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LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESCONFERENCE SUR LE DEVELOPPEMENTSOCIAL LOCALCO-PRÉSIDENTS :Véronique FAYET, Vice-Présidente du Conseil nationale des Villes, Maire-adjointe deBordeauxYves KRATTINGER, Sénateur, Président du Conseil général de Haute-SaôneGRANDS TÉMOINS :Marie-Guite DUFAY, Maire-adjointe de Besançon, Vice-Présidente du Conseil régional deFranche-ComtéDaniel RENAUD, Vice-Président de l’Association Nationale des Directeurs de l’ActionSanitaire et Sociale des conseils généraux (ANDASS), Directeur général adjoint du Conseil généralde l’ArdèchePhilippe RYSMAN, Président de l’Association Nationale des Cadres Communaux d’ActionSociale (ANCCAS), Directeur général adjoint de la ville de TourcoingGérard SOUMET, Directeur de l’action sanitaire et sociale de la Caisse Centrale deMutualité Sociale Agricole (CCMSA)INTERVENANTS:Sylvie TEYCHENNE, ConsultanteEric PELISSON, Sous-préfet chargé de la politique de la ville, Premier conseiller à laChambre régionale des Comptes du Nord-Pas-de-CalaisJean-Claude PLACIARD, Directeur général adjoint du Conseil général du Puy de DômeGérard SANVICENS, Délégué général de la Fédération nationale des centres sociaux1


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESPremière partie de la conférenceLES ENJEUX DU DEVELOPPEMENTSOCIAL LOCAL ET L’ETAT DES LIEUXVéronique Fayet, Vice-Présidente du Conseilnational des Villes et Adjointe au Maire deBordeauxYves Krattinger, Sénateur, Président duConseil général de Haute-SaôneNous avons devant nous deux demi-journéespour parler de développement social local :cet après-midi nous analyserons plutôt les enjeux dudéveloppement social local, nous essaierons d’endonner une définition et de dresser un état des lieux.Demain nous nous attacherons à formuler des propositionspuisque l’objectif est bien de dégagerdes pistes de travail et d’action.Il est évident que si l’on parle aujourd’hui de développementsocial, c’est d’abord et avant tout pourrépondre à une transformation de la société. Cettequestion a été largement et très bien abordée ce matindonc je n’y reviendrai pas. Mais c’est aussi parcequ’il nous faut aujourd’hui plus que jamais optimisernos réponses publiques.Nous sommes en train de changer de monde dupoint de vue de notre système de solidarité.En effet, depuis la Libération notre système étaitavant tout un système assurantiel accompagné desolidarités familiales ou locales. Ce système a bienfonctionné pendant plus de trente ans, adossé àune croissance de l’emploi et des salaires, mais peuà peu « des mailles sont apparues dans le filet ». Pourrépondre aux transformations de la société, de lafamille, du marché de l’emploi, on a alors mis enplace le Fonds National Vieillesse, l’Allocation ParentIsolé, l’Allocation Spécifique de Solidarité, puisl’Allocation Adulte Handicapé et l’AllocationCompensatrice pour Tierce personne… Enfin, estarrivé le RMI, avec une dimension nouvelle, plushumaine: la personne reçoit et donne.2


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESOn pensait alors que ces dispositifs allaient permettreaux personnes de retrouver un chemin. Or c’estle contraire qui s’est produit : le nombre de bénéficiairess’est accru pour tous les types d’allocations.La société a en quelque sorte montré sa « capacité» à précariser les gens : travailleurs précaires,multiplication des contrats à durée déterminée, explosiondu coût du logement, phénomènes de surendettement…Autant de sources nouvelles d’exclusionface auxquelles les personnes ne sont pas toutesarmées de la même façon.Aujourd’hui on peut donc s’interroger, d’abord surla finalité de ces interventions de la société, maisaussi sur les difficultés à les financer. On peut rappelerqu’entre 1990 et 1997, alors que le PIB n’augmentaitque de 25 %, les dépenses de protectionsociale ont progressé de 37 %, les dépenses d’actionsociale des départements de 57 %. Dans un contexteoù les perspectives de croissance sont sans cesseremises en cause, où le vieillissement de la populationnous interpelle et où les règles et les modes definancement connaissent une mutation profonde, partoutest posée la question de comment dépensermieux?On s’est aperçu d’ailleurs que ce n’est pas parceque l’on met beaucoup plus d’argent que l’on solutionnebeaucoup de problèmes. Il faut donc maintenanttravailler autrement, mettre en place un grandplan de prévention des risques sociaux avec de grandsobjectifs: comment parvenir à retisser du lien entreles institutions et les individus mais aussi entre lesindividus entre eux, dans les familles, dans les quartiers,dans les villages… Comment faire pour que cettesociété retrouve son caractère humaniste, pour que lesgens prennent le temps de vivre ensemble? Commentpasser de la « bonne action » anecdotique à une véritableimplication de chacun ? Comment rassurer lebénévolat (plus que revaloriser ou revitaliser) dansune société de complexité croissante, et plus globalementcomment avoir des gens responsables dans unesociété qui cherche des responsables non pas au senshumain du terme mais au sens judiciaire?Gérard Soumet, Directeur de l’actionsanitaire et sociale de la CCMSAJe voudrais donner quelques point de repères parrapport à l’action que nous menons sur les territoireset en particulier par rapport à notre approchedu développement social local. La dimension territorialea toujours été présente dans notre approchesociale, car elle conditionne pour une large part laqualité de vie de nos ressortissants (exploitants etsalariés agricoles qui vivent dispersés sur les territoires).Pendant longtemps notre action s’est développéeautour du concept d’animation en milieu rural,puis, au milieu des années 1980, nous sommes passésà une phase plus ambitieuse, formalisée autourdu concept de DSL. Aujourd’hui nous avons doncune expérience d’une vingtaine d’années qui s’estenrichie au fur et à mesure.Ce qui caractérise cette approche, c’est d’être avanttout une philosophie d’action, qui vise à susciter la3


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESparticipation des populations parce qu’elles ont lacapacité à trouver des réponses. Elle vise à mobiliser,grâce à des méthodologies particulières, l’ensemblede la population pour que les individus trouvententre eux des liens de solidarité producteurs desolutions à leurs problèmes de vie. Contrairementau travail social réparateur ou assistantiel, cette approchene s’adresse donc pas spécifiquement aux personnesen difficulté mais celles-ci peuvent trouverun moyen de s’y insérer. C’est très important, caraujourd’hui les territoires ruraux sont souvent trèscomposites. La population agricole est devenue minoritaireet nous ne voulons pas créer un enfermementagrico-agricole. Au contraire, il faut que cette populations’intègre dans le tissu du territoire. Il y atout un travail à faire pour que les gens s’emparentdu territoire et le considèrent comme un territoire devie et non pas simplement comme un territoire derésidence.Nos premières actions de DSL ont été lancées en1984 à partir de deux outils: des « programmes d’actionpour la revitalisation du milieu » à vocation généralisteet des « programmes locaux » sur des thématiquesparticulières. Le travail de conceptualisationet de rodage des méthodes de travail s’est poursuiviet aujourd’hui nous proposons un programme à vocationgénéraliste: le « contrat de développement socialterritorialisé ».Ce contrat se décline en milieu rural, sur des territoiresqui ne sont pas trop grands (souvent la dimensiond’un canton même s’ils ne correspondent pas àla notion administrative) et qui correspondent àdes espaces où existent des liens de vie entre les personnes(ce qui demande une certaine observation).L’ancrage territorial, bien-entendu, ne se suffit pasen lui-même (on peut territorialiser des actions « toutesprêtes »). Il a vocation à mettre au cœur du dispositifles acteurs locaux et la population elle-même.En effet, cette démarche procède d’une philosophiemutualiste: les travailleurs sociaux de la MSA deviennentdes agents de la mutualisation des ressourceslocales, le contrat de développement social n’étantpas un outil de la caisse mais un outil au service d’unterritoire. Il doit rassembler l’ensemble des acteurslocaux « naturels », au premier rang desquels les éluspolitiques sans lesquels on ne peut entrer dans le processus,mais aussi la CAF, les centres sociaux, lesréseaux associatifs…Du point de vue de la participation des habitants,c’est à travers la mise en place de groupes d’expressionque l’on intéresse petit à petit la population, d’abordautour de l’analyse de ce qu’est le territoireet de ce que sont ses besoins, puis autour de la recherchede solutions sur les thématiques ayant émergé(exemple : accueil de la petite enfance, aide auxaidants…). L’objectif ensuite est de parvenir à créerune dynamique pour que les personnes trouvent entreelles des liens de solidarité. On recommande d’ailleursà nos travailleurs sociaux de poser une limite dansle temps à leur intervention (en général 4 ans) etde se désengager progressivement des actions misesen place, en passant le relais à d’autres et notammentaux associations qui auront trouvé des opportunitéspour agir.Au final, il est possible de donner une définitiondu développement social qui serait la suivante : ils’agit d’un processus d’analyse et d’action qui concerneune situation sociale collective sur un territoire ; ceprocessus est mené avec la population et avec lespartenaires, dans une philosophie selon laquelleles individus sont capables de prendre des responsabilitéssociales et qui a pour but l’élaboration deréponses à des besoins sociaux tout en favorisantl’insertion des populations. Sa finalité réside dans ladynamisation du territoire et dans le développementdu lien social.Le DSL est donc la promotion d’un mieux vivreensemble sur un territoire, un mieux vivre au seinduquel on peut trouver des opportunités pour les personnesen difficulté (par exemple autour de la créationd’emplois dans le champ du social). L’objectifest donc autant sociétal que social.Véronique Fayet, Vice-Présidente du Conseil nationaldes Villes et Adjointe au Maire de BordeauxLe DSL est donc d’abord une démarche basée surdes valeurs. Ensuite, la question du pilotage est àgéométrie variable, car le pilote unique qui sait toutfaire n’existe pas, il n’y a pas de réponse unique etdogmatique.4


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLEAkintola Sauahibou, Directeur du service actionsociale à <strong>Mo</strong>ntivilliers, Seine-MaritimeVous avez parlé de contrat de développement socialterritorialisé, c’est un outil efficace, mais bien souventles outils se surajoutent, les démarches sejuxtaposent avec les mêmes objectifs mais sans jamaisse croiser. Aujourd’hui ne faudrait-il pas réunir lesdifférents partenaires pour inscrire ces outils dansun projet social global de territoire?Michel Genty, chargé de mission DSL au Conseilgénéral du Pas-de-CalaisLa démarche de DSL est-elle un supplément d’âme,quand on a résolu les problèmes, ou peut-elle englobertoutes les problématiques (insertion, aide socialeà l’enfance, personnes âgées etc.) pour s’inscrire dansun seul grand projet qui ne tronçonne pas à nouveaules problèmes et les interventions (réparation pourles uns, DSL pour les autres) ?Michel Vielle, MSA Alpes du NordDans le développement social local, on approche lanotion de territoire en trois temps : territoire d’observation,territoire d’intervention des professionnelset des institutions et territoire d’appartenancedes habitants. La MSA a dû répondre depuis les années1970 à la dévitalisation du milieu rural. Etant entenduque le développement social local est basé sur ledynamisme des habitants, quelle est l’ingénierie etl’expertise que la MSA peut proposer à des communeset à des intercommunalités?Gérard Soumet, Directeur de l’action sanitaire etsociale de la CCSMAJe tiens à la disposition de tous les informations surce que nous faisons, par exemple en matière d’aideaux aidants. Nous nous intéressons fortement à cesujet car en milieu rural les solidarités, notammentfamiliales, sont absolument nécessaires pour que lespersonnes puissent continuer à vivre chez elles puisqu’ily a encore dans certains territoires un fort déficitde services d’aide à la personne même si ceux-cise sont beaucoup développés.S’agissant du « mille-feuille » des dispositifs, je préciseque le contrat de développement social local estavant tout une méthode d’intervention: il s’agit d’ap-5


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESporter à nos caisses et à nos travailleurs sociaux laméthodologie nécessaire pour aborder les territoires.L’objectif est d’intégrer les personnes, et en particuliernos ressortissants, dans des logiques de développementdu territoire de vie et dans cette démarche,les dispositifs existants sont autant d’atouts qui vontpermettre d’accompagner la démarche qui va faireémerger des solutions. Par exemple en matière d’insertion,on va pouvoir offrir une opportunité à despersonnes en créant un service petite enfance.Aujourd’hui de nombreux Maires ont du mal à s’intégrerdans des démarches d’intercommunalité sur levolet social. La MSA peut peut-être les aider à prendreconscience du fait que le volet social est un élémentindispensable du développement lui-même etqu’il faut travailler à rapprocher ces gens qui cohabitentsur un territoire mais ne vivent pas forcémentensemble.Jean-Philippe Chabannaud, Directeur du CIASdu Blaisois, Président de l’association des maisonsdes services publicsLes maisons de services publics, qui mettent l’usagerau cœur de leur logique en fédérant sur un mêmesite différents modes d’approche, participent du développementsocial local. En effet, loin du « servicepublic clé en main » identique partout, elles s’inscriventdans des projets de territoire. Aujourd’hui lebilan est positif puisque le service public réintègredes territoires sur lesquels il avait plus ou moinsdisparu, faute de combattants, et que l’on arrive parlà à recréer du dynamisme, à retisser du lien socialet de la complémentarité entre services. Il nous fautessayer de ne pas stigmatiser les publics en difficulté,c’est sur des logiques de développement local qu’ilstrouveront les voies d’une meilleure intégration.Et c’est essentiel en milieu urbain comme en milieurural.Raphaël Slama, chargé de mission DGASJe souhaiterais rappeler que le Conseil National deLutte contre les Exclusions et la Ministre chargée dece dossier ont mis en place un groupe de travail nationalsur l’exclusion en milieu rural. Trois types deconstats ont émergé : la difficulté à connaître lesbesoins en milieu rural (quantitativement et qualitativement,par exemple en matière d’habitat indigne);les interrogations sur l’adaptation des outils des politiquesnationales de lutte contre les exclusions auxterritoires ruraux (par exemple : quelle forme peuventprendre les maisons de l’emploi?); la difficultéà articuler les différentes initiatives et les différenteszones d’intervention (la question se pose notammentdans la perspective des chartes de cohésionsociale).Yves Krattinger, Sénateur, Président du Conseilgénéral de Haute-SaôneJe voudrais préciser d’abord que presque tous lesdépartements ont une part de ruralité donc il ne fautpas opposer départements ruraux et départementsurbains. Mais surtout il me semble que ce ne sontaujourd’hui ni les outils ni même les diagnostics quimanquent. La connaissance des problèmes en milieurural est bonne, canton par canton, commune parcommune… l’informatique a permis des progrèsconsidérables dans ce domaine.Quant à la question de l’adaptation des outils nationaux,desquels parle-t-on ? Aujourd’hui les outilsd’intervention sociale sont plus souvent communaux(un maire n’a pas toujours de moyens financiersen milieu rural, mais il abandonne rarement des administrés)et départementaux, avec des complémentsrégionaux. Je n’ai donc pas le sentiment que les éluslocaux demeurent sans réaction, incapables de mettreen œuvre les grandes idées nées au niveau national!D’ailleurs les maisons de services publics, dontle bilan est positif, ont été inventées par les acteurslocaux, et non par le législateur, le cabinet ou la hauteadministration ! C’est d’ailleurs pour cela qu’ellesont des formes différentes selon les territoires et selonles besoins.Enfin, l’intercommunalité est une perspective enmilieu rural pour la prise en charge collective d’unbesoin qui souvent ne peut pas être traité communepar commune mais à l’échelle d’un territoirede projet où l’on peut avoir des stratégies et où l’onpeut regrouper des moyens. Mais cela suppose unpeu plus de débat, avec un conseil communautairequi commence à vraiment discuter de l’avenir et nonpas simplement des lampes de rues!6


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESMarion Laumain, Responsable des étude etFrançois Quelennec, chargé de missionà l’OdasLe DSL, le lien social, est avant tout une affairede proximité et une affaire de projet politiquelocal. On ne fera donc pas de véritable projet de DSLsans impliquer les collectivités locales et notammentles départements et les communes. C’est la raison pourlaquelle nous présentons quelques éléments concernantà la fois les départements et les villes, qui n’ontvocation qu’à être des éléments de débat.1. LES DÉPARTEMENTS ET LE DSLLes départements se sont massivement engagés dansdes démarches de territorialisationUn mouvement massif de territorialisationDepuis la décentralisation, 8 départements sur 10 ontprocédé à une refonte de leurs découpages territoriauxet ces restructurations ont de plus en plus un caractèrestratégique. En effet, même si les préoccupations gestionnairesd’équilibrage des charges de travail sontbien présentes, ces restructurations reposent avant toutsur une volonté d’adaptation de l’action aux spécificitésde chaque territoire et de meilleure cohérenceavec les territoires des partenaires (les territoiresdes villes sont pris en compte dans 65 % des départementset 4 départements sur 10 envisagent aujourd’huiune territorialisation qui tienne mieux comptedes EPCI, des bassins d’emploi et des pays). On cherchedonc à rapprocher les circonscriptions d’actionsociale des territoires de vie, et dans le même temps,on recherche également une cohérence avec les territoiresde mission. Ainsi les territoires d’ASE sont harmonisésavec les circonscriptions dans 86 % des départementset c’est le cas dans 92 % des départementspour les territoires de PMI. Cela progresse égalementpour l’insertion, moins pour l’APA qui est un dispositifplus récent. Enfin, ce mouvement s’accompagned’une déconcentration des décisions qui s’est développéedans le service social, l’ASE et la PMI, et désormaisquelque peu dans l’insertion.Une recherche de transversalitéLa transversalité s’est traduite dans les départementstout d’abord par la réorganisation des services. Leregroupement des services d’ASE et de PMI est effectuédans un département sur deux, et on observe deplus en plus une ouverture de la PMI sur les missionsde prévention. Du côté de la lutte contre les exclusionson constate également un rapprochement significatifdes dispositifs d’insertion et des autres dispositifs(75 % des départements l’ont fait ou envisagentde le faire). Enfin, même s’il faut vérifier ce que lanotion recouvre, on constate l’émergence de directionsdu développement social… La recherche detransversalité dans les départements s’est faite égalementau travers de la désectorisation du travail social:elle a fortement progressé (le nombre de départementsfonctionnant en désectorisation totale a doublé en 6ans), même si le mouvement n’est pas complètementhomogène. La désectorisation favorise en général ledéveloppement d’un accueil administratif, qui constitueune évolution capitale quand on sait qu’untiers des usagers des services sociaux n’ont besoin qued’un accompagnement administratif et non pas d’unaccompagnement social au sens traditionnel. Enfin,on peut relever qu’un département sur deux a misen place un lieu d’accueil commun avec la CAF leplus souvent, mais aussi la CPAM et la ville ou sonCCAS.Une observation encore trop peu stratégiqueLa territorialisation et la transversalité n’ont de sensque si elles permettent et s’appuient sur une bonneconnaissance des besoins sociaux. C’est pourquoi quela nécessité de l’observation est aujourd’hui fortementressentie dans le monde de l’action sociale, mêmesi les obligations liées aux dispositifs de schémas etles procédures contractuelles y ont probablement contribué.C’est une évolution positive, et ce d’autantplus que dans la dernière génération des schémas l’analyseporte de plus en plus sur les besoins (et non passeulement sur l’activité, l’offre de services) entraînantune évolution des réponses dans le sens de la prévention.Cependant, dans les départements cette observationreste encore souvent trop sectorielle (liée auxschémas) et surtout insuffisamment partagée, notammentavec les villes, ce qui limite les possibilités departenariat stratégique. Or c’est bien l’un des enjeuxmajeurs de l’observation que de permettre la constructiond’un partenariat de conviction.7


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCES2. LES VILLES ET LE DSLDu côté des villes, les atouts sont importants. Tout d’abord,probablement parcequ’il est au quotidien au plusprès des citoyens, le Maire est une figure politiquereconnue: 7 français sur 10 ont de lui une opinion positive.En outre, le Maire dispose de nombreux leviersde la « prévention primaire » (c’est-à-dire de la préventionportant sur l’environnement des personnes) àtravers les politiques culturelles, sportives, d’éducation…C’est à partir de ces hypothèses que nous avonslancé récemmentune enquête intitulée « Les Maires etle vivre-ensemble », dont nous vous présentons les premièrestendances.Les priorités dans les villesPremière question que nous avons posée, pour appréhenderla vision que les maires se font de la questionsociale « qu’est-ce qui vous paraît aujourd’hui le plusimportant pour le bien-être de vos concitoyens ?».Les réponses ont été, par ordre de priorité décroissante: l’emploi, l’habitat et le cadre de vie, le liensocial, la sécurité, le niveau de vie, les loisirs et letemps libre. Les deux premières réponses sont trèsprégnantes, et sont quasiment toujours classées parmiles 3 premières préoccupations. Le lien social, lasécurité et le niveau de vie sont classés de manièrebeaucoup plus diversifiée, à ceci près que la sécuritén’est jamais classée en 1 re préoccupation. Enfin, ilfaut le noter, la préoccupation « loisirs et temps libre» n’est jamais mieux classée qu’en 5 e position.Seconde question, pour appréhender cette fois lavision que les maires se font des solutions à mettreen œuvre au sein de leur rôle : « qu’est-ce qui vousparaît aujourd’hui le plus important, sur le plan municipal,pour préserver le vivre-ensemble?». Dans unepremière catégorie, on trouve la lutte contre lechômage et l’insertion des jeunes, ce qui confirmela prégnance des problèmes économiques ; dans unedeuxième catégorie, on trouve la lutte contre l’isolement,la participation des habitants et la préventiondes incivilités. Enfin, dans une dernière catégorie,on trouve les relations entre les âges, les relationsentre les cultures, la santé, le soutien à la monoparentalité,qui ne sont que très rarement classés parmiles trois premières priorités.L’organisation interneNous avons cherché ensuite à appréhender quelleétait la contribution (subjective) des différents servicesau vivre-ensemble. Le service action socialeet le CCAS sont les services les plus souvent citéscomme participant fortement au vivre-ensemble. Onobserve toutefois que les services animation, éducationet jeunesse suivent de près, puis viennent lesservices vie associative, centres sociaux, maisons dequartier. Enfin, les services culture et sport sont euxaussi souvent cités parmi les trois premiers servicescontribuant au vivre-ensemble (le service politiquede la ville est également très souvent cité bienqu’il n’existe pas dans toutes les villes).S’agissant de la coordination interne mise en placeentre ces différents services et les différentes délégationsconcernées, si 4 villes sur 10 ont mis en placedes coordinations sur des sujets bien spécifiques(essentiellement sociaux), seule 1 ville sur 10 a misen place une coordination à vocation généralisteimpliquant la présence du maire comme animateurprincipal (observatoire, comité stratégique…).L’autonomie du CCAS apparaît une fois sur deuxcomme un atout pour la performance des politiquemunicipale (les « sociaux » sont ici sur-représentés…)et elle n’est un atout ni un frein pour untiers des répondants.L’enquête a été réalisée auprès des maires des villes de plus de 20000 habitants, avec l’appui de l’AMGVF et de la FMVM.Début juillet 2005, l’exploitation ne portait que sur un quart des réponses, et les résultats présentés ici n’ont vocation qu’à êtredes éléments de débat et ne peuvent pas être considérés comme représentatifs. Le recueil des données se poursuit et les résultatsdéfinitifs seront communiqués début 2006.A noter: les deux tiers des réponses proviennent de « généralistes » (les maires eux-mêmes, directeurs de cabinet ou membresdu cabinet, DGS, directeurs de la communication, DGA, responsables politique de la ville), l’autre tiers provient de «sociaux»(maire-adjoints, responsables de services sociaux).8


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESLa place de l’intercommunalité dans la cohésionsocialeLes 3/4 des villes qui, dans nos répondants, appartiennentà une intercommunalité, s’appuient ou comptents’appuyer sur l’intercommunalité pour renforcer lacohésion sociale dans son acception large. Elles s’appuienttrès fortement sur l’intercommunalité dans ledomaine économique (développement économique,maison de l’emploi), et très largement aussi pour toutesles grandes politiques structurantes d’aménagementdu territoire (habitat, logement, transports-communications,urbanisme). En revanche, les politiquesde proximité (personnes âgées, personnes handicapées,petite enfance, lutte contre la précarité) sont trèspeu déléguées à l’intercommunalité, à l’exeption dusport et de la culture, qui nécessitent souvent la constructiond’équipements importants, et la politiquede la ville qui constitue une compétence obligatoiredes communautes d’agglomérations. Certains interprètentcela comme un simple retard par rapportaux autres domaines, mais cela peut refléter aussi unevolonté des villes de conserver ces prérogatives dansleur giron. Evidemment se pose la question de l’évolutiondes intercommunalités: selon un sondage réaliséen 2000, la moitié des maires et 73 % du grand publicsont favorables à l’élection au suffrage universel directdes conseillers communautaires.Les relations partenarialesEnfin, puisqu’il ne peut guère y avoir de DSL sanspartenariat, nous nous sommes intéressés aux relationsdes villes avec leurs partenaires. Globalementla moitié des villes qualifient les relations avec leurspartenaires Conseil général, Conseil régional, Etat,de « moyennes ou médiocres »,les associations etl’EPCI s’en sortent un peu mieux et les CAF sont lesplus appréciées.Partant de là, pour appréhender l’effet du nouveaucontexte législatif (acte II de la décentralisation, planBorloo, loi sur le handicap…) sur les partenariats,nous avons posé des questions précises dans le domainede l’insertion, de l’autonomie et du logement. Quelque soit le domaine, c’est l’incertitude qui prime.Cependant, on peut relever comme des signes positifsque les villes souhaitent majoritairement êtredavantage associées aux dispositifs partenariaux déjàexistants (CLIC, schémas médico-sociaux…), etmontrent un certain intérêt pour les nouveaux dispositifspartenariaux (maison de l’emploi, maison duhandicap, charte de cohésion sociale…).9


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESMarie-Guite Dufay, Adjointe au mairede Besançon, Vice-Présidente du conseilrégional de Franche-ComtéLa priorité des maires serait l’emploi; bien sûr,mais je ne suis pas sûre que le maire ait tous lesleviers d’action par rapport à l’emploi et la lutte contrele chômage. La politique de l’emploi est une politiquefortement nationale, le maire a la capacité d’attirer surson territoire l’activité économique mais il n’est pastout puissant dans la lutte contre le chômage!En revanche nous avons au niveau d’une ville desleviers pour agir sur le lien social et pour lutter contrel’isolement, qui sont donnés dans l’enquête commedes éléments importants au service du vivre ensemble.On retrouve là le thème du DSL, car la questionest: comment faire de cette lutte contre l’isolementet de cette reconstruction du lien social unequestion centrale, qui ne soit pas traitée que par l’adjointà l’action sociale mais qui soit au centre de toutesles politiques menées par la ville? Si les CCAS etles services sociaux contribuent largement au vivreensemble,d’autres services y participent. Commentfaire pour que la question du vivre ensemble soit partagéepar tous les services alors que l’on est dans descloisonnements et des politiques très peu transversales?C’est tout l’intérêt du DSL. Ce n’est pas un outil deplus et ce n’est surtout pas un supplément d’âme. Dela même manière qu’il n’y a pas de développements’il n’est pas durable, il n’y a pas de traitement de laquestion sociale, pas d’action sociale en profondeursi l’on n’est pas dans une démarche de DSL. Dansle champ social où il y a des obstacles, des contraintes,il faut être créatif: le DSL est l’ouverture du champdes possibles. Il s’agit de miser sur les potentielsdes gens pour favoriser une dynamique, de la part depersonnes en difficulté en premier lieu mais en sachantqu’il faut tout faire pour établir des liens entre elles et10


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESles autres. Et quand on entend ce qui naît de cette dynamiquedes personnes, on est amené à conduire desprojets qui vont nécessiter des bousculements dansnos organisations (transversalité, partenariat) et quidoivent s’inscrire dans une vision globale du territoire.A titre d’exemple, aujourd’hui à Besançon le muséedes beaux-arts s’ouvre à des expositions organiséeset animées par des sans domicile fixe, des personnesde l’atelier pour travailleurs handicapés et quelquespersonnes des foyers-logements. Si l’on remonte lefil de l’histoire, il faut revenir au projet que nous avionsd’extension d’une boutique d’accueil de jour pour lespersonnes sans domicile fixe au cœur d’un quartiermixte. Cela nécessitait évidemment l’adhésion de lapopulation du quartier. On a donc expliqué le pourquoiet le comment du projet via les conseils de quartier,mais on a aussi mobilisé les habitants et commerçantsdu quartier autour d’un événement festif trèsimportant: le 17 octobre, jour du refus de la misère,nous avons pavoisé la ville de tableaux magnifiquesfaits par les habitants et les commerçants au termed’un travail avec une artiste qui s’est installée dans lequartier pendant plusieurs mois. A l’issue de cette journéenous avons prolongé le pavoisement de cetterue sur un jour, une semaine, un mois… puis on nousa demandé de rendre permanent cet atelier où se retrouvaient,pour créer, les gens du quartier, ceux qui vontbien et ceux qui ne vont pas bien. On a donc crééun atelier animé par des travailleurs sociaux (ayantdes compétences artistiques) et cet atelier produit régulièrementdes œuvres exposées ici et là. Donc à partird’une question sociale grave sur le quartier, nousavons travaillé à mobiliser les habitants et petit à petitnous sommes amenés à travailler avec le service culturelde la ville. C’est avec ce type de démarche quel’on peut irriguer petit à petit tous les services, et aujourd’huion travaille avec l’urbanisme, le service économique…Donc le développement social local est véritablementune méthode pour qu’ensemble, les élus,les travailleurs sociaux et les personnes concernées,on soit plus créatifs pour inventer les réponses nécessaireslà où spontanément on a l’impression qu’il n’ya plus de réponses.Je voudrais par ailleurs insister sur l’intérêt de l’analysedes besoins sociaux au regard du développementsocial local. Le CCAS de Besançon, et c’estd’ailleurs une de ses premières fonctions, a mené uneanalyse des besoins sociaux (ABS). J’ai demandé queles résultats de cette analyse soient chaque année présentésen conseil municipal, et nous avons alors undébat en conseil municipal sur les questions sociales.Or dans les grandes villes, le débat sur les questionssociales a rarement lieu dans ce conseil; il a lieu dansles CCAS, qui sont des lieux d’expertise mais deslieux fermés au débat démocratique. Par le biais decette analyse des besoins sociaux, la question socialerevient donc un élément de débat démocratique. C’estdonc un outil intéressant, à condition toutefois qu’ellene soit pas qu’un exercice statistique. A Besançonnous l’enrichissons constamment de la parole des usagers.Dès que l’on pointe une difficulté, on fait un travaild’enquête dont les résultats viennent abonderl’ABS. Par exemple on a mené une enquête avec leFasild auprès des vieux immigrés quand on s’est aperçuque toutes nos actions intergénérationnelles excluaientcomplètement les populations immigrées.Enfin, pour terminer sur l’intercommunalité, il sembleraitque les questions sociales ne devraient pas,selon les maires, être traitées au niveau intercommunal.Besançon est entourée d’une cinquantaine de toutespetites communes rurales, et l’on voit bien que lesmaires sont très réticents à l’idée de perdre ce qui estpour eux un levier extrêmement important (personnesâgées, personnes handicapées, précarité). Mais ilfaut avancer progressivement, la loi nous y autoriseavec la compétence optionnelle en matière d’actionsociale. Il faut faire preuve de pédagogie pour se rendrecompte des besoins et de l’échelle à laquelle onpeut y faire face. Dans cette question comme dans toutesles questions sociales, le grand allié est le département,et il nous conduit à raisonner au niveau intercommunalpour des questions d’équité sur le territoire.Yves Krattinger, Sénateur, Président du Conseilgénéral de Haute-SaôneSur la priorité de l'emploi dans les préoccupations desmaires, il y a un danger aujourd’hui, avec les maisonsde l’emploi notamment, de découper les statistiquesen autant de chiffres que de bassins d’emploi et detransmettre aux élus locaux la responsabilité d’unesituation économique sur laquelle ils n’ont pas beaucoupd’influence… Je ne suis pas sûr que les éluslocaux aient complètement mesuré les conséquencesde ce qu’ils sont en train d’accepter.11


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESPhilippe Rysman, Président de l’ANCCAS,Directeur général adjoint de la ville de TourcoingOn a vu que développement social suppose d’associerles usagers à la construction d’un certainnombre de solutions et d’associer d’autres composantesde l’action municipale (culture, sports…). Mais jepense aussi qu’il faut lire la question sociale dans leprojet global de développement du territoire. Laville de Tourcoing s’est fixé un projet stratégique dedéveloppement reposant à la fois sur un projet urbainet sur un projet de développement social (dit « de servicesà la population et de cohésion sociale »), totalementinclus dans le projet stratégique des élus.Il y a quelques années l’action sociale était le parentpauvre des préoccupations municipales, c’était l’affairedu CCAS. Aujourd’hui il y a vraiment une prisede conscience par les élus municipaux de l’importancede la cohésion sociale, du lien social, pour ledéveloppement même de la ville et cette démarchede DSL devient un enjeu stratégique à égale partieavec le développement urbain, les infrastructures oul’économique, au sein de la ville.Deuxième observation : beaucoup de départementsont jugé utile de territorialiser leur action pour êtreplus proches, déconcentrer et donner davantage d’autonomieaux services dans la mise en œuvre des politiquessociales. J’observe que pour autant, cela nedonne pas une légitimité politique: la légitimité politiquedes projets de développement suppose une présence,une implication politique, et j’ai tendance àpenser que les maires restent, du point de vue du portagedes projets de développement social des territoires,la légitimité politique première.Par ailleurs, s’agissant des collaborations entre villeset départements, en ma qualité de Président d’uneassociation nationale, je constate que les situationssont très diverses. On déplore parfois des positionsun peu hégémoniques de la part des départements,forts de ce que le législateur leur a confié, avec unrôle de chef de file qui est au fond, comme l’a ditRobert Lafore, plus une question qu’une solution…Ad’autres endroits les relations sont positives. A titred’exemple, la ville de Tourcoing et le Conseil généraldu Nord (département un peu atypique avec2,5 millions d’habitants et beaucoup de grandes villes)ont bâti une convention de coopération, très pragmatique,pour donner aux équipes en place sur le terrainles moyens d'une coopération confiante. Il fallaitdonner un cadre clair car les agents de terrainavaient des difficultés à collaborer tant qu’ils n’avaientpas un aval du politique et de l’encadrementtechnique. Aujourd’hui par exemple quand ily a des nouveaux embauchés dans les services dudépartement (agissant sur le territoire de la ville) oude la ville, il y a une partie commune dans les procéduresd’accueil, qui permet de se découvrir et decomprendre ce que chacun fait.Enfin, je voudrais terminer sur une préoccupationforte, celle de la capacité de l’action sociale à produiredu DSL. L’action sociale a beaucoup de difficultésà se dégager de l’approche strictement et uniquementindividuelle des problématiques: les travailleurssociaux font du 1+1 à l’infini, ils se découragent(il y a de quoi!) et ont beaucoup de difficultés à repositionnerles problèmes individuels qu’ils rencontrentdans des problématiques qui peuvent devenircollectives. En ce sens j’ai été très intéressé par lespropos de M. Soumet (comment peut-on à partir desapproches individuelles, produire une capacité decompréhension et d’action de la part des populations?) même si on est souvent face à des populationsextrêmement exclues et que c’est petit à petit,en recréant d’abord la confiance en soi, que l’on peutamener les gens à être en situation de constructiondes solutions qui les concernent et d’interpellationface aux pouvoirs publics locaux.12


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLEUne personne de la salleOn fait du « social » surtout quand on ne sait pasqu’on en fait. Ce qui est intéressant c’est de traiterla question des SDF en l’intégrant dans des dynamiquesculturelles, on pourrait de même traiterune problématique d’ASE en l’intégrant dans uneproblématique de logement ou d’urbanisme. L’enjeuest bien de permettre au travailleur social de sortirdu ghetto du traitement individuel et de créer unedynamique qui permette de sortir de ce piège. C’estpourquoi il serait intéressant, même si la ville ou l’intercommunalitén’a pas compétence en matière sociale,qu’elle vienne signer avec le département un projetsocial de territoire intégrant cette dynamique.Geneviève Metral, Maire-adjointe Cran-Gevrier et Vice-Présidente d’une communautéd’agglomérationLa proximité est une chose importante, en particulierdans les politiques d’action sociale, et elle estdifficile au niveau de l’agglomération. Mais quandla volonté est là, on peut réaliser des choses. Dansnotre communauté, où nous disposons notammentde la compétence personnes âgées pour des raisonshistoriques, les adjoints des 13 communes seréunissent depuis 15 ans dans une instance informelle,« l’entente sociale », pour réfléchir à des développementsd’action.Ghyslaine Pelletier, responsable d’actionsociale CAF de l’EureL’enquête auprès des maires montre que les CAF ontde bonnes relations avec les villes. Depuis 7 ou 8ans, nous avons pris le parti de soutenir les collectivitéslocales, dont le rôle est central, au titre du développementsocial de leur territoire. A partir de l’ensemblede leurs champs de compétence (petite enfance,enfance, habitat, loisirs, animation de la vie sociale),les CAF disposent d’outils contractuels qui donnentdes possibilités de soutien (accompagnement, diagnostic,élaboration des politiques sociales…) et quipermettent un partenariat relativement pérenne carla plupart des contrats sont pluriannuels et renouvelables.Dans le département de l’Eure, à forte inter-13


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCEScommunalité, nous sommes résolument situés sur lesoutien au développement des politiques territoriales.On a travaillé avec les élus, qui n’ont pas toujoursla connaissance ni les moyens mais sont intéresséspar la question sociale, et aujourd’hui on esten contrat avec presque toutes les intercommunalités.Au-delà des aspects d’équipements, d’équipeset de moyens, nous avons mis en évidence le besoinde coordination. Nous avons par exemple permis decréer près de 45 postes de coordination sur le département,avec une fonction de coordination des politiquessociale, enfance, temps libre, animation…C’est une contribution importante à la cohésionsociale, et si les collectivités locales ont un rôle importantà jouer dans l’animation des politiques socialeslocales, c’est de poser la responsabilité des organismespublics pour voir comment nous pouvons tousensemble donner des moyens au territoire pour sedévelopper dans la durée.Maria Guidicelli, élue à l’assemblée de Corse etVice-Présidente de l’agglomération du paysajaccienOn peut difficilement dire que l’action sociale produitdu DSL. L’action sociale relève d’une actionpréventive et palliative, alors que le DSL relève plusd’une action anticipatrice et innovatrice. Les deuxnotions se complètent mais je ne crois pas que l’unegénère l’autre. Par contre le fait d’amorcer une démarchede DSL pourrait tendre à long terme à ce que lesinterventions sociales s’amenuisent puisque lepropre du DSL est de proposer un mieux être.Néanmoins, c’est une démarche très complexe carelle se situe à la jonction de deux logiques: la logiquedescendante (dispositifs nationaux) et la logiqueascendante qui émane des acteurs de terrain. Ceuxlàdoivent faire preuve d’innovation et sont parfoisconduits à anticiper sur des dispositifs qu’ils neconnaissent pas, parce qu’ils répondent à un momentdonné à une réalité de terrain; ils peuvent effectivementensuite utiliser les dispositifs nationaux pourconcrétiser la réponse qu’ils ont construite, mais ilfaut bien rappeler que cette réponse s’est construitedans le temps. Cette notion de temps est essentielle,des projets peuvent démarrer modestement etse développer petit à petit. En tant qu’assistantesociale MSA j’ai observé que les programmes d’actionont lieu depuis plusieurs années, alors qu’on neparlait pas autant de la notion de territoire, et ont pus’intégrer ensuite dans des dispositifs beaucoup pluslarges. Enfin une autre difficulté pour le développementsocial, c’est qu’ayant partie liée avec l’aménagementdu territoire, le développement économiqueetc. il implique de se situer à différentes strates, avecle rôle d’aménageur des régions, le rôle social desdépartements, et le rôle des EPCI qui, quand ils sedotent d’un projet d’agglomération, peuvent à partirdes bassins de vie créer des partenariats intéressants.Didier Lesueur, secrétaire général de la directiongénérale adjointe de la solidarité auConseil général de Seine et MarneSur la question de l’implication des services sociauxdans le DSL, il est vrai qu’ils ont des difficultés à sedégager de l’approche individuelle mais on les«englue» dans cette logique individuelle ! En outrela législation ne cesse d’en rajouter dans cette logiquelà.Qu’il s’agisse des procédures de surendettement,de faillite civile, d’impayés d’énergie où l'on a puentendre qu’on allait demander aux services sociauxde faire une enquête… Or le DSL est probablementun changement de posture complet des servicessociaux, pour passer d’une logique que l’on peut qualifierde « demande-réponse » à une logique de questionà l’usager : « que pourriez-vous faire pour sortirde ces difficultés ? ».14


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDeuxième partie de la conférenceLES PROPOSITIONS : COMMENTFAVORISER LE DEVELOPPEMENTSOCIAL LOCAL ?Il s’agit maintenant de dépasser le diagnostic etle consensus mou sur la nécessité de requalifierla réponse sociale en mettant à l’épreuve des propositionssur les trois niveaux d’implication indispensablesdans une perspective de DSL : les habitants,les professionnels et les institutions.I. LA MOBILISATION DES HABITANTS :VERS UNE SOLIDARITÉ D’IMPLICATIONHervé Carré, Maire-adjoint d’AngersPrésentation des propositionsl Revitaliser les solidarités de proximitéIl y a aujourd’hui urgence, pour faire face à cettecrise des solidarités qui nous frappe, à faire en sorteque les habitants recréent du lien. Alors que nos dispositifssont plutôt dans une logique de captation et destigmatisation, l’enjeu est de construire une sociétéplus ouverte, plus fluide. C’est tout l’intérêt des pratiquesnouvelles, comme les pratiques intergénérationnelles,qui ne partent pas d’un partage des difficultés.Aujourd’hui ces initiatives restent des anecdotes.Ces anecdotes sont pédagogiques, emblématiques,mais est-ce que nous ne pouvons pas, sur la questiondu partage des cultures et du partage des générations,créer de vraies ambitions qui dépassent largement laterritorialisation segmentée et désignée par les quartiersen difficulté? Pourquoi ne pas faire en sorte quedans toutes les écoles, on crée un club intergénération,que dans toutes les bibliothèques on se pose laquestion d’aller vers ceux qui ont une faible mobilité? Que dans tous les restaurants on ait des lieux15


