Bientôt SOLEIL : la source française de rayonnement synchrotron
Bientôt SOLEIL : la source française de rayonnement synchrotron
Bientôt SOLEIL : la source française de rayonnement synchrotron
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
Bientôt <strong>SOLEIL</strong> : <strong>la</strong> <strong>source</strong> française<strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong>Le <strong>rayonnement</strong> électromagnétique etles photons associés, un outil privilégiépour étudier <strong>la</strong> matièreLe <strong>rayonnement</strong> électromagnétique, c’est <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière. De<strong>la</strong> lumière au sens <strong>la</strong>rge bien sûr, non restreint au petit domaine<strong>de</strong> fréquence auquel <strong>la</strong> rétine <strong>de</strong> notre œil est sensible. Lephoton est un concept introduit par Einstein, dans l’un <strong>de</strong> sesquatre articles fondamentaux publiés en 1905, pour modéliserles interactions entre le <strong>rayonnement</strong> électromagnétique et <strong>la</strong>matière qui s’effectuent par quantités discrètes d’énergie. Lephoton est une particule quantique associée au champ électromagnétique(e.m.), dont <strong>la</strong> fonction d’on<strong>de</strong> est l’on<strong>de</strong> e.m.elle-même. Sa vitesse c dans le vi<strong>de</strong>, invariante dans toutréférentiel, est celle <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière (voisine <strong>de</strong> 300 000 km/s).Le photon a une durée <strong>de</strong> vie infinie et suit les géodésiques <strong>de</strong>l’espace-temps. Il emporte une énergie liée à <strong>la</strong> fréquence ν<strong>de</strong> l’on<strong>de</strong> e.m. associée par <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion E = hν, et son impulsionest p = hν/c, h étant <strong>la</strong> constante <strong>de</strong> P<strong>la</strong>nck.Les photons sont un outil essentiel pour son<strong>de</strong>r <strong>la</strong> matière,et ceci tient à un ensemble <strong>de</strong> raisons. Il existe divers procédéspour produire du <strong>rayonnement</strong> e.m. <strong>de</strong> <strong>la</strong> fréquence souhaitée.Les <strong>source</strong>s disponibles permettent <strong>de</strong> produire<strong>de</strong>s on<strong>de</strong>s e.m. dans une très <strong>la</strong>rge gamme <strong>de</strong> fréquence(donc d’énergie <strong>de</strong> photons), <strong>de</strong> bril<strong>la</strong>nce, d’intensitéet <strong>de</strong> flux. On sait comment modifier <strong>la</strong> géométrie <strong>de</strong>sfaisceaux e.m. (par exemple pour les focaliser) et choisiret modifier leur état <strong>de</strong> po<strong>la</strong>risation, y compris dans ledomaine <strong>de</strong>s rayons X. La gamme <strong>de</strong>s détecteurs disponiblesest également <strong>la</strong>rge. Par ailleurs, les conditions<strong>de</strong> sécurité dans l’utilisation <strong>de</strong>s faisceaux e.m. sontbien maîtrisées. En choisissant l’énergie <strong>de</strong>s photons, onsélectionne le phénomène physique étudié. Enfin, lesphotons, selon leur énergie et les conditions expérimentales,permettent l’analyse <strong>de</strong> <strong>la</strong> surface et/ou du volume<strong>de</strong>s échantillons sondés.Le <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong>Une particule chargée qui subit une accélération émetdu <strong>rayonnement</strong> e.m., donc éjecte <strong>de</strong>s photons. Dans untube à rayons X médical, par exemple, les électrons émispar le fi<strong>la</strong>ment cathodique, puis accélérés, sont brutalementralentis dans le métal <strong>de</strong> l’ano<strong>de</strong> et émettent alorsdu <strong>rayonnement</strong> continu baptisé « bremsstrahlung »(<strong>rayonnement</strong> <strong>de</strong> freinage). Lorsque l’électron se dép<strong>la</strong>ceà vitesse re<strong>la</strong>tivement faible par rapport à l’observateur, ilrayonne dans toutes les directions <strong>de</strong> l’espace un rayon-Roger Fourme 1 , Marie-Paule Level 2 , Isabelle Quinkal 3Synchrotron Soleil, L’Orme <strong>de</strong>s Merisiers, Saint-Aubin, 91190 Gif-sur-Yvette1. Directeur scientifique, Roger.fourme@<strong>synchrotron</strong>-soleil.fr2. Adjointe au directeur <strong>de</strong> <strong>la</strong> division Sources et Accélérateurs, Marie-paule.level@<strong>synchrotron</strong>-soleil.fr3. Chargée <strong>de</strong> communication, Isabelle.quinkal@<strong>synchrotron</strong>-soleil.frProjet initié au début <strong>de</strong>s années 1990 au <strong>la</strong>boratoire d’utilisation du <strong>rayonnement</strong> électromagnétique (LURE) d’Orsay,<strong>la</strong> <strong>source</strong> française <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> <strong>SOLEIL</strong> fournira une lumière aux caractéristiques exceptionnelles, dèsl’automne 2006, aux communautés scientifiques et industrielles. Cette lumière sera produite par <strong>de</strong>s électrons re<strong>la</strong>tivistescircu<strong>la</strong>nt dans un anneau <strong>de</strong> 354 mètres <strong>de</strong> périmètre, puis exploitée dans 24 « lignes <strong>de</strong> lumière ». <strong>SOLEIL</strong>, actuellementen construction sur le p<strong>la</strong>teau <strong>de</strong> Sac<strong>la</strong>y, bénéficiera d’innovations technologiques développées par ses propreséquipes, qui le p<strong>la</strong>cent au premier rang <strong>de</strong>s centres <strong>synchrotron</strong> dits <strong>de</strong> 3 e génération. Les qualités <strong>de</strong> son <strong>rayonnement</strong>(bril<strong>la</strong>nce et gamme spectrale s’étendant <strong>de</strong>s infrarouges aux rayons X) ouvrent <strong>de</strong> nouvelles perspectives pour son<strong>de</strong>r<strong>la</strong> matière. Aussi, ce grand équipement accueillera-t-il chaque année plus <strong>de</strong> 2000 utilisateurs spécialistes <strong>de</strong> domainesaussi variés que <strong>la</strong> biologie, <strong>la</strong> chimie, <strong>la</strong> science <strong>de</strong>s matériaux, l’environnement, <strong>la</strong> physique, les sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> Terreou le patrimoine culturel et l’archéologie.nement monochromatique (c’est-à-dire d’une seule fréquence)(figure 1). Quand sa vitesse augmente pour atteindre une fractionappréciable <strong>de</strong> <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière, l’émission <strong>de</strong>vient<strong>de</strong> plus en plus anisotrope. Pour un électron <strong>de</strong> très hauteénergie, donc animé d’une