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SLRB-Info n°58 - Région de Bruxelles-Capitale

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Bureau <strong>de</strong> dépot :1050 <strong>Bruxelles</strong> 5Société du Logement <strong>de</strong> la<strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>N° 58JUIN 2009<strong>SLRB</strong> infoBulletin trimestriel d’information <strong>de</strong> la Société du Logement<strong>de</strong> la <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>DOSSIER DU TRIMESTRE :Réflexions sur les évolutionsdu secteur du logement socialen Europe


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009L’éditorial durédacteur en chefLe pendule <strong>de</strong> FoucaultVous avez entre les mains le numéro 58 <strong>de</strong> notre périodiqued’information sur le logement social bruxellois.Les réflexions quant aux objectifs du logement social restentd’actualité pour l’ensemble <strong>de</strong>s acteurs oeuvrant dans notresecteur. Ces <strong>de</strong>rniers n’hésitent pas à remettre en question leschoses préétablies au risque <strong>de</strong> se sentir, parfois incompris, ouinjustement traités suite aux manifestations <strong>de</strong> mécontentement <strong>de</strong>certains, exacerbées par la crise actuelle.Les effets <strong>de</strong>s politiques mises en place sont, parfois, insuffisamment perceptibles... et les attentes,impatientes, mais tellement compréhensibles.Il n’empêche, à l’initiative <strong>de</strong> la Secrétaire d’État au Logement, la <strong>SLRB</strong> n’a pas chômé pour faire sortir<strong>de</strong> terre les nouveaux logements, inscrits notamment au « Plan <strong>Région</strong>al du Logement » ... contrevents et marées.À ce jour, ce sont pas moins <strong>de</strong> 4.500 logements qui sont d’ores et déjà en cours <strong>de</strong> projet.Par ailleurs, ce sont également 500 millions d’euros qui sont investis par nos sociétés immobilières <strong>de</strong>service public pour la rénovation du parc existant.Malgré les embûches administratives et juridiques, ainsi que le phénomène NIMBY, nos actions conjuguéessur le terrain sont palpables et nos habitants sont en mesure <strong>de</strong> juger du travail accompli.Nous <strong>de</strong>vons être honnêtes et reconnaître qu’après les massacres à la bétonneuse <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> où<strong>Bruxelles</strong> n’était pas encore une <strong>Région</strong>, <strong>de</strong>s mesures correctrices ont été prises par le législateurbruxellois pour encadrer les dérives du tout au béton.Si tout le mon<strong>de</strong> est d’accord pour que le logement social <strong>de</strong>meure une priorité politique, qui souhaitel’arrivée <strong>de</strong> nouveaux habitants dans son jardin ? Mais, le mon<strong>de</strong> ne peut s’arrêter <strong>de</strong> tourner,y compris dans le domaine <strong>de</strong> la construction au sein d’une ville <strong>de</strong>vant faire face aux besoins <strong>de</strong> seshabitants.Ceci met en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> manière criante le dilemme qui se présente à nos déci<strong>de</strong>urs lorsqu’il s’agit <strong>de</strong>choisir entre une ville attractive avec un cadre <strong>de</strong> vie arboré et un logement décent pour tous.Le logement pour tous et par là, l’application <strong>de</strong> l’article 23 <strong>de</strong> la Constitution, <strong>de</strong>meure un réel enjeusociétal et est bien sûr l’affaire <strong>de</strong> tous les citoyens.À l’heure où l’accroissement démographique bruxellois <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> nouveaux investissements pourles années à venir, il y a <strong>de</strong>s choses qui vont sans dire ... mais qui vont encore mieux en les disant ...le logement social à <strong>Bruxelles</strong>, c’est avant tout une noble cause animée par l’intérêt général et parla volonté <strong>de</strong> tout un secteur <strong>de</strong> mettre <strong>de</strong> nouvelles opportunités <strong>de</strong> logement au bénéfice <strong>de</strong> l’ensemble<strong>de</strong> la population <strong>de</strong> notre Ville-<strong>Région</strong>.Construire plus, tout en respectant la qualité <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s quartiers, sera donc notre défi pour <strong>de</strong>main.Yves LEMMENS,rédacteur en chef3


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 20094DOSSIER DU TRIMESTRERÉFLEXIONSSUR LES ÉVOLUTIONS DU SECTEURDU LOGEMENT SOCIAL EN EUROPE■ Le développement du logementsocial dans l’Union européenneCet article présente les résultats d’une étu<strong>de</strong> conduitedans les 27 États membres. Il s’intéresse au développementdu logement social dans chacun <strong>de</strong> ces pays en tenantcompte <strong>de</strong>s référentiels <strong>de</strong> l’Union européenne, plusprécisément <strong>de</strong> la définition d’un service d’intérêt économiquegénéral (SIEG). Trois grands types <strong>de</strong> conceptionsdu logement social en Europe sont proposés : résiduelle,généraliste et universelle. L’analyse <strong>de</strong> la sélection <strong>de</strong> la<strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale et <strong>de</strong> l’attribution effective <strong>de</strong>s logementsmontre le rôle croissant joué par les communes.Article complet disponible sur simple <strong>de</strong>man<strong>de</strong>,email : mnlivyns@slrb.irisnet.beDans l’Union européenne, le logementreprésente le premier poste<strong>de</strong> dépenses <strong>de</strong>s ménages : 25 %<strong>de</strong> leur budget y sont en moyenneconsacrés (European Union, 2003).Ce poste permanent <strong>de</strong> dépensespeut atteindre plus <strong>de</strong> 50 % dubudget pour les ménages disposant<strong>de</strong> très faibles ressources oudépendant <strong>de</strong>s minima sociaux.Le logement social relève précisémentd’une réponse <strong>de</strong>s Pouvoirspublics à la défaillance structurelledu marché du logement à satisfairel’ensemble <strong>de</strong>s besoins et à garantirl’accès pour tous, à un logementdécent et accessible financièrement.Ainsi, près <strong>de</strong> 20 millions <strong>de</strong> ménageseuropéens ont recours au logementsocial et plusieurs millions <strong>de</strong>ménages sont inscrits sur les listesd’attente <strong>de</strong> ces logements, notammentdans les villes européennes oùse concentre la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et où sedéveloppe la spéculation immobilière.Si le logement social a été à l’origine<strong>de</strong> la définition <strong>de</strong>s politiques mo<strong>de</strong>rnesdu logement dans les Étatsmembres <strong>de</strong> l’Union européenne(UE), il ne relève aujourd’hui qued’une composante à part entière <strong>de</strong>ces politiques publiques menées ausein <strong>de</strong> dispositifs globaux, laquelleintervient également sur le segmentprivé du marché du logement. Cetteintervention se fait, notamment,par <strong>de</strong>s mesures fiscales visant àdévelopper ou améliorer l’offre <strong>de</strong>logements locatifs privés ou à favorisercertains statuts d’occupationdu logement tels que l’accession àla propriété <strong>de</strong>s ménages, ainsi quepar <strong>de</strong>s « revenus <strong>de</strong> transfert » affectésau logement visant à assurerla solvabilité <strong>de</strong>s ménages en <strong>de</strong>man<strong>de</strong>,indépendamment du type<strong>de</strong> logement qu’ils occupent.Une obligation<strong>de</strong> servicepublic pour le droitcommunautaireLes États membres sont en principelibres <strong>de</strong> définir leur propre politiquedu logement, leurs objectifs spécifiqueset les moyens <strong>de</strong> les atteindre.Cependant, l’ensemble du processusd’attribution <strong>de</strong>s logements sociauxdoit désormais être appréciéau regard du droit communautaire.En effet, le logement social relève<strong>de</strong>s dispositions du Traité instituantla Communauté européenne (article


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 200986 alinéa 2, et article 87), bien quel’UE ne dispose pas <strong>de</strong> compétencesexplicites en matière <strong>de</strong> définitionet <strong>de</strong> mise en œuvre <strong>de</strong> la politiquedu logement. Ainsi, les modalitésconcrètes <strong>de</strong> mise en œuvre <strong>de</strong> cesmoyens d’intervention (ai<strong>de</strong>s publiques,opérateurs spécifiques sousagrément, régulation <strong>de</strong>s marchésdu logement) relèvent pleinement<strong>de</strong>s dispositions <strong>de</strong>s traités, et notamment<strong>de</strong>s règles européennes<strong>de</strong> concurrence et du marché intérieur.En effet, ces règles d’applicationhorizontale 1 concernent touteactivité disposant d’un caractèreéconomique, c’est-à-dire exercéedans un marché donné – en l’occurrencele marché du logement – etfaisant l’objet d’une rémunérationou d’une contrepartie économique,y compris quand celle-ci est intégralementprise en charge par l’État entiers payant.Les services d’intérêt économiquegénéral (SIEG), sont définis comme<strong>de</strong>s « activités <strong>de</strong> service marchandremplissant <strong>de</strong>s missions d’intérêtgénéral et soumises <strong>de</strong> ce fait parles États membres à <strong>de</strong>s obligationsspécifiques <strong>de</strong> service public » (Livrevert <strong>de</strong> la Commission européennesur les services d’intérêt général du21 mai 2003). Le logement socialfait explicitement partie <strong>de</strong>sSIEG et la licéité <strong>de</strong> son subventionnementest donc soumise, à ce titre,à une série <strong>de</strong> critères spécifiques 2 .De fait, l’ensemble <strong>de</strong>s instruments<strong>de</strong> toute politique du logement relève<strong>de</strong>s dispositions <strong>de</strong>s traités etdu contrôle <strong>de</strong> la Commission européenne(CE) et <strong>de</strong> la Cour <strong>de</strong> justice<strong>de</strong>s Communautés européennes(CJCE) qui en sont les gardiennes.Ceci concerne notamment :• les ai<strong>de</strong>s publiques à l’offre <strong>de</strong>logement, quelle qu’en soit lanature, directes, indirectes, fiscales,<strong>de</strong> circuit ou liées à <strong>de</strong>sgaranties publiques telles queles ai<strong>de</strong>s au logement social, lesai<strong>de</strong>s fiscales à l’investissementlocatif privé <strong>de</strong>s personnes moralesou physiques, à l’exception<strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s personnelles ou fiscalesau logement accordées directementaux ménages pour leurusage propre. Toutes ces ai<strong>de</strong>sdoivent être notifiées à la Commissionpar les États membresafin d’en contrôler leur conformitéaux règles européennes <strong>de</strong>concurrence ;• les ai<strong>de</strong>s spécifiques sous laforme <strong>de</strong> taux réduits <strong>de</strong> TVA,tant au logement social qu’auxtravaux dans le parc privé, lesquellesrelèvent <strong>de</strong>s dispositions<strong>de</strong> la sixième directive TVA ;• les droits exclusifs ou les droitsspéciaux accordés à certains acteursintervenant dans le marchédu logement : ces droits spéciauxou exclusifs <strong>de</strong>vant être octroyésaprès publicité préalable et dansla mesure où ils sont strictementnécessaires à l’accomplissement<strong>de</strong> la mission spécifique confiéeaux acteurs qui en bénéficientou à leur viabilité financière ;• les relations existantes entre lapuissance publique et les opérateurs,notamment en matière <strong>de</strong>mandatement, <strong>de</strong> concessions,<strong>de</strong> délégation <strong>de</strong> mission <strong>de</strong> servicepublic ou <strong>de</strong> création d’opérateursspécifiques <strong>de</strong> type partenariatpublic-privé institutionnel(sociétés d’économie mixtepar exemple). L’appel d’offre estgénéralement exigé par les dispositionsdu droit communautaire,ou tout au moins, l’exigence<strong>de</strong> transparence <strong>de</strong> ces marchésou concessions. Ces dispositionsont fait l’objet <strong>de</strong> textes spécifiquesfin 2007 et contribuent àclarifier le cadre communautaireapplicable 3 .Trois types<strong>de</strong> conceptiondu logementsocial en EuropeLa place qu’occupe le logement socialdans ces politiques varie d’unÉtat membre à l’autre en fonction<strong>de</strong> l’héritage <strong>de</strong>s politiques conduitesdans le passé, <strong>de</strong>s structures et<strong>de</strong>s patrimoines existants et surtout<strong>de</strong>s choix politiques <strong>de</strong>s gouvernementssuccessifs.Typologie <strong>de</strong>s conceptionsdu logement social en EuropeLes conceptions du logement socialpeuvent être classifiées d’après lesmissions qui sont confiées à ce secteur.Le tableau ci-<strong>de</strong>ssous en présenteschématiquement les gran<strong>de</strong>slignes.1 Une règle communautaire d’application horizontales’entend <strong>de</strong> celles qui entrent en vigueurdirectement sans intervention législativeou réglementaire <strong>de</strong>s États membres.2 Décision <strong>de</strong> la Commission européenne du 28novembre 2005 concernant l’application <strong>de</strong>sdispositions <strong>de</strong> l’article 86, paragraphe 2, dutraité CE aux ai<strong>de</strong>s d’État sous forme <strong>de</strong> compensations<strong>de</strong> service public octroyées à certainesentreprises chargées <strong>de</strong> la gestion <strong>de</strong> servicesd’intérêt économique général [notifiée sousle numéro C(2005) 2673] (2005/842/CE).3 Communication <strong>de</strong> la Commission européenneaccompagnant la communication intitulée « Unmarché unique pour l’Europe du XXI e siècle, lesservices d’intérêt général, y compris les servicessociaux d’intérêt général : un nouvel engagementeuropéen » du 20 novembre 2007[COM(2007) 725 final] et le document <strong>de</strong> travail<strong>de</strong>s services <strong>de</strong> la Commission.5


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009Missions générales assignées au logement social dans les 27 États membresMission résiduelle (1) Mission généraliste (2) Mission universelle (3)Groupes ciblesDeman<strong>de</strong> socialeDeman<strong>de</strong> socialeDeman<strong>de</strong> globale• ménages défavorisés• ménages défavoriséstout ménage• ménages exclus• ménages exclus• ménages à faiblesressourcesMission essentielleRépondre à l’exclusion duRépondre aux difficultésRépondre à l’accèsmarché du logement <strong>de</strong>d’accès au marchépour tous à unménages dans le besoindu logementlogement décentCaractéristiques du• forte prédominance <strong>de</strong>• prédominance <strong>de</strong>• faiblesse <strong>de</strong> l’accessionmarché du logementl’accession à la propriétél’accession à la propriétéà la propriété• faiblesse du locatif• existence d’un• existence d’un secteurprivé dérégulésecteur locatif privélocatif privé régulé• prédominance du• prédominance dusecteur privé danssecteur locatif socialle marché locatifdans le marché locatifAttribution <strong>de</strong>sattribution directe par• attribution parattribution parlogements sociauxautorité publiquepropriétaire bailleurliste d’attentesur base <strong>de</strong> règleset <strong>de</strong> procédures• critères <strong>de</strong> priorité sousplafond <strong>de</strong> ressourcesPolitique tarifaire• loyers aux coûts ou• loyers plafonnés• loyers aux coûts réelsloyers en fonctionfixes ou loyers en• ai<strong>de</strong>s personnelles<strong>de</strong>s revenusfonction <strong>de</strong>s revenusau logement• ai<strong>de</strong>s sociales• ai<strong>de</strong>s personnelles• garantie <strong>de</strong> paiementau logement (en<strong>de</strong>s loyers pour lesfonction <strong>de</strong>s revenus)plus défavorisésSécurité d’occupation baux à durée illimitée baux à durée illimitée baux à durée illimitéeÉtats membresBulgarieAllemagneDanemarkChypreAutrichePays-BasEspagne (locatif social)BelgiqueSuè<strong>de</strong>EstonieEspagne (accessionGrèce mais dans unHongriesociale)contexte très spécifiqueIrlan<strong>de</strong>Finlan<strong>de</strong>(accession socialeMalteFranceà la propriété)LituanieItalieLettonieLuxembourgPortugal (locatif social)PologneRoumaniePortugal (accessionRoyaume-Unisociale)SlovaquieRépublique TchèqueSlovénie6