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESadaptés? On peut se demander plus généralement cequ’une ville ou un département peut faire pour construireune société moins indifférente…- Construire une nouvelle architecturedu bénévolatL’essoufflement du bénévolat est connu: on parle de12 millions de bénévoles mais en même temps onconstate un reflux de l’engagement. Les règles administrativeset de comptabilité difficiles déportent l’engagementcitoyen vers la préoccupation administrative.Face à ces constats, comment, dans les servicesmunicipaux mais aussi dans les départements, sepose-t-on la question de la promotion du bénévolat,de l’outillage du bénévolat et du rapprochementde « l’offre et de la demande de bénévoles » ? Commentveiller à ce que l’engagement bénévole ne reposepas simplement sur le cœur ou la générosité? Il fautaider les bénévoles à donner du sens à leur engagementsi on veut qu’il dure, il faut leur dire combienils sont importants, les soutenir, les orienter etles former. Il faut mobiliser les services publics etnotamment municipaux pour qu’ils participent aurepérage des besoins et des bénévoles potentiels. Dece point de vue les collectivités et en particulierles villes, en coopération avec les maisons des associations,les centres d’aide à la vie associative, lescentres sociaux, peuvent avoir un rôle central dansun type de bénévolat plus stable, qui contribue à l’intérêtgénéral : un bénévolat allié des politiquespubliques, les aiguillant et qui réussit dans la duréeson dialogue avec les institutions.- Associer réellement les habitants à la décisionpublique et à la gestion des services publicsComment faire pour que les habitants soient mieuxassociés à la décision publique et contribuent à lagestion des services publics ? C’est la partie laplus délicate. Le législateur a certainement eu unebonne idée en voulant nous donner, avec la loi 2002-2, des moyens d’instrumenter des instances de dialogueparticipatif. N’est-il pas temps de faire unbilan ? Quand on organise des démarches de dialogueavec les habitants, doit-on créer des usines à gaz,des dispositifs très réglementés? Pouvons-nous envisagerd’instiller dans nos pratiques quotidiennes,dans la pratique des services publics, dans la pratiqued’analyse des besoins sociaux et de définitiondes actions, un dialogue participatif plus doux,moins dans l’injonction de la démocratie participative,mais avec l’ambition plus modeste d’améliorerl’efficacité de la réponse publique ?Marie-Jeanne Fay-Bocognani, Adjointeau Maire de Marseille, déléguée à la solidarité et àl’intégrationNotre société traverse deux types de fractures: une fracture sociale et une fracture desociété, qui se traduit par une évolution en parallèlede personnes et de groupes qui vivent dansune même cité, dans un même lieu, mais qui ne serencontrent jamais. Ici à Marseille, malgré notre cultureméditerranéenne, nous avons pu constater quele lien intergénérationnel et inter-culturel est distendu.On l’a vu comme tout le monde avec la canicule,même si Marseille a moins souffert pour plusieursraisons: c’est bien sûr l’habitude du climat mais c’estaussi parce que nous avons un autre regard sur l’autreet parce que nous avons une configuration urbanistiqueparticulière à partir de laquelle on a créé desliens intergénérationnels (ruelles très concentrées,beaucoup de quartiers caractérisés par une mixitésociale et d’âge, avec des personnes âgées qui viventdepuis leur naissance dans des maisons entourées degrandes cités). Dans un premier temps les associations,encouragées par la Ville et le Conseil général,ont commencé à rapprocher autour du domaine scolairedes enfants, des jeunes, des retraités, des personnesâgées, pour recréer la cellule familiale. Dansun second temps elles se sont attachées à construiredes liens avec les primo-arrivants.Les institutions ne sont pas en reste. Depuis 10 ansnous menons une politique d’écoute et d’accompagnementde la population, dans un projet communappuyé sur les services avec une certaine pérennité.La ville de Marseille est divisée en secteurs, cequi permet aux élus de secteur de bien connaître leurpérimètre et à partir de là d’organiser de vraies politiquesintergénérationnelles et interculturelles avecles élus thématiques concernés. On a pu organiserpar exemple des rencontres interculturelles et intergénérationnellesoù des personnes venant d’ailleursexpliquent d’où elles viennent et comment elles vivent.16


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESIl reste que Marseille est une ville particulière. Ici lephénomène villageois, les gens qui vivent dehors,qui se parlent de fenêtre à fenêtre, qui s’échangentdes recettes, ce ne sont pas des images d’Epinal, c’estla réalité des faits. Pour nous c’est essentiel, on vitdehors et on aime parler, même s’il est vrai que certainesévolutions ont pour une part tué l’intergénérationet l’interculturalité (habitat insalubre, grandesbarres…).Gérard Sanvicens, Délégué général de laFédération nationale des centres sociauxLes centres sociaux sont engagés dans le DSL,à côté de l’éducation populaire et de l’économiesociale et solidaire. Il faut croire qu’on peut changerle monde en agissant au quotidien, modestement,mais en même temps il faut monter en politique :les travailleurs sociaux, les associations etc. doiventavoir et porter une vision plus large des enjeux de laCité. De ce point de vue la formation des acteurs estune question fondamentale du DSL, et au-delà, lespropositions de l’Odas sont excellentes.Pour que les habitants trouvent des espaces de participation,il faut modifier les logiques: fait-on de lagestion de services ou du projet ? Aujourd’hui on«mouline» le développement de services (pas forcémentsolvabilisés et que l’on a du mal à financer),on demande aux associations d’être prestataires deservices et on fait de la gestion de marchés. A l’inverse,dans la logique d'un espace de projet, les gensviennent pour monter leur action. Par exemple, lagarde d’enfants et la coopération entre parents, professionnelset bénévoles ce n’est pas le même sujet.On s’aperçoit que ces collaborations entre les différentstypes d’acteurs sont paralysées par les cadressécuritaires de l’ensemble des activités: aujourd’huiun bénévole ne devrait pas s’approcher de moins de20 mètres d’un enfant ! Pourtant le soir, quand lesservices sont fermés, qui va permettre que les familless’arrangent entre elles s’il n’y a pas eu cette relationentre les multiples acteurs? Et c’est un projet communqui va permettre de résoudre cela, ce n’estpas la gestion d’un service avec ses horaires et sontarif! Il faut donc favoriser l’auto-organisation et laprise d’initiative des personnes pour régler la plupartdes questions qui les concernent au quotidien.C’est la raison pour laquelle il faut maintenir la reconnaissanceet le financement de l’animation globaledans les centres sociaux afin de garder une capacitéd’accompagnement des initiatives. D’où la nécessitéde reposer la question de la forme de la République.La France a choisi un modèle étatique, aujourd’-hui il faut reconnaître l’organisation propre de lasociété civile comme mode de République active.On ne peut pas avoir un îlot de DSL au milieu d’unocéan d’institutions anciennes et crispées sur leurmodèle!Enfin pour terminer je parlerai non pas d’une solidaritéd’implication mais d’une solidarité d’engagement.Si l’on parle d’engagement cela signifie qu’onne peut pas faire participer les gens à ce qu’on adécidé pour eux. La participation c’est le droit à l’initiativeautonome, et même s’il y a des régulationsà maintenir, il faut accélérer et accentuer la reconnaissancede cette capacité d’initiative. La participationest civile et politique ; ce n’est pas qu’uneinjonction à contribuer à des conseils consultatifs,le gadget ne se vend plus. C’est un grand défi pourles élus et les réseaux associatifs.Qu’es- ce qui fait obstacle à cela? La normalisationadministrative et juridique; le dirigisme étatique quel’on retrouve parfois au niveau local, alors qu’un seulpilotage ne peut gérer l’ensemble des problématiques;la techno-gestion de certains professionnels du mondeassociatif qui se veulent des chefs d’entreprises…17


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESalors que le travail entre bénévoles-habitants et professionnelsengagés dans le même projet est trèsfécond. On pourrait prendre des initiatives en termesd’accompagnement des parcours, d’imaginationautour de l’emploi. Il y a des ressources considérablesdans l’initiative associative pour offrir dansles territoires une richesse fondée sur l’humain etpas seulement sur la couche économique marchande,qui de toutes façons ne produit plus les élémentsnécessaires à la sécurité collective.Hervé Carré, Maire-adjoint d’AngersJe voudrais apporter le témoignage de la ville d’Angers,engagée dans une aventure très étonnante de dialogueavec les usagers de notre CCAS. La question estde savoir comment établir de vrais partenariats avecles habitants et notamment les plus fragiles. Mais laparticipation est un concept compliqué car c’est à lafois une finalité et une méthode. Une finalité, car inciterà la participation c’est au fond produire du sens,nourrir le sentiment d’appartenance à la cité et contribuerà son devenir. Une méthode, qui tend à reconnaîtrel’influence des habitants dans l’élaborationd’une réponse et permet d’atteindre des objectifs précis.Ce chemin de la participation est difficile car on doitse faufiler entre deux excès : le premier, c’est d’offrirune sorte d’exutoire, de capacité d’expression dela douleur des gens sans rien derrière hormis de ladésillusion. De l’autre côté c’est la tentation de lamanipulation, de suggérer les réponses, de mobiliserl’expertise professionnelle pour orienter le chemin.La participation est difficile aussi pour deux autresraisons: d’abord c’est un long périple, difficilementcompatible avec le temps électoral mais aussi avecl’aspiration au changement dans la vie quotidiennedes gens. Pourtant c’est passionnant d’envisager quece dialogue est aussi un instrument de formation réciproqueet de transformation. Indiscutablement le diagnosticpartagé avec les habitants est un vrai facteurde reconnaissance de la situation qu’ils vivent. Ensuitec’est aussi, pour nos collectivités, l’introduction d’uneculture de l’inattendu. Or quand on est dans l’actionpublique, on a besoin d’apporter des réponses tangiblesaux gens et on chasse tout ce qui est inattendu.La participation c’est l’idée au contraire que l’inattendupeut être une source d’enrichissement et d’améliorationde la réponse publique. Enfin, troisièmeidée : on ne peut pas postuler ce dialogue si l’on nepartage pas quelques concepts simples: altérité, différence,intérêt général, lutte contre l’urgence et l’immédiat...Pour ne pas rester sur ces considérations généraleset généreuses, il faut dire aussi que la participationproduit des résultats: à Angers on avait dégagé avecles usagers du CCAS huit chantiers prioritaires ; endeux ans et demi il y a eu quatre réalisations, notammentl’installation d’un prêt à faible taux d’intérêt,la mise en place d’un journal destiné aux usagers duCCAS pour lutter contre l’isolement et faciliterl’échange de savoir-faire, des actions de formationpour qu'une culture du projet puisse outiller les démarchesdes personnes, et enfin on est en train de réaliserun guide du bien être… Autant d’actions qui ontapporté des choses dans la vie quotidienne des gens.Enfin, on ne peut pas dire que la participation laisseraintacte la pratique politique et des services publics.La participation métamorphose la posture du politiquecar l'élu doit se départir de son champ de compétence,regarder l’habitant dans sa complexité etchasser la tentation qui le séduit parfois d’être le providentiel,celui qui a les réponses ; il doit coopéreravec ses collègues, avec les autres institutions, admettreque c’est avec des réponses complexes qu’onrépond à des problèmes complexes. La participationa un impact aussi pour les services publics: elle montreque d’autres priorités sont possibles. Par exempleà Angers, on a débattu pendant 3 ans sur l’opportunitéd’un formulaire unique pour le demandeurd’aide sociale; on était satisfaits mais une questionnous avait échappé: le temps d’attente entre la demandeet la réponse. C’est quand on a dialogué avec les gensque l’on a débusqué que le problème pour les gensn’était pas de répondre plusieurs fois mais d’avoirune réponse rapide et efficace!Je plaide donc pour que, à côté de la mobilisationpour la reconstruction du lien social, à côté de l’attentevis-à-vis d’un secteur associatif qui doit se renforcer,nous instaurions un véritable dialogue avecles habitants et avec ceux qui sont les plus démunisde notre société.18


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLEUne personne dans la salleLes centres sociaux sont vraiment le lieu où le liensocial se crée, où tous les gens peuvent se rencontrerquelle que soit leur catégorie sociale, leur origineculturelle, mais ils n’ont pas encore toute leur placedans le développement local, les élus n’ont pas encorecompris cet outil merveilleux. Par ailleurs sur la participation,il n’y a pas une méthode spécifique, cesont des micro-actions qui font que les gens vontcommencer à participer, à se sentir acteurs de leurterritoire. Et tant que dans le cadre de nos partenariatsentre institutions on ne définira pas nos territoiresd’action avec la population, on aura du malà faire participer les habitants et les rendre acteursde cette vie sociale.Akintola Sauahibou, Directeur du CCAS de<strong>Mo</strong>ntevilliers, Seine-MaritimeJe partage ce qui a été dit mais je pense qu’il ne fautpas brutaliser ce qui se fait déjà sur le terrain. Il fautinsister sur la notion d’évaluation, évaluation dece qui se fait avant de faire autre chose, et ce notammentsur la participation des habitants, sur le rôle descentres sociaux… Il y a nécessité d’évaluer avant detout changer et de proposer une grande dynamique,il faut voir comment réadapter certaines réussitesdans d’autres territoires.Michel Genty, Chargé de mission DSL auConseil général du Pas-de-CalaisJe voudrais revenir sur l’opposition entre DSL etintervention sociale traditionnelle et faire un lienavec la question de la difficulté pour les travailleurssociaux de participer au DSL dans la mesure où toutleur temps serait mangé par l’intervention traditionnelle.Dans le Pas-de-Calais, nous avons réalisé untravail notamment avec des centres sociaux, l’ÉducationNationale, certaines agglomérations et certainescommunes. Les travailleurs sociaux ont acceptéde sortir de cette trappe de l’individuel pour participerà une démarche avec des partenaires et en ontretiré un véritable intérêt. A travers un travail de diagnosticlong, les travailleurs sociaux des différentesinstitutions et les autres acteurs ont appris à se connaîtreet à développer des coopérations. Il ne s’agit pasde soustraire le temps du développement du temps19


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESde l’intervention, mais il y a une retombée très intéressante(que l’on souhaiterait évaluer) en termes deprotection, d’aide sociale à l’enfance ou d’insertion.On mesure l’aberration qu’il y avait à multiplier lesinterventions sociales et éducatives ponctuelles dansles différentes familles alors que, en s’appuyant surdes réseaux, en faisant confiance à ce qui se passedans un quartier, en permettant aux personnes de seretrouver dans une vie locale, on arrive tout à faità servir la mission d’un département dans les domainestraditionnels de l’ASE par exemple. On est enphase de recherche mais je souhaitais souligner queles choses ne sont pas opposées.Marie-Guite Dufay, Adjointe au maire deBesançon, Première Vice-Présidente du conseilrégional de Franche-ComtéIl ne faut surtout pas opposer une intervention socialetraditionnelle et une intervention dite de DSL. Uneaction sociale qui ne repose pas sur une méthode deDSL n’a pas de chance d’être une vraie action enprofondeur qui amène à une transformation des personnes,des organisations et du territoire! Par exempleà Besançon nous avons un projet de création d’uncafé-brasserie dans le cœur d’un quartier en zonesensible, qui sera sûrement porté par une entreprised’insertion. C’est le résultat d’un travail surl’aide alimentaire et du travail des travailleurs sociauxauprès des personnes en très grande précarité: parceque l’on a écouté les personnes, des actions sesont montées autour de repas puis d’autres initiativesde rencontres se sont mises en place. Aujourd’huides femmes qui avaient l’habitude de faire la cuisineen arrivent à un projet de constitution d’une brasserie.On a convaincu le maire de racheter un local, cequi ne va pas sans difficultés administratives et juridiquesmais on est vraiment, à partir d’une actionsociale concernant des personnes en difficulté, dansune démarche de transformation, de DSL.Une personne dans la salle, CCAS de MarseilleJe suis d’accord pour une démarche associant lesbénévoles et visant à situer le citoyen dans une démarchede réappropriation de ses actions, mais nous sommesun peu à contre-culture des politiques actuelles.Aujourd’hui la préoccupation majeure est l’emploi,l’insertion, la qualification de personnels et la professionnalisationautour de ces pratiques du lien social(plan Borloo). Donc comment réconcilier ces deuxlogiques, du bénévolat et de l’insertion professionnellevia les pratiques du lien social autour despersonnes âgées notamment?Christine Brusque, Responsable decirconscription au Conseil général du GardJe retiens la notion de « culture de l’inattendu », quise heurte de plus en plus aux notions d’organisation,de culture de gestion, de tableaux de bord, de moyensconstants, de nombre de personnes reçues… Le DSLdoit offrir un espace d’inattendu, de créativité, pourles usagers mais aussi pour toute la population, caril ne doit pas y avoir d’injonction particulière vis-avis des plus fragiles. Par ailleurs je rejoins M. Sanvicenssur la dimension politique de la participation: la participationdes habitants peut aussi amener un contrepouvoir.J’ai l’exemple d’une commune dans laquelleles habitants se sont mobilisé pour construire uneargumentation juridique et technique et montrer quela commune n’était pas dans la légalité en matièred’accueil des gens du voyage. L’enjeu du DSL c’estaussi de travailler un projet de société commun habitants-décideurset les élus ont tout à y gagner.Nathalie Célarié, Directrice du CCAS la villedes Lilas et Présidente d’une association dequartierEn tant que fonctionnaire, on souffre parfois des carcansdes missions qu’on nous impose. Personnellementj’ai compensé ce manque d’innovation au niveauprofessionnel par une action de terrain dans le quartier.Cependant, aujourd’hui dans le cadre de cetteassociation, pour monter un projet il faut contacterde multiples financeurs, faire des dossiers un an àl’avance, tricher sur les budgets prévisionnels… C’estbien là l’une des raisons de la crise du bénévolat.Il faudrait que l’on parvienne à centraliser toutes lesaides financières, sans éviter les évaluations et lescontrôles, afin de simplifier les démarches et faciliterles actions pour que les gens se réapproprientla vie de leur quartier.Jean-François Cerruti, chef de projet politiquede la ville sur un site des Bouches-du -Rhône(inter-réseau DSU)Il y a dix ans, la politique de la ville a institutionnaliséla participation des habitants, faisant suite aux20


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESexpérimentations du développement social des quartiers.En 1994 c’était un des piliers des contrats devilles. Cela a permis de voir que la participation esttransversale, pas seulement dans le social mais aussidans l’urbain, l’éducatif etc. ; que la participationest un combat de tous les jours, qu’elle ne se décrètepas et qu’elle demande une ingénierie (avec une légitimitépolitique évidemment) et que cette ingénieriedoit avoir un rôle de coordination des interventionssur un territoire. Par ailleurs, grâce à la participationdes habitants, on passe du concept d’habitant-usager,pour ne pas dire « client », à la notion d’habitant aucœur du débat social. En ce sens la politique de la villea contribué à faire émerger la «ressource habitant».Alain <strong>Mo</strong>cherat, Directeur de l’action sociale etde la santé à Sénart, Seine-et-MarneConcernant l’opposition bénévoles-professionnels,il ne s’agit pas pour les bénévoles d’avoir l’expertisedes salariés, mais ils doivent quand même sedoter d’outils qui leur permettent de travailler avecun cadre, une méthodologie. C’est la formation, etde ce point de vue les bénévoles ont aussi à se « professionnaliser».Hervé Carré, Maire-adjoint d’AngersPourquoi les services municipaux ne pourraient pasorganiser la mutualisation de la gestion des contraintes,c’est-à-dire faire en sorte qu’il n’y ait pas le parcoursdu combattant pour aller chercher les subventions,pour que la partie juridique et administrativesoit mieux appréhendée ? Quand je dis professionnalisationc’est pour donner des outils. Ce qui tueaujourd’hui ce pays ce sont des fonctionnements dedispositifs extrêmement descendants. Il faut réintroduirel’idée que c’est le territoire qui doit initier lemouvement, apprendre à être beaucoup plus dans laculture de l’émergence des besoins et des solutionspar le bas.Par ailleurs, l’enjeu du développement c’est précisémentde ne pas développer des publics cibles. Aussije précise qu’il y a des membres du comité d’usagerdu CCAS qui sont aussi membres des conseils consultatifsde quartiers, d’ateliers d’urbanisme… et qu’ily a d’autres mobilisations par exemple autour de l’échangeentre les âges, où les gens n’ont pas de difficultésparticulières mais ont envie de se rencontrer.Ce qui est important c’est le respect de l’autre etde son choix. A partir du moment où l’individufait son choix et pousse la porte d’un centre socialou d’une association, il faut aller vers lui et l’écouter.Il vient peut-être demander un logement ouun emploi mais il vient surtout demander un momentd’écoute. Dans chaque individu, et notamment lesindividus isolés, que ce soit une personne âgée, unepersonne SDF ou la personne qui arrive dans uneville et qui n’a plus de repères, il y a une envie d’allerplus loin, c’est notre devoir à tous de l’écouter.Gérard Sanvicens, Délégué général de laFédération nationale des centres sociauxTous les acteurs de terrain présents ici ont su s’adapteraux centaines de dispositifs dont on peut compterles croix dans les cimetières des politiques publiques.Ne peut-on pas utiliser cette capacité d’adaptation àautre chose: à l’adaptation au projet des personnes?Par ailleurs, au lieu de résoudre le conflit permanententre le professionnel et son bénéficiaire, ou entre lebénévole et le salarié, consacrons la coopération entreces acteurs comme le vrai cadre qui va produire desressources. Aujourd’hui on parle de l’accompagnementtout au long de la vie des travailleurs, maiscela ne suffit pas : dans les centres sociaux on travailleà l’accompagnement tout au long de la vied’actif, que l’on soit bénévole ou professionnel dansle champ associatif, c’est un parcours. Il n’y a pasd’issue à la question de l’emploi dans le seul champde l’emploi marchand classique. C’est une époquequi semble révolue. Il faut bien comprendre que dansla vie d’une personne, l’ensemble de son activité vaprendre plusieurs formes : engagement social, travailsalarié classique évidemment mais aussi travaild’intérêt général, non lucratif…Le chantier est considérable et l’on peut s’y engagerà partir du local. Non seulement la mairie peut aiderles associations, mais il faut d’autres leviers : et siles associations se regroupaient pour s’aider ellesmêmes?Il ne faut pas penser que l’ensemble de l’intérêtgénéral relève de la gestion publique.21


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESII. LA MOBILISATION DES PROFESSIONNELS :VERS UNE REFONDATION DU TRAVAIL SOCIALHervé Carré, Maire-adjoint d’Angersprésentation des propositions- Renouveler l’approche individuelleIl est certain que la crise de la société est collective,même si ceux qui sont les plus démunis sont encoreplus malmenés par cette société. Les travailleurssociaux sont aux prises avec des situations atypiquespar rapport à leur formation, et la relation d’aide type« cabinet médical » - je donne rendez-vous et je donnedes réponses - ne convient plus. Il faut changer lamanière d’appréhender la relation individuelle, à traversdes procédures de suivi individuel plus collectives(pluridisciplinarité) mais au-delà, cela nécessiteun changement de regard sur la personne fragilisée.- Donner au travail social une dimension plus stratégiqueL’enjeu pour le travail social aujourd’hui est de parvenirà ce que la connaissance des situations individuellesnourrisse un travail de veille, d’analyse et deproposition pour éclairer les orientations stratégiques.Il nous faut faire en sorte que dans les institutions unvéritable dialogue s’installe. L’analyse des besoinssociaux et les diagnostics partagés sont de fantastiquesleviers, mais il faut aussi mettre en placedes formations pour les travailleurs sociaux et lesencadrants.- Sortir de l’antinomie entre bénévoles et professionnelspour renforcer le service publicBien sûr il y a une tentation de considérer que lebénévolat va se substituer à création de postes et ilfaut élucider cette ambiguïté. Toutes les questionsne peuvent pas se régler par le bénévolat, il faut desintervenants experts. Mais une société digne de cenom ne peut pas se laisser aller à entretenir cette illusionque la solidarité reposerait uniquement sur laforce de frappe professionnalisée. On l’a dit, le devoirde solidarité peut s’inscrire dans la loi, mais la fraternité,c’est vraiment une question de société, decitoyenneté. Et je pense qu’on peut voir entrer dansla même chambre et dans un même espace de dialogueun professionnel tout à fait légitime dans sa contribution,et à ses côtés quelqu’un qui va apporter cepetit plus qui fait que notre société soit plus douce àvivre.Daniel Renaud, Vice-Président de l’Associationnationale des directeurs d’action sanitaire et socialedes conseils généraux et Directeur général adjointdu Conseil généralde l’ArdècheEn tant que manager social je chercherai à définirune nouvelle approche que je pressens et qui peutpeut-être s’apparenter à un nouveau mode opératoire.Nos structures se sont beaucoup engagées depuisune dizaine d’années: on a territorialisé pour se rapprocherdes usagers, on a amélioré notre encadre-22


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESment, à la fois par territoire et par thématique (et c’esttoute la difficulté), on a désectorisé pour accroîtrel’efficacité. Mais aujourd’hui, on se trouve face àtrois grandes réformes qui vont profondément changerle travail social et médico-social.L’APA d’abord, en faisant apparaître le diagnosticavec la participation très importante de la personneet de son entourage, l’élaboration d’un pland’aide et la prescription avec la préoccupation majeurede la mise en œuvre. L’APA a tout de suite percutéles pratiques professionnelles. Elle a fait émerger lanécessité d’un accueil et l’importance du rôle dessecrétaires. Avec l’élaboration du plan d’aide, quidemande de nombreuses compétences (médecin,infirmière, assistante sociale), on a vu émerger unnouveau mode opératoire, avec un groupe techniquepré-décisionnel. Ce qui fait marcher le système cesont des professionnels qui sur un territoire se connaissentet se reconnaissent, se confrontent et permettentd’élaborer à partir de dossiers des référentielsd’action. De nouveaux rapports sont nés de cetteconfrontation et dans les équipes APA l’infirmièren’est plus tout à fait une infirmière, le travailleursocial n’est plus tout à fait travailleur social, c’estun mitigé des deux, chacun ayant bien compris lerôle et les enjeux des autres.La réforme du RMI a elle aussi un impact. La réformede 2003 est en fait une grande réforme, et non passeulement une rénovation d’un dispositif ancien: lefait de donner aux départements la plénitude de l’allocationlui impose de travailler beaucoup plus surla globalité du dispositif. On a vu qu’il fallait travaillersur la qualité de l’accueil pour dès le premierjour bien expliquer à la personne le couple allocation-insertion(c’était la cause du non-résultat del’Etat). On a vu aussi apparaître la nécessité d’undiagnostic avec la personne sur ses capacités. Pournotre part nous offrons à chaque bénéficiaire, dèsson arrivée, un diagnostic de 3 mois, par un travailleursocial du département. L’élaboration du contrat estlà aussi préparée par un groupe technique prédécisionnelqui regroupe les acteurs des différentschamps, de la formation, du médical, de l’emploi…Comme de plus en plus de départements, nous avonsmobilisé des moyens forts (1 équivalent tempsplein pour 100 personnes) et le mode opératoire setransforme avec l’apparition de professionnels del’emploi, de la santé, du logement…Enfin la réforme du handicap qui sera plus complexeavec un élément clé : le projet de vie. Il va falloiraider la personne handicapée à formaliser son projetde vie. Là l’équipe pluridisciplinaire est évoquéedans la loi et il va nous être nécessaire de s’adjoindredes compétences de psychologues, d’ergothérapeutes,de techniciens de l’habitat… Et là aussi onverra la nécessité de groupes techniques pré-décisionnels.Ainsi le métier de travailleur social devient un métierqui englobe un aspect de psychologue, de médical,de formation et d’accompagnement vers l’emploi pourle RMI notamment. J’appelle donc à une rupturedans la formation, pour que demain on ait un métier detravailleur social plus ouvert à toutes ces spécialités. Ilfaut refondre la filière sociale: c’est vraiment le parentpauvre de la fonction publique territoriale, c’est unniveau de cadre B avec une petite émergence d’un niveaude cadre A. Cette filière n’attire pas, il faut lui offrir unavenir. Il y a de bonnes compétences mais les statutsne permettent pas de rémunérer ces cadres. Cette carrièredoit donc être refondue, et pourquoi pas à l’occasionde ces nouveaux modes opératoires, vers une filièremédico-sociale basée sur la catégorie A, car c’est àce niveau que sont les responsabilités pour faire de l’ingénieriesociale.Yves Krattinger, Sénateur, Président du Conseilgénéral de Haute-SaôneTout le monde sera d’accord mais on peut se poser laquestion des financements!Sylvie Teychenné, ConsultanteIl y a trois ans à l’Odas nous avions mené une recherchesur l’adéquation ou l’inadéquation entre la formationinitiale des travailleurs sociaux et les attentesdes collectivités locales pour mener leur projet d’actionsociale, de développement social local. On avaitinterrogé les départements et villes et travaillé avecun groupe de travail réunissant des responsables d’organismesde formation, ministères et dirigeants decollectivités locales.23


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESPremière question: a-t-on besoin du travail social pourfaire du DSL? Ce ne sont pas les seuls professionnelsconcernés par le DSL mais quand le travail social n’estpas impliqué dans les démarches locales des quartierson voit bien les limites, et l’évaluation de la politiquede la ville l’a montré, de la prise en compte de la questionsociale. Donc le travail social a un rôle incontournabledans le DSL.Deuxième question: son profil d’intervention est-iladapté aux projets des collectivités locales? Même siles collectivités locales considèrent que les travailleurssociaux doivent encore mettre en œuvre un accompagnementindividualisé, on en voit bien aussi leslimites en termes à la fois de changement individuelet de renforcement des ressources locales. Onavait donc posé plusieurs questions pour connaîtreles attentes en termes de compétences et connaissances.Les principales attentes des collectivités étaientd’avoir un travail social capable de participer au diagnosticsocial sur un territoire et de construire uneproblématique à partir des constats établis au coursde l’activité professionnelle; de favoriser la mobilisationcitoyenne des populations en difficulté, doncde sortir d’une relation duale derrière un bureau pourtravailler d’autres types de relations; d'impulser, élaborer,piloter des actions collectives ; de savoir sesituer dans les collectivités locales par rapport auxélus, à leur hiérarchie et aux autres professionnelset institutions et de savoir travailler avec eux. En effet,la faiblesse de la culture politique et de la connaissancedu fonctionnement des institutions par lestravailleurs sociaux étaient pointée. Enfin, les collectivitéslocales attendaient aussi des travailleurs sociauxde savoir travailler avec des élus et d’être en capacitéde comprendre les logiques et contraintes des différentesinstitutions et des différents acteurs…En réponse, les organismes de formation insistaientsur le fait que tous ces domaines de compétencesétaient travaillés dans les écoles… mais pas intégrés.Cela a permis de mettre en évidence le problème del’articulation entre l’enseignement et le stage: ces différentesdimensions ne sont guères mises en perspectivesau cours des stages, on est très vite dans la priseen charge individuelle. On peut donc regretter, et l’étudele montrait, la faiblesse de la présence des collectivitéslocales dans les écoles, aussi bien en termesd’orientation des projets des écoles qu’en termes d’articulationentre les formateurs des écoles et les formateursde terrain. Le GNI et l’AFORTS insistent surla spécificité de notre formation et sur l’apport de l’alternance(on est pratiquement les seuls en Europeet dans le monde à avoir des écoles de formation spécifiques)mais on constate que c’est une partie de laformation qui est relativement délaissée, déqualifiée…alors que ce devrait être le lieu de l’appropriation opérationnelledes connaissances et qu’il devrait y avoirdes allers retours bien mieux articulés. Ce problèmene peut pas se travailler d’un côté avec les écoles etde l’autre avec les collectivités locales, il faut uneréflexion commune et aujourd’hui il y a des écoles etdes formateurs en capacité de le faire. Je reviensd’ailleurs du 1er congrès international francophonedes écoles de travailleurs sociaux et j’ai été heureusementsurprise par quelques présentations, par exemplede l’IRTS d’Aquitaine qui a présenté une méthodede préparation des professionnels au diagnostic territorial,avec un programme sur 2 ans de soutien d’activitésur les stages autour de diagnostics, de participationà des conseils municipaux, de rencontres avecdes élus, des habitants, et qui soulignait l’impact dece type de démarche et l’intérêt des professionnels!Pour terminer je voudrais proposer deux pistes. D’abord24


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESinsister sur l’importance de la formation-action pluriinstitutionnelleet pluri-partenariale: le changementdes pratiques dans la durée passe par là, autour de diagnosticset projets concertés. J’ai accompagné uneaction de ce type sur Mantes-la-Jolie, et on constateaujourd’hui un changement au niveau des professionnels,avec la fin du turn-over, le retour des visites àdomicile, le développement du travail partenarial et…du plaisir au travail! Le DSL c’est aussi cela, des professionnelsplus engagés parce qu’ils trouvent un épanouissementdans le portage de projets, le rapprochementavec la population et avec des partenaires. Doncessayons dans les collectivités de donner aux professionnelsla possibilité d’expérimenter, de leverleurs craintes et leurs peurs, de les accompagner versces nouveaux modes d’intervention, d’être créatifs.La deuxième piste, c’est aussi de leur donner la chancede prendre des risques. Un des freins au changementc’est que la fonction publique, c’est le risque zéro, oron ne peut pas monter des projets en ayant tout « bordé». Mais comment fait-on pour faire du DSL avec des35 heures, des pointeuses, des fiches de postes, et desdemandes en 3 exemplaires pour avoir la voiture deservice pour aller à une réunion le soir ? Donc ilfaut vraiment trouver comment, au niveau des organisations,des projets politiques et institutionnels, onmet en place des conditions qui vont favoriser souplesse,adaptation, créativité et prise de risque.Jean-Claude Placiard, Directeur généraladjoint chargé de la solidarité dansle Puy-de-DômeAvec quelques personnes nous avons écrit un ouvragesur le rôle du bénévolat dans l’action sociale, qui permetde donner quelques repères. Aujourd’hui il y a àpeu près 200000 « équivalent temps plein » (à 35 heures)de bénévoles agissant dans le champ du social.Nous avons 17,6 bénévoles pour 1 000 habitants.La moyenne européenne est de 14,4 (aux Pays-Bas ily en a 24,5 et en Autriche 5,1). Il faut donc travailleravec eux ! D’autant plus que le bénévolat, commel’indique le Conseil économique et social, aide àreconstruire des liens sociaux et solidaires et qu’il estune forme supérieure de participation citoyenne. Maissurtout dans le bénévolat il y a l’idée de réciprocité,d’échange et de conscience d’appartenir à un groupefraternel. Quand un bénévole aide une personne âgée,il pense aussi qu’un jour il sera personne âgée et qu’enfin de compte il y aura réciprocité. Enfin il faut le rappeler,le bénévolat contribue à l’existence d’une véritableconsultation et participation des usagers.Sur la question de la relation entre professionnels etbénévoles, la complémentarité est indispensable.Premièrement, les bénévoles ne doivent surtout pasêtre des « équivalent temps plein » pour couvrir lesinsuffisances de personnels sociaux et médico-sociaux.Deuxièmement, les actions des bénévoles et des professionnelssont complémentaires au sens d’unenrichissement mutuel : ce n’est pas un petit plus àrajouter, il y a deux logiques qui se complètent et quis’enrichissent. Troisièmement, et c’est tout l’intérêtpour le DSL, bénévoles et professionnels peuventapporter des approches différentes et complémentairessur un territoire.Si la complémentarité est donc indispensable, commentla construire? Cela passe clairement par une clarificationdes rôles et des compétences de chacun: lesbénévoles ont des compétences tout autant que lesprofessionnels, mais ce ne sont pas les mêmes. Lacomplémentarité nécessite de la confiance et unevolonté d’apprentissage en commun (les réseaux d’échangesréciproques de savoir en sont un exemplesimple et efficace). Enfin, cela oblige à un minimumde méthode et cela engage à évaluer les résultats del’action, se mettre autour de la table et discuter de ceque l’on a fait ensemble.Quelles pistes peut-on proposer pour évoluer ? Ilest indispensable de multiplier, sur un territoire, lesformations communes bénévoles-professionnels (etl’on peut sur ce point négocier avec le CNFPT). Onpeut également développer des groupes de parole etd’échange entre professionnels et bénévoles maisaussi usagers bien sûr. Il faut aussi évaluer ensembleles résultats des actions et écrire sur les actionspour capitaliser les expériences. Enfin il faut accepterle principe de l’innovation partagée. Il n’y a pasque le milieu associatif qui innove! Ce sont les hommeset les femmes, qu’ils soient dans le secteur associatif,public ou privé, qui sont capables d’innovation.Et même s’il y a des contraintes quand on estfonctionnaire on peut prendre des risques!25


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLEPascale Reverdy, chargée du développementdes actions collectives et du développement sociallocal au Conseil général du Val de MarneAvec une formatrice issue du mouvement des réseauxd’échanges de savoir, nous avons mis en place uneformation « travailleurs sociaux-bénévoles: commenttravailler ensemble ? » dans laquelle on travaille lepartage autour des représentations, des champs devaleurs, et où on aborde cette fameuse notion de secretprofessionnel qui parasite parfois les choses. Parailleurs ma fonction me conduit à accompagner lestravailleurs sociaux qui souhaitent monter des actions,de l’étape diagnostic à l’étape évaluation, jusqu’à parfoisl’étape régulation au sein d’action en cours. Celapasse par des formations, des outils pour être plus àl’aise, pour faciliter l’écriture et rassurer les travailleurssociaux dans cette animation qui n’est pas facile pourtout le monde. Elle l’est plus pour les jeunes professionnels.Dans le Val de Marne on a une moyenne de20 à 40 jeunes professionnels et ils sont plus ouverts.Mais je n’oublie pas que les charges de travail fontque c’est difficile de s’y impliquer. Elles ont consciencede l’importance du partenariat mais ellessont parfois tellement engluées qu’elles ne s’aperçoiventplus qu’il y a des partenaires ! Il y a une réelleouverture des travailleurs sociaux mais trop de freins,et ceux qui ont envie de s’engager préfèrent quitterun territoire où tout est bloqué pour aller ailleurs. Il ya des projets intéressants mais ce n’est pas simple d’allerjusqu’au bout, par exemple sur la place des usagersdans un conseil d’administration, tout le monden’est pas encore prêt…Véronique Fayet, Vice-Présidente du Conseilnational des Villes et Adjointe au Maire deBordeauxOn fait encore une distinction entre usagers et bénévoles,il faut en sortir. Les bénévoles au sens du 19 ece sont les gens en bonne santé qui visitent les malades,les riches qui aident les pauvres… Il faut bousculerces catégories, dans la politique de la ville et dans lescentres sociaux, le bénévole c’est l’habitant, le citoyendu quartier, l’usager du service public, c’est une seuleet même personne. Il ne faut pas hésiter, et là il y a del’innovation, à proposer aux gens mêmes qui sont en26


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCEStrès grande difficulté de devenir bénévoles, offreursde dons, de services… On peut proposer cela dans lecadre du contrat RMI par exemple et on va faciliter àterme sa réinsertion professionnelle, on ne l’empêchepas de travailler, on lui redonne sa dignité, on redonnedu sens à sa vie, on lui permet de retrouver de lafraternité, de l’appartenance.Karen Levasseur, animatrice d’un centre socialgéré par la CAF dans le Puy de DômePour moi la difficulté n’est pas dans le travail avec lesbénévoles mais avec les élus. Les assistantes socialesde secteur ont des savoir-faire en travail social collectif,en méthodologie de projet mais elles ne peuventpas toujours les mettre en place. La prise de risquen’est pas facile étant donné l’organisation des collectivitéslocales, les difficultés dans la réactivité, les problèmesde liaison entre les travailleurs sociaux de terrainet la hiérarchie. Des choses intéressantes ontété déclinées avec les bénévoles, il faut aussi voir commentfaire tomber les cloisonnements entre professionnelset élus, peut être par des formations communes.Hervé Carré, Maire-adjoint d’AngersLe DSL c’est précisément le parti pris d’un triangled’acteurs élus, usagers et professionnels et la coformationconcourt à la transformation de tous. Il fautque les élus comprennent qu’il est important de se rapprocherdes travailleurs sociaux non pas simplementpour mieux comprendre le terrain mais aussipour élaborer leur pensée stratégiqueFrancette Batigni, travail collectif, Conseil généralde Corse du SudActuellement, les assistantes sociales passent 90 %de leur temps à constituer des dossiers d’aide financièreet elles n’en sont pas satisfaites, ce n’est pas lemétier qu’elles ont choisi. On voit des injonctions plusthéoriques que pratiques pour faire du travail collectif.En 30 ans, j’ai vu le travail social évoluer: onfaisait beaucoup de travail à domicile, on y a été demoins en moins, on reste dans les bureaux pourfaire des dossiers, des dispositifs financiers, pour payerdes fournisseurs d’énergie et des services… Je suisétonnée du manque de réflexion qu’il y a en Francesur le problème de la fracture sociale et de la pauvreté.Pour régler ce problème on a essentiellement misen place des dispositifs financiers. On en paie actuellementle prix. Sur la question de l’immigration, on apensé que si on trouvait un logement et un travailon pourrait faire du regroupement familial. Et maintenanton n’arrive plus à juguler le problème de la violencedes banlieues et du vivre-ensemble. On a doncfait entrer les professionnels dans des dispositifs etmaintenant on voudrait inverser cette tendance. Onest tous partants pour le DSL mais comment réunirces deux logiques opposées? Quant à la question descloisonnements, il suffirait que dans les mairies, oninvite les travailleurs sociaux dans les autres servicesde la culture, de la politique de la ville.Daniel Renaud, Vice-Président de l’Associationnationale des directeurs d’action sanitaire etsociale des conseils généraux et Directeur généraladjoint du Conseil général de l’ArdècheJe crois que les travailleurs sociaux et médico-sociauxdoivent s’emparer de cette question mais il est vraique les structures peuvent leur donner des moyensfinanciers et décisionnels. J’ai insisté sur les groupestechniques pré-décisionnels car comme vous je penseque faire passer au travail social du temps pourdécider si on donne 100 ou 150 euro c’est sans intérêt.Un cadre, sur un dossier préparé, peut prendrela décision en moins de 2 secondes ; il se tromperacertainement 10 fois sur 100 mais il faut aller vite,c’est ça l’efficace. Le travailleur social, lui, doit êtredans ces groupes techniques, de confrontation entreles différents métiers. Et comme le travail médical, letravail social est rare et cher, il faut donc que les professionnelsacceptent aussi, et ça rejoint la notionde secret professionnel, qu’une partie du travail soitfaite par des secrétaires en amont, pour libérer letravail social pour faire à la fois du traitement individuelmais surtout du travail en groupe.Sylvie Teychenné, ConsultanteLes changements autour du DSL ne pourront pas s’appuyerque sur le changement des travailleurs sociaux,il y a bien des questions d’organisation et de priorités.Il y a nécessité d'un projet politique, institutionnel.Au Val Fourré à Mantes la Jolie, le nombred’intervenants sociaux (au sens large) sur le quartierest phénoménal: la vraie question n’est pas tellementcelle des moyens, c’est celle de l’organisation,de la mutualisation des interventions, du reposition-27