vitesse proche <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière,l’anisotropie <strong>de</strong>vient extrême. Dans ce cas, du point <strong>de</strong> vue<strong>de</strong> l’observateur dans le système du <strong>la</strong>boratoire, le <strong>rayonnement</strong>e.m. est confiné dans un cône <strong>de</strong> très petite ouverturedont l’axe est le vecteur-vitesse <strong>de</strong> l’électron (figure 1).De plus, le <strong>rayonnement</strong> n’est plus monochromatique, mais« b<strong>la</strong>nc » : on est en présence d’une distribution continue <strong>de</strong>fréquences. Ces caractéristiques découlent directement <strong>de</strong>slois <strong>de</strong> l’électromagnétisme et <strong>de</strong>s postu<strong>la</strong>ts et résultats <strong>de</strong> <strong>la</strong>re<strong>la</strong>tivité restreinte, théorie exposée dans un autre articled’Einstein <strong>de</strong> <strong>la</strong> miraculeuse année 1905.Le principe du <strong>rayonnement</strong> d’un électron en mouvementapparaît pour <strong>la</strong> première fois dans un ouvrage <strong>de</strong> J. Larmoren 1897 en ce qui concerne les électrons non re<strong>la</strong>tivistes, puisdans les ouvrages <strong>de</strong> A. Lienard et E. Wiechert en 1898 pourles électrons <strong>de</strong> vitesse arbitraire (concept <strong>de</strong>s potentielsretardés). Il faut ensuite attendre les années 1950 pour qu’apparaissent<strong>de</strong>s ouvrages <strong>de</strong> référence tels les articles <strong>de</strong>Figure 1 : Production <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong> par un électron lent (a) ou re<strong>la</strong>tiviste (b) sur orbitecircu<strong>la</strong>ire.(a) Quand <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong> l’électron accéléré est faible par rapport à c :– émission <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong> e.m. dans toutes les directions– photons mono-énergétiques(b) Quand <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong> l’électron accéléré est proche <strong>de</strong> c :– émission concentrée autour du vecteur vitesse dans un cône d’ouverture totale proche<strong>de</strong> 2/γ radian (γ, le facteur <strong>de</strong> Lorentz en re<strong>la</strong>tivité restreinte, est égal au rapport <strong>de</strong>l’énergie totale <strong>de</strong> <strong>la</strong> particule à l’énergie associée à <strong>la</strong> masse au repos)– distribution continue en énergie <strong>de</strong>s photons émis.Bulletin <strong>de</strong> <strong>la</strong> S.F.P. (150) juillet-août 2005 9
J. Schwinger en 1949, <strong>de</strong> D. Ivanenko et A. Sokolov (traductionalleman<strong>de</strong> en 1953), <strong>de</strong> M. Sands en 1955 et enfinl’ouvrage général <strong>de</strong> J.D. Jackson en 1962 (C<strong>la</strong>ssicalElectrodynamics).La mise en évi<strong>de</strong>nce expérimentale du <strong>rayonnement</strong> produitpar <strong>de</strong>s électrons re<strong>la</strong>tivistes eut lieu d’abord indirectement en1946, par l’observation <strong>de</strong> <strong>la</strong> variation <strong>de</strong> l’orbite <strong>de</strong> l’électron(J. P. Blewett), puis directement en 1947, par l’observation du<strong>rayonnement</strong> lui-même (H. Pollock et R. Langmuir) à travers lehublot d’un <strong>synchrotron</strong> produisant <strong>de</strong>s électrons <strong>de</strong> 70 MeVdans les <strong>la</strong>boratoires <strong>de</strong> <strong>la</strong> General Electric à Schenectady(USA), d’où le nom <strong>de</strong> « <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> ».Les <strong>source</strong>s <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> sont <strong>de</strong>s accélérateursd’électrons qui dérivent <strong>de</strong> ceux conçus initialementpour <strong>la</strong> physique <strong>de</strong>s hautes énergies. L’idée <strong>de</strong>s anneaux <strong>de</strong>collisions est née chez les physiciens <strong>de</strong>s hautes énergies(B. Touschek, Frascati, 1961) afin <strong>de</strong> disposer <strong>de</strong> toute l’énergie<strong>de</strong>s particules dans l’interaction. Il s’agit d’anneaux danslesquels <strong>de</strong>s particules (ici, e + , e - ) circulent sur <strong>la</strong> même orbitedans <strong>de</strong>s directions opposées. Le premier anneau, ADA,d’énergie 160 MeV (anneau italien installé à Orsay en 1963),fut bientôt suivi <strong>de</strong> beaucoup d’autres dans les différentspays, dans une course aux énergies <strong>de</strong> plus en plus gran<strong>de</strong>qui a culminé avec le LEP (100 GeV et 27 km <strong>de</strong> circonférence)au CERN, mis en service en 1989. Le <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong>a tout d’abord été une nuisance. En effet, l’effet <strong>synchrotron</strong>dissipe <strong>de</strong> l’énergie <strong>de</strong>s particules et engendre du<strong>rayonnement</strong> parasite : le grand diamètre du LEP est imposépar <strong>la</strong> nécessité d’avoir une faible courbure <strong>de</strong> <strong>la</strong> trajectoire<strong>de</strong>s particules, <strong>de</strong> manière à limiter <strong>la</strong> production <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong><strong>synchrotron</strong>. Puis les physiciens se sont avisés que cesanneaux étaient <strong>de</strong>s <strong>source</strong>s <strong>de</strong> lumière <strong>de</strong> grand intérêt.Dans un premier temps, il y eut utilisation partagée entre physiciens<strong>de</strong>s hautes énergies et physiciens du <strong>rayonnement</strong><strong>synchrotron</strong> (par exemple ACO et DCI au <strong>la</strong>boratoire LURE àOrsay, ou SPEAR à Stanford). Puis <strong>de</strong>s anneaux <strong>de</strong> stockage<strong>de</strong> 2 e génération, dédiés seulement à <strong>la</strong> production <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong><strong>synchrotron</strong>, ont été réalisés (par exemple, le SRS àDaresbury près <strong>de</strong> Manchester en Gran<strong>de</strong>-Bretagne,SuperACO à Orsay). Nous en sommes à <strong>la</strong> troisième génération,celle <strong>de</strong>s anneaux conçus pour obtenir <strong>de</strong>s <strong>source</strong>s <strong>de</strong><strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> très bril<strong>la</strong>ntes, très stables et tailléessur mesure pour diverses applications.Les anneaux <strong>de</strong> stockage à électrons sont souvent appelésdans le <strong>la</strong>ngage courant <strong>de</strong>s <strong>synchrotron</strong>s, ce qui est pluscourt et plus