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009du parc locatif public généraliste etle développement d’une nouvelleoffre <strong>de</strong> logements sociaux très cibléesur <strong>de</strong>s groupes sociaux en diffic u l t é.Ce glissement du généralisme aurésidualisme peut aussi partiellementse produire au sein d’un Étatmembre à l’échelle <strong>de</strong> groupes <strong>de</strong>logements sociaux et <strong>de</strong> quartierspériphériques dans lesquels peuventêtre concentrés les ménagesdéfavorisés et les groupes ciblesexclus, notamment les populationsimmigrées ou issues <strong>de</strong> l’immigrationcomme en France, aux Pays-Bas ou en Suè<strong>de</strong>, par exemple.3. Conception universelle dulogement social, parfois qualifiée<strong>de</strong> logement d’utilité publique, caractériséepar l’absence <strong>de</strong> ciblagesur une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale donnée,et qui a pour mission <strong>de</strong> fournirun logement en direction <strong>de</strong> l’ensemble<strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>sociale incluse, en complément <strong>de</strong>l’offre présente sur le marché. Lavocation première est <strong>de</strong> peser surles conditions du marché en développantune zone <strong>de</strong> basse pressionen termes <strong>de</strong> prix par une politiquetarifaire <strong>de</strong> logements auxcoûts réels et non en référenceaux valeurs <strong>de</strong> marché.On ne procè<strong>de</strong> pas à une sélection<strong>de</strong>s risques caractérisant lesclients dans le processus d’allocation<strong>de</strong>s logements et on offre unesécurité d’occupation du logement,contrairement au segment privédu marché. Les obligations <strong>de</strong> servicepublic, en terme d’attribution,sont relativement souples et se traduisentpar la constitution <strong>de</strong> listesd’attente chronologiques, commeen Suè<strong>de</strong> (Lujanen, 2004) ; certaineslistes d’attente pouvant intégrer<strong>de</strong>s facteurs <strong>de</strong> priorité liés à la naturedu besoin en logement, commeaux Pays-Bas, voire un quota<strong>de</strong> réservations prioritaires accordéaux collectivités locales, commeau Danemark. Par définition, cetteconception d’un secteur <strong>de</strong> référenceinduit certaines frictions avecle secteur privé, à l’exemple <strong>de</strong> laSuè<strong>de</strong> et <strong>de</strong>s Pays-Bas, <strong>de</strong>ux Étatsmembres dans lesquels <strong>de</strong>s plaintespour distorsion <strong>de</strong> concurrence ontété introduites par les investisseursprivés, tant <strong>de</strong>vant les instances nationalesque communautaires.Cette conception universelle du logementsocial ne correspond pas,en effet, à la définition communautairedu service d’intérêt général dulogement social car il va bien au-<strong>de</strong>là<strong>de</strong> la satisfaction <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>sociale. L’argumentaire développédans la lettre <strong>de</strong> mise en <strong>de</strong>meureadressée par la Commission européenneaux Pays-Bas en témoigne 5 .La conception néerlandaise corresponddavantage à un serviced’intérêt général du logement,et non du logement social, baséesur <strong>de</strong>s missions universelles en direction<strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> globale <strong>de</strong>logements, et sur un objectif <strong>de</strong> régulationdu marché, même s’il n’estpas explicitement qualifié commetel par les États membres concernés.Cette conception n’interditd’ailleurs pas, non plus, un glissementpartiel vers la conception résiduelledu logement social qui peuts’opérer au sein même <strong>de</strong> certainsgroupes <strong>de</strong> logements sociaux et<strong>de</strong> quartiers, dans lesquels peuventêtre concentrés les ménagesdéfavorisés et <strong>de</strong>s groupes ciblesexclus. Cette conception du logementsocial est présente en Suè<strong>de</strong>,aux Pays-Bas et au Danemark, Étatsmembres partageant une structurationdu marché du logement assez5 Commission européenne, DG Concurrence,Mesure d’ai<strong>de</strong> n° E 2 / 2005 : Financement <strong>de</strong>coopératives du logement – Pays-Bas. Courrieradressé en vertu <strong>de</strong> l’article 17 du règlement <strong>de</strong>procédure concernant le secteur du logementaux Pays-Bas, 14 juillet 2005 * 0 / 55413.homogène, composée d’un faibletaux <strong>de</strong> propriétaires occupants,d’un secteur locatif privé dynamiquebien que régulé par l’État etd’un secteur locatif social d’utilitépublique très représentatif et dominantle marché locatif. Même si ellerelève d’un contexte totalement différent,la situation présente en Grèceen matière d’accession socialeà la propriété peut être égalementassociée à cette conception car ellea pour vocation <strong>de</strong> répondre auxbesoins en logement <strong>de</strong> l’ensemble<strong>de</strong>s salariés du secteur privé. Lessolutions proposées par ces Étatsmembres pour se conformer auxrègles communautaires <strong>de</strong> concurrenceet à l’approche du logementsocial développée par la Commissioneuropéenne sont diverses. AuxPays-Bas, la ministre du Logementavait proposé au Parlement, justeavant <strong>de</strong> quitter le Gouvernement,d’introduire un plafond <strong>de</strong> revenuspour l’accès au logement social et<strong>de</strong> basculer ainsi dans la conceptiongénéraliste du logement social, plusconforme à la position <strong>de</strong> la Commissioneuropéenne. Le nouveau Gouvernement,récemment constitué,ne s’est pas encore prononcé sur laquestion. En Suè<strong>de</strong>, par contre, oùle terme même <strong>de</strong> logement socialn’est pas usité, voire rejeté, l’hypothèseen cours d’analyse au sein dunouveau Gouvernement consisteraità maintenir la conception universelledu « logement social » tout enneutralisant l’impact du droit communautaire<strong>de</strong> la concurrence par lasuppression <strong>de</strong> toute ai<strong>de</strong> d’État endirection <strong>de</strong>s sociétés communales<strong>de</strong> logement et par l’assouplissementdu contrôle <strong>de</strong>s loyers dans lesecteur locatif privé.Ces mesures permettraient, en effet,<strong>de</strong> garantir une égalité <strong>de</strong> traitemententre les sociétés communales<strong>de</strong> logement et les sociétés d’investissementimmobilier sans remettreen cause les instruments <strong>de</strong> régula-8


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009tion du marché du logement et laconception universelle du « logementsocial », mais en renonçant àla qualification explicite <strong>de</strong> « serviced’intérêt économique général ».Les missions spécifi quesdu logement socialLes missions confiées au logementsocial par les États membres peuventse résumer dans la satisfaction<strong>de</strong>s besoins en logements <strong>de</strong>sménages par l’accès et le maintiendans un logement décent et accessiblefinancièrement. Dans tous lesÉtats membres, une mission est assignéeau logement social et à leursopérateurs mandatés. Si les modalités<strong>de</strong> définition diffèrent d’un Étatmembre à l’autre, allant <strong>de</strong> l’acte législatifà la convention, au contrat,cahier <strong>de</strong>s charges ou délibérationdu conseil d’administration souscontrôle <strong>de</strong> l’autorité publique <strong>de</strong>rattachement, leur formulation relève<strong>de</strong> la compétence exclusive <strong>de</strong>sautorités publiques au niveau nationalou fédéral, régional ou local.En effet, il revient à l’autorité publique<strong>de</strong> définir le contenu <strong>de</strong> lamission spécifique et <strong>de</strong> charger lesopérateurs mandatés <strong>de</strong> son accomplissement.C’est le cas dans l’ensemble<strong>de</strong>s États membres même sile <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> précision dans la définition<strong>de</strong> la mission varie d’un Étatà l’autre, ainsi que les marges d’appréciationet d’initiative laissées auxopérateurs dédiés ou ponctuels.Cette mission se concrétise dansla construction <strong>de</strong> logements locatifsou en accession à la propriétévisant à accroître le niveau général<strong>de</strong> l’offre sur le marché et plus spécifiquementle niveau <strong>de</strong> l’offre <strong>de</strong>logements accessibles. Cette missionprincipale peut être complétéepar <strong>de</strong>s missions complémentairesvisant à intégrer socialement lesménages par l’emploi, la santé, laformation, à promouvoir la diversitédans l’habitat ainsi que la mixité sociale,ou à contribuer à une régulationpublique globale du marché dulogement.Au sein d’un État membre, les missionsdu logement social peuventégalement fluctuer selon la nature<strong>de</strong> l’opérateur. Ainsi, au Royaume-Uni et en Irlan<strong>de</strong>, alors que le parclocatif public <strong>de</strong>s communes disposaittraditionnellement d’une fonctiongénéraliste, les Housing Associations,bailleurs sociaux associatifsagréés, ont toujours disposé d’uneapproche beaucoup plus sociale <strong>de</strong>leur mission, notamment <strong>de</strong> spécialisationsur les personnes dansle besoin ou les minorités. Comptetenu <strong>de</strong> leur essor et <strong>de</strong> leur professionnalisation,cette mission spécifiquetend aujourd’hui à se diversifieralors que celle du parc locatif publicgéré par les communes tend aucontraire à se spécialiser du fait <strong>de</strong>la vente massive <strong>de</strong>s logements auxlocataires les plus aisés et du développement<strong>de</strong>s problèmes sociauxà gérer au niveau local. Des formes<strong>de</strong> spécialisation et <strong>de</strong> complémentaritépeuvent exister au sein d’unmême État membre ainsi que <strong>de</strong>sdynamiques d’évolution <strong>de</strong> ces missions.Dans les missions assignées au logementsocial dans les États membresdotés d’une telle politique se dégagentquelques éléments <strong>de</strong> convergence:• l’existence d’une mission spécifiqueen référence à un objectifd’intérêt général ;• la mission principale visant àaccroître l’offre <strong>de</strong> logements,laquelle s’exprime dans lesÉtats membres par la définitiond’une mission <strong>de</strong> fourniture, <strong>de</strong>construction, d’acquisition, d’entretien,d’offre <strong>de</strong> logements, <strong>de</strong>loger ou encore d’assurer un logement;• le ciblage sur la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> socialeexprimée dans les États membrespar les notions <strong>de</strong> personnesen difficulté sur le marché,<strong>de</strong> personnes dont les revenussont inférieurs à un plafond,<strong>de</strong> personnes dans le besoin,<strong>de</strong> personnes défavorisées ouappartenant à <strong>de</strong>s groupes sociauxdéfavorisés, ou encore <strong>de</strong>familles à revenus moyens ou <strong>de</strong>classes moyennes.On est donc bien en présence d’unservice d’intérêt général (SIG) définien référence à une mission particulièrequi se décline par un acte <strong>de</strong>fourniture <strong>de</strong> logements en directiond’une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale définieplus ou moins largement. Des missionsd’intérêt général, plus largesconfiées au logement social, sontégalement présentes, comme enFrance la mixité sociale et la diversité<strong>de</strong> l’habitat ou encore la régulation<strong>de</strong>s prix <strong>de</strong>s loyers dans le parcprivé en Suè<strong>de</strong>.Ces missions d’intérêt général setraduisent par <strong>de</strong>s obligations <strong>de</strong>service public spécifiques selon laconception communautaire, lesquelless’imposent aux opérateurs<strong>de</strong> logement social.(…)Les obligations<strong>de</strong> service publicpropres aulogement socialLes obligations <strong>de</strong> service publicconcernent, à la fois, les caractéristiques<strong>de</strong>s services offerts, notammentles conditions <strong>de</strong> fourniture etd’occupation <strong>de</strong>s logements (critèrematériel) et les conditions <strong>de</strong> fonctionnement<strong>de</strong>s entreprises <strong>de</strong> logementsocial qui en sont chargées(critère organique).9