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESnement. Pour cela il faut une volonté politique forte,car les questions de l’image des institutions, de la visibilitéde leur action, est complexe et peut bloquer lepassage vers un autre type de travail social. Par contreon peut parvenir à dégager du temps en interne, mêmesi, comme on est dans une culture où tout le mondeest au même niveau et où tout le monde fait la mêmechose, c’est souvent difficile pour les cadres, en termede management, de soutenir l’initiative de deux outrois professionnels!Jean-Claude Placiard, Directeur général adjointchargé de la solidarité dans le Puy de DômeDans le département du Puy de Dôme, on a récemmentprésenté un portrait social de territoire à l’ensembledes conseillers généraux et élus, qui nous ontensuite remercié de ce travail car on partageait enfinquelque chose ensemble. Cela a permis ensuite deposer autrement la question des moyens humains parrapport à l’activité de cette circonscription et c’estimportant car souvent les travailleurs sociaux demandentd’abord des moyens humains avant de savoir cequ’on va en faire ensemble… Avant il y avait environune assistante sociale pour 5000 habitants, regardezla réalité actuellement en France.Par ailleurs, l’Odas l’a rappelé et les travaux de SergePaugam sont très précis là-dessus, il y a un tiers desusagers qui n’ont besoin que de renseignements administratifset non pas d’une intervention complexe dutravailleur social.Enfin sur la formation, j’ai été formateur et je croisque l’on pourrait proposer que les formateurs soientlimités au maximum à 5 ans de formation dans lesIRTS et qu’après ils retournent sur le terrain!Yves Krattinger, Sénateur, Président du Conseilgénéral de Haute-SaôneMichel Dinet dit parfois que devant la densificationdu versement des allocations, on pourrait imaginerrecentraliser tout cela et continuer à faire du travailsocial « pour de bon », comme vous avez osé ledire et je vous en félicite! C’est peut-être une façonprovocante de poser la question mais vu sous l’angledes conseils généraux, il est vrai qu’on a l’impressionde devenir des distributeurs d’allocations au détrimentdu reste.III. LA MOBILISATION DES INSTITUTIONS :VERS UNE GOUVERNANCE PARTAGÉEHervé Carré, Maire-adjoint d’Angersprésentation des propositions- La définition du pilotageMême si la compétence est reconnue aux conseilsgénéraux en matière sociale, les villes ont, à traversleurs politiques du sport, de la culture, de l’éducatif,des transports etc, des leviers essentiels pour contribuerau renforcement du vivre-ensemble. Elles sontdonc probablement les mieux placées pour animersur leur territoire une politique de développementsocial, dans une logique de partenariat qui doit alorsêtre autre chose qu’un mauvais compromis entreinstitutions. En milieu rural la contribution du Conseilgénéral doit être certainement plus importante, maiscela doit peut-être nous amener à revoir la questionde l’élection tous les 3 ans pour permettre unestabilité.-La construction d’une gouvernance partagéeOn ne peut penser une gouvernance trop pyramidale.Le pilotage peut être initié par le haut (il y a eu unecertaine efficacité des schémas médico-sociaux oudes contrats de ville) mais il doit y avoir une réalitélocale qui structure la gouvernance et qui fasse qu’onassocie toutes les institutions à la définition des prioritéset modes d’action. C’est pourquoi on ne peut pasenvisager un pilotage d’un projet de territoire quine s’adosse à une compréhension partagée de la réalitédu territoire, l’observation étant un instrument de miseen perspective autour d’un partenariat de conviction.Jean-Philippe Chabannaud, Directeurdu CIAS du BlaisoisLe pilotage suppose d’abord que les partenaires soientau fait de leurs responsabilités et dans la notion de«chef de file» il y a file, ce qui suppose partenariat.J’étais enthousiasmé par ce qu’a dit Michel Dinetsur le Conseil général comme agent de DSL sur le territoire.Dans cette logique, il me semble souhaitable,en zone urbaine, d’aller vers des délégations de compétencedes départements vers les villes ou les agglomérations.Nous avons 13 travailleurs sociaux au CIAS28


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESdu Blaisois et nous serions en mesure d’exercer pourle Conseil général des compétences bien ciblées.Car l’intercommunalité ouvre des perspectives. Lamairie de Blois a choisi de positionner l’action socialeau niveau de l’agglomération (on était déjà sur la compétenceoptionnelle) pour être à un niveau pertinentdans le dialogue avec le conseil général. Cela permetde donner une visibilité aux politiques sociales etde mener des actions dans le cadre des autres politiquesstructurantes de l’agglomération (Schéma decohérence territoriale, Plan local d'habitat…), en faisantmieux coïncider les lieux de vie et d’activité.Nous avons supprimé les CCAS sur le Blaisois, cequi n’était pas obligatoire, car il y avait une volontéclaire de mutualiser complètement. Nous avons crééun conseil de développement social qui nous permetde conserver les forces vives des conseils d’administration.Ainsi nous avons pu conserver la proximitéavec les communes rurales tout en allant versdes politiques structurantes et en plaçant l’actionsociale au cœur des débats importants que sont ledéveloppement économique, l’insertion, le transport,l’habitat, le cadre de vie.Le Conseil de développement social se limite pourle moment au périmètre du CIAS: on y travaille surl’évolution de l’hébergement des personnes âgées, lespolitiques d’insertion globale, la politique jeunesse, lelien santé-handicap… Mais nous souhaitons le faireévoluer en partenariat avec la CAF, le Conseil général,les différentes associations qui oeuvrent sur cechamp.Bien sûr en matière d’intercommunalité l’avenir estdans l’élection au suffrage universel direct du conseilde communauté, même si la situation actuelle permetparfois d’éviter des affrontements politiques quine sont pas toujours source de projet dans la définitiondes politiques.Véronique Fayet, Vice-Présidente du Conseilnational des Villes et Adjointe au M aire deBordeauxIl faudrait utiliser votre expérience pour faire comprendreà beaucoup de maires réticents aux CIAS,notamment en milieu rural, qu’ils ne perdent rien nien proximité ni en influence mais gagnent en efficacitédans le cadre d’une gouvernance éclairée.Eric Pélisson, Sous-préfet (chargé de la politiquede la ville), Premier conseiller à la Chambre régionaledes Comptes du Nord-Pas-de-CalaisIl est important aujourd’hui, à l’heure où l’on nouspropose des chartes territoriales de cohésion sociale,de capitaliser les fruits des expériences passées envue du projet global. Je me pose souvent la questiondu sens de notre action publique. J’observe que lapolitique sociale est en recherche de sens, avec unempilement de dispositifs qui tient lieu de réflexionstratégique, le social étant souvent réduit au traitementde la précarité. L’articulation avec les politiquesterritoriales est difficile, mais les politiques territorialeselles mêmes sont en recherche de sens, avecdes chevauchements de compétences et des interventionsnon coordonnées.Quelles leçons peut-on tirer de la politique de laville pour le développement social local? En termesde sens d’abord, on peut se poser la question de la cohérenceet de la stabilité des perspectives. Remettre lesens au cœur de l’action signifierait partir des besoinset non des dispositifs et prendre acte des jeux d’acteurs.S’agissant de la méthode, on peut relever que laCour des Comptes, dans son évaluation de 2002, préciseque les objectifs affichés au plan national concernentessentiellement les moyens mis en œuvre, souventen termes financiers, et cela n’a pas beaucoupchangé. Le lien entre les orientations retenues et le diagnosticest souvent lâche. Les signataires des contratscherchent à être exhaustifs dans la définition des orientationsmais sont laconiques dans la définition desobjectifs eux-mêmes. En terme d’efficacité enfin, mêmes’il est difficile de mesurer un impact dans le champsocial, aujourd’hui on ne manque plus d’observatoiresmais on n’a pas de critères d’évaluation!On peut donc retenir de l’expérience de la politiquede la ville qu’il faut mieux hiérarchiser les prioritésd’action (quand on a 64 priorités dans un contratplus rien n’est prioritaire !), en fonction d’un diagnosticde départ véritablement partagé et en définissantdes résultats à atteindre et des moyens à mettreen œuvre.Quelles leçons peut-on tirer des « Projets sociaux de29


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESterritoires » ? L’expérimentation s’est faite de 2002à 2004 sur 20 sites volontaires en France, la plupart dutemps proposés par les conseils généraux. Les objectifsétaient de décloisonner les logiques institutionnelleset de faire converger les pratiques des professionnelsgrâce à la production d’un diagnostic d'ensembleet à un échange sur les pratiques. Un bilan a été fait enmars 2005. Les réalisations concrètes sont ténues, fragiles,les effets sont surtout organisationnels. Seuls 2sites ont fait émerger les problèmes du territoire en partantd’un diagnostic partagé, seul 1 PST a associé leshabitants et les conseils généraux s’y sont investisen utilisant parfois les projets comme outil de qualificationdes équipes en matière de DSL. En outre on aconstaté des antagonismes et des concurrences entreles institutions, des auto-censures, alors que ce sontdes sites volontaires! Certains sites indiquent avoirmanqué d’un mandat clair venant des élus. Aujourd’huidevant ces résistances, les perspectives concrètesdes PST autour d’une coordination des différentes maîtrisesd’ouvrage semblent limitées. Quant à l’Etat, ils’est avéré être un partenaire discret voire absent carn’ayant plus d’acteurs sociaux sur le terrain il ne s’estpas senti la légitimité pour intervenir.Le plan de cohésion sociale nous offre maintenantla possibilité de construire des chartes de cohésionsociale, dont l’objectif, avec lequel on ne peut qu’êtred’accord, est la mise en cohérence des actions.Ces chartes s’appuient sur des dispositifs et des partenariatspré-existants (PDALPD, PLI, PLH …) etle périmètre n’est pas imposé et peut être modulable.Elles doivent s’appuyer sur plusieurs thématiques:logements, accès au droit, culture, insertion,accès aux soins, accompagnement éducatif… et doiventprévoir l’implication des acteurs locaux, partenairessociaux, associations, monde économique.C’est une réelle avancée par rapport à ce qui sefaisait dans un passé récent. L’Etat a souvent hésitéentre son rôle régalien et un rôle de partenaire quasibanaldes collectivités. Jusqu’à présent l’Etat définissaitseul ses propres priorités pour le territoire.Les contractualisations comme les contrats de planEtat-région listent davantage des objectifs générauxou des opérations qu’ils ne répondent à un diagnostic,et ce sont parfois des partenariats dont l’enjeuprincipal est la bonne consommation des crédits.Il faudra cependant bien tirer les leçons des évaluationsde la politique de la ville et des PST pouréviter le risque de catalogue non hiérarchisé d’actionsoù chaque service de l’Etat aura voulu fairefigurer ses propres priorités; le risque de signer desconventions sans lendemain ; le risque d’un accordmou des partenaires sans réelle implication; le risqued’emboîtement de chartes à tous les niveaux territoriauxmal articulées entre elles… En outre, on peuts’interroger, et c’est la question principale, sur lalégitimité de l’Etat à piloter ce partenariat (comptetenu qu’il n’a plus d’intervenants sociaux sur le terrain).Quoi qu’il en soit le partenariat ne doit pas êtreune injonction à faire, ce qui suppose de travaillerensemble autour d’un projet commun et non autourdu projet de l’Etat seul et de se préoccuper autant dumanagement quotidien que du fond. Le partenariatdoit d’abord susciter la confiance des acteurs (seconnaître et se reconnaître avant de pouvoir toutse dire) et déboucher sur des résultats tangibles rapides(se donner des objectifs mesurables avec des rendez-vousintermédiaires, pour que l’évaluation nesoit plus considérée comme un gros mot!).Véronique Fayet, Vice-Présidente du Conseilnational des Villes et Adjointe au Maire deBordeauxDans la continuité de cet exposé, je m’interroge surle respect du local et sur l’adaptation au local de tousces grands dispositifs. A Bordeaux nous travaillonsdepuis longtemps sur un projet social local, va-t-ilfalloir balayer ce travail pour faire une charte decohésion sociale labellisée, avec le préfet, ou pourrat-ondire que la démarche de Bordeaux qui n’est pasparfaite, est en fait déjà une charte de cohésion socialesur le territoire de la ville?En 1999 la ville de Bordeaux avait écrit un projetsocial, avec l’idée de permettre aux acteurs du social(associations, travailleurs sociaux) et aux habitants devoir qu’il y avait une certaine cohérence politique entredifférentes actions et dispositifs qui paraissaientjuxtaposés. On mettait en avant deux valeurs partagéessimples et piliers de notre action sociale : premièrementc’était l’idée que l’on a affaire non pas àun « cas social » mais à une personne, avec des besoinssociaux mais aussi des besoins de loisirs, de citoyenneté,d’accès à la culture… et deuxième idée que tout30


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESdoit se faire et se fait mieux avec les personnes concernéeset non pour elles. A partir de cela nous avonsmené surtout une action concrète phare : un grouped’usagers au CCAS. Il s’appelle aujourd’hui groupede dialogue citoyen (ce sont eux qui ont voulu ce nom).En 2004 Alain Juppé nous a demandé de réécrirele projet social, pour l’actualiser. C’était l’annéede la Grande Cause Nationale Fraternité et j’ai vu làune opportunité de redonner un nouveau souffle ànotre action. Cette notion de Fraternité a permisde donner un élan, d’élargir la question sociale. J’aiorganisé une réunion des élus de toute la majoritémunicipale, animée par Jean-Louis Sanchez, et ilssont venus pour parler de fraternité, alors qu’ils neseraient pas venus si je les avais invités à parler d’actionsociale! On a parlé de solidarité et de fraternitépendant près d’une journée, et c’était extraordinairecar pour une fois on n’est pas rentrés dans les «recettesde cuisine» on a vraiment parlé des valeurs quel’on partageait. Cette réunion a été le fondement dunouveau projet social. Il y a eu ensuite un débat longavec les associations et les institutions partenairesautour de trois journée en 2004, puis un forum de laFraternité avec le grand public: 3000 bordelais sontpassés pour débattre avec nous de cette questionde la fraternité et de la solidarité alors que nous avionsété, comme la Grande Cause, boycottés par la presse!Aujourd’hui nous sommes dans la phase finale deréécriture du projet qui va sans doute s’appeler « Unpacte de fraternité pour Bordeaux ». Une des innovationsen dehors des diverses pistes de travail, c’estla création d’un Conseil de développement social.En effet les associations nous ont dit ne pas avoirsenti de suivi, d’animation sur la durée pour lepremier projet social. D’où la création d’un Conseilavec 3 collèges : le collège des institutions, avec laville, la CAF qui est très mobilisée, le Conseil générals’il est d’accord et c’est essentiel car cela ne peutpas se faire sans lui, l’Etat évidemment et peutêtre la CRAMA. Le nombre d’institutions est volontairementlimité à 4-5 et c’est la différence avec unecharte de cohésion sociale : on n’a pas la prétentionde tout embrasser. Il y aura également un collègedes associations, qui se coopteront entre ellespour des représentations tournantes, et un collègedes habitants, qui sera composé des habitants déjàmilitants au sein du groupe de dialogue citoyen parcequ’ils sont déjà dans la dynamique de participationà l’élaboration de politiques publiques.Ce Conseil de développement social a vocation à améliorerl’analyse des besoins sociaux pour voir, à partirdes chiffres, ce qu’on peut imaginer comme moyensd’action. Il sera animé de façon continue, avec peutêtre une journée annuelle et une lettre électronique oupapier. Le pilotage pourrait décliner les grandes orientationsen plans d’actions annuels avec précisionssur les moyens, le maître d’œuvre, et la durée. Car unedes qualités du DSL est de savoir se limiter dans letemps, se donner des objectifs et se donner la possibilitéd’arrêter. Souvent dans le champ social on lanceune action qui correspond aux besoins d’une époquemais qui, quinze ans après, essaie de survivre.DEBAT AVEC LA SALLEBéatrice Prieur, responsable de la politique de la villesur l’agglomération brestoiseIl y avait hier une rencontre initiée par le centre deressources PACA sur l’avenir de la politique de laville et sur la manière dont les agglomérations ontpu se saisir des compétences données en 2001 enmatière de politique de la ville et de DSL. Les mêmes31


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESquestions se sont posées qu’ici: question de la gouvernance,de projet, de réalité d’un projet d’agglomération.Il est important de faire le lien entre différentslieux de réflexions.Les agglomérations ne sont pas toutes dans la mêmesituation: certaines se sont saisies de la politique dela ville pour en faire un outil d’aide à l’élaborationd’un projet social sur leur territoire et d’autres ontencore besoin de temps. Cependant, des forces et descompétences se sont développées au fil des annéesdans les agglomérations et les collectivités (on peutregretter que les conseillers généraux soient peu présentsdans le champ de la politique de la ville), c’estlong et il faut continuer. Du côté de la politique dela ville, plus que les politiques sociales, on doit maintenantgagner en maturité au niveau local et entérinerune forme de rupture avec l’Etat, en se disantque « l’on devient adulte ». On doit être capablede construire la gouvernance locale nécessaire à laconduite du projet social sur les villes et les agglomérations.En la matière la position de l’Etat noussemble malgré tout un peu ambiguë, car on est dansune injonction qui recentralise sur un certain nombred’axes et qui représente un risque réel pour lesdynamiques longues qui sont en train de se construirelocalement. Par exemple, quand on fait un appelà projet sur une maison de l’emploi ou une équipede réussite éducative sans faire référence au projetsocial que les collectivités ont commencé à construirelaborieusement, on risque de casser les débutsde gouvernance qui se sont mis en place.Sur l’évaluation, les agglomérations qui ont évoluéen terme de maturité de leur projet social se sonten général appuyées sur des démarches d’évaluationde long terme qui ont aidé au débat et à la réflexion.Ces démarches sont loin d’être évidentes et la politiquede la ville malgré tout est l’une de celles qui ale plus pris le risque de cette évaluation et donc dela critique.Ce qui est important dans la rencontre entre notredébat d’hier et celui d’aujourd’hui c’est qu’on estsur les mêmes enjeux de gouvernance locale. Ons’est posé la même question du Conseil de développementsocial, de l’intérêt de réunir les forces civilesles habitants autour de ce projet. Mais on est aussirevenu sur la force du contrat. La politique de la villea été une politique contractuelle qui a permis de rythmerdans le temps (on se donnait des objectifs à trois,quatre, six ans), ce qui permettait de faire des bilansréguliers et c’est ce qui nous a permis d’évoluer. Lecontrat est le lieu d’une gouvernance qui, au-delà dela connaissance et du partage que peuvent produireles Conseils de développement, est une formed’engagement. Pour construire une réelle gouvernancelocale on a besoin de ce contrat, et l’expériencedes contrats de ville est à réintégrer car contrairementaux contrats d’agglomérations qui sont descontrats financiers, les contrats de ville ont été descontrats pilotés, animés, évalués.Maryse Chaix, responsable de l’animation territorialeet du travail social à la DGASLa démarche des chartes de cohésion sociale a étéun changement complet de posture de l’Etat: il s’agitde respecter les initiatives locales. Le travail quia été fait autour des préconisations a été réalisé parplusieurs administrations (logement, ville, DGAS etautres) pour permettre une mise en cohérence des« troupes de l’Etat » pour servir un projet territorial.L’idée n’a pas été, contrairement à nos habitudes, defaire remonter des projets au niveau national et deles labelliser. Il ne s’agit pas non plus de mettre ensembletous les acteurs. On a cité quelques politiques quipouvaient faire l’objet d’une articulation sur un oudeux piliers du « plan Borloo », à partir d’un diagnosticpartagé et avec une possibilité d’évolutiondans le temps et dans la géographie.Les premières chartes signées ont surtout décliné leplan emploi du plan de cohésion sociale mais on voitapparaître des chartes territoriales avec d’autres prioritéset il me semble que le projet mené par la villede Bordeaux rentre bien dans ce champ. Il s’agitde rendre les choses lisibles, sans contraintes, defaçon évolutive et en se donnant du temps, parce queles partenariats prennent du temps. On doit pouvoirse donner des objectifs chiffrés et dans quelques chartesnous voyons qu’un comité de pilotage et d’évaluationa été mis en place avec l’idée de réévaluerles objectifs, année par année.32


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESCONFERENCE SUR LE SOUTIENA L'AUTONOMIECo-Présidents :Pierre MAILLE, Président du Conseil général du FinistèreRégis DEVOLDERE, Président de l'UNAPEIGrands témoins :Marie-Sophie DESAULLE, Présidente de l’Association des Paralysés de FrancePierre JAMET, Directeur général des services du Conseil général du RhôneBernard ODE, DGS de l'Hérault, Président honoraire de l'AATFDenis PIVETEAU, Directeur de la Caisse Nationale de Solidarité pour l’AutonomieIntervenants :Brigitte CROFF, Professeur associée à l'Université d'Angers, management des services deproximitéDominique FRULEUX, Directrice générale de l'association Arcadia (Roanne)Marie-Annick HELFER, Chef de service handicap-dépendance au Conseil général deMeurthe-et-<strong>Mo</strong>selleSerge KROICHVILI, Directeur du CREAI de Normandie/Association nationale des CREAISolange MOLL, Adjointe au Maire de Marseille, Déléguée aux personnes handicapées et àl'animation du troisième âge33


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESPremière partie de la conférenceLES ENJEUX DU SOUTIEN A L'AUTONOMIEET LE NOUVEAU PAYSAGE INSTITUTIONNELPierre Maille, Président du Conseil général duFinistèreLe souci actuel est de maintenir dans un cadredécentralisé les droits minimums et permettrela construction de solutions locales dans le mêmetemps. En tant que président d'un conseil général,j'estime que la décentralisation a apporté de nombreuxpoints positifs; ses risques tiennent aux ressourcesfinancières; nous ne maîtrisons pas la démographiepas plus que la situation économique; par ailleursapparaît le risque de se transformer en administrationsociale, en organisme de gestion de masse alorsqu'il faut laisser place à la prévention dans nos politiques.Sur la question de l’autonomie je rappellerai qu'ils'agit d'une notion récente pour les politiques publiques;jusqu’ici nous fonctionnions avec des dispositifs préétablisd'allocations. Or l'évolution de la législationtraduit l’évolution du regard porté sur les autres,et la reconnaissance de l’individualisation desprojets. On le voit bien avec l'évolution des mots :"prestation spécifique dépendance", puis "allocationpersonnalisée d'autonomie" et demain "prestation decompensation du handicap".Les départements essaient, comme le Finistère, detraduire sur le territoire départemental ces évolutions: il s'agit ainsi de laisser place à la contractualisationdans le cadre de l’APA. Dans le soutienà l’autonomie l'idée est de faire converger les politiquespersonnes âgées et personnes handicapées,car si les publics restent très différents, des points derapprochement existent. Nous pouvons mutualiserbeaucoup de projets en direction des personnesfragiles ou isolées du fait de leur handicap, commetout ce qui concerne l’aménagement de l’espacepublic, l’accès aux loisirs, aux sports, à la vie sociale…34


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESI. LES DÉFIS DU SOUTIEN À L’AUTONIMIELes besoins sociaux sont de mieux en mieux perçuset identifiés dans le cadre du soutien à l'autonomie.Mais si l'importance de la préservation dulien social est mieux reconnue, il faut lui donner uneimpulsion plus décisive.1. Connaissance des attentes et besoinsAnne Latty, Responsable des Etudes à l'Odaspersonnelle souvent mis à mal dans les moments detransition de vie, de rupture (veuvage, maladie) etplus généralement de vulnérabilité. Elle a des conséquenceslourdes sur l‘autonomie de la personne etsur la qualité de vie.Parmi les indicateurs du champ sanitaire, on noteégalement la surconsommation ou la mauvaise consommationde médicaments par les populations âgées…Tous ces indicateurs sont bien connus et font l'objetde plus en plus d'études. Mais si l'on sait théoriquementrepérer les populations à risque, sait-on agirpour elles ? C'est-à-dire sait-on et veut-on agir surles facteurs de risque eux-mêmes, au niveau localnotamment?La prévention est un enjeu social, une affaire deresponsabilité collective : "Prévenir c’est permettreà tous de vieillir sans cesser d’exister". La préventionconcerne tous les publics, quel que soit l’âge.Cela nous renvoie au rôle des politiques publiques,au rôle de l'environnement social, au rôle de l'ensembledes réseaux formels ou informels d'aide.Serge Kroichvili, Directeur du CREAI deNormandie/Association nationale des CREAID es indicateurs de tous types nous rappellentque nos réponses n’ont de sens que si elles sont enphase avec les besoins réels. Je ne mettrai en exergueque certains d'entre eux, à la fois connus maisinsuffisamment exploités. Tout d'abord les étudesmontrent la réalité de l'isolement relationnel qui augmenteclairement après 70 ans. Notion objective, l'isolementpeut se traduire par un ressenti négatif,la solitude. On sait qu'il y a une plus grande sensibilitédes personnes isolées à la solitude et à l’ennui(c'est le cas notamment des personnes handicapéessans travail et des veufs...)Autre indicateur, moins connu, celui du suicidedes personnes âgées de plus de 60 ans: il représentele tiers des suicides en France et touche surtout leshommes.Le phénomène de la dépression des personnes âgéesest également mal repéré et mal traité; la dépressionest à mettre en lien avec le sentiment de valorisationM on intervention s'appuie sur une étude debesoins des personnes lourdement handicapées vivantà domicile en Basse-Normandie. Elle a été réaliséepar le Creai de Haute-Normandie. Elle avait pourobjet de qualifier les besoins des personnes dans tousles domaines; de repérer les conséquences de la prise35


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESen charge sur l’aidant ; de dégager un échantillonillustratif des situations de handicap.Quels en sont les principaux résultats ?Sur l'environnement social on note que très peu depersonnes sont isolées ; le degré d'isolement est liéà la situation de handicap. Ainsi les personnes handicapéespsychiques ont très peu de relations avecleur environnement. Ressort fortement de l'étude et desinterviews la question du regard porté sur le handicap,comme le montre cette citation d'une personne en situationde handicap: «C’est pas que je le sens, c’est que çadérange. Vous êtes en fauteuil. J’ai voulu aller à G., avecmes parents, mes parents m’aident à faire le transfertvoiture/fauteuil, les gens ils vous regardent et puis ilsvous suivent (du regard)». Ceci nous invite à modifierla représentation sociale du handicap et bien entendu lespratiques.L'analyse de la situation des aidants familiaux montreque le rapport fusionnel entre l’aidant et la personnehandicapée est une réalité très forte. Les aidants sont engrande difficulté pour organiser leur vie. L'acceptationdu handicap par l'aidant est d’autant moins aisée que lavie sociale avant la survenue du handicap était riche, lanouvelle situation entraînant de nombreuses restrictionsdans la vie quotidienne... Les aidants ne veulent pas plusd’aide humaine mais davantage "souffler" ce qui renvoieau nécessaire développement des dispositifsd'accueil temporaire. Ils ont besoin également de plusd’informations et d'être mieux orientés.L'étude a permis de dégager quatre groupes de handicap,du moins aidé au plus aidé. Paradoxalement les personnesles plus aidées par un tiers bénéficient le moinsd’aide sociale…Sur le plan des relations avec les aidants professionnels,les personnes handicapées souhaitent être considéréescomme acteur et auteur et non comme objet de l’intervention.Elles attendent d'abord de l’écoute, du respect,du sourire... de la part de l’ensemble des professionnelsintervenants. Enfin sur leur avenir elles expriment del'inquiétude. Leur souhait est de rester chez elles. Enfinles plus jeunes ont également un souhait de vie affective.2. COMMENT FAVORISER LE MAINTIEN DANS LA VIESOCIALE? LE POINT DE VUE DES GRANDES ASSOCIATIONSMarie-Sophie Desaulle, Présidente de l’Associationdes Paralysés de FranceLe premier sujet est celui de l'accès à la cité ;c'est une exigence qui a des coûts et qu'ilfaut donc programmer. Des initiatives locales montrentque l’on avance concrètement sans coûts excessifs.Je pense par exemple aux crèches avec enfantsvalides et handicapés où se vit l'apprentissage commundes enfants et des familles, où l'on s’apprivoisepeu à peu.Il y a également la question de la connaissance dessituations de handicap; il faut mener localement desopérations de sensibilisation : celle intitulée "Gigala vie", organisée par un département et l'APF aété très porteuse. Elle visait des enseignants, des élèves,des parents et a permis de dédramatiser la différence.Sur l'accès physique il est important d'avoir de bonnesanalyses de la situation et de ne pas exagérer lesdifficultés. D'où la nécessité d'avoir un lieu d’échangesur le plan à mener, d'établir ce qui est prioritaire ounon avec la commune. C'est une invitation à démultiplierles lieux de coordination entre acteurs pourdéfinir par la discussion les programmes concrets ;il n'y a que dans le "décider ensemble" qu'on peutavancer.Les difficultés tiennent au fait qu'on aura toujoursbesoin de réponses spécialisées ; pour éviter l'iso-36


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESlement etc., on aura besoin de réponses individuelles(voir le droit à compensation). Il faut donc travailleravec la personne son projet, dans la finesse.Sur la question de la convergence des politiques personnesâgées/personnes handicapées il nous semblequ'il y a des sujets où cela est possible; ainsi sur lesgrilles d'évaluation du handicap il serait intéressantque le dispositif personnes âgées converge versles dispositifs personnes handicapées car la grilleAGGIR on le sait n'est pas suffisante. Dans tous lescas nous sommes d'accord pour ne pas s’enfermerdans des catégories ou des forfaits.Régis Devoldère, Président de l'UNAPEISur l'accessibilité: elle prend un sens particulier pourle handicap mental; il est possible de développer desmoyens permettant le repérage dans le temps et dansl’espace (comme le pictogramme S3A). Mais pour ladiffusion de ces outils il y a nécessité d'avoir l’aide descollectivités. Cela servira à tous, je pense ici notammentà la question de l'illettrisme. Je note que l'accessibilitéaux loisirs est l'aspect oublié de la loi. Il faut unaccompagnement adapté pour y arriver: des associationsy travaillent mais elles attendent une impulsionforte des pouvoirs publics.Sur l'accueil des enfants et adolescents : une évolutionessentielle est apportée par la loi, celle du droit àla scolarisation. On met en avant les possibilités de l’enfant,et non ses déficiences, la place des parents estreconnue. Toutefois ces évolutions n'auront d'effectivitéque si les textes réglementaires sont à la hauteurdes ambitions. Il nous paraît vital à l'Unapei que lanotion de handicap cognitif ne vienne pas se substituerà celle de notion de handicap mental. L'accueil de ladifférence passe aussi par des campagnes de sensibilisationcomme celle que nous avons faite dans les classesde cours préparatoires sur toute la France.J e mettrai d'abord en exergue le mot accompagnement.Il nous faut abandonner le mot de prise encharge (qui signifie "je fais à ta place") car les personneshandicapées ne sont pas des assistées.Sur l'emploi et le travail, la crainte essentielle porte surle risque de sélection des travailleurs handicapés.Sur la participation des personnes handicapées mentalesà la vie sociale: en tant que parents, nous savonsqu'il est très difficile de ne pas faire à leur place. Or ilfaut apprendre à respecter cette autonomie, et aujourd'huiil existe des associations de personnes handicapéesmentales.Pour finir, je ferai part de mon optimisme: en 2004,la Grande cause nationale portait sur la Fraternité etle corollaire de la fraternité c’est la solidarité nationale.Or le premier conseil de la Caisse nationale de solidaritépour l'autonomie a été très positif; son présidenta en effet mis en avant quatre mots essentiels: l'équité,la proximité, la qualité et la personne.37


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLEChantal Ruby, Directrice du CCAS, ville de CranGevrierL'intégration des enfants handicapés est en effetréelle dans les maternelles mais en revanche à partir ducours préparatoire c'est très difficile.Régis Devoldère, Président de l'UNAPEIPlutôt que d'intégration scolaire parlons de scolarisationqui peut se faire sous différentes formes. Mais ellene pourra se faire à grande échelle en effet que s'il ya une volonté politique de l’éducation nationale.Christine Antigny, Directrice de la vie sociale,ville de SuresnesNous faisons partie d'un département, les Hauts-de-Seine, où il y a eu un fort développement des chartesville-handicap; c'est une démarche qui s'est avérée trèspositive pour découvrir le monde du handicap et apprendreà travailler en réseau. Nous avons dans notreville édité un guide d’information très fourni: les groupesde paroles de personnes handicapées ont en fait desretours positifs. Par ailleurs deux grandes études ontété réalisées, l'une sur l'accessibilité dans les bâtimentspublics avec validation d'une grille par l'APF, l'autresur la voirie avec la participation de bénévoles handicapésafin d'établir les priorités sur les cheminementspiétonniers.Claire Simon, Adjoint au maire de la ville de LaTroncheJe voudrais faire part d'une expérience de classe "sas"gérée par une association (apaje) avec le soutien dela mairie : il s'agit d'apporter une solution pour desparents dont l’enfant handicapé devait rentrer au CP;une salle de classe de l'école primaire a été mise à dispositionavec un accès à la cantine et à la bibliothèque.Les enfants handicapés sont encadrés par un agent àtemps complet de l'éducation nationale ainsi qu’un38


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESemploi aidé et une personne de l’association.Marie-Claude Charbit, Directrice adjointeemploi-insertion au pôle intercommunal OuestprovenceNotre intercommunalité mène une action en directiondes enfants handicapés qui s'appuie sur des auxiliairesde vie scolaire; notre président a intégré commeagents territoriaux ces deux emplois jeunes. Le servicea été développé et actuellement nous avons un serviceavec 21 agents “animatrices insertion handicap” quiaccompagnent trente-cinq enfants en mi-temps. Toutefoisnous estimons faire le travail de l’éducation nationale...Fabien Thiemé, Vice-président du Conseilgénéral du NordDu côté des adultes handicapés notre département acréé 740 places ; le schéma gérontologique prévoit12,39 % du budget en 2005 pour les personnes âgées.Or l’Etat ne joue pas son rôle: il n'y a pas de financementsur la partie soins des places médicalisées (1500places budgétées); en conséquence les gens vont enBelgique pour trouver une place adaptée…Marie-Sophie Desaulle, Présidente del’Association des Paralysés de FranceLe chantier est complexe notamment parce qu’il nepeut s’appuyer que sur des initiatives de proximité, surdes décideurs publics. En même temps on s'aperçoitbien que quand il y a réelle implication on peut changerla donne sur un territoire, et surtout on permetaux personnes de retrouver du lien social; il faut gagnerle défi de la complexité (multiplicité des interlocuteursetc.).II. LENOUVEAU PAYSAGE DU SOUTIEN À L’AU-TONOMIE1. Vers un cinquième risque?La création de la CNSA, la loi du 11 février 2005 surle handicap et ses futurs décrets sont les jalons d'unerévolution discrète dans le paysage de la protectionsociale et du soutien à l'autonomie. Quels sont les enjeuxde cette nouvelle caisse ? Comment réussir l'articulationavec les territoires?Denis Piveteau, Directeur de la CaisseNationale de Solidarité pour l’AutonomieJ e souhaite revenir sur la question de l’articulationavec les territoires car elle est en effet importante.Nous voyons l'émergence du risque de perted’autonomie: c'est une petite révolution dans notreprotection sociale avec un changement de posture,une logique ascendante dans la prise de décision. Onpart en effet des spécificités des situations de handicap,et des besoins locaux comme on le voit notammentavec la prestation de compensation du handicapqui élargit l’approche que l'on a mise en placeavec l’APA. Pour les établissements, c'est la mêmedémarche, avec un programme pluriannuel de financementélaboré dans une logique remontante. Cettelogique a deux conséquences : elle oriente vers undispositif local, et elle fait appel à une grande diversitéd’acteurs donc à la mise en place d'un dispositifpartenarial.L'évaluation du dispositif se fait par la mesure de lasatisfaction des besoins de la personne : on ne peutse contenter d’appliquer un règlement, il faut doncavoir une mesure fine. Avec cette logique de proximitéet cette logique de mesure du résultat, si nousréussissons, on peut même penser que la politiquede soutien à l'autonomie prendra une longueurd’avance sur les autres politiques publiques.39


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESQuel est le rôle de la CNSA dans cette révolution ?- articuler les compétences locales et nationales : ily a place pour une instance nationale d’appui enmatière de méthode, d’outils de travail etc. Elle devraégalement diffuser la compétence du bas vers le haut;garantir que tous les sites de proximité travaillent enréseau; la CNSA sera un des animateurs de l’échanged’expériences ;- articuler initiatives locales et principe d’égalité ;c'est une question ancienne dans la décentralisation.Or la logique de proximité et la logique de résultatpermettent de concilier ces deux principes. Il existeaujourd'hui un cadre dans lequel peuvent s'élaborerdes solutions et des choix de gestion variés.Ce qui compte c’est le résultat. La CNSA assurerala transparence dans la mesure objective de ce résultat.La CNSA va devoir objectiver le débat. La transparencene va pas se traduire par des mises à l’indexou des tableaux d’honneur. L'idée est de faire progresser.L’égalité de traitement n’est pas un but ensoi mais un garde fou. Le but c’est de faire reculerla perte d’autonomie.En conséquence on ne mettra en place la loi qu'avecceux qui vont conduire ces politiques: nous sommesdans une politique de contrat. Pour les établissementscela se traduit par des conventions d’objectifs; avecles départements et les maisons départementales duhandicap seront également passées des conventionsavec des objectifs de qualité.La CNSA est donc bien aussi une agence à mes yeux,comme le souhaitait le rapport Briet-Jamet.2. Le rôle central des départements dans le dispositifLa décentralisation acte II renforce le rôle du départementdans le soutien à l'autonomie. Cette clarificationdoit cependant s'accompagner d'un renforcement de sescapacités de coordination et de financement. Par ailleursles départements devront animer un partenariat riche,dans le respect du GIP Maison du handicap.Pierre Jamet, Directeur général des services duConseil général du Rhôneexprimerai d'abord mon pessimisme : la loi duJ' 11 février 2005 a fait naître beaucoup d’espoirs, ellereprésente un réel progrès, mais on dit trop que le rôlepivot revient au département. En effet ma crainte c'estque l'on mette à la charge du département ce qu’il neveut pas. Dans cette politique on s’est arrêté à mi-chemin,il y a une insuffisante volonté politique au niveaunational et un vrai risque de dilution dans de l'administratif.J'en prendrai une illustration: celle de la circulairesur le handicap lourd qui a mis à jour des aberrations,comme les délais exigés pour faire remonter les données.Il y a eu notification des montants, mais toujourspas d'attribution!On confond la décentralisation de la gestion et de la politique:il appartient à l’Etat de définir la politique du handicapet de procéder à une évaluation. Or on ne sait paschoisir: l’administration d’Etat continue de faire de lagestion, ce qu’elle ne sait plus faire.On va mettre les départements en difficulté avec la sortiedes décrets au dernier moment; ce sera pire que pourl’APA. Nous aurons 40000 dossiers au titre du handicapdans notre département. Il faut donc dire ouvertementqu’il y a un ordre pour les recevoir, que tout lemonde ne pourra être traité en même temps, sinon onva tuer la crédibilité de la réforme.Mais je ferai part aussi de mon optimisme: si les départementssavent saisir l’opportunité donnée par la loi du11 février et celle du 13 août sur la coordination des servicesà domicile, s'ils savent s’imposer comme unvrai chef de file de coordination de tous les acteurs, alorson peut faire évoluer la manière de traiter les besoinsdes personnes handicapées dans tous les domaines. Onva travailler bien mieux sur le logement social, sur la40


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESformation, avec la région notamment.<strong>Mo</strong>n attente c'est que les services de l’Etat ne nous mettentpas en porte-à-faux. Il faut avoir des procéduressimples, courtes et directes en ne rajoutant pas d’intermédiaireentre les départements et la CNSA.Denis Piveteau, Directeur de la CNSALe rôle de l’Etat n’est pas seulement dans la définitiondes politiques ; il y a, c’est certain, un exercicecontractuel difficile, lié à la grande complexité du sujetet des acteurs. Se pose la question des moyens et de l'organisationsur l’accueil et l’évaluation des premiers dossierspour être en phase avec les délais imposés par laloi. Si nécessaire il y aura une évolution réglementaire.Il faut travailler aussi sur la dimension de communicationauprès des associations, dès le deuxième semestre2005.Pierre Jamet, Directeur général des services duConseil général du RhôneJe suis d’accord pour dire que la politique du handicappasse par du contrat, mais je voudrais redire quele contrat ne se fait pas par des circulaires! Les départementsne sont pas les subordonnés du ministère dela cohésion sociale…Bernard Ode, Directeur général des services duConseil général de l'Hérault, Président honoraire del'AATFNous avons un champ énorme à explorer: c'est unepriorité importante pour notre société. Il faut eneffet que les représentants de l’Etat soient conscientsque les élus, les départements sont capables d'agir. A traversles schémas on a négocié, hiérarchisé les priorités,planifié. Mais on ne peut nier qu'il y a un malaisedans les relations entre l'Etat et les départements qui touchenttous les secteurs de l’action sociale.Je suis cependant optimiste aussi: quand on observe cequi s'est fait sur la dépendance des personnes on voità quel point les départements ont fait des efforts (Dansl’Hérault 9 millions d’euros en 2001 pour la PSD, dixfois plus aujourd’hui avec 24000 plans d’aide. En 2002:38 millions d’euros de dépense compensée à 50 %;en 2004: 83 millions de dépense compensée à 29 %).Les droits de mutation apportent une recette dynamiqueimportante pour financer cette politique mais attentionce n'est pas une recette pérenne.Du côté des personnes handicapées: le nombre de dossierva vite monter. L’accompagnement nécessite uneprésence forte et la création d'emplois à temps plein.Comment financer les initiatives locales? Les dépensesde fonctionnement doivent être financées par la fiscalité,pas par l’emprunt; sommes-nous prêts pour faireun effort supplémentaire (CSG)? Ces politiques de soutienà l'autonomie vont contribuer au développement41


