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Clauses et dispositifs anti-spéculatifs dans l'accession aidée à - Anil

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Mars2011ANILHABITATACTUALITE<strong>Clauses</strong> <strong>et</strong> <strong>dispositifs</strong> <strong>anti</strong>-spéculatifs <strong>dans</strong> l’accessionaidée à la propriétéAugustin Chomel, directeur de l'ADIL de l'Hérault


SOMMAIREIntroduction : Une préoccupation forte des collectivités territoriales <strong>et</strong> des promoteurssociaux ........................................................................................................................................................2Le dispositif législatif <strong>anti</strong>-spéculatif <strong>dans</strong> la vente HLM.......................................................................3En cas de revente du logement.................................................................................................................................................3Le droit de préemption au profit de l’organisme HLM vendeur ...................................................................................3L’obligation de rembourser tout ou partie de l’aide perçue en cas de revente avec plus-value ............................3En cas de mise en location du logement.................................................................................................................................3Les clauses <strong>anti</strong>-spéculatives en accession aidée à la propriété ...........................................................4Une création de la pratique progressivement encadrée par la jurisprudence................................................................4Des exceptions au principe de libre disposition des biens .................................................................................................5Les clauses limitatives du droit de libre disposition .............................................................................................................6La clause d’inaliénabilité..........................................................................................................................................................7Les autres clauses restrictives du droit de libre disposition........................................................................................ 13Les clauses ayant pour obj<strong>et</strong> de limiter la libre affectation de l’usage du bien par l’acquéreur ............................... 17Obligation de construire <strong>dans</strong> un certain délai............................................................................................................... 17Obligation d’occuper le logement acquis ou construit à titre de résidence principale de l’acquéreur.............. 18L’interdiction de louer ou les restrictions au droit de louer....................................................................................... 18Des clauses tendant à assurer le remboursement des aides accordées ....................................................................... 19Le remboursement par l’acquéreur de la minoration de charge foncière en cas de plus-value .......................... 19Le remboursement par l’acquéreur des aides directes versées par les collectivités territoriales ...................... 20Les recours de l’acquéreur d’un bien affecté d’une clause <strong>anti</strong>-spéculative ................................................................. 21Le juge civil est, en principe, compétent en cas de contestation sur la clause restrictive du droit dedisposer................................................................................................................................................................................... 21Quelle action pour contester la clause ou y déroger ? La nullité sinon rien !......................................................... 221


Introduction :Une préoccupation forte des collectivités territoriales <strong>et</strong>des promoteurs sociauxDe nombreuses collectivités locales, communes ou établissements de coopérationintercommunale (EPCI), ont mis en place des <strong>dispositifs</strong> d’aide à l’accession sociale, enparticulier à la faveur des dispositions de la loi ENL du 13 juill<strong>et</strong> 2006. D’autres y réfléchissentou s’apprêtent à le faire : la hausse des prix des terrains <strong>et</strong> des logements pousse en eff<strong>et</strong> à uneintervention croissante, car elle rend plus difficile l’accession à la propriété <strong>et</strong> tend à renforcerles phénomènes de ségrégation spatiale. Ces aides, qui viennent souvent compléter celles del’Etat, peuvent prendre diverses formes : primes aux accédants, subventions aux promoteursen contrepartie d’un abaissement du prix de vente, vente de terrain à un prix préférentiel ouinférieur au prix du marché.La clause <strong>anti</strong>-spéculative est principalement une création de la pratique notariale, en réponse àla demande des collectivités locales <strong>et</strong> en particulier des communes, lesquelles veulent ainsis’assurer que les aides qu’elles dispensent ne pourront pas être détournées de leur obj<strong>et</strong>.Elle est donc destinée à éviter que le bénéficiaire de l'aide de la collectivité ne soit tenté derevendre rapidement le terrain ou le logement qu'il a acquis, pour encaisser à c<strong>et</strong>te occasion,une plus-value parfois importante par rapport au prix d'acquisition, <strong>et</strong> qui apparaîtra parailleurs illégitime, compte tenu de l’aide publique apportée au moment de l’acquisition initiale.La clause <strong>anti</strong>-spéculative : pour quel objectif ?La clause « <strong>anti</strong>-spéculative » peut en réalité poursuivre plusieurs objectifs :– limiter la liberté de disposer de l’acquéreur pendant un certain délai ;– l’empêcher de réaliser <strong>et</strong> d’empocher une plus-value jugée illégitime ;– maintenir l’affectation du bien à usage de résidence principale de l’acquéreur ;– obtenir le remboursement des aides ayant permis d’abaisser le prix d’achat du logement, duterrain acquis, ou des aides à l’accession s’il s’agit d’une aide directe, qu’elle prenne la formed’une subvention ou d’un prêt à taux réduit.Ces différents objectifs peuvent d’ailleurs se combiner entre eux.Une première intervention législative <strong>dans</strong> le cadre de la loi ENL du 13 juill<strong>et</strong> 2006 est venue, àla fois, conforter le principe de licéité des <strong>dispositifs</strong> <strong>anti</strong>-spéculatifs, mais également parcontrecoup questionner sur les pratiques ayant cours <strong>dans</strong> ce domaine.S’agissant des clauses <strong>anti</strong>-spéculatives stipulées contractuellement, la jurisprudence ne s’estprononcée à ce jour que sur certains aspects, ce qui perm<strong>et</strong> de préciser les conditions devalidité de celles-ci, mais laisse en suspens d’autres questions, d’autant que la diversité dessituations qui les motivent <strong>et</strong> la variété de la durée pour laquelle elles sont prévues ne perm<strong>et</strong>pas de gar<strong>anti</strong>r la licéité de l’ensemble de ces clauses. Leur cadre juridique reste encore àhomogénéiser.2


Le dispositif législatif <strong>anti</strong>-spéculatif <strong>dans</strong> la vente HLMEn eff<strong>et</strong> à ce jour, le législateur 1est intervenu à l’occasion de la loi ENL du 13 juill<strong>et</strong> 2006, modifiéepar la loi du 25 mars 2009, pour éviter la tentation d’une éventuelle « spéculation » sur la vente d’unlogement ayant bénéficié d’une aide publique, <strong>dans</strong> le seul domaine de la vente de logements HLM àune personne physique, en instaurant un mécanisme qui restreint la liberté de l’acquéreur en cas derevente ou en cas de mise en location <strong>dans</strong> les cinq ans suivant la date d’acquisition.En cas de revente du logementLe dispositif <strong>anti</strong>-spéculatif repose sur un double mécanisme : d’une part un droit de préemption légalau profit de l’organisme HLM <strong>et</strong> d’autre part une obligation de rembourser le montant de l’aideperçue en cas de plus-value à la revente, si l’acquéreur a bénéficié d’un prix minoré lors de l’achat dulogement HLM.Le droit de préemption au profit de l’organisme HLM vendeurL’acquéreur personne physique qui souhaite revendre son logement <strong>dans</strong> les cinq ans suivantl’acquisition, doit en informer l’organisme HLM qui peut se porter acquéreur en priorité. Ce droitreconnu désormais par la loi perm<strong>et</strong> à l’organisme vendeur initial de rach<strong>et</strong>er le logement au prixproposé ou <strong>dans</strong> les mêmes conditions qu’un autre candidat acquéreur ayant conclu une promessede vente ou d’achat avec le vendeur. En revanche, si l’organisme HLM discute le prix ou en proposeun prix moindre, cela équivaut à un refus de l’offre d’acquérir aux conditions proposées <strong>et</strong> fauted’accord entre les parties, il ne pourra acquérir le logement mis en vente.L’obligation de rembourser tout ou partie de l’aide perçue en cas de reventeavec plus-valueQuand le logement acquis à un prix inférieur à l’évaluation faite par le service des domaines, estrevendu <strong>dans</strong> les cinq ans de l’acquisition, <strong>et</strong> ce, à compter du 28 mars 2009, l’acquéreur personnephysique reverse à l’organisme HLM une somme égale à la différence entre le prix de vente <strong>et</strong> le prixd’acquisition. C<strong>et</strong>te somme ne peut excéder l’écart constaté entre l’évaluation faite par le service desdomaines lors de l’acquisition <strong>et</strong> le prix d’acquisition, soit au maximum la décote dont il a bénéficié àl’achat. Les prix sont entendus hors frais d’acte <strong>et</strong> d’accessoires à la vente.En cas de mise en location du logementLorsque l’acquéreur personne physique a acquis son logement à un prix inférieur à l’évaluation desdomaines, <strong>et</strong> le loue <strong>dans</strong> les cinq ans suivant l’acquisition, le niveau du loyer perçu est encadré. Il nepourra dépasser le montant du dernier loyer acquitté avant acquisition. Ce montant est révisé au 1erjanvier de chaque année <strong>dans</strong> les conditions prévues par l’article 17 d de la loi du 6 juill<strong>et</strong> 1989 2 .1CCH : L.443-12-1. Ce texte a été inséré par la loi du 13 juill<strong>et</strong> 2006 « Engagement national pour le logement ». Il a été modifié par la loidu 25 mars 2009 « Mobilisation pour le logement <strong>et</strong> la lutte contre l'exclusion ».2Arrêté du 5.12.07 : JO du 14.12.07.3


Les clauses <strong>anti</strong>-spéculatives en accession aidée à lapropriétéUne création de la pratique progressivement encadrée par lajurisprudenceDans les domaines autres que celui de la vente de logements HLM à une personne physique, les<strong>dispositifs</strong> <strong>anti</strong> spéculatifs, relèvent exclusivement du domaine du contrat, <strong>dans</strong> lequel les partiesinsèrent une clause destinée à interdire <strong>et</strong> à prévenir le risque d’un gain jugé illégitime au regard del’aide accordée par la collectivité.La validité des clauses doit être principalement examinée sous l’angle de leur compatibilité avec lesprincipes généraux du droit <strong>et</strong> plus précisément au regard de la licéité des atteintes ou restrictionsapportées au droit de propriété.Les principales formes des clauses <strong>anti</strong>-spéculativesFace à la diversité des clauses <strong>anti</strong>-spéculatives pratiquées, il est mal aisé de trouver une classificationunique, compte tenu de la variété des mécanismes juridiques employés.Certaines d’entre elles pourraient être qualifiées de « sûr<strong>et</strong>és négatives3 », notion usuelle en droitdu crédit, par lesquelles le créancier cherchera, en complément des sûr<strong>et</strong>és traditionnelles(hypothèques, privilèges de prêteur de deniers …) à assurer la stabilité du patrimoine de sondébiteur en lui interdisant d'accomplir certains actes de disposition ou d'administration. Il s’agit «d’obligations de ne pas faire » auxquelles le débiteur s’engage, pendant la durée du contrat de prêt.Parmi les plus courantes, on peut citer la clause d’inaliénabilité ou celle interdisant de louer le bienacquis.D’autres peuvent être considérées comme des « obligations de faire » : obligation d’affecter le bien àla résidence principale de l’acquéreur, ou de construire <strong>dans</strong> un certain délai sur le terrain acquis, oude rembourser l’aide perçue en cas de revente.On pourrait aussi tenter d’appliquer une classification en fonction du caractère réel ou personnel dessûr<strong>et</strong>és.De façon plus pragmatique, nous nous bornerons à distinguer les différents types de clauses <strong>anti</strong>spéculatives,en fonction de leur obj<strong>et</strong> que l’on peut classer en trois catégories, sachant que cesdiverses formes de clauses peuvent se combiner entre elles, comme on l’observe fréquemment enpratique :– Les clauses limitatives du droit de disposer <strong>et</strong> en particulier interdisant la revente du bien <strong>dans</strong> undélai limité ou instituant une faculté de préemption ou de rachat par le vendeur ou lui conférantun droit de préférence lors de la cession du bien par l’acquéreur.– Les clauses ayant pour obj<strong>et</strong> de limiter la libre affectation de l’usage du bien par l’acquéreur(obligation de construire <strong>dans</strong> un certain délai, d’occuper à titre de résidence principale del’acquéreur <strong>et</strong> interdiction de louer).– Les clauses tendant à exiger le remboursement de la fraction des aides accordées par lacollectivité territoriale en cas de revente ou de non-respect d’un engagement pris par l’acquéreurbénéficiaire.3Yves Chaput, Professeur à l'Université de Paris I, Juris Classeur Banque, Crédit, Bourse. Fasc. 790.4