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009Quatre critères matériels du servicepublic sont présents dans les Étatsmembres :• les obligations liées aux conditionsd’occupation <strong>de</strong>s logementset <strong>de</strong> sélection <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>éligible ;• les obligations <strong>de</strong> nature tarifairequant à l’accessibilité financière<strong>de</strong>s logements ;• les obligations liées à la sécuritéd’occupation <strong>de</strong>s logements ;• les obligations liées à la participationet à l’implication <strong>de</strong>s ménagesbénéficiaires.Ces obligations peuvent être cumulativesou se concentrer sur unaspect principal comme la politiquetarifaire et l’accessibilité financière,la politique d’attribution et <strong>de</strong> sélection<strong>de</strong>s bénéficiaires ou encorela participation <strong>de</strong>s ménages et lesservices spécifiques à leur fournir.Ces obligations <strong>de</strong> service publicvarient également en fonction dustatut d’occupation du logementsocial. Enfin, ces obligations sontillimitées pour une très large majoritéd’États membres <strong>de</strong> façon àrespecter le principe <strong>de</strong> continuitédu service d’intérêt général du logementsocial qui s’applique ici auxconditions effectives d’occupationdu logement. Il convient cependant<strong>de</strong> noter la pratique d’obligations<strong>de</strong> service public limitées dans letemps, notamment en Allemagneet en République Tchèque (Donner,2005), dans le cadre d’un conventionnementtemporaire <strong>de</strong>s logementssociaux au terme duquel lesobligations <strong>de</strong> service public cessentet les conditions d’occupation dulogement pour le bénéficiaire retombentdans le droit commun dusecteur privé.Les obligations matérielles<strong>de</strong> service public relativesà la sélection <strong>de</strong> la<strong>de</strong>man<strong>de</strong> socialeSelon la Commission européenne,le service d’intérêt général du logementsocial présente un caractèresocial, et à ce titre … « la définition<strong>de</strong>s activités (…) doit donc conserverun lien direct avec les ménagessocialement défavorisés et non pasuniquement avec la valeur maximum<strong>de</strong>s logements » 6 .Cette approche communautaire dulogement social sous le prisme <strong>de</strong>srègles <strong>de</strong> concurrence place doncles conditions <strong>de</strong> sélection <strong>de</strong>s bénéficiairesau cœur <strong>de</strong>s obligations<strong>de</strong> service public du logement social,notamment dans la définitiondu lien direct avec les ménages socialementdéfavorisés et par conséquent<strong>de</strong> « l’erreur manifeste dansla qualification <strong>de</strong> service d’intérêtgénéral » 7 du logement social. Lesconditions d’accessibilité financière<strong>de</strong>s logements sociaux, notammentpar plafonnement <strong>de</strong> leur valeur ou<strong>de</strong> leur prix, sont également prisesen considération par la Commissioneuropéenne mais ne suffisent pasà qualifier un logement social entant que service d’intérêt général.L’existence d’obligations <strong>de</strong> servicepublic en matière <strong>de</strong> sélection <strong>de</strong>la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale et <strong>de</strong> conditionsd’attribution effective <strong>de</strong>s logementssociaux à leurs occupantssemble donc incontournable pourle droit communautaire.(…)6 Lettre <strong>de</strong> la Commission au Gouvernementhollandais sur l’abus manifeste <strong>de</strong> qualificationdu SIEG <strong>de</strong> logement social, points 34 et 45 :Courrier adressé en vertu <strong>de</strong> l’article 17 du règlement<strong>de</strong> procédure concernant le secteurdu logement aux Pays-Bas : Mesure d’ai<strong>de</strong> n°E 2 / 2005 (Ex – NN 93 / 02) – Financement<strong>de</strong> coopératives du logement – Pays-Bas, référence: 14/07/2005 * 0 / 55413, COMP H1FSP /lc (2005), A / 30854 D / 1001.7 I b i d. point 30.Les critères d’inscriptionLes critères d’inscription représententle premier niveau <strong>de</strong> sélectionqui renvoie aux conditions légalesd’accès au logement social et auxconditions d’inscription sur les listesd’attente, définies soit au niveau national,régional ou local. Plus les systèmesd’attribution sont centralisésou uniformisés à l’échelle d’un Étatmembre, plus les critères d’inscriptionprennent <strong>de</strong> l’importance car ilsconstituent les principaux élémentsobjectifs <strong>de</strong> filtrage appliqués auniveau local par les opérateurs quien ont la responsabilité, à savoir, lescommunes ou les régions, commec’est le cas en Allemagne, en Belgique,au Luxembourg, en Italie eten France. Ces critères d’inscriptionsont constitués généralement par :• le statut d’occupation du <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur(locataire ou logé gratuit);• le niveau <strong>de</strong> revenus <strong>de</strong>s candidats(plafonds <strong>de</strong> revenus enBelgique, Allemagne, France,Italie et Luxembourg) ;• la domiciliation (inscription auregistre communal en Belgiqueet Allemagne, lien professionnelou rési<strong>de</strong>ntiel avec la communeen Italie, trois ans minimum <strong>de</strong>rési<strong>de</strong>nce au Luxembourg).(…)De façon générale, plus la dimensionlocale <strong>de</strong>s politiques <strong>de</strong> logementsocial est importante, plus lescritères <strong>de</strong> priorités sont déterminants.Les critères d’inscription sontainsi soit inexistants soit centrés surla nature et la permanence du lienentre le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur et la communedans laquelle il a fait la démarched’inscription. C’est le cas notammentau Danemark, en Irlan<strong>de</strong>, auxPays-Bas, au Royaume-Uni et enSuè<strong>de</strong> où peu <strong>de</strong> critères d’inscriptionsont définis si ce n’est le critère10


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009<strong>de</strong> domiciliation et <strong>de</strong> lien avec lacommune.Les critères <strong>de</strong> prioritéLes critères <strong>de</strong> priorité visent doncà établir l’ordre d’attribution <strong>de</strong>slogements aux différents candidatsayant passé le premier filtre <strong>de</strong> l’inscriptionquand il existe. Ces critèresgarantissent que la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>sménages disposant <strong>de</strong>s niveaux<strong>de</strong> besoins les plus importants soittraitée en priorité, à l’opposé dusystème <strong>de</strong> sélection <strong>de</strong>s risques,dans le segment privé du marchédu logement social, qui exclut prioritairementles ménages à faiblesressources et/ou à comportements« sociaux » présumés. Différentssystèmes <strong>de</strong> priorité coexistent, lesplus classiques étant la liste d’attenteoù les candidats sont systématiquementclassés au mieux, parordre <strong>de</strong> priorité (système <strong>de</strong> pointsaux Pays-Bas, au Royaume-Uni, enIrlan<strong>de</strong> et en Allemagne), sinon parordre chronologique (le Danemark,la <strong>Région</strong> flaman<strong>de</strong> en Belgique,la Suè<strong>de</strong>, la Finlan<strong>de</strong>) avec possibilitéd’attribution communale directepour les cas les plus urgents <strong>de</strong> relogement.Les systèmes <strong>de</strong> réservationet d’attribution directe, assurésprincipalement par les communes,sont présents en Allemagne (100 %<strong>de</strong>s logements sociaux conventionnés),en France (20 %), au Danemark(25 %), au Royaume-Uni (<strong>de</strong> 50 %minimum à 100 % dans le cadred’une convention avec le bailleursocial agréé), en Italie (15 %), auxPays-Bas et en Suè<strong>de</strong> (variable) etexceptionnellement par les régions(l’Italie) ou par les représentantslocaux <strong>de</strong> l’État central (la France,l’Italie uniquement en cas <strong>de</strong> dangerpour l’ordre public).Dans ces États membres, il n’existedonc pas <strong>de</strong> plafonds <strong>de</strong> ressourcesmais <strong>de</strong>s critères objectifs <strong>de</strong> prioritémis en œuvre par <strong>de</strong>s systèmestransparents <strong>de</strong> liste d’attente uniqueconstituée sur base <strong>de</strong> points/priorité, et <strong>de</strong>s critères <strong>de</strong> convenancedéfinis localement visant à optimaliserl’affectation du logementsocial, en termes <strong>de</strong> service renduet <strong>de</strong> niveau <strong>de</strong> loyer, aux caractéristiquesdu ménage bénéficiaire.Ainsi, bien que le périmètre potentiel<strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale couvrel’ensemble <strong>de</strong>s ménages sur un territoiredonné, le périmètre effectif<strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale reste dansce système, entièrement dépendant<strong>de</strong> la taille <strong>de</strong> la liste d’attente et <strong>de</strong>l’importance relative <strong>de</strong>s ménagesen tête <strong>de</strong> liste en terme <strong>de</strong> pointspriorité. Dans les zones tendues àfaible mobilité dans le parc social,ce périmètre <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> socialesera effectivement limité aux personnesles plus défavorisées alorsque dans les zones moins tenduesdu même État membre, le périmètreeffectif <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> socialesera plus large.Le classement par liste d’attenteCe classement par liste d’attentecommune, multiple, et/ou parsous-listes thématiques est en généralla technique utilisée afin <strong>de</strong>répondre aux objectifs <strong>de</strong> prioritéet d’urgence et aux exigences <strong>de</strong>lisibilité et <strong>de</strong> transparence <strong>de</strong>s attributions.Dans tous les pays étudiés,exception faite du Danemark, <strong>de</strong>la Suè<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la <strong>Région</strong> flaman<strong>de</strong>en Belgique (classement par ordrechronologique avec droit communald’attribution directe), le classements’opère selon un système <strong>de</strong>points prenant en compte les différentscritères <strong>de</strong> priorité retenus.Les principaux critères <strong>de</strong> prioritésont les conditions <strong>de</strong> logement ducandidat et/ou l’appartenance à <strong>de</strong>sgroupes cibles. A chaque caractéristique<strong>de</strong> la situation du <strong>de</strong>man<strong>de</strong>urest affecté un nombre <strong>de</strong> points.L’attribution s’opère « automatiquement» au profit du candidat ayantle plus grand nombre <strong>de</strong> points ouà l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux ou trois candidatsen tête <strong>de</strong> la liste d’attente. Sontprises en considération les conditions<strong>de</strong> logement au moment <strong>de</strong> la<strong>de</strong>man<strong>de</strong>, à savoir, l’insalubrité dulogement, son niveau d’inconfort et<strong>de</strong> manque d’équipement, sa taillerelativement à celle du ménage,son adéquation à <strong>de</strong>s besoins spécifiques(personnes âgées ou handicapées),les situations <strong>de</strong> cohabitationforcée, etc. ( Italie, Allemagne,Luxembourg, Belgique [ <strong>Bruxelles</strong>,Wallonie ], Pays-Bas ). D’autres Étatsmembres privilégient les groupescibles tels les sans-abri, les noma<strong>de</strong>s,les personnes dépendantesmédicalement... (Irlan<strong>de</strong>, Royaume-Uni). Si ce système <strong>de</strong> classementpar points permet <strong>de</strong> répondre àun souci d’équité, d’efficacité et <strong>de</strong>transparence, il limite fortement lesmarges <strong>de</strong> manœuvre et l’exercice<strong>de</strong>s politiques <strong>de</strong> peuplement. C’estla raison pour laquelle <strong>de</strong>s « soupapes» ou autres « portes <strong>de</strong> sortie »ont été instaurées. En Allemagneet au Luxembourg, le bailleur dispose<strong>de</strong> la possibilité <strong>de</strong> choisirun candidat parmi trois candidatsprésentés. En Belgique (<strong>Région</strong>swallonne et bruxelloise) <strong>de</strong>s dérogationsdéfinies ont été prévues et<strong>de</strong>s sous-listes d’attente organisées.En <strong>Région</strong> wallonne, <strong>de</strong>ux tiers <strong>de</strong>slogements sont attribués automatiquementpar liste d’attente informatisée(liste prioritaire) et un tiersau cas par cas (revenus moyens). Cetiers peut être majoré par dérogationexpresse en cas <strong>de</strong> déséquilibresocial du peuplement. Un systèmeanalogue d’attribution automatiqueexiste en <strong>Région</strong> bruxelloise auquelest associé un régime d’attributiondérogatoire, soit pour accélérer lesprocédures d’attribution d’urgence(relogement, expulsion), soit pourmettre en œuvre un rééquilibragesocial <strong>de</strong>s quartiers. En <strong>Région</strong> flaman<strong>de</strong>,au Danemark et en Suè<strong>de</strong>,11


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009l’attribution s’opère selon l’ordrechronologique d’inscription sur laliste d’attente sans véritable systèmedérogatoire. On retrouve ce systèmeen Italie, mais selon un classementpar ordre <strong>de</strong> priorité.On observe le développement <strong>de</strong>systèmes <strong>de</strong> liste d’attente communeétablie au niveau local en Irlan<strong>de</strong>,au Royaume-Uni, aux Pays-Baset en Allemagne, généralisation dusystème <strong>de</strong>s conférences communalesinitialement créées à Brême etpermettant <strong>de</strong> répartir la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>sociale prioritaire sur l’ensemble duparc locatif social <strong>de</strong> la communeet non pas <strong>de</strong> la concentrer sur unquartier particulier ou sur une entreprise<strong>de</strong> logement social.Le système <strong>de</strong> réservationIl constitue la secon<strong>de</strong> métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>sélection <strong>de</strong>s candidats, à côté <strong>de</strong>l’attribution par liste d’attente. Lestaux <strong>de</strong> réservation varient d’un paysà l’autre. La diversité <strong>de</strong>s situationsobservées nécessite <strong>de</strong> clarifier leconcept <strong>de</strong> réservation. On retiendraici comme définition cadre, lapossibilité dont dispose le réservataire,soit d’attribuer le logement directementselon ses propres critères<strong>de</strong> priorité mais dans le respect <strong>de</strong>scritères d’inscription, soit <strong>de</strong> « nominer» <strong>de</strong>s candidats en les insérantdans les listes d’attente existantesquand celles-ci sont gérées par uneentreprise <strong>de</strong> logement social. Dansce cas, les critères <strong>de</strong> priorité nesont pas dérogatoires. Cette définitionpermet d’i<strong>de</strong>ntifier trois types<strong>de</strong> réservataires : les Pouvoirs publics(principalement les communesmais aussi les régions, voire mêmel’État dans les États membres centralisés); les commissions d’attributionindépendantes ; les entrepriseset associations.Le système <strong>de</strong> réservation est en généralcontrôlé par un acteur uniquequi est la commune avec l’objectifprincipal <strong>de</strong> garantir et d’accélérerl’accès au logement social pour lesgroupes cibles et les cas d’urgence(sans-abri, ménages en difficulté,personnes à faibles ressources) dansle cadre <strong>de</strong> l’action communale entreprisedans le domaine social et <strong>de</strong>l’obligation qui leur est faite par laloi d’offrir un logement aux ménagesqui en sont exclus (l’Allemagne,le Danemark, l’Irlan<strong>de</strong>, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Suè<strong>de</strong>, la France<strong>de</strong>puis 2008 ).D’autres systèmes <strong>de</strong> réservationsont conçus dans une optique différenteconsistant à offrir un droit<strong>de</strong> réservation à différents acteursen contrepartie <strong>de</strong> leur apportau financement du logement (enFrance : État, communes, entreprises)ou compte tenu <strong>de</strong> leur niveau<strong>de</strong> compétence respectif (en Italie :État, régions, communes). L’utilisation<strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> réservation par lesréservataires répond à <strong>de</strong>s logiquesdifférentes et conduit à la constitution<strong>de</strong> filières d’attribution spécifiquesoù chaque réservataire peutattribuer ou présenter son quota <strong>de</strong>logements selon ses propres règles<strong>de</strong> classement et <strong>de</strong> sélection, enl’absence <strong>de</strong> critères <strong>de</strong> priorité définislégalement.Les critères <strong>de</strong> convenanceCe troisième type <strong>de</strong> critère vise àgarantir une affectation optimale<strong>de</strong>s logements sociaux vacants ouneufs à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale. Il s’agit<strong>de</strong> s’assurer que les caractéristiquesdu logement correspon<strong>de</strong>ntau mieux au besoin du <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur.Ces critères relèvent <strong>de</strong> donnéesnormatives (nombre minimum etmaximum <strong>de</strong> m² par personne) etpositives (affecter les logementsaux loyers les plus faibles aux candidatsdisposant <strong>de</strong> faibles revenus,taux d’effort maximum et <strong>de</strong> restepour vivre, effectif après la dépenselogement, capacité d’insertion du<strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur…).Ces critères <strong>de</strong> convenance présententsouvent une dimension qualitativeet sont définis et appliquésau niveau local. Ainsi, le revenu effectifdu ménage peut in fine êtrepris en considération au niveau <strong>de</strong>scritères locaux <strong>de</strong> convenance alorsqu’il ne figure pas dans les critèresnationaux d’inscription, comme auxPays-Bas.Par ailleurs, même si <strong>de</strong>s revenusmaxima sont définis au niveau <strong>de</strong>scritères d’inscription, l’attributiondu logement s’effectuera en fonction<strong>de</strong> ratio entre le revenu effectifdu <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur et le niveau <strong>de</strong>sloyers (Luxembourg). L’importancecroissante accordée à ces critères <strong>de</strong>convenance, notamment aux Pays-Bas (permis d’habiter et attributionpar petites annonces personnaliséeslogement par logement), au Luxembourg,au Danemark, en Allemagne(bon d’accès au logement i<strong>de</strong>ntifiantavec précision le type <strong>de</strong> logementauquel le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur peut postulerauprès <strong>de</strong>s différents bailleurs), reflète:• l’évolution <strong>de</strong>s pratiques d’attributionqui sont passées d’unelogique <strong>de</strong> qualité du servicerendu et <strong>de</strong> critères générauxd’inscription à une attributionpersonnalisée par nature etpriorité <strong>de</strong>s besoins à satisfaire.L’attribution par liste d’attenteindividualisée par logement auxPays-Bas en est l’une <strong>de</strong>s manifestationsla plus aboutie ;• l’impuissance du bailleur à maîtriserce niveau d’adéquation dansle temps en raison <strong>de</strong> l’existence<strong>de</strong> baux à durée indéterminée,<strong>de</strong> la garantie du maintien dansles lieux, et <strong>de</strong> la faible mobilité<strong>de</strong>s locataires ou <strong>de</strong>s processusd’échange <strong>de</strong>s logements entrebénéficiaires. Toutefois, cette12