percutant, mais impropre. En réalité, un anneau<strong>de</strong> stockage est en général associé à un (vrai) <strong>synchrotron</strong> –appelé encore « booster » – qui accélère jusqu’à l’énergierequise les électrons produits par un petit accélérateur linéaire– ou « linac » – avant <strong>de</strong> les injecter dans l’anneau <strong>de</strong> stockage(voir figure 2).Comment fonctionne un anneau<strong>de</strong> stockage à électronsDans un tel anneau, <strong>la</strong> trajectoire <strong>de</strong>s électrons est constituéed’une alternance <strong>de</strong> parties courbées en arc <strong>de</strong> cercle(par application d’un champ magnétique permanent produitpar <strong>de</strong>s aimants dits <strong>de</strong> courbure) et <strong>de</strong> sections droites.L’énergie perdue par les électrons à chaque révolution sousforme <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong> leur est restituée intégralement durant<strong>la</strong> traversée d’une cavité où règne un champ électrique longitudinalproduit par un système radio-fréquence (RF). Seuls lesélectrons qui arrivent en phase avec l’oscil<strong>la</strong>tion du champradio-fréquence sont maintenus en orbite stable : cet effetprovoque le regroupement <strong>de</strong>s particules en « paquets » équidistants.La structure magnétique <strong>de</strong> l’anneau comprend,outre les aimants <strong>de</strong> courbure, un ensemble <strong>de</strong> quadrupôlesqui ramènent les électrons sur l’orbite moyenne, et d’hexapôlesqui corrigent diverses aberrations. Lors <strong>de</strong> <strong>la</strong> phase <strong>de</strong>remplissage (dite phase d’injection), les électrons produits parle booster sont injectés dans l’anneau et se stabilisent, ousont perdus dans les parois. Une fois l’anneau « rempli » (alors<strong>la</strong> circu<strong>la</strong>tion <strong>de</strong>s particules correspond à un courant continumoyen d’une fraction d’Ampère), l’injection est arrêtée et lesélectrons peuvent rester en orbite plusieurs heures.Figure 2 : Vue d’artiste d’un ensemble <strong>synchrotron</strong>, comprenant LINAC (1),booster (2), anneau <strong>de</strong> stockage (3) et <strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> lumière (4).Le <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> est extrait dans <strong>de</strong>s « lignes<strong>de</strong> lumière » raccordées tangentiellement à <strong>la</strong> chambre à vi<strong>de</strong>dans <strong>la</strong>quelle circulent les électrons. À chaque fois qu’unpaquet passe <strong>de</strong>vant un trou d’extraction, un éc<strong>la</strong>ir <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong><strong>synchrotron</strong> est émis dans <strong>la</strong> ligne <strong>de</strong> lumière correspondante.L’émission <strong>synchrotron</strong> est donc pulsée. Toutefois,à raison <strong>de</strong> millions d’éc<strong>la</strong>irs par secon<strong>de</strong>, on peut considérerpour beaucoup d’applications que l’émission recueillie à l’extrémité<strong>de</strong> chaque ligne <strong>de</strong> lumière est continue. La structurepulsée <strong>de</strong> l’émission peut être mise à profit dans <strong>de</strong>s expériencesimpliquant une résolution temporelle ; à cette fin, l’anneauest spécialement injecté avec un nombre réduit <strong>de</strong>paquets contenant le plus <strong>de</strong> charges possible.Les anneaux <strong>de</strong> 3 e génération accueillent dans leurs sectionsdroites <strong>de</strong>s dispositifs magnétiques spéciaux appelésonduleurs et wigglers. Un onduleur est une structure magnétiquepériodique dans lequel les électrons décrivent unetrajectoire en forme <strong>de</strong> sinusoï<strong>de</strong> <strong>de</strong> faible amplitu<strong>de</strong>. Pourchaque électron, les émissions successives dans les diversesarches <strong>de</strong> <strong>la</strong> sinusoï<strong>de</strong> interfèrent entre elles. Il en résulte,d’une part une concentration <strong>de</strong> l’énergie rayonnée dans uneban<strong>de</strong> fondamentale et <strong>de</strong>s ban<strong>de</strong>s harmoniques (au lieu duspectre continu produit dans un aimant <strong>de</strong> courbure) etd’autre part une réduction <strong>de</strong> <strong>la</strong> divergence du faisceau <strong>synchrotron</strong>.Dans ces conditions, <strong>la</strong> bril<strong>la</strong>nce (paramètre fondamentaldéfini comme le nombre <strong>de</strong> photons émis parsecon<strong>de</strong>, à une certaine longueur d’on<strong>de</strong> et dans une ban<strong>de</strong>spectrale déterminée, par unité <strong>de</strong> surface <strong>de</strong> <strong>source</strong> et parunité d’angle soli<strong>de</strong>) <strong>de</strong>vient très élevée. Le domaine spectrald’utilisation <strong>de</strong> chaque onduleur dépend <strong>de</strong> sa pério<strong>de</strong>magnétique. Il est possible aussi d’ajuster à volonté l’état <strong>de</strong>po<strong>la</strong>risation <strong>de</strong>s photons. Les wigglers sont <strong>de</strong>s systèmesintermédiaires entre aimants <strong>de</strong> courbure et onduleurs. Ainsi,un anneau <strong>de</strong> 3 e génération est un vélodrome à électrons, trufféd’éléments magnétiques d’insertion taillés sur mesure pourune application déterminée.Les photons émis dans les aimants <strong>de</strong> courbure et les sectionsdroites équipées d’éléments d’insertion sont ensuite dirigéspar <strong>de</strong>s systèmes optiques (miroirs c<strong>la</strong>ssiques ou multicouches,réseaux, cristaux) vers les stations expérimentalesutilisatrices du <strong>rayonnement</strong> et disposées à l’extrémité <strong>de</strong>slignes <strong>de</strong> lumière. Chaque ligne <strong>de</strong> lumière constitue un véritable<strong>la</strong>boratoire où tous les éléments, <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> <strong>source</strong> <strong>de</strong>10 Bulletin <strong>de</strong> <strong>la</strong> S.F.P. (150) juillet-août 2005
