106 LA GAZETTE MÉDICALE DU CENTREmême mode inflammatoire, et il existe des différencesnotables entre Véry-thème et la vésicationque pro<strong>du</strong>it la cantharidine et les effets analoguesobtenus au rnoyen d'une irritation mécanique, del'application <strong>du</strong> calorique, de l'ammoniac, de lamoutarde, de l'ail, de la plupart des Renonculacéeset des Daphnées, dans tous ces cas la différenced'énergie de la cause ne suffit pas pour rendre raisonde cette différence des effets :Que deux escarres cuta,nées également profondessoient pro<strong>du</strong>ites, l'une par l'application de l'acidenitrique, l'autre par celle de l'acide sulfurique, vousverrez, si vous suivez les conséquences ultérieuresdes deux cautérisations, qu'une ligne inflammatoiretrès étroite circonscrira à peine et tardivement lapremière de ces esgarres, tandis que la seconde serabientôt entourée d'une tuméfaction érysipélateusefort éten<strong>du</strong>e. Il suffit qu'une gouttelette d'acidehydro-chlorique soit déposée sur la peau pour ydéterminer Instantanément une ulcération profonde,éten<strong>du</strong>e, douloureuse et qui, pendant plusieursjours, continuo toujours a s'accroître. Onobserve les mêmes différences entre les phénomènesinflammatoires développés scrus l'applicationdeP l'émétique, <strong>du</strong> nitrate d'argent, de mercure ; desdeutoxydes de potassium, d'arsenic ; des deutochloruresd'antimoine, de mercure: Quelle ressemblanceexiste-t-il entre une inflammation causée parune vive insolation et celle qui est le résultat del'action <strong>du</strong> froid (1) ? L'observation démontre doncqu'il existe entre chaque mode inflammatoire desdifférences indépendantes <strong>du</strong> degré d'irritation,puisque chaque espèce d'inflammation peut varieret varie beaucoup dans son intensité en conservantles caractères qui lui sont propres : Chàque stimulusmodifie plus puissamment que la texture organiqueles résultats de la stimulation. L'inflammation varioliqueest encore pustuleuse lorsqu'elle s'étend à l'intérieurde la bouche, au voile <strong>du</strong> palais, à l'intérieurde la trachée ; l'érythème papuleux forme sur laconjonctive comme sur la peau des taches élevéeset circonscrites et la vaccine de même que la pustulemaligne en passant d'un animal ruminant à l'hommegardent tous leurs caractères distinctifs.Je l'ai déjà dit, ce sont les Mêmes propriétés, lesmêmes fonctions vitales qui sont mises en jeu parl'action de chaque substance irritante, mais je nepuis assez le répéter, ce n'est ni dans le mêmeternps, ni dans le même nombre, ni dans la mêmeproportion, et il résùlte de cette diversité d'aetionles différences les plus frappantes entre chaquemode inflammatoire. Cette faculté de modifier lespropriétés organiques, cette puissance des fonctionsvitales, inhérente à la stimulation, à l'action exercéepar divers agents n'est pas bornée aux animaux desclasses supérieures elle s'étend à tous lesêtres organisés; les végétaux eux-mêmes sont passibles d'unemultitude d'altérations morbides qui ne sont pasmoins distinctes entre elles, moins remarquablespar les modifie,ations de la forme et de la textureorganique primitive que ne le sont les pustules dela galle, les rayons de la teigne, les tubérosités de(1) <strong>La</strong> lumière, qui colore si fortement la peau, a sans doute unegrande part aux effets de coups de soleil, car à une élevation de températureégale le calorique rayonnant qui s'échappe d'un foyer nepro<strong>du</strong>it pas la même inflammation,la lèpre et les excroissances <strong>du</strong> framboesia ; vingtsortes d'exhubérances dont la consistance et là formesont extrêmement variées et dont le développementa été déterminé par la piqûre de vingt espèces d'insectesnaissent sur une seule et même espèce dechêne. On trouve sur la même tige d'églantier (RosaCanina Lin.) ces grosses tubérosités, mousseuseset lisses, connues sous le noni de bédéguards ; desinsectes d'espèces différentes, en déposant dans lajeune tige un liquide et leurs oeufs, y ont modifié lanutrition, la vie et donné naiSsance à ces étrangespro<strong>du</strong>ctions. Sous l'influence d'un stimulus demême sorte, des excroissances identiques se développentsur les péricarpes, les pédoncules et les tigesquelle que soit la différence de leur structure anatomique,ettelle est l'influence d'un stimulus de mêmesorte qu'on voit la piqûre <strong>du</strong> même insecte donnernaissance à des excroissances identiques sur les périçarpes,les pédoncules et les tiges malgré la différencede leur structure anatomique. Cependantd'autres espèces d'insectes pénètrent dans l'intérieurde ces mêmes plantes, y habitent, rongent leurtissu, se nourrissent de leur suc sans qu'il en résulteaucun autre. effet *apparent qu'une perte de substance.Quelques autres altérations morbides desvégétaux sont <strong>du</strong>s