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009(…)impuissance peut être partiellementcompensée par la miseen œuvre <strong>de</strong> correctifs tels queles « surloyers » en France et la« taxe à l’occupation indue » enAllemagne, ou <strong>de</strong>s pratiquesplus coercitives telles que lataxation <strong>de</strong>s m² excé<strong>de</strong>ntairesquand le ménage en sous-occupationrefuse le relogement,ou encore, l’introduction dans lebail d’une clause <strong>de</strong> relogementobligatoire en cas <strong>de</strong> sous-occupationdu logement, comme auLuxembourg.Un processus complexeet une forte implication<strong>de</strong>s autorités localesDes principales évolutions observéesen matière d’obligations liées à lasélection <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale et àl’attribution effective <strong>de</strong>s logementssociaux, nous retiendrons une tendancegénérale au resserrement<strong>de</strong>s conditions d’attribution dans lesens du renforcement <strong>de</strong> la missionsociale <strong>de</strong>s organismes à vocationgénéraliste. Cela est observé auDanemark et en Suè<strong>de</strong> où la pression<strong>de</strong>s communes s’intensifie, enBelgique suite à la publication durapport général <strong>de</strong> la Fondation RoiBaudouin sur la pauvreté publié en1994, et en Allemagne dans le cadre<strong>de</strong> la réforme <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième loisur la construction et sur le postulat<strong>de</strong> remise en cause <strong>de</strong> l’objet socialdu logement conventionné. Corrélativementà cette évolution, le taux<strong>de</strong> réservation communale tend às’étendre à une part croissante duparc social, principalement sous unmo<strong>de</strong> <strong>de</strong> conventionnement localentre la commune et l’entreprise <strong>de</strong>logement social.Le souci <strong>de</strong> lisibilité et <strong>de</strong> transparence<strong>de</strong>s politiques locales d’attributionaccompagne ces évolutionstant du point <strong>de</strong> vue du <strong>de</strong>man<strong>de</strong>urque <strong>de</strong>s Pouvoirs publics. Constatest fait d’une dimension éminemmentlocale <strong>de</strong>s attributions et lerôle croissant joué par les communesdans le cadre <strong>de</strong>s conventionnementset <strong>de</strong> la contractualisationavec les entreprises <strong>de</strong> logementsocial. L’État est <strong>de</strong> moins en moinsprésent dans les procédures, si cen’est dans la définition <strong>de</strong>s critèresd’inscription quand ils existentet délègue au niveau local, dans lecadre <strong>de</strong> la décentralisation, la définitionet le contrôle <strong>de</strong>s critères<strong>de</strong> priorité et <strong>de</strong> convenance. Ces<strong>de</strong>rniers sont modulés en fonction<strong>de</strong>s situations <strong>de</strong>s marchés locauxdu logement. Les attributions sontainsi territorialisées, à savoir, le développement<strong>de</strong> pratiques et <strong>de</strong> politiquesd’attribution conçues globalementau sein du territoire communal.Cela s’illustre notamment par ledéveloppement <strong>de</strong> listes d’attentecommunes, <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong>s attributionsentre plusieurs entreprises <strong>de</strong>logement social (Allemagne), ou dupermis d’habiter aux Pays-Bas.(…)Cette analyse détaillée <strong>de</strong>s obligationsen matière <strong>de</strong> sélection <strong>de</strong>la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale (critères d’inscription)et d’attribution effective<strong>de</strong>s logements sociaux (critères <strong>de</strong>priorité et <strong>de</strong> convenance) montreà la fois la complexité du processuset la forte implication <strong>de</strong>s autoritéslocales compétentes en matière <strong>de</strong>logement social. Cette analyse démontreque c’est bien l’ensembledu processus d’attribution <strong>de</strong>s logementssociaux qui doit être appréciéau regard <strong>de</strong> l’exigence communautaire<strong>de</strong> lien direct avec la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>sociale et non pas seulement lepérimètre théorique d’éligibilité découlant<strong>de</strong>s seuls critères d’inscriptionquand ils existent.Laurent GHEKIÈRE, économiste,Représentant <strong>de</strong> l’Union sociale pourl’Habitat auprès <strong>de</strong> l’Union européenne13


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009Références bibliographiquesBoelhouwer P., Heij<strong>de</strong>n H.,1992, Housing Systems in Europe: Part 1: A comprehensive study ofhousing policy, Delft, Deft University Press.Comité européen <strong>de</strong> liaison <strong>de</strong> l’habitat social (CECODHAS), 2006, Etu<strong>de</strong> sur les Services sociaux d’intérêtgénéral dans l’UE : Chapitre sur le logement social. Contribution <strong>de</strong> l’Observatoire Européen du LogementSocial à un projet financé par l’UE pour la DG Emploi, Affaires sociales et Egalité <strong>de</strong>s chances, <strong>Bruxelles</strong>.CECODHAS, 2007a, Gestion du parc locatif social en Europe : expériences et approches novatrices,Observatoire Européen du Logement Social, <strong>Bruxelles</strong>, juillet.CECODHAS, 2007b, L’avenir du logement social dans l’UE, Observatoire Européen du Logement Social,<strong>Bruxelles</strong>, mai.Council of Europe, 2002, Policy Gui<strong>de</strong>lines on Access to Housing for Disadvantaged Categories of Persons,group of specialists on access to housing, CS-LO (2001) 31, ECSLO2001.31.Doling J., 1997, Comparative Housing Policy : Government and Housing in Advanced IndustrialisedCountries, New York, St. Martin’s Press, Inc.Donner C., 2000, Housing Policies in the European Union - Theory and Practice, Vienne, publication<strong>de</strong> l’auteur.Donner C., 2005, Housing Policies in Central Eastern Europe : Czech Republic / Hungary / Poland /Slovenia / Slovakia, Vienne, publication <strong>de</strong> l’auteur.European Union, 2003, Housing Statistics in the European Union, 2002. International Centre for Researchand <strong>Info</strong>rmation on the Public and Cooperative Economy, Liège, University of Liège.Guerrand R.-H., 1992, Une Europe en construction : <strong>de</strong>ux siècles d’habitat social en Europe, Paris,La Découverte.Hegedüs J., Mayo S., Tosics I., 1996, Transition of the Housing Sector in the East Central European Countries,Review of Urban & Regional Development Studies, n° 8 : 101-136.van <strong>de</strong>r Heij<strong>de</strong>n H., 2002, Social Rented Housing in Western Europe : Developments and Expectations,Urban Studies, vol.39, n°2 : 327-340.Lujanen M., 2004, Housing and housing policy in the Nordic Countries, Nordic Council of Ministers.Priemus H., Dieleman F-M., 1997, Social rented housing : recent changes in Western Europe : introduction,Housing Studies, vol. 12, n° 4 : 421-425.Tsenkova S., 2003, Housing Policy Matters : The Reform Path in Central and Eastern Europe : PolicyConvergence ? in Tsenkova S. and Lowe S (eds) Housing Change in Central and Eastern Europe :Integration or Fragmentation, Al<strong>de</strong>rshot, Ashgate Publishing Limited : 193-205.14


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009■ Réflexions sur les évolutions dulogement social en Europe (1999-2009)C’est une évi<strong>de</strong>nce : les contextes etles formes <strong>de</strong> l’intervention publiqueen matière <strong>de</strong> logement social diffèrentfortement selon les pays.Nombre d’événements, propres auxpassés nationaux, jalonnent l’action<strong>de</strong>s personnes privées et <strong>de</strong>s pouvoirspublics européens <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>uxsiècles. Cette singularité se traduitdans les constructions <strong>de</strong>s systèmes: la politique du logement social,c’est-à-dire l’habitation notammentà caractère social dont la fournitureest facilitée par l’intervention<strong>de</strong> la puissance publique, son mo<strong>de</strong><strong>de</strong> financement ainsi que la gestion<strong>de</strong>s logements sociaux portent lamarque <strong>de</strong>s cultures nationales,voire locales. Néanmoins, force est<strong>de</strong> constater que les politiques <strong>de</strong>logement social sont sujettes à <strong>de</strong>sévolutions pour le moins similaires<strong>de</strong>puis quelques décennies.La présente contribution a ainsipour ambition <strong>de</strong> mettre en lumièrel’ensemble <strong>de</strong>s évolutions enregistréesdans le domaine du logementsocial en Europe <strong>de</strong>puis dix années.Son point <strong>de</strong> départ est donc fixéà l’année 1999. Cette année-làconsacra dans la majorité <strong>de</strong>s paysdu continent l’apogée <strong>de</strong>s gouvernementssociaux-démocrates seréclamant d’une gauche nouvelle,souhaitant concilier la dimensionlibérale <strong>de</strong> l’économie <strong>de</strong> marchéavec une certaine permanence <strong>de</strong>l’intervention sociale : Lionel Jospinen France (1997-2002), Tony Blair enGran<strong>de</strong>-Bretagne (1997-2007), GerhardSchrö<strong>de</strong>r en Allemagne (1997-2005). En France, Martine Aubry, laministre <strong>de</strong> l’Emploi et <strong>de</strong> la Solidaritévient <strong>de</strong> faire adopter la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 « contre lesexclusions », qui consacre le rôle <strong>de</strong>sassociations <strong>de</strong> défense <strong>de</strong>s personnesen situation d’exclusion par lelogement et prévoit nombre <strong>de</strong> mesuresen matière <strong>de</strong> maintien dansle logement. En Gran<strong>de</strong>-Bretagne,le ministère <strong>de</strong>s Affaires galloises(« The Welsh Office ») est provisoirementen charge du logement en cequi concerne le pays <strong>de</strong> Galles. EnAllemagne, le nouveau GouvernementSPD entame la mise en œuvre<strong>de</strong> l’opération « Ville sociale », afind’adopter une démarche globale enmatière <strong>de</strong> politiques urbaines : participation<strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s acteursinstitutionnels et privés, etc… ; cetteinitiative entreprise conjointementpar l’État fédéral, les Län<strong>de</strong>r et lescommunes est conçue pour stabiliserles quartiers qui connaissent undéclin en raison <strong>de</strong> problèmes sociaux,économiques et d’aménagementurbain. Il nous semble que cesquelques mesures donnent le « la »symbolique aux évolutions à venirau cours <strong>de</strong> la décennie suivante.Nous tenterons, dès lors, <strong>de</strong> dégagerles gran<strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong>sdites évolutions,en distinguant simplementl’intervention (I) <strong>de</strong>s fonctions (II).I. L’interventionLa physionomie <strong>de</strong> l’intervention<strong>de</strong>meure quasiment inchangée<strong>de</strong>puis 1999, en dépit <strong>de</strong> quelquesréformes enregistrées ici ou là :l’implication publique n’est pas enrecul, elle est permanente; les mo<strong>de</strong>s<strong>de</strong> gestion n’ont pas non plusété bouleversés, ils connaissent unecertaine continuité.1. La permanence <strong>de</strong>l’implication publiqueLes écrits <strong>de</strong>s spécialistes du logement<strong>de</strong>s années 1980 et 1990,lesquels prédisaient la fin <strong>de</strong> ce pan<strong>de</strong> l’action publique, étaient vraisemblablementtrop alarmistes. Eneffet, les années 1999-2009 sontcaractérisées par une permanencepublique dans le domaine du logementsocial. Cette permanence<strong>de</strong>meure légitimée par l’importance<strong>de</strong> ce secteur au niveau économique,social, voire familial. En France,<strong>de</strong>s statistiques préoccupantes sesuccè<strong>de</strong>nt à un rythme régulier 1 . Demême, le logement social apparaîtrégulièrement dans la plupart <strong>de</strong>sdiscours politiques, pour toute sorte<strong>de</strong> scrutin (par exemple, les électionsrégionales alors que la régionne détient que peu <strong>de</strong> compétenceen matière <strong>de</strong> logement en France),tous bords confondus, comme unepriorité. Le récent Rapport <strong>de</strong> laCommission pour la libéralisation<strong>de</strong> la croissance française, dit « RapportAttali », a préconisé en 20081 L’Institut national <strong>de</strong> la statistique et <strong>de</strong>sétu<strong>de</strong>s économiques (INSEE) estimait il y apeu qu’il faudrait bâtir 320.000 logementssupplémentaires par an pour résorber la criseactuelle.15