Des exceptions au principe de libre disposition des biensIl faut rappeler en préambule le principe fondamental posé par le code civil <strong>dans</strong> son article 537 auxtermes duquel « les particuliers ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent, sous lesmodifications établies par les lois ».Le principe général est donc plutôt celui de l’illicéité de la clause d’inaliénabilité <strong>et</strong> plus généralementdes clauses restrictives du droit de libre disposition en raison de l’exigence de conformité à l’ordrepublic. Dès lors, les clauses restrictives du droit de disposer apparaissent comme une exceptionau principe de libre disposition des biens. En eff<strong>et</strong>, ces clauses vont à l’encontre de l’ordre publictraditionnel <strong>et</strong> en particulier de l’ordre public économique (liberté du commerce <strong>et</strong> de l’industrie),parce qu’elles risquent de paralyser la circulation des richesses, de porter atteinte au créditnotamment en restreignant le patrimoine du débiteur, gage de l’ensemble des créanciers 4 , <strong>et</strong> parconséquent d’aller à l’encontre de l’intérêt général. En eff<strong>et</strong>, la clause d’inaliénabilité entraînel’insaisissabilité du bien qu’elle frappe.D’une façon schématique, on peut r<strong>et</strong>enir l’idée que les clauses entraînant des restrictions du droitde libre disposition des biens seront admises si le législateur ou le juge considère que leur obj<strong>et</strong> <strong>et</strong>leurs eff<strong>et</strong>s présentent des avantages supérieurs aux inconvénients qu’elles peuvent entraîner,notamment au regard de l’atteinte à l’ordre public économique (atteinte au droit de propriété, à laliberté du commerce). La Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler que le droit de propriété estun droit fondamental de valeur constitutionnelle 5 .Il s’agit de fixer le point d’équilibre entre les exigences de l’ordre public économique d’une part <strong>et</strong> laliberté contractuelle d’autre part, laquelle sera admise si elle perm<strong>et</strong> de protéger l’intérêt sérieux <strong>et</strong>légitime de l’une des parties.Ces clauses restrictives du droit de libre disposition doivent être librement consenties en vertu duprincipe de liberté contractuelle (art. 1134 du code civil).Dès lors que les deux conditions qui précèdent sont réunies, il apparaît licite d'insérer <strong>dans</strong> l'acted'achat du terrain ou du logement, une clause <strong>anti</strong>-spéculative qui se justifie par l’aide accordée ou ladiminution du prix prises en charge par la collectivité. C<strong>et</strong>te aide ou avantage consenti doit luiperm<strong>et</strong>tre d’atteindre les objectifs qu’elle s’est fixée <strong>dans</strong> le cadre de sa politique locale de l’habitaten vue d’encourager ou de favoriser l’accession sociale à la propriété de certaines catégories deménages sur tout ou partie de son territoire. Elle constitue la cause 6de l’obligation contractée parl’acquéreur qui s’engage à se conformer à la clause <strong>anti</strong>-spéculative.Cependant, la clause <strong>anti</strong>-spéculative, ne constitue pas une catégorie juridique propre. En réalité, ellese définit par sa finalité puisqu’elle a pour objectif, comme on l’a vu, d’éviter que l’aide publiqueaccordée à une personne privée, <strong>dans</strong> un but d’intérêt général ne soit détournée de son objectif <strong>et</strong>que le bénéficiaire ne réalise à c<strong>et</strong>te occasion un profit jugé illégitime en revendant le bien acquis. Dupoint de vue du droit civil, la clause <strong>anti</strong>-spéculative peut revêtir différentes formes juridiques quiempruntent <strong>et</strong> combinent le recours à un certain nombre de techniques contractuelles propres audroit privé : notamment clause d’inaliénabilité, droit de préemption, pacte de préférence… obligationde construire <strong>dans</strong> un certain délai, ou de rembourser l’aide accordée en cas de revente <strong>dans</strong> uncertain délai.4Article 2284 du code civil (ancien article 2092) : « Quiconque s’est obligé personnellement, est tenu de remplir son engagement sur tousses biens mobiliers <strong>et</strong> immobiliers, présent <strong>et</strong> à venir ».Article 2285 du code civil (ancien article 2093) : « Les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers … ».5Cass. Civ., 4 janv. 1995 : Bull. Civ. 1995, I, n° 4.6La cause constitue l’une des conditions essentielles du contrat selon le code civil. Son existence est essentielle pour la validité du contrat.Elle ne doit pas être illicite, ni contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs (articles 1131 à 1133 du code civil).5


Du point de vue du droit public, les gar<strong>anti</strong>es prises par la collectivité publique pour assurer lerespect des engagements de l’acquéreur constituent une des contreparties de l’avantage qui lui estconsenti.C’est ainsi que la Cour administrative d’appel de Nantes du 30 juin 20007, a rej<strong>et</strong>é le recours exercépar le préf<strong>et</strong> <strong>dans</strong> le cadre du contrôle de légalité, considérant que les engagements pris parl’acquéreur de terrains <strong>dans</strong> un lotissement communal <strong>et</strong> les gar<strong>anti</strong>es prises conventionnellementpar la commune pour assurer le respect de ces engagements, constituent des contreparties à la ventedes lots à un prix inférieur à leur valeur vénale. Dès lors, c<strong>et</strong>te cession ne peut être regardée commeune libéralité consentie par une collectivité à une personne privée, laquelle serait contraire auxprincipes généraux du droit.Mise en oeuvre de la clause <strong>anti</strong>-spéculativeIl appartient à celui qui se prévaut d'une telle clause de justifier du motif sérieux <strong>et</strong> légitime qu'ilallègue.En cas de stipulation de clauses <strong>anti</strong>-spéculatives, pour renforcer la sécurité juridique de l'acte decession <strong>et</strong> assurer la solidité juridique de ces clauses <strong>dans</strong> l'éventualité où elles seraient contestéesdevant les tribunaux, il sera de bonne pratique d'insérer <strong>dans</strong> l'acte un paragraphe« Exposé préalable » présentant le contexte <strong>dans</strong> lequel s'inscrit c<strong>et</strong>te mutation, c'est-à-dire lapolitique de la collectivité en matière d'habitat <strong>et</strong>/ou de maintien d'un équilibre démographique, enfaisant référence à la délibération de l'organe décidant de ces orientations <strong>et</strong> des modalités r<strong>et</strong>enues.En eff<strong>et</strong>, il est indispensable de faire ressortir que l'avantage accordé à telle catégorie de citoyens oud'usagers répond à un objectif d'intérêt général, constituant à la fois la cause de l’obligation résultantde la clause <strong>anti</strong>-spéculative, mais aussi un intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime, ce qui est l'une des conditionsessentielle de sa validité.En outre, il peut être pertinent de faire ressortir l’importance de l’avantage accordé par rapport auxconditions de marché. C<strong>et</strong> exposé perm<strong>et</strong> de démontrer que l’accédant s’est engagé en touteconnaissance de cause <strong>et</strong> a clairement accepté les contraintes pouvant limiter temporairement sondroit de disposer du terrain ou du logement acquis grâce à l’aide de la collectivité. Dès lors, il seratenu de respecter les termes de la clause <strong>anti</strong>-spéculative (article 1134 du code civil précité).Les clauses limitatives du droit de libre dispositionPour légitimer l’intervention des collectivités publiques <strong>dans</strong> les marchés tendus <strong>et</strong> en particulier <strong>dans</strong>les grandes agglomérations, ces clauses sont désormais insérées de façon quasi-systématique <strong>dans</strong> lesactes de vente de logements à prix maîtrisés situés <strong>dans</strong> un programme neuf pour lequel lepromoteur a bénéficié d’une minoration de la charge foncière grâce à une aide de la ville ou d’unopérateur public, notamment les SEM. Il est également assez fréquent de rencontrer ces clauses <strong>dans</strong>les actes de cession de terrains situés <strong>dans</strong> un lotissement communal. On peut plus rarement lestrouver <strong>dans</strong> les actes de vente de logements existants par des collectivités à un prix inférieur à lavaleur du marché.Ces clauses apparaissent comme une contrepartie de l’avantage conféré à l’accédant bénéficiantdirectement ou indirectement de l’aide de la collectivité publique, ce qui fait obstacle à ce qu’onpuisse les assimiler à une libéralité.Il s’agit principalement des clauses d’inaliénabilité ayant pour obj<strong>et</strong> d’interdire la revente pendant uncertain délai. Relèvent également de c<strong>et</strong>te classification, les clauses prévoyant un droit de rachat par7Cour administrative d’appel de Nantes N° 00NT00040, 3 ème chambre, 30 juin 2000, Préf<strong>et</strong> de Vendée c. Commune de La Guyonnière.6


le vendeur en cas de revente du bien ou logement par l’acquéreur : il s’agit du droit de préemptionconventionnel <strong>et</strong> de façon plus exceptionnelle de la vente à réméré.On peut également y rattacher le pacte de préférence au profit du vendeur s’il contient une clausedéterminant à l’avance le prix de rachat <strong>et</strong> ses modalités de réévaluation.La clause d’inaliénabilitéC’est la clause la plus contraignante <strong>et</strong> la plus emblématique des clauses <strong>anti</strong>-spéculatives. Elle estaussi l’archétype des « sûr<strong>et</strong>és négatives ».Ces clauses interdisent la revente de l'immeuble (terrain ou logement) <strong>dans</strong> un délai déterminé, saufà obtenir une autorisation préalable de la commune, laquelle sera généralement subordonnée à lajustification d'un motif économique ou familial grave, rendant nécessaire la cession de l'immeuble, oula présentation d’un sous-acquéreur remplissant les critères pour bénéficier de l’accession aidée <strong>et</strong>s’obligeant à reprendre les engagements souscrits par l’acquéreur initial.La clause d’inaliénabilité peut être stipulée <strong>dans</strong> un acte à titre onéreux selon lajurisprudence…Si ces clauses d’inaliénabilité sont expressément prévues <strong>et</strong> encadrées par la loi 8en cas d<strong>et</strong>ransmission à titre gratuit (donation ou succession). En revanche, la licéité de ces clauses, pourtantfréquente en pratique, n’était pas clairement reconnue <strong>dans</strong> les actes de cession à titre onéreux.Cependant, ce point a été tranché par la Cour de cassation <strong>dans</strong> un arrêt du 31 octobre 2007 9defaçon particulièrement n<strong>et</strong>te : « Mais attendu que, dès lors qu’elle est limitée <strong>dans</strong> le temps <strong>et</strong> qu’elleest justifiée par un intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime, une clause d’inaliénabilité peut être stipulée <strong>dans</strong> unacte à titre onéreux… ». Par sa formulation particulièrement claire, c<strong>et</strong> arrêt apparaît comme unedécision de principe, perm<strong>et</strong>tant d’insérer avec sérénité une clause d’inaliénabilité <strong>dans</strong> un acte à titreonéreux.C<strong>et</strong>te affirmation claire par la Cour de cassation de la licéité des clauses d’inaliénabilité <strong>dans</strong> les actesà titre onéreux, dès lors qu’un intérêt légitime est démontré <strong>et</strong> qu’elle est temporaire, contrasteavec la relative timidité du législateur en matière de clauses <strong>anti</strong>-spéculatives. En eff<strong>et</strong>, à l’occasiondes débats pour l’adoption de la loi ENL du 13 juill<strong>et</strong> 2006, la commission des affaires économiquesdu Sénat, par la voix de son rapporteur, a émis des réserves sur la constitutionnalité d’unedisposition, votée en première lecture par l’assemblée nationale, interdisant la revente du logementHLM acquis avec une décote pendant un délai de cinq ans, comme portant atteinte au droit depropriété <strong>et</strong> lui a préféré un dispositif prévoyant un remboursement à l’organisme HLM de la décoteconsentie à l’accédant. C<strong>et</strong>te position a été reprise par le rapporteur du proj<strong>et</strong> de loi lors des débatsau Sénat 10 , qui y a ajouté une clause <strong>anti</strong>-location spéculative.8Le Code civil réglemente les clauses d'inaliénabilité en cas de transmission d'un bien par donation ou par succession à l'article 900-1. Ils’agit de la consécration par le législateur en 1971 d’une jurisprudence ancienne apparue en 1858 décidant de valider les clausesd’inaliénabilité introduites <strong>dans</strong> les testaments <strong>et</strong> les donations. Ces clauses ne sont valables que pour autant qu'elles sont temporaires (parexemple la vie du donateur) <strong>et</strong> justifiées par un intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime (exemple : conserver un bien <strong>dans</strong> la famille). Enfin le bénéficiairede la libéralité (donataire ou légataire) peut toujours s'adresser au juge judiciaire pour faire lever l'interdiction d'aliéner si l'intérêt qui avaitjustifié c<strong>et</strong>te restriction au droit de propriété a disparu ou s'il advient qu'un intérêt plus important l'exige. En dehors de c<strong>et</strong>te hypothèse,généralement, la propriété inaliénable est conventionnelle. On tend à adm<strong>et</strong>tre la validité de c<strong>et</strong>te stipulation sous les mêmes conditions,c'est-à-dire le caractère temporaire de la restriction au droit de disposer du bien <strong>et</strong> sa justification par un intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime qu'ilappartient à celui qui s'en prévaut de faire ressortir notamment par l'importance de l'aide accordée ou du but d'intérêt général poursuivi.9Cass. Civ 1°, 31/10/2007 N°05-14238. Commentaire par Renaud Mortier agrégé des facultés de droit, directeur du Master II droit <strong>et</strong>gestion du patrimoine de Rennes « La nouvelle aire des clauses d'inaliénabilité » La Semaine Juridique Notariale <strong>et</strong> Immobilière n° 5, 1 erfévrier 2008, 1064.10Cf. Débats Sénat, séance du 6 avril 2006 article 5 bis A, intervention de M. Dominique Braye, rapporteur.7


