en Afrique francophone dans les secteurs clés (eau, électricité, ports, transport, énergie). La <strong>Franc</strong>eimposa <strong>de</strong>s limites sur l’importation d’une variété <strong>de</strong> produits en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>zone</strong>-franc ; mais elleimposa aussi un minimum d’importation <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e. Ces traités sont encore opérationnelsaujourd’hui.L’impact du Pacte colonialLes conséquences <strong>de</strong> <strong>la</strong> continuation <strong>de</strong> <strong>la</strong> politique <strong>de</strong> dépendance <strong>de</strong> l’Afrique sont tangibles. Ce sontle manque d’option <strong>de</strong> compétitivité, <strong>la</strong> dépendance <strong>de</strong> l’Afrique par rapport à l’économie française, <strong>la</strong>dépendance à l’armée française, et <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> ouverture faite aux entreprises françaises privées.Certaines différences sont beaucoup plus subtiles.Les compagnies françaises opérant en Afrique francophone, en fonction <strong>de</strong> leur pouvoir sécurisé <strong>de</strong>monopole et d’oligarchie, ont un apport substantiel dans le PIB <strong>de</strong>s pays africains. Elles sont souventles seules gran<strong>de</strong>s pourvoyeuses <strong>de</strong> recettes fiscales. Dans <strong>de</strong> nombreux pays, les compagniesfrançaises paient 50% <strong>de</strong>s taxes ; ce qui leur donne un statut unique. Ainsi il n’est pas rare d’entendreles Français déc<strong>la</strong>rer que sans les compagnies françaises, les économies <strong>de</strong>s pays africainss’écrouleraient. Lorsqu’en plus <strong>de</strong> ce fait les pays africains ont du mal à accé<strong>de</strong>r à leurs réserves,l’évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> <strong>la</strong> dépendance <strong>de</strong> l’Afrique <strong>de</strong>vient a<strong>la</strong>rmante. Cependant, ce<strong>la</strong> n’exclut pas <strong>la</strong>participation d’autres opérateurs économiques tels <strong>la</strong> Chine, ou les Etats-Unis. C’est l’éventualité <strong>de</strong>cette compétition qui rend <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e si fébrile.50 ans après les indépendances africaines, <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e continue <strong>de</strong> contrôler <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s infrastructuresafricaines, et continue <strong>de</strong> mé<strong>la</strong>nger ses réserves <strong>de</strong> change à celles <strong>de</strong>s 14 pays africains <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>zone</strong>CFA. Les compagnies aériennes, <strong>la</strong> téléphonie, l’électricité, l’eau et les gran<strong>de</strong>s banques sontcontrôlées par <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e. Les accords <strong>de</strong> coopération signés après les indépendances par le prési<strong>de</strong>ntHouphouët et le premier ministre français d’alors, Michel Debré, sont toujours théoriquementapplicables. La <strong>Franc</strong>e maintient une poigne <strong>de</strong> fer sur <strong>la</strong> monnaie et le commerce ivoiriens ; ce qui tuetoute initiative nationale d’indépendance.Cette position privilégiée <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e est documentée dans un rapport <strong>de</strong> <strong>la</strong> Commission <strong>de</strong>s NationsUnies : « Les témoignages recueillis montrent que <strong>la</strong> loi <strong>de</strong> 1998 sur le foncier rural est liée à <strong>la</strong>position dominante que <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e et les intérêts français occupent en Côte d’Ivoire.Selon ces sources, les Français possè<strong>de</strong>nt 45% <strong>de</strong>s terres ; curieusement, les immeubles <strong>de</strong> <strong>la</strong>Prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> <strong>la</strong> République et <strong>de</strong> l’Assemblée nationale sont loués <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e. Les intérêts françaiscontrôlent les secteurs <strong>de</strong> l’eau et <strong>de</strong> l’électricité ». Le rapport n’effleure que très superficiellementl’influence <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e en Côte d’Ivoire. Voici ci-<strong>de</strong>ssous quelques uns <strong>de</strong>s opérateurs françaisinfluents dans le pays :Bolloré, lea<strong>de</strong>r du transport maritime français et opérateur principal du transport maritime en Côted’Ivoire, en compagnie <strong>de</strong> Saga, SDV et Delmas, contrôle le port d’Abidjan, le pus grand port maritimeen Afrique <strong>de</strong> l’ouest. Bolloré contrôle <strong>la</strong> régie ferroviaire Abidjan-Burkina (Sitarail). Bien qu’il se soitretiré récemment du commerce du cacao, il conserve toujours sa position <strong>de</strong> lea<strong>de</strong>r dans le tabac et lecaoutchouc.Bouygues, lea<strong>de</strong>r dans les travaux publics a le monopole <strong>de</strong>s grands travaux ; sans oublier Co<strong>la</strong>s,troisième compagnie française <strong>de</strong> travaux publics. A travers <strong>la</strong> privatisation, Bouygues a aussi obtenu<strong>de</strong>s concessions supplémentaires dans l’eau et l’électricité. Il est aussi présent dans l’exploitation dupétrole ivoirien.