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009l’accroissement <strong>de</strong> l’offre et <strong>de</strong> laqualité du logement social (commeAmbition n° 2 !). La <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>l’ensemble <strong>de</strong>s électeurs européensest assez forte en matière d’habitatsocial, mais aussi <strong>de</strong> cadre <strong>de</strong> vie, <strong>de</strong>gestion urbaine, d’environnementet <strong>de</strong> sécurité. Pour ces raisons, lespouvoirs publics ont compris qu’ils<strong>de</strong>vaient maintenir leur capacitéd’intervention dans ce domaine,situé au carrefour <strong>de</strong> ces politiquespubliques.En témoigne tout d’abord une juridisationcroissante du logement socialeuropéen. En France, nul douteque le droit du logement social,apparu à la faveur <strong>de</strong>s premièresgran<strong>de</strong>s lois votées sous l’ère Mitterrand2 , tend à <strong>de</strong>venir une branchejuridique à part entière, situéeentre le droit <strong>de</strong> l’action sociale etcelui <strong>de</strong> la construction et <strong>de</strong> l’urbanisme.Nombre d’éléments propresau mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s HLM ont été saisispar le droit ces <strong>de</strong>rnières années 3 .En Belgique, la fin <strong>de</strong>s années 1990a également constitué le moment<strong>de</strong> la codification du droit du logement: adoption en 1997 et 1998<strong>de</strong>s co<strong>de</strong>s wallon et flamand du logement4 . De plus, le droit au logement,connu <strong>de</strong>s Belges et <strong>de</strong>s Français<strong>de</strong>puis les décennies précé<strong>de</strong>ntes,s’est affermi ailleurs en Europe,tant par <strong>de</strong> nouvelles proclamations2 Loi n° 82-526 du 22 juin 1982 « relative auxdroits et obligations <strong>de</strong>s locataires et <strong>de</strong>sbailleurs », dite « Quilliot » ; loi n° 89-462 du6 juillet 1989 « tendant à améliorer les rapportslocatifs », dite « Mermaz ».3 Ainsi, le traditionnel métier <strong>de</strong> gardien est<strong>de</strong>venu un cadre d’emploi <strong>de</strong> la fonction publique,suite à la publication <strong>de</strong>s décrets n°99-391 du 19 mai 1999 « portant statut particulierdu cadre d’emplois <strong>de</strong>s gardiens territoriauxd’immeuble » et celui n° 99-394 du19 mai 1999 « fixant les conditions d’accèset les modalités d’organisation <strong>de</strong>s concourspour le recrutement <strong>de</strong>s gardiens territoriauxd’immeuble ».4 Co<strong>de</strong> flamand du logement adopté par décretle 15 juillet 1997 ; Co<strong>de</strong> wallon du logementen date du 29 octobre 1998.constitutionnelles à l’Est, à l’Ouestet au Nord, que par l’adoption <strong>de</strong>nouveaux textes législatifs. Citonsl’article 19, alinéa 4 <strong>de</strong> la Constitutionfinlandaise du 1 er mars 2000, etles articles 41, alinéa 1 er , 108 et 109<strong>de</strong> la Constitution <strong>de</strong> la Confédérationhelvétique, telle que révisée le18 avril 1999. En Belgique, le décretdu 20 juillet 2005 « modifiant leCo<strong>de</strong> wallon du logement » est sanséquivoque sur ce point, puisque l’article2 §1 er dudit co<strong>de</strong> dispose : « La<strong>Région</strong> et les autres autorités publiques,chacune dans le cadre <strong>de</strong> leurscompétences, mettent en œuvre ledroit à un logement décent en tantque lieu <strong>de</strong> vie, d’émancipation etd’épanouissement <strong>de</strong>s individus et<strong>de</strong>s familles ».Par suite, la capacité d’impulsion<strong>de</strong>s pouvoirs publics, en premierlieu l’État, <strong>de</strong>meure importante.Cette implication est tout d’abord,et bien entendu, financière. A cetitre, et sans trop rentrer dans lesdétails, nombre <strong>de</strong> nouveaux programmesse sont succédé un peupartout au long <strong>de</strong> la décennie 5 . Cemaintien <strong>de</strong> l’implication financière<strong>de</strong>s États est également observé àl’Est du Continent 6 .5 En Espagne, un nouveau plan <strong>de</strong> logement aété adopté en 1999 : il maintient le dispositiffinancier <strong>de</strong>s plans précé<strong>de</strong>nts en y ajoutant<strong>de</strong> nouvelles formes d’assistance pour certainsgroupes cibles (personnes <strong>de</strong> moins <strong>de</strong>trente ans, handicapés, etc…). Au Danemarkla même année, 96 millions <strong>de</strong> couronnesont été consacrés aux politiques urbaines et585 à la lutte contre l’exclusion à compter <strong>de</strong>1999. De même en Islan<strong>de</strong>, un nouveau fondsa été institué en janvier 1999 afin <strong>de</strong> financerles prêts au logement. En Finlan<strong>de</strong>, toujoursla même année, le nouveau Gouvernementsocial-démocrate <strong>de</strong> Paavo Lipponen a comportéun ensemble <strong>de</strong> mesures en matière <strong>de</strong>logement social. Ce texte recomman<strong>de</strong> unestabilité, une fonctionnalité du Marché duLogement ainsi que la fourniture d’un logementpour chaque citoyen ; les prêts publicsau logement (« Arava ») ainsi que les prêts àintérêt, vont être augmentés.6 En Slovénie, un Programme national du logementa ainsi prévu la réalisation avant 2010<strong>de</strong> 10.000 nouvelles habitations, dont uneL’implication <strong>de</strong> l’État dans le domaine<strong>de</strong> l’habitat social peut égalementse traduire par <strong>de</strong>s mesures<strong>de</strong> coercition, parfois en direction<strong>de</strong>s collectivités locales. A ce titre,l’article 55 <strong>de</strong> la loi n° 2000-1208du 13 décembre 2000 « relative àla solidarité et au renouvellementurbains » est plus qu’emblématiquedu fait qu’en France, l’État <strong>de</strong>meurele garant <strong>de</strong> la mise en œuvre <strong>de</strong> lapolitique sociale <strong>de</strong> l’habitat. Leditarticle permet au préfet <strong>de</strong> sanctionnerfinancièrement les communesd’une certaine taille qui nepossè<strong>de</strong>nt pas sur leur territoire aumoins 20 % <strong>de</strong> logements considéréscomme sociaux. Les débatsrelatifs à cette mesure d’urbanismeélaborée par le Gouvernement <strong>de</strong>Lionel Jospin ont été, et sont encore,d’une véhémence assez inhabituelleen la matière, nombre d’éluslocaux ne voulant pas payer en cas<strong>de</strong> défaillance, et a fait resurgir uncertain clivage entre conceptions<strong>de</strong>xtristes et sinistristes <strong>de</strong> la politiquesociale du logement. L’actuelGouvernement <strong>de</strong> François Fillonn’a pas envisagé la suppression <strong>de</strong>ce dispositif.2. La continuité <strong>de</strong>smo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> gestionAprès <strong>de</strong>ux décennies d’intensesmutations, symbolisées un peu partoutpar la décentralisation <strong>de</strong> la politiquedu logement social ainsi quepar une mise au pas <strong>de</strong>s organismesgestionnaires (cas britannique,mais aussi néerlandais et italien), lesannées 1999-2009 marquent unecontinuité dans les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> gestion.En effet, peu <strong>de</strong> changementspartie doit être affectée au secteur locatifsocial ; <strong>de</strong> même, la Bulgarie s’est dotée en2004 d’un plan triennal pour soutenir sanouvelle politique du logement en vue <strong>de</strong>tenter d’enrayer la détérioration du parc existantet <strong>de</strong> stimuler la création <strong>de</strong> nouveauxlogements.16


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009notables dans ce domaine sont àsignaler.En France, ladite pério<strong>de</strong> a notammentmarqué l’émergence d’uncinquième niveau <strong>de</strong> responsabilitéen matière d’habitat (après l’État, la<strong>Région</strong>, le Département et la Commune): celui <strong>de</strong> l’intercommunalité.La loi n° 99-533 du 25 juin 1999d’orientation pour l’aménagementet le développement durable du territoire(dite « loi Voynet ») et portantmodification <strong>de</strong> la loi n° 95-115 du4 février 1995 « d’orientation pourl’aménagement et le développementdu territoire », consacre le rôle<strong>de</strong>s établissements publics <strong>de</strong> coopérationintercommunale (EPCI) enmatière <strong>de</strong> politique locale <strong>de</strong> l’habitatet s’appuie sur la notion nouvelle<strong>de</strong> « bassin d’habitat ». Ils peuventêtre la collectivité-mère d’unorganisme public d’HLM (commepar exemple à Argenteuil-Bezons,en Île-<strong>de</strong>-France).Un instrument tend également à segénéraliser : le contrat. En effet, lesconventions <strong>de</strong> coopération entrepersonnes publiques, mais aussi entrepersonnes publiques et privéesse sont multipliées au cours <strong>de</strong> ladécennie passée. Cette tendanceest notamment illustrée en Walloniepar l’institution en 2005 <strong>de</strong> contratsd’objectifs <strong>de</strong> cinq ans entre la Sociétéwallonne du logement (SWL)et les sociétés <strong>de</strong> logement <strong>de</strong> servicepublic (SLSP) 7 . En Finlan<strong>de</strong> également,le Plan <strong>de</strong> 1999 précité prévoitpour son exécution la coopérationentre l’État et les municipalités parle biais <strong>de</strong> contrats. La contractualisation<strong>de</strong>s objectifs et <strong>de</strong>s moyensest, à n’en point douter, promise àun avenir encourageant dans la plupart<strong>de</strong>s politiques publiques européennes.En France, cette évolutionn’a pas échappé à l’œil <strong>de</strong> la CommissionAttali, laquelle a préconisé7 Article 162 (Section 2bis) du Co<strong>de</strong> wallon dulogement.la fixation <strong>de</strong> contrats d’objectifset d’évaluation opposables aux organismesd’HLM 8 : un dispositif estactuellement examiné par l’Assembléenationale, dans le cadre <strong>de</strong> laloi « Boutin » dont le projet a étéadopté le 19 février 2009 par le Parlementet votée le 25 mars 2009.Peu <strong>de</strong> changements récents, comparables<strong>de</strong> par leur ampleur à ceuxobservés dans les années 1980,sont à signaler en matière <strong>de</strong> statuts<strong>de</strong>s opérateurs. D’ailleurs, les ratioentre organismes <strong>de</strong> droit public et<strong>de</strong> droit privé à but non lucratif sontsensiblement les mêmes qu’il y adix ans. Nulle politique massive <strong>de</strong>privatisation ou <strong>de</strong> renationalisationn’est non plus constatée sur le continent.Quelques changements <strong>de</strong>statuts sont toutefois à signaler. EnBelgique, l’arrêté du Gouvernement<strong>de</strong> la <strong>Région</strong> wallonne du 17 janvier2002 « portant approbation <strong>de</strong>s statutsmodifiés <strong>de</strong> la Société wallonnedu Logement et fixant son capitalminimum » est venu procé<strong>de</strong>r àcertaines réformes <strong>de</strong> l’organisationet <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> la structure <strong>de</strong>gestion du logement social wallon.En France, la décennie passée auraété marquée par la suppression <strong>de</strong>soffices publics d’HLM (OPHLM),établissements publics à caractèreadministratif institués par la loiBonnevay du 23 décembre 1912, etleur fusion avec les offices publicsd’aménagement et <strong>de</strong> construction(OPAC) afin <strong>de</strong> constituer la catégorienouvelle <strong>de</strong>s offices publics <strong>de</strong>l’habitat (OPH), établissements publicsà caractère industriel et commercialétablis par l’ordonnance n°2007-137 du 1 er février 2007 « relativeaux offices publics <strong>de</strong> l’habitat ».Cette fusion était <strong>de</strong>venue inéluctablepuisqu’un nombre conséquentd’OPHLM s’était mué en OPAC aufil <strong>de</strong>s ans. La nature d’EPIC (Etablissementpublic à caractère industrielet commercial) propre aux OPAC8 Décisions 287, 288, 291 et 292.et aux nouveaux OPH permet <strong>de</strong>« <strong>de</strong>sserrer » les contraintes et rigiditéscaractéristiques <strong>de</strong>s OPHLM :leur originalité rési<strong>de</strong> en un empruntaux techniques commerciales(comptabilité privée, statut mixte<strong>de</strong>s agents, possibilité <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>sfiliales, <strong>de</strong> détenir <strong>de</strong>s parts <strong>de</strong> sociétés<strong>de</strong> droit commercial, etc…) 9 .On signalera également la disparitiondu sigle traditionnel « Sociétéanonyme HLM » (SAHLM) au profit<strong>de</strong> celui d’« Entreprise sociale pourl’habitat » (ESH). De même, l’Unionnationale <strong>de</strong>s fédérations d’organismesHLM (UNFOHLM) a été rebaptisée« Union sociale pour l’habitat» en octobre 2002. Au Portugalenfin, le décret-loi 502/99 du 19novembre 1999 est venu réformerpartiellement le statut juridique <strong>de</strong>scoopératives d’habitation, le principaloutil <strong>de</strong> la politique du logementlà-bas.Par ailleurs, les années récentesn’ont guère remis en cause l’équilibreentre logement social locatif etaccession à la propriété, une domination<strong>de</strong> la propriété privée étaità ce titre évoquée (et crainte) par<strong>de</strong> nombreux auteurs <strong>de</strong>s années1980. De nouvelles politiques onttoutefois été adoptées dans ce domaine.On signalera, pour ce qui estdu cas français, les « maisons à centmille euros » instituées en 2005 parJean-Louis Borloo alors ministre <strong>de</strong>l’Emploi, <strong>de</strong> la Cohésion sociale etdu Logement 10 . Les années 1999-9 Y. Jegouzo (Dir .), L’émergence d’une mission<strong>de</strong> service public local <strong>de</strong> l’habitat , Etu<strong>de</strong>spour l’habitat, 1995, p. 77.10 Ce dispositif est <strong>de</strong>stiné aux ménages les plusmo<strong>de</strong>stes, afin <strong>de</strong> leur permettre <strong>de</strong> <strong>de</strong>venirpropriétaires d’un pavillon qui respecte certainesnormes <strong>de</strong> qualité. Les foyers désirantbénéficier d’une « maison à cent mille euros »doivent respecter <strong>de</strong>s critères <strong>de</strong> revenus,plafonnés selon la localisation <strong>de</strong> la maisonet la composition <strong>de</strong> la famille (les critèresd’accession sont fixés par les municipalités),un choix pouvant être effectué entre troisrégimes <strong>de</strong> financement. Il semblerait néanmoinsque cette innovation n’ait pas encoreconnu d’engouement populaire.17