ayonnement jusqu’au détecteur et au système d’acquisition<strong>de</strong> données, sont conçus et optimisés spécifiquement pourun ou plusieurs types d’applications.Principales caractéristiquesdu <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong>Étendue spectrale al<strong>la</strong>nt <strong>de</strong>l’infrarouge aux rayons XdursDe LURE à <strong>SOLEIL</strong>Avantages potentielsSource universelleBril<strong>la</strong>nce très élevée Réalisation d’expériencesrapi<strong>de</strong>s et/ou à très hauterésolution spectrale ou spatialeÉtat <strong>de</strong> po<strong>la</strong>risation : linéaire,circu<strong>la</strong>ire ou elliptiqueStructure pulséeGran<strong>de</strong> stabilitéParfaitement contrô<strong>la</strong>bleÉtu<strong>de</strong>s résolues en tempsMesures précises, potentield’expériences d’imagerieTableau 1. Caractéristiques du <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong>, et ses principauxavantages.Une <strong>source</strong> <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> est un outil crucialpour <strong>la</strong> recherche et les applications. C’est démontré parl’existence, chez nos voisins, <strong>de</strong> <strong>source</strong>s <strong>synchrotron</strong> <strong>de</strong>3 e génération nationales, soit opérationnelles (Suisse, Italie,Allemagne, Suè<strong>de</strong>), soit en construction (Gran<strong>de</strong>-Bretagne,Espagne). Il y a <strong>de</strong> plus une <strong>source</strong> européenne <strong>de</strong> hauteénergie, l’ESRF (European Synchrotron Radiation Facility) àGrenoble. À l’échelle mondiale, il existe actuellement environ84 <strong>source</strong>s <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> opérationnelles ouen construction, dont 17 <strong>de</strong> 3 e génération.Le projet <strong>SOLEIL</strong> (acronyme <strong>de</strong> Source Optimale <strong>de</strong>Lumière d’Énergie Intermédiaire <strong>de</strong> LURE) a été initié il y aenviron 15 ans au <strong>la</strong>boratoire LURE (Laboratoire d’Utilisationdu Rayonnement Électromagnétique) d’Orsay. C’est au LURE,créé en 1972 et arrêté (pour <strong>la</strong> production <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong><strong>synchrotron</strong>) fin 2003, qu’a commencé l’aventure française du<strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong>. Le projet <strong>SOLEIL</strong> a fait l’objetd’une convention <strong>de</strong>s tutelles CEA et CNRS pour <strong>la</strong> créationd’un groupe d’étu<strong>de</strong>s sur une durée <strong>de</strong> 3 ans qui a abouti enmai 1999 à l’é<strong>la</strong>boration d’un avant-projet détaillé comprenanttoutes les spécifications nécessaires pour démarrer <strong>la</strong>construction.Nous n’évoquerons pas ici <strong>la</strong> belle et tumultueuse saga quis’ensuivit pour aboutir, en septembre 2000, à <strong>la</strong> décision <strong>de</strong>construire <strong>SOLEIL</strong>, sur le site du p<strong>la</strong>teau <strong>de</strong> Sac<strong>la</strong>y. Elle n’aguère d’équivalent dans toute l’histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> science française.Ce qui importe est qu’une décision positive ait finalementété prise, suite à l’avis positif d’un organisme instruisant lesdécisions <strong>de</strong> l’Assemblée Nationale et du Sénat, l’OPECST(Office Parlementaire d’Évaluation <strong>de</strong>s Choix Scientifiques etTechnologiques). Nous soulignerons seulement quelquesaspects techniques et scientifiques <strong>de</strong> ce projet, qui est enFrance l’un <strong>de</strong>s plus grands chantiers scientifiques dumoment.Une société civile, Synchrotron-<strong>SOLEIL</strong>, a été créée pour <strong>la</strong>construction et <strong>la</strong> mise en œuvre <strong>de</strong> l’instal<strong>la</strong>tion. Le Conseild’administration <strong>de</strong> <strong>la</strong> société est constitué <strong>de</strong> représentantsdu CNRS et du CEA. Le financement <strong>de</strong> <strong>la</strong> construction estassuré majoritairement par <strong>de</strong>s collectivités (Région Ile-<strong>de</strong>-France, Département <strong>de</strong> l’Essonne, Région Centre), et pour lereste par les organismes <strong>de</strong> recherche. Actuellement, le projetest financé pour <strong>la</strong> construction <strong>de</strong> 24 lignes <strong>de</strong> lumière. Lecalendrier actuel, prenant en compte les res<strong>source</strong>s tant enpersonnel que budgétaires, vise à mettre en service une douzaine<strong>de</strong> ces lignes en 2006, avec le début <strong>de</strong> l’accueil <strong>de</strong>séquipes extérieures (phase 1). Le reste du programme s’échelonnerajusqu’en 2008 (phase 2). Par <strong>la</strong> suite, une vingtaine <strong>de</strong>lignes supplémentaires pourraient être installées sur l’anneau,moyennant <strong>de</strong> nouveaux investissements.L’instal<strong>la</strong>tion fournira sur chaque ligne aux utilisateurs, enrégime <strong>de</strong> croisière, <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 5500 heures par an <strong>de</strong>temps <strong>de</strong> faisceau.<strong>SOLEIL</strong> accueillera pour <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s plus ou moinslongues plus <strong>de</strong> 2000 chercheurs par an sur ses lignes <strong>de</strong>lumière. Il gèrera sur son budget 350 emplois permanents,auxquels s’ajouteront une cinquantaine d’étudiants en thèseou post-doctorat, <strong>de</strong>s chercheurs invités, etc. Des enseignants-chercheurs<strong>de</strong>s universités pourront être affectés à<strong>SOLEIL</strong> pour <strong>la</strong> partie recherche <strong>de</strong> leur activité statutaire, via<strong>de</strong>s conventions liant le <strong>la</strong>boratoire aux universités concernées.Par ailleurs, <strong>de</strong>s chercheurs d’organismes extérieurs(CNRS, CEA, INRA…) ou <strong>de</strong>s enseignants-chercheurs pourrontêtre associés à titre individuel à <strong>SOLEIL</strong> pour y faire toutou partie <strong>de</strong> leur recherche et participer aux tâches générales.Pour <strong>la</strong> recherche ou <strong>la</strong> formation, <strong>SOLEIL</strong> est un <strong>la</strong>boratoiretrès ouvert et bien connecté à son environnement, dans uncontexte régional, national et international.Pourquoi <strong>SOLEIL</strong> sera à <strong>la</strong> pointe<strong>de</strong> <strong>la</strong> technologieL’étu<strong>de</strong> qui est à l’origine du projet <strong>SOLEIL</strong> a permis <strong>de</strong>développer un certain nombre d’idées nouvelles et ainsi <strong>de</strong>marquer <strong>de</strong>s points décisifs dans les performances <strong>de</strong>smachines <strong>de</strong> 3 e génération d’énergie dite intermédiaire : <strong>la</strong>bril<strong>la</strong>nce et <strong>la</strong> durée <strong>de</strong> vie, mais également <strong>la</strong> stabilité du faisceau<strong>de</strong> photons (en position et en énergie) pour les utilisateurs,ont été améliorées.L’énergie <strong>de</strong>s photons est déterminée par l’énergie <strong>de</strong>sélectrons stockés, mais également par les caractéristiques<strong>de</strong>s