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLEdes emplois, entraînant la diminution des déficits publics.Patrick Gohet, Délégué interministérielau handicapJe voudrais rappeler d'abord que nous avons un bel héritageen matière de politique de handicap, que nous nesommes pas partis de rien.La loi du 11 février 2005 essaie d'organiser la solidaritédu corps social face à un risque que l'on pourrait appelerle manque et la perte d'autonomie. Il a fallu entendreles vœux des citoyens concernés et les associationsqui les représentent.Il fallait d'abord résoudre l'équation suivante: équité/proximité.Nous avons un système nouveau qui consiste à constituerun réseau de solidarité régulé par un pilote original(la CNSA), original car il n'est pas hiérarchique.Ce pilote contracte avec le réseau et avec l'élément pharede ce réseau, l'acteur de proximité qui est la maisondépartementale du handicap. En allant assez loin dansla responsabilisation de cet acteur de proximité. La voiedu GIP ne fait pas l'unanimité dans les départements,certes. Le président du conseil général est cependant lepatron de cette affaire; le contrôle qui s'exerce traditionnellementsur le GIP a été adapté. On ne peut parlerde décentralisation radicale; on ne peut dire non plusqu'on a mis en place un cinquième risque, mais cela peuten être l'amorce.La loi dit beaucoup d'autres choses, mais cette équationen est un des points très importants.Je suis venu ici pendant deux jours pour vous écouter,écouter les préoccupations des collectivités. Vous êtestrès sollicités, il n'y a pas que la loi sur le handicap, ettout cela est assez précipité; des réformes ont tardé àêtre faites, mais celle du handicap il était temps en effetde la faire. Nous devons comprendre que vous avez desimpératifs de calendrier. Cela dit il se fait des choses: lerapport du parlementaire M. Paul Blanc repose sur unelarge audition des uns et des autres. La DGAS et la CNSAont pris l'initiative de consulter également les départements.L'assemblée des départements de France y estétroitement associée. Les choses ne seront pas décré-42


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESBernard Gaudiard, Directeur des établissements etprestations aux personnes âgées au Conseil généralde l'HéraultMa première interrogation: à partir du moment où nousconnaissons les modalités de saisine d'un certainnombre d'organismes consultatifs obligatoires, on peuts'étonner des délais très courts pour la date d'applicationde la loi au 1 er janvier 2006. C'est du bon sens. Sinon onmet les collectivités territoriales dans des situations inextricables.Il y a donc un problème de cohérence avecl'Etat. On l'a vu il y a deux ans au sujet du RMI; celapose des problèmes techniques évidents, sans parler desprévisions budgétaires impossibles!Deuxième remarque: on souhaite effectivement avoiravec la CNSA une véritable plate-forme de compétencesqui puisse nous aider. Car aujourd'hui nous avonsbesoin d'aide technique pour la mise en place de textesaussi complets.tées sans concertation: celle ci doit permettre d'être leplus possible en cohérence avec vos échéances, vos budgetsetc. C'est une exigence… Je rappelle cependantqu'il y a 80 décrets à écrire! La loi a été signée par 22ministères; le projet comportait 45 articles, on a fini à101! Cet enrichissement progressif du texte provenaitpour beaucoup de la pression des lobbies: tant mieux,car cela prouve que l'on a abordé tout le spectre de lavie des personnes handicapées. Il faut donc du temps.Il y a des contraintes inévitables.Pour conclure je crois qu'il n'y a pas d'ennemis autourde la question du handicap. Mais il est vrai qu'il faut queles choses se fassent en confiance.Philippe Didier-Courbin, Sous-directeur personneshandicapées à la DGAS, Ministère del’Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement<strong>Mo</strong>n service réunit 30 personnes. 10 personnes sontactuellement sur la rédaction de la quarantaine dedécrets à sortir rapidement, car il faut sortir les textesprimordiaux pour les personnes handicapées.Je précise que la prestation de compensation est devenueun dispositif plus complexe entre le projet de départet l'aboutissement, afin de prendre en compte le besoinindividuel. Il faut inventer de nouveaux référentiels,transformer les outils d'évaluation, mettre en placedes éléments multiples. C'est donc un gros travail complexeà conduire; en principe les décrets sur la prestationde compensation passeront au CNCPH courant septembre.Quelques précisions sur la circulaire relative aux personneslourdement handicapées. L'année 2005 est uneannée de transition: la CNSA draine déjà des financementsqu'il faut bien utiliser. Le choix a donc été fait d'orienterune partie de ces sommes vers le test des instrumentsnouveaux à mettre en place: d'où la réglementationproposée pour le handicap lourd qui a pour objectifde construire un référentiel donné pour une partie dupublic, à tester avec les médecins, les différents intervenantsetc. Les difficultés posées par l'application decette circulaire vont être réglées: on pourra rattraper lessituations où les conventions n'ont pu être passées endonnant directement les moyens à nos directeurs départementauxde le faire. Sachant que ce qui ne pourra passe faire, car cela entraînerait un risque de dérapage (gestionde fait), c'est de confier une délégation de gestionà des partenaires privés.Un modèle de convention élaboré conjointement (départements,DDASS…) est en cours.43


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDeuxième partie de la conférenceLES PROPOSITIONS OPERATIONNELLESDANS LE SOUTIEN A L'AUTONOMIERégis Devoldère, Président de l'UNAPEIpropositions. On ne part pas de rien, des illustrationslocales le montrent. Trois axes d'hypothèses sont proposésau débat.I. LA RATIONALISATION DES RÉPONSESHier nous avons consacré nos débats aux défisdu soutien à l'autonomie et au nouveau paysagede la solidarité dans ce domaine. Pour mapart j'ai ressenti une volonté politique de l'Etat,des départements et des communes pour qu'une nouvellearchitecture se mette en place ; on a noté égalementqu'il faudrait renforcer les liens, les échanges,entre les différents partenaires, notamment entreEtat et départements. Les personnes handicapéeset leurs familles seraient extrêmement déçues que lapolitique se traduise par des luttes ou des incompréhensionsà ce niveau-là.Aujourd'hui nous allons consacrer notre séance auxAnne Latty, Responsable des études à l'OdasLe premier axe porte sur la convergence effectivedes politiques de soutien à l'autonomie en directiondes personnes âgées et personnes handicapées.Il ne s'agit pas de dire que les projets de vie desuns et des autres sont identiques. On parle ici d'optimisationde nos forces sur le terrain, d'optimisationégalement des dépenses publiques.La question aujourd'hui c'est bien la prise en comptedes personnes quels que soient leur âge et leur situationde handicap, et non plus l'établissement de politiquessectorisées pures et dures. Différentes pistessont possibles, déjà bien avancées dans certaines collectivités.Sur l'information du public et la coordinationdes aides (à l'occasion du montage des maisonsdu handicap, des démarches cohérentes etrationnelles devront être proposées dans les départementspour optimiser les ressources), sur l'évaluationdes besoins d'autre part (que peut-on mutualiserpar exemple en terme de grilles d'évaluation ?)et sur l'offre de services (services communs…). Lesouci étant de promouvoir les choix les plus efficaceset de rendre les services plus performants touten respectant les spécificités.44


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESMarie-Annick Helfer, responsable de lapolitique en faveur des personnes âgées et des `personnes handicapées au Conseil général de Meurtheet-<strong>Mo</strong>selleD e l'organisation de ses services à la réponsede proximité sur ces territoires d'action, le Conseilgénéral de Meurthe-et-<strong>Mo</strong>selle a fait le choix du rapprochementde l'ensemble des politiques de soutienà l'autonomie, quel que soit l'âge. Ce choix lui a permisd'anticiper sur les évolutions liées à la mise enœuvre de la loi du 11 février 2005 sur le handicap.Au départ, la démarche de rapprochement découled'un choix purement organisationnel, avec la suppressionde l'aide médicale en 2000 qui obligeait àreconfigurer les services. Depuis cette date, nousavons envisagé le rapprochement des politiques personnesâgées/personnes handicapées, rapprochementqui a été au fil du temps voulu par les élus.Cette politique de rapprochement s'appuie sur uneorganisation départementale et territoriale cohérente,des thèmes de travail communs et une mutualisationdes savoir-faire.Une organisation départementale et territorialecohérenteL'animation des deux politiques est assurée par lemême vice-président et il y a regroupement dans unmême service des actions individuelles et collectivesen faveur des personnes âgées et personnes handicapées.Cette organisation facilite les échangesquotidiens entre professionnels, médecins, chargésde missions etc., et favorise la mise en commun d’informations,de savoir faire et la conception de réponsescommunes.Par ailleurs les élus ont souhaité dès 2000 que lespolitiques soient le plus proches possibles des citoyens,d'où un découpage en 6 territoires où se déclinel'animation des politiques personnes âgées et personneshandicapées.Sur chaque territoire, et aux côtés des CCAS on adonc:- création et développement de réseaux locaux regroupantélus, professionnels, associations, représentantsdes usagers- au centre du réseau, installation d’un Point AccueilInformation Services, interlocuteur de proximité pourles personnes âgées, personnes handicapées et leurfamille mais aussi pour les professionnels.Les personnes ont le réflexe de contacter leur communequi elle même oriente sur, ou s'informe auprèsdu PAIS (Les 6 P.A.I.S. sont labellisés C.L.I.C. personnesâgées/personnes handicapées depuis 2002 -L'activité des PAIS est cependant encore très tournéevers les personnes âgées car l'APA a beaucoupmobilisé leur temps).Par ailleurs se développe un partenariat étroit avecle site pour la vie autonome qui prend en comptetoute situation de handicap, quel que soit l'âge dudemandeur. Lever les limites d'âge apporte en effetun réel intérêt pour l’usager, permet le rapprochementdes acteurs de la gérontologie et du handicapau sein du comité de pilotage et de la commissiondes financeurs et enfin favorise l'homogénéité de l’évaluationdes besoins.Ces rapprochements vont nous aider à mettre en placela maison départementale des personnes handicapées.Des thèmes de travail communsNous pouvons citer quelques-uns de ces thèmes:- La prise en charge des personnes handicapées vieillissantesIl y a eu une mobilisation par le PAIS/CLIC des professionnelsdu handicap et de la gérontologie pourpartager autour de situations individuelles (cf. situa-45


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCEStion d'une personne handicapée qui ne peut plus travailleren CAT), échanger des connaissances, savoirfaire,préoccupations et promouvoir des réponsesinnovantes.- La maltraitance :Il existe un dispositif départemental commun d’accueilet de traitement des signalements concernantles personnes âgées et les personnes handicapéesappelé à coopérer avec ALMA, qui comporte enMeurthe-et-<strong>Mo</strong>selle une antenne personnes âgées etune antenne personnes handicapées.- Autres thèmes de travail communs: les transports,l'adaptation du logement et tout ce qui concerne l'accessibilitéà toutes les politiques publiques (culture,loisirs, sports…) en général; mais aussi les questionsde lutte contre l'isolement qui ne sont bien évidemmentpas portées par le seul conseil général.Une mutualisation des savoir-faireElle se traduit à travers notamment le savoir fairedes équipes médico-sociales de l'APA, comme :‡ une intervention ponctuelle de l’équipe médicosocialeAPA pour évaluer à domicile les besoins d’unepersonne handicapée ; pour cela il faut modifier lagrille Aggir certes, mais ce qui est le plus intéressantc'est l'élaboration du plan d'aide.‡ la prise en charge d'une situation d’une famillecomposée d’un parent dépendant et d’un « enfant» adulte handicapé avec élaboration d’un plan d’aideglobal.L’expérience acquise dans les actions développéesen gérontologie dans le cadre de l'aide aux aidantsnaturels peut être transférée dans le champ du handicap(exemples: groupes de paroles pour les aidantset les professionnels, actions de formation, d’information)En conclusion il ne s'agit pas de transposer à l'identiqueune politique sur l'autre, mais il nous semblequ'il y a un rapprochement à poursuivre et la loi ouvrede réelles perspectives sur cette question.46


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLERégis Devoldère, Président de l'UNAPEIIl est indispensable de créer cette synergie, mais il estindispensable aussi de bien distinguer les projets. Anoter que nous parlons plutôt d'avancée en âge que devieillissement des personnes handicapées mentales.Martine Savry, responsable du service socialdépartemental au Conseil général du GardNous avons avancé sur cette question du rapprochementdes politiques mais pas complètement dansle même sens car nous avons dissocié la fonctionévaluation et diagnostic de la fonction traitement.Le service social fait l'évaluation de la dépendancedes personnes âgées. Depuis 1998 nous avions unpoint d'accueil information handicap qui comporteune équipe ressource. Nous partons du principe qu'ilfaut s'appuyer sur les compétences déjà existantes.Aujourd'hui le service social doit se former à l'accueilde personnes handicapées, avec le souci notammentdes réponses à apporter pour les publics en handicappsychique, en marge de la psychiatrisation.Il faut faire appel à ce sujet à du réseau qui devra êtretrès spécialisé.Régis Devoldère, Président de l'UNAPEILe handicap psychique fait partie de la loi ; mais ily a clairement un problème de définition aujourd'-hui sur ce point et c'est une des grandes difficultés.Arlette Chouzenoux, Directrice de la solidarité etde la prévention au Conseil général de l'Allier<strong>Mo</strong>n département représente 345000 habitants avec28 % de personnes âgées et 6700 allocations adultehandicapé. Malgré nos inquiétudes liées aux délaisde mise en place de la loi, nous en avons une lecturefavorable car elle va nous permettre de poursuivre unpartenariat déjà très fort avec l'Etat, les autres collectivitéset le secteur associatif. Il y a un an, les associationsse sont regroupées en une association appelée"totum 03 dépasser le handicap", ce qui facilitegrandement les échanges avec le département. Nosélus se sont positionnés officiellement sur un scénarioproposé après ces échanges, qui s'appuie surl'organisation actuelle (la territorialisation est récente,2001). La grande majorité des interventions sontdéconcentrées; les équipes médico-sociales de l'APAsont placées dans les 6 territoires (55 000 à 60 00047


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCEShabitants). Les dispositifs pour les personnes handicapéesseront communs: ils passeront par le mêmedécoupage territorial. Nous souhaitons créer des équipespluridisciplinaires spécialisées dans le domainedu handicap dans un premier temps, avec des rapprochementssur des thématiques (maltraitance…); dansle cadre du suivi des schémas, un comité de pilotagea déjà mis en oeuvre un certain nombre de réponses(création de 250 places). La maison départementaledu handicap sera située au niveau central (<strong>Mo</strong>ulins),dans un immeuble où existent déjà des services (CDES,inspection académique etc.). Nous avons créé un posted'attaché pour la mise en oeuvre du GIP; nous envisageonsdes ouvertures de poste, progressives, carnous nous interrogeons sur la façon dont nous allonsreprendre les actuels dossiers traités par la Cotorepet la CDES. Enfin nous travaillons avec l'Etat pourla mutualisation, le regroupement et la formation despetites associations pour engager des personnes surle domaine du handicap, mais avec une gestion communeafin de faire des économies d'échelle.Dr Davanne-Guitard, responsable du servicepersonnes âgées/personnes handicapées auConseil général de la Lozère, chargée de la miseen place de la maison du handicapDans un petit département de 73000 habitants commele nôtre le rapprochement handicap/personnes âgéesest une nécessité de survie. Nous avons un seul service,un seul vice-président, une antenne Alma quia été dès le départ mixte. Nous avons un seul CLICporté par le Conseil général et qui se décline avec 5référents gérontologiques sur les 5 bassins de vie :le CLIC est chargé de l'évaluation des besoins dans lecadre de l'APA. La Maison du handicap sera centraliséedans un lieu unique (vitrine) avec une déclinaisonsur les territoires existants. L'équipe pluridisciplinairedu CLIC va s'enrichir pour prendre encompte le problème du handicap. Ma question est desavoir comment faire évoluer les ressources du CLICalors que je ne sais pas combien de personnes vont seprésenter? On est encore dans le flou sur ce sujet.Régis Devoldère, Président de l'UNAPEIOn constate avec vos interventions la grande diversitédes départements: les réponses et les organisationsne pourront pas être les mêmes partout, c'estune évidence.Bernard Gaudiard, Directeur des établissementset prestations aux personnes âgées auConseil général de l'HéraultNous avons créé au sein de la direction de la solidaritéun département handicap et gérontologie : eneffet la masse des compétences dont nous héritonsnécessite que l'on privilégie l'accès aux droits. Entermes de délais, d'accès etc. Il faut privilégier untravail très transversal, éviter les redondances dansles procédures. Nous avons engagé un travail trèspragmatique en pensant aussi à la dématérialisationpour éviter l'encombrement des services avec desdossiers papiers.Marie-Pierre Petitot, Directrice du pôle gérontologiqueau CCAS de BesançonJe voudrais rebondir sur la question des personnesen difficultés psychiques : ces personnes ont besoincertes de soins mais aussi de soutien à domicile. Sansquoi elles sont en risque de désaffiliation socialetotale. Car elles ont de gros besoin de stimulation ;elles sont capables de faire, mais doivent être incitéesà se laver, à manger, à entretenir leur intérieursinon elles se laissent aller et sont rejetées.Régis Devoldère, Président de l'UNAPEILe handicap psychique est celui qui doit être découvert,mieux connu, car il est de celui qui fait leplus peur. On a supprimé 50 000 lits d'hôpitaux :un tiers de ces personnes sont chez leurs parents,souvent très âgés, un tiers sont dans la rue, et un tierssont en prison. C'est un dossier fondamental desannées à venir.Jean-Louis Loirat, CNSA, animation du réseaudes maisons départementales du handicapJ'ai une question à poser aux départements et auxCCAS sur l'implication éventuelle des CCAS dansle futur GIP. Nous avons visité 28 départementsaujourd'hui : assez peu nous parlent des CCAS. Laloi prévoit la possibilité d'appui sur les CCAS.Christine Antigny, Directrice de la vie sociale,ville de SuresnesNous avons une démarche ancienne sur la créationdes chartes ville-handicap dans toutes les villes dudépartement des Hauts-de-Seine. Le conseil générala clairement dit aux villes que pour la maison du han-48


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESdicap on continuerait dans cet esprit de réseau.Des conventions seront signées, avec des contenusdifférents selon les avancées des communes.Jean-Marie Weitig, Adjoint au maire de la villede Bar-le-Duc, Président des CCAS de MeuseLes conseils généraux dans leur ensemble ont complètementoublié qu'il y avait des CCAS. On a voulusupprimer récemment les CCAS. Or le conseil d'administrationd'un CCAS est le seul organe où se trouventdes personnes non élues qui peuvent fairepart de leurs difficultés. Nous sommes sur le terrain.Les personnes ont l'habitude de venir dans les CCAS.Les CCAS ont des obligations légales qu'on ne peutsupprimer sauf à modifier la loi.Arlette Chouzenoux, Directrice de la solidaritéet de la prévention au Conseil général del'AllierLa loi a donné au conseil général le rôle de maîtred'œuvre d'élaboration des politiques publiques d'actionsociale. Mais il ne faut pas confondre pilotageet mise en oeuvre : à ce niveau-là tous les partenairessont concernés. Selon les domaines le degré d'intensitédu partenariat est plus ou moins fort ; dansl'insertion, domaine très transversal, nous travaillonsbien entendu avec les CCAS. Nous avons notre histoireaussi; dans le domaine du handicap dans notredépartement nous n'avons pas beaucoup de partenariatavec les CCAS en effet; dans le cadre du GIP ons'orienterait vers une participation dans le cadre despôles territoriaux. On ne peut dire que nous ayonsomis de joindre les CCAS.a donc ici un rôle central à jouer.Il nous faut donc réfléchir aux différentes formes deréponses avec les questions d'adaptation de l'environnementurbain, l'implication des politiques publiques(transports, loisirs, culture, logement, urbanismeetc.), la volonté d'utiliser toutes les solutions disponibleset potentialités des habitants pour répondredavantage aux attentes. En terme de services de proximité,existent également des expériences réussiesquant à l'objectif de maintien de la vie sociale despersonnes handicapées, grâce à une vraie réflexionen amont. Enfin nous sera présentée une expériencede construction d'un nouveau métier de proximitédans le soutien aux personnes handicapées.1) L'action d'une villeSolange MOLL, Adjointe au Maire deMarseille, Déléguée aux personnes handicapées età l'animation du troisième âgeII. PRÉVENTION DES RISQUES, DÉVELOPPE-MENT SOCIALET SERVICES DE PROXIMITÉSAnne Latty, Responsable des études à l'OdasNous allons justement parler des villes. L'objectif dece deuxième temps de débat est en effet de revenirsur tout ce qui peut contribuer à répondre aux besoinsde vie sociale. On a parlé hier par exemple de loisirs,point faible de la loi du 11 février 2005, on aparlé plus généralement de la complexité naturellede nos besoins, et de la difficulté accrue à y répondreen situation de handicap. Il est clair que nosbesoins sont satisfaits sur nos lieux de vie, et la villeL e soutien à l’autonomie des personnes âgées etdes personnes handicapées constitue une prise deconscience forte des politiques sociales. Il représenteune étape dans l’évolution des dispositifs qui ont étémis en œuvre depuis quelques décennies. Ce soutienrésulte à la fois d’une évolution démographique etsociétale et correspond à une forte aspiration de cespopulations.Les personnes âgées et les personnes handicapées setrouvent exclues du schéma traditionnel économiquedu producteur, du consommateur. Elles n’existent49


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESquasiment plus en tant qu’acteur-citoyen. Ces altérationsde solidarité sociale favorisent la montéede l’exclusion et la perte du lien social.Il faut donc compenser, protéger par une aide organiséepour éviter de stigmatiser les populations lesplus exposées comme le sont notamment les personneshandicapées et les personnes âgées dépendantes.Cette protection ne doit pas devenir une marchandisemais doit être basée sur la relation humaineet donc sur du lien. C’est pour l’ensemble de ces raisonsque la Ville de Marseille, par l’intermédiaire deson Centre Communal d’Action Sociale (C.C.A.S.),au-delà de tous les services traditionnels, à l’occasionde son Plan de Prévention « Canicule » pourl’été 2004, s’est engagée dans une politique de repérageafin de ne laisser aucune personne au bord duchemin et offrir un dispositif de service de natureà rompre l’isolement et à leur faire retrouver leurplace de citoyen dans la Cité.Par ailleurs avec sa Direction des PersonnesHandicapées, la ville a entrepris une politique volontaristede mise en accessibilité de la Ville. A ce titre,j’ai le plaisir de vous présenter deux dispositifs, l’unpour les personnes âgées, l’autre pour les personneshandicapées.Personnes âgéesUne action de veille sociale a été mise en place à partirde juillet 2004. La ville de Marseille compte189 000 personnes âgées de plus de 60 ans. Dansle cadre de l'action de repérage 70000 personnes ontreçu un questionnaire. Plus de 7000 y ont répondu.L'exploitation des résultats a permis de recenser plusde 5000 personnes fragilisées qui ont été contactéespar téléphone. Suite à quoi 1600 personnes sont suiviespar téléphone, plus de 700 par visites à domicile(3 encadrants, 11 visiteurs, 30 agents d'accompagnement).Des systèmes de télé-assistancesupplémentaires ont été mis en place, 200 agentssociaux ont été formés au total. Même si les appelset les visites se concentrent dans l'été, ils se poursuiventtout au long de l'année. Actuellement on compte400 visites mensuelles en file active gérées par leCCAS.Personnes handicapéesDu côté de l'accessibilité, la ville a entrepris un vastechantier à l'occasion notamment des travaux du futurtramway. Depuis 1997, les commissions communalesd'accessibilité étudient les dossiers. Deux schémasdirecteurs sont élaborés pour la voirie et les bâtiments.Par ailleurs la ville soutient fortement l'actiond'accompagnement individualisé des enfants handicapésavec 92 auxiliaires de vie scolaire.Enfin tous les ans se tient le Forum Marseille Handicap:c'est une valorisation du savoir faire des personneshandicapées, un temps d'échange et de connaissancemutuelle des associations, un temps de fête pendant48 heures avec la présentation des productionsculturelles des personnes handicapées, un défiléde mode avec des mannequins valides et handicapésetc. Le Forum est ouvert au public et l'accès est gratuit.118 Associations de personnes handicapées yparticipent.Dans la réussite de toutes ces politiques il fautsouligner toute l’importance de travailler dans latransversalité, la collaboration et la concertation :transversalité et collaboration entre tous les servicesconcernés de la Ville et de la Communauté Urbaine,collaboration et concertation avec les associationsreprésentatives qui doivent être partenaires dès ledébut de tous nos projets.L’objectif de toutes ces politiques, au-delà du soutienà l’autonomie, est de permettre à tous de vivreune pleine citoyenneté quelles que soient les difficultésrencontrées. C’est aussi-là une manière deconstruire une Ville ouverte, une Ville solidaire, uneVille qui refuse toute forme d’exclusion.Régis Devoldère, Président de l'UNAPEIJe rappelle que l'accessibilité c'est beaucoup plus quel'accessibilité physique. Or les communes ont en têteessentiellement l'accès aux bâtiments, sans douteparce que c'est une priorité, mais cela ne suffit pas.Il y a donc encore beaucoup à faire.2) Evolution du service et de la prise en chargeSerge Kroichvili, Directeur du CREAI deNormandie/Association nationale des CREAIJ'appuie mon analyse sur deux expériences: une maisond'accueil spécialisé et un institut médico-éducatifqui ont développé l'accueil temporaire et l'accom-50


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESpagnement à domicile de personnes lourdement handicapées.Cette initiative a été prise dans le Cotentinpar la fondation du Bon sauveur, pour des personnesen situation de polyhandicap ou autistes.Il faut reconsidérer la démarche des établissementset services : ne plus partir de l'offre mais avoir uneapproche de développement social et médico-sociallocal. On part de trois éléments: quelle est la populationconcernée d'un territoire et ses attentes tant auplan collectif qu'individuel? quelles sont les ressourcesexistantes du territoire? et enfin qui sont les partenairesà mobiliser pour apporter des réponses? Cesréponses ayant pour objectif, non pas le maintien dela personne dans son domicile, mais la vie de la personnedans son milieu avec une démarche d'accompagnementde son parcours.Dans cette démarche, un établissement médico-socialce n'est plus un lieu fermé, mais un centre de ressourcesà disposition des personnes en situation dehandicap. L'établissement a alors obligation d'articulerles différentes réponses possibles: l'accueil permanent,l'accueil temporaire, l'accueil de jour, l'accueilséquentiel, les familles d'accueil, les SSIAD,les associations d'aide à domicile, mais aussi les associationsqui développent des activités de loisirs, devacances etc.L'intérêt de cette évolution des établissements médicosociauxet de l'ouverture au domicile c'est d'abordpour la personne une façon de mieux répondre à sesaspirations et cela apporte un soutien pour lesparents/aidants en offrant des temps de répit. Deuxièmeintérêt : cela facilite les échanges réguliers entreles professionnels et les personnes concernées par lehandicap. De ces échanges naît une fertilisation croiséedes pratiques. Enfin cela permet une préparationde l'accès à l'institution à terme.L'accompagnement de la vie à domicile a pour intérêtpremier de rompre l'isolement des personnes, enleur donnant la possibilité d'aller dans des lieux classiquesou adaptés. Il faut arriver à des relationstrès personnalisées entre la personne, la famille,les professionnels (relation triangulaire).Ces expériences de transformation d'établissementsd'accueil ont été faites avec le soutien financierdes collectivités locales (communauté de communede Beaumont-Haye). Pour les professionnels il y aune nécessité d'évoluer dans la manière d'intervenir,ce qui signifie qu'il y a nécessité aussi de faireévoluer les compétences dans le secteur du handicapqui a besoin de formation complémentaire et desupervision.3) L'évolution des métiersBrigitte Croff, Professeur associé à l'Universitéd'Angers, management des services de proximitéJ e dirige un centre de formation professionnelle spécialisédans les services aux personnes, principalementà domicile. On y travaille sur l'ensemble des questionsde dépendance, handicap, petite enfance. Je suispar ailleurs professeur associé à l'Université d'Angersdans une nouvelle formation "master managementdes services de proximité". On y prend en comptetoutes les dimensions de la vie quotidienne (services,conciliation vie familiale-vie professionnelle, transports,environnement, tourisme local). Cette formation a étémise en place par le département "études supérieurestourisme-hôtellerie" ce qui est significatif: on interrogel'action sociale à partir de la vie locale. C'est l'occasionde décloisonner des disciplines (urbanistes, sociologues,action sociale…).Je vais présenter un travail inclus dans un projet européenappelé Icare: ce travail a été mené dans le départementdu Val-de-Marne et porte sur le transport adaptéaux personnes handicapées et sur la réorganisation, àtravers une délégation de service public, de l'ensembledes transports. Le projet Icare se caractérise par des51


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESacteurs pluridisciplinaires: associations d'usagers, GIHP,APF, APAJE, Coderpa, association "Vivre", spécialiséesur les questions d'insertion pour les travailleurs handicapés,un syndicat professionnel des transports et biensûr le département qui est porteur du projet.Les objectifs: animer un groupe de travail impliquanttous ces acteurs, pour élaborer une stratégie départementalesur les transports adaptés et développer l'offrede service en conservant les offres existantes sur leterritoire. Mettre en place un observatoire des besoinsdes usagers afin de gagner en lisibilité. En effet l'offreinsuffisante induit une "non-expression" des besoins;d'où la volonté de créer une plate-forme unique permettantaux personnes de faire appel à un service et d'êtreorienté vers l'existant, ville par ville. Dernier objectif:travailler à la professionnalisation et concevoir de nouveauxmétiers. Je vais développer ce point que j'ai travailléparticulièrement pour le GIHP.Un nouveau métier est à développer pour accompagnerles déplacements des personnes handicapées: conducteur-accompagnateur.La question de l'accompagnementest au cœur de la réponse. L'analyse de l'existant nousa permis de mesurer ce qui manque aujourd'hui pourarriver à ce métier. Quel est l'éventail des solutions actuellessur ce territoire?Il existe tout d'abord des services qui se sont construitssurtout à partir des associations pour handicapmoteur, et qui ne sont pas très professionnalisés: ils arriventà apporter une réponse adaptée mais sans autre formationque ce qui concerne la conduite du véhicule etla sécurité. Ce qui concerne le relationnel et l'approchedes différentes formes de handicap est négligé. Laquestion de l'accompagnement des personnes en situationde handicap psychique n'est quasi pas traitée. Deplus les conducteurs ont des représentations stigmatisantesdu handicap faute de formation et d'apprentissage.Il existe aussi des services issus de la loi du 29 janvier1996 qui a autorisé les entreprises marchandes à investirdans le champ de l'aide à domicile. Des petites entreprisesont commencé à apporter des réponses en matièrede transport avec déduction fiscale pour les bénéficiaires.Le public étant surtout les populations âgées.Même chose avec des associations et des CCAS: on estlà sur la dimension gérontologique essentiellement.La réponse reste donc insuffisante avec le problème dene reposer que sur des systèmes aléatoires (on résout ledéplacement de la personne parce que la salariée quivient chez elle a un véhicule par exemple). On est doncloin d'une structuration.Il existe encore des associations comme "les compagnonsdu voyage" structures développées en Ile de Francedans le cadre des emplois jeunes. Le salarié accompagnedans les transports publics: il doit apprendre à lapersonne à devenir autonome. On a des expériences intéressantesavec des jeunes enfants atteints d'un handicap(surdité…).Outre l'analyse de l'existant, nous avons écouté les conducteursactuels sur leurs difficultés quant à l'organisationdu service. Il reste un travail à faire sur l'informationnotamment. Nous avons travaillé aussi avec eux sur cequ'on entend par accompagnement, ses limites. Onaccompagne "porte-à-porte", mais jusqu'où?L'étude a abouti à la construction de deux référentielsmétiers:Le premier s'intitule "conducteur-accompagnateur",donnant la possibilité d'accompagner toutes sortes dehandicap quel que soit l'âge; il est au même niveau quele DEAVS (niveau 5).Le deuxième s'intitule "assistant de mobilité". Pour yaccéder il faudra avoir validé le métier de conducteuraccompagnateur.De niveau 4, il permettra le métier d'accompagnementsur la vie scolaire, universitaire, les loisirs,le sport… Différents modules sont donc possibles.Les professionnels peuvent en valider tout ou partieen fonction de leur intérêt et de leur souhait de mobilité.Dans quelle branche professionnelle s'inscrivent cesmétiers? Difficile de répondre car on le voit bien c'estvers un décloisonnement que l'on se dirige.DEBAT AVEC LA SALLEMarie-Claude Charbit, Directrice adjointeemploi insertion au pôle intercommunal OuestprovenceOn a en effet besoin de métiers qui ne rentrent pasdans les cases traditionnelles. La difficulté est defaire reconnaître ces animateurs polyvalents, cesaccompagnateurs multi-tâches en tant que professionnelsspécifiques. Dans la question de la pro-52


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESfessionnalisation il y a à la fois l'acquisition d'unmétier et la reconnaissance par les autres partenairesde ces nouvelles fonctions.Marie-Pierre Petitot, Directrice du pôlegérontologique au CCAS de BesançonNous gérons un service intitulé "compagnie-accompagnement"qui vise à lutter contre l'isolement despersonnes âgées et handicapées, monté au départavec les associations. Cela fonctionne bien, mais c'estencore timide. Le principal obstacle c'est que ce servicen'est pas gratuit (tarification sociale); quand onveut aller au théâtre par exemple ou au cinéma, l'accompagnateurva chercher la personne à domicile,l'aide à se préparer, reste avec elle si elle le souhaiteet la ramène : cela représente des séquences de 2 à3 heures, ce qui est prohibitif en terme de coûts.On travaille au développement d'un réseau de bénévolessur la partie compagnie. Car on a fait le constatque les personnes sont plus enclines à payer del'accompagnement que de la compagnie qui relèvede la convivialité, non solvable à leurs yeux.Mais sur l'accompagnement où il y a la mise à dispositionde véhicules, le financement reste l'obstaclemajeur.III LA NÉCESSAIRE RESTRUCTURATION DEL’OFFRE DE SERVICES DANS LE SOUTIEN ÀL’AUTONOMIEAnne Latty, Responsable des études à l'OdasNous sommes dans ce troisième temps de débat dansla droite ligne de nos interventions d'hier: nous avonsle souci de mieux répondre et pour cela il faut s'appuyersur des services adaptés, à l'écoute des besoinsréels, travaillant le soir et le week-end, aux horairesétendus, etc. Comment les services évoluent en cesens? Le défi des associations notamment c'est biend'apprendre à gérer la complexité de la demande.L'offre de service à domicile et en établissement abeaucoup évolué ces dernières années faisant de l'aideaux personnes une profession à part entière. Toutefois,elle souffre d'une grande atomisation des services,de carences en compétences tant dans l'encadrementque chez les intervenants. Au moment où la questiondu soutien à l'autonomie est rendue plus cruciale avecles évolutions démographiques, il faut proposer unenouvelle polyvalence des métiers d'intervention. Parailleurs des outils de structuration du secteur peuventêtre développés ainsi qu'une culture nouvelledu service. Enfin, il devient urgent de mieux organiserla rencontre de l'offre et de la demande dansles services à la personne.Dominique Fruleux, Directrice généralede l'association Arcadia (Roanne)Je dirige depuis 25 ans une structure qui compte 450salariés aujourd'hui. Elle a commencé par des servicesde soutien à domicile qui se sont rapidementdéveloppés vers les repas à domicile, la télé-assistancedans les années 1987 ; on s'est intéressé aussiau problème de l'habitat: en 1989 on a développé leconcept des résidences marguerite, logements de T1à T3 avec APL, disposant d'une ergonomie adaptée,de services de nuit. Par la suite l'association s'est vueconfier la gestion d'un établissement pour personnesâgées dépendantes (MAPAD), et nous avons créé en1996 un des premiers accueils de jour.L'ensemble de ces projets part d'une volonté militante.Il y a une complémentarité entre éthique et management.Se pose d'emblée la question du sens: il doit yavoir une forme de militantisme, même si on s'orientede plus en plus vers le modèle de l'entreprise. Le managementmet en place des techniques, apporte une veillesur les problèmes financiers, administratifs (droit dutravail notamment), le lien entre usagers et salariés.Manager n'est pas renoncé à ses valeurs.Je voudrais vous citer une enquête sur les plus de 80ans à San Francisco qui montre que ce sont les servicesd'aide à domicile qui leur permettent de garderun lien social. On est bien dans des services importants,attendus, qui ont évolué. Quand je suis arrivéesur ce secteur, il y avait plus de bénévoles, et au fil dutemps on a eu des professionnelles, qui agissentavec une conscience et un dévouement que je reconnaistrès grand.Comment a t-on structuré ce service ? En 1981, j'aid'abord mis en place un service comptable et financier.Ensuite on a beaucoup travaillé sur les formations(en 1983 convention collective des salariés dumaintien à domicile: imparfaite mais qui donnait au53


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESmoins un cadre) ; nous avons utilisé des procédurescomme les contrats FNE à 60 ans (départ en préretraite)car il y a un vrai problème qui se pose surl'usure au travail. En 1998 nous sommes passés à lamensualisation : ce n'est pas simple car nous sommestoujours tarifés à l'heure.Nous avons créé un certain nombre de nouveauxmétiers dont on vient de parler, comme le métierd'auxiliaire itinérant de nuit qui a très bien marché.On a créé également des auxiliaires itinérantsde jour que l'on finance sur l'heure d'aide à domicile.On a créé les médiateurs XXI e siècle car il nous semblaitimportant de former les gens à la carte vitale, àl'euro, à l'ordinateur (ateliers). Nous l'avons fait aussiauprès de l'ADAPEI de Roanne avec des personneshandicapées adultes, et cela a été formidable.En 2001-2002 nous sommes passés aux 35 heures,en 2003 à la subrogation (l'employeur assure le salairependant un congé maladie et se fait rembourser parla sécurité sociale). Bien entendu l'application du droitdu travail se traduit par des coûts (délégué syndical,délégué du personnel, comité d'entreprise, CHSCT…).Au bout de tout cela, aujourd'hui nous avons 45 % depersonnes diplômées (DEAVS et assistantes de vie).J'ai envie également de reprendre les questions poséespar les organisateurs et d'indiquer ce que l'on réussità faire ou que l'on aimerait faire:- Sur l'information au public: nous prenons des informationssur le livret de l'hôpital et de la clinique etsur le guide type "petit futé". Cela ne représente pasun budget énorme, c'est simple à réaliser.- sur le fait que la ville est le lieu essentiel à adapter:attention, nous allons en effet vers des logements et deslotissements qui vieillissent; pour des personnes quivont avoir un handicap, il va falloir trouver des formules,sachant qu'elles sont très attachées à leur lieu devie.- sur le management: nous avons travaillé en Rhône-Alpes avec le président de l'union des médecins généralistespar exemple pour échanger avec les autresmétiers (infirmières, auxiliaires de vie) sur les pratiques;- sur l'enrichissement des métiers: l'animation à domiciledevrait se développer dans le métier de base :faire en sorte que les auxiliaires de vie se formentaussi à cette dimension (en faisant un geste techniqueon peut aussi être dans la relation) ; faire travaillerles auxiliaires avec des ergonomes. Des groupesde parole sont nécessaires également: ils font partiedu suivi du métier.- sur le fait de conserver le droit au risque et de respecterle libre choix des personnes : c'est de notre avenirdont nous parlons ; quel que soit l'âge, il y a undroit au risque, un droit à bouger. Évitons de parlerde "placement".Pour terminer je vous renvoie à un dossier d'avril 2005de Santé et travail sur le thème "aides à domicile,des métiers peu ménagés".Bernard Ode, Directeur général des services duConseil général de l'Hérault, Président honorairede l'AATF<strong>Mo</strong>n intervention sera complémentaire. Notredépartement essaie de faire émerger les emploisde service dans un processus de professionnalisation.<strong>Mo</strong>n propos concernera pour l'essentiel les personnesâgées. Notre politique s'appuie sur un principeet deux outils. Le principe c'est de privilégier lerecours au mode prestataire : nous pensons que cesystème sous forme associative ou sous statut d'entreprisepermet une gestion des ressources humaines,un suivi, un dispositif d'accompagnement. Celacoûte plus cher mais c'est à nos yeux une garantie deprofessionnalisation.Les outils sur lesquels s'appuie notre politiquesont tout d'abord une démarche d’accompagnementdes opérateurs autour de la professionnalisation,de la structuration du secteur, et de la tarification, etégalement une expertise et une animation pour ledéveloppement de ces emplois de services avec lacréation d'un Pôle Emploi Services Hérault en relationavec la mission Économie Résidentielle (pôlesolidarité). Le département a une double exception:c'est le premier département pour la progressiondémographique (1 000 personnes de plus par mois)et c'est également un des premiers départements pourle nombre de RMI et de chômeurs.54