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 20092009 n’ont pas été marquées par<strong>de</strong>s politiques <strong>de</strong> privatisation duparc locatif social sur le modèle <strong>de</strong>la loi thatchérienne sur le Logement<strong>de</strong> 1980. On constatera simplement,toujours en ce qui concernele cas français, traditionnellementréfractaire à ce genre <strong>de</strong> mesures,que la loi n° 2006-872 du 13 juillet2006 « portant engagement nationalpour le logement », dite « ENL »,prévoit la possibilité <strong>de</strong> vendre leslogements sociaux avec une décotepouvant aller jusqu’à 35 % <strong>de</strong> la valeurdu logement telle que déterminéepar le Service <strong>de</strong>s domaines : <strong>de</strong>même, le Rapport Attali préconiseune politique <strong>de</strong> vente <strong>de</strong>s logementsHLM à leurs occupants 11 .Le logement social <strong>de</strong>s années1999-2009 <strong>de</strong>meure au centre <strong>de</strong>sinterventions menées dans le cadre<strong>de</strong>s politiques <strong>de</strong> la ville, apparuesà la fin <strong>de</strong>s années 1980 dans <strong>de</strong>nombreux pays d’Europe. Il continued’en constituer l’objet privilégiéainsi que l’acteur principal.En Belgique, en <strong>Région</strong> wallonneparticulièrement, <strong>de</strong> nouveaux Programmespluriannuels <strong>de</strong> rénovation<strong>de</strong>s logements sociaux wallonssont signés en 1999. En France, leterme « renouvellement urbain » estapparu ces <strong>de</strong>rnières années dansles discours et les textes afin <strong>de</strong> lesdésigner. Ces nouvelles politiquesurbaines se caractérisent par l’implication<strong>de</strong>s bailleurs sociaux maisaussi <strong>de</strong>s habitants eux-mêmes.L’émergence <strong>de</strong>s politiques <strong>de</strong> rénovationurbaine s’inscrit, en tous cas,dans une approche nouvelle <strong>de</strong> laquestion <strong>de</strong>s villes. L’adaptation <strong>de</strong>smo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> gestion fait ainsi émergerune « nouvelle culture urbaine » 12dans les pays d’Europe occi<strong>de</strong>ntale<strong>de</strong>puis plus d’une vingtaine d’an-11 Décisions 184 et 185.12 F. Tomas, « Projets urbains et projets <strong>de</strong> ville :la nouvelle culture urbaine a vingt ans », Lesannales <strong>de</strong> la Recherche Urbaine, n° 68-69,1995, p. 134.nées. On notera, pour finir, que certainesévolutions <strong>de</strong>s nouvelles politiquesurbaines dépassent les cadresnationaux : en témoigne l’adoption,le 3 juillet 2000, d’une charte franco-alleman<strong>de</strong>sur les politiques <strong>de</strong>la ville.II. Les fonctionsUne tendance observée à compter<strong>de</strong> la fin <strong>de</strong>s années 1980 s’est poursuivie: les fonctions <strong>de</strong>s opérateurssont <strong>de</strong> plus en plus caractériséespar un élargissement <strong>de</strong>s publics visés(1), ainsi que par une diversification<strong>de</strong>s missions assignées (2).1. L’élargissement<strong>de</strong>s publics visésLes années 1999-2009 ont en troisièmechef confirmé une tendancelour<strong>de</strong> amorcée au cours <strong>de</strong> la décennieprécé<strong>de</strong>nte : le logementsocial ne s’adresse plus uniquementaux ménages mo<strong>de</strong>stes européens,mais à tout un ensemble <strong>de</strong> publicsjuridiquement ciblés. Cette tendanceest presque partout perceptible,y compris à l’Est du Continent : lapolitique slovaque du logement,par exemple, s’effectue sous formed’ai<strong>de</strong>s octroyées <strong>de</strong> manière sélectiveafin <strong>de</strong> favoriser la construction<strong>de</strong> logements accessibles à <strong>de</strong>s ménagesqui relèvent <strong>de</strong> différentescatégories <strong>de</strong> revenus 13 .La pério<strong>de</strong> récente a tout d’abordconfirmé l’émergence d’une politiquedu logement « très social » 14 unpeu partout en Europe. En Gran<strong>de</strong>-Bretagne, par exemple, le réajustement<strong>de</strong> la politique sociale du lo-13 C. Van Vaerenbergh, « Aperçu du logementsocial en Europe centrale et <strong>de</strong> l’Est », <strong>SLRB</strong>-<strong>Info</strong>, n° 46, avril-mai-juin 2006. p. 19.14 Voir : R. Ballain, E. Maurel, préface <strong>de</strong> L.Besson, Le logement très social : extensionou fragilisation du droit au logement ?,L’Aube recherches, collection Société et territoire,Paris, 2002, 221 p.gement, entrepris par ses prédécesseursconservateurs, semble avoirété ralenti par le Gouvernement<strong>de</strong> Tony Blair : ce changement estdû aux réflexions qui insistent surl’existence d’une classe d’exclus caractériséepar la forte présence <strong>de</strong>mères adolescentes célibataires, <strong>de</strong>chômeurs <strong>de</strong> longue durée ou <strong>de</strong>rési<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> cités où règne la criminalité15 . Une <strong>de</strong>s premières mesuresdu Gouvernement désigné le 1 ermai 1997 fut d’ailleurs <strong>de</strong> mettre enplace une Unité sociale d’exclusion,« Social Exclusion Unit » (SEU), ausein du cabinet du Premier ministre,et supervisée par ses soins.Les années 1999-2000 ont aussi étécelles <strong>de</strong> la consécration du principe<strong>de</strong> non-discrimination, notammentethnique, à l’accès au logementsocial. La lutte contre les discriminationsest en premier lieu priseen compte Ex lege. Par le droit. Leprincipe <strong>de</strong> prohibition <strong>de</strong>s comportementsdiscriminatoires s’est en effetaffermi dans nombre <strong>de</strong> corpusconstitutionnels, <strong>de</strong> législations et<strong>de</strong> réglementations <strong>de</strong>puis une quarantained’années. Deux groupes <strong>de</strong>pays sont i<strong>de</strong>ntifiables en Europe :ceux qui ont pris en compte <strong>de</strong>manière précoce la question <strong>de</strong> lalutte contre les discriminations, notammentdans l’habitat social (années1970) et qui ont élaboré uneauthentique politique publique enla matière (Gran<strong>de</strong>-Bretagne, Paysbas,Suè<strong>de</strong>) ; ceux qui se contententd’une simple proclamation constitutionnelleainsi que, le cas échéant, <strong>de</strong>textes législatifs visant à combattrele racisme et la xénophobie (Allemagne,Belgique, Espagne), la question<strong>de</strong> l’égal accès au logement socialn’y est pas traitée spécifiquement.La prise en compte <strong>de</strong> la discriminationest en second lieu d’ordreinstitutionnel. Presque partout en15 H. Fawcett, « La re-constitution <strong>de</strong> l’État-Provi<strong>de</strong>nce », Pouvoirs, n° 93, 2000, p. 94.18


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009Europe, <strong>de</strong>s structures chargées <strong>de</strong>la surveillance et <strong>de</strong> la répréhension<strong>de</strong>s actes <strong>de</strong> xénophobie et <strong>de</strong> racismeont été mises en place par lespouvoirs publics. Lesdites structuressont toutes récentes 16 . Enfin, l’initiative<strong>de</strong>s gestionnaires constituele troisième moteur <strong>de</strong> la prise encompte <strong>de</strong> la lutte contre les discriminationsen matière <strong>de</strong> logementsocial européen. Des services adéquatssont proposés aux locatairesissus <strong>de</strong>s minorités. Les agents sontdésormais confrontés à <strong>de</strong>s cultureset <strong>de</strong>s pratiques qu’ils ne connaissaientpas, ou peu, auparavant 17 .Des médiateurs sont embauchés unpeu partout. Des structures ad hocsont parfois créées : le spécialistedu logement social allemand, ClausHachmann, évoque, à ce titre,l’exemple <strong>de</strong> la coopérative Ludwig-Frank,instituée par ses habitantsissus <strong>de</strong> l’immigration turqueen vue <strong>de</strong> réhabiliter <strong>de</strong>ux quartiersdégradés <strong>de</strong> Mannheim 18 . On remarqueraque le logement <strong>de</strong>s personneshandicapées fait aussi l’objetd’une attention particulière unpeu partout, au Nord évi<strong>de</strong>mment16 Citons le Bureau national contre le racisme(« Lan<strong>de</strong>lijk Bureau Racismebestrijdiging »(LBR) aux Pays-Bas, fruit <strong>de</strong> la fusion réaliséeen 1999 entre plusieurs structures préexistantes,la Haute autorité <strong>de</strong> lutte contre lesdiscriminations et pour l’égalité (HALDE),instituée en France par la loi n° 2004-1486du 30 décembre 2004 « portant création <strong>de</strong>la haute autorité <strong>de</strong> lutte contre les discriminationset pour l’égalité », ou la Commissionpour l’égalité et les droits <strong>de</strong> l’homme(« Commission for Equality and HumanRights » (CEHR), mise en place au 1 er octobre2007 en Gran<strong>de</strong>-Bretagne.17 Voir par exemple : I. <strong>de</strong> Viron, « Mudawana etdroit belge : implications légales en Belgiquedu nouveau co<strong>de</strong> marocain <strong>de</strong> la famille »,<strong>SLRB</strong>-<strong>Info</strong>, n° 46, avril-mai-juin 2006, pp.39-41.18 Voir C. Hachmann, « Housing Co-operativeLudwig-Frank, Mannheim » in F. W. Boal(Ed.), Ethnicity and Housing : accommodatingdifferences, Ashgate, Research in Migrationand Ethnic Relations Series, Al<strong>de</strong>rshot, 2000,pp. 233-236.(Plan finlandais <strong>de</strong> 1999), mais aussià l’Ouest du Continent.La pério<strong>de</strong> étudiée symbolise enfin,et <strong>de</strong> façon certes quelque peucontradictoire avec les <strong>de</strong>ux phénomènesprécé<strong>de</strong>nts, la multiplication<strong>de</strong>s mesures prises en direction <strong>de</strong>sclasses moyennes. Cette tendanceest principalement illustrée par uneprise en compte croissante <strong>de</strong> laquestion du logement <strong>de</strong>s « professions-clés» : <strong>de</strong>s agents <strong>de</strong> police,<strong>de</strong>s infirmières, <strong>de</strong>s instituteurs et<strong>de</strong>s pompiers 19 .Cet élargissement <strong>de</strong>s publics visésne manque pas <strong>de</strong> poser interrogation.En ce qui concerne la <strong>Région</strong><strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>, l’économisteAlain De Becker soulignait en 1999une « absence <strong>de</strong> définition claire(et politique) quant aux objectifs dulogement social. Est-ce réservé auxplus démunis ou, afin d’éviter <strong>de</strong>sghettos, doit-on accepter une mixité<strong>de</strong> revenus ? » 20 . Nous pensonspour notre part qu’une partie <strong>de</strong> laréponse rési<strong>de</strong>, un peu partout, nonpas dans les textes mais dans l’ingéniosité<strong>de</strong>s gestionnaires locaux etla bonne connaissance <strong>de</strong> la compositionhumaine <strong>de</strong> leur parc.19 En Gran<strong>de</strong>-Bretagne, tout un ensembled’initiatives a pris place dans la relance <strong>de</strong> lapolitique d’accession à la propriété. Depuisle 1 er avril 2006, un programme d’achat dulogement (« HomeBuy Scheme ») regroupel’ensemble <strong>de</strong>s procédures relatives à l’accessionà la propriété : achat du logement socialpar les locataires du logement social ; ai<strong>de</strong> aulogement <strong>de</strong>s « professions-clés » (« KeyWorkers ») ; ai<strong>de</strong>s à l’acquisition du premierlogement.20 A. De Becker, « Questions quant à l’avenirdu logement social en <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> » in Ouvrage collectif publié sous ladirection <strong>de</strong> l’ASBL Loi et Société, « Logementsocial : un état <strong>de</strong>s lieux pour <strong>de</strong>main », LaCharte, Collection Loi et Société, <strong>Bruxelles</strong>,1999, p. 50.2. La diversifi cation <strong>de</strong>smissions assignéesEn <strong>de</strong>rnier lieu, la décennie passéea été marquée par la poursuite duphénomène <strong>de</strong> diversification <strong>de</strong>smissions assignées aux opérateurs<strong>de</strong> logement social en Europe. Lesbailleurs sociaux européens ten<strong>de</strong>nten effet <strong>de</strong>puis vingt ans à élargirleurs fonctions initiales en dépassantla simple fonction <strong>de</strong> logeur.De nouvelles missions sociales, <strong>de</strong>nature autre que locative, sont désormaisprises en considération.Cette diversification croissanteconcerne notamment les sociétésimmobilières <strong>de</strong> service public (SISP)en <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> :elle s’est accompagnée d’une responsabilisationcroissante <strong>de</strong>sditsbailleurs 21 . Deux fonctions nouvellesretiennent notamment l’attention :l’insertion par l’économique (aprèsla France, la Belgique est le secondpays à adopter le terme « Régie <strong>de</strong>quartier » ) et ensuite l’informationet la communication : rendre le parcplus attrayant, mais aussi plus accessible.Attrayant, c’est-à-dire apteà toucher le plus grand nombre <strong>de</strong>ménages. Accessible, c’est-à-direfaciliter le parcours administratif etjuridique (voire juridictionnel) <strong>de</strong>scandidats-locataires et <strong>de</strong>s locatairesau moment <strong>de</strong> l’attributionainsi que tout au long <strong>de</strong> la relationlocative. Cette préoccupationnouvelle est, sur la pério<strong>de</strong> récente,clairement imposée par un §3 quicomplète l’article 2 du Co<strong>de</strong> wallondu logement. La publication <strong>de</strong> cetexte a notamment eu pour effetla mise en place <strong>de</strong> dispositifs d’information(info-conseil logements,brochures, site Internet, etc…) 22 .21 B. Lahousse, « Notes sur une responsabilisationcroissante <strong>de</strong>s SISP, questions <strong>de</strong> « risques» et <strong>de</strong> « fautes »», <strong>SLRB</strong>-<strong>Info</strong>, n° 46,avril-mai-juin 2006, p. 30.22 S. Fontaine, « Le décret du 20 juillet 2005modifiant le Co<strong>de</strong> wallon du logement »,<strong>SLRB</strong>-<strong>Info</strong>, n° 46, avril-mai-juin 2006, p. 35.19