dispositifs d’insertion : pour un onduleur, plus <strong>la</strong> pério<strong>de</strong>magnétique est petite, plus l’énergie <strong>de</strong>s photons émis estélevée. Des onduleurs <strong>de</strong> pério<strong>de</strong>s différentes permettent <strong>de</strong>couvrir <strong>de</strong>s domaines spectraux complémentaires. Par ailleurs,<strong>la</strong> durée <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s faisceaux stockés croît avec l’énergie. Ona donc tout intérêt, même pour <strong>la</strong> production <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong>VUV (lumière visible et ultra-violette), à disposer d’une énergie<strong>de</strong> machine suffisamment élevée (E > 2.10 9 eV = 2 GeV),pour garantir une bonne durée <strong>de</strong> vie et utiliser <strong>de</strong>s onduleursà gran<strong>de</strong> pério<strong>de</strong> pour couvrir le spectre désiré. En revanche,une énergie trop élevée conduirait à <strong>de</strong>s onduleurs troplongs ou à une dégradation inacceptable <strong>de</strong>s optiques <strong>de</strong>slignes VUV à cause <strong>de</strong> <strong>la</strong> puissance émise. C’est à partir <strong>de</strong>telles considérations que l’énergie choisie a été 2,75 GeV,soit un facteur <strong>de</strong> Lorentz γ <strong>de</strong> 5380 ! Cette valeur permet à<strong>SOLEIL</strong> <strong>de</strong> fournir du <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> <strong>de</strong> très hautebril<strong>la</strong>nce <strong>de</strong>puis l’infrarouge lointain (longueur d’on<strong>de</strong> <strong>de</strong>300 µm) jusqu’aux rayons X. <strong>SOLEIL</strong> couvrira 7 déca<strong>de</strong>s enlongueur d’on<strong>de</strong> du <strong>rayonnement</strong> e. m. (et bien sûr en énergie<strong>de</strong>s photons).La bril<strong>la</strong>nce (définie plus haut) est le principal facteur <strong>de</strong>mérite <strong>de</strong>s <strong>source</strong>s <strong>de</strong> 3 e génération. Cette gran<strong>de</strong>ur permet<strong>de</strong> qualifier à <strong>la</strong> fois le flux <strong>de</strong> photons disponible sur l’échantillon,et <strong>la</strong> possibilité <strong>de</strong> le focaliser et <strong>de</strong> l’exploiter avec unetrès haute résolution spectrale. Une <strong>de</strong>s solutions pour augmenter<strong>la</strong> bril<strong>la</strong>nce est d’équiper l’anneau <strong>de</strong> stockage d’onduleursà grand nombre <strong>de</strong> pério<strong>de</strong>s. Le gain en bril<strong>la</strong>nce parrapport à un aimant <strong>de</strong> courbure est alors <strong>de</strong> quatre ordres <strong>de</strong>gran<strong>de</strong>ur. C’est dire l’importance du nombre et <strong>de</strong> <strong>la</strong> longueur<strong>de</strong>s sections droites dans ces machines. Or, l’optique <strong>de</strong><strong>SOLEIL</strong> a été particulièrement optimisée dans ce sens : l’anneau<strong>de</strong> <strong>SOLEIL</strong> a une circonférence <strong>de</strong> 354 m, dont 104 mBulletin <strong>de</strong> <strong>la</strong> S.F.P. (150) juillet-août 2005 11
Figure 5 : Instal<strong>la</strong>tion <strong>de</strong>s pieux pour stabiliser le bâtimentdu <strong>synchrotron</strong>, en octobre 2003.dalle épaisse flottantsur 600 pieuxen béton p<strong>la</strong>ntésprofondémentdans le sable <strong>de</strong>Fontainebleau duP<strong>la</strong>teau <strong>de</strong> Sac<strong>la</strong>y(figure 5) ;conception <strong>de</strong>ssupports <strong>de</strong>saimants (poutres)évitant les mo<strong>de</strong>s<strong>de</strong> vibration indésirables; moniteurs<strong>de</strong> positiondu faisceau etsystème <strong>de</strong> correctionet <strong>de</strong>guidage performants; et enfincompacité <strong>de</strong>nombreuseslignes <strong>de</strong> lumière.La stabilité localesur une durée <strong>de</strong> quelques heures escomptée <strong>de</strong> <strong>la</strong> positiondu faisceau d’électrons est <strong>de</strong> l’ordre du µm !Bril<strong>la</strong>nce et stabilité combinées sont <strong>de</strong>s qualités essentiellespour <strong>de</strong>s expériences utilisant <strong>de</strong>s faisceaux <strong>de</strong> lumièrefocalisés sur <strong>de</strong>s surfaces <strong>de</strong> taille micronique voire submicronique,et l’imagerie en IR, VUV et rayons X mous et durs.<strong>SOLEIL</strong> est donc une <strong>source</strong> universelle <strong>de</strong> lumière qui seprête à une multitu<strong>de</strong> d’applications pluridisciplinaires. Leprogramme scientifique a été é<strong>la</strong>boré avec l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> groupes<strong>de</strong> travail et d’ateliers thématiques issus <strong>de</strong> <strong>la</strong>rges communautés<strong>de</strong> chercheurs et répondra à <strong>de</strong> multiples problématiques<strong>de</strong> <strong>la</strong> science en train <strong>de</strong> se faire. Il comprend <strong>de</strong>manière équilibrée <strong>de</strong>s expériences visant soit à caractériserles propriétés électroniques <strong>de</strong> <strong>la</strong> matière, soit à déterminerses propriétés structurales.Des performances au service<strong>de</strong> <strong>la</strong> recherche et <strong>de</strong> l’industrieL’utilisation du <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> concerne, nousl’avons déjà souligné, un très <strong>la</strong>rge ensemble d’activités <strong>de</strong>recherche, que ce soit en recherche fondamentale dans lessciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> matière et celles du vivant, ou en rechercheappliquée (figure 6).En recherche fondamentale, <strong>SOLEIL</strong> couvrira les besoins enphysique, en chimie et en sciences <strong>de</strong>s matériaux, ensciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie, en sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> terre et <strong>de</strong> l’atmosphère.Figure 6 : Parts <strong>de</strong> temps qui seront consacrées aux différents domainesd’étu<strong>de</strong> sur les lignes <strong>de</strong> <strong>SOLEIL</strong>.Par ailleurs, <strong>SOLEIL</strong> souhaite s’ouvrir aux industriels, PMI,PME et groupes, et aux acteurs <strong>de</strong> certains grands enjeuxsociétaux intervenant à différents échelons géographiques :régional, national, européen et international. Le centre <strong>de</strong><strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> sera ainsi <strong>la</strong>rgement dédié aux activités<strong>de</strong> recherche appliquée et <strong>de</strong> développement, <strong>de</strong>contrôle