Total, <strong>la</strong> plus gran<strong>de</strong> compagnie pétrolière française, détient un quart <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> <strong>la</strong> Sociétéivoirienne <strong>de</strong> raffinage (première compagnie ivoirienne). Total est propriétaire <strong>de</strong> 160 stationsd’essence et contrôle <strong>la</strong> provision <strong>de</strong> bitume. <strong>Franc</strong>e Telecom, <strong>la</strong> 7 e compagnie française et lea<strong>de</strong>r <strong>de</strong>l’industrie <strong>de</strong>s télécommunications, est <strong>la</strong> principale actionnaire <strong>de</strong> Côte d’Ivoire Telecom avec 85% ducapital. Ce secteur lui fut offert dans le cadre <strong>de</strong> <strong>la</strong> privatisation <strong>de</strong>s entreprises.Dans le secteur <strong>de</strong>s banques et <strong>de</strong>s assurances, on note les activités <strong>de</strong> <strong>la</strong> Société Générale, 6 e banqueen <strong>Franc</strong>e, regroupant 55 branches en Côte d’Ivoire, aussi bien que celles du Crédit Lyonnais et <strong>de</strong>BNP-Paribas. AXA, <strong>la</strong> 2 e compagnie française et lea<strong>de</strong>r <strong>de</strong> l’assurance est présente en Côte d’Ivoire<strong>de</strong>puis l’ère coloniale.La compagnie française <strong>la</strong> plus vieille en Cote d’Ivoire est <strong>la</strong> CFAO-CI. Elle opère dans <strong>de</strong> nombreuxsecteurs (automobiles, pharmacie, nouvelles technologies, etc.). Pendant très longtemps, <strong>la</strong> CFAO avaitle monopole <strong>de</strong>s exportations et <strong>de</strong> <strong>la</strong> vente au détail. La CFAO n’a jamais connu une année déficitaire<strong>de</strong>puis sa création en 1887. Elle fut acquise récemment par le groupe Pinault-Printemps-La Redoute.Il y a aussi à signaler <strong>la</strong> présence du « boss <strong>de</strong>s boss français d’antan », le baron Ernest Seilleres, àtravers Technip (usine du secteur pétrolier) et Bivac (qui a récemment installé un nouveau scanner auport d’Abidjan).La gran<strong>de</strong> présence du capital français est l’évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> <strong>la</strong> profitabilité <strong>de</strong> <strong>la</strong> Côte d’Ivoire. Bien queles investissements directs français ne constituent que <strong>de</strong> 3,5 milliards d’euros, les compagnies d’étatacquises par <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e leur ont été offertes à <strong>de</strong>s prix imbattables. Les bénéfices que génèrent cescompagnies à <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e sont d’une immensité vertigineuse. En dépit <strong>de</strong> <strong>la</strong> fuite <strong>de</strong> certaines compagniesfrançaises au cours <strong>de</strong> l’attaque rebelle contre <strong>la</strong> Côte d’Ivoire, le Business français est vite revenu dansle pays, et a même recouvré son importance d’antan. En fait, l’un <strong>de</strong>s premiers gestes <strong>de</strong> Ouattara aprèsque <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e l’a imposé comme prési<strong>de</strong>nt fut <strong>de</strong> payer <strong>de</strong>s millions d’euros <strong>de</strong> compensation auxentreprises françaises qui avaient fui <strong>la</strong> Côte d’Ivoire par peur <strong>de</strong> représailles après le massacre <strong>de</strong>scivils ivoiriens par l’armée française le 20 novembre 2004.Le vrai challenge du business français vint avec l’élection <strong>de</strong> Laurent Gbagbo comme prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>Côte d’Ivoire. Sa décision <strong>de</strong> revoir les termes du Pacte Colonial et son intention <strong>de</strong> faire partir lestroupes françaises et onusiennes <strong>de</strong> son pays sont les raisons pour lesquelles <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e causa sa chute etson incarcération.Pourquoi <strong>la</strong> dévaluation du CFA ?La <strong>Franc</strong>e n’a plus d’argent. Elle n’a que d’énormes <strong>de</strong>ttes publiques et bancaires. Elle est <strong>la</strong> plusexposée aux faillites grecques et italiennes, entre autres, et vient <strong>de</strong> s’embarquer sur un nouveau p<strong>la</strong>nd’austérité. Elle est sur le point <strong>de</strong> perdre son Triple A, ce qui va conduire les banques privées àaccepter <strong>de</strong> pardonner une partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>tte européenne. Les gran<strong>de</strong>s dépenses occasionnées dans <strong>la</strong>poursuite <strong>de</strong> <strong>la</strong> guerre contre <strong>la</strong> Libye ont ruiné <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e. La seule raison pour <strong>la</strong>quelle <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e aencore <strong>la</strong> tête hors <strong>de</strong> l’eau est <strong>la</strong> présence <strong>de</strong>s vastes réserves africaines dans les caisses du Trésorfrançais <strong>de</strong>puis 1960. La gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> cette somme est détenue sous forme d’actions au nom duTrésor français ; ce qui a permis <strong>de</strong> compenser <strong>de</strong> façon très substantielle <strong>la</strong> perte <strong>de</strong> crédibilité <strong>de</strong>sfinances françaises.Les pays francophone d’Afrique se sont progressivement habitués à l’idée qu’ils ne reverront plusjamais leurs avoirs accumulés <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s années, que <strong>la</strong> <strong>Franc</strong>e entend utiliser comme sa contribution àl’effort <strong>de</strong> sauvetage <strong>de</strong> l’euro. Le prési<strong>de</strong>nt Wa<strong>de</strong> du Sénégal a encore <strong>de</strong>mandé qu’une comptabilitésoit faite sur les réserves africaines. Jusque là aucune réponse ne lui est venue. Ouattara <strong>de</strong> <strong>la</strong> Côte