Le mécanisme de la clause d’inaliénabilité à but <strong>anti</strong>-spéculatifIl repose sur une interdiction d’aliéner avec des assouplissements perm<strong>et</strong>tant des dérogations enfonction de l’évolution de la situation de l’acquéreur initial, ou de la possibilité d’une cession à unsous-acquéreur à certaines conditions.L’interdiction d’aliéner imposée <strong>dans</strong> un but <strong>anti</strong>-spéculatifL’acquéreur en contrepartie de l’avantage financier qui lui a été consenti, s’interdit toute aliénation àtitre onéreux (revente, échange, apport en société) pendant la durée de la clause d’inaliénabilité (cinqà sept ans en général) <strong>et</strong> s’oblige à occuper personnellement le logement à titre de résidenceprincipale.Il s'agit alors d'une limitation du droit de propriété, puisque la clause d'inaliénabilité dérog<strong>et</strong>emporairement au principe de libre disposition des biens. La clause prévoit généralement qu’elles’impose à l’acquéreur du logement pour lequel il a bénéficié d’une aide de la collectivité, mais aussi àses ayants droits, c'est-à-dire ses héritiers ou sous-acquéreurs le cas échéant.Généralement, la clause prévoit également les sanctions en cas de violation des engagementscontractuels, qui sont, d’une part, l’action en nullité relative de l’aliénation consentie enméconnaissance des engagements souscrits <strong>et</strong>, d’autre part, le remboursement de tout ou partie del’aide versée par la collectivité.Les dérogations à l’interdiction d’aliénerPour tenir compte de circonstances exceptionnelles ou des besoins de mobilité du ménage accédant,les clauses prévoient généralement deux types d’exceptions au principe de l’interdiction d’aliéner.- Les motifs sérieux <strong>et</strong> légitimes pouvant revêtir les caractéristiques de la force majeure rendantnécessaires la revente du bien : il s’agit de faits qui s’imposent à l’acquéreur <strong>et</strong> vont l’obliger àsolliciter l’autorisation de céder le bien pour lequel il a bénéficié d’une aide à l’accession. Le plussouvent, on prévoit le décès de l’acquéreur ou de son conjoint, le divorce ou la rupture du PACS, lamutation ou mobilité professionnelle, une période de chômage prolongée, l’invalidité ou l’incapacitéreconnue par la COTOREP 11 , parfois le surend<strong>et</strong>tement de l’accédant, c<strong>et</strong>te liste étant tantôtlimitative ou tantôt indicative selon les clauses rencontrées.- La possibilité de revendre à un sous-acquéreur remplissant les critères exigés pour l’acquisitioninitiale, à condition que le prix de revente n’excède pas le prix d’acquisition initial réévalué selon unindice national (BT01 ou indice INSEE du coût de la construction) majoré des frais d’acquisition <strong>et</strong><strong>dans</strong> certaines clauses du coût ou de la plus-value apportée par les travaux d’amélioration dulogement effectués <strong>et</strong> justifiés. De son côté, le sous-acquéreur devra s’engager à respecter la claused’inaliénabilité <strong>et</strong> d’affectation du logement jusqu’au terme du dispositif <strong>anti</strong> spéculatifcontractuellement prévu.Une procédure d’agrément à géométrie variable d’une collectivité à l’autre :Dans la plupart des cas, il est prévu une notification par l<strong>et</strong>tre recommandée avec demande d’avis deréception accompagnée des justificatifs nécessaires à l’instruction de la demande, du proj<strong>et</strong> decession aux services de la ville ou de l’aménageur pendant la durée de la concession. Ceux-cidisposent d’un délai généralement compris entre un <strong>et</strong> deux mois pour donner ou refuser leuraccord. Le défaut de réponse <strong>dans</strong> le délai imparti équivaut à un accord tacite, lequel pourraitnéanmoins faire l’obj<strong>et</strong> d’un r<strong>et</strong>rait <strong>dans</strong> le délai de deux mois s’il est irrégulier (par exemple, le sousacquéreurne remplit pas les conditions de ressources exigées).11Commission technique d'orientation <strong>et</strong> de reclassement professionnel. Jusqu’au 1 er janvier 2006 elle gérait les problèmes liés au handicap<strong>et</strong> notamment à la réinsertion professionnelle des handicapés. Depuis c<strong>et</strong>te date, la Maison départementale des personnes handicapéesintègre la commission des droits <strong>et</strong> de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH). C'est <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te nouvelle instance que seprennent les décisions de compensation (humaine / techniques), de prestations (le plus souvent financières : voir Allocation aux adulteshandicapés) <strong>et</strong> d'orientations en faveur des personnes handicapées.8


Dans d’autres cas, le contrôle est confié au rédacteur de l’acte de revente, qui devra, soit y annexerles justificatifs de l’exception à l’interdiction d’aliéner, soit vérifier que le sous-acquéreur remplit bienles critères le rendant éligibles au bénéfice de l’accession aidée <strong>et</strong> que le prix de vente respecte bienles limites imposées par la clause <strong>anti</strong>-spéculative.Conditions de validité de la clause d’inaliénabilitéPour la validité de la clause, comme on l’a vu, une double condition doit être remplie, à savoir :– être fondée sur un intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime,– être stipulée pour une durée limitée.Un intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime doit être démontréPrécisons en préambule qu’il s’agit là d’une condition exigée non seulement pour la validité desclauses d’inaliénabilité, mais plus largement pour les clauses restrictives du droit de disposer, voirepour l’ensemble des clauses à finalité « <strong>anti</strong>-spéculative ».Pour bien cerner la question de l’intérêt légitime <strong>et</strong> sérieux, deux aspects doivent êtresuccessivement envisagés :– la notion d’intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime,– la question de la proportionnalité entre l’intérêt justifiant la clause restrictive du droit de libredisposition <strong>et</strong> la gravité de l’atteinte aux droits de son propriétaire.A partir de quand peut-on considérer qu’il existe ?C<strong>et</strong>te exigence d’un intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime suppose d’abord que l’intérêt à protéger ne soit pasillicite, mais aussi que l’atteinte au droit de libre disposition du bien soit proportionnée à celui-ci.Pour la validité de la clause, il faudra en conséquence démontrer en premier lieu que le propriétaire alibrement consenti à c<strong>et</strong>te clause, mais aussi justifier en quoi c<strong>et</strong>te atteinte est nécessaire <strong>et</strong> surtoutquelle est la contrepartie dont il a bénéficié au regard des restrictions qu’il s’est engagé à respecter.C<strong>et</strong> intérêt pourrait être celui de la collectivité ayant vendu le bien ou fourni l’aide perm<strong>et</strong>tant del’acquérir ou de l’acquéreur que l’on voudrait protéger, ou d’un tiers. Dans le contexte d’un dispositif<strong>anti</strong>-spéculatif, il s’agira le plus souvent de l’intérêt général au nom duquel la collectivité publique auraaccordé l’aide pour compléter le financement de l’opération ou pour minorer de façon significative leprix d’acquisition par rapport au prix du marché, <strong>dans</strong> le cadre d’une politique publique tendant àfavoriser l’accession à la propriété des ménages modestes, perm<strong>et</strong>tant de stipuler une claused’inaliénabilité temporaire.C<strong>et</strong>te aide par son importance, son caractère déterminant a permis à l’accédant de réaliser uneopération <strong>dans</strong> des conditions hors marché, sans laquelle il n’aurait pas pu la mener à bien.Une restriction au droit de disposer ne peut être admise si elle n’est pas justifiée par un intérêt sérieux pour l’une des parties :En eff<strong>et</strong>, pour la Cour de cassation 12 , une restriction au droit de disposer, constitue une atteinte auprincipe constitutionnellement reconnu du droit de propriété 13<strong>et</strong> ne peut être admise dès lorsqu’elle n’apporte aucun avantage particulier à l’une ou l’autre des parties. C<strong>et</strong> arrêt statuant sur lavalidité d’une sûr<strong>et</strong>é négative imposée par une banque à son client emprunteur, est particulièrementremarquable <strong>et</strong> les solutions qui s’en dégagent peuvent être transposées au domaine des clauses <strong>anti</strong>spéculatives.En l’espèce, un prêteur (la Caisse des Dépôts <strong>et</strong> Consignations) avait inséré <strong>dans</strong> un acte de prêtdestinée à financer l’achat d’un immeuble, une clause m<strong>et</strong>tant à la charge des emprunteurs, une12Cass. Civ. 1 ère . 13 décembre 2005, n° 04-13772 ; Commentaire par Marie Lamoureux, docteur en droit Ater à l'université d'Aix-MarseilleIII « Nullité d'un engagement de ne pas louer sans accord du prêteur immobilier », La Semaine Juridique Entreprise <strong>et</strong> Affaires n° 49, 7Décembre 2006, 2743.13Code civil article 544 : La propriété est le droit de jouir <strong>et</strong> de disposer des choses de la manière la plus absolue pourvu qu’on n’en fassepas un usage prohibé par les lois ou les règlements.9