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESLes objectifs du pôle emploi Services:Inscrire les métiers, les activités et les emplois de servicesaux particuliers dans un modèle territorial dedéveloppement, dans le but d’améliorer les conditionsde vie des Héraultais et de créer des emplois pérenneset qualifiés. Nous travaillons aussi sur la définition desservices aux particuliers: l'ensemble des services prestéspar des associations, entreprises, indépendants, artisans,intermittents du spectacle…au domicile des particuliers,sur leur lieu de travail ou de villégiature.Le dispositif mis en place est composé detrois éléments :La Plate-forme Emploi● Valoriser les métiers de l’aide à domicile● Informer et orienter les candidats● Mettre en relation offre et demande d’emploi● Accompagner vers et dans l’emploiPléiades Services (association, cotisation de35 euros par an)Mettre en relation l’offre et la demande de servicesaux particuliersDévelopper la consommation de servicesContribuer à l’émergence et à la structurationdu secteur économique des services aux particuliersLe Centre ressources recherche-développementObservatoire de la consommation de serviceset de la création d’emploisLaboratoire d’idées pour le développement deLes résultats du pôle Emploi services➊ Informer et orienter6 783 personnes ont contacté la Plate-formeEmploi du 1 er janvier 2000 au 31 décembre2004 dont 1441 personnes en 2004➋ Faciliter le rapprochement offre/demanded’emploi860 offres d’emploi ont été enregistrées du1 er janvier 2000 au 31 décembre 2004 sur ledépartement de l’Hérault dont 154 offres d’emploien 2004826 contrats de travail ont été signés du 1 er janvier2000 au 31 décembre 2004 dans le cadrede l’action de la Plate-forme Emploi dont 135contrats en 2004➌ Favoriser la création d’emplois pérennesEn 2004, 72.5 % des contrats de travail ont étésignés en CDILes résultats de Pléiades Services➊ <strong>Mo</strong>bilisation de la demande de services- 7 785 appels prospects enregistrés- 4 640 abonnements souscrits depuis 2000dont 1226 en cours à fin 2004➋ Structuration de l’offre de servicesUn taux de satisfaction de 88 % dans le domainedes Emplois Familiaux et 94 % dans les autresdomaines -182 prestataires référencés à fin2004➌ Intermédiation entre l’offre et la demandede services: le centre d’appel8 640 dossiers ouverts depuis 2000 dont 614en cours à fin 2004Je voudrais également donner un petit coup deprojecteur sur l'allocation personnalisée d'autonomie:l'APA représente une chance pour notre départementen terme de développement d'emploi. Au31 décembre 2004, l’APA concerne 44 prestatairespour 3.6 millions d’heures réalisées et mobilise unbudget de 52.9 millions d’euros. L’APA représente60 à 70 % de l’activité des prestataires. Dans un secteuroù 3 associations représentent les 2/3 du marché,les petites et moyennes structures sont déséquilibréespar la forte croissance de leurs effectifs: aussinous essayons de les aider à se restructurer pour faireface. Nous avons mené pour cela une action d’accompagnementavec un cabinet extérieur auprèsde 21 petites et moyennes structures de juillet 2004à mars 2005 afin de repérer les problématiques, detravailler en collectif à la recherche de solutions etde mutualiser les moyens, en particulier humains.L'objectif est d’aboutir à un groupement d’employeurstant pour des compétences spécifiques (psychologue,qualité, communication, informatique…) quepour des intervenants(es).55


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESEn terme d'emploi, l'APA a permis la création en 3 ans,d'environ 1300 équivalents temps plein (ETP). Ce sontdes emplois partiels cependant (2500 personnes concernées):il faut veiller à cette question de précarisationde l'emploi. Toutefois 80 % des heures accordées lesont dans le système prestataire avec une professionnalisation(formation…) et de l'emploi stable.Par ailleurs, la volonté du département est de fairebénéficier les personnes au RMI de cette dynamiqueemploi en mettant en œuvre des actions spécifiques.Nous avons fait une expérience à ce sujet avec unaccompagnement socio-professionnel de bénéficiairesdu RMI vers l’aide à domicile dans le cadre del’APA. Cette expérimentation menée dans le biterroisa concerné 22 bénéficiaires du RMI de novembre2002 à juin 2003 avec un taux de réussite en termesd'emploi ou de formation de 70 %. Du coup,nous avons souhaité élargir cette action au niveaudépartemental, de novembre 2003 à juin 2004 avec14 préformations sur les territoires des 12 Commissionslocales d’Insertion, soit 170 bénéficiaires concernéspour un coût de 400 000€. Les résultats au 30 septembre2004 sont satisfaisants: 41 personnes en CDI,28 en CDD, 16 en travail occasionnel 3 CES dont 2en maison de retraite. Enfin 71 personnes travaillentdans l’aide à domicile, 17 ont choisi un autre domained’activité et 42 sont en parcours de qualification(6 VAE). Les autres personnes sont en suivi de recherched’emploi ou approfondissement du projet professionnel.En conclusionLes démarches menées depuis la mise en place del’APA dans l’accompagnement des personnes âgéessont transférables dans le domaine du handicap maisaussi dans celui de la petite enfance autour notammentde la garde d’enfants à domicile auprès des jeunescouples.Par ses actions, le département participe largement àla qualification des emplois de service aux particulierstout en proposant un parcours d’insertion professionnelleà des personnes en difficulté.L’harmonisation des politiques en direction des emploisde service couvre donc à la fois les domaines de lasolidarité et de l’emploi. Elle ne peut s’envisager qu’entermes de transversalité inter-services et de partenariatsexternes.DEBAT AVEC LA SALLEGeneviève Romieu, médecin territorial à laDirection de la solidarité du Conseil général desPyrénées-OrientalesDans notre département nous n'avons pas fait le choixde donner la priorité au prestataire; cela me semblaitimportant de faire un plan d'aide personnalisé etd'écouter ce que la personne avait à dire. C'est beaucoupplus long et compliqué mais c'est essentiel. Il nefaut pas oublier qu'au cœur du dispositif il y a des personnesqui ont derrière eux une existence, qui ontnoué des relations fortes, dans les villages en particulier,depuis longtemps. Nous avons constaté que sion attribuait des services prestataires à ces personnes,finalement ils ne suivaient pas le plan d'aide, ce qu'onappelle en langage administratif des problèmesd'effectivité. Aussi on est revenu en arrière et on aessayé de comprendre ce qui se passait. Il faut égalementdire que l'intervention en gré à gré permet auxpersonnes d'avoir un service plus à leur écoute et avecdes interventions à des heures où parfois les prestatairesne peuvent venir (12 heures/14 heures, lecoucher…) et cela ce n'est pas négligeable. On continuedonc de s'intéresser au gré à gré : une jeuneuniversitaire vient faire une étude dans notre département.Un questionnaire est prévu pour mieux connaîtreles parcours des intervenants en gré à gré, savoirpourquoi et comment ils interviennent etc.56


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESBernard Ode, Directeur général des services duConseil général de l'Hérault, Président honorairede l'AATFC'est vrai que nous faisons un effort pour convaincreles personnes de prendre le prestataire, mais nousne l'imposons pas à 100 %. Les prestataires peuventtrès bien intervenir aux heures des repas et il fautaussi travailler aussi sur ça. Les prestataires ne sontpas uniquement des services de CCAS avec des fonctionnairesqui n'acceptent pas de travailler en 12 heureset 14 heures etc.Réactions contraires venues de la salleDominique Fruleux, Directrice générale de l'associationArcadia (Roanne)Je voudrais réagir sur l'étude que vous voulez fairedans les Pyrénées-Orientales : je suggère que cetteuniversitaire rencontre d'une part le médecin du travailqui lui dira qu'il n'y a pas de visite médicale dansle gré à gré ; et d'autre part je vous renvoie auxprud'hommes où des employeurs se retrouvent à l’âge85 ans car incapables de gérer correctement leur rôle.Brigitte Croff, Professeur associée à l'Universitéd'Angers, management des services de proximitéIl est important de ne pas mettre dos-à-dos prestataire,mandataire et emploi direct (l'AFEPEM se batpour qu'on ne dise pas gré à gré). En effet il faut queles services apprennent à travailler dans la diversitéet à gérer la complexité. On ne peut pas être dans ledéni qu'actuellement en France il y a 2,7 millionsutilisateurs de chèque emploi service et à fin 200420 % ont plus de 65 ans. Cela signifie que l'on esttrain d'éduquer les futures personnes âgées que nousserons. C'est la réalité. L'Etat a créé tous les dispositifspour que chacun ait une palette de librechoixthéoriquement ; s'acharner en disant "vive leprestataire" n'est pas réaliste, car les départementsne pourront pas suivre sur les tarifs. Dans nos études,on observe des départements où des personnesdiplômées doivent faire en 2 heures ce qu'ellesfaisaient avant en 3 heures. Face à des conditions detravail de plus en plus difficiles il faudra bien composeravec toutes sortes de statuts: cela renvoie à lacapacité du management à se servir de tous les outils.Composer avec l'existant signifie aussi d'avoir desdiplômes réellement polyvalents (cf. DEAVS) : ilfaut considérer l'usure mentale des personnes qui travaillentsur les mêmes publics. Comment construitonde la pluri-activité, comment fait-on des passerellespour varier les interventions? Les services nesavent pas travailler sur la polycompétence des personneset construire des emplois du temps cohérentsaussi bien en terme d'heures de travail que de contenud'activité. Dernière chose : dans notre travail d'enquêtesur le référentiel métier de conducteur-accompagnateur,nous notons que les personnes handicapéesveulent être donneur d'ordre, c'est-à-dire souhaitentavoir la maîtrise du service et des prestations.Maurice Jousse, Administrateur IrcantecJe me situe du côté de la demande, en tant que retraité.Sur la question prestataire/mandataire, il ne faut pasoublier que la personne bénéficiaire du service n'estsouvent pas celle qui s'occupe des papiers : c'est lafamille, un proche. Or dans le mandataire c'est trèscompliqué de gérer.Par ailleurs nous n'opposons pas le domicile et l'institution: c'est un faux débat. Le seul problèmec'est que si le choix, quelque soient l'âge et le degréd'autonomie, n'est pas optimum, les problèmes naissentalors ! On le voit avec la maltraitance. Il fautdonc optimiser le choix.Bernard Garandeau, Vice-président du Conseilgénéral de la GirondeNous avons développé avec un partenariat européenl'emploi de services et créé 1 300 ETP. Restent desquestions : comment faire que les personnes socialementen marge puissent intégrer ces métiers ?Les taux d'intégration de personnes au RMI ne sontpas si importants que cela. Le deuxième problèmec'est la gestion des établissements : on recrute despersonnels sous-qualifiés avec en conséquence ungros taux d'absentéisme. Le statut associatif est celuiqui est le plus pratiqué. Mais quand une associationcomporte 450 salariés cela semble quelque peu limitepar rapport à la loi de 1901 ; d'autre part on a desrisques d'instabilité (démission du président). Peutêtrefaut-il inventer une autre forme de statut adaptéà ces évolutions. Le nombre de structures pose problème:nous avons 170 structures en Gironde. Noussommes donc intéressés par les moyens d'inciter auxregroupements.57


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESAnne Latty, Responsable des études à l'OdasJe voudrais conclure cette conférence en rassemblantles points de consensus suite à nos différents débats.On a entendu d'abord qu'il y avait une volontépolitique assez claire sur le soutien à l'autonomie etpas de conflits sur le sens, même s'il y a nécessitéencore de renforcer le dialogue et la confiance entreacteurs publics d'une part et entre acteurs publics etassociatifs d'autre part. On a entendu aussi un appeldes départements à la suppression des intermédiationsadministratives rajoutées.À travers les différentes interventions ressort bienl'intérêt de la décentralisation qui permet que la miseen oeuvre de l'aide prenne bien en compte la spécificitédes territoires.Sur la convergence des dispositifs personnes âgéespersonnes handicapées, comprise comme le rapprochementopérationnel de dispositifs et non pas laconfusion des attentes individuelles, on note un réelconsensus.Dans les pistes à approfondir : un gros travail resteà faire sur la formation de façon globale mais aussiplus spécifiquement sur le handicap psychique, avecune clarification du rôle du secteur psychiatrique.Enfin on a insisté sur l'accent à mettre sur la créativitélocale. Les collectivités doivent surtout impulserdans ce domaine. Pour qu'il y ait créativité il fautqu'il y ait prise de risque: il s'agit pour le professionnelou l'élu d'accepter de bousculer ce que l'on saitdéjà faire et qui peut ne plus être adapté; il faut évaluerce que l'on fait. Car seule l'évaluation peut valoriserl'intérêt des services proposés.Sur le débat de la forme statutaire que l'emploidoit prendre il me semble que le mot de la fin appartientaux personnes. Le rôle des services publics c'estde les conseiller, certes, mais en toute objectivité. Laliberté de choix des personnes doit être respectée.L'est-elle? Ceci renvoie à un autre débat qu'il conviendrad’ouvrir ultérieurement.58


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESCONFERENCE SUR L'INSERTIONPROFESSIONNELLECo-Présidents :Claude JEANNEROT, Président du Conseil général du DoubsGisèle STIEVENARD, Vice-présidente de l'UNCCAS, Maire-adjointe de ParisGrands témoins :Michel ABHERVE, Vice-président de l'Union Nationale des Missions localesMarie-Pierre ESTABLIE, Déléguée générale d'Alliance Ville-EmploiBruno ARBOUET, Directeur de la mission de préfiguration de l'Agence Nationale de Développementdes services à la personne auprès du Ministre de l'Emploi et de la Cohésion socialeIntervenants :Françoise BOUYGARD, Chef de service de la DGEFPPierre-Marie CHARVOZ, Vice-président du Conseil général de la Savoie, chargé dela vie socialePhilippe CHOLET, Directeur de l’Insertion au CCAS de BesançonPatrice FEDERIGHI, Directeur de l'insertion, de la politique de la ville et de la jeunesse auConseil général du VauclusePatrick GARDET, Vice-président de la communauté urbaine Brest-Métropole OcéaneJean-Paul RAYMOND, Directeur des Politiques Sociales au Conseil général du LoiretPaul TORRENT, Directeur du PLIE de LIMOGESClaude Jeannerot, Président du Conseil généraldu Doubsla société. En effet, cet état des choses signe l’échecde toutes les politiques publiques, et invite toutes lescollectivités à se mettre en mouvement. D'autre parton ne peut se satisfaire que les dépenses passivesviennent de plus en plus peser sur les finances publiques.Enfin, il faut permettre à chacun des allocataires duRMI de reconquérir son autonomie, ce qui est toutle contraire d’une politique d’assistance.Quatre enjeux fondamentaux découlent de ce constat:Dans un pays qui compte 1,3 million de rmistespour une dépense au titre de la seule allocationde plus de 5 milliards d’euros, la problématiquede l’insertion revêt une triple dimension : ils'agit d'une part de ne plus accepter qu’un nombresans cesse croissant de personnes reste en marge de- Les moyens engagés par les collectivités locales doiventtraduire une volonté politique forte d’engagementdans ce combat contre la précarité; mon départementa ainsi porté les dépenses d’insertion à 20 %,- L’insertion ne sera réalisée que si l’emploi est aurendez-vous, et il nous faut combattre cette idée qu’unnombre significatif de Rmistes écartés durablementsont inemployables,- Un plan d’action global et multidimensionnel doitêtre mis en œuvre (logement, santé, illettrisme),- L’ensemble des partenaires doit être mobilisé dansun souci d’optimisation et de cohérence d’action.59


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESPremière partie de la conférenceLE POSITIONNEMENT DES ACTEURSI. LES DÉPARTEMENTSPierre-Marie Charvoz, Vice-Président duConseil général de la SavoieLe département de la Savoie depuis 2 ans et demiea mis en œuvre une politique territoriale au niveaudu bassin de vie, là où s’agrègent toutes les politiquesde développement de territoires (d’environnement,des sports, de la culture, d’action sociale, etc.),en procédant selon une logique de mission.Les actions sont menées avec tous les acteurs de l’insertion:chacun vient avec sa « caisse à outils », avecdes objectifs partagés en reconnaissant la légitimité duterritoire et la légitimité des acteurs, et en réalisantconcrètement la mise en cohérence des territoires.Nous avons souhaité agir dans plusieurs directions:- responsabiliser les acteurs sur des territoires cohérentsen respectant le poids de l’histoire pour chacun d’entreeux;- mener des diagnostics approfondis avec l’ANPE. Ànoter que l’ANPE considère que, pour le Rmiste, lasolution la plus pertinente c’est de conclure un CI-RMAavec une entreprise ordinaire, ou, à défaut, avec uneentreprise d’insertion pour 3 à 6 mois, et ensuite passeren contrat ordinaire avec une entreprise de droitcommun;- réaliser des suivis – en luttant contre l’isolement et lasolitude- dans les domaines du FAJ, du logement, dela santé, etc. Il ne faut pas lâcher les gens dans la naturemais guider notre action sur les principes suivants: développement,modernité, proximité, solidarité;- Préconiser des accompagnements dans les entreprises,avec le souci de travailler avec elles dans descollaborations bien construites.Des résultats remarquables ont été ainsi obtenus:- 650 rmistes remis au travail en CDI ou CDD deplus de 6 mois, plus 75 RMA, et 12 contrats d’avenirsignés,- baisse de 4 % du nombre d’allocataires RMI,- 80 à 85 % des contrats d’insertion axés sur l’insertionprofessionnelle, - dont 50 % de leurs bénéficiaires ayant2 ans ou plus d’inscription au RMI -, élaborés à partirdes CLI avec l’ensemble des partenaires et structuresconcernés.60


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESJean-Paul Raymond, Directeur des PolitiquesSociales au Conseil général du LoiretNotre département s’est donné comme objectifde privilégier l’insertion professionnelle ensecteur concurrentiel marchand, et de rémunérerl’instruction administrative et l’accompagnementsocial.Pour cela, il a tout d’abord créé une cellule RMA,des pôles spécialisés insertion dans les unités déconcentrées,après expérimentation sur 2 années, etengagé un travail par projet et par objectifs, en rompantavec le principe de prise en charge unique parun travailleur social.Il a mobilisé à cet effet un certain nombre d'acteurs:- les entreprises, chambres consulaires et syndicatsde branche par des actions de communication (phoning,mailing),- le service public de l’emploi, en donnant à l’ANPE,rémunérée en fonction des mesures adoptées, desobjectifs de doublement de sorties,- les entreprises temporaires d’insertion,Les résultats, au bout de 18 mois, sont encourageants:- l'accompagnement social s'est amélioré grâce auniveau des compétences ; il pourrait être un pointd’ancrage pour d’autres domaines comme le FAJ, leFSL...- l’implication des communes est satisfaisante,- les contacts avec la Région sont bien établis,- la culture de l’orientation professionnelle est enprogrès dans les équipes du département,- les taux de contractualisation RMI sont en hausse,Un point cependant est encore délicat: il s'agit de latendance de l’ANPE, -dont l’organisation est centréesur la gestion des contrats aidés-, de ne pas toujoursbien repérer les compétences des bénéficiairesdu RMI et de s’assigner des objectifs plus quantitatifsque qualitatifs avec de gros écarts selon les territoires.Par ailleurs la culture de l’accompagnementindividuel y est encore peu développée. Le départementsouhaite revoir en 2006 les termes du partenariatavec l'ANPE.Le département se donne aujourd'hui plusieurs perspectives.Il s'agit d'abord de promouvoir l’évolution des compétencessociales du niveau intercommunal, parun partenariat plus affirmé entre le département etles différentes structures intercommunales (CIAS,Communautés de Communes, Communautésd’Agglomération, …). Il faut ensuite aider fortementà l’éclosion de micro-projets de développement territorialen s'appuyant sur de nouveaux profils de professionnels.Le département souhaite accroître l’accèsà l’emploi par le recours à des prestataires privésspécialisés. Enfin il veut affiner la connaissance despublics, en développant notamment le volet santédans les pôles insertion.II. LES COMMUNESPhilippe Cholet, Directeur de l’Insertion duCCAS de BesançonLa mise en œuvre du protocole entre le conseilgénéral et l’union départementale des CCASCe protocole se distingue par une mise en perspectivede l’intercommunalité, avec une compétencevariable selon la volonté des communesmembres. Deux types de service sont offerts : sansdomiciliation- les dispositifs étant seulement gérésadministrativement-, et avec domiciliation avec unservice RMI particulier, ayant une fonction d’accompagnementsocial non rémunérée.Le protocole prévoit également tout un ensemble demesures : un accueil des publics adapté à la complexitédes profils des demandeurs, un numérovert avec réponse dans la semaine, une analysedes besoins sociaux développée depuis 1995, unedomiciliation Caf en 5 jours maximum, un niveaumoyen de contractualisation atteint de 86 %, unaccompagnement valorisé à 50 euros par sortie dansl’emploi, avec une priorité accordée à l’insertion économique,et enfin un travail en proximité avec le PLI,et avec le PLIE intercommunal.Le CCAS se donne pour perspective de co-produirede façon expérimentale, avec le Conseil Général, unprojet, d’organisation de la participation des bénéficiairesdu RMI au dispositif d’insertion.61


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESPaul Torrent, Directeur du PLIE de Limoges :Formation et Accès à l’emploi des salariés enCDD d’insertionNotre conviction aujourd’hui c'est qu'un emploidurable s’obtient par la formation et la qualification.Le travail réalisé avec le PLIE de Limogesva dans ce sensL’entreprise d’insertion s’engage à donner une formationà ses salariés en insertion. En contrepartie,le PLIE finance le remplacement par d’autres personnes(CDDI en sureffectif, intérimaires ou encadrants).Le dispositif est financé via le fonds social européenpour le poste de conseiller ANPE, le coût du placementet de la formation des salariés en insertionest pris en charge par le conseil régional (salaires) etl’Etat (aides au poste), le conseil général co-finançantl’accompagnement des salariés en CDDI lorsqu’ilssont en formation.Le PLIE a ainsi accru le temps consacré à la formationpour les salariés en CDDI, et a facilité leur accèsà un emploi durable.III. L'ETATFrançoise Bouygard, chef de service à laDélégation Générale de l'Emploi et de la FormationProfessionnelle, Ministère de la Cohésion sociale etde l'EmploiPlusieurs points sont à souligner dans la volontéde l'Etat:Du côté des principes, l’option prise est bien de fairedu retour à l’emploi sa priorité, et la politique del’emploi est aujourd’hui affirmée comme une responsabilitépartagée entre l’Etat et les collectivités locales.Du côté des dispositifs, il s'agit de viser la diminutiondu nombre de contrats aidés, mais simplifiern’est pas seulement réduire ce nombre; la nouveautéréside dans le fait de fixer à ces contrats aidés, quine sont que des outils parmi d’autres, des objectifsd’accès à l’emploi.Il est clair que la période actuelle est un moment detransition et de mise en œuvre. 73 contrats d’objectifsont été signés et 27 sont envisagés d’iciseptembre pour les Contrats d’Avenir (CA) avec lesdépartements, sans compter les communes et lesEPCI.L’ANPE a écrit à chaque conseil général pour proposerun accompagnement à titre gratuit des contratsd'avenir, et se proposer comme référent, si le départementen était d’accord.Malgré tout, je conviens qu’il y a trop de comités depilotage dans ces dispositifs et que le système peutêtre allégé.Gisèle Stievenard, Maire-adjointe de ParisL'intervention de M me Bouygard nous pose la questiondu rôle de la solidarité nationale et de la solidaritélocale dans l'emploi. Il me semble que l'Etat doitcontinuer à jouer un rôle central dans la conduite dela politique économique et de l’emploi, les collectivitéslocales venant en appui, ce qu’elles font.Il ne faut pas imaginer que les collectivités localespourront supporter à elles seules la situation du chômage.Tout le monde souscrit à une stratégie d’alliance entrel’Etat et les collectivités locales, mais on a besoin desentir qu'il y a une mobilisation de moyens importantsau niveau de l'Etat qui soit à la hauteur desenjeux auxquels nous devons faire face.62


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLEDominique Susini, Directeur de l’IRTS deFranche-ComtéPour dépasser les morcellements des dispositifs, ilfaut avoir une prise en charge globale d’une situationsociale. Si les associations ne sont que des courroiesde transmission, embouteillées par toutessortes de contrôles, des pertes d’initiatives seront àdéplorer.Bertrand Druon, Maire-adjoint de Saint-OuenMa ville se situe sur un territoire qui est l’un des plusdynamiques de la région en matière économique, ettous les outils sont en place : PLIE, etc. Pourtant lenombre de nos Rmistes augmente ! Ayons donc lamodestie de relativiser nos succès, car ils sontbien souvent fragiles.Claude Jeannerot, Président du Conseil généraldu DoubsJe veux rebondir sur une remarque: on souhaite agirsur les minima sociaux, mais comment et pourquoifaire? J’estime qu’on a un bel exemple d'actionsur tous les minima sociaux avec la mise en œuvredu contrat d’avenir. Un champ de réflexion majeurs’ouvre devant nous : quels sont les publics ciblesqu’il faut privilégier?Dans tous les cas, l’Etat doit définir le cadre législatifet la collectivité mettre en œuvre, de la façon laplus souple possible.63


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDeuxième partie de la conférenceLES DISPOSITIFSLES PERSPECTIVES DE L'OFFRE D'INSERTIONI. Des dispositifs utiles mais insuffisants ?1. Le Plan local d'insertion par l'économiqueMarie-Pierre Establie, Directrice de l’association« Alliance-Ville-Emploi », Directrice duPlie de Rueil-MalmaisonLe PLIE est un outil sur lequel peuvent s’appuyer départementset régions, développé grâce aux fonds européens.L'ensemble des PLIE couvrent aujourd’hui enFrance une population de 23 millions d’habitants.Le PLIE se caractérise essentiellement par une ingénieriedes parcours construite sur une expérienceacquise depuis le début des années 1970. Cette ingénieriecomprend plusieurs axes :- la mutualisation des moyens employés; le PLIE estle seul outil obtenant des financements en programmationprévisionnelle annuelle (les fonds ne sontobtenus que si les objectifs sont atteints),- un savoir-faire sur le plan de la coopération des acteurs:c’est l’ensemble des partenaires qui construisent unPLIE, ce sont eux qui vont analyser les besoins despublics avec les différents référents: ANPE, etc. ,- la construction de diagnostics,- l’évaluation des besoins,- l'apport de réponses sous forme de projets, avec lesuivi des parcours, pour et avec les demandeurs.2. La mission localeMichel Abhervé, Vice-Président de l’Unionnationale des Missions localesLa mission locale prône la non-séparation entrel’insertion professionnelle et l’insertion sociale: il fauten effet un seul monde et un seul interlocuteur pourassurer la continuité de la relation avec le jeune, avecpour idée centrale que le dispositif s’adapte au jeuneet non l’inverse.La mission locale se caractérise par une fonction d’écouteet la volonté de construire avec les jeunes et surle territoire, en complémentarité avec les autres intervenants.L'autre principe adopté par les Missions Locales c'estla nécessité d’allier un responsable politique et unresponsable professionnel. Pour aller jusqu’au boutde cette logique, les Missions Locales ont déployé desprofessionnels avec des compétences bien spécifiques,et créé une convention collective de droit privé dansleur secteur, dix ans avant le Plan de Cohésion Sociale.64


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLEMarie-Solange Dubes, Directrice généraleadjointe à la solidarité du Conseil général del'EssonneNous sommes dans un moment de rupture: tous lescontrats aidés ont changé et il nous faudra de 18 moisà 2 ans pour se réapproprier leur fonctionnement.Quant à la coopération entre le département et lesCCAS il serait souhaitable d’obtenir des conventionsharmonisées.Bertrand Druon, Maire-adjoint de Saint-Ouen:Je m’interroge également sur la collaboration entreles CCAS d’une part, et l'ADF-AMF d’autre part, quipermettrait des avancées sur un certain nombre de problématiques,notamment des harmonisations.Danielle Roche, Chargée de Mission de laRégion Ile-de-FranceAu sujet des difficultés du partenariat départements –régions décrites par plusieurs intervenants, je me posela question de savoir, si cela est dû à une inadaptationdes dispositifs, à la volonté de chaque institution demarquer son territoire ou simplement à la jeunesse dutravail de l’insertion avec les régions qui commencentà peine?Gisèle Stievenard, Maire-adjointe de ParisIl est vrai que les régions sont encore jeunes, etleurs services sont en train de se transformer en s’adaptantaux nouveaux défis ouverts par l’acte II dela décentralisation. Je peux témoigner que la région65


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESIle-de-France fait un bon travail avec les MissionsLocales.Du côté de l'harmonisation des cadres conventionnels,la démarche de l’UNCCAS a été bien accueillie parl’ADF.Plusieurs départements, dont Paris, ont monté desdispositifs pour les jeunes au stade du démarrage oupendant leur parcours d’insertion. Il leur est alloué desaides d’une durée courte au premier engagement dansce parcours. Ces aides doivent être attribuées sur untemps suffisant pour leur permettre de rebondir.Michel Abhervé, Vice-Président de l’Unionnationale des Missions localesEn 2002, il existait, pour les jeunes, une bourse d’accèsà l’emploi. Elle était lourde, un peu bureaucratiquedans ses modalités. Elle n’a été remplacée parrien. Un CIVIS, annoncé dans la loi de finances 2003,et transféré aux régions, n'a jamais été mis en place,puis a été supprimé dans la loi de finances 2004. Uneallocation interstitielle doit voir le jour, en 2005, dansle cadre du Plan de Cohésion Sociale.Ainsi on est passé d’un système qui marchait en 2002à un autre système, qui va peut-être marcher en 2005.Pour faire face aux décalages que ces changementsde politiques produisent un certain nombre de départementsmettent en place des mesures de compensation.Jean-Paul Raymond, Directeur des PolitiquesSociales au Conseil général du LoiretNotre département a regretté qu'à l'occasion du nouveauFAJ il n’y ait pas eu la possibilité de refaire sonrèglement intérieur, en l’adaptant pour être en complémentaritéréelle avec tous les fonds locaux, et ceciavant que la nouvelle réglementation voit le jour. Leschoses sont en train de se mettre en place directementavec les missions locales, sans que le départementsoit complètement associé.Or tous les partenaires se voient régulièrement autourdes contrats d'avenir, et de la loi Borloo, pour avoirune occasion de travailler sur ce genre de dossier.Par ailleurs quand on regarde ce que l'on dépensedans le cadre de l'aide sociale à l'enfance pour lesjeunes majeurs, on estime parfois qu’il serait nettementplus rentable pour tout le monde, et, notamment,pour les jeunes, d’avoir accès aux dispositifsde droit commun. Si on arrivait réellement à bienmieux travailler ensemble, à ne pas avoir de parachutagesde dispositifs, mais des dispositifs intégrés,concertés au niveau local, on gagnerait tous énormément.Claude Jeannerot, Président du Conseil généraldu DoubsNous souffrons d'un manque de coopération entreles Régions et l'Etat, notamment pour la qualificationdes jeunes.L’AFPA développe un programme spécifique de préqualificationdestiné aux chômeurs de longue duréeet elle est prête à le mettre en œuvre en direction despublics RMI : il est financé par l’Etat, avec undroit de tirage, auquel les départements peuvent accéder.Se pose ici la question de la coopération avecles régions.Je partage le point de vue d'une clarification du rôlede l’ANPE. Au niveau matériel il nous faut construiredes modalités de travail, des critères communs,car les prestations sont coûteuses pour les départementset pas complètement compensées par l'Etat.Sur l'harmonisation CCAS/départements, je veuxbien porter le dialogue au sein de l’ADF avec lesCCAS, pour partager un certain nombre de critèrescommuns, d’autant qu’aujourd’hui, nous disposonsd’un certain recul.Yves Aubert, Directeur général adjoint auConseil général du Val d'OiseAujourd’hui nous avons d'un côté un monde réel deplus en plus complexe, et de l’autre, le monde del’insertion. Or qu’est-ce que l’insertion, si ce n’estce passage qui fait entrer le Rmiste dans le monderéel ?C’est sans doute autour de la question de l'accueil,du diagnostic et de l’évaluation que se jouent lesvraies questions.Jean-Claude Villemain, Vice-président auConseil général du Val d'OiseEn ce qui concerne les jeunes, il me semble que sil’on arrivait à unifier, stabiliser les dispositifs et àles simplifier, on pourrait leur donner un statut socialtemporaire.66


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESII. LES PERSPECTIVES DE L’OFFRED’INSERTION1. Construire l'offre: les maisons départementalesde l'emploiMarie-Pierre Establie, Directrice de l’association« Alliance-Ville-Emploi », Directrice duPlie de Rueil-MalmaisonLes maisons départementales de l'emploi sontl’occasion de construire avec les partenairesdes outils en commun. Elles doivent produire de lavaleur ajoutée si le projet est construit à partir du parcoursd’accompagnement vers l’emploi.Patrick Gardet, Vice-Président de laCommunauté urbaine Brest Métropole océanefaçon pertinente, en un même lieu.Notre territoire comportant des zones rurales et urbaines,les premières disposeront de lieux uniques occupéspar différents organismes, là où il y a un sens àrenforcer cette présence, tout en faisant en sorte quechacun continue à faire son métier ou accueille lespublics pour lesquels il est payé.Sur la grande ville, nous tablerons sur la diversité,mais en renforçant la mise en réseau de ces lieux, defaçon à ce que les gens ne soient pas renvoyésd’un endroit à un autre, mais aussi pour favoriser uneculture commune et donner l’information pertinenteaux personnes.A l’échelon des pays en partant des outils existants,on peut arriver à une plus-value, avec comme objectifsla coordination des politiques sur les territoires,la création de nouveaux outils, le renforcementdes services.En territoire urbain, l’objectif est de faire descendreles contrats de ville au niveau des quartiers.Jean-Claude Villemain, Vice-président duConseil général du Val d'OiseJ’ai peur que les Maisons de l’emploi ne soient qu'unpis-aller et qu’on arrive avec cette nouvelle structureà un éclatement des services sociaux des départements.Je compte sur la mise en réseau et le soutienaux partenaires dans leur rôle de référent,pour acquérir, notamment, des compétences.En Bretagne, des comités vont voir le jour oùseront présents, outre les villes, les départementset la Région, ainsi que les autres partenaires.L'objectif est de gérer ensemble, et de mettrel’argent là où il faut, en organisant évidemment lacomplémentarité avec les fonds existants, comme leFAJ et le FSL. Dans le bassin brestois, la communautéurbaine a proposé au service public de l'emploid’y participer.Quant au projet de Maison de l’Emploi, il s’agitde bien définir toutes les fonctions souhaitées, quine sont pas faciles à rassembler, et pas toujours de2. Les perspectives d'emploiPatrice Federighi, Directeur de l’insertion, dela politique de la ville et de la jeunesse au Conseilgénéral du VaucluseNotre département n’a pas conclu de CI-RMAou de contrats d’avenir. En revanche il mèneune expérience, au stade du démarrage, qui consisteà monter des contrats de type contrat d'accompagnementvers l'emploi, orientés sur des métiers d'accompagnementdans les établissements pour personnesâgées dépendantes. Le dispositif s'appuie sur desco-financements: pour les jeunes l'Etat finance 90 %,67


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESle département 10 %. Pour les personnes au RMI larépartition est de 40 % pour l'Etat, 60 % pour le département.Ces contrats d'une durée de 3 à 6 mois, devraientse transformer à l’échéance, en contrats initiativeemploi, avec accompagnement dans l’emploi.Le département a créé une seule instance départementaleexaminant toutes les problématiques d’emploidans le champ des publics en insertion, et envisaged’étendre son champ d’action.Parmi les freins au développement des emplois, ledépartement soulève deux points:- le peu de contraintes sur les partenaires en matièrede formation et d’accompagnement, notamment pourl’accompagnement dans l’emploi,- le nombre trop important de structures instauréespar les dispositifs visant l’insertion.Bruno Arbouet, Directeur de la Mission dePréfiguration de l’Agence Nationale deDéveloppement des Services à la PersonneTrois constats essentiels sont à retenir en ce quiconcerne les perspectives d'emploi dans ledomaine des services aux personnes : tout d'abordun potentiel a été identifié dans le cadre du Plande Cohésion Sociale, ensuite on se trouve avec desacteurs tous prêts à se mettre en mouvement, enfinla difficulté se trouve dans diversité et l'émiettementdu secteur avec des particuliers employeurs, et denombreuses entreprises de taille modeste.Nous sommes à la veille d’une vraie révolution.Le développement de ce secteur, qui compte 1,3 milliond’emplois ou environ 550 000 équivalents tempsplein, non délocalisables à l’étranger, représente unvrai enjeu pour notre société, car il concerne chacund’entre nous.Certains aspirent à plus de temps libre pour mieuxorganiser leur vie familiale, de loisirs, l’éducationde leurs enfants, tandis que de nouveaux besoinsse font jour (vieillissement de la population et dépendance,émergence de besoins nouveaux, etc.).Le rythme de croissance de ce secteur,- la plus fortede l’économie de ces 15 dernières années- est aujourd’huide 5,5 % par an, avec une création de 80 000emplois chaque année.Trois obstacles principaux ont été repérés dans cedéveloppement:- les personnes utilisatrices de ces services estimentque leur accès est trop compliqué et coûte trop cher,- l'image de ces services est peu valorisante : petitsboulots, emplois trop précaires souvent à temps partielsubi, avec de faibles niveaux de rémunération,de formation et de qualification,- la complexité, pour les employeurs, est trop grandeavec la procédure d’agrément, le poids des chargessociales, le nombre de formalités à accomplir,etc.D’où la volonté du gouvernement de s’attaquer à cesproblèmes de façon simultanée et massive avec unprojet qui se veut extrêmement pragmatique, reposantsur deux objectifs: un accès au service plus simpleet moins coûteux.La mesure phare est la création du chèque emploiservice universel (C.E.S.U.), outil de simplificationet de solvabilisation, que les entreprises pourront utiliserdès le 1 er janvier 2006, et co-financer, abonderavec leur comité d’entreprise. Elles pourront enfaire un instrument de leur politique de ressourceshumaines, avec dans ce cas un crédit d’impôt de 25 %(type crédit crèche). Le C.E.S.U. pourra être utilisépour le versement de l’APA, pour mieux s’assurerde l’effectivité du service, et pour combattreles indus, qui s’élèveraient entre 10 à 18 % de l’allocation(pour un montant global d'environ 12 milliardsd’euros).D'autres améliorations sont à venir :- la baisse de 15 % des charges patronales pour lesparticuliers employeurs, avec une incitation forte enleur direction pour asseoir le paiement des chargessociales sur la rémunération effective des salariés,- un taux réduit de TVA maintenu,- une extension à toute la branche de l’aide à domicilede l’accord de 2002, revalorisant de 24 % lesgrilles de rémunération,- la simplification et la clarification de la procédured’agrément,- la mise en œuvre de véritables filières de formations.Un projet de décret va lister les métiers et activités68


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESéligibles, qui requièrent, certes de la technicité, maisau moins autant d’aptitudes relationnelles. Sans cesdeux éléments, on courra à l’échec.Ces emplois sont de vrais emplois et ne constituentpas des débouchés naturels pour des personnesen insertion.Pour éviter les distorsions de concurrence, les artisansvont pouvoir eux aussi bénéficier du C.E.S.U.(exemple: la coiffure à domicile).Ce secteur concerne aujourd’hui 22 ministères, l’objectifpoursuivi est d’identifier au sein de l’appareild’Etat une entrée unique : ce sera l’AgenceNationale de Développement des Services à la Personne.En septembre 2005 de grandes enseignes nationalesseront lancées; elles sont aujourd’hui au nombre de5, et rassemblent de grandes associations nationaleset des organismes mutualistes, coopératifs et bancaires.Une convention d’objectifs a été conclue récemmentpour 15000 contrats d’avenir avec les grandes fédérationsde l'aide à domicile.69


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLEFrançoise Amat, du Conseil National de laFormation Professionnelle tout au long de la vieJ'ai plusieurs questions: avez-vous un projet de formationpour les personnes qui sont accueillants familiaux? Y aura-t-il des financements ?La formation étant de la compétence des régionset des employeurs, quel est l’OPCA qui pourra ycontribuer, et quelles relations peuvent se nouer avecles certificateurs pour les nouveaux diplômes?Bruno Arbouet, Directeur de la Mission dePréfiguration de l’Agence Nationale deDéveloppement des Services à la PersonneTout d'abord nous partons d’une situation où beaucoupreste à faire. L’ensemble de ces questions deprofessionnalisation relèvera de la négociation, etnon de la loi, et donc pas du plan de développementdes services à la personne. Les assises nationales dela professionnalisation de ce secteur, qui se sontdéroulé récemment, n’ont pas souhaité d’interventionlégislative, mais ont produit des initiatives intéressantes.Aussi des discussions ont déjà commencé avec chacundes acteurs, entendus séparément, pour construireet avancer avec eux sur ces problématiques.Ces assises se termineront concrètement par unefeuille de route précise pour l’année 2006.Marie-Christine Sarre, Directrice adjointe de lasolidarité au Conseil général de l'HéraultNotre département a créé un pôle emploi service ily a 5 ans. Des personnes bénéficiaires du RMI repéréeslors d’entretiens sur leurs capacités d’interventionpour des aides à domicile, sont employées, surtoutpour des gardes d’enfants- problème importantpour un département qui augmente chaque mois dequelque mille habitants supplémentaires!Cela fonctionne avec des échecs criants mais aussides réussites remarquables, et la loi sur le handicapfait espérer d’autres débouchés.Il n’y a donc pas de recette toute faite dans ce domaine.La région ne s’est pas encore vraiment investie, etsi des contrats ont été signés avec de grandes enseignes,on constate que l’offre d’insertion se rétracte.70