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009Les années 1999-2009 ont égalementmontré l’importance <strong>de</strong>s politiques<strong>de</strong> sécurisation du parc socialet <strong>de</strong> ses habitants. En effet, directementfragilisés dans leur gestionpar l’émergence <strong>de</strong> phénomènes<strong>de</strong> dégradation ou <strong>de</strong> vacance, sanscesse confrontés aux <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong>slocataires et à l’évolution du cadrelégislatif, les organismes sont désormaisimpliqués dans la gestion<strong>de</strong> la sécurité à l’échelon local 23 . Lesmoyens d’action dont les bailleurset leurs partenaires disposent s’avèrentmultiples : aménagement dubâti, présence humaine, partenariatavec les forces <strong>de</strong> l’ordre, avec leshabitants, etc…Par ailleurs, le « paradigme urbain »en déclin <strong>de</strong>puis quarante ans, a définitivementcédé la place à celui du« cadre <strong>de</strong> vie » 24 . Les conceptions<strong>de</strong> la Charte d’Athènes appartiennentà l’histoire du logement social.La concrétisation <strong>de</strong> cette notion,apparue au cours <strong>de</strong>s annéesseptante, peut être symbolisée enBelgique par l’idée d’« épanouissement» <strong>de</strong>s individus et <strong>de</strong>s familles,mentionnée à l’article 2 duCo<strong>de</strong> wallon du Logement cité plushaut. Cette notion <strong>de</strong> cadre <strong>de</strong> vieest ainsi prise en compte à traverscelle <strong>de</strong> développement urbain durablequi s’est affirmée au cours <strong>de</strong>la décennie passée : adoption, enFrance, du label « Haute qualité environnementale» (HQE) par le « Plannational habitat-construction et dé-23 Certes, ce phénomène ne concerne pasl’ensemble <strong>de</strong>s pays d’Europe : il nous semblepar exemple que le parc social belge estrelativement épargné par ces évolutions. Ilen est <strong>de</strong> même dans l’ensemble <strong>de</strong>s paysnordiques. A contrario, en France, les émeuteslyonnaises <strong>de</strong> 1990 avaient symbolisé laprise en compte <strong>de</strong> ce problème au niveaunational par le mouvement HLM.24 Voir F. d’Arcy, Y. Prats, « Les politiques ducadre <strong>de</strong> vie » in M. Grawitz, J. Leca, présentation<strong>de</strong> J. C. Thoenig, Traité <strong>de</strong> sciencepolitique. Volume n° 4 : les politiques publiques,Presses Universitaires <strong>de</strong> France, Paris,août 1985, pp. 261-299.veloppement durable » présenté enjanvier 2002 par le secrétaire d’Étatau logement. Le concept belge <strong>de</strong>1 % artistique (appelé aujourd’huile 101 e %), c’est-à-dire l’investissementen région bruxelloise <strong>de</strong> près<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux millions d’euros du budgetdu programme quadriennal d’investissementdu logement social 25 ,illustre cette volonté.Enfin, cet élargissement <strong>de</strong>s missionss’est accompagné par la transversalité<strong>de</strong>s politiques menées : lapolitique publique du logementsocial n’est plus pensée et menéeisolément <strong>de</strong>s autres. Nous avonsvu plus haut que les politiques <strong>de</strong> laville et la gouvernance urbaine ontpréfiguré cette tendance au niveaulocal, en France mais aussi ailleurs(en Gran<strong>de</strong>-Bretagne principalement).La transversalité constituaitd’ailleurs un <strong>de</strong>s credo <strong>de</strong> TonyBlair lors <strong>de</strong> son accession au 10Downing Street en 1997 26 . Outre-Quiévrain, cette idée <strong>de</strong> transversalité<strong>de</strong>s politiques sociales a étéincarnée lors du <strong>de</strong>uxième mandatprési<strong>de</strong>ntiel <strong>de</strong> Jacques Chirac parJean-Louis Borloo, le député-maire<strong>de</strong> Valenciennes, promu super ministreen charge simultanément <strong>de</strong>l’Emploi, <strong>de</strong> la Cohésion sociale etdu Logement <strong>de</strong> juin 2005 à mai2007. Au Danemark, le Livre Bleu<strong>de</strong> 1999 relatif au développementurbain durable fait écho à cetteévolution 27 . L’apparition <strong>de</strong> politiquestransversales (c’est-à-dire traitant<strong>de</strong> questions relevant <strong>de</strong> structuresdifférentes comme le social,l’urbanisme, l’éducation, la sécurité25 B. Massart, « Le 1 % artistique : bien plusque <strong>de</strong> la couleur dans le quotidien », <strong>SLRB</strong>-<strong>Info</strong>, n° 46, avril-mai-juin 2006, p. 58.26 D. Hugues, S. Lowe, 2000, C “Public SectorHousing Law” (3 rd ed.), Butterworths, p. 51.27 Il énonce que la politique du logement doitêtre considérée comme inscrite au sein <strong>de</strong>squestions urbaines, les problèmes <strong>de</strong> l’intégrationsociale <strong>de</strong>s plus démunis ainsi que<strong>de</strong>s immigrés font l’objet d’une attentionaccrue.ou encore les transports), ainsi quel’accentuation <strong>de</strong> la décentralisation,le rôle nouveau <strong>de</strong>s pouvoirspublics, du secteur privé et <strong>de</strong>shabitants ont, en conclusion, faitémerger l’idée d’une « gouvernanceurbaine » (« Urban governance ») ou<strong>de</strong> « gouvernement urbain » dans<strong>de</strong> nombreux pays d’Europe, situéspour la plupart au Nord-ouest ducontinent.En conclusion, si le logement socialn’a guère connu <strong>de</strong> changementmajeur <strong>de</strong>puis 1999, on observecertaines mutations dans les fonctions: un élargissement <strong>de</strong>s publicsvisés ainsi qu’une diversification <strong>de</strong>smissions assignées. Le rôle <strong>de</strong>s personnespubliques, en premier chef,l’État, est donc <strong>de</strong>meuré centraltout au long <strong>de</strong>s dix <strong>de</strong>rnières années.Elles doivent néanmoins faireface à un ensemble <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>svariées et parfois contradictoires.En effet, l’intervention publiquesemble <strong>de</strong> plus partagée entre <strong>de</strong>sobjectifs et <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s opératoiresdivers et quelquefois opposés :quant aux fins, elle doit à présentconcilier rentabilité et accueil <strong>de</strong>spopulations vulnérables ; quant auxmo<strong>de</strong>s opératoires, elle oscille entrerenforcement du soutien étatiqueet décentralisation, gestion publiqueet délégation au secteur privé.La divergence <strong>de</strong>s cadres d’interventionset <strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong>meureencore dominante en Europe, laconvergence se profile néanmoinsdoucement. Ladite convergence,apparue à compter <strong>de</strong> la fin <strong>de</strong>sannées 1970, à la suite <strong>de</strong>s premiersefforts <strong>de</strong> réajustement <strong>de</strong>sÉtats-provi<strong>de</strong>nce, est largementtributaire <strong>de</strong>s avancées communautairesdans le domaine du logement.Or, la pério<strong>de</strong> 1999-2009 n’aaucunement été marquée par uneprise en compte communautaire<strong>de</strong> l’habitat social, hormis la consécrationpour le moins houleuse (enraison <strong>de</strong> divergences entre latins20


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009et anglo-saxons) 28 <strong>de</strong> l’article 34 <strong>de</strong>la controversée Charte européenne<strong>de</strong>s droits fondamentaux <strong>de</strong> l’Unioneuropéenne 29 , lors du Conseil européen<strong>de</strong> Nice en décembre 2000.Force est <strong>de</strong> constater, en tout état<strong>de</strong> cause, que la pério<strong>de</strong> récente aété marquée par la fragilisation <strong>de</strong>l’intégration communautaire (référendumsfrançais et néerlandais<strong>de</strong> 2005, référendum irlandais <strong>de</strong>2008), entretenant un certain flouquant à ses finalités. Peu <strong>de</strong> textessignificatifs ont été adoptés, hormispeut-être ceux intéressant le droitcommunautaire <strong>de</strong> la concurrence,celui <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s marchés publics,lesquels semblent a contrarioconstituer une menace potentiellequant à la pérennité <strong>de</strong> l’interventionpublique dans le domaine dulogement social.Romain GRAËFFLY,Docteur en droitAvocat au barreau <strong>de</strong> Paris99, boulevard Beaumarchais75003 PARIS Francegraeffly@neuf.frDernier ouvrage paru :Logement social et politique<strong>de</strong> non-discrimination enEurope, L’Harmattan, collectionQuestions contemporaines,Paris, février 2008, 221 p.28 Voir G. Braibant, « La Charte européenne<strong>de</strong>s droits fondamentaux et le droit au logement» in Les Cahiers du GRIDAUH, n° 5, sérieDroit <strong>de</strong> l’habitat, L’Europe et l’habitat social :colloque Paris 5 et 6 décembre 2000 organisépar la Fédération nationale <strong>de</strong>s Officesd’HLM sous le patronage du Secrétariatd’État au Logement et du Ministère déléguéà la Ville, La Documentation Française, Paris,juin 2001, pp. 15-24.29 L’article 34 (3) « Sécurité sociale et ai<strong>de</strong> sociale» <strong>de</strong> la Charte <strong>de</strong>s droits fondamentaux<strong>de</strong> l’Union européenne énonce : « afin <strong>de</strong> luttercontre l’exclusion sociale et la pauvreté,l’Union reconnaît et respecte le droit à uneai<strong>de</strong> sociale et à une ai<strong>de</strong> au logement <strong>de</strong>stinéesà assurer une existence digne à tousceux qui ne disposent pas <strong>de</strong> ressourcessuffisantes, selon les modalités établies parle droit communautaire et les législations etpratiques nationales ».21


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009■ ConclusionsLes articles publiés <strong>de</strong> Romain Graëfflyet <strong>de</strong> Laurent Ghekière nous ontprésenté <strong>de</strong>ux perspectives différentessur les évolutions actuellesdu secteur du logement social dansl’Union européenne :• le premier, qui a une approcheplus fonctionnelle, met en exergueles développements plus récentsdu logement social européencomme secteur public,tant sur le plan organisationnelqu’en ce qui concerne les fonctionsqu’il remplit;• le second systématise les troistypes <strong>de</strong> conceptions actuellesdu logement social en Europeen tenant compte <strong>de</strong>s référentiels<strong>de</strong> l’Union européenne,plus précisément <strong>de</strong> la définitiond’un service économiqued’intérêt général. Il évoque égalementle rôle plus prégnant,aujourd’hui, <strong>de</strong>s pouvoirs locauxdans les conditions d’attribution<strong>de</strong>s logements.Ces <strong>de</strong>ux articles permettent, chacun,la mise en perspective européennedu logement social bruxelloisvingt ans après la création <strong>de</strong> la<strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>.Qu’en retenir ?Le texte intitulé « Réflexions surles évolutions du logement socialen Europe 1999-2009 » meten exergue <strong>de</strong>s évolutions qui se retrouventau niveau européen et quele secteur bruxellois a matérialiséesquasi toutes ces dix ou quinze <strong>de</strong>rnièresannées.En termes <strong>de</strong> politique locative,l’élargissement du public est à l’œuvre<strong>de</strong>puis les années « nonante »dans la région bruxelloise avec l’objectivationplus gran<strong>de</strong> <strong>de</strong>s règlesen matière d’attribution <strong>de</strong>s logements: cette évolution a diversifiéles publics accueillis par les sociétésdans la région et a signifié moins <strong>de</strong>discrimination dans l’accès au logementsocial public 1 . Cette évolutiona été concomitante avec l’affirmationd’une politique sociale qui s’estprogressivement développée et quia signifié la mise à disposition localement<strong>de</strong> divers services et dispositifssociaux. La simple fonctionimmobilière est désormais dépasséeet le secteur a vu ses missions se diversifier,ou plutôt, sa mission historiqueêtre complétée.L’implication publique dans le secteurdu logement social bruxelloisa été clairement maintenue quandon examine, notamment, l’apportfinancier régional ces <strong>de</strong>rnières années: entre 2004 et 2009, le budgetrégional <strong>de</strong>s dépenses a octroyé740 millions d’euros <strong>de</strong> crédits d’ordonnancementet 1.330 millionsd’euros <strong>de</strong> crédits d’engagementau logement social bruxellois. Parailleurs, si les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> gestion ontévolué, notamment avec l’introductiond’une logique d’investissementpluriannuel et la mise en place <strong>de</strong>contrats <strong>de</strong> gestion, il n’y a pas eu,globalement, <strong>de</strong> désengagement<strong>de</strong> la <strong>Région</strong> dans le secteur.Enfin, le logement social bruxelloiss’est trouvé i<strong>de</strong>ntifié progressivementcomme l’un <strong>de</strong>s opérateurs1 Cette dynamique a été récemment confortéepar le vote d’une ordonnance modifiantl’ordonnance du 17 juillet 2003 portant leCo<strong>de</strong> bruxellois du Logement et visant àaffirmer le principe <strong>de</strong> l’égalité <strong>de</strong> traitementen matière d’accès au logement socialet moyen (Document A/538/1 - Sessionordinaire 2008-2009, 12 Janvier 2009).Au moment <strong>de</strong> la rédaction <strong>de</strong> cet article,cette ordonnance n’avait pas encore été publiéeau Moniteur belge.<strong>de</strong> la politique <strong>de</strong> la ville et <strong>de</strong> la cohésionsociale.On doit donc constater l’extrêmeproximité entre les constats communsaux pays européens, relevéspar Romain Graëffly, et les réalitésrencontrées par le secteur du logementsocial bruxellois <strong>de</strong>puis sa régionalisation.L’article <strong>de</strong> Laurent Ghekièrerelève d’une approche très différente: <strong>de</strong>rrière l’analyse <strong>de</strong> laréalité actuelle du logement socialeuropéen qu’il effectue, il constitueune sorte d’argumentaire très structuré<strong>de</strong> la légitimation du secteur dulogement social européen commeservice public.« Et qui doit le rester au regard dudroit communautaire quels qu’ensoient les développements ! » serait-ontenter <strong>de</strong> dire en suivant lapensée <strong>de</strong> l’auteur.C’est pour cela que la question dutraitement <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale<strong>de</strong> logement, par le secteur du logementsocial, occupe une part importante<strong>de</strong> cet article.Il s’agit, en effet, d’un élémentcentral <strong>de</strong> l’argumentaire pour empêcherles évolutions voulues parcertains qui verraient volontiers leparadigme <strong>de</strong> la concurrence s’emparerdu secteur et supprimer, oudu moins réduire, dans le mêmemouvement, son financement public.Autant le premier article insiste surune homogénéité certaine dans lesévolutions observées, autant le secondsystématise ce qui différencieles conceptions du logement socialà l’œuvre aujourd’hui dans l’Unioneuropéenne et vise à les classifieren trois gran<strong>de</strong>s catégories à partir22


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009<strong>de</strong> l’examen <strong>de</strong>s missions remplies :conception résiduelle, généralisteou universelle.Cette réflexion vient compléter <strong>de</strong>manière pertinente la réflexion <strong>de</strong>Romain Graëffly et, quelque part,répondre à l’un <strong>de</strong> ses refoulés : carles évolutions qu’il relève et danslesquelles il perçoit une gran<strong>de</strong> homogénéitéont pour acteurs <strong>de</strong>ssecteurs du logement social européenqui opèrent dans <strong>de</strong>s contextesnationaux, parfois extrêmementdifférenciés, et porteurs <strong>de</strong> conceptions<strong>de</strong> leur mission, plus ou moinslarge, définie à partir <strong>de</strong> leur taillerespective.La Belgique est considérée, avecl’Allemagne, la France et l’Italie,comme appartenant à la catégorie<strong>de</strong>s nations ayant une conceptionintermédiaire du logement social, àsavoir, entre la conception universelleportée principalement par lespays du Nord, dont l’une <strong>de</strong>s caractéristiquesest l’absence <strong>de</strong> plafond<strong>de</strong> revenus comme critère d’accès,et la conception résiduelle, portéepar les pays du Sud, dans laquelle lepoids du parc locatif social est marginalen matière <strong>de</strong> représentativitévis-à-vis <strong>de</strong> marchés du logementdominés par l’accès à la propriété.Cette conception à laquelle appartientla Belgique était historiquementcentrée sur la réponse auxbesoins <strong>de</strong>s salariés et <strong>de</strong>s famillesmais elle est aujourd’hui concernéepar une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale <strong>de</strong> plus enplus large qui oblige ses opérateursà développer une approche <strong>de</strong> plusen plus précise, voire étroite, <strong>de</strong> leurpublic <strong>de</strong>stinataire, vu les capacitésrestreintes <strong>de</strong> réponse que l’offrereprésente.Si Laurent Ghekière inscrit davantagesa réflexion dans l’actualitécommunautaire, cette approcheapparaît tout autant en phase quecelle <strong>de</strong> Romain Graëffly avec lesévolutions bruxelloises qu’il resituedès lors, à partir <strong>de</strong> sa typologisation,au cœur du débat européenfondamental autour <strong>de</strong> la notion<strong>de</strong> service d’intérêt économique général.Nul doute que ce débat n’estpas terminé et que nous aurons encorel’occasion d’en reparler.Pol ZIMMER, expert,<strong>SLRB</strong>, cellule « étu<strong>de</strong>s »23