obligation d’habitation personnelle <strong>et</strong> d’interdiction de vendre ou de louer l’immeuble sans sonaccord, sanctionnée par l’exigibilité <strong>anti</strong>cipée de plein droit de toutes sommes restant dues en cas denon respect de ladite clause. La Cour d’appel, puis la Cour de cassation, ont jugé que « les clauses ducontrat de prêt relatives à l’interdiction de location sans l’accord du prêteur sous la sanction del’exigibilité <strong>anti</strong>cipée de ce prêt qui ne procurent aucun avantage à l’une des parties, sont prohibéesau regard des articles 6 <strong>et</strong> 1172 du code civil en ce qu’elles constituent une atteinte au droitconstitutionnellement reconnu à l’article 544 du même code de disposer de son bien de la manière laplus absolue <strong>et</strong> également une condition affectant les modalités d’exécution de l’engagementcontracté, prohibé par la loi.. »…. 14Autrement dit, c<strong>et</strong>te clause n’est justifiée par aucun avantagepour l’une ou l’autre des parties <strong>et</strong> en particulier pour l’emprunteur, susceptible de constituer lacontrepartie de la restriction qui lui est imposée sur la liberté d’affectation <strong>et</strong> de disposition du bienacquis ; elle n’est par conséquent justifiée par aucun intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime, alors qu’il s’agit d’unedes conditions essentielles pour justifier une limitation temporaire au droit de libre disposition dubien sans pour autant porter atteinte au droit de propriété. En eff<strong>et</strong>, on peut se demander à queltitre une banque consentant un prêt à des conditions de marché, pourrait imposer à l’emprunteurune clause restrictive de la liberté d’affectation <strong>et</strong> de vendre le bien acquis, alors qu’elle dispose parailleurs de sûr<strong>et</strong>és généralement exigées de l’emprunteur lors de la conclusion du prêt pour gar<strong>anti</strong>rle remboursement de sa créance (hypothèque, privilège du préteur de denier ou cautionnementmutuel…).S’agissant de l’intérêt sérieux légitimant les clauses restrictives du droit de disposer insérées à lademande des communes <strong>et</strong> autres collectivités publiques, les juges auront à apprécier si ces clausesimposées au nom de l’intérêt général local portent l’atteinte à l’ordre public économique. Dans uncontexte de forte hausse des prix de l’immobilier observée depuis plus d’une décennie, où lesmécanismes du marché s’avèrent défaillants pour assurer les besoins de logements de l’ensemble desménages, on peut penser que l’intérêt général local prévaudra le plus souvent <strong>dans</strong> la mesure où ils’efforce justement de corriger les eff<strong>et</strong>s discriminants du libre jeu du marché.La question de la proportionnalité entre l’intérêt justifiant la clause <strong>et</strong> la gravité de l’atteinte aux droits de sonpropriétaireLa décision qui précède amène, en eff<strong>et</strong>, à soulever la question de la proportionnalité entre l’objectifpoursuivi par le créancier <strong>et</strong> les restrictions imposées au débiteur de l’obligation. Au delà desmotivations de l’arrêt qui se fonde sur l’absence d’intérêt pour l’une des parties, il apparaîtmanifestement excessif de prétendre interdire de louer <strong>et</strong> de vendre un bien en contrepartie d’unprêt consenti à l’acquéreur du bien. La Cour européenne des droits de l’homme a élaboré unejurisprudence qui s’efforce de protéger les droits des personnes privées en cas d’atteinte au respectdes biens <strong>et</strong> en particulier d’atteinte au droit de propriété constituant « une ingérence » susceptibled’ouvrir droit à réparation pour le préjudice subi.14Illégalité au regard des articles 6 (contraire aux lois qui intéressent l’ordre public) <strong>et</strong> 1172 du code civil (nullité d’une conventioncontenant une condition prohibée par la loi).10


La protection de la propriété aux termes du protocole additionnel à la convention européenne desdroits de l’homme 15Le particulier s’estimant lésé par une clause portant atteinte sa propriété pourrait invoquer pour l’appréciation del’intérêt légitime <strong>et</strong> sérieux conditionnant la validité de la clause litigieuse, l’article 1 er du protocole additionnel 16 à laconvention européenne des droits de l’homme relatif à la protection de la propriété. En eff<strong>et</strong>, en cas d’atteinte à lapropriété, n’entraînant pas de transfert du droit de propriété, mais constitutive d’une altération du droit de propriété, lerequérant doit invoquer devant la Cour européenne des droits de l’homme, le droit au respect des biens. C<strong>et</strong>te hautejuridiction a dégagé une jurisprudence selon laquelle, il y a lieu de rechercher si un juste équilibre a étémaintenu entre les exigences de l’intérêt général <strong>et</strong> les impératifs de sauvegarde des droitsfondamentaux de l’individu 17 . Si l’altération est reconnue, elle doit trouver une compensation financière ou autre,mais qui doit être effective.C<strong>et</strong>te jurisprudence a ouvert la voie à un contentieux indemnitaire destiné à prendre en compte l’aspect économique dudroit protégé à l’article 1er du protocole additionnel.La Cour européenne recherche si les requérants ont eu à supporter, en l'espèce, une charge spéciale <strong>et</strong> exorbitante qui arompu le juste équilibre à ménager entre la protection de leur propriété <strong>et</strong> les exigences de l'intérêt général 18 . En cas deréponse affirmative, elle leur alloue une indemnité destinée à réparer le préjudice subi.Jusqu’ici c<strong>et</strong>te argumentation n’a pas été invoquée en matière de clause <strong>anti</strong>-spéculative. Cependant,rien n’empêcherait un demandeur d’intenter un recours en se fondant sur ce texte devant lesjuridictions françaises, voire de saisir la Cour européenne de Strasbourg, après épuisement des voiesde recours internes.Il conviendrait alors de rechercher si l’aide ou l’avantage accordé à l’acquéreur constitue unecontrepartie suffisante au regard de la restriction au droit de disposer découlant de la claused’inaliénabilité stipulée au nom de l’intérêt général <strong>dans</strong> l’acte de vente à la demande de la collectivitépublique, en particulier en ce qui concerne sa durée.Le caractère temporaire de la clause d’inaliénabilité 19On sait qu’il s’agit de l’autre condition essentielle exigée pour la validité de la clause d’inaliénabilité.C’est d’ailleurs sur ce point que porteront en priorité les contestations des propriétaires de biensaffectés par une clause d’inaliénabilité ou restrictive du droit de libre disposition.C<strong>et</strong>te exigence du caractère temporaire de la clause découle en premier lieu de la prohibition desengagements perpétuels en droit civil 20 . Par ailleurs, la durée de la clause devra être proportionnéepar rapport à l’intérêt qui la motive. Autrement dit, l’appréciation de l’intérêt sérieux <strong>et</strong> légitimemotivant la clause reviendra à mesurer l’importance de l’avantage consenti à l’acquéreur par rapportà l’étendue de la restriction au droit de libre disposition mais surtout par rapport à sa durée.Mais quelle doit être la durée des clauses d’inaliénabilité stipulées à des fins <strong>anti</strong>-spéculatives ?15Note Gilles Pill<strong>et</strong> maître de conférences à l‘université Paris XII, La Semaine Juridique Edition Générale n° 48, 23 Novembre 2009, 479.16Article 1 er du protocole additionnel : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sapropriété que pour cause d’utilité publique <strong>et</strong> <strong>dans</strong> les conditions prévues par la loi <strong>et</strong> les principes généraux du droit international.Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de m<strong>et</strong>tre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessairespour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ouamendes ».17Cf. code de la convention européenne des droits de l’homme, Litec Ed. 2005 p.222-224.18CEDH 18.11.2010 : Affaire Consorts Rich<strong>et</strong> <strong>et</strong> Le Ber c. France (Requêtes n° 18990/07 <strong>et</strong> 23905/07).19En matière de donation, on adm<strong>et</strong> qu’une clause d’inaliénabilité peut être valablement stipulée pour la durée de la vie du donateur. Dansles ventes en viager, lesquelles sont des actes à titre onéreux, il est fréquemment stipulé une clause d’inaliénabilité pour la durée de la viedu vendeur, afin de gar<strong>anti</strong>r la pérennité du versement de la rente viagère constituant tout ou partie du prix de vente.20Exemple : prohibition des baux perpétuels découlant de l’article 1709 du code civil.11


A l’occasion des débats parlementaires ayant précédé l’adoption de la loi ENL a été posée,également, la question de la durée de ces clauses <strong>anti</strong>-spéculatives, assez variable en pratique d’unecollectivité à une autre. L’examen d’un certain nombre d’exemples de clauses <strong>anti</strong>-spéculatives faitressortir la diversité, voire l’hétérogénéité des solutions r<strong>et</strong>enues. Cinq ans (Marseille), sept ans(Nantes, Montpellier), voire quinze ans (Hendaye) pour d’autres villes ou organismes HLM. Ladiversité des pratiques en la matière ne manque pas d’interpeller sur le respect du principe del’égalité des citoyens devant les charges publiques. Il serait d’ailleurs logique de se demander si ladurée de la contrainte imposée par la collectivité au moyen de la clause d’inaliénabilité estproportionnée avec le montant de l’aide ou de l’avantage accordé à l’accédant. La question del’appréciation de la durée de validité de la clause d’inaliénabilité reste ouverte à ce jour, puisqu’ànotre connaissance, la jurisprudence ne s’est prononcée que sur une clause <strong>anti</strong>-spéculative prenantla forme d’un pacte de préférence stipulé pour une durée de vingt ans, dont le régime juridique estn<strong>et</strong>tement différent de celui applicable aux clauses d’inaliénabilité (cf. infra Cassation Civ. 23septembre 2009).Une donnée non juridique, mais incontournable : l’évolution du comportement des ménages propriétaires.Pour donner quelques repères sur le comportement des ménages propriétaires de leur logement, ilest intéressant de mentionner les observations faites par les notaires <strong>dans</strong> leur analyse annuelle dumarché immobilier en 2009 ; il en ressort que la durée moyenne de détention des appartementsanciens situés en métropole hors Ile-de-France est de neuf ans <strong>et</strong> quatre mois <strong>et</strong>, pour les maisonsanciennes, de onze ans <strong>et</strong> cinq mois. A titre d’illustration pour ce qui concerne le département del’Hérault, la durée de détention des appartements anciens est passée de onze ans <strong>et</strong> quatre mois, en1999, à neuf ans <strong>et</strong> six mois en 2009, soit une diminution de près de deux ans en une décennie. Latendance est similaire, quoiqu’un peu moins prononcée pour les maisons anciennes. Pour lespropriétaires de moins de quarante ans, la durée de détention moyenne est inférieure à six ans,autant pour les appartements que pour les maisons anciennes. Ceci reflète une évolution descomportements des ménages <strong>dans</strong> leur parcours résidentiel qui tend à s’accélérer, mais sans douteaussi de leur rapport à la propriété d’un bien qui devient plus temporaire qu’auparavant. Il est sansdoute indispensable de prendre en compte ces évolutions pour fixer la durée d’une clause <strong>anti</strong>spéculative!Une intervention du législateur pourrait être souhaitable pour harmoniser les pratiques <strong>et</strong> fixer desrègles normatives pour les contreparties admissibles susceptibles d’être exigées du bénéficiaire del’aide d’une collectivité locale consentie en application de l’article L.312-2-1 du code de laconstruction <strong>et</strong> de l’habitation. Si la durée de la clause d’inaliénabilité apparaît trop longue,l'acquéreur pourrait être tenté de la rem<strong>et</strong>tre en cause notamment en contestant sa validité devantle juge (cf. infra : le recours devant le juge).Transmission <strong>et</strong> opposabilité de la clause d’inaliénabilité aux tiersIl faut distinguer, les modalités pour assurer le respect de la clause d’inaliénabilité par les ayantsdroits de l’acquéreur <strong>et</strong> en particulier les héritiers, mais surtout le sous-acquéreur auquel la clause<strong>anti</strong>-spéculative devra en principe s’imposer <strong>et</strong> les créanciers fournissant le financement del’opération, auxquels la clause ne sera généralement pas applicable par convention.Pour assurer l’efficacité de la clause d’inaliénabilité comme contrepartie de l’avantage consenti auxfuturs acquéreurs, la collectivité ou une société d’économie mixte détenue majoritairement par lacollectivité, impose à l’aménageur, en particulier <strong>dans</strong> les zones d’aménagement concertées (ZAC),que les cahiers des charges des cessions de terrains <strong>et</strong> leurs annexes aux promoteurs traduisent lesobjectifs de la politique locale de l’habitat en matière d’accession sociale aidée, en énonçant :– l’effort consenti par la ville pour perm<strong>et</strong>tre une accession à prix maitrisé, voire en chiffrant lemontant de l’avantage consenti ;– les critères auxquels devront répondre les ménages bénéficiaires ;12