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESLe département fait passer devant le CROSSN lesservices à domicile, qui sont affiliés à de grandesenseignes. Le CROSSN a rejeté le dossier présentépour un certain nombre d’entre eux, maisces derniers ont acquis la conviction, qu’ils auront,de toute façon, la labellisation nationale!Bruno Arbouet, Directeur de la Mission dePréfiguration de l’Agence Nationale deDéveloppement des Services à la PersonnePar nature, on constate un émiettement de ces servicessur le territoire. La vraie question est: commentmet-on en correspondance une demande qui va encoreplus émerger et une offre de services de qualité?Notre réponse ce sont des enseignes nationales quifonctionnent comme des marques. Celles-ci sont d’aborddes plates-formes d’intermédiation, et des entitésqui vont fournir de l’appui technique à un certainnombre d’opérateurs qui peuvent être petits ou avoirdes besoins.Trois objectifs sont poursuivis: un effet de développement,un effet d’action sur l’attractivité des métiers,un effet qualité. Les enseignes nationales sont actuellementtrès différentes. Il y a de grandes associationsnationales qui veulent utiliser cette nouvelle dynamiquepour asseoir leur développement, et moderniser leur propreactivité.Des collectivités souhaitent même assumer ce rôled’intermédiation, de mise en relation. Et je penseque ce n’est pas antinomique, mais complémentaire.Henri Simor, Directeur des Solidarités auconseil Régional de BretagneUne Charte de qualification d’emplois à domicilevient d’être signée avec l’ensemble des partenairesde la région (Conseil régionnal, Préfet de Région,recteur de l'Académie, institut et associations de formation,départements, etc.).Elle se caractérise surtout par la création d’un fondsmutualisé pour une qualification DEAVS, avec l'objectifd’arriver à un taux de qualification de 50 % en 3 ans.Pour l'instant le taux de qualification est de 30 %Jean-Claude Villemain, Vice-président duConseil général du Val d'OiseJe ne suis pas d’accord avec M. Bruno Arbouet surle contrôle qualité par les collectivités locales oul’Etat (exemples: agrément et formation d’assistantematernelle, fermeture d’un EHPAD, etc.).Je ne pense pas non plus que le CESU lutte contrela précarité et améliore la professionnalisation. Rienne vaut un contrat de travail.Bruno Arbouet, Directeur de la Mission dePréfiguration de l’Agence Nationale deDéveloppement des Services à la PersonneLe système du contrôle public est globalement satisfaisant.Quant au CESU il n’a rien à voir avec les problèmesévoqués ; au-delà de 8 heures accomplies, il y abel et bien un contrat de travail qui est conclu.Les acteurs du secteur, dans nos discussions, ont largementprogressé sur ces questions de professionnalisation.Le monde associatif a une inventivité propre, et atoutes les armes pour se battre, se développer, et releverce défi.Sortons du fantasme, et jugeons sur des résultats, quiseront, j’en suis persuadé, au rendez-vous rapidement.En résumé: les propositions ou les constats qui sedégagent :- Sur le plan de la législation, il y a clairement un appelà la stabilisation. Il ne faut pas supprimer des dispositifsavant que les nouveaux outils ne soient mis aupoint, afin de pouvoir organiser, à temps, concertationet coopération entre tous les acteurs intéressés.- Sur les partenariats, le souhait est d'atteindre davantagede cohérence entre acteurs, notamment villes etdépartements. En ce qui concerne le département etla Région il est nécessaire d'établir une relationconfiante, opérationnelle, et bien construite. En cequi concerne les CCAS et les départements le souhaitest exprimé de disposer d’un cadre harmonisénationalement (accord-cadre ADF-UNCCAS)- Sur les pratiques et dispositifs à promouvoir, plusieursaxes sont à développer :- amélioration des méthodes de travail des intervenantsdes départements- travail en réseau avec l’ensemble des référents insertion,- choix d'un interlocuteur ou référent unique tout aulong du parcours du demandeur, ce parcours étantconstruit avec lui,71


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCES- élaboration d'un diagnostic pertinent, pluripartenarialet pluridisciplinaire (avec au moins un travailleursocial et un spécialiste de l’insertion professionnelle).Cette étape est tout aussi fondamentale que l’évaluationou le choix du référent unique, mais elleest surtout celle qui engage l’avenir du demandeur,- évaluation des résultats obtenus et diffusion à tousles acteurs concernés- mise à disposition dans les conseils généraux, autantqu’il est possible, d’équipes spécialisées,- mise en œuvre d'une politique de qualification etpas seulement de formation, pour anticiper les besoins,en s’appuyant sur des expériences validées, en développantla validation des acquis de l'expérience, descontrats d’objectifs entre le département- chef de filereconnu de l’insertion -, et les autres acteurs, en particulierla Région certes, mais aussi les communesdans leur rôle d’organisatrices dans la proximitéde dispositifs de solidarité et de réinsertion.- instauration de lieux d’accueil unique (exemples: Paris, projet de Maison de l’Emploi de la CUde Brest), pour une prise en charge globale des personnes,ConclusionsGisèle Stievenard, Maire-adjointe de ParisLe RMI remplit son rôle de filet de sécurité, et concerneun public très hétérogène, avec la nécessité deporter une égale attention aux entrants et à ceux depuislongtemps dans le dispositif. Il est le révélateur deproblématiques lourdes, plus larges, et tend à se substituerà l’assurance chômage.Nous constatons que les collectivités locales fontleur travail, mais ont encore une marge de progrèsdevant elles.Claude Jeannerot, Président du Conseil généraldu DoubsTrois points me paraissent importants :- il faut lever les freins à l’insertion professionnelle,et sociale; ce travail est devant nous.- il faut revisiter le protocole des parcours d’insertionprofessionnelle des bénéficiaires pour le rendreplus efficient, et en réorganisant le partenariat.- enfin il faut que le département place l’insertion aucœur de toutes ses politiques, au cœur de ses chantiersaussi, en insérant plus de Rmistes ou de bénéficiairesde minima sociaux grâce à la clause socialedont j'ai fait pour ma part une obligation.72


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESCONFERENCE SUR LE SOUTIENAL’ENFANCE ET A LA FAMILLECo-Présidents :Christophe BECHU, Président du Conseil général de Maine et LoireJean-Louis SANCHEZ, Délégué général de l’OdasGrands témoins :Tahar BELMOUNES, Directeur de l'action sociale à la CNAFBrigitte DUFOUR, Maire-adjointe de la Ville du HavreFrançoise RAYNAUD, Présidente de l’ANCASDJean-Pierre ROSENCZVEIG, Président du Tribunal de BobignyIntervenants :Geneviève AVENARD, Directrice de la Solidarité et de la famille au Conseil général de laCôte d'OrRoselyne BECUE-AMORIS, Directrice "Enfance-famille" au Conseil général du GardJean EPSTEIN, PsychosociologueMichel GATE, Directeur général de la FNAIDAlain GREVOT, Directeur de JCLT – OISE/Groupe SOS; Spécialiste de l’approche comparativeinternationaleVéronique GUION de MERITENS, Directrice de l'Action Territoriale au Conseil généraldu Bas-RhinMarie-Paule MARTIN, Directrice "Enfance-famille" au Conseil général d'Eure-et-LoirFabienne PADOVANI, Maire-adjointe de la Ville de NantesAnita SOBLER, Directrice des actions de santé de la Communauté urbaine de StrasbourgJean-Louis Sanchez, Délégué général de l'OdasNous allons commencer à travailler sur l’amont dela protection de l’enfance. Le terme de prévenance,utilisé par nos amis Québécois, nous a été proposépar Jean Epstein: il s’agit de s’interroger sur la qualitédu vivre ensemble du voisinage. Un des enseignementsde l'affaire de pédophilie d'Angers, c’estl’indifférence des habitants. Comment transformercette indifférence en une proximité plus active et plushumaine? Sur la prévention au sens précis du terme,celle qui s’exerce auprès de populations ciblées,on travaillera sur la PMI qui a souvent du mal à s’inscriredans des démarches de territorialisation et doitpeut-être se poser un certain nombre de questionsmême si son efficacité est bien réelle. L’école, toutle monde le sait, est un lieu privilégié de préventionau moment où le communautarisme enferme les communautésou la famille. Ceci pose peut-être le problème,sans polémique, de la chance que nous avonsratée de la décentralisation du service social scolaireet de médecine scolaire. Enfin, nous aurons égalementune intervention sur un outil qu’on a sans doutetrop vite oublié, ce sont les travailleuses familialesaujourd’hui appellées TISF. En troisième partie, nousaborderons la protection au sens plus précis du terme.Nous avons le sentiment qu’il est urgent de clarifierles règles de jeu entre la justice et l’ASE, un certainnombre de rapports aujourd’hui militent pour cetteclarification.73


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESPremière partie de la conférencePRÉVENANCE : CONTRIBUER AU BIEN-ÊTREDES FAMILLESI. POUR UNE DÉFINITION DE LA NOTIONDE PRÉVENANCEJean Epstein, psychosociologueOn m’a demandé de définir la notion de prévenanceen moins de dix minutes. J’étais encorece matin dans un désarroi total et je remercie ChristopheBéchu car il m’a soufflé la réponse. Il a dit deux chosesimportantes: la responsabilité encourage l’actionet si la solidarité devient une affaire de professionnels,les choses demain seront bien pires qu’aujourd’hui.Tout cela fait écho au concept de prévenance.J’ai une formation de psychosociologue et depuislongtemps, je participe à des travaux de rechercheactionsur deux thèmes. Le premier porte le titre de «repères », la question posée étant celle des moyensnécessaires à un enfant, bébé ou adolescent, pour construiredes repères. Le deuxième interroge l’évolutiondes modes de garde et les accompagnements fait auxparents. On aborde là la notion de prévenance. Eneffet, parler repères c’est parler aussi des violencesdès la petite enfance.<strong>Mo</strong>n métier est extrêmement précis et très prétentieux.Je m’explique. Sur le plan des modes d’accueil,ça consiste à aller voir ce qui se fait au niveau des crèches,des écoles, des établissements éducatifs pourdonner un avis sur la qualité. Vaste projet! Cela supposeraitque j’ai quelque part une idée de ce qui estbien et de ce qui n’est pas bien. Or, je n’en ai aucuneidée. En revanche, j’ai un petit outil, que je vais vousdonner. Il s’agit de ce que j’appelle le triangle de laqualité. Lorsque j’arrive dans une crèche, une école,une maternité, j’utilise ce triangle. Aux trois sommetsje mets l’enfant ou l’adolescent, les parents et les professionnels.Aux trois sommets, je mets aussi B. B.C. pour Bien être, Besoins et Compétences. Indiciblementje suis en train de vous parler de prévenance. Pourquoi?Parce qu’il y a qualité au vu des compétences desparents et des enfants en tant qu’acteurs avec la priseen compte de leur Bien être, de leurs Besoins et deleurs Compétences. Mais aussi parce que les professionnelsont eux aussi besoin de Bien être, qu’ils ontdes Besoins en matière de formation d’accompagnementpar exemple et bien sûr des Compétences qui,ne l’oublions pas, ont des limites. En effet, il ne peutpas y avoir de qualité si des professionnels sont chargésde résoudre des problèmes auxquels ils ne sontpas capables de répondre.Ce triangle m’amène à parler de prévenance. La prévenancesuppose compétence et le mot clé est alors« acteur ». Le premier contact que j’ai eu avec lanotion de prévenance, c’était en 1995. Je travaille74


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESavec le Québec depuis 10 ans environ un mois par an.J’étais étonné de voir ce qui se faisait en terme sdelien social. Leurs réponses n’étaient pas forcémentles mêmes que les nôtres. Je suis « tombé en amour» comme ils disent dans un grand congrès où il y avait400 à 500 personnes et où se trouvait une grande dame,Pauline MAROI, qui était alors ministre de la famille.Dans le débat, on disait « c’est fabuleux ce que vousfaites au Québec. Quel sens vous avez de la prévention!». Le mot prévenance, je l’ai entendu dansles secondes qui suivaient. Pauline MAROI m’a interrompu.« Prévention, qu’est ce que c’est cette affaire?C’est encore un mot à la française ». Elle m’a dit :« comprenez bien que le simple fait de penser prévention,vous pensez qu’il va y avoir problème. Doncvous avez une idée des quartiers à problèmes. Vousavez presque le nom des familles à problèmes dansles quartiers à problèmes. Donc vous risquez de voirdes problèmes là où il n’y en a pas et de ne pas en voirlà où il y en a peut-être ». Il y a quelques années, JeanPierre ROSENCZVEIG me disait qu’il voyait autantde problèmes dans les milieux aisés que dans lesmilieux défavorisés, à la différence près que dans lesmilieux aisés les murs sont plus épais. Il y a les mursde l’habitat, il y a aussi les murs qu’on a dans la tête.J’ai demandé comment ils définissaient la prévenance.C’est difficile parce que ce n’est pas un concept, c’estplus un état d’esprit. Pour simplifier la tâche, jevais reprendre la formule de Boris CYRULNICKquand il a construit la notion de résilience. Il y a audépart une phrase très simple « être capable de reconstruireune histoire après une déchirure ». Cela paraîtune petite chose, c’est une énormité. La prévenancepeut se résumer d’une façon aussi simple. C’est « faireavec et non pas faire pour » et c’est aussi « faire à plusieursce qu’on ne peut pas faire seul ». S’il fallaittrouver des synonymes, on pourrait dire « lien social,citoyenneté, solidarité ». Cela ressemble à des évidencesqui de fait n’en sont pas. On pourrait ajouter« vivre ensemble », ou même « Bientraitance »,un concept cher à l’ODAS, ou encore « partenariat etréseau ». Restons un instant sur « réseau » : sommesnousprêts à vraiment travailler en réseau?C’est vrai que cette notion de prévenance est une vraierévolution, il faut qu’elle s’inscrive dans notre culture.J’ai dit que la prévenance c’est faire à plusieursce qu’on ne peut pas faire seul, c’est créer du liensocial. Nous avons été formatés en Europe et en Francedans une logique de manques, une logique consommatrice.On part du principe que l’autre a des manqueset comme nous on est bon, on répond à ses manques.La logique des manques c’est fabriquer de la consommation.La logique de prévenance c’est le contraire,c’est rendre chacun acteur, c’est promouvoir la logiquede compétences, c’est faire en sorte par exemple queles parents s’investissent dans des projets. C’est sedemander: quelle place sont-ils prêts à prendre, quelleplace les professionnels sont-ils prêts à leur laisser?Les villes ont un rôle tout à fait important dans cesens-là et doivent être motrices. J’ai hâte de voirles CAF, la PMI devenir plus opérationnelles ensemblepour agir avec les parents. Voici un exemple deprévenance: les femmes se sont mises à travailler auQuébec et il fallait que les enfants mangent à midi.Logique de manque: on fabrique des restaurants scolaires.Mais très vite de plus en plus d’enfants viennentà la cantine, alors on fait deux services. A unmoment donné un élu est obligé de dire qu'il suffiraitd’interdire la cantine aux enfants dont les deux parentsne travaillent pas. Vaste fumisterie parce qu’il y a desenfants dont les deux parents ne travaillent pas et quiont tout intérêt à manger à la cantine. Par ailleurs, desenfants dont les parents travaillent peuvent ne pasmanger à la cantine s’il y a d’autres réponses. Logiquede prévenance? créer des réseaux. Au Québec, il n’ya pas de restaurants scolaires, pourtant les femmestravaillent parce que les élus ont subventionné desassociations de personnes en retraite pour venir chercherdeux ou trois enfants et les emmènent manger àla maison. On est dans du lien social. Comme ils disent« à travers la prévenance, on transforme un problèmeen un plus de proximité ». Comme ils sont trèsméchants, ils disent « en France vous avez des politiquesintergénérationnelles, vous emmenez les enfantsdes crèches visiter l’hospice. Ça doit leur faire peur! ».Dans nos échanges, nous pourrons développer toutcela. En France, on est en marche, certaines villescomme Nantes ont très bien compris que penser ences termes c’est aussi influencer le marché du travail.75


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESII. L’ EXPÉRIENCE DE LA VILLE DE NANTES ENMATIÈRE DE POLITIQUE FAMILIALEFabienne Padovani, Maire Adjointe de laville de NantesLa Mairie c’est la maison commune, de touset de toutes et c’est dans cet état d’esprit qu’ona choisi de travailler et de décliner la politique de lafamille sur la ville de Nantes. Les politiques en directiondes familles sont au service du lien éducatif.Nous travaillons pour conforter l’autorité parentale,nous accompagnons dans leur responsabilité éducativeles parents et nous travaillons à soutenir lelien parents/enfants en respectant le libre choix familial,point fondamental, avec des services adaptésaux réalités des familles et à leur évolution. Cecise concrétise par une offre éducative pour les 0/18ans et des réponses concertées avec les parents, lesassociations, les professionnels. En tant que maireadjointe en charge de la petite enfance et de la familleet avec les conseillers municipaux qui m’accompagnent,cela se traduit en particulier par beaucoupde temps de discussions et d’échanges, mais cetemps est toujours fructueux et intéressant.Nantes aujourd’hui: la population a augmentéde 11 % entre les deux derniers recensements.Le nombre de famille est resté stable. On compte35000 familles, qui ont 1,9 enfant en moyennesoit au total 65 000 enfants. Les familles detrois enfants et plus ne représentent que deuxfamilles sur 10 et une famille sur 4 est monoparentale.On constate le départ des jeunesménages vers la périphérie comme dans la plupartdes villes centre. Depuis quelques annéesdéjà, la famille a connu de profondes modifications.Vous les connaissez: diversificationdes formes familiales, transformation durôle des pères et des mères, développement del’activité féminine. La ville de Nantes a commencéen 1995, à travers sa politique familiale,à accompagner l’accueil de la petiteenfance. Sur les 19 900 enfants de moins desix ans, la moitié a moins de 3 ans et 40 % desmères travaillent. Nous avons doublé le nombrede places en crèche avec 2600 places aujourd'huice qui correspond à 20 % des modes d’accueilde la petite enfance, le tout réparti en 50établissements; nous disposons de 2400 placeschez les assistantes maternelles du conseilgénéral, ce qui assure un équilibre. Tout notretravail est de préserver ces deux modes d’accueilpour que chaque famille puisse disposerd’un choix correspondant à sa volonté.L’accueil de la petite enfance étant en place, nousélargissons maintenant notre champ d’action. Enpréalable, nous avons défini la famille comme étantla cellule dans laquelle un ou plusieurs adultes onten charge la responsabilité juridique, affective, éducativeet économique d’un ou plusieurs enfants âgésde moins de 18 ans. Les liens conjugaux se diversifient,deviennent plus personnels et sont parfoisprécaires, il est donc nécessaire de passer à la notionde parentalité et d’épauler les parents dans l’exercicede leurs responsabilités. Ceci se traduit par uncertain nombre d’actions concrètes. Nous avons nousaussi les réseaux d’aide, d’appui et d’écoute pour lesparents. Nous avons aussi sur les quartiers des actionspasserelles dans les écoles, comme un point rencontreavec l’UDAF pour le maintien du lien père/enfant.Les parents peuvent se retrouver entre eux, accompagnésou non de professionnels en fonction de leurchoix, en fonction des thèmes qu’ils veulent évoquer.La ville développe aussi, suite aux demandes desparents, des actions sur la relation avec les adolescents.Nous avons le projet d’une maison des adolescentsà l’image de ce qui se fait à Marseille. Ony travaille avec le conseil général. Il s’agit d’un lieud’accueil qui favorisera, si besoin, le relais avecles structures de soins idoines en cas de nécessité.Pour que cela fonctionne, il faut construire lesrelations avec l’hôpital, la CAF, le conseil généralet toutes les associations qui oeuvrent dans le domainede l’enfance et de la relation à l’enfant.Pour nous, l’éducation est une responsabilité partagée.Nous récusons complètement l’idée que lesparents soient démissionnaires. La plupart des enquêtesmontrent que les parents sont pleinement cons-76


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCEScients de leurs responsabilités éducatives et les assument.Simplement, ils éprouvent des difficultés pourplusieurs raisons: interrogation sur l’exercice de l’autoritéparentale, sur les valeurs, sur les repères. En2004, nous avons mis en place sur Nantes régulièrementun carrefour des citoyens, moment de rencontreavec les habitants. Nous avions un thème quenous avions voulu volontairement provocateur « Etreparent: mission impossible ». Il est apparu que si lesparents sont confiants dans le cadre familial, dans lerôle de l’école, ils éprouvent des inquiétudes sur l’influenceextérieure: rôle de la télé, Internet, publicité,dégradation de l’environnement. Ils se disent aussiparfois dépassés par leurs adolescents. D’autres embûchesbien sûr comme l’isolement, le chômage, la différenceculturelle, accentuent les craintes. Cela nousoblige en tant qu’adulte, enseignant, animateur, professionnelde l’enfance, habitant de quartier, à travailler,sur des solutions actuelles et réelles. Ceciimpose d’inclure dans notre politique l’évaluationpermanente. Nous avançons dans le cadre de contrats,en particulier avec la CAF : contrat éducatif local,contrat enfance avec le développement des modesd’accueil, renforcement de la politique jeunesse avecle contrat temps libre. Mais aussi de façon plus simple,par exemple l’ouverture des gymnases pour queles enfants puissent s’y rendre, les parents sachantque sur place il y a l’animateur sportif pour lesaccueillir. On essaie d’être au côté des familles enchoisissant de travailler sur la cohérence de lapolitique éducative sur l’ensemble du territoire, enfonction de la spécificité et des besoins de chaquequartier. Dans les conseils d’école, nous sommesforts présents en tant qu’élus, ainsi que dans lesconseils d’établissements, dans les crèches, dans lesconseils d’usagers, dans les centres sociaux maisaussi sur des temps forts comme des rencontres avecl’ensemble des parents d’élèves avec des journéesthématiques. Tout cela a un but : bien vivre dans saville.Vous l’avez dit, la prévenance ce n’est pas seulementce qui concerne l’action sur l’éducation. Cela peutêtre le développement de tout ce qui est politiquetarifaire en matière culturelle, ou encore faire venirdes spectacles comme Royal de Luxe, vrai momentde communion familiale: le dernier spectacle a attiré100 000 personnes dans les rues de Nantes. C’estaussi développer les transports, faire que la ville soitaccessible partout et pour tous, veiller à l’amplitudedes horaires d’autobus.Les attentes des familles sont fortes et nous travaillonsen s’appuyant sur des enquêtes. J’ai envie de vousciter quelques résultats de l’enquête du CREDOC etune enquête que nous avons menée en 2003 sur l’extensiondes accueils périscolaires: 40 % des famillesont répondu. La demande des familles porte essentiellementsur des services accessibles à tous, et passeulement en termes d’aide financière.Pour finir, je voudrais insister sur le fait que cettepolitique ne pourrait pas voir le jour s’il ne s’agissaitpas d’une politique partenariale avec les associations,avec le conseil général mais aussi avec laCAF. Sans la CAF, les actions développées dans laville de Nantes n’existeraient pas de façon pérenne,constructive et régulière. La participation représenteenviron 30 % du coût des politiques familiales.DEBAT AVEC LA SALLEBrigitte Dufour, Maire-adjointe de la villedu HavreIl est vérifié en effet que les villes sont les premièrescollectivités en contact avec les parents. Les villesont une mission de prévenance, une mission d’écoute.Elles ont la possibilité de travailler en réseau.Elles peuvent mettre en place avec le départementdes structures communes et travailler en liens étroitsavec les associations qui ont une implication trèsforte dans les grandes villes. Par exemple elles peuventcréer des lieux d’accueil où il y a à la fois laPMI et la CAF, lieu où les parents se posent avecplaisir et peuvent évoquer les difficultés qu'ils rencontrent.Christophe Béchu, Président du conseil généralde Maine et LoireIl y a quelques semaines, j’ai eu l’occasion d’allerdans une ludothèque, soutenue par la ville d’Angers,comme cela se passe dans d’autres villes. L’animatriceinsistait sur le fait qu'il faut apprendre à jouer àdes enfants. La diminution du nombre d’enfants dans77


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESles fratries fait qu’il n’y a pas la même émulation, latélévision meuble et occupe l’espace. Or le jeu estabsolument essentiel dans la construction de la personnalitéd’un enfant, à la fois parce qu'on est dansun échange social et parce qu'on va essayer de dépasserl’autre, de se construire. Le soutien aux ludothèquesest quelque chose qui peut apparaître dérisoiremais qui, de fait, est très important.Denise Cacheux, présidente d’un centre social àLille Sud et administratrice des centres sociauxdu Nord, Présidente de l'ETSUPLa philosophie des centres sociaux c’est que lesfamilles se prennent elles mêmes en charge, se construisent,fassent des choix et montent des actionsavec le support de professionnels. Or, j’ai une inquiétudecar on est actuellement en pleine renégociationdu contrat d’objectif de la CNAF et nous ne savonsrien du financement des centres sociaux pour bâtirles budgets de l’année prochaine et permettre auxfamilles de bâtir leurs propres projets.Jean-Loup Englander, conseiller général del’EssonneJe voudrais dire que toute mon expérience aboutit àmettre en avant la notion de prévenance. Je me batsmais je suis un peu isolé, pour une prévention trèsen amont, c’est-à-dire la prévenance. Je suis d’accordavec Claire Brisset: les conseils généraux, saufexception, dépensent de l’argent qu’on pourrait sansdoute mieux utiliser en mettant l’accent sur toute unesérie de structures, les centres sociaux avec la CAF,les points d’écoute pour les parents, la préventionspécialisée qui est trop peu développée dans beaucouptrop de départements, (l’Essonne fait exception).Je voudrais mettre l’accent sur la PMI qui dansbeaucoup de départements est une grande oubliée,très en retard sur l’évolution de la population dansles départements en croissance comme l’Essonne,ou sur toute l’évolution des difficultés des famillespour des raisons économiques, psychologiques, éducatives…Je voudrais mettre l’accent sur le travail àplusieurs en réseau ou non, mais aussi sur le fait quecertaines familles sont suivies par 5, 6 10 parfois jusqu’à12 travailleurs sociaux ! Il pourrait y avoir uncertain partage du travail pour mieux suivre et aiderles familles. Les sommes que l'on consacre à la réparationsont des sommes folles, de l'ordre de plusde 5000 euros par mois pour « balader » les enfantsentre structure et famille.Jean Epstein, psychosociologueJe me permets d’insister sur le fait que la prévenanceest un concept de proximité, c’est très local, cela doitgénérer des micro-projets parce que cela doit répondreà des micro-besoins de proximité. Il n’est pascertain que le conseil général ait un grand rôle parrapport à la prévenance. Les choses se passent auniveau de la ville, d’un quartier. Enfin, j’ai plaisantéautour de la notion de réseau, non pas en les critiquant,j’y crois très fort, ce qui fait fonctionner laprévenance, ce sont les réseaux de réseaux. Le danger,c’est que chacun soit enfermé dans un réseauhermétique. Or, nous avons en France quelque chosequi fait vivre la prévenance, ce sont les associationsfamiliales. Parce que je suis intimement persuadéque les parents sont les premiers éducateurs, depuisquelques années j’ai rejoint le mouvement familialen tant que chercheur pour voir les micro-projetsdans lesquels les parents sont acteurs. À ce titre, jesuis atterré de voir le nombre de choses formidablesqui se font et qu’on ne sait pas assez. Le problèmeest celui de la lisibilité, non pas pour dupliquer maispour le faire savoir et donner des idées. Ici, à Marseille,j’ai rencontré une association qui s’appelle Christophe.Ce sont des parents endeuillés suite au suicided’un de leur jeune et qui font des groupes de parentspour rencontrer d’autres parents qui se retrouventdans cette situation et qui vont dans des collèges rencontrerdes jeunes pour leur parler des conduites àrisques. À Lille, il y a une association qui s’appelleTélé en or : j’ai rencontré des parents qui seretrouvent pour parler des programmes de télévisionentre eux et savoir comment en parler avec leurs jeunes.Des exemples comme cela, je peux vous assurerqu’il y en a des milliers mais qu’on ne le sait pasencore et c’est un peu dommage. La prévenance, cen'est pas forcément très grand.Christophe Béchu, Président du conseil généralde Maine et LoireJe pense qu’il y a une confusion. La compétence desconseils généraux concerne la prévention et laprotection, ce qui est donc différent de la prévenance.C’est par exemple le système de transport en communde Nantes. C’est l’exemple avec l’ouverture desgymnases ou autres équipements sportifs, c’est la78


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESprésence de lieux d’écoute. Pour rebondir sur le nombred’intervenants sociaux, c’est la question des compétencesprofessionnelles. Est-ce qu’une conseillèreen économie sociale et familiale fait le même travailqu’une assistante sociale ? Par ailleurs, ce que jetrouve profondément injuste dans le rapport de ladéfenseure des enfants et dans votre intervention,<strong>Mo</strong>nsieur Englander, c’est le fait de dire que les départementssont en dessous de tout. Je vous invite àregarder d’où nous sommes partis. Demandez vousce que l’Etat aurait fait s’il avait conservé cette compétence.Claude Roméo, Directeur enfance famille auConseil général de Seine-Saint-DenisJe connais le travail qui est fait dans l’Essonne enmatière de prévention. Au moment où il y a médiatisationde la protection de l’enfance, ce n’est pas lemoment d’avoir des états d’âme sur le fait que lesdépartements ne feraient pas ce qu’il conviendraitde faire ou donner l’impression au public qu’il yaurait un gaspillage d’argent public. Néanmoins,je suis d’accord avec vous sur le fait qu’on dépensetrop d’argent. Je vais vous dire où : on en dépensetrop parce que la PJJ ne prendra plus de jeunes majeurs,parce que la pédopsychiatrie est incapable de répondreà nos préoccupations, parce que les mineurs isolésne sont pas de notre compétence mais que c’estnous qui payons, parce que la santé scolaire ne faitpas face aux besoins. Ceci étant, cela n’exclut pasl’obligation de se poser la question de l’évolutiondes pratiques professionnelles et je fais partie de ceuxqui pensent que la loi d’orientation de 1989 est complètementdépassée et qu’il est temps qu’on se metteautour d’une table pour avoir une nouvelle loi sur laquestion de la protection de l’enfance.Jean-Louis Sanchez, Délégué général de l'OdasJe voudrais rétablir un déni de justice par rapportau conseiller général de l’Essonne. Il n’a pas dit queles conseils généraux ne faisaient pas leur travail, ila simplement soulevé le problème de la place descentres sociaux dans la prévenance et celui du soutienaux centres sociaux. Jean Epstein a raison, on estcréatif en France mais cela reste de l’anecdote. Toutela question est de savoir comment transformer cesinitiatives en de véritables politiques publiques, commesavent le faire quelques départements et quelquesvilles. Deuxième question, la place des centres sociaux.Je suis de ceux qui pensent que les centres sociauxavaient un rôle privilégié à jouer, que malheureusementon les a instrumentalisés avec la gestion dedispositifs et qu’aujourd’hui ils ne sont plus en capacitéde promouvoir l’éducation populaire. On perdainsi des outils précieux pour réconcilier les Françaiset la citoyenneté. Je crois que les départements, mêmesi ce n’est pas leur compétence stricto-sensu, ont toutintérêt à épauler les centres sociaux parce qu'1 euroversé à un centre social, c’est autrement pertinent quede verser un 1 euro à la protection de l’enfancedont le coût a doublé par enfant. Et c’est vrai aussides CAF qui ont tout intérêt de maintenir cet outil ;encore faut-il que les centres sociaux ne se bureaucratisentpas, parce qu'aujourd’hui comme dans toutle reste, on n’est plus aujourd’hui sur des logiques demissions mais sur des logiques étroites de métiers cequi explique peut-être pourquoi les centres sociauxont été si facilement instrumentalisés.Jean-Pierre Rosenczveig, Président duTribunal pour enfants de BobignyIl faut bien se garder d’opposer l’Etat aux conseilsgénéraux. Il ne s’agit pas non plus de jouer le présentcontre l’histoire. L’enjeu est d’identifier lesresponsabilités des uns et des autres, d’articulerles moyens avec les objectifs. Il nous faut sortir desaffrontements. Même avant la décentralisation, il sefaisait des choses extraordinaires. Comment articulerles 5 niveaux de responsabilité publique entreeux : l’Europe, l’Etat, la région, le conseil général,les municipalités? Deuxième point: les responsabilitésparentales. On a bien identifié le rôle des parents,on a eu raison de dire qu’ils n’étaient pas démissionnairesmais démissionnés plus souvent qu’à leur tour.Je voudrais souligner le fait que, dans le même temps,les gens sont parents et assument la responsabilitédes personnes âgées. La difficulté est alors de gérerplusieurs problèmes à la fois. Dans la définition quevous avez donnée de la famille, vous l’identifiez dansle rapport des adultes à l’égard les enfants. Aujourd’hui,c’est plus compliqué que ça. Ce sont des rapportsentre ascendants et descendants qui sont réciproquementen situation de solidarité. Si on ne prend pasen compte la pluralité des difficultés auxquellesles gens sont confrontés, on comprend mal pourquoiils répondent mal à un problème. Dans certaines asso-79


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESciations, j’en préside une dans les Yvelines, les problèmessont pris de façon transversale, le problèmedu père, de la mère, du grand père, du logement,psychiatrique, financier, etc. L’expériencedémontre que lorsqu’on arrive à soutenir les gens,dans la prise en compte dans le même instant de l’ensembledes problèmes, ils arrivent à se rendre autonomesdes services sociaux. Il faut réunifier la vie.C’est peut-être à l’échelon territorial qu’on peut lefaire.III. L’'ACTION SOCIALE DES CAFTahar Belmounes, Directeur de l’actionsociale de la CNAFLe concept de prévenance me laisse perplexe.Est-ce que c’est un concept nouveau, un dispositifde plus, un mot à la mode pour dire des chosesque l’on faisait déjà? Par le dialogue, on se rendcompte dans les CAF que nous sommes déjà inscritsdans cette logique. Nous devons participer par unecertain nombre d’initiatives de nos professionnels,par la mobilisation des moyens et des partenariats,à cet “agir ensemble” qui doit permettre, en s’appuyantsur les habitants et sur les familles, de faireen sorte que celles-ci soient parties prenantes dansl’identification des problèmes et leur solution.On a cité un certain nombre d’initiatives dans le cadredes responsabilités des CAF, notamment contractuellesavec les communes. Pour pouvoir agir defaçon préventive et dans la logique de prévenance,il me semble important d’insister sur le travail dediagnostic qui doit être fait le plus en amont possiblede telle sorte qu’on puisse se donner les moyensd’observer ce qui se passe sur les territoires. Puisqu’onparle de prévenance et avec ce qui s’est passé à Angers,nos diagnostics devraient avoir une épaisseur humaineplus importante que le travail sur les chiffres quenous sommes déjà conduits à faire ; nous devrionsréfléchir à des indicateurs plus qualitatifs pour étofferet être mieux en situation de cerner les risques,particulièrement dans des secteurs plus ou moinsreculés ou parfois visibles mais dont les portesrestent fermées.Les CAF s’appuient et veulent développer la logiquede diagnostic partagé puisque c’est le support initialde la contractualisation. Sur cette question, nousavons certainement à progresser. Les contrats encours fonctionnent mais nous devrions, avec nos partenaires,dépasser la logique de contrats thématiques,verticaux, spécifiques et réfléchir à une logique decontractualisation territoriale. À partir du diagnosticpartagé, nous pouvons étoffer nos différentes interventionset compétences, essayer de déterminer unpartenariat plus politique, impliquer les conseils généraux,nous assurer que malgré la richesse des compétences,il n’y a pas des trous dans lesquels certainesfamilles peuvent tomber. Nous avons déjàprogressé. Nous sommes partis des contrats crèchepour aboutir à ce qu’on appelle désormais les contratsenfance. Construire une politique petite enfance, c’estbien autre chose que de se contenter d’ouvrir des berceaux.Quand j’évoque un contrat territorial, c’estpour pouvoir élaborer une politique sociale coordonnéeet cohérente sur un territoire. Nous avons en tantque CNAF à réfléchir sur les prochaines conventionset sur une approche plus globale, plus large, denos interventions territoriales. Pour la prévenance,je retiens que c’est un état d'esprit. A partir de là, ilest important de pouvoir « réseauter » comme disentles Québécois et que chacun assume son registreet sa partition en veillant à l'articulation avec lesautres.80


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESEn ce qui concerne la prévenance, je voudrais termineren disant que j’ai une sorte de prévenance surle concept et sur l’état d’esprit. C’est tellement idéaldans la présentation, tellement évident: or, attentionaux fausses évidences. En ce qui concerne les conseilsgénéraux, il y a à faire la différence entre les compétences,les responsabilités légales et les contributionsde chacun. La prévenance c’est aussi être attentifaux responsabilités des uns et des autres. Les CAF,par exemple, ne sont pas juridiquement compétentesen matière de protection de l’enfance mais ellesne peuvent pas ne pas être complètement impliquéesdans tout ce qui concerne l’enfance.J’espère que pour l’avenir, notamment pour les centressociaux et les contrats, nous serons en situation,dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestionque nous négocions en ce moment avec l’Etat,de continuer à avoir les moyens financiers pour lefaire. Nous allons avoir des choix importants à faireparce qu'économiquement le contexte est difficile.DEBAT AVEC LA SALLEBernard Soula, Vice-Président, Conseil généralde l’AriègeL’Ariège est un petit département. Depuis tout à l’heure,on parle de politique de la ville, et des quartiers. J’aiun peu l’impression de ne pas exister. Heureusementqu’il y a la CAF qui vient de parler mais c’est unpeu inquiétant parce que je me dis que c’est bien lesdépartements ruraux qui ont besoin de cet argent et dece partenariat. Nos ressources propres ne permettentpas de développer ce qui se fait sur Nantes. J’ai le sentimentque le monde rural est un peu oublié parfois. Jesuis complètement d’accord sur la notion de travail enréseau et notamment de politique territorialisée avecle contrat éducatif local qui me semble être un outilintéressant à partir du moment où on l’appelle politiqueéducative locale. En Ariège, on a commencé àtravailler avec la CAF mais aussi avec la Jeunesse etles sports ainsi que les communes parce qu’on a le sentimentque la dynamique territorialisée autour de l’éducationest essentielle. Il semble qu’il manque l’éducationnationale. Si ce partenaire n’est pas mobilisésur les politiques de prévenance et de prévention, et ilne peut être mobilisé que par l’Etat, nous allonsavoir du mal à avancer de façon cohérente, coordonnéeet en partenariat efficace.Nicole Clément, Directrice de l’action sociale villede Saint Rémi (Saône et Loire)Il me semble que pour mettre en place la prévenancesur un territoire, il y a 3 conditions : la première,c’est une véritable volonté politique, la deuxième c'estun véritable partenariat entre l’ensemble des acteursinstitutionnels et politiques. Enfin la troisième conditionc'est une véritable mutation des pratiques professionnellesde l’ensemble des acteurs de terrain, des travailleurssociaux, des enseignants, des animateurs, detous ceux qui interviennent directement auprès despublics pour que chacun travaille pour et surtout avecles familles.Eve-Marie Jeandemange, Directrice du CCAS, villede NancyÀ Nancy nous avons 100000 habitants, 900 places enaccueil collectif, familial ou parental. J’ai bien entenduce que disait le représentant de la CNAF et les difficultésque vous aurez à financer une partie de l’actionsociale. Je me pose une question: les CAF nous imposentde mettre en place dans le système de garde laprestation de service unique et donc de tarifer la présencedes enfants à l’heure. Nous tentons de le faire,nous sommes à notre troisième renouvellement quinquennalavec la CAF, les relations sont très bonnes,mais il me semble que cette mesure n’a pas été priseen connaissance de cause. Imaginez que certaines structuresqui ont une capacité de 80 enfants voient quelquefoisdéfiler par journée 130 ou 140 enfants sanspossibilité de personnel supplémentaire. Demander auCCAS et à ses gestionnaires de tarifer à l’heure la présencedes enfants est impossible!Tahar Belmounes, Directeur de l’action socialede la CNAFEn ce qui concerne le monde rural, nous avons vocationà agir sur l’ensemble du territoire, et nous essayonsde construire une politique équilibrée avec la contributionde la MSA. Pour ce qui concerne la politiquefamiliale et notamment les territoires ruraux, l’offre deservices et d’intervention n’est pas la même. Il peuty avoir des difficultés qui sont encore plus grandes quesur certains territoires urbains. Je peux vous affirmer81


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESque notre intervention vise à couvrir l’ensemble desterritoires et à nous inscrire dans une politique duterritoire avec tous les acteurs. Je ne voudrais pas quede mon propos on déduise que les CAF n’ont plusde moyens financiers pour l’avenir. Rassurez vous,nous ne sommes pas dans une situation de pénuriecomplète. Je dis ce qui est. Nous aurons à faire deschoix et faire en sorte de respecter nos engagements.C’est de notre responsabilité de faire ces ajustements.Nous n’avons pas conçu la PSU pour faire des économies.Sur ce dispositif, il est de notre responsabilité deveiller à la mise en oeuvre de nos interventions sociales,à l’optimisation des moyens. Nous faisons en sorteque le contrat respecte les horaires atypiques, les rythmesde vie et qu’autant que possible la famille paye lejuste prix. Il y a trop de situations précédentes où ily avait des familles qui se voyaient imposer un formatpré-établi d’accueil, dans lequel elles devaient rentrerparce que la pénurie était telle qu’il n’y avait pas dechoix. Nous développons la logique du multi-accueil,c'est-à-dire éviter la spécialisation des équipementspour tenir compte de la diversité des demandes desfamilles.Jean-Louis Sanchez, Délégué général de l'OdasSi on a séparé prévenance et prévention, c’est parcequ’il nous paraît important, et c’est une des missionsde l’ODAS, de redéfinir les principaux concepts. Laprévenance n’est pas un concept, c’est un état d’esprit.On parle de développement social quand on parle deprévenance. L’ensemble des politiques publiques doity concourir. C’est pour cela qu’on ne parle pas simplementde l’accueil de la petite enfance, on parle ausside la péri-scolarité, du sport, de la culture, maisaussi de la refondation du travail social et de la remobilisationdu bénévolat et des habitants autour du vivreensemble. Il nous paraît intéressant de bien montrerles trois niveaux de la protection de l’enfance: la prévenance,la prévention et la protection.Parlons donc maintenant de la prévention. On dit partoutque la PMI joue un rôle déterminant en matièrede prévention alors que je ne suis pas certain qu’onsoit dans chacun des départements de France aujourd’huidans la même lecture de son rôle. D’autre partselon la conception que l’on a de la PMI, protectiontrès ciblée ou protection beaucoup plus large, on nesait plus très bien si la PMI revient aux départementsou aux municipalités, en particulier dans lesgrandes villes. Il est clair qu’autant le principe de subsidiaritédoit s’appliquer pour les grandes agglomérations,autant le rôle des départements reste tout à faitprédominant y compris en matière de développementprimaire et de développement social dans tous les territoiresdans lesquels il n’y a pas compétition entre unegrande ville centre et département. C’est la raison pourlaquelle on pose comme première question celle de la« municipalisation » de la PMI, parce que nous pensonsqu’il est utile de s’interroger sur les quelques expériencesen ce sens. Lorsqu’on a une vision transversaledu rôle des villes, on ne peut pas se contenter deleur donner un rôle d’accueil collectif sans leur donnerles moyens de la responsabilité de l’accueil individuelse traduisant notamment par le contrôle desassistantes maternelles. Se pose une véritable question:est-ce qu’il est plus important de créer aujourd’-hui des liens étroits entre municipalité, PMI et accueilparticulier à travers les assistantes maternelles ou aucontraire faut-il surtout préserver le système actuel, nepas le déstabiliser? Nous nous demanderons ensuitesi le travail social aujourd’hui les conditions d’épanouissementqui lui permettrait de retrouver sa vocationà fabriquer du social plutôt qu’à s’enfermerdans des dispositifs et du travail administratif. Et enfin,parce que c’est aussi une manière de traiter la deuxièmequestion indirectement, est-ce qu’il n’y a pas aujourd’huiau-delà du travail social dit canonique, d’autresmétiers qui coopèrent d’une manière plus prochedes familles, dans une politique de prévention? Je penseaux techniciens de l’intervention sociale. Ce quipeut paraître paradoxal c’est le fait que tous les outilsqui travaillent efficacement, les centres sociaux pourla prévention primaire, les techniciens en interventionsociale pour la prévention secondaire, se trouventles plus déstabilisés, les plus fragilisés par les différentesréorganisations des financements publics.82