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009HABITER EN 3Déclinaisons : Santé, Sécurité, Convivialité■ <strong>Bruxelles</strong> peut-elle se <strong>de</strong>nsifier<strong>de</strong> manière durable ?Il fait bon vivre à <strong>Bruxelles</strong> ! Selon une étu<strong>de</strong> du bureau du plan,notre région s’apprête à accueillir <strong>de</strong> nombreux nouveaux habitants.Avons-nous <strong>de</strong> la place pour loger ces personnes ? Et qu’en est-il <strong>de</strong>la viabilité <strong>de</strong> la ville? Selon le Bral 1 , cette forte <strong>de</strong>nsification <strong>de</strong> laville n’est pas une sinécure mais elle ouvre bien <strong>de</strong>s perspectives.En effet, une ville durable est par définition une ville <strong>de</strong>nsémentpeuplée. Ceci ouvre un certain nombre <strong>de</strong> réflexions à l’intention<strong>de</strong> ceux qui s’occupent <strong>de</strong> la problématique du logement.Si l’on veut garantir le droit au logementdans les décennies à venir,il faut massivement créer <strong>de</strong> nouvelleshabitations. D’ici 2025, et encoreplus d’ici 2060, notre populationva fortement s’accroître. Nousallons compter, selon le bureau duplan, quelque 300.000 habitants enplus.Comment pouvons-nous les accueillirsi, aujourd’hui déjà, nouséprouvons tant <strong>de</strong> mal à loger notrepopulation ? Dans notre ville,presque chaque nouveau projet<strong>de</strong> construction soulève la critique.Et soyons honnêtes, celle-ci ne résultepas uniquement d’un manque<strong>de</strong> sensibilisation. La manière dont<strong>Bruxelles</strong> a abordé les projets immobilierspar le passé, n’est pas <strong>de</strong>nature à donner confiance. Beaucoup<strong>de</strong> choses ont été gâchées etil n’existe pas <strong>de</strong> garantie que nousréussirons mieux cette fois. En saqualité <strong>de</strong> réseau indépendant <strong>de</strong>comités d’habitants, le Bral a publiéun document intitulé « BrusselEcopolis ? duurzame i<strong>de</strong>eën voornieuwe wijken 2 » afin d’accompagnerle public dans les projets <strong>de</strong>nouvelles constructions. Nous reprenonsci-<strong>de</strong>ssous l’essentiel <strong>de</strong>s1 BRAL : Brusselse Raad voor Leefmilieu(Conseil bruxellois pour l’environnement).2 <strong>Bruxelles</strong> Ecopolis ? idées durables pour nouveauxquartiers.ingrédients issus <strong>de</strong>s « recettes pour<strong>de</strong>s quartiers durables ».Étape 1 : versez2 kilos d’habitationsdans un bolConstruire au moins cent mille nouvelleshabitations, est-ce là compromettrela viabilité <strong>de</strong> la ville ? Pasforcément. Cela peut même servir<strong>de</strong> tremplin pour faire <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>une « écopolis ». Peu <strong>de</strong> personnesse ren<strong>de</strong>nt compte <strong>de</strong> l’importance<strong>de</strong> la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> population pour ladurabilité d’une ville. Dans les lotissementspériphériques, cela coûtebeaucoup plus cher d’aménager <strong>de</strong>sconduites et <strong>de</strong>s rues, d’organiser ladistribution du courrier… et surtout<strong>de</strong> faire fonctionner les transportsen commun. Pour le commerceégalement, la <strong>de</strong>nsité est cruciale :pour un magasin <strong>de</strong> proximité, lesurbanistes prennent comme référenceun chiffre <strong>de</strong> 2000 à 5000habitants dans un rayon <strong>de</strong> 200 à600 mètres. Pour toutes ces raisons,l’écologie et la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> populationvont <strong>de</strong> pair.Selon <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s, on pourrait parler<strong>de</strong> zone urbaine à partir <strong>de</strong> 40à 60 habitations par hectare. Dansles quartiers (lobes) écologiques <strong>de</strong>Tübingen, ce sont même 240 individus/haqui vivent ensemble en touteconvivialité. Cela représente plus <strong>de</strong>100 habitations par hectare. Et s’yajoute encore tout ce qui concernel’emploi.À <strong>Bruxelles</strong>, la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> populationn’est pas idéale. La région compteen moyenne 63 habitants par hectare,grosso modo une trentained’habitations. En fait, bon nombre<strong>de</strong> quartiers dans la <strong>de</strong>uxième ceinture<strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong> sont donc suburbains.C’est entre autres pour celaque beaucoup <strong>de</strong> stations <strong>de</strong> métrosont désertées le soir et que la villeest confrontée à un problème <strong>de</strong>voitures si important.La conclusion est claire : <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>sparties <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong> gagneraient à se<strong>de</strong>nsifier. Il faut abandonner l’idéeque les nouveaux projets immobiliersne peuvent pas dépasser enhauteur les blocs existants. Si nousremplissons le maigre espace dontnous disposons encore avec <strong>de</strong>sblocs <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ou trois étages, noussacrifions <strong>de</strong> la place d’une manièrequi est irresponsable eu égard auxgénérations futures. Nous <strong>de</strong>vonsoser construire plus haut.Attention toutefois ! Ceci ne signifiepas que nous <strong>de</strong>vons en retourneraux tours. Les tours peuvent semblerêtre le chemin le plus court vers24


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> population mais, pourmaintenir viable un tel quartier, il estnécessaire d’avoir beaucoup d’espaceouvert dans le voisinage <strong>de</strong>stours. Les urbanistes estiment quel’idéal est d’avoir une constructionà six niveaux.Surpopulation ?Et qu’en est-il <strong>de</strong> la <strong>de</strong>nsité dans lesquartiers existants ? Pour répondreà cette question, il convient <strong>de</strong> distinguerla <strong>de</strong>nsité théorique au niveaud’un quartier <strong>de</strong> la <strong>de</strong>nsité auniveau <strong>de</strong> l’infrastructure existante.Au sein <strong>de</strong> la banane 2 , la ceinturedu 19 e siècle, bon nombre <strong>de</strong> quartiersont la réputation d’être surpeuplés: le vieux Molenbeek, le bas <strong>de</strong>Schaerbeek, et surtout Saint-Josse.Effectivement, avec 200 habitantspar hectare, cette <strong>de</strong>rnière communedépasse <strong>de</strong> loin la moyennebruxelloise. Les familles avec enfantsy vivent ensemble dans <strong>de</strong>sappartements beaucoup trop petits.Il existe un manque criant d’espaces<strong>de</strong> jeu et <strong>de</strong> verdure dans levoisinage…Et pourtant… Il est frappant <strong>de</strong>constater que Paris dans son ensembleest aussi <strong>de</strong>nsément peupléque Saint-Josse. La ville lumière estelleune agglomération surpeupléesans espaces verts ? Certainementpas. Force est <strong>de</strong> constater queParis connaît <strong>de</strong>s constructions quipermettent une <strong>de</strong>nsité supérieure,avec <strong>de</strong>s blocs comptant facilementhuit étages. A Saint-Josse, lesconstructions ont été prévues pour<strong>de</strong>s familles riches avec un peu <strong>de</strong>personnel. La ville n’est pas <strong>de</strong>stinéeà ce que plusieurs ménages y viventles uns au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s autres. Levieux Molenbeek a pour sa part étéconstruit pour <strong>de</strong>s familles ouvrières,sans personnel. Ces quartiers,avec leur infrastructure actuelle,3 La banane : croissant <strong>de</strong> pauvreté allant duSud-Ouest au Nord-Est.sont fortement peuplés. Il y seraittrès compliqué d’augmenter encorela <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> population.Dans les nouveaux quartiers, ilnous est possible <strong>de</strong> construire <strong>de</strong>manière bien plus <strong>de</strong>nse. Nous <strong>de</strong>vonssans doute examiner <strong>de</strong> prèscertains vieux blocs d’habitations.Ne <strong>de</strong>vons-nous pas tout simplementdémolir certaines habitationsouvrières et les remplacer par <strong>de</strong>sconstructions plus hautes ? Et ce <strong>de</strong>manière à ce qu’il nous reste <strong>de</strong> laplace sur et à côté <strong>de</strong> celles-ci pour<strong>de</strong>s espaces verts ? Voilà commentnous pouvons rendre la ville plus<strong>de</strong>nse et plus verte à la fois. Avecle projet ‘oxygène pour la porte <strong>de</strong>Bruges’, Gand a prouvé que ce pariétait réalisable. En tenant comptelors <strong>de</strong> la <strong>de</strong>nsification <strong>de</strong> la situation<strong>de</strong>s stations <strong>de</strong> métro, nouscontribuons <strong>de</strong> manière multiple àun urbanisme durable.Étape 2 :assaisonnez le tout<strong>de</strong> commerces,d’emploi et <strong>de</strong>différents typesd’habitantsPour obtenir un quartier vivant, nous<strong>de</strong>vons ajouter <strong>de</strong>s variétés très différentes<strong>de</strong> gens et bien mélanger.Nous avons besoin <strong>de</strong> logementssociaux car ils font cruellement défautdans cette ville. Parallèlement,la classe moyenne est indispensablepour permettre une bonne mixitésociale. Nous <strong>de</strong>vons mélanger lespropriétaires et les locataires ainsique les petits et les grands ménages.Il peut aussi peut-être y avoir<strong>de</strong> l’espace réservé à <strong>de</strong>s appartementspour seniors qui soient <strong>de</strong>préférence bien intégrés dans lereste du quartier.Et pour éviter que les gens se limitentà dormir dans le quartier, il fautprévoir <strong>de</strong>s espaces commerciaux,<strong>de</strong> petits espaces <strong>de</strong> bureaux, etune infrastructure <strong>de</strong> quartier. Pensezpar exemple à une crèche, à unebibliothèque, à une salle <strong>de</strong> sportou <strong>de</strong> réunion. Ceci procure <strong>de</strong>semplois et permet aux habitantsd’effectuer leurs achats ou d’envoyerleurs enfants à l’école dans lequartier. Nous rendons le quartieragréable et évitons beaucoup <strong>de</strong>déplacements superflus.Il est capital que cette infrastructure<strong>de</strong> quartier soit mise en place sansattendre, en même temps que leshabitations. Si nous ne la créonsque <strong>de</strong>s années après, les nouveauxhabitants auront pris d’autres habitu<strong>de</strong>sdans l’intervalle. Les célèbresquartiers durables en Allemagnesont <strong>de</strong>s exemples classiques <strong>de</strong> cetype <strong>de</strong> développement mixte.Autre point prioritaire : faire en sorteque les habitations s’insèrent aumieux au sein <strong>de</strong> l’espace public, enévitant par exemple <strong>de</strong> placer <strong>de</strong>schambres à coucher du côté <strong>de</strong> larue, car alors les ri<strong>de</strong>aux ou voletsrestent fermés et tout contrôle social<strong>de</strong>vient impossible.ProtestationsQuand <strong>de</strong>s magasins, <strong>de</strong>s crèchesou <strong>de</strong>s écoles sont implantés, lapopulation est généralement satisfaite.Mais les gens accueillent d’unœil moins favorable la création <strong>de</strong>nouvelles habitations. C’est principalementcontre <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> logementssociaux qu’une résistancefarouche se fait sentir. Bien que l’offre<strong>de</strong> logements sociaux à <strong>Bruxelles</strong>soit particulièrement faible, chaquequartier dira compter déjà suffisamment<strong>de</strong> logements sociaux. Unetelle réaction peut se comprendre.Beaucoup <strong>de</strong> blocs ou <strong>de</strong> toursd’habitations sont loin <strong>de</strong> former<strong>de</strong>s exemples <strong>de</strong> bonne intégrationdans le voisinage. Par le passé, bon25


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009Les quartiers mo<strong>de</strong>rnes <strong>de</strong> Tübingen prouvent qu’il est possible <strong>de</strong> concilier une haute <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong>population avec les espaces verts et la cohésion sociale. Des plaines <strong>de</strong> jeux partagées et <strong>de</strong>s dallesjardinspeuvent être <strong>de</strong>s ingrédients importants dans ce cadre. Photo Ville <strong>de</strong> Tübingen.nombre <strong>de</strong> fautes ont été commisesdans la conception et la construction<strong>de</strong> blocs d’habitations sociales.On entend fréquemment <strong>de</strong>s gensreprocher à ces blocs d’être <strong>de</strong> véritablesghettos. Cela n’est pas nécessairementfaux.A l’heure actuelle, nous continuons<strong>de</strong> préconiser une approche selon<strong>de</strong>ux axes : la <strong>Région</strong> lance <strong>de</strong>sprojets <strong>de</strong> logements sociaux etle secteur privé développe les zonesd’intérêt régional ainsi que <strong>de</strong>plus petits terrains avec peu ou pas<strong>de</strong> logements sociaux. La mixité<strong>de</strong>meure illusoire. Pourquoi neparvenons-nous pas à engranger<strong>de</strong>s succès comme aux Pays-Bas ?Les coopératives <strong>de</strong> logement yconstruisent <strong>de</strong>s blocs où un certainnombre <strong>de</strong> logement sociaux sontdispersés ça et là parmi les appartements<strong>de</strong> luxe.Étape 3 :ajoutez <strong>de</strong>uxlitres <strong>de</strong> verdureProblème : si nous <strong>de</strong>nsifions la ville,l’espace public et la verdure disparaissent.La ville <strong>de</strong>vient donc moinsviable et moins durable. L’urbanismedurable est donc un exerciced’équilibre qui consiste à combinerun coefficient d’occupation <strong>de</strong>s solspas trop élevé avec une forte <strong>de</strong>nsité<strong>de</strong> population. Le modèle idéalpour une ville verte est l’ecopolis oulobbenstad, une ville présentant lastructure d’une roue <strong>de</strong> vélo, dontles rayons sont en alternance <strong>de</strong>nsémentbâtis et verts. Les ban<strong>de</strong>s bâtiesen direction du centre <strong>de</strong>vraientidéalement faire 600 mètres <strong>de</strong> large.Chacun habite alors à proximitéd’arrêts <strong>de</strong> transports en commun,d’un centre commercial ou <strong>de</strong>s lobesverts qui sillonnent la ville.Ces axes verts ne sont pas uniquementimportants pour les loisirs. Cesont <strong>de</strong>s routes <strong>de</strong> migration idéalespour les cyclistes. Et pour la fauneet la flore. Si nous intégrons le vertdans un réseau, nous offrons à nosespèces un habitat bien plus grand.En Gran<strong>de</strong>-Bretagne, la prestigieuseTown and Country Planning Association3 insiste elle aussi sur l’importance<strong>de</strong> la verdure pour armer laville contre le réchauffement climatique.Les espaces bleus et verts seréchauffent moins vite pendant l’étéet restent plus humi<strong>de</strong>s que le béton,l’asphalte et le revêtement <strong>de</strong>stoitures. La pression atmosphériquey est également plus forte que dans4 Association britannique pour l’aménagement<strong>de</strong> l’espace et <strong>de</strong> la ville.26


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009les endroits chauds. Il se crée doncun mouvement d’air frais, humi<strong>de</strong>et relativement pur qui part d’un telespace vert en direction du centre.Une étu<strong>de</strong> réalisée à Berlin montrequ’il existe