– les prix maxima auxquels ces programmes pourront être commercialisés ;– les clauses prévoyant l’inaliénabilité du bien acquis <strong>et</strong> les restrictions à sa libre affectation parl’acquéreur.Le promoteur prend à son tour l’engagement d’insérer des clauses types <strong>dans</strong> les actes de ventesavec les acquéreurs des logements pour lesquels la collectivité a apporté une aide ou consenti unavantage perm<strong>et</strong>tant d’en limiter le prix de vente final, <strong>dans</strong> lesquels sont reprises notamment laclause d’inaliénabilité temporaire, <strong>et</strong> les restrictions au droit de libre jouissance du logement, ainsique l’engagement de l’acquéreur de respecter ces clauses tant pour lui-même que pour ses ayantsdroits, pendant toute la durée contractuellement prévue.Pour assurer l’efficacité juridique de la clause, l’acte de vente stipule que la clause s’impose àl’acquéreur <strong>et</strong>, en cas de cession autorisée, aux acquéreurs successifs pendant sa durée de validité <strong>et</strong>pour gar<strong>anti</strong>r son opposabilité aux tiers, c’est-à-dire aux personnes auxquelles il pourrait transm<strong>et</strong>treses droits par convention, <strong>et</strong> notamment aux acquéreurs successifs du bien frappé par la claused’inaliénabilité. Les actes instituant c<strong>et</strong>te restriction au droit de disposer doivent faire l’obj<strong>et</strong> d’unepublication au fichier immobilier 21 .Le cas particulier des créanciers de l’acquéreurEn principe le créancier, notamment hypothécaire, ayant fourni les deniers pour l'acquisition duterrain <strong>et</strong> la construction de la maison ou l’achat du logement, ne pourrait faire saisir <strong>et</strong> vendre lebien pendant la durée de validité de la clause, sauf à obtenir l'autorisation du bénéficiaire de la claused'inaliénabilité (la collectivité locale) <strong>et</strong>, à défaut, du juge, le cas échéant par la voie de l'actionoblique 22 .C’est pourquoi, afin d’éviter que la clause d’inaliénabilité ne se r<strong>et</strong>ourne contre l’acquéreur en luifermant l’accès au crédit, il est stipulé de façon quasi-systématique <strong>dans</strong> les actes de vente contenantce type de clause, que celle-ci n’est pas opposable aux banques <strong>et</strong> établissements financiers ayantfourni les prêts nécessaires à l’acquisition. A défaut selon la jurisprudence dominante, la présenced’une clause d’inaliénabilité ne perm<strong>et</strong>trait que l’inscription d’une hypothèque judiciaire, mais surtoutferait obstacle à toute saisie tant qu’elle est en vigueur.Les autres clauses restrictives du droit de libre dispositionDans la plupart des situations rencontrées, on recourt aux clauses suivantes, souvent combinéesentre elles pour en accroître l’efficacité <strong>et</strong> l’eff<strong>et</strong> dissuasif :– le droit de préemption conventionnel ;– la faculté de réméré ;– le pacte de préférence ;– la clause d’agrément de prix.Observons que le pacte de préférence <strong>et</strong> la clause d’agrément de prix ne constituent pas au sensstrict, des restrictions au droit de disposer, en raison du caractère personnel de la créance conféréau titulaire du droit qui n’est pas opposable aux ayants droits de l’acquéreur.21Article 28 - 2° du décr<strong>et</strong> n°55-22 du 4 janvier 1955 : « Sont obligatoirement publiés au bureau des hypothèques de la situation desimmeubles :1° - ….2° - Les actes entre vifs dressés distinctement pour constater des clauses d’inaliénabilité temporaire <strong>et</strong> toutes autres restrictions au droitde disposer, ainsi que des clauses susceptibles d’entraîner la résolution ou la révocation d’actes soumis à publicité en vertu du 1° (mutationou constitution de droits réels, bail pour une durée supérieure à 12 ans…) ».22Article 1166 du code civil : « les créanciers peuvent exercer tous les droits <strong>et</strong> actions du débiteur à l'exception de ceux qui sontexclusivement attachés à la personne.13


Cependant, lorsqu’elles sont combinées ensemble ou avec un droit de préemption conventionnel,elles perm<strong>et</strong>tent de limiter de façon très efficace, toute possibilité de revente« spéculative » par l’acquéreur, comme on le verra en analysant l’apport de la jurisprudence, ci-après,<strong>dans</strong> l’arrêt du 23 septembre 2009.Le droit de préemption 23Il s’agit ici d’un droit consenti conventionnellement par l’acquéreur au vendeur. Il fait obligation àl’acquéreur d’informer le vendeur au cas où il décide de m<strong>et</strong>tre en vente le bien acquis. Il est destinéà assurer le respect des engagements pris par l’acquéreur. Sa durée est fixée contractuellement pourune période variable souvent de cinq à dix ans, voire plus. Il prévoit les modalités d’information duvendeur, le délai <strong>dans</strong> lequel celui-ci devra répondre, ainsi que celui <strong>dans</strong> lequel le bénéficiaire dudroit de préemption devra payer, s’il choisit de l’exercer. Pour éviter les cessions spéculatives, lesmodalités de détermination du prix en cas de cession sont déterminées à l’avance. Il peut être prévu,par exemple, que le prix de revente soit déterminé sur la base du prix d’acquisition révisé enfonction de la variation de l’indice trimestriel du coût de la construction publié par l’Insee, augmentédes frais d’acquisition <strong>et</strong> de la valeur des améliorations apportées par l’acquéreur <strong>et</strong> diminué du coûtdes réparations à effectuer.En cas de renonciation du vendeur à l’exercice du droit de préemption, l’acquéreur pourra vendre àun tiers au prix fixé en cas de préemption. Il s’agit ici d’une variante de la clause d’agrément de prix,puisque les modalités de détermination sont fixées à l’avance <strong>dans</strong> l’acte de vente initial.Comme toute clause constitutive d’une limitation ou d’une restriction au droit de disposer un bienimmobilier, elle devra faire l’obj<strong>et</strong> d’une publication de l’acte qui la prévoit au fichier deshypothèques.La vente à réméré 24C<strong>et</strong>te clause perm<strong>et</strong> au vendeur de se réserver pendant une durée maximale de cinq ans le droit derach<strong>et</strong>er le bien vendu. A la différence du droit de préemption, l’initiative de la cession appartient auvendeur (commune, promoteur social…) qui peut l’exercer à tout moment. Cependant, pourperm<strong>et</strong>tre au vendeur de l’exercer <strong>dans</strong> une perspective <strong>anti</strong>-spéculative, la clause de réméré estfréquemment associée à un pacte de préférence de même durée, par lequel l’acquéreur s’oblige, encas de revente, à proposer son bien en premier lieu au vendeur (commune ou promoteurnotamment social). Ainsi, ayant connaissance des conditions de la vente <strong>et</strong> en particulier du prix, cedernier décidera d’exercer ou non la faculté de réméré.L’acquéreur est propriétaire de la chose vendue sous la condition que son droit de propriété ne soitpas résolu par l’exercice du droit de réméré. L’exercice de la faculté de réméré produit l’eff<strong>et</strong> d’unecondition résolutoire (cf. infra) <strong>et</strong> replace donc les parties <strong>dans</strong> l’état où elles se trouvaient avant quela vente ait lieu. Le vendeur initial reprend l’immeuble <strong>dans</strong> l’état où il se serait trouvé s’il n’avait pasquitté son patrimoine ; il supporte les diminutions de valeur <strong>et</strong> profite des augmentations qui ne sont23Définition du droit de préemption : le droit de préemption est le droit reconnu à une personne publique ou privée de se substituer àl’acquéreur d’un bien mis en vente par son propriétaire. C’est un droit d’achat prioritaire qui perm<strong>et</strong> à son titulaire d’évincer toutacquéreur éventuel du bien aliéné. Il peut résulter de la loi ou de la convention.24La faculté de réméré ou de rachat est une stipulation par laquelle, le vendeur se réserve de reprendre la chose vendue moyennant larestitution du prix principal <strong>et</strong> le remboursement des frais <strong>et</strong> loyaux coûts du contrat <strong>et</strong> des réparations nécessaires ou ayant augmenté lavaleur du fond (code civil : art. 1659 <strong>et</strong> 1673). Pour produire tous ses eff<strong>et</strong>s notamment à l’égard des ayants causes de l’acquéreur (sousacquéreurs,créanciers titulaires de droits réels….), la faculté de réméré doit avoir été publiée à la conservation des hypothèques (codecivil : art. 1673). Toutefois, les parties peuvent convenir que le remboursement peut porter sur un montant forfaitaire, fixé <strong>dans</strong> laconvention initiale <strong>et</strong> supérieur au prix de vente, par exemple le prix initial augmenté en fonction de la variation du coût de la construction.Le vendeur ne peut rentrer en possession du bien qu’après avoir satisfait à toutes ses obligations <strong>et</strong> notamment avoir payé ou consigné leprix.14


pas le fait de l’acquéreur. L’acquéreur demeure responsable des dommages ou de la perte causés parson fait ou sa faute.Le pacte de préférence 25Dans c<strong>et</strong>te clause, l’acquéreur s’engage par convention à l’égard du vendeur, au cas où il décideraitde vendre l’immeuble (logement ou terrain) acquis ou de réaliser toute autre cession à titre onéreux(échange, apport en société), à lui donner la préférence sur tout autre acquéreur. Ce pacte obligegénéralement l’acquéreur à faire connaître au vendeur bénéficiaire du droit de préférence selon desformes définies <strong>dans</strong> la convention, le prix, les modalités de paiement.Celui-ci dispose alors d’un délai déterminé par la clause pour acquérir aux mêmes conditions quecelles proposées par le sous acquéreur.Pour jouer un rôle <strong>anti</strong>-spéculatif, le pacte de préférence devra être associé à une clause d’agrémentde prix ou une faculté de réméré, faute de quoi le bénéficiaire du pacte se trouverait <strong>dans</strong> les mêmesconditions que tout acquéreur subissant les évolutions du marché immobilier.Par ailleurs, pour donner sa pleine efficacité juridique à c<strong>et</strong>te clause, même si elle ne constitue pas,par elle-même une restriction au droit de disposer, elle sera généralement publiée, à titred’information des tiers, au bureau des hypothèques avec l’acte de cession qui l’instaure.L’arrêt de la Cour de cassation du 23 septembre 2009Pour la Cour de cassation, un pacte de préférence d’une durée de vingt ans fixant un prix de rachat égal au prixde vente initial majoré selon la variation de l’indice INSEE ne porte pas atteinte au droit de propriété.C<strong>et</strong>te décision a été particulièrement remarquée <strong>et</strong> abondamment commentée 26 , car elle est la première <strong>dans</strong>laquelle la Cour de cassation a été amenée à se prononcer sur la licéité d’une clause à finalité <strong>anti</strong>-spéculative.Les faits méritent d’être brièvement rappelés, car ils peuvent être considérés comme un cas d’école en matière derevente « spéculative ». La commune de Saint Pée sur Nivelle, a vendu par acte notarié en mai 2003 à Mr J. <strong>et</strong>Mme B. un terrain à bâtir de 999 m² <strong>dans</strong> un lotissement au prix de 42.685 € ; l’acte comportait une clauseintitulée « Pacte de préférence », stipulée pour une durée de vingt ans, prévoyant qu’avant toute revente à un tiers,le rachat du terrain devrait être proposé à la commune, au prix d’acquisition réactualisé en fonction de l’indiceINSEE du coût de la construction, majoré le cas échéant du prix de revient de la construction évalué par expert.Trois ans plus tard, Mr J. <strong>et</strong> Mme B. sans avoir fait construire, signent un compromis pour revendre le terrain nupour un montant de 120.000 €, soit près de trois fois le prix initial. La commune se manifeste <strong>et</strong> demande àexercer le droit que lui confère le pacte de préférence au prix fixé selon les modalités prévues à l’acte de venteinitial. Ceux-ci assignent la commune devant le tribunal de Grande Instance en invoquant la nullité de la clauseconstituant selon eux une atteinte à leur droit de propriété. Le tribunal les déboute de leur demande. Le jugementsera confirmé par la Cour d’appel de Pau 27 , puis par la Cour de cassation <strong>dans</strong> l’arrêt précité.Les motivations de l’arrêt de la Cour de cassation reprennent <strong>et</strong> approuvent celles de l’arrêt de la Courd’appel. Elles sont schématiquement les suivantes :25Le pacte de préférence constitue une créance personnelle. Il ne constitue pas une restriction au droit de disposer <strong>et</strong> n’est enconséquence pas soumis aux formalités de publicité foncière obligatoire. Le bénéficiaire du pacte ne dispose d’aucun droit à l’encontre del’acquéreur pour l’inexécution de ce pacte, puisqu’il n’y est pas partie. Si le propriétaire cède son bien sans respecter le pacte depréférence, le bénéficiaire peut le poursuivre en dommage <strong>et</strong> intérêt, pour violation d’une obligation de faire <strong>et</strong> de ne pas faire, mais enaucun cas il ne peut être substitué au tiers acquéreur, sauf à obtenir l’annulation judiciaire de la vente en apportant la preuve que levendeur <strong>et</strong> l’acquéreur ont agi frauduleusement <strong>et</strong> de concert. Le concert frauduleux nécessite la preuve que l’acquéreur avait connaissancedu pacte de préférence.26Cass. Civ. , 23 septembre 2009, n°08-18.187 Jaureguiberry <strong>et</strong> a. c/Commune de Saint Pée sur Nivelle, commentée notamment <strong>dans</strong> :- La semaine juridique Notariale <strong>et</strong> Immobilière n°1, 8 janvier 2010, 1001 Chronique de Stéphane Piedelièvre professeur à l’université deParis XII / Immobilier ;- Jurishebdo immobilier (369, 6 octobre 2009) p.2-3 ;- La semaine juridique Edition Générale n°48, 23 novembre 2009, 479 / Note sous l’arrêt de Gilles Pill<strong>et</strong>, maitre de conférence àl’université de Paris XII / Vente d’immeuble ;- La Semaine Juridique Edition Générale n° 12, 22 Mars 2010, 336 / Droit des biens .Chronique par Hugues Périn<strong>et</strong>-Marqu<strong>et</strong>, professeur àl'université Panthéon-Assas (Paris II).27CA Pau 1 ère ch. Civ 24 avril 2008.15