qualité (<strong>de</strong>s matières premières, <strong>de</strong>s produits intermédiaireset finis) et <strong>de</strong> fabrication, dans <strong>de</strong>s secteurs variés :• pharmacie, biotechnologies, médical,• chimie, pétrochimie, cosmétiques, agroalimentaire,• métallurgie, mécanique, électronique,• matériaux p<strong>la</strong>stiques, céramiques, verres…,• environnement, géophysique, sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> terre,• défense et sûreté nationales, police scientifique,• développement durable, sauvegar<strong>de</strong> du patrimoine culturel,etc.Les techniques qui seront disponibles à <strong>SOLEIL</strong> couvrent <strong>la</strong>plupart <strong>de</strong>s besoins d’analyse, <strong>de</strong> caractérisation et <strong>de</strong>mesures : absorption, diffraction, diffusion, fluorescence,microscopie, tomographie, imagerie, microspectroscopie… etpermettent également <strong>la</strong> mise en œuvre <strong>de</strong> procédés <strong>de</strong> transformation<strong>de</strong> <strong>la</strong> matière : fabrication <strong>de</strong> microsystèmes, irradiation<strong>de</strong> matières premières biologiques ou <strong>de</strong> matériaux…Parmi tous ces domaines, <strong>la</strong> cristallographie <strong>de</strong>s macromoléculessera le pivot du programme en sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie.Les macromolécules biologiques sont en effet <strong>de</strong>s micromachinesdont le fonctionnement détaillé ne peut être décritcomplètement que si l’on en connaît <strong>la</strong> structure tridimensionnelle(3D), ce que permet <strong>la</strong> cristallographie. Dans les <strong>de</strong>rnièresannées, <strong>de</strong> nombreux génomes, y compris le génomehumain, ont été séquencés et l’exploitation rationnelle <strong>de</strong> <strong>la</strong>marée d’information ainsi obtenue passe notamment parl’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> structure 3D <strong>de</strong> diverses protéines codées par legénome concerné. Le <strong>rayonnement</strong> X issu <strong>de</strong>s onduleurssous vi<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>SOLEIL</strong> est idéalement adapté pour l’enregistrementultra-rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong>s données <strong>de</strong> diffraction <strong>de</strong> cristaux <strong>de</strong>ces protéines, dont l’analyse mathématique conduit rapi<strong>de</strong>mentà <strong>la</strong> structure 3D. C’est pourquoi <strong>de</strong>ux lignes <strong>de</strong> lumièresont en construction à <strong>SOLEIL</strong> pour cette application. Ceslignes seront munies d’un robot manipu<strong>la</strong>nt les cristaux, <strong>de</strong>détecteurs très performants et, à terme, d’un véritable système–expertassurant toutes les opérations <strong>de</strong>puis l’enregistrement<strong>de</strong>s données <strong>de</strong> diffraction jusqu’à l’analyse structurale.Ces possibilités intéressent les industries du médicament. Eneffet, <strong>la</strong> pharmacologie mo<strong>de</strong>rne s’appuie <strong>de</strong> plus en plus sur<strong>la</strong> connaissance détaillée <strong>de</strong> <strong>la</strong> structure, par exemple, d’uneprotéine-cible, pour concevoir <strong>de</strong>s inhibiteurs efficaces quiseront éventuellement utilisables comme médicaments. Lafigure 7 montre <strong>la</strong> structure d’un complexe membranaire résoluegrâce à l’utilisation du <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> (ESRF).La cristallographie n’est que l’une <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s qui serontmises en œuvre dans le cadre du programme en sciences <strong>de</strong><strong>la</strong> vie. Ce programme s’appuiera sur une dizaine <strong>de</strong> lignes <strong>de</strong>lumière utilisées à temps complet ou partiel. Il s’agit surtout<strong>de</strong> biologie structurale et d’imagerie dans un domaine spatialétendu (<strong>de</strong>puis <strong>la</strong> résolution atomique atteinte par <strong>la</strong> cristallographiejusqu’à l’imagerie <strong>de</strong> <strong>la</strong> cellule, <strong>de</strong> fibres et <strong>de</strong> tissuspar IR, VUV et éventuellement microscopie X mous), avecsouvent le coup<strong>la</strong>ge à <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s résolues en temps.L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> sites pollués est également une application du<strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> en fort développement. Un thèmemajeur en sciences <strong>de</strong> l’environnement concerne l’étu<strong>de</strong> ducomportement <strong>de</strong> substances produites par les activitéshumaines et qui peuvent être dispersées alentour (contact :rose@cerege.fr). Le <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> constitue unoutil bien adapté à <strong>de</strong> telles étu<strong>de</strong>s. Parmi toutes les techniques,<strong>la</strong> spectroscopie d’absorption X (XAS) <strong>de</strong>meure incontournable.Tout d’abord le XAS agit comme une son<strong>de</strong> sélec-Bulletin <strong>de</strong> <strong>la</strong> S.F.P. (150) juillet-août 2005 13
Figure 7 : Vue dans <strong>de</strong>ux directions orthogonales <strong>de</strong> <strong>la</strong> structure cristallographique<strong>de</strong> <strong>la</strong> formate déshydrogénase, un système macromolécu<strong>la</strong>ire membranaire[1]. Cette représentation montre, non pas les atomes, mais pour plus<strong>de</strong> c<strong>la</strong>rté les éléments <strong>de</strong> <strong>la</strong> structure secondaire (notamment hélices-alpha etfeuillets-béta) et les groupements fonctionnels. La position <strong>de</strong> <strong>la</strong> membraneest représentée en gris.tive, c’est-à-dire qu’il est possible d’étudier un seul élémentau sein d’un système complexe, d’en déterminer <strong>la</strong> structureélectronique et l’environnement atomique. Il peut en effet êtreprimordial <strong>de</strong> connaître l’état <strong>de</strong> valence <strong>de</strong>s métaux impliquésdans certaines contaminations, car <strong>de</strong> cet état <strong>de</strong> valencepeut dépendre leur toxicité. C’est par exemple le cas duchrome : <strong>la</strong> forme Cr(VI) est beaucoup plus toxique que <strong>la</strong>forme Cr(III), dont <strong>la</strong> mobilité et <strong>la</strong> bio-accessibilité sont limitéespar une faible solubilité. Le spectre XAS (figure 8) permet<strong>de</strong> déterminer le rapport Cr(III)/Cr(VI).La préparation simple <strong>de</strong>s échantillons rend également possible<strong>de</strong>s analyses in situ, c’est-à-dire sans perturber l’échantillon.Enfin, l’élément étudié est souvent en très faibleconcentration. Or <strong>la</strong> technique XAS est l’une <strong>de</strong>s seulescapable <strong>de</strong> son<strong>de</strong>r l’environnement local <strong>de</strong> tout élémenttrace dans <strong>de</strong>s systèmes naturels (sols, sédiments, neige,végétaux et micro-organismes…). L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> tels systèmespour lesquels les échantillons sont hétérogènes, et où les élémentssondés se trouvent à l’état <strong>de</strong> traces, tire un grandavantage <strong>de</strong> <strong>la</strong> bril<strong>la</strong>nce délivrée par les anneaux <strong>de</strong> 3 e générationtels que <strong>SOLEIL</strong>. Les qualités du faisceau <strong>de</strong> photons(intense et collimaté) permettent <strong>la</strong> combinaison d’expériences<strong>de</strong> microfluorescence qui donnent une cartographie<strong>de</strong>s éléments, l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> spéciation <strong>de</strong> ces éléments(micro-XAS) et <strong>la</strong> détection <strong>de</strong> phases précipitées à l’échelledu micron (microdiffraction X).Comme les échantillons prélevés sur <strong>de</strong>s sites pollués, lesobjets anciens d’intérêt archéologique ou artistique exigent<strong>de</strong>s conditions particulières d’étu<strong>de</strong> et <strong>de</strong> manipu<strong>la</strong>tion,dues ici à leur hétérogénéité, leur fragilité et leur rareté. Les<strong>la</strong>boratoires du domaine du patrimoine culturel et <strong>de</strong> l’archéologietestent ainsi, <strong>de</strong>puis une vingtaine d’années, l’utilisationdu <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> pour leurs recherches : microdiffraction<strong>de</strong>s rayons X pour i<strong>de</strong>ntifier finement les pigmentsutilisés en peinture ; absorption <strong>de</strong>s rayons X pour comprendre<strong>la</strong> dégradation <strong>de</strong>s vestiges archéologiques marins ;microscopie infrarouge pour appréhen<strong>de</strong>r les interactionsentre emplâtres à base <strong>de</strong> plomb, datant <strong>de</strong> l’Antiquité, et <strong>la</strong>peau ; analyse par fluorescence X pour retrouver lesmétho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> fabrication <strong>de</strong> verres anciens... Il s’agit <strong>de</strong> techniquesparticulièrement adaptées à ce type d’étu<strong>de</strong>s car non(ou micro-) <strong>de</strong>structives. De plus, leur diversité ainsi que <strong>la</strong>possibilité <strong>de</strong> coupler plusieurs techniques, sont adaptées àl’analyse d’échantillons hétérogènes, minéraux ou organiques,amorphes ou structurés. La bril<strong>la</strong>nce du <strong>rayonnement</strong><strong>synchrotron</strong> <strong>de</strong> <strong>SOLEIL</strong> permettra, avec un faisceau <strong>de</strong>quelques µm <strong>de</strong> diamètre, <strong>de</strong> répondre à <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>sbesoins expérimentaux concernant les matériaux du patrimoine,par <strong>de</strong>s mesures en cartographie et en tomographie sur<strong>de</strong>s prélèvements. Concrètement, <strong>de</strong>s partenariats se sontcréés, notamment avec les acteurs du GDR (Groupement DeRecherche) du CNRS « Matériaux du patrimoine et <strong>synchrotron</strong><strong>SOLEIL</strong> », qui réunit une vingtaine d’équipes françaisesutilisant le <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s matériauxdu patrimoine. <strong>SOLEIL</strong> fournira également support, formationet expertise aux chercheurs dans le choix <strong>de</strong>smétho<strong>de</strong>s d’étu<strong>de</strong>, l’analyse <strong>de</strong>s données et le développement<strong>de</strong> nouvelles expériences. Ce projet fait l’objet d’uneinterface dédiée.<strong>SOLEIL</strong> portera encore mieux son nom lorsque ses photonssimuleront le <strong>rayonnement</strong> so<strong>la</strong>ire : par son caractère continuet accordable, le <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> constitue eneffet un excellent moyen <strong>de</strong> simuler l’activité ionisante dusoleil. Ce sont alors les chercheurs en p<strong>la</strong>nétologie qui setourneront vers <strong>SOLEIL</strong>… (contacts : odile.dutuit@lcp.upsud.fr,christian.alcaraz@lcp.u-psud.fr). Dans les hautescouches <strong>de</strong>s atmosphères p<strong>la</strong>nétaires, les espèces gazeusesqui sont soumises au <strong>rayonnement</strong> UV lointain provenant dusoleil sont ionisées. C’est dans cette couche, appelée ionosphère,que se produisent bien <strong>de</strong>s processus primordiaux,pouvant affecter <strong>la</strong> p<strong>la</strong>nète toute entière. Dans le cas <strong>de</strong> <strong>la</strong>Terre, il y a d’une part l’activité électromagnétique, régie par lechamp magnétique <strong>de</strong> <strong>la</strong> p<strong>la</strong>nète, qui induit par exemple lesphénomènes d’aurores boréales ou <strong>la</strong> réflexion <strong>de</strong>s on<strong>de</strong>shertziennes (télécommunication). Il y a d’autre part l’activitéchimique, qui résulte <strong>de</strong> <strong>la</strong> réactivité exacerbée <strong>de</strong>s espècesioniques présentes dans ce milieu, et qui conduit à <strong>la</strong> synthèsed’espèces <strong>de</strong> complexité variable (phénomènes <strong>de</strong> croissancefractale dans l’atmosphère <strong>de</strong> Titan). Il est dès lorsimportant <strong>de</strong> comprendre <strong>de</strong> façon détaillée les mécanismesrégissant un tel milieu, d’autant plus que <strong>la</strong> conquête spatialenous ouvre régulièrement <strong>de</strong> nouveaux horizons, aux caractéristiquestrès diverses. C’est <strong>la</strong> raison pour <strong>la</strong>quelle une forteactivité <strong>de</strong> modélisation est engagée par les agences spatialespour prévoir et interpréter, aussi finement que possible,les résultats scientifiques <strong>de</strong>s missions spatiales. Mais pourFigure 8 : Spectre XANES(*) au voisinage du seuil K du chrome (E 0≈ 5990eV) dans un échantillon <strong>de</strong> ciment dopé au chrome, comparé à <strong>de</strong>ux références: Cr 2O 3(CrIII) et Na 2CrO 4(CrVI). Le spectre d’absorption <strong>de</strong>s rayons Xprésente un « pré-pic » intense autour <strong>de</strong> E 0du CrVI.(*) Le XANES (pour X-ray Absorption Near Edge Structure) est <strong>la</strong> métho<strong>de</strong> quiétudie <strong>la</strong> région <strong>de</strong>s spectres XAS proche du seuil d’absorption d’un élémentdonné. Il renseigne sur <strong>la</strong> structure électronique et les liaisons chimiques <strong>de</strong>l’élément, ici le chrome.14 Bulletin <strong>de</strong> <strong>la</strong> S.F.P. (150) juillet-août 2005