au' développement de plantesmicroscopiques qui appartiennent à la famille desAlgues et à celle des Champignons. Dans ce derniercas on voit encore la lésion organique recevoir soncaractère distinctif et spécifique de l'irritamenturnpropre à chacun de ces êtres parasites.En admettant que ces altérations de texture nepuissent être entièrement assimilées aux lésionsphlegmasiques qu'on observe chez les animaux,resterait constant qu'une multitude d'agents ex trin-,sèques ont la puissance de modifier les phènomènesde la vie d'une manière spéciale,que cette puissance-modificatrice s'étend à l'ensemble des êtres organisés et que l'influence qu'elle exerce dépend plus<strong>du</strong> mode et de la proprieté de l'action que de sondegré apparent d'énergie.C'est parmi les pro<strong>du</strong>ctions des corps vivants,c'est parmi les pro<strong>du</strong>its/de leur décomposition quese trouvent les agents modificateurs doués d'unepuissance plus remarquable et plus incompréhensible(1). Leur activité qui, le plus souvent, se dérobeà nos sens et qui s'adresse à peine aux propriétéschimiques ou physiques de l'être animé, s'exercetout entière sur ses propriétés vitales, c'est sur lavie même que s'étend leur mystérieuse influence.Souvent, il est vrai, l'inflammàtion est le deiniertemps de leur action, niais si dans toute irritationinflammatoire les mêmes propriétés vitales sontmises en jeu, ce n'est ni dans Ia même proportionni pour le même temps, ni dans le même ordre successif.Tandis qu'une vive rougeur érysipélateuse accompagnéede chaleur et de douleur marque le début del'Eléphantiasis des Arabes, la décoloration de lapeau, sa stupeur et son insensibilité signalent lepremier degré de la Lèpre blanche (Leucer Barros-(1). Les alcalis organiques, l'huile volatile de laurier-cerise, unemultitude de poisons, de venins et de virus sont fabriqués pdr l'action,soit normale soit anormale, d'une puissance vitale ; dans la premièresérie viennent se ranger l'acide hydro-cyanique. les effluves des maraiset sans doute un grand nombre d'autres miasmes délétères qui s'exhalentdes débris des corps organisés.
REVUE MENSUELLE 107cles Arabes qui paraît être une variété de l'Eléphantiasisdes Grecs.)<strong>La</strong> plupart des huiles volatiles excitent à l'orificedes membranes muqueffles une impression douloureusede chaleur qui n'est accompagnée ni de turgescencevasculaire ni d'aucun autre symptôme del'inflammation (1).Au contraire, l'application d'une solution huileusede càntharides qui ne cause d'abord qu'un léger engourdissementest bientôt suivie de vésication. Dansle premier cas, quelque ternps que subsistent la chaleuret la douleur, la rougeur et Ia tuméfaction neviennent point s'y joindre ; dans l'autre, au contraire,le tissu cellulaire sous-muqueux se tuméfie et l'épithéliumqui le recouvre se soulève et se détache bienavant qu'aucun sentiment de douleur et de chaleurcommence à se laisser apercevoir.<strong>La</strong> tumeur qui accompagne les taches varioliquesnaissantes, et qui continue à s'accroître de plus enplus, est nulle dans la scarlatine et rend à peine sensibleau toucher les taches de l'exanthème morbilleux.Tandis que les limites de l'inflammation varioliquesont exactement circonscrites, celles de l'inflamma-, tion érysipélateuse restent vagues et indéterminées.Les phénomènes morbides suscités par l'action• que le venin de la vipère exerce sur le sang semblentsans doute se rapprocher de ceux qui caractérisentl'inflammation.L intumescence des tissus pénétrés par le venin,,la douleur qui accompagne ou plutôt qui suit cetteintumescence dans toutes les régions qu'elle commenceà envahir lui donnent même, j'en conviens,une sorte de ressemblance avec l'érysipèle phlegmoneux; mais la nature phlegmasique de cette tuméfactiondeviendra beaucoup plus équivoque pourquiconque aura suivi. les progrès deS altérationsmorbides (2). <strong>La</strong>'coloration livide et marbrée de laPeau, la teinte qui lui succède et que l'on voit gra<strong>du</strong>ellementpasser au vert, au jaune verdâtre, enfinau jaune pur, l'infiltration séreuse ensanglantée quiabreuve le tissu cellulaire et qui distend jusqu'auxinterstices des fibres musculaires, l'exsudation demême nature qui dans les cas où le venin a étéPorté directement dans les troncs veineux s'opère(1) J'ai découvert à la superficie des cloisons séminifères <strong>du</strong> péricarpe<strong>du</strong> Capsicurn annuurn, des vésicules jaunâtres reraplies d'unehuile volatile dont la saveur est si caustique qu'elle laisse longtempssur les lèvres et sur la langue l'impression d'une vive brûlure. Lesfruits de cette plante doivent uniquement la sapidité qui les fait recherchercomme assaisonnerpœnt à la présence de cette huile volatile.<strong>La</strong> sensation de brûlure qu'élle excite à l'extrémité des doigts lorS.