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDeuxième partie de la conférencePRÉVENTION : S'ORGANISER POUR REPÉRERET TRAITER LES NOUVELLES PROBLÉMATIQUESDES FAMILLES VULNÉRABLESI. UNE ACTION CONCERTÉE VILLE/DÉPARTEMENT :L’EXEMPLE DE LA PMI À STRASBOURGAnita Sobler, Directrice des actions de santé dela Communauté urbaine de Strasbourg etVéronique Guion de Meritens, Conseilgénéral du Bas-RhinCette délégation de compétences est l’élémentfondateur des relations qui lient aujourd’huila ville et le département en matière d’aide socialeet médico-sociale. Le souhait est aujourd’hui de formaliserdavantage le partenariat par le biais d'uneconvention signée le 19 mars 2005.L’objectif, s’inscrivant dans la ligne politique du Bas-Rhin intitulée « Hommes et territoires », est de renforcerles relations entre les deux collectivités en clarifiantles responsabilités et les rôles de chacun,d’améliorer la lisibilité des missions relevant de lacompétence du département et de faciliter le travailen réseau des professionnels de chaque institutiondans le but d’améliorer la qualité du servicerendu à l’usager. Les deux collectivités constatentque leur environnement est marqué par une sur représentationdes minima sociaux, un indice de chômageélevé et un poids de difficulté d’habitat, de santé, devie quotidienne particulièrement prégnant dans certainssecteurs. Pour le conseil général du Bas-Rhin, la délégation trouve là tout son intérêt. Ellepermet une meilleure articulation des compétencesdéléguées par le département avec d’une part lesdélégations ou habilitations de l’Etat à la ville enmatière de santé scolaire, de tutelle aux majeurs protégéset d’enquêtes sociales pour le juge des enfants,et d’autre part ses compétences propres notammenten matière d’aide sociale locale, de soutien administratifet d’accès aux droits ainsi que d’accueil de lapetite enfance. Le département et la ville peuventainsi développer au bénéfice des habitants une interventionsociale et médico-sociale répondant à unmaximum de besoins. Cette intervention s’appuie,en regroupant au sein des unités territoriales des équipespluri-professionnelles sous une même coordination,sur l’ensemble des services municipaux et communautairesoeuvrant pour la promotion de la protectiondes personnes, sur la richesse de la vie associativeet sur le bénévolat. Cette convention porte délégationdes missions du service social départementald’action sociale, une délégation de compétencesen matière d’insertion, en matière d’aide sociale àl’enfance et de PMI.Le département définit ses stratégies sociales etses orientations au travers des schémas départementauxet des démarches et réflexions relevant de sesdomaines de compétences à l’élaboration desquelsla ville est associée. Il apporte des moyens financiers,compense les frais de personnel et de fonctionnementengagés par la ville au titre de l’ensembledes compétences déléguées. Il fournit à la ville lesdonnées actualisées permettant de situer la ville parrapport à l’ensemble du département, il organise desrencontres annuelles entre les services départementauxet les services municipaux intervenant en matière83


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESde protection de l’enfance, de la PMI, en vue de définirles procédures, de partager l’information et demettre en place des actions de prévention. Pour laville, il s’agit d’exercer les compétences déléguéespar le Conseil Général. Elle est responsable de l’organisation,du fonctionnement, du management desprofessionnels. Elle doit bien sûr fournir les donnéesstatistiques nécessaires et définit évidemment sesorientations relevant de ses compétences.Le contexte : la population du Bas-Rhin estde 1026000 habitants dont 26 % vivent sur laville de Strasbourg. 12 600 naissances dont31 % sur la ville. 2800 bénéficiaires de l’APIdont 48 % sur la ville. 15000 bénéficiaires duRMI dont 64 % sur la ville. On peut néanmoinssouligner des contrastes: malgré un pôle urbaintrès fort, la moitié de la population réside à lacampagne, dans des petites communes. Unconstat: 65 % des enfants confiés à l’ASE oubénéficiant d’une mesure de prévention sontissus de la seule ville de Strasbourg. À Strasbourg,on constate une forte dominante de jeunes adultesavec une part importante de cadres et deprofessions intellectuelles supérieures avec enregard une très grande concentration de populationsen difficulté, notamment les bénéficiairesdu RMI mais aussi les personnes percevantl’API, ainsi que le taux de chômage le plusimportant du département.Quel est l’intérêt de cette délégation?Pour la population, de notre point de vue et de cequ’elle en dit, c’est qu’elle va dans un seul lieu pourrencontrer aussi bien une assistante sociale, une puéricultrice,un conseiller social, le personnel administratifauprès duquel des demandes d’aide sociale oud’accès à des droits peuvent être faites. Autre avantageselon nous, il y a une connaissance partagée despersonnes et du quartier par les différents professionnelsqui interviennent dans le même centre médicosocial.Pour le conseil général, cela permet de pouvoir piloterde manière plus proche les politiques sociales.De fait, cela existe depuis 1945 et le fait d’avoir construitle partenariat en conventions, a permis de faireconnaissance les uns des autres, de prendre en chargeL’histoire. Il existait une « première loi » dePMI dès 1895 dans le droit local. La ville avaitalors mis en place les premières consultationsde nourrissons à destination des enfants adultérinset des enfants naturels. En 1902 il y a eucréation d’une clinique dentaire et en 1907création d’une équipe de santé scolaire. En1983, les lois de décentralisation ont confiéaux départements la compétence de droits communsen matière sociale et médico-sociale,compétence réaffirmée par l’acte II de la décentralisation.Le conseil général a alors, au traversde l’article 145 de la loi du 13 août 2003ainsi qu’au regard de plusieurs dispositionsinscrites dans le code de l’action sociale et dela famille autorisant les départements à déléguerl’exercice de leurs compétences en toutou partie aux collectivités territoriales que sontles communes, décidé d’officialiser ce qui existaitdepuis plusieurs dizaines d’années entrela ville de Strasbourg et le Département duBas-Rhin. La ville de Strasbourg exerce donc,sur le territoire communal au nom et pour lecompte du département, un certain nombre decompétences. C’est une organisation fonctionnelleet territoriale qui est antérieure auxtextes précités. Elle est le résultat d’un processushistorique démarré au début du XX e siècleet qui a donné lieu en 1945 à la création del’Office Départemental d’Hygiène Sociale. Àla demande de la municipalité à cette époque,le Directeur régional de la santé et de l’assistancea autorisé la ville à organiser la luttecontre les fléaux sociaux dans le cadre de l’administrationmunicipale. Cette délégation étaitexercée en collaboration avec le service départementald’hygiène sociale sous le contrôle dudirecteur départemental de la santé et de l’assistanceet a été entérinée par la commissiondépartementale en 1947.les problèmes sociaux dans l’action politique généralede la ville avec une intégration possible sur l’ensembledu département.Pour la ville, cette délégation est un moyen complé-84


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESmentaire à l’action qu’elle mène en direct, ce qui luipermet d’avoir une approche globale des personneset des familles et de pouvoir en une seule réceptionde public répondre à plusieurs problématiques.Par ailleurs il y a possibilité pour la ville, qui aune connaissance de la population dans les quartiersau travers de ses autres services, de pouvoir faireremonter en partie ses observations et ses propositionsau Conseil Général dans la mesure où celuicidoit développer un certain nombre de schémasdirecteurs. Nous avons l’exemple récent autour duschéma directeur sur la protection de l’enfance. Siles grandes orientations ont été données par le ConseilGénéral, la ville de Strasbourg a apporté une contributionnotamment à l’occasion d’une journée deréflexion avec l’ensemble des professionnels intervenantsur le territoire par contribution écrite. Certainesdes propositions qui avaient été faites par la ville ontété reprises dans le schéma départemental.Quelques mots sur l’organisation et les moyens. Pourle Conseil général, outre les unités territoriales surStrasbourg, nous sommes dotés de 11 circonscriptionsd’action sociale. La délégation de moyens concerneune centaine d’agents pour un coût de 6,2 millions d’eurosannuels. Pour la ville, il y a donc 6 unités territoriales,sous la responsabilité d’une responsable d’unité.Chaque équipe est composée d'assistantes sociales desecteur, de puéricultrices, de CESF, de secrétaires médicosociales,de chargés d’accueil, de conseillers sociaux.La ville complète en finançant les postes administratifs,les chargés d’accueil, des postes de CESF et se situedans une approche plus globale car ces services fontpartie intégrante d’une direction de l’action sociale quicomprend 800 agents, notamment avec des servicesauprès des SDF ou des structures d’accueil. La ville gèreles 17 centres médico-sociaux qui se trouvent sur sonterritoire.La délégation se situe aussi dans un champ d’interventionplus large. La ville est une des 13 villesde France qui a sa propre équipe de santé scolaire.Elle a également des relations privilégiées avec laDDASS, Nous avons gardé, comme 230 villes enFrance, le Bureau d’Hygiène municipal où nous exerçonsdes missions qui relèvent de l’Etat. Le dernierpartenaire en date est le CCAS puisque nous l’avonscréé seulement en 1997 sachant que nous luiavons confié des tâches d’animation caritative etla gestion des structures d’accueil.L’action de la ville en faveur des enfants se situe àdifférents niveaux. Certains sont classiques, d’autresplus nouveaux. La gestion des structures d’accueild’enfants de moins de 3 juin ans bien sûr, 88structures sur Strasbourg, par exemple : certainessont en gestion directe, d’autres sont des structuresassociatives que la ville peut soutenir financièrement.Ou encore les activités périscolaires à travers le contratéducatif local, la restauration scolaire, la PMI, lasanté scolaire, et aussi une clinique santé dentaire,suite de ce qui avait été crée en 1902. Notre servicede protection des mineurs reprend la partie délégationASE et a développé une action intéressante.Les parents séparés peuvent avoir un lieu où ils peuventrencontrer leur enfant en dehors de leur propredomicile. Enfin, nous avons bien sûr les activitéssportives et culturelles en direction des enfants commeles autres villes et un conseil des jeunes.La PMI seule ne présente aucun intérêt, cela peutmême représenter des risques. Les relations privilégiéesse font à deux niveaux. D’une part le référentpour les puéricultrices est le médecin PMI. Ellesont des missions clairement définies par la loi. L’autreréférence ce sont les assistantes sociales de secteuravec lesquelles elles sont amenées à travailler trèsrégulièrement. Imaginez la municipalisation de laPMI avec la polyvalence restant au Conseil Général:personne n’arriverait à atteindre le moindre objectif!D’une part parce que la relation privilégiée seraitmaintenue avec le médecin chef PMI du ConseilGénéral, d’autre part parce que les relations avec lesassistantes sociales de secteur se feraient alors qu’ellesdépendent elles mêmes d’un autre employeur, cequi pourrait provoquer des difficultés de coordination,des difficultés de management et peut êtredes difficultés de pilotage institutionnel. Si la municipalisationde la PMI ne concerne que l’équipe PMI,cela n’a aucun intérêt. Par contre, on a envie de vousprésenter ce qui nous semble être le tiercé gagnantà savoir la PMI, le service social de secteur et leCCAS ou l’intervention de la ville. Ceci permet desorganisations partagées sur un territoire, une culturecommune ou qu’on essaye de rendre commune, desapproches complémentaires, un meilleur repéragedes enfants en danger ou en risque de danger et puis85


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESsurtout des complémentarités de moyens telles qu’ona pu le décrire. Une délégation réussie est une délégationgagnant/gagnant à la fois pour les partenairesinstitutionnels mais surtout pour le public.Quelques prolongements. D’une part, pour la villenous nous lançons dans l’aventure de la création d’unpôle dit « 0 à 12 ans », pôle de prévention territorialiséoù nous allons essayer de regrouper les missionsde PMI et de santé scolaire. L’objectif est d’avoirdes médecins territoriaux qui interviennent sur lesdeux missions, de la naissance à la fin de la scolarisationen CM2, toujours avec l’équipe de puéricultriceset d’infirmières et des coopérations renforcéesavec les autres professionnels de santé de la ville.Le Conseil Général dans le plan d’action validé enjuin 2005, s’engage à mettre en place 40 actions dans6 domaines particuliers concernant l’enfance et lafamille comme la parentalité, la prévention, laprotection, l’accompagnement des enfants confiés,les assistantes maternelles. Nous avons opté pourcréer des postes d’adjoint à l’enfance sur l’ensembledu territoire, dans les circonscriptions d’actionsociale, avec le même profil. Il s’agit de mettre àdisposition au plus près du territoire des adjoints quiseront là pour coordonner la mission enfance, avoirun décisionnel sur les mesures de prévention, augmenterla réactivité au plus proche du territoire etconstruire une réponse adaptée au territoire pour l’ensembledes problématiques enfance.II. UN TRAVAIL SOCIAL PLUS PRÉSENT DANS LESQUARTIERS : COMMENT S’IMPLIQUER DAVANTAGEDANS L’ACTION COLLECTIVEFrançoise Raynaud, Présidente del’ANCASD (Association Nationale des Cadres del’Action Sociale des Départements)En matière de prévention, il y a nécessité de s’impliquerdavantage dans l’action collective en complémentaritéavec l’action individuelle et en privilégiantla participation des familles.1. L'évolution du rapport à l’usager.L’évolution signifiée par les textes et les institutionsautorise une mise en perspective : l’usager devientun citoyen. Mais nous avons des problèmes avec lesmots: usagers, citoyens, habitants? Usager/assujetti,usager/administré, usager/géré : pour s’en sortir,on parle de l’usager-acteur voire auteur, on parle coproductiondu service public. Tout ceci est étroitementlié à la question de la démocratie participativeet à la participation citoyenne. Depuis plusieursannées, les textes donnent cette orientation et questionnentles pratiques des institutions et des intervenantssociaux pour sortir d’une logique « mécaniste». Ainsi de la loi de lutte contre les exclusions du29 juillet 1998, ou de la loi n° 2002-2 du 2 janvier2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale.Dans ces textes sont en jeu : la mobilisation descitoyens, des nouvelles pratiques (sortir de l’assistance),une place importante du droit, un usager quidevient citoyen, la mise en place de démarches collectiveset participatives.Et pourtant, on constate un réel décalage entre lesdéfinitions institutionnelles des usagers de l’actionsociale et les représentations subjectives que ceuxcise font de leur situation de pauvreté, de vulnérabilité,ou d’exclusion. Les personnes se ressentent àla fois disqualifiées comme acteur et comme sujet.Ceci se traduit par des sentiments de honte, de culpabilitéet aussi par la perte de confiance en soi, lasouffrance, la dépendance, le sentiment d’injustice.Mais elles sont porteuses aussi de capacités,d'aspirations, de désir d’autonomie.Pour permettre à l’usager d’être acteur, citoyen, ilconvient donc de passer du « faire pour » ou «faire avec» en mettant en valeur les potentialités dechacun. Cette méthode implique un changementde regard sur les personnes. Il est nécessaire d’identifierleurs potentialités, de construire avec ellesles moyens à mettre en œuvre pour améliorer leursinitiatives, proposer des solutions. Il s’agit d’allerdu diagnostic partagé à la construction et la réalisationd’un projet partagé.2. Les conséquences pour les professionnels.Un positionnement différent: il ne s’agit plus de construiredes projets d’action pour résoudre un problèmemais de mobiliser tous les acteurs concernés y comprisles personnes touchées directement, les habitants… à partir d’un projet, pédagogique, stratégique,professionnel.Ainsi sur un quartier où beaucoup de parents et d’en-86


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESfants n’investissent pas facilement les lieux d’accueilde la petite enfance, les lieux d’accueil parentsenfants,ou l’école, un projet fédérateur s’est mis enœuvre impliquant d’abord les parents puis l’ensembledes professionnels des structures sociales et socioculturelles,des élus du quartier sur le thème du rôledes parents face à la question des limites à poser dansl’éducation des enfants.Dans ce cadre la réalisation d’un théâtre forum interprétépar un groupe d’habitants du quartier sur lethème du rôle éducatif des parents « question deparents, question de société» a permis que des questionssoient débattues en groupe et que des parentss’investissent par exemple à l’école (rencontre engroupe de la directrice d’école sur les raisons desorientations par le CMP, participation du conseil d’école).On a constaté également une forte évolutiondes personnes en difficulté au sein du groupe. Cetteaction se poursuit et s’est élargie avec toute uneréflexion sur la démarche participative autour du centresocial.Dans ce type d’action le travailleur social devient« facilitateur » ; il pilote un processus, pour structurerdes démarches collectives en réponse à desproblèmes concrets identifiés sur un territoire.Des modifications de l’attitude professionnelle: il ya là une position éthique, une recherche de cohérenceentre les valeurs et les pratiques qui fondent la relationà l’autre. Il faut prendre le risque de la rencontre,laisser l’espace pour les doutes, les interrogations,savoir se laisser surprendre, accepter uneproposition qui n’est pas forcément la nôtre.Une action fondée sur une réelle relation d’échange:les personnes en difficulté ont besoin d’être reconnuessocialement, les individus ont besoin de s’affirmercomme sujets; la solution des problèmes rencontrésest à rechercher avec les personnes concernées.Il faut leur permettre de s’inscrire dans des dynamiquesd’échanges et de participation avec d’autresacteurs. La relation d’échange permet des changementssignificatifs tant pour les personnes que pourles professionnels.Ceci implique de trouver des modalités adaptées:Aller vers les personnes éloignées des structures, desdynamiques collectives. Les professionnels sont obligésde sortir de leur structure, de leur bureau, d’être créatifs,d’inventer des supports pédagogiques adaptés. Rompre avec la logique de l’offre pour piloterun processus qui permettra le diagnostic et le projetpartagés. Ceci nécessite d’être exigeant avec laméthode. Se souvenir que le désir est le moteur de la participation(lieux, circonstances, sujets mobilisateurs)pour le changement. Permettre une expression qui ne va pas de soi :créer les conditions pour que la personne puisse sereconnaître et se constituer comme sujet: accueillirla parole, ne pas tout maîtriser, permettre l’existenced’espaces de liberté pour s’exprimer, créer. S’inscrire dans la durée : sortir d’un positionnementau jour le jour, prendre le temps d’apprendre àintervenir avec d’autres acteurs, se donner le tempsde l’appropriation.Nous avons là un déficit manifeste. Comment aiderles usagers à s’approprier la démarche, à être forcede proposition et à conduire la suite de l’action ?Comment passer le relais aux habitants, et continuer?3. Les outils de réussite :Il s'agit d'une part de la formation, d'autre part dusoutien méthodologique auprès des travailleurs sociauxengagés dans des actions collectives associant lesusagers.Il s’agit de les aider à conduire et à réussir un projetsous la forme d’analyse de la pratique autour de l’actioncollective et dès lors de passer de la phase d’expérimentationà la phase de pérennisation. C’estun accompagnement de proximité, limité dans letemps, assuré par un organisme extérieur. Des bilanssont faits de ces accompagnements pour favoriserune capitalisation des expériences et des échangesentre professionnels.Pour permettre que ce travail et cette réflexion avancentpas à pas, il est important que tous les niveauxde nos institutions soient mobilisés sur du long terme. Les professionnels qui s’engagent dans les projetset s’appuient sur la démarche qui considère l’usagercomme expert et acteur de sa situation.87


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCES Les cadres qui accompagnent les projets deformation et de soutien méthodologique. Ils ont unrôle indispensable pour le développement de ces nouveauxmodes de travail avec les habitants, le suivides projets et le soutien hiérarchique et techniquedes professionnels. Les élus qui déterminent les choix politiques :c’est en effet une volonté politique qui permet dedévelopper toutes ces actions et cette optique de travailavec les habitants.Alors l’engagement partagé entre tous ces niveauxcontribue à diminuer les écarts entre les intentionset les moyens pour ceux qui ont en charge la miseen oeuvre des politiques sociales et pour les habitants.La crédibilité réciproque, la confiance mutuelleet des résultats visibles donnent sens à ces actions età ce pouvoir partagé, chacun à sa juste place.Il est essentiel de suivre mais aussi de soutenir leshabitants. Ces actions collectives à ce moment-làsont porteuses de culture, de citoyenneté, et de solidarité.En conclusion, je rappellerai que le travail socials’exerce comme un art en donnant la priorité à l’écoute,aux relations humaines et qu’il peut alors générerune dynamique participative et citoyenne. Il estbien sûr au cœur des contradictions de notre sociétémais il dépend de nous tous, élus, cadres et professionnelsqu’il reste un outil de transformation socialecentré sur la personne ou le groupe à partir d’uneapproche globale et partenariale.III. LES TISF AU CŒUR DE L’ACTIONCOLLECTIVEMichel Gaté, Directeur général de la FNAID(Fédération nationale de l'aide et de l'interventionà domicile)Je vais essayer de vous parler rapidement de professionnelsqui sont dans le « faire », non commeon dit parfois « faire à la place de » mais bien « faireavec » comme cela a déjà été souligné. Je tiens à remercierl’ODAS d’avoir invité une Fédération nationaleassociative qui représente un certain nombre de pratiquesprofessionnelles et d’expériences de terrain pourtémoigner des savoirs faire et des compétences de cespersonnels que sont les Techniciens de l’InterventionSociales et Familiales (TISF), impliqués dans la problématiquede la protection de l’enfance.Pour commencer, trois petites phrases comme autantde clignotants, d’avertisseurs sur un ensemble demétiers, de professions et d’interventions qui sontsingulièrement menacés. Les TISF, c’est un métierqui est très peu connu, trop méconnu et qui mérited’être plus valorisé. C’est une profession qui est malrepérée et qui mérite d’être mieux positionnéedans le champ du travail social. Enfin c’est une interventionsociale globale qui mérite d’être intégréedans les dispositifs de prévention et de protection del’enfance plus qu’elle ne l’est aujourd’hui.Je voudrais dans un premier point illustrer combiencemétier a connu des mutations importantes. Le métierde TISF existe depuis près de 60 ans. Avant on lenommait travailleuses familiales jusqu’à la réformede la formation en 1999. Les TISF s’appuient sur lestâches de la vie quotidienne. Elles mènent une actionsocio-éducative qui vise à maintenir la continuité dela vie familiale et à permettre le développement del’autonomie de l’enfant et des parents. Titulaires d’undiplôme d’Etat de niveau 4 c'est un travailleur socialdu domicile qui suit une formation longue compriseentre 18 et 24 mois. Une seule citation tirée du référentielprofessionnel en cours de validation auprèsde la DGAS pour illustrer mon propos: « Le diplômed’Etat de TISF atteste des compétences nécessairespour effectuer une intervention sociale préven-88


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCEStive et réparatrice à travers des activités d’aide à lavie quotidienne et l’éducation des enfants ». C’estdonc à domicile que les TISF effectuent une interventionsociale. Les activités ne sont pas des servicesrendus aux familles: c’est le moyen d’être avec,c’est la façon de faire avec les parents, les enfants,dans un objectif de prévention et d’éducation à domicile.Le territoire des TISF, le domicile, est d’ailleursoccupé par peu d’autres professions. Le TISF ades qualités et des compétences qui permettent d’avoirune vision pragmatique, une vision intégrée dusystème de relations qui existe dans la famille. Celaconcerne ce que nous connaissons tous, le budget,le logement, la santé, la vie sociale, etc. C’est cesavoir faire relationnel, cette capacité à écouter, àaccompagner les prises de conscience, à mettre enoeuvre les activités qui en découlent qui caractérisel’essentiel du mode d’intervention sociale des TISF.Le cœur du métier des TISF, c’est l’observation etle diagnostic. Une fois l’observation réalisée dans laproblématique intra-familiale, la TISF agit avec unedouble préoccupation: celle de protéger les enfantsen soutenant la fonction parentale, notamment pourles familles confrontées à des violences internesou à l’origine des carences éducatives. Cela permetde mieux connaître les conditions d’émergencedes maltraitances, de mieux appréhender dans l’intimitéde la sphère privée ce qu'est le vécu de lafamille. Précisons que ce qui est le plus difficile dansce métier, c’est la fabrication permanente du « surmesure ».Ce métier est en pleine évolution. Ce sont aujourd’-hui les conseils généraux qui sont les principaux prescripteurset financeurs (la CAF à l’origine) de cetteintervention. Aujourd’hui, les enfants sont de plusen plus fragiles, sont menacés, les parents de plus enplus isolés, sans repères et les relations internes sontremises en cause. À ces difficultés s’ajoutent des difficultésqui sont d’ordre psychiques, psychologiquesvoir psychiatriques. On est passé d’une interventioncentrée sur une problématique individuelle à uneaction sociale d’accompagnement qui nécessite demettre en oeuvre des dynamiques d’actions collectives.Ces dynamiques s’appuient sur les ressourcesextérieures à la famille mais aussi sur les ressourcesde l’environnement de l’enfant et des parents.Dans un deuxième temps, je vais montrer commentles interventions des TISF peuvent constituer desmaillons du processus global des interventionscollectives qu’appelle la prévention des situations àrisques. Quelques mots sur trois situations qui meparaissent illustrer aujourd’hui l’implication des professionnelsdans le cadre des maillons de la protectionde l’enfance. Premier point, préventionprécoce dès la grossesse de la mère. La préventiondoit s’exercer le plus en amont possible, dès la périodeprénatale et la naissance, lorsqu’il s’agit de soutenirdes mères isolées, fragilisées, surchargées. Dans notreréseau, pour prévenir la maltraitance, nous avons desprofessionnels qui interviennent de différentes façons.Elles sont présentes dans les maternités pour préparerles parents à la venue de l’enfant, pour les informersur leurs droits et leurs devoirs de parents, enrelation étroite avec les services de PMI. Ce n’estpas une pratique facile. Il y a évidemment la préparationdu retour à domicile dans ces premièressemaines qui sont souvent les plus éprouvantes pourdes mères qui sont parfois inexpérimentées, seules,voire défavorisées. Deuxième exemple, c’est letravail qu’on fait notamment à Marseille avec lesservices hospitaliers et en particulier les puéricultrices.Comment faire face à des situations de maltraitancedont on constate qu’elles interviennent de plusen plus tôt dans la vie de l’enfant? Il faut alors organiserles articulations entre le domicile et le milieuhospitalier.Il est important de savoir que certaines TISF sontimpliquées dans des départements, la Seine-Saint-Denis par exemple, avec les travailleurs sociaux dansl’observation et le suivi lors d’accompagnement dansles familles ou avec la famille. L'intervenant TISFélabore un diagnostic qu'il transmet aux travailleurssociaux qui décident alors de l’action à mettre enoeuvre. Cette observation est exercée en lien directavec les acteurs du système familial comme l’école,la crèche, le service social, le médecin etc. C’est àla fois un révélateur des dysfonctionnements familiauxet un déclencheur de certaines formes d’action.Le TISF entre dans la famille, sait se faire accepter,repérer les codes sur lesquels la famille fonctionneou de fait ne fonctionne pas et relayé auprèsdes travailleurs sociaux les modes de relation qu’elleétablit avec son environnement.Dernier point sur la médiation familiale et le travail89


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESen réseau. Pour préparer le retour dans la famille desenfants placés ou en lien avec les institutions psychiatriques,les TISF ont leur place. Dans les Pyrénées-Atlantiques, des visites de TISF se font en lien avecle projet éducatif de l’enfant confié à l’ASE et le projetthérapeutique suivi par l’équipe de psychiatrie desecteur. C’est un travail très lourd mais qui a donnédes résultats intéressants. Nous manquons d’un peude recul pour rendre compte de nos analyses, maison voit bien que dans une situation de crise cetteintervention se trouve au cœur de la protection, dela prévention et de la réparation.DEBAT AVEC LA SALLEPatricia Starek, Adjointe au maire deForcalquierJe voudrais revenir sur le fait de pouvoir aller à domicile.J’ai aussi mis en place une maison de la famille,lieu d’accueil pour les parents. Il fut un temps oùil y avait systématiquement une puéricultrice quivenait à domicile, quelle que soit la situation sociale.Cela permettait à ces professionnelles de faire lesconstats dont vous parlez. J’ai demandé aux assistantessociales pourquoi cela ne se fait plus. Il y avaitlà un moyen de dépistage qui était précieux. Dans le04, cela a été supprimé faute de moyens. Depuis queje suis dans ce secteur, je remarque que les constatsproblématiques s’amplifient et qu'à la fois lesmoyens diminuent. Je suis donc assez surprise qu’avecles TISF il y ait des moyens pour aller au domiciledes personnes. Je voudrais savoir si cela sefait sur un signalement, une ordonnance ou si c’estautomatique.les situations potentiellement carencées. La seconde,c’est le travail avec les puéricultrices, au moins pourla première naissance. Dans certains départements,on intervient systématiquement pour le premier enfant,pas forcément pour les suivants. Il y a une hétérogénéitédans les réponses, c’est une question de choixdes départements.Claude Roméo, Directeur enfance famille auConseil général de Seine-Saint-DenisJe voudrais expliquer ce qu’on a mis en place surnotre département au sujet des sorties précoces dematernité: c’est un travail en réseau à partir de chaquematernité qui tient à disposition, 12 jours après lanaissance, une sage-femme pouvant aller à domicile.De plus une TISF peut intervenir. Je voulais aussiréagir à l’intervention de Strasbourg sur la PMI enm’étonnant du fait qu’un thème comme la municipalisationde la PMI vienne dans un colloque national,car c'est une expérience qui tient compte de l’histoirelocale. Il ne faudrait pas croire que cela pourraitêtre étendu demain à l’ensemble du territoire national.J’en parle d’autant plus qu’il y a dans mon département118 centres de PMI. Je crois qu’il y a d’autreschoses qui existent et qui marchent bien. D’abord,la PMI municipale, la loi ne le permet pas. Il y a descompétences propres du conseil général en termesde protection de l’enfance, concernant les questionsd’agrément d'assistante maternelle, les établissementsaccueillants des enfants de 0 à 6 ans, les compétencesque la loi prévoit pour le médecin chefde la PMI. Dans notre département, il n’existe pasque des PMI départementales, nous avons mis enChristophe Béchu, Président du conseil généralde Maine et LoireL’intervention des puéricultrices employées par ledépartement dans le cadre de la mission PMI est unequestion d’autant plus cruciale que la durée moyennedu séjour à la maternité diminue. Il y a deux réponses:la première, si les moyens suivent, c'est le plande périnatalité qui a été mis en place par le ministreDouste Blazy, notamment sur l’entretien du 4 e moisavec une sage-femme qui doit permettre de repérer90


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESplace des PMI à gestion municipale, associative,hospitalière. Mais la compétence PMI reste une compétencedépartementale.Christophe Béchu, Président du conseil généralde Maine et LoireVotre intervention a le mérite d’insister sur les pouvoirsjuridiques du Président du Conseil Général quine sont pas transférables. Derrière le terme municipalisation,le vrai sujet est l’expérience d’un partenariatparticulièrement poussé sur ces questionspar rapport à la PMI. Certains départements n’ontpas encore fait la jonction entre le service ASE et leservice PMI en terme de réflexion interne. Le cas deStrasbourg est significatif par sa durée. On peut reteniraussi la santé dentaire comme élément innovant.Denise Cacheux, Présidente d’un centre social àLille Sud et administratrice des centres sociauxdu Nord, Présidente de l'ETSUPJe reviens sur la délégation de compétences à Strasbourg.J’ai bien repéré qu’il y a des prolongements à la compétenceobligatoire, ce qui se traduit par des dépensessupplémentaires. Qui prend en charge cette extensionde service? Deuxième remarque: cela marche à Strasbourget dans le Bas-Rhin parce que c’est la même orientationpolitique, mais dans le cas contraire, comment surdes missions sensibles comme les missions de planificationfamiliale, l’accompagnement du surendettement,l’habitat social, la dualité prévention/répression,l’articulation peut-elle se faire?Anita Sobler, Directrice des actions de santé dela Communauté urbaine de StrasbourgTout ce qui concerne l’organisation relève d’une priseen charge supplémentaire du conseil général qui metà disposition de la ville des agents supplémentaires.Mais c’est bien le Conseil Général qui prend les décisionsqui lui reviennent, il est maître d’œuvre. Lesmoyens supplémentaires rentrent dans le cadre duplan d’action dont je vous ai parlé.En ce qui concerne les options politiques éventuellementdifférentes entre la commune et le département,il faut savoir que le conventionnement adémarré avant 2001. Les négociations ont été tout àfait possibles entre le Conseil Général et la municipalitéprécédente bien que n’étant pas de la mêmecouleur politique. Cet aspect n’a jamais gêné lesnégociations et je peux en témoigner puisque c’étaitmoi qui étais en gestion de ce dossier.Un intervenant de la salleL’intervention de Madame Raynaud nous permet derefaire le lien avec la question de la prévenance parcequ’elle repose la question du maillage territorial etje voudrais souligner qu’aujourd’hui, dans la majoritédes cas, les Conseils Généraux ont des équipesterritorialisées, donc des équipes de proximité, encapacité, en partenariat avec les communes, d’apporterleur connaissance du terrain, des populationset de leurs besoins. Cette intervention pose aussila question de la définition de l’exercice professionnelaujourd’hui et du contenu de la polyvalence desecteur et en particulier la question du travail collectifet partenarial de proximité dans le lien social. Dansles fiches de postes des travailleurs sociaux, avecbien sur une volonté politique, il faut inclure unereconnaissance de ce temps nécessaire à ce travailde partenariat et de lien social.Françoise Raynaud, Présidente de l’ANCASDIl est exact que le travail avec les habitants pose laquestion du rôle et de la place de la polyvalencede secteur. Dans notre association, nous avons réfléchien particulier sur la nécessité de pouvoir lasortir des dispositifs pour la remettre sur ce qui estl’essentiel, l’accompagnement social, qu’il soit individuelou collectif. Cela conduit à s’interroger surles notions de métiers et de la spécificité de chacun.Les métiers ont des choses à apporter en complémentarité.Il faut peut-être prévoir une partie de tempspour l’accompagnement individuel et une partiede temps pour l’accompagnement collectif et accompagnerl’évolution des mentalités. La réforme dela formation prévoit que 50 % des stages doivent permettrel’apprentissage du travail collectif, on peutdonc en attendre une évolution très forte. Cependant,dans mon département, j’ai du mal à trouver ces terrainsde stage, il faut le reconnaître. Le nouveau référentieldes assistantes sociales nous offre un levierpour développer le travail collectif ce qui est pourmoi un point essentiel pour le travail social.91


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESTroisième partie de la conférencePROTECTION : MIEUX IDENTIFIER LESENFANTS EN DANGER ET GRADUER LES RÉPONSESPOUR PRÉSERVER LES POTENTIELS DES FAMILLESJean-Louis Sanchez, Délégué général de l'OdasVotre présence dans cet atelier pendant ces deux joursest un grand encouragement pour tous ceux quiessayent de voir les choses telles qu’elles sont et defaire des propositions. Le travail dans cet atelier estinformel. Nous avons des idées sur la protectionde l’enfance, il y a aujourd’hui des travaux sur lesquelson a envie de s’appuyer parce qu’ils correspondentà notre philosophie, notamment le rapport deLouis de Broissia (l’amélioration de la prise en chargedes mineurs protégés). Pour autant, il ne s'agit pasde changer sans avoir engagé des débats avec lesacteurs qui tous les jours gèrent les situations etles problèmes sur le terrain. Je pense bien sûr à tousles acteurs sociaux et aux acteurs de la justice.Nous abordons donc un problème délicat car il relèvedu législateur. La démarche initiée par Jean-PierreRosencveig et Claude Roméo, publique dans quelquessemaines, a pour objectif de lancer un grand débatsur la protection de l’enfance. Nous pouvons aboutirà une loi qui recadre les choses, qui s’inspire durapport parlementaire qui vient d’être déposé concernantla protection de l’enfance et qui essaye declarifier les relations en amont et en aval de l'aidesociale à l'enfance (ASE) et de la justice. Notre rencontreest faite pour discuter de ces propositions etvoir si l'on peut dégager certaines recommandations.I. PRÉSENTATION DU RAPPORT SURL’AMÉLIORATION DE LA PRISE EN CHARGEDES MINEURS PROTÉGÉSGeneviève Avenard, Directrice de la solidaritéet de la famille au Conseil Général de la Côte d’OrU n groupe de travail a été mis en place parMadame ROIG, à l’époque Ministre de la famille,en novembre 2004. La lettre de mission fixait deuxthèmes: la désignation d’un adulte référent, la diversificationdes modes de garde et des modalités de92


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESsoutien aux familles dans la perspective globale dela prise en charge des mineurs protégés. Le curseurétait bien placé sur la protection et non sur laprévention. Nous avons eu dans le groupe un débatpréalable pour définir notre champ de réflexion etnous avons considéré qu’on s’intéressait à la priseen charge de l’enfant à partir du moment où desparents faisaient appel à l’ASE ou au moment où desbesoins étaient repérés par un service social, un servicesocial scolaire ou autres. Nous avons choisi d’êtretrès concrets et très pragmatiques, de repérer cequi aujourd’hui pouvait être proposé sur différentspoints pour faire évoluer ce dispositif.La composition du groupe a témoigné de cette volonté.Il était composé d’une trentaine de personnes de différentesinstitutions : des praticiens de l’institutionjudiciaire, des associations d’aide à domicile, de grossesassociations. Les Conseils Généraux étaient aunombre de 6. Durant les travaux du groupe estparu le rapport de la défenseure des enfants qui aretenu toute notre attention, ainsi que les propositionsde loi de Madame Pecresse et de MadameMartinez et puis planait sur nous, même si ce n’étaitpas l’objet, le procès d’Angers qui se déroulait dansle même temps.Le groupe de travail s’est voulu très humble, trèsmodeste parce qu’opérationnel. Son premier choixa été de s’appuyer sur les rapports antérieurs. Sondeuxième choix, de favoriser une démarche decollaboration et de co-construction avec un engagementpersonnel de chacun à participer à l’ensembledes travaux tout en dépassant les représentationsinstitutionnelles pour rester dans la technicité et garantirun apport authentique. Le troisième choix a étéde limiter le nombre d’auditions, à la fois parce quele temps nous était compté et parce que certainesavaient déjà été réalisées par d’autres groupes. Enfindernier choix : enrichir les travaux par l’apport decontributions écrites émanant des différents réseauxqui étaient représentés dans le groupe. Par ailleurs,nous avons recensé les actions innovantes misesen oeuvre au plan local après avoir établi une fichesynthétique type, l’idée étant de faire ce recueil dansune perspective de diffusion et de mutualisation.Le rapport comporte trois parties. En premièrepartie, nous avons la présentation des constats et desproblématiques rencontrées aujourd’hui dans le champde la protection de l’enfance. Dans la deuxième partie,nous avons procédé à l’analyse des fiches d’actionsinnovantes et en troisième partie nous avonsélaboré des propositions, résultat d’un vrai travailde groupe. 34 propositions ont été élaborées, 15 surle plan juridique, 9 sur le plan des pratiques et 10 surle plan des partenariats.Nous avons fait le constat de l’absence, au moment deslois de décentralisation de 1982-1983, d’une véritableréflexion de fond sur les places de chacun des acteursde la protection de l’enfance. En conséquence, subsiste20 ans après une insuffisante connaissance et reconnaissancemutuelle entre les acteurs, notamment entre lesacteurs principaux, représentants de l’administration etreprésentants de la justice. Nous avons été invités à déclinerconcrètement par des procédures la piste ouverte parla loi du 13 août 2004 qui confie au Conseil généralun rôle de chef de file. Nous avons aussi appelé à undébat national, mais également local.Nous avons fait le constat d’une insuffisante perméabilitéde la protection de l’enfance aux grandes mutationsde l’action sociale d’aujourd’hui. Elle resteencore trop individuelle et curative. Elle n’intègreque très progressivement des approches plus collectivesaxées sur l’environnement des familles et desenfants. Elle peine à trouver sa place dans les grandespolitiques publiques conduites sur les territoires.Ce que dit la commission, c’est qu’il ne faut pas dissocierla protection de l’enfance des autres politiquespubliques conduites sur les territoires par les différentspartenaires, l’emploi, l’insertion, la santé, l’accueildes jeunes enfants.Sur la diversification des réponses et des modalitésde soutien, nous avons reçu 48 fiches d’actionsinnovantes. Elles concernent 27 départements et couvrenttout le prisme de la prévention à la protection.Ces fiches témoignent de la grande inventivité etcréativité dans les départements : au-delà des anecdotes,nous avons essayé de voir les raisons pour lesquelleselles ont été mises en place. Elles renvoyaienttoujours bien sûr à des carences ou des inadaptationsou à des difficultés de mises en oeuvre d’action dedroit commun. Nous avons donc analysé un certainnombre de caractéristiques des dispositifs etrepéré les obstacles au transfert de ces expériences.Il est possible d’identifier des critères permet-93