- La clause incriminée relève de la liberté contractuelle : Les juges r<strong>et</strong>iennent que « la stipulation avait étélibrement convenue…. ».- La clause est justifiée par un intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime :. en eff<strong>et</strong> d’une part, elle répond à une finalité <strong>anti</strong>-spéculative : « …elle avait pour but, en fixant d’ores <strong>et</strong> déjàun prix, institué pour une durée de vingt ans, d’empêcher la spéculation sur le bien <strong>dans</strong> un contexte marqué parla rar<strong>et</strong>é de l’offre <strong>et</strong> le décrochage des possibilités financières de la plupart des ménages par rapport à l’envoléedes prix de l’immobilier…» ;. d’autre part, elle constitue la contrepartie pour les acquéreurs de « la possibilité d’accéder à un marchéprotégé de la spéculation immobilière ».Ce sont les deux conditions exigées pour la validité du pacte de préférence. La stipulation d’un délai ne constituepas selon la jurisprudence de la Cour de cassation 28 une condition de validité du pacte à la différence d’une claused’inaliénabilité. Dès lors, la clause instituant le pacte de préférence ne portait pas atteinte au droit de propriété, enl’espèce. Cependant, on ne peut s’empêcher de se demander si la solution aurait été la même, <strong>dans</strong> l’hypothèse oùnos acquéreurs auraient construit leur maison <strong>et</strong> voulu la revendre avec le terrain dix ans après…Quoiqu’il en soit, le pacte de préférence constitue bien une restriction au droit de disposer, dès lors que lesconditions de détermination du prix sont fixées à l’avance conventionnellement en fonction de paramètres qui neperm<strong>et</strong>tent plus le jeu d’une libre négociation des parties <strong>dans</strong> le cadre d’un prix de marché, pendant la duréestipulée.Le risque de l’action en rescision pour lésionObservons en eff<strong>et</strong> qu’à titre subsidiaire, les demandeurs avaient soulevé devant le tribunal, puis laCour d’appel, le caractère lésionnaire de la vente encouru lors du rachat par la commune, si levendeur est lésé de plus de 7/12° du prix de l’immeuble 29 . Sans écarter définitivement c<strong>et</strong> argument,les juges du fond ont considéré que la question de la lésion se posait non pas à propos du pacte depréférence, mais seulement une fois la vente réalisée, en soulignant le caractère aléatoire de celle-ci.Autrement dit, le caractère lésionnaire ne pourra être démontré qu’une fois l’acte de vente signé. Orle pacte de préférence s’analyse en une promesse unilatérale <strong>et</strong> la vente ne devient parfaite que parl’acceptation du vendeur, laquelle était loin d’être acquise en l’espèce, compte tenu du procès encours.Il restera <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te hypothèse à savoir sur quelle base évaluer la valeur de l’immeuble. Autrementdit, faudrait-il pour apprécier le caractère lésionnaire ou non de la vente, tenir compte de la clauseaffectant la libre disposition du bien, laquelle conduirait normalement à en amoindrir la valeur vénale,comme on peut l’observer fréquemment par exemple <strong>dans</strong> la vente d’un immeuble loué par rapportà celle d’un immeuble libre de toute occupation, pour tenir compte des droits consentis à des tierspar le propriétaire ?La clause d’agrément de prixElle consiste pour l’acquéreur à prendre l’engagement, en cas de revente du bien acquis <strong>dans</strong> un délaifixé contractuellement, d’obtenir l’accord sur le prix de cession du vendeur initial, ou de lacollectivité ayant fourni une aide perm<strong>et</strong>tant de minorer le prix de vente initial. Il s’agit d’éviter latentation de revendre pour encaisser une plus-value, alors que l’opération a bénéficié d’une aidepublique perm<strong>et</strong>tant d’en minorer le coût, ce qui est le cas quand le terrain constituant l’assi<strong>et</strong>te del’immeuble a été apporté au maître de l’ouvrage à des conditions sensiblement inférieures à sa valeurde marché, <strong>dans</strong> la perspective d’une opération d’accession sociale ou très sociale. L’agrément duprix est subordonné à la condition que le prix de cession, en cas de revente par l’acquéreur,28Cass. Civ 3° 15 janvier 2003 n° 01-03700 : «…la prédétermination du prix du contrat <strong>et</strong> la stipulation d’un délai ne sont pas desconditions de validité du pacte de préférence.. ».29Article 1674 du code civil ouvrant l’action en rescision pour lésion en matière de vente d’immeuble.16


n’excède pas le prix d'acquisition actualisé, ou une autre modalité de déterminabilité du prix derevente prévue <strong>dans</strong> la clause.C<strong>et</strong>te clause est souvent associée à un droit de préemption conventionnel ou à une faculté deréméré au profit du vendeur pour en assurer le respect, ou encore à un pacte de préférence (cf.supra).Ce type de clause est souvent imposée, comme condition d’une dérogation à une claused’inaliénabilité ou en complément d’un droit de préemption conventionnel, à l’occasion d’opérationsd’accession sociale réalisées par des promoteurs ayant bénéficié d’une aide de la collectivitéterritoriale, pour vendre à des acquéreurs remplissant certaines conditions, des logements neufs ourénovés à des prix plafonnés à un niveau sensiblement inférieur au prix du marché.Les clauses ayant pour obj<strong>et</strong> de limiter la libre affectation de l’usage dubien par l’acquéreurCes clauses ont pour obj<strong>et</strong> de limiter la libre affectation de l’usage du bien par l’acquéreur en luiimposant des obligations de faire (obligation de construire <strong>dans</strong> un certain délai, d’occuper à titre derésidence principale de l’acquéreur) ou de ne pas faire (interdiction de louer).Elles sont généralement stipulées en complément d’une clause restrictive du droit de libredisposition, notamment la clause d’inaliénabilité, pour gar<strong>anti</strong>r à la collectivité ayant octroyé unavantage ou une aide à l’accédant, que pendant sa durée de validité, celui-ci utilisera le bien acquisconformément à l’objectif recherché par la collectivité ayant accordé l’aide ou l’avantage.Obligation de construire <strong>dans</strong> un certain délaiIl est possible de vendre un terrain à bâtir à la condition que l'ach<strong>et</strong>eur construise <strong>dans</strong> un délaimaximum. Si l'acquéreur est d'accord pour s'engager <strong>dans</strong> ces termes, aucun texte ne s'y oppose. Ilconviendra, toutefois, que c<strong>et</strong>te modalité de la vente apparaisse clairement <strong>dans</strong> l'acte de cession. Ledélai maximum prévu sera souvent compris entre trois <strong>et</strong> quatre ans, sans qu’il n’existe aucunenorme impérative en la matière.En cas de non-respect de l’obligation de construire :– l’acquéreur peut être condamné au versement de dommages/intérêts pour inexécution d'uneobligation de faire ;– la sanction applicable peut également être définie par une clause prévoyant un droit de rachat parla commune à un prix déterminé ou déterminable, par exemple le prix d'achat réévalué selon unindice (cf. supra : la vente à réméré) ;– l'engagement de construire de l'ach<strong>et</strong>eur peut également être érigé en condition résolutoire 30 .Ainsi, si au terme du délai, la construction proj<strong>et</strong>ée n'a pas été réalisée conformément à lastipulation, la condition sera accomplie <strong>et</strong> la vente sera résolue (code civil : art. 1183).30Clause résolutoire en application de l’article 1183 du code civil « La condition résolutoire est celle qui, lorsqu’elle s’accomplit, opère larévocation de l’obligation, <strong>et</strong> qui rem<strong>et</strong> les choses au même état que si l’obligation n’avait pas existé. Elle ne suspend point l’exécution del’obligation : elle oblige seulement le créancier à restituer, ce qu’il a reçu, <strong>dans</strong> le cas où la condition prévue par l’obligation arrive ».17