-qu'elle y est appliquée tarde davantage à se développer, elle persistePendant des jours entiers et elle est fort exaspérée chaque fois quel'épiderme est humecté ; mais quelque vive que soit cette sensationelle n'est suivie ni de gonflement ni de rougeur.(2) L'hésitation augmente si l'on considère que la singulière subs-- tance qui pro<strong>du</strong>it de si redoutables effets peut rester longtemps'appliquée à la surface d'un muscle, d'un nerf, d'un tendon, de labouche, des narifies, de la conjonctive sans causer la plus légèrephlogose. Fontana a multiplie ces sortes d'expériences et ce n'est quesur un pigeon, en forçant la dose <strong>du</strong> venin et en l'appliquant plusieursfois de suite qu'il a obtenu un gonflement des paupières sansque le globe de l'ceil parût enflammé ; il a souvent goûté lui-mêmele venin de la vipère, « plus de 100 fois, dit-il, j'ai répété les mêmesépreuves et je n'ai jamais eu la langue enflée, ni enflammée, ni douloureuse,un sentiment de torpeur et d'astriction étaient la seuleimpression que pro<strong>du</strong>isit le venin longtemps conservé sur la langue.L'écueil ordinaire des hommes, écueil que les philosophes les pluscirconspects n'ont pas toujours su éviter, c'est qu'il suffit qu'ontrouve une circonstance qui accompagne le phénomène pour qu'oncroie trop facilement `qu'il en est la cause. » (eontana, t. il, p. 201).si rapidenient et si abondamment dans toutes lescavités splanchniques, ont-ils donc autant de rapportqu'on eût été tenté de le croire à la première inspection,avec les phénomènes qui caractérisentl'inflammation; et si une rougeur qui est plutôt <strong>du</strong>eà une extravasation <strong>du</strong> sang qu'à une injection vasculaire,si une infiltration seroso-sanguine qui ressemblesi peu à l'épanchement fibrineux qui s'opèredans le tissu aréolaire d'un membre affecté d'érysipèdephlegmoneux ne séparent pas les lésions pro<strong>du</strong>itespar le venin de la vipère des lésions inflammatoires,il reste <strong>du</strong> moins clairement prouvé que.cette inflammation constitue un état phlegmagiquetrès particulier.Si les phérlomènes de la vie pouvaientêtre assimilésà des phénomènes plus simples, j'emprunteraisune comparaison à la chimie, et, de même, dirais-jeque la ,théorie <strong>du</strong> phlogistique n'a longtemps fourniaux chimistes que des explications hypothétiques, demême celle de la phlogose, telle qu'elle est adoptéepar l'école physiologique, n'offre qu'une solutionillusoire etspécieuse des plus importantes difficultésde la pathologie.L'observation démontre il est vrai que la combustionse ré<strong>du</strong>it le plus généralement une combinaisond'oxygène, mais combien la nature des corpssimples ou composés qui entrent dans cette combinaison,combien les circonstances dans lesquelleselles s'opèrent ne font-elles pas varier les conditions<strong>du</strong> phénomène ; l'interposition de l'eau qui empêchela combustion <strong>du</strong> phosphore serait-elle un bonmoyen. de s'opposer à celle <strong>du</strong> potassiu,m ? Cependant,l'inflammation, phénomène vital bien pluscompliqué que celui de la combustion, se présentesous des aspects encore plus diversifiés. Aussi lepraticien, s'il est attentif à noter les phases dechaque espèce de phiegmasie, est-il forcé de reconnaîtreque la phlogose n'est pas le caractère principalde ces affections et qu'elle n'établit que des rapportspeu importants entre des états morbides qui exigentsouvent des médications différentes et même opposées.Les maladies ne sont pas des êtres, chaque jour onle répète et jamais que je sache le contraire n'a étéété formellement affirme. Mais beaucoup de désordresqui ne proviennent pas de l'altération spontanéedes organes et notamment une .multittide d'inflammationssont déterminées par des causes matériellesextrinsèques, par de véritables êtres venus<strong>du</strong>dehors ou <strong>du</strong> moins étrangers à l'état normal dela structure organique. Les entozoaires qui deviennentassez fréquemment des hôtes incommodes etnuisibles sont des êtres, et des êtres vivants.Les tissus hétérologues, quelle que soit leur origine,une fois développés, sont des êtres, et l'ettistencede ces pro<strong>du</strong>ctions parasites douées d'un modespécial de vitalité, de la faculté de se propager et depulluler ne peut être dédaignée toute,4 les fois qupleur présence complique une lésion phlegmasique .Le puà est la cause matérielle d'un grand nombred'irritations phlegmasiques et la résorption . de cefluide accidentel hétérologue (I. V.). Répétition ?<strong>La</strong> variole reconnaît pour principe repro<strong>du</strong>cteur, un être miasmatique coPrcible ou qui <strong>du</strong> moinss'unit et adhère à la sécrétion morbide des pustulesavec laquelle il peut être recueilli et conservé. <strong>La</strong>maladie variolique ne Se ré<strong>du</strong>it pas à une irritation