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCEStant d’utiliser sinon de généraliser du moins de transférervers d’autres.La notion de référent a fait l’objet de beaucoup dedébats. Le groupe était mandaté pour réfléchir à lamise en place d’un adulte référent, à la fois au niveauinstitutionnel et inter-institutionnel. Il s’agissait d’abordde trouver des repères dans les pratiques desdépartements. Cette notion de référent est utiliséedans tous les départements mais elle recouvre desréalités tout à fait différentes sans qu’il y ait de définitionprécise, rendant ainsi aléatoire l’évaluationdes pratiques. La notion de référent éducatif utiliséemajoritairement recouvre des réalités différentes ausein de l’ASE selon qu’il assume lui-même la mesure,ou selon que l’enfant est confié à un service deplacement familial habilité ou un établissement. Cequi est souvent mal défini c’est le rôle de ce référentpar rapport aux parents. Les liens entre le référentde l’enfant et les services en amont de la mesurede protection sont souvent insuffisamment clarifiésnotamment s’agissant de l’accompagnement desparents pendant la prise en charge de l’enfant. Onnote aussi que cette pratique de référent éducatifse heurte à une limite très concrète : il s’agit duturnover des professionnels, constaté dans l’ensembledes départements; s'y ajoutent des délais de vacancesde poste qui nuisent à une désignation de référent.Une autre limite tient au cloisonnement entrele secteur psychiatrique et le secteur socio-éducatif,ce qui conduit au phénomène de la « patate chaude» entre différentes institutions. Outre une extrêmehétérogénéité des pratiques départementales, on noteune imprécision assez générale des objectifs detravail assignés au référent éducatif avec le risquemajeur d’incompréhension entre les magistrats et lesservices de l’ASE. Le groupe a préféré renvoyer laquestion de la désignation du référent au projet globalde l’enfant et de sa famille, élaboré dans un cadrepluridisciplinaire qui devrait déterminer le ou lesprofessionnels les mieux placés pour assumer cettefonction de fil rouge. Le groupe a alors centré saréflexion sur la conception d’un référent garant d’unemeilleure cohérence entre les actions menées par lesdifférents intervenants auprès de l’enfant et de safamille, quelle que soit l’institution dont il relève.L’objectif est de favoriser la continuité des parcoursde protection au-delà des clivages institutionnels endéveloppant d'une part la coordination et la transversalitéentre les acteurs, d'autre part le travail pluridisciplinaire.Pour le distinguer des autres référents,nous avons choisi le terme de référent de continuité,expression soufflée par Hervé Hamon, qui auraitla capacité de garantir la globalité des projets éducatifset de contribuer à l’évaluation des mesuresmises en place.Cette recherche de cohérence du suivi du parcoursd’un enfant a très logiquement conduit le groupe às’interroger sur l’articulation des deux grands acteursdu dispositif de protection de l’enfance que sont lejuge des enfants et le service départemental de l’ASE.Le groupe a en particulier relevé le fait que notredispositif s’appuyait sur un principe de coresponsabilitéqui était délicat à mettre en oeuvre. Sur ce sujet,je voudrais évoquer une question qui a été débattuedans le groupe: le passage de la protection administrativeà la protection judiciaire. Une analyse comparativeprécise a été menée sur les dispositionsdu code civil et du code de l’action sociale. La loidu 6 janvier 1986, adaptant la législation sanitaire etsociale au transfert de compétences en matière d’aidesociale et de santé, avait substantiellement modifiéles concepts légitimant l’intervention de l’ASE quijusque-là se trouvaient en parfaite adéquation etconcordance avec les dispositions du code civil.Depuis 1986, il y a donc discordance autour de lanotion de danger. Pour le juge, l’autorité judiciaire,article 375 du code civil, intervient si la santé,la sécurité ou la moralité d’un mineur sont en dangerou si les conditions de son éducation sont gravementcompromises. La notion de danger a disparudans la loi du 6 janvier 1986 provoquant des difficultésde calage entre les deux autorités. Nous noussommes interrogés sur cette notion de danger quireste difficile à cerner et pour laquelle la jurisprudencen’a guère apporté de précisions quant à soncontenu. La doctrine s’accorde à dire que le critèredu danger nécessaire mais non suffisant pour justifierl’intervention de l’assistance éducative est lacarence ou la défaillance de l’autorité parentale. C’estdans le domaine de l’enfance maltraitée que les critèresde l’intervention judiciaire ont été le plus clairementposés par le législateur en 1989. La loi de1989 a prévu que le juge intervient dans deux cas :l’impossibilité pour les services sociaux d’évaluer94


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESla situation du mineur et le refus manifeste de lafamille d’accepter l’intervention de l’ASE. Il nousest apparu que ces deux critères induisaient de manièreimplicite un principe de subsidiarité de l’interventionde l’autorité judiciaire. Le groupe a considéréque ce principe était un point essentiel dans la questionde l’articulation entre l’autorité judiciaire et l’autoritéadministrative mais qu’elle n’était que partielleparce que ne concernant que l’enfance maltraitée,part qui n’est pas la plus importante de l’ensembledes situations recensées. L’une de nos préconisationsest donc la modification du code de la famille etde l’action sociale pour instaurer cette notion de subsidiaritépour l’ensemble des situations d’enfants endanger avec saisine de l’autorité judiciaire selon lesdeux mêmes critères que pour l'enfance maltraitée.Autre proposition qui préconise l’affirmation du principede subsidiarité dans le code civil: modifier l’article375 en ajoutant qu’avant d’ordonner les mesuresprévues à l’alinéa précédent, le juge examinesi les actions mentionnées sont de nature à protégerla santé, la sécurité ou la moralité du mineurou à restaurer ses conditions d’éducation. Le jugeexamine avant d’ordonner. À cet égard, a été rappelél’intérêt que représente pour le magistrat, la transmissiond’informations sur le mineur et sa famille etdonc la nécessité pour les départements de s’organiserpour garantir au mieux cette transmission.Marie-Paule Martin Blachais, DirectriceEnfance Famille au Conseil général d’Eure etLoire, présidente de l’AFIREMGeneviève Avenard a présenté le dispositif au regarddu périmètre de compétences entre la protection administrativeet la protection judiciaire et en particuliersur ce qui concerne le moment où il va y avoirpassage de l’une vers l’autre. Il nous faut aussi regarderce qui se passe en aval. Une fois que la justices’est saisie de la situation, les problèmes ne sont paspour autant résolus puisque dans notre système, ledépartement va être concerné par l’exécution desmesures de justice. C’est là qu’apparaît toute la complexitéde notre dispositif.Il serait dommage de penser qu’il s’agit de conflitsautour de la question des territoires ou de conflits deprérogatives entre l’autorité judiciaire et l’autoritéadministrative. C’est l’architecture même du dispositifqui est questionnée, décentralisation ou non.Peut-être la décentralisation vient activer ou mettreen relief certains aspects paradoxaux de notre systèmemais il convient de ne pas se tromper de débat.Il concerne le système plus que les prérogatives dechacun.Quel questionnement nous apporte l’architecture dudispositif? Un grand manque de lisibilité et un manquede clarification sur les lieux d’arbitrage, les lieux dedécisions, les lieux de mise en oeuvre, les lieux d’exécution,les lieux de responsabilités et les lieux derecours. Quelques exemples pour éclairer mon propos.La mesure d'assistance éducative en milieu ouvert(AEMO) telle qu’elle est prévue dans le code civil,article 375 et suivants, occupe une place tout à faitparticulière dans le dispositif puisqu’on se rend comptefinalement que bien que n’étant pas un outil d’expertisepour le magistrat c’est véritablement unemesure qui s’inscrit dans l’assistance éducative. Pourautant, cette mesure est très externalisée par rapportau dispositif puisque telle qu’elle est organisée aujourd’hui,elle fonctionne plus comme un service auprèsdu tribunal que comme un service dans le dispositifde protection de l’enfance. Ceci interroge les articulationsde la mesure éducative avec l’amont et l’aval,sur la transmission et la coordination d'informations,sur la continuité de parcours, sur le contenu etle référentiel de l’AEMO. On voit se développeraujourd’hui à côté de l’AEMO classique, des AEMOrenforcées: on peut se demander pourquoi. Le groupe95


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESa fait 3 propositions sur l’AEMO. Une propositionsur la coordination, une sur la transmission d’informationet une sur les référentiels de contenu.Deuxième exemple : la notion de placement direct.Les placements directs représentent aujourd’hui àpeu près 20 % des placements judiciaires. L’articleL.122.7 du code de l’action sociale et des famillesprécise qu’en cas de placement direct, le mineur estplacé sous la responsabilité conjointe du juge desenfants et du président de Conseil Général. Très généralement,le département n’intervient que pour laprise en charge de ces placements et absolument pasdans la connaissance et dans le suivi de ces situations.Troisième élément pour la démonstration: le placementà l’ASE. Il faut savoir que les enfants confiésà l’ASE représentent 80 % des décisions de placementsjudiciaires. Que dit la jurisprudence sur cettequestion ? Le service de l’ASE doit rendre compteau juge des enfants du suivi du mineur confié. Elledit que le choix du lieu de placement et de la familled’accueil incombe au service de l’ASE. Toutefois,le juge des enfants peut assortir la remise de l’enfantà l’ASE d’une obligation à fréquenter un établissementsanitaire ou d’éducation ordinaire ou spécialisée.Donc comment s’articule à la fois la compétencede l’ASE et la compétence du magistrat?Autre point : le transfert de responsabilité. Lorsquele juge des enfants confie un mineur à l’ASE, il luiconfère la responsabilité de diriger, d’organiser et decontrôler la vie du mineur et donc la responsabilitéde ses actes, celle-ci n’étant pas fondée sur l’autoritéjudiciaire mais sur la garde (arrêt de la cour decassation de 1996).Enfin, dernier point: le recours aux organismes habilités.Le service de l’ASE, pour l’accomplissementde ses missions et sans préjudice de ses responsabilitésvis-à-vis des enfants qui lui sont confiés, peutfaire appel à des organismes publics ou privés habilités.On voit bien se profiler la complexité desdifférents niveaux de l’architecture. Qui est lemaître d’ouvrage, qui est le maître d’œuvre, quiest l’opérateur? Pour ajouter encore à la complexité,le président du conseil général, a des compétencespropres. Il peut ester en justice au nom du mineur, ilpeut saisir le tribunal de grande instance en matièrede déclaration judiciaire d’abandon, il peut saisirle juge des tutelles, il peut saisir le juge aux affairesfamiliales en matière de délégation d’autorité parentale.Il est également organisme de tutelle d’habilitationet de contrôle des établissements habilités etautorité de tarification.De ce fait, il apparaît indispensable aujourd’hui demettre à plat les prérogatives de chacun afin de rendreplus lisibles ces différents niveaux (décision,ordonnateur, exécution) ainsi que les différentes articulationsentre les deux pôles fondamentaux du dispositif.Devra-t-on rester sur le modèle existant quiimplique une triangulation entre juge des enfants,ASE et opérateur ? N’oublions pas que si 80 % desenfants placés par mesure judiciaire sont confiés àl’ASE, la très grande majorité des lieux de priseen charge se trouvent de fait dans le secteur privéhabilité. Nous avons donc besoin de concilier jugedes enfants, ASE et opérateur et à l’intérieur de cetriangle je positionnerai l’enfant et sa famille.Le groupe a fait un certain nombre de propositions.Son souci a été de souligner l’importance dela coordination interinstitutionnelle et le repositionnementde chacun, le retour à un schéma conjoint etnon plus un schéma relevant exclusivement duprésident du Conseil Général, l'introduction d'uneinstance départementale qui aura pour vocation lesuivi du schéma, la conférence annuelle, l’évaluation,la coordination du schéma avec les schémassanitaires et médico-sociaux. Nous devons nous interrogersur la configuration future car il faut rendre ledispositif non seulement lisible mais de plus l’évaluerau titre de l’évaluation des politiques publiqueset au titre de la loi de 2 janvier 2002 en matière detransparence à l’égard des enfants et des familles.Cette évaluation devra répondre à quatre questions:- Est-ce que ce dispositif est pertinent? La pertinenceétant l’adéquation entre objectifs engagés et enjeuxidentifiés.- Est-ce que le dispositif est cohérent? La cohérenceétant l’adéquation entre objectifs et moyens misen oeuvre.96


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCES- Est-ce que le dispositif est efficace ? L’efficacitéétant l’adéquation entre objectifs adoptés et résultatsobservés.- Est-ce que le dispositif est efficient ? L’efficienceétant l’adéquation ente les moyens mobilisés et lesrésultats obtenus.Jean-Louis Sanchez, Délégué général de l'OdasIl serait vain de penser que ce débat peut être réduità deux partenaires, justice et ASE. Il concerne toutle monde. L’efficience viendra du fait que les villeset les CAF seront elles aussi impliquées dans la protectionde l’enfance. Ce qui peut apparaître commeun minimum serait la construction dans chaque départementd’un dispositif d’observation partagée, derencontres partagées peu importe le terme, dans lequelse retrouvent tous les acteurs pour mesurer qu’on nepeut pas agir dans la société moderne sans tenircompte de la logique du partenaire et inversement.On ne peut pas construire des logiques contre, il nousfaut construire des logiques avec.II. ÉCLAIRAGE EUROPÉEN SUR LESCONCEPTS DE PROGRESSIVITÉ ET DE SUBSI-DIARITÉ DE L'INTERVENTION JUDICIAIRE :L’EXEMPLE DE L’ALLEMAGNE ET DE LABELGIQUEAlain Grevot, directeur de JCLT Oise, groupeSOSAujourd’hui on parle beaucoup de progressivitédes réponses, de concept de subsidiarité. Jesais que ces deux mots sont très puissants en Belgiqueet en Allemagne. Je ne vais pas rentrer dans le détaildu fonctionnement de ces deux pays. Globalementils agissent sur un même modèle qu’on peut qualifierd’offensif parce qu’il repose sur la notion d’obligationpositive définie par la cour européenne deStrasbourg qui, en particulier, demande aux Etatsd’aller au-devant des usagers, au-devant des difficultésde leurs concitoyens sur le principe de subsidiarité.Tout d’abord, un avertissement. Ces pays ont deuxtraits en commun extrêmement importants sur le plancontextuel. D’une part, ce sont des pays fédéraux.La légitimité des collectivités territoriales, villes etprovinces, a précédé celle de l’Etat central. On neconnaît pas dans ces pays de débats sur la légitimitédes conseils généraux. L’autre point extrêmementimportant c’est que ce sont des pays où l’intérêt généralest porté conjointement, constitutionnellementen ce qui concerne l’Allemagne, par les pouvoirspublics et par de très puissantes organisations, piliersde la société civile. Ces organisations sont issues dela vie confessionnelle comme les oeuvres diaconalesen Allemagne, Caritas que l’on retrouve en Belgique,de la vie politique, du mouvement social démocratepar exemple, des syndicats ou des partis politiques,de la militance qui peut être féministe, culturelle,laïque. Ces grandes organisations sont co-gestionnairesen période de vaches grasses, un petit moinsen période de vaches maigres comme c’est le cas enAllemagne actuellement. Ce modèle offensif, progressifet subsidiaire a été défini en Allemagne et enBelgique au début des années 1990 à partir d’un débatentamé au milieu des années 1970.Le premier principe et le plus puissant est la subsidiarité.Il faut bien comprendre que c’est d'abord unprincipe politique, avec une distribution des rôles etdes compétences entre les différents niveaux de pouvoirpolitique, la commune, la province, les communautésen Belgique, les länders en Allemagne et l’Etatcentral. Les frontières sont clairement délimitées.L’Allemagne a redéfini sa structure au lendemain dela seconde guerre mondiale et la Belgique au momentde la communautarisation en 1990. C’est aussi unprincipe opérationnel qui repose sur la valorisationdes acteurs de première ligne, de l’implication decelles et ceux qui sont au plus près du problème.Quelques exemples. L’écoutant téléphonique, équivalentdu 119, va dans un premier temps voir commentaider le signalant à agir. Le principe de subsidiaritéconsiste à faire tout ce qu’il est possible defaire à un niveau N avant de passer à un niveau N+1.C’est une logique d’action ascendante qui repose surle principe du pouvoir d’agir et qui vise à donner auxusagers un peu plus de pouvoir sur leur destinée, surleur propre vie. Cela se traduit par une définition du97


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESrôle de l’aide spécialisée qui a un caractère supplétifpar rapport à toute autre forme d’action sociale.On ne passe à un niveau de réponse plus institutionnellequ’après avoir vérifié qu’aucune autre formed’aide n’est possible. En terme de placement, c’ests’assurer qu’une formule de parrainage, qu’une formuled’accueil de proximité par la famille, par unvoisin n’est vraiment pas possible avant de passer àun registre institutionnel. Principe de subsidiaritésignifie en Belgique et encore plus en Allemagne trèsconcrètement que les tiers secteurs non lucratifs sontprioritaires dans la mise en oeuvre des actions alorsque les pouvoirs publics ont le monopole en matièredécisionnelle. La ligne de partage est très claire. EnAllemagne par exemple, on ne développera unservice en régie à partir d’une ville ou d’un länder,que si aucune initiative ne vient de la part du secteurque nous appellerions le secteur associatif.Ce principe de subsidiarité se traduit par la progressivitédes réponses. Il y a une très grande attentiondans ce modèle à donner priorité aux dimensions deprévention primaire et secondaire et notamment à ladimension confidentielle. Après le volet préventionprimaire et secondaire, on entre dans le champ de l’approchenégociée, volontaire. Ces pays donnent prioritéà l’approche négociée. On ne passe à une formed’action contrainte que s'il y a échec affirmé et évaluéde l’action négociée. C’est aussi la priorité donnéeà l’aide dans le milieu de vie par rapport à la suppléancefamiliale.Un autre de ces principes et celui de la déjudiciarisation.Jusqu’en 1993, les Belges avaient un dispositifstrictement comparable au nôtre. La fonction de jugepour enfant appelé ensuite juge pour la jeunesse étaitstrictement similaire à la situation française. Actuellement,le juge de la jeunesse belge est compétent pour lesmineurs délinquants et pour toutes formes de difficultésrencontrées par l’enfant. Le juge allemand, jugede la famille, cumule les fonctions de juge pour enfantau civil français, de juge des affaires familiales, dejuge des tutelles c'est-à-dire couvrant l’ensemble dessituations dans lesquelles un enfant ou un adolescentpeut se trouver en délicatesse par rapport à ses parentsou à la société. Le juge garde le monopole de l’aideimposée et contrainte. Il n’intervient que sur saisinedu parquet qui en Allemagne et en Belgique a un rôletrès important. En Belgique, le parquet est présent àtoute audience publique quand il y a signalement etsaisine du juge de la jeunesse. La compétence du jugeest limitée aux circonstances, le danger ou le désaccord.L’intervention de la justice doit être limitée autemps nécessaire au règlement de l’affaire. On donneratoujours priorité à la négociation y comprisune fois la décision contraignante prise. Si on trouveun accord après, il prévaudra sur la décision initiale.En contrepartie, et c’est un point important, en allégeantla charge du juge, en lui donnant une place beaucoupplus procédurale, beaucoup plus limitée, on adéfini beaucoup plus précisément les rôles de chacun.En Belgique, c'est le conseiller d'aide à la jeunesse quiintervient dans le cadre de l'aide volontaire et le directeurde l'aide à la jeunesse dans le cadre de l'aidecontrainte. En Allemagne, cette prérogative revientaux fonctionnaires de la jeunesse. On a ainsi dégagéle juge de la jeunesse d'un certain nombre de décisionsen cernant plus clairement le rôle du décideur administratif.Quatrième principe, celui de la régulation. Il y aune régulation de l’action de l’administration par descommissions, en Allemagne comme en Belgique, danslesquelles sont représentées les composantes de lasociété civile du territoire donné. Elles en reflètent lacomposition culturelle, sociale. Imaginez simplementen France qu’entre l’administration de l’ASE et leconseil général existe cette commission qui soit uneinterface à laquelle l’ASE rendrait compte, avec laquelleles élus échangeraient continuellement. C’est un espacede régulation qui est complété par une très puissanteréférence déontologique et une présence du droit,notamment du droit des usagers. Dans ces deux pays,il n’y a pas d’obligation de signalement mais uneresponsabilité de signalement pour les professionnelset d’autre part un positionnement des adolescentsde 14 ans et plus comme co-décideurs. Aucune décisionde type administratif, accueil provisoire ou AEDne sera prise en Belgique ou en Allemagne sans l’accordexpress écrit du mineur de 14 ans et plus.98


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESIII. DE NOUVELLES FRONTIÈRES À DÉFINIR,EXEMPLE D'UN DÉPARTEMENT : LE GARDRoselyne Becue-Amoris, Directrice EnfanceFamille au Conseil Général du GardIl est important de mettre de la distance entre ceuxqui décident et ceux qui mettent en oeuvre. Malgrécela, quand on regarde le nombre d’enfants accueilliset le nombre d’enfants qui sont suivis, on a à peuprès 65 % de situations qui font l’objet de décisionsjudiciaires et 35 % qui font l'objet de décisions administratives.On a essayé de comprendre pourquoi. Ons’est demandé s’il suffisait de modifier les textespour que les pratiques s’en trouvent modifiées.Plusieurs éléments peuvent expliquer cette situation.Tout d'abord pour travailler dans la « prévention »,c’est-à-dire aller à la rencontre des parents, discuteravec eux de leurs difficultés et de ce qui va bien aussi,cela demande beaucoup de temps, cela demande unereconnaissance mutuelle entre les parents et le ou lesprofessionnels qui interviennent, cela demande aussiune estime. La plupart du temps, face à la préoccupationconstante qu'on a de l’enfant, on va plutôts’occuper de l’enfant que des parents. Cette questiondu temps nécessaire pour élaborer quelque choseavec les parents me semble importante. Le deuxièmeélément d’explication, c’est que nous sommes dansune société où la notion de sécurisation juridique estde plus en plus prégnante. Les professionnels aussisont peureux et les élus nous demandent de garantiret de prendre des décisions qui ne fassent pas devagues. Il nous faut pourtant accepter la prise derisques. Le cadre administratif oblige à prendredes risques et parfois à intervenir en urgence. Celasuppose de bonnes relations de travail avec le jugedes enfants. Sans fondamentaux communs, cela nemarche pas. J’ai eu la chance de participer il y aquelques années au groupe de recherche sur la parentalitésous la direction du Professeur Roussel, et nousavons parlé de la fonction symbolique du cadre judiciaire.Dans certains cas, ce cadre permet de mieuxrespecter les parents. Quand les parents sont dansl’incapacité de reconnaître leurs difficultés, il est préférableque la décision arrive de façon autoritaire.Cela ne les oblige pas à nommer concrètement cesdifficultés. Je pense que depuis quelques années nousrencontrons des parents qui vont de plus en plus mal.On commence à travailler avec eux dans le cadred’un accord et deux mois après ces modalités sontremises en question. Le cadre administratif peut parfoisêtre insuffisant.Pour conclure, par rapport à la proposition du rapport,il me semble intéressant d’ajouter dans le codecivil que lorsque le juge des enfants est saisi, ildoit pouvoir vérifier qu’on a pas pu aboutir à la miseen place des modes de réponse et d’accompagnementdans le cadre administratif. Cette possibilitépeut sécuriser à la fois les décideurs, les travailleurssociaux et cela nous permettra d’être plus fermes.Ajoutons qu’un travail continu entre les magistratset les cadres attachés ou inspecteurs de l’ASE estincontournable. Si on ne se voit pas régulièrement,le minimum de confiance, de reconnaissance ne semet pas en place.DEBAT AVEC LA SALLEBrigitte Dufour, Maire-adjointe de la villedu HavreJe voudrais reprendre ce que vous avez dit sur lesélus et sur leurs inquiétudes. Bien que nous ayonsdes numéros verts, c’est très difficile de faire dessignalements. Souvent les élus sont le réceptacled’inquiétudes de voisins qui se déchargent sur nous99


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESpour faire les signalements. Nous constatons que lesenfants signalés sont déjà suivis par l’ASE. Noussommes donc inquiets de voir que bien que ces enfantssoient suivis, les voisins ont le sentiment qu’il y aencore des choses à faire.Roselyne Becue-Amoris, Directrice EnfanceFamille au Conseil Général du GardCette inquiétude est légitime et partagée mais celan’empêche pas de travailler et de prendre des risques.Cette prise de risques me semble nécessaire. Ilfaut aussi expliquer que l'évaluation d'une situationc’est d’abord une proposition d’aide et desoutien à la famille avant autre chose. Nous sommessans arrêt, et c’est normal, entre la protection de l’enfanceet le soutien des familles. Cette obligationde ne pas penser l’enfant contre les parents maisde penser la famille comme étant le lieu où il y a lesenfants et les parents nous conduit à prendre desrisques et les élus doivent pouvoir mesurer cela.Jean-Louis Sanchez, Délégué général de l'OdasJ’ai trouvé vos propositions tout à fait pertinentes.Vous avez signalé l’importance de rencontres, d’espacespartagés avec la justice. Est-ce que vous avezcréé ce type d’espace dans le Gard, est ce que vousêtes très impliqués dans une démarche d’observationpartagée?Roselyne Becue-Amoris, Directrice EnfanceFamille au Conseil Général du GardL’assemblée vient de voter le schéma de l’enfance.On a prévu effectivement des temps de rencontres,d’évaluation, de conférences annuelles pour faire lepoint sur la politique de l’enfance. Il a été prévude mettre en place un observatoire. En parallèle,on a pris l’habitude, avec les 4 juges des enfantsde se retrouver tous les trois mois. On travaille ensemblesur la définition et la gestion du danger.IV. DE NOUVELLES FRONTIÈRES À DÉFINIR,TÉMOIGNAGEJean-Pierre Rosenczveig, Président duTribunal pour enfants de BobignyIl y a beaucoup de sujets dans nos débats. Le premierest celui du respect du droit des enfants, durespect de l’enfant en tant que personne. C’est lamême démarche qu’au niveau du droit des femmes.On doit les reconnaître comme des personnes ayantdes droits. Après on envisage des dispositifs de préventionet de lutte contre la maltraitance. C’est lamême question que nous aurons demain à traiteren ce qui concerne les personnes âgées.Disons tout de suite qu’il faut légiférer sur les grandesvaleurs sans refaire l’erreur de 1989. Dans lesdeux rapports dont on parle depuis ce matin, il y ades très bonnes choses, de très bonnes évolutionstechniques. Il y a aussi des manques et des lacunes.Restons prudents. Devant la mission parlementaire,j’ai demandé: d’après vous combien y a-il d’enfantsqui sont pris en charge physiquement par l'ASEdont les propres parents l’étaient il y a 20 ans ? Ilssont allés jusqu’à 70 %. La réalité, sur la base destravaux sérieux, c'est qu'on est entre 4 % et 6 %.Il faut un débat national d’une manière posée. Commentpeut-on avoir un débat politique sain si on ne metpas sur la table des informations partagées, d’où l’intérêtde la création de l’ONED et des travaux del’ODAS. L’ASE moderne n’a pas aux yeux des gensl’image d’un service accueillant. Pour autant, je penseque le travail que nous faisons, travailleurs sociaux,magistrats, est plutôt performant mais d’évidence ilfaut encore progresser. Arrêtons de dire que toutce que nous faisons est mauvais, interrogeons noussur les limites de notre dispositif. Avant de casserl’instrument, réfléchissons aux valeurs que nous voulonspromouvoir. Hier, nous étions d'accord sur l'attentionà porter au triangle sur les parents, les enfants,les professionnels et aujourd’hui on exclut totalementle débat sur l’enfant et ses droits, son droit àavoir une famille, pour ne plus raisonner que sur lesproblèmes de régulation entre l’autorité administrativeet l’autorité judiciaire. Il faut prendre en compte100


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESd’abord la protection de l’enfance et le droit fondamentalpour l’enfant de vivre en famille, la sienneou une autre, d’être protégé dans sa personne et d’avoiraccès à toutes les possibilités de développement,selon notre ordre culturel et juridique français et international.Qui a priori est le plus apte à garantirl’atteinte de ces objectifs? Ce sont plutôt les parents,les géniteurs. Ce qu’il faut se rappeler, c’est qu’onavait 150 000 enfants abandonnés au début du XX esiècle, on est aujourd’hui à 2500 pupilles de l’Etat,c’est plus une avancée historique positive qu’unerégression. S’il faut demain légiférer, identifions lesvaleurs et les objectifs principaux et ensuite voyonssi le dispositif technique est adapté ou non. Il y a 20ans, sur ce débat on aurait réfléchi sur les grandsconcepts fondamentaux, l’autorité parentale, le droitdes personnes, la constitution, l’article 34 et 37 dela constitution. On entre de plus en plus dans unestratégie de gestion.Le dispositif est actuellement contesté, souvent par desapprentis sorciers sur des bases plus scientistes que scientifiques.Il ne faut pas que l’arbre cache la forêt c'està-direl’intervention judiciaire, ses limites, ses contradictions,ses défaillances et que cela nous fasse manquerles nécessaires articulations avec les interventionspubliques, privées: à partir de quel moment la sociétélégitime qu'on entre dans la sphère privée?Plusieurs questions sont posées :La première est celle de la dénonciation de la judiciarisationavancée comme étant une démarche qu’ilfaut combattre. Est ce que c’est un mal ? Oui, dansle sens où trop de justice tue la justice. Il y a une augmentationde 1 à 3 des interventions judiciaires enmatière d’assistance éducative sur 20 ans. Dans lemême temps, la montée de la délinquance juvénileet des réponses judiciaires fait exploser la machine.On peut alors se demander quelle est l’attente desservices sociaux à l’égard de la justice. De plus, ilfaut montrer à l’Etat que s’il peut y avoir dysfonctionnementsjudiciaires, le vrai problème qui est posé,c’est la mise en oeuvre des décisions judiciaires.C’est là que les propositions du rapport de Broissiaprennent sens quand vous dites qu’on ne peut pasnous mandater sans nous donner les informations.Mais pourquoi y a-t'il à l’heure actuelle une attenteà l’égard de la justice ? Est-ce que c’est une attentepositive, est-ce le moyen de créer le cadre qui va rassurertout le monde et qui va permettre à l’actionsociale de se développer ou est-ce par défiance à l’égarddes services sociaux que des justiciables vontdirectement à la justice ? Est-ce que c’est par soucides travailleurs sociaux et des institutions socialesd’avoir un cadre qui les sécurise mieux que leur propreadministration ? Il faut s’interroger sur le sensdu mouvement auquel nous avons assisté ces dernièresannées.Lorsqu’on regarde le contenu du rapport de Broissiaou du rapport Pecresse, personne n’appelle à la révolutionsur le dispositif actuel. On passe à côté desquestions fondamentales, pour des raisons de sensibilitépoliticienne, de guerre d’influence, de guerred’école; la proposition Martinez voudrait que le jugedes enfants ne soit plus compétent en matière de protectionde l’enfance mais que ce soit le juge des affairesfamiliales. Il ferait la loi dans la famille, lejuge pour enfant s’occuperait de la délinquance juvénileet ce serait l’Etat qui prendrait en charge les jeunesdélinquants. Voilà le dispositif vers lequel certainssouhaiteraient aller, il est clair qu’il répond àun souci de clarification et à un souci politique deconcentrer les forces judiciaires sur la délinquance.Mais il passe à côté d’un siècle de réflexion qui consistaità dire qu’avant d’être délinquant, les enfants sonten danger, c’était la grande révolution de 1958. Estceque ce dispositif a été défaillant? Est-ce que l’autoritéjudiciaire ne va plus être celle qui, commeaujourd’hui identifie, avec l’aide des services sociauxd’investigation et notamment de l’ASE, un besoind’étayage parental, qui mandate une équipe et quivérifie que cet étayage est à la hauteur ? On serademain sur un nouveau juge des affaires familialesqui distribuera du droit, qui donnera un mandat globalà l’ASE et qui sera là uniquement pour trancher,un peu comme le juge à l’américaine qui du haut desa tribune, donne un mandat aux services sociaux etdit « affaire suivante ». Les propositions qui sontavancées dans les deux rapports sont intéressantes.Je me demande simplement si elles sont à la hauteurdu problème qui a été identifié. Est-ce qu’elles s’imposent? Est-ce qu’elles ne sont pas redondantes ?C’est un objectif politique quand on dit que la justicene doit intervenir qu’en cas de limites rencontréespar l’action sociale. Est-ce que c’est si diffé-101


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESrent de ce que nous vivons aujourd’hui ? Je n’en aipas le sentiment.Jean-Louis Sanchez, Délégué général de l'OdasJe ne pense pas que les préconisations de Broissiasoient de marginaliser la justice. Ce qui est souhaitablecomme tu viens de le dire, c'est un appelpolitique pour que chacun joue son rôle. Ces dernièresannées, on n’a pas cessé, y compris avec les débatssur la décentralisation, de déstabiliser la protectionadministrative. Un des buts de ce rapport est de remettrela protection administrative au cœur du dispositifde protection de l’enfance, cette dimension politiqueest indispensable aujourd’huiJean-Pierre Rosenczveig, Président duTribunal pour enfants de BobignyJe ne le conteste pas. On voit bien que le dispositifest complexe. Pour l’intervention judiciaire,il y a deux critères: le danger et le refus des parentsde mettre en oeuvre. C’est assez clair. Je dis que lerapport de Broissia n’est pas révolutionnaire, il amélioredans des stratégies modestes. Il vise à réaffirmerle rôle premier de la protection administrative,la place du conseil général au cœur de la protectionde l’enfance, la place du président du départementcomme pilote de cette prise en charge et la place duprocureur comme pilote judiciaire. On demande àl’autorité judiciaire, par un jugement, comme enAllemagne et en Belgique, de bien vouloir dire sil’action administrative a été pertinente. C’est ce quenous faisons de facto.Je partage l’objectif. Vouloir réaffirmer la subsidiaritéest intéressant. On a toujours tendance à dire quel’autorité administrative et l’autorité judiciairesont sur le même pied. Ce n’est pas vrai. L’interventionpremière est une intervention administrative. Ce n’estqu’exceptionnellement, là on rejoint l’article 34 et 37de la constitution, qu’on doit porter atteinte à l’autoritéparentale et dans ce pays, on ne peut le faireque par la loi et la justice. Cette orientation-là mesemble bonne. En revanche, là où je suis un peu surpris,c’est sur le fait que vous êtes à la recherche d’unréférent les uns et les autres. J’enseigne à mes étudiantsque le pendant du juge pour enfant, c’estl’inspecteur de l’enfance, c’est celui qui est garant àl’égard de la famille du suivi et des mesures administratives.Pour finir, je rejoins des choses qui ont pu être diteset sur lesquelles je voudrais insister. À la marge, ily a des corrections qu’on peut faire notamment surla compétence du président du Conseil Général ence qui concerne le recueil de l’ensemble des signalementset leurs traitements, erreurs qui ont étéfaites en 1989. Ensuite il faut, et c’est là l’enjeu politique,redonner de la crédibilité à l’action sociale auxyeux de la population, aux yeux même des acteurssociaux. Nous produisons des choses bonnes maisla représentation que nous donnons de nous, l’affaired’Angers en est une caricature, est une mauvaiseimage. Troisième chose, il faut faire jouer à fond lesdispositifs comme ce qui se passe dans le Gard oudans d’autres départements notamment sur le problèmedes signalements et de la réponse judiciairepar des protocoles locaux qui s’inscrivent dans lesgrands principes posés par la loi et qui s'adaptentlocalement: n’oublions pas l’intérêt des lois de décentralisation.Oui, il y a disparités des réponses locales,c’est l’enjeu même de la décentralisation, maisles grandes valeurs, les grands enjeux sont respectés.La quatrième chose, c'est de lâcher la bride àtoute une série de réponses diversifiées qui répondentaux besoins des familles notamment avec desniveaux d’intervention sociale qui vont de la priseen charge physique jusqu’à l’accueil à la maison maissurtout ne pas mélanger la prise en charge physiqued’un enfant ou d’une situation avec le statut juridiquede l’enfant. Dans la loi de 1984, j’ai fait en sorte queplus jamais, l’ASE ne puisse être accusée de rapterles enfants et d’en faire des pupilles de l’Etat.Vous devez intervenir soit sur un mandat de la famille,soit sur un mandat judiciaire. Votre métier, c’est d’accompagnerdes parents dans l’exercice de l’autoritéparentale et quand les parents sont défaillants, deprendre en charge les enfants. Vous ne devez pas êtretitulaire de l’autorité parentale, sauf exceptionnellement.Méfions nous d’une législation à l’emporte-pièce,prenons le temps d’un débat vraiment politique.102


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESDEBAT AVEC LA SALLEJean-Louis Sanchez, délégué général de l’OdasEst-ce que le juge pour enfants est prêt à reconnaîtrela légitimité politique sur un système de protectionde l’enfance qui n’est pas contraire aux principes d’indépendancedes magistrats? Les magistrats doiventrevendiquer leur indépendance mais la constructiondes politiques au niveau des départements relève desconseils généraux. Cela aussi fait partie du débat.Lucie Tarajacque, Conseil général de la SavoieJe pense qu’effectivement, on ne pourra pas faire l’économied’une analyse de la pertinence, de la cohérence,de l’efficience et de l’efficacité de nos dispositifsde protection de l’enfance au regard des coûts.Il y a une chose dont j’ai très peu entendu parler cematin, sinon peut être par ma collègue du Gard, c’estcomment nous allons anticiper une vague, j’espèreque je me trompe, de parents qui n’ont plus du tout lemoindre savoir faire par rapport aux gestes de la viequotidienne concernant leur enfant.Madeleine Branger, conseillère technique auConseil général des Bouches-du-RhôneLes travaux de ce matin ont été très intéressants. Letravail social de groupe, de communauté, de DSL, çaa toujours existé mais il faut avoir le temps, être militantpour pouvoir le faire. Pourquoi allons nous changerla loi de 1989 ? Parce que de temps en temps ily a des affaires qui sont reprises pas la presse du typeAngers? Que fait le service social? Que fait la PMI?Que font le département et la justice? Au quotidien,il y a du travail qui se fait et je pense que depuis 20ans il y a une amélioration notable. Ce qu’il faudraitpeut-être c’est faire des évaluations, de manièresscientifiques, pour savoir si nous fonctionnonsmal. Quand j’entends parler de référent, c’est faitdepuis 1984. On a mis en place des procédures et desévaluations régulières et je ne vois pas pourquoi onva changer à nouveau un système alors qu’il y a untravail de régulation, de confrontation, d’échangesavec les partenaires. Je voudrais ajouter qu’on demandebeaucoup aux travailleurs sociaux de terrain.Daniel Ramé, chef du service social départementalau Conseil général du Bas-RhinQuand on parle de prévention et de protection de l’enfance,on cible principalement les interventions administrativesou judiciaires. C'est dommage parce qu’audépart de toute la politique de prévention et de protectionles deux services qui assurent cette relation deproximité avec la famille sont le service social etles services PMI: leur approche n'est pas marquée parune décision administrative ou judiciaire.Jean-Louis Sanchez, Délégué général de l’OdasQuand on me dit qu’il y a du développement socialdans ce pays, je suis désolé, il y a des anecdotes dedéveloppement social. Le problème est de savoir sion reste là ou si on va plus loin.Claude Roméo, Directeur enfance famille auConseil général de Seine-Saint-DenisSur ce débat, il faut rester zen parce que au moins onest tous d’accord sur l’idée que l’ASE en 2005 n’arien à voir avec ce qui pouvait se faire il y a 20, 30 ou40 ans. Le niveau des professionnels que nous avonsaujourd’hui contribue à cette amélioration. Quand onregarde les études, les investissements des uns etdes autres, tout cela a contribué à l’amélioration del’ASE. La question qui est posée est celle du problèmede la protection de l’enfance dans nos relations avecl’extérieur, dans nos relations avec l’opinion publiqueet avec les médias. On voit combien on est obligéde se justifier plutôt que d’être offensif.Sur le changement de l’ASE et des familles, je pensequ’il y a des choses radicalement nouvelles et jesuis complètement d’accord avec les 34 préconisationsdu groupe de travail de Broissia.Il faut faire évoluer les structures mises en place. Sion regarde bien, entre l’AEMO et le placement, il n’ya rien du point de vue de la loi. Il faut qu’on trouvedes structures adéquates. Il faut aussi envisager le soutiendes professionnels, parce qu’aujourd’hui travaillerdans la rue ou aller voir les familles en difficultés, pluspersonne ne veut le faire. C’est tout cet ensemble qu’ilfaut revoir et c’est ce qui nous conduit à dire : lançonsun débat avec tous les professionnels.Alain Grevot, Directeur de JCLT Oise, groupeSOSJe voudrais rappeler que la France, parmi les grandspays occidentaux, est le seul pays qui n’a pas opéréun toilettage de sa législation avec un rappel des valeursfondamentales, des principes d’action qu’on y associeet de la structure qu’il faut adopter. Nous sommes103


LES CINQUIÈMES RENCONTRES NATIONALES DE L’ODASACTES DES CONFÉRENCESun pays extrêmement riche de concepts cliniques, d’analysessur la parentalité mais il nous faut allerchercher dans des pays voisins comme la Belgiqueune utilisation pratique de ces concepts. Dans cecas on se tourne vers la suppléance voire la substitutioncomme le font les anglo-saxons, soit on travailledans la durée comme au Canada.Jean-Louis Sanchez, Délégué général de l’OdasJe reprends l’analyse du Vaucluse sur l’indépendancede la justice et le nécessaire rapprochement avec lepolitique. Avec les interventions d’aujourd’hui, onpeut souligner les signes positifs qui devraient conduireà l’évolution du dispositif. N’oublions pas cependantle travail en amont, la prévenance, car sans elle onrisque d’être emportés par une vague et, ce quel quesoit le dispositif.104

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