Obligation d’occuper le logement acquis ou construit à titre de résidenceprincipale de l’acquéreurEn contrepartie de l’aide apportée par la collectivité ayant permis une minoration du prix du terrainou du logement, il est fréquemment stipulé une obligation à la charge de l’acquéreur d’occuperpendant une durée variable (généralement de cinq à dix années), le logement acquis ou construit àtitre de résidence principale. C<strong>et</strong>te occupation doit être effective <strong>dans</strong> un certain délai (souvent fixéà un an) à compter de la déclaration d’achèvement de l’immeuble ou de l’acte de vente notarié, <strong>dans</strong>l’hypothèse d’un logement acquis achevé. Elle constitue le point de départ de l’obligation d’occuper àtitre de résidence principale. Il est généralement prévu qu’elle s’impose aux acquéreurs successifspendant la durée stipulée au contrat de vente, ce qui nécessite sa publication au fichier immobilier dubureau des hypothèques, chacun d’eux devant à son tour s’engager à affecter le logement acquis àtitre de résidence principale.Certaines clauses ouvrent la possibilité d’un d’assouplissement en prévoyant une faculté de solliciterauprès du vendeur initial (commune ou promoteur) une dispense d’affectation (par exemple lesautorisant à louer) en justifiant d’événements graves revêtant le caractère de la force majeure(insurmontable, irrésistible <strong>et</strong> extérieur aux parties) de nature familiale ou professionnelle.En cas de non-respect de la clause d’affectation à titre de résidence principale, la sanction estconstituée par une clause résolutoire (cf. supra) mise en œuvre « si bon semble au vendeur (initial) »,laquelle peut être complétée par une clause pénale 31 .Une clause résolutoire dont la mise en oeuvre aura des conséquences dévastatrices.En cas de mise en jeu de la clause résolutoire, l’indemnité versée par le vendeur initial (commune oupromoteur) est généralement définie comme égale au prix d’acquisition initial augmenté des frais. Ilest parfois prévu que l’indemnité sera diminuée par application d’un abattement dégressif en fonctionde la durée restant à courir jusqu’à la fin de la durée d’obligation d’affectation à titre de résidenceprincipale. C<strong>et</strong>te dernière modalité semble cependant à éviter car elle peut s’avérer contraire auxintérêts des créanciers inscrits ayant fourni tout ou partie des fonds nécessaires au financement del’opération, en ne perm<strong>et</strong>tant pas au débiteur (l’acquéreur évincé) de rembourser le capital restantdû.D’une façon générale, la clause résolutoire apparaît difficile à m<strong>et</strong>tre en oeuvre, par les eff<strong>et</strong>sradicaux qu’elle emporte, en ané<strong>anti</strong>ssant rétroactivement l’opération, ce qui entraîne desconséquences disproportionnées pour l’acquéreur <strong>et</strong> ses ayants droits au regard de l’objectifpoursuivi, en particulier les créanciers de l’acquéreur qui voient leurs sûr<strong>et</strong>és réelles (hypothèques,privilège de prêteur de deniers) sur le bien remises en cause, mais aussi pour le vendeur qui devrarembourser le prix d’acquisition majoré des frais. C’est pourquoi, on peut penser qu’elle ne pourraêtre appliquée que de façon très exceptionnelle <strong>et</strong> <strong>dans</strong> des hypothèses d’abus <strong>et</strong> de mauvaise foimanifestes de l’acquéreur.L’interdiction de louer ou les restrictions au droit de louerLa stipulation obligeant l’acquéreur à occuper son logement à titre de résidence principales’accompagne d’une interdiction de louer le logement nu ou meublé, de le transformer en locauxcommerciaux ou professionnels, de l’affecter à usage de résidence secondaire, ou de l’utiliser commeaccessoire d’un contrat de travail.31Clause par laquelle les parties conviennent à l’avance d’une indemnisation forfaitaire en cas de non-respect par l’une d’elles desobligations qui lui incombe. Cependant, c<strong>et</strong>te indemnisation peut être modulée par le juge à la demande des parties à la hausse ou à labaisse, pour tenir compte du préjudice effectivement subi (code civil : art. 1152).18


Cependant, c<strong>et</strong>te interdiction de louer n’est pas toujours absolue : on rencontre des clauses <strong>dans</strong>lesquelles les parties ont stipulé que la convention n’a pas pour obj<strong>et</strong> la constitution d’un patrimoinelocatif, sans cependant vouloir interdire purement <strong>et</strong> simplement la location du logement.A titre d’exemple, on citera la stipulation selon laquelle l’organisme vendeur adm<strong>et</strong> la possibilité delouer le logement acquis sous réserve que c<strong>et</strong>te location intervienne à « un prix raisonnable », étantprécisé que la notion de loyer raisonnable doit s’entendre d’un loyer ne dépassant pas de plus de 50% le loyer maximum PLA ou PLUS. Dans c<strong>et</strong> exemple, il est stipulé en outre qu’en tout état de cause,l’acquéreur reste libre de fixer comme il l’entend le niveau du loyer qu’il demandera à son locataire,mais si celui-ci dépasse le loyer dit « raisonnable », les deux tiers de ce dépassement devront êtreversés au vendeur.Toute la difficulté en matière de location réside <strong>dans</strong> le contrôle de sa mise en œuvre, <strong>dans</strong> lamesure où la publication des stipulations restrictives de l’utilisation du logement au fichierimmobilier, ne constitue nullement une gar<strong>anti</strong>e de leur respect, puisque le locataire n’a pas accès àl’acte de cession <strong>et</strong> aux modalités réglementant l’occupation du logement.Pour tenter de pallier c<strong>et</strong>te difficulté, l’acte de cession, quand il autorise sous condition la mise enlocation du logement, prévoit une obligation d’information du vendeur ou parfois du syndic en luiadressant le proj<strong>et</strong> de bail préalablement à la date d’entrée en jouissance du locataire. Le non-respectde c<strong>et</strong>te formalité est parfois sanctionné par une indemnité forfaitaire, ou une amende civile 32(parexemple 1.000 euros) qui s’ajoute à l’obligation de reversement de la partie du loyer dit «raisonnable ».Des clauses tendant à assurer le remboursement des aides accordéesIl s’agit ici d’une approche différente, partant du constat que la collectivité territoriale, est intervenuepour réaliser une opération d’accession sociale ou pour contribuer à perm<strong>et</strong>tre l’accession à lapropriété de ménages à revenus modestes, soit sous forme d’un apport de terrain à l’accédant ou aupromoteur social à un prix sensiblement inférieur à sa valeur de marché, soit sous forme d’aidesdirectes financières à l’accédant. En général, en contrepartie de la réduction de charge foncière dontil a bénéficié, le promoteur s’engage ce que le prix de vente ne dépasse pas un prix plafond par mètrecarré, compatible avec les revenus des ménages relevant de l’accession sociale.L’objectif n’est pas ici de restreindre les droits de l’acquéreur, ni de rem<strong>et</strong>tre en cause la vente par lamise en œuvre d’une clause résolutoire ou d’une faculté de réméré, ni de contrôler le prix decession, encore que ce type de clause puisse s’articuler avec l’une ou l’autre des clausesprécédemment analysées, mais bien d’obtenir le remboursement des aides versées ou uncomplément de prix représentant la contre-valeur de l’effort consenti par la collectivité, sil’acquéreur ou le sous-acquéreur revend ou m<strong>et</strong> en location le bien acquis <strong>dans</strong> un délai déterminé<strong>dans</strong> l’acte de cession initial du terrain ou du logement.Le remboursement par l’acquéreur de la minoration de charge foncière en casde plus-valueCe type de clause présente l’avantage d’être assez « pédagogique », <strong>dans</strong> la mesure où il estgénéralement introduit par un bref exposé faisant ressortir la finalité sociale de l’opération, maissurtout présentant une évaluation chiffrée de l’effort consenti par la collectivité <strong>et</strong> de son impact surle prix du logement <strong>et</strong> de ses annexes.32L’indemnité forfaitaire est une réparation qui suppose l’existence d’un préjudice, alors que le prononcé de l’amende est indifférent àl’existence de ce préjudice mais sanctionne, en revanche, le comportement fautif d’une partie.19


En cas de revente <strong>dans</strong> le délai conventionnellement fixé (le plus souvent de cinq à dix ans), supérieurau prix de vente revalorisé le cas échéant selon la variation d’un indice, l’acquéreur s’oblige àrembourser l’équivalent de la réduction de la charge foncière dont il a bénéficié. Il peut être prévucependant, <strong>dans</strong> certaines clauses de ce type, qu’au-delà d’une durée minimale, le remboursement dela réduction de la charge foncière sera réduit au prorata de la durée de détention (par exemple audelàde cinq ans de détention du bien, par année supplémentaire, une réduction de 20 % de la chargefoncière à rembourser sera appliquée).Pour tenir compte de la survenance d’événements importants pouvant influer sur la parcoursrésidentiel des accédants, il est fréquemment stipulé que l’acquéreur sera néanmoins exonéré dec<strong>et</strong>te obligation si la vente ou la revente est motivée par certains événements : mutation ou mobilitéprofessionnelle pour lui-même ou son conjoint, chômage, modification grave de situation familiale(décès, divorce, séparation…) justifiant ou imposant la vente du logement.Hormis ces hypothèses, si le prix de vente ne perm<strong>et</strong> pas de rembourser la somme à reverser à lacommune, notamment en raison de l’obligation de désintéresser les créanciers bénéficiant d’unesûr<strong>et</strong>é réelle (hypothèque <strong>et</strong> privilège de prêteur de deniers), en l’absence plus-value, l’obligation deremboursement de la réduction initiale de la charge foncière pèsera sur le sous- acquéreur.Certaines clauses ajoutent, qu’en cas de mise en location du bien avant l’expiration du délai au coursduquel l’acquéreur s’est engagé à occuper le logement acquis ou construit à titre de résidenceprincipale, le remboursement de la réduction de charge foncière deviendra immédiatement exigible.Le droit à remboursement au profit de la commune s’éteint au terme du délai fixé, même si lesventes successives n’ont pas permis de payer en tout ou partie la réduction de charge foncière.La créance de la collectivité est généralement gar<strong>anti</strong>e par une hypothèque inscrite lors de la venteinitiale, étant précisé que pour préserver la capacité de l’acquéreur de trouver du crédit auprès desbanques <strong>et</strong> établissements financiers, c<strong>et</strong>te sûr<strong>et</strong>é prendra rang au fichier immobilier du bureau deshypothèques, après celles gar<strong>anti</strong>ssant les sommes empruntées.Le remboursement par l’acquéreur des aides directes versées par lescollectivités territorialesL’aide de la collectivité peut en eff<strong>et</strong> être apportée selon d’autres modalités ou même encomplément de la minoration de la charge foncière. Elle peut prendre la forme d’une prime verséedirectement à l’accédant, ou d’une subvention au promoteur, afin de perm<strong>et</strong>tre à ce dernier deréduire le prix de vente des logements.La clause <strong>anti</strong>-spéculative contient un exposé préliminaire relatant l’objectif poursuivi, c'est-à-direl’aide à l’accession sociale ou très sociale, <strong>et</strong> les conditions auxquelles doivent satisfaire les ménageséligibles : plafonds de ressources, première accession, bénéficiaires du prêt à taux zéro, <strong>et</strong>c.Elle contient ensuite généralement un engagement exprès de l’acquéreur d’occuper personnellementle logement à titre de résidence principale pendant une durée minimale, <strong>et</strong> de rembourser l’aide entout ou partie s’il n’est plus en mesure d’y satisfaire.A l’initiative du promoteur, ce type de clause peut être inséré <strong>dans</strong> l’acte de cession par le notairerédacteur. Dans d’autres cas, elle figure sous forme de conditions <strong>dans</strong> les documents sous seingsprivés à compléter pour le dossier de demande de subvention présenté par le futur acquéreur.La difficulté réside alors <strong>dans</strong> le contrôle de son application effective, <strong>dans</strong> la mesure où la collectivitéqui attribue l’aide n’est pas toujours informée de la vente du logement ayant donné lieu au versementde c<strong>et</strong>te aide.20


Les recours de l’acquéreur d’un bien affecté d’une clause <strong>anti</strong>-spéculativeLa question se pose d’abord pour l’acquéreur ayant acquis un logement ou terrain à bâtir frappéd’une clause d’inaliénabilité. Elle doit également être soulevée d’une façon plus générale pour touteclause restrictive de la libre affectation <strong>et</strong> la libre disposition du bien.Deux points doivent être tranchés :– Quel est le juge compétent ?– Quelle action intenter ?Le juge civil est, en principe, compétent en cas de contestation sur la clauserestrictive du droit de disposerA l’occasion d’un litige entre les parties entre la collectivité publique ayant contracté <strong>et</strong> la personneprivée avec elle, se posera la question de savoir quel est le juge compétent pour trancher ledifférend.Le cas de figure est le suivant : le demandeur ayant contracté avec la personne publique, pour fairereconnaître le bien fondé de ses prétentions l’assigne devant le tribunal de Grande Instance <strong>et</strong>, endéfense, celle-ci soulève l’incompétence du juge civil au profit du tribunal Administratif, en invoquantle caractère administratif de l’acte ou contrat en raison de la présence réelle ou supposée de «clauses exorbitantes du droit commun », qui constitue l’un des critères de la compétence du jugeadministratif.Rappelons que le juge administratif est en principe compétent pour tout ce qui relève du contentieuxde la gestion du domaine public 33 . En revanche, le domaine privé est par principe, soumis au droitprivé <strong>et</strong> son contentieux relève des juridictions judiciaires. C’est ainsi que les ventes d’immeublesappartenant au domaine privé d’une personne publique relèvent de la compétence judiciaire, à moinsqu’il ne s’agisse d’un contrat visant à faire participer le cocontractant à l’exécution d’un service public<strong>et</strong> comportant des clauses exorbitantes du droit commun, ce qui amène alors à le ranger <strong>dans</strong> lacatégorie des contrats administratifs relevant du juge administratif.C’est ainsi que la Cour de cassation 34a jugé que la clause par laquelle une commune se réserve ledroit de contrôler le caractère non spéculatif de l’opération immobilière poursuivie par la sociétéacquéreur, clause perm<strong>et</strong>tant à la commune d’agréer les prix de vente ou de location, confère àcelle-ci un pouvoir de contrôle sur l’activité de son cocontractant. La Cour de cassation en déduitqu’il s’agit d’une clause exorbitante du droit commun <strong>et</strong> décide que les juridictions de l’ordrejudiciaire sont incompétentes pour connaître du litige.En revanche, dès lors que le litige porte sur un pacte de préférence inséré <strong>dans</strong> un contrat de vented’un terrain par une commune à une personne privée, afin de répondre aux objectifs de la politiquede la commune visant à faciliter l’accession à la propriété, c<strong>et</strong>te clause s’analyse en une promesse devente conditionnelle <strong>et</strong> ne constitue pas une clause exorbitante du droit commun. En conséquence,l’exception d’incompétence soulevée par la commune est rej<strong>et</strong>ée 35; le juge civil est compétent pourtrancher le litige.33Article L.2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques.34Cass. Civ 1°, 18 novembre 1992 ; n°91-12.621 commune de P<strong>anti</strong>n c/ Société de construction 46-48 rue Victor Hugo.35CA Pau 1 ère ch. civ. 24 avril 2008 X c/ Commune de St Pée sur Nivelle.21


