>la</strong> protection et <strong>de</strong> <strong>la</strong>stabilisation <strong>de</strong>s sols et <strong>de</strong>s ressources. Un sol non dégradé avec un couvert végétal assure eneffet une meilleure recharge <strong>de</strong>s aquifères, qui par ailleurs ont besoin d’être mieux régulé. Laconstruction <strong>de</strong>s puits privés et les prélèvements effectués doivent aussi par ailleurs êtremieux contrôlée. <strong>Le</strong> type <strong>de</strong> culture est aussi un facteur important à considérer. Dans une zone<strong>de</strong> quasi- désert comme le district <strong>de</strong> Kutch, il est plus intéressant <strong>de</strong> cultiver <strong>de</strong>s p<strong>la</strong>ntes quiont une certaine résistance aux sécheresses plutôt que <strong>de</strong> vouloir absolument faire <strong>de</strong> ce désertun énorme oasis! On peut aussi adapter les activités, en favorisant par exemple une activitépastorale, qui est actuellement en déclin, par rapport à une agriculture intensive.Tout ce<strong>la</strong> permettrait ainsi <strong>de</strong> diminuer <strong>la</strong> pression sur le barrage. Toutes ces propositionspourraient permettre <strong>de</strong> diminuer <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en eau par rapport au barrage et donc <strong>de</strong>diminuer l’ampleur <strong>de</strong>s infrastructures. S. Paranjape et K.J. Roy ont par exemple montré quele passage <strong>de</strong> <strong>la</strong> hauteur du Sardar Sarovar <strong>de</strong> 140 mètres à 107 mètres réduire <strong>la</strong> taille <strong>de</strong> <strong>la</strong>zone d’inondation <strong>de</strong> 36000 ha à 10800 ha, ce qui diminuerait considérablement le nombre <strong>de</strong>personnes dép<strong>la</strong>cées et les dommages créés. De même, <strong>la</strong> production électrique passerait <strong>de</strong>1400 MW à 850 MW.Mais l’un <strong>de</strong>s obstacles au développement d’un système <strong>de</strong> gestion plus local rési<strong>de</strong> entreautre dans le fait que <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s fonds sont alloués au barrage qui est présenté parles autorités comme <strong>la</strong> seule alternative aux pénuries d’eau. <strong>Le</strong> fait que les bénéfices soientquantifiables et visibles par rapport à une logique sur le plus long terme dont les apports sontmoins perceptibles joue aussi un rôle important dans l’acceptation <strong>de</strong> ce barrage.Il y aussi un argument économique contre le développement <strong>de</strong> ces systèmes alternatifs.Prenons l’exemple d’une ville comme Ahmedabad. L’utilisation <strong>de</strong> systèmes alternatifs vaavoir <strong>de</strong> graves conséquences sur le service public <strong>de</strong> distribution. Un service <strong>de</strong> distribution,pour être rentable, doit avoir une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> constante, qui lui permet <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s p<strong>la</strong>ns et <strong>de</strong>pouvoir investir dans <strong>de</strong>s infrastructures ; or, l’utilisation <strong>de</strong> réservoirs personnelles parexemple, que les consommateurs utiliseront préférentiellement car l’eau est alors gratuite,crée d’importantes fluctuations <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. On peut faire le raisonnement à l’échelleentière <strong>de</strong> l’état. En effet, si l’on a choisit <strong>de</strong> s’engager dans un grand projet hydraulique, iln’est pas intéressant <strong>de</strong> mettre en p<strong>la</strong>ce d’autres systèmes <strong>de</strong> captation <strong>de</strong>s ressources, carl’objectif est quand même <strong>de</strong> rentabiliser l’investissement fait à <strong>la</strong> base.8


4.5. Une quantification <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en eau nécessaireUne quantification précise <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et <strong>de</strong> son évolution est à mettre en p<strong>la</strong>ce, mais unetelle étu<strong>de</strong> est presque maintenant trop tard. En effet, il aurait été plus intéressant <strong>de</strong> quantifiercette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au départ, en essayant <strong>de</strong> voir si une gestion au niveau local aurait suffit, avant<strong>de</strong> se <strong>la</strong>ncer tout <strong>de</strong> suite dans ce projet. De plus, une prévision <strong>de</strong> <strong>la</strong> croissance en In<strong>de</strong>s’avère extrêmement difficile étant donné le rythme <strong>de</strong> celle-ci.L’eau, malgré tous les retards et les controverses, a finalement commencé à couler dans lecanal principal en 2002. Mais l’In<strong>de</strong> n’en reste pas là et à peine a-t-elle commencé à voir lebout <strong>de</strong> ce projet colossal qu’elle s’apprête à se <strong>la</strong>ncer dans un nouveau projet déjà fortcontreversé. Il serait en effet question <strong>de</strong> créer un véritable mail<strong>la</strong>ge <strong>de</strong> l’In<strong>de</strong> eninterconnectant les différentes rivières!BibliographieLy<strong>la</strong> Mehta (1996).Water, Difference and Power : Kutch and the Sardar Sarovar (<strong>Narmada</strong>)Project, IDS working paper 54.Racine J.L. <strong>Le</strong> débat sur <strong>la</strong> <strong>Narmada</strong>: l’In<strong>de</strong> face au dilemme <strong>de</strong>s grands barrages, Hérodote,n°102, 3 e trimestre 2001.Verghese BG. (1999). A poetic licence. Outlook ; July5.<strong>Narmada</strong> Bachao ando<strong>la</strong>n. The river and the life. The people struggle in <strong>Narmada</strong> Valley,1998.Turaga U. (2000), Damming waters and wisdom: protest in the <strong>Narmada</strong> river valley,technology in society 22, 237-253.Ram N. (1993). Muddy waters: a critical assessment of the benefits of the Sardar SarovarProject. New-Dehli: kalpavriksh.Roy A. The greater common good; outlook 1999 ; May 24.Paranjape S. and Joy K.J. (1994). Revisiting the Alternative Restructuring of Sardar Sarovar: -International river network Sardar Sarovar Project: An overview. Berkeley, CA:IRNRoutledge P. (2003). Voices of the damned : discursive resistance amidst erasure in the<strong>Narmada</strong> Valley, India. Political Geography 22, 243-270.McCully, P. (1996). Silence drivers : the ecology and politics of <strong>la</strong>rge dams. London : Zed.http://www.narmada.orgMorse B. (1992), Sardar Sarovar: the report of the in<strong>de</strong>pen<strong>de</strong>nt review. Ottawa: the WorldBank and resource Futures international.Moore M. India’s lifeline or man-ma<strong>de</strong> disaster? Washington post. Washington DC, 1993;aug 24.Morse B., Berger T. (1997). Findings and recomandations of the in<strong>de</strong>pen<strong>de</strong>nt review. In W.F.Fisher (Ed.), Toward sustainable <strong>de</strong>velopment : Strugling over India’s <strong>Narmada</strong> river. Jaipur:Rawat publications.9


Annexe10

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