affiner ces modèles, <strong>de</strong>s données expérimentales sont nécessaires,et c’est à ce niveau qu’interviennent les étu<strong>de</strong>s fondamentales<strong>de</strong> réactivité chimique élémentaire qui peuvent êtremenées sur un centre <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong> synchroton tel que<strong>SOLEIL</strong>. Il <strong>de</strong>vient ainsi possible <strong>de</strong> produire <strong>de</strong>s espècesdont on connaît précisément le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> formation, pourensuite les faire réagir, en atmosphère raréfiée, avec un gazcorrespondant à celui rencontré dans l’ionosphère considérée.De plus, le caractère pulsé <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière <strong>synchrotron</strong>permet une définition précise <strong>de</strong> l’énergie d’excitation portéepar l’ion réactant. Autant d’atouts qui font <strong>de</strong> <strong>SOLEIL</strong> un outi<strong>la</strong>ux caractéristiques extraordinaires pour aller plus loin dans<strong>la</strong> <strong>de</strong>scription précise <strong>de</strong> telles réactions chimiques.Pour clore cette liste, loin d’être exhaustive, citons lesrecherches menées sur les dispositifs d’enregistrementmagnétique, qui sont présents dans un nombre croissant <strong>de</strong>foyers. De plus en plus perfectionnés, ils ren<strong>de</strong>nt possiblel’utilisation <strong>de</strong> supports à très haute <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> stockage. Parexemple, les têtes <strong>de</strong> lecture <strong>de</strong> disques durs les plussensibles sont aujourd’hui capables <strong>de</strong> lire <strong>de</strong>s informationsmagnétiques stockées sur <strong>de</strong>s supports à plus <strong>de</strong>10 Gbits/cm 2 , soit 1 bit magnétique pour 100x100 nm 2 . Cestêtes <strong>de</strong> lecture sont réalisées par un empilement successif <strong>de</strong>films minces non magnétiques, ferromagnétiques et antiferromagnétiquescouplés. Le mécanisme <strong>de</strong> coup<strong>la</strong>ge entrecouches et le rôle joué par les interfaces sont encore malconnus, leur compréhension nécessite <strong>de</strong>s approches variées.La haute bril<strong>la</strong>nce <strong>de</strong>s nouvelles <strong>source</strong>s <strong>de</strong> <strong>rayonnement</strong><strong>synchrotron</strong> a ouvert <strong>la</strong> voie à l’imagerie <strong>de</strong>s surfaces, interfaceset films minces avec <strong>de</strong>s résolutions spatiales <strong>la</strong>térales<strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 20 nm. Ainsi, un microscope à photoélectrons(PEEM, pour PhotoEmission Electron Microscope) permet <strong>de</strong>combiner <strong>la</strong> sélectivité chimique et magnétique <strong>de</strong> l’absorptionX, <strong>la</strong> sensibilité aux couches les plus superficielles <strong>de</strong> <strong>la</strong>technique <strong>de</strong> photoémission et l’imagerie. Récemment, àl’ALS à Berkeley, une étu<strong>de</strong> très complète <strong>de</strong> l’interface entreune couche antiferromagnétique d’oxy<strong>de</strong> <strong>de</strong> nickel, NiO, etune couche ferromagnétique <strong>de</strong> cobalt a permis <strong>de</strong> préciserl’origine du coup<strong>la</strong>ge magnétique entre les <strong>de</strong>ux films [2].L’instal<strong>la</strong>tion d’un PEEM, prévu sur l’une <strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong>lumière <strong>de</strong> <strong>SOLEIL</strong>, permettra à <strong>la</strong> communauté scientifique<strong>de</strong> disposer d’un outil unique <strong>de</strong> visualisation <strong>de</strong>s domainesmagnétiques dans <strong>de</strong>s dispositifs multicouches (contact :rachid.belkhou@lure.u-psud.fr). À l’avenir, il peut être envisagéd’enregistrer <strong>de</strong>s images en <strong>de</strong>s temps suffisammentcourts pour accé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s évolutions lentes <strong>de</strong> cartes <strong>de</strong>domaines magnétiques (échelle <strong>de</strong> <strong>la</strong> secon<strong>de</strong>).Figure 9 : Hall expérimental en contruction du <strong>synchrotron</strong> <strong>SOLEIL</strong> (juin 2005).À chaque re<strong>de</strong>nt, une ligne <strong>de</strong> lumière prendra p<strong>la</strong>ce. Au total, 24 lignesseront ouvertes progressivement entre 2006 et 2010.PerspectivesGrâce aux efforts <strong>de</strong> tous, équipes <strong>de</strong> <strong>SOLEIL</strong> mais aussiutilisateurs et chercheurs associés, <strong>SOLEIL</strong> sera une <strong>source</strong>polyvalente, d’une gran<strong>de</strong> souplesse d’adaptation, incorporant<strong>de</strong> nombreuses idées novatrices en même temps que lesmeilleures techniques actuelles, ce qui <strong>de</strong>vrait assurer <strong>la</strong>pérennité <strong>de</strong> l’instal<strong>la</strong>tion pendant les 30 ans à venir. Le projetest maintenant dans sa phase <strong>la</strong> plus excitante, à quelquesmois <strong>de</strong> son entrée en fonctionnement (figure 9), pour <strong>la</strong> fourniture<strong>de</strong>s premiers photons début 2006 et un accueil <strong>de</strong>s premiersutilisateurs à l’automne 2006.Pour en savoir plus…Mis à jour en continu, le site WEB <strong>de</strong> <strong>SOLEIL</strong> permet d’avoir<strong>de</strong>s informations détaillées sur le projet et son état d’avancement: www.<strong>synchrotron</strong>-soleil.fr. Ce site comprend une section« res<strong>source</strong>s pédagogiques » permettant aux enseignants d’obtenir<strong>de</strong>s outils <strong>de</strong> travail, en c<strong>la</strong>sse ou en vue d’une préparation <strong>de</strong>visite <strong>de</strong> <strong>SOLEIL</strong>, sur les thèmes du <strong>rayonnement</strong> <strong>synchrotron</strong> etses applications, et fournit <strong>de</strong>s liens avec les sites internet <strong>de</strong>sautres <strong>synchrotron</strong>s <strong>de</strong> 3 e génération.Références[1] Jormakka, M., Tornroth, S., Byrne, B. & Iwata, S. (2002) Science295 (5561), 1863-68.[2] Ohldag J. et al. (2001) Phys. Rev. Lett. 87, 247201.Bulletin <strong>de</strong> <strong>la</strong> S.F.P. (150) juillet-août 2005 15