Quelle action pour contester la clause ou y déroger ? La nullité sinon rien !Plusieurs actions paraissent théoriquement envisageables par l’acquéreur, s’estimant lésé en raisondes contraintes imposées par la clause restrictive du droit de libre disposition.La première est une action en nullité de la clause fondée en particulier sur l’absence d’un intérêtsérieux <strong>et</strong> légitime <strong>et</strong> d’une atteinte au droit de propriété.A côté de c<strong>et</strong>te action en nullité, se pose la question de savoir, si à l’instar de l’autorisation judiciairede disposer, ouverte pour les clauses d’inaliénabilité stipulées en matière de libéralité, il pourraitdemander l'autorisation du juge de passer outre au refus d’autorisation sollicité auprès de lacollectivité ou de l’organisme vendeur (de vendre, ou de louer).Une troisième voie mérite enfin d’être évoquée, celle d’une action tendant à faire réduire les eff<strong>et</strong>sde la clause restrictive du droit de libre disposition, en demandant au juge d’exercer un contrôle dela proportionnalité des intérêts ayant justifié la clause <strong>et</strong> les restrictions imposées par celle-ci.L’action en nullité de la clause <strong>anti</strong>-spéculativeC<strong>et</strong>te action judiciaire tend à faire reconnaître la nullité de la clause litigieuse, conformément au droitgénéral des contrats d’une part <strong>et</strong> des principes applicables aux clauses restrictives du droit de libredisposition d’autre part, c'est-à-dire de leurs conditions de validité.Il faudra démontrer l’absence de l’une des conditions de validité de la clause contractuelle, c'est-àdire:– L’absence de l’une des quatre conditions exigées pour la validité d’une convention 36 duconsentement ?– Ou l’atteinte au droit de propriété résultant de l’absence d’un intérêt sérieux la justifiant (cf. supraarrêt du 13 décembre 2005), ou du caractère temporaire. On remarque que c’est également surce même fondement que les acquéreurs ont tenté d’obtenir l’annulation de la clause instituant undroit de préférence d’une durée de 20 ans au profit de la commune (cf. supra : arrêt du 23septembre 2009).Les conséquences de la nullité ?Dès lors que le juge prononce la nullité des clauses d'inaliénabilité ou des clauses restrictives au droitde libre disposition, considérant qu’elles contreviennent aux conditions de validité sus-énoncées, laquestion qui se pose est de savoir si c<strong>et</strong>te sanction n’affectera que la clause elle-même ou si elleentraînera la nullité de l’acte tout entier.En règle générale, la nullité n'affectera que la clause elle-même <strong>et</strong> laissera subsister le contrat amputéde la clause illicite. C’est d’ailleurs la solution r<strong>et</strong>enue par la jurisprudence <strong>dans</strong> l’arrêt du 13décembre 2005 précité. Il n’en ira autrement que si le caractère déterminant de la clause pour leurconsentement des parties est démontré. Une simple affirmation <strong>dans</strong> l’acte du caractère déterminantde la clause pour le consentement des parties devra être confirmée par d’autres éléments faisantressortir, par exemple, qu’elle est la contrepartie de l’aide importante accordée par la collectivitépour tel montant, faute de quoi elle risque de n’être considérée par les juges que comme une simpleclause de style.L’hypothèse d’un contrôle judiciaire de la proportionnalitéIl s’agit <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te hypothèse de saisir le juge en soulevant le caractère disproportionné desrestrictions imposées par la clause au regard de la contrepartie ou de l’avantage accordé à36Article 1108 du code civil : « quatre conditions sont essentielles pour la validité d’une convention : le consentement de celui qui s’oblige ;sa capacité de contracter ; un obj<strong>et</strong> certain qui forme la matière de l’engagement ; une cause licite <strong>dans</strong> l’obligation ».22


l’acquéreur ou de la durée de la validité, s’il s’agit d’une clause d’inaliénabilité, pour obtenir unallègement de ces mesures restrictives, soit <strong>dans</strong> leur étendue, soit <strong>dans</strong> leur durée.Les juges devront alors se prononcer, en premier lieu, sur l’existence de l’intérêt sérieux <strong>et</strong> légitimejustifiant la clause, <strong>et</strong> s’ils l’adm<strong>et</strong>tent, ils auront le cas échéant à effectuer un contrôle deproportionnalité entre les contraintes imposées à l’acquéreur <strong>et</strong> l’importance de l’aide ou del’avantage qui lui a été accordé par la collectivité <strong>et</strong> qui en fonde l’intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime. C<strong>et</strong>teappréciation relève du pouvoir souverain des juges du fond.Comme on l’a vu ci-dessus, les premières décisions rendues à ce jour par la jurisprudence en matièrede clauses restrictives du droit de libre disposition, l’ont été à l’occasion d’actions tendant à obtenirla nullité de celles-ci. Les juges se sont prononcés sur leur validité, <strong>et</strong> les motivations de ces décisionsne font mention d’aucun contrôle par le juge de leur proportionnalité au regard des eff<strong>et</strong>s de laclause contestée.On r<strong>et</strong>iendra néanmoins que, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme,s’appuyant sur le protocole additionnel à la convention européenne précitée (article 1 erprécité, cf.supra), il y a lieu en cas d’atteinte au « respect des biens » du plaignant, de rechercher si un justeéquilibre a été maintenu entre les exigences de l’intérêt général <strong>et</strong> les impératifs de sauvegarde desintérêts fondamentaux (dont fait partie le droit de propriété). C<strong>et</strong>te atteinte, le cas échéant, devrapouvoir être soumise à une juridiction qui contrôlera si ce juste équilibre a été respecté.L’intérêt de c<strong>et</strong>te action réside <strong>dans</strong> le fait qu’elle perm<strong>et</strong>, tout en laissant subsister la clause, d’enlimiter les eff<strong>et</strong>s jugés excessifs ou disproportionnés par rapport aux atteintes au principe de libredisposition des biens posé par l’article 537 du code civil. Encore faudra t-il qu’elle soit admise par lajurisprudence ou le législateur. A défaut, le juge n’a d’autre alternative qu’adm<strong>et</strong>tre la validité de laclause ou l’annuler… un choix clair <strong>et</strong> radical !L’autorisation judiciaire de lever les restrictions au droit de libre disposition est elleenvisageable ?Rappelons qu’en ce qui concerne les clauses d’inaliénabilité stipulées <strong>dans</strong> les actes à titre gratuit(testaments <strong>et</strong> donations), le code civil <strong>dans</strong> l’article 900-1 37 , est venu conforter une jurisprudenceancienne <strong>et</strong> perm<strong>et</strong>tre la révision judiciaire de clauses d'inaliénabilité valides, dès lors que le donataireou le légataire apporte la preuve ou bien que l'intérêt qui a justifié la clause a disparu, ou bien qu'unintérêt plus important exige de passer outre ou de modifier l'interdiction d'aliéner.La question se pose pour les clauses d’inaliénabilité stipulées <strong>dans</strong> les actes à titre onéreux de savoir,si le propriétaire du bien frappé d’inaliénabilité temporaire, peut, comme le gratifié <strong>dans</strong> les actes àtitre gratuit, solliciter l’autorisation du juge pour r<strong>et</strong>rouver le droit de disposer de son bien, alorsmême que la validité de la clause n’est pas contestée. Force est de constater que le droit positifn’apporte pas de réponse à c<strong>et</strong>te question. Cela supposerait, soit une disposition législative quiétende la faculté déjà ouverte par la loi au profit du donataire ou du légataire, soit que lajurisprudence reconnaisse c<strong>et</strong>te possibilité pour les clauses stipulées <strong>dans</strong> les actes à titre onéreux.La question n’est pas tranchée <strong>et</strong> la doctrine n’y semble pas favorable 38 , faisant valoir que la possibilitéouverte par la loi pour les actes à titre gratuit, constitue une exception au principe de la forceobligatoire des conventions légalement formées (article 1134 du code civil), laquelle ne peut êtreétendue sans un texte. Par ailleurs, on fait valoir qu’en matière de contrat à titre onéreux, les partiespourraient librement négocier les obligations mises à leur charge, avant la conclusion définitive de37Article 900-1 alinéa 1 er : « Les clauses d'inaliénabilité affectant un bien donné ou légué ne sont valables que si elles sont temporaires <strong>et</strong>justifiées par un intérêt sérieux <strong>et</strong> légitime. Même <strong>dans</strong> ce cas, le donataire ou le légataire peut être judiciairement autorisé à disposer dubien si l'intérêt qui avait justifié la clause a disparu ou s'il advient qu'un intérêt plus important l'exige… ».38Cass. Civ 1°, 31/10/2007 N°05-14238. Commentaire par Renaud Mortier précité « La nouvelle aire des clauses d'inaliénabilité » LaSemaine Juridique Notariale <strong>et</strong> Immobilière n° 5, 1 er février 2008, 1064.23


l’acte. C<strong>et</strong> argument est manifestement infondé pour les clauses <strong>anti</strong>-spéculatives qui sont imposéespar les collectivités aux acquéreurs ayant bénéficié d’une aide ou d’un avantage pour accéder à lapropriété, sans discussion possible.Resterait alors la possibilité de stipuler conventionnellement <strong>dans</strong> l’acte d’acquisition, le droit pourl’acquéreur de demander une autorisation judiciaire de déroger à la clause <strong>anti</strong>-spéculative, s’ilsurvient un intérêt plus important que celui ayant justifié initialement la clause (cf. article 900-1précité).La clause <strong>anti</strong>-spéculative participe de l’économie générale du contrat : il s’agit là de l’argument leplus convaincant pour exclure l’extension de l’autorisation judicaire pour les clauses stipulées <strong>dans</strong>les actes à titre onéreux. En eff<strong>et</strong>, on doit considérer que la clause d’inaliénabilité (ou les restrictionsau droit de libre disposition) fait partie de l’économie générale du contrat <strong>dans</strong> la mesure où elleconstitue la contrepartie de la possibilité d’accéder à la propriété à un prix sensiblement inférieur auprix du marché. Autrement dit, il est logique qu’un bien frappé d’inaliénabilité temporaire soit vendumoins cher que le même bien vendu sans aucune restriction. Dès lors, l’acquéreur doit en supporterles conséquences, même si elles lui sont finalement défavorables, ou moins favorables que prévu.C’est d’ailleurs c<strong>et</strong> argument qui explique le mieux, à notre avis, la position de la jurisprudencedécidant de valider un pacte de préférence d’une durée de vingt ans, assorti d’une clause limitant leprix en cas de revente, <strong>dans</strong> l’arrêt du 23 septembre 2009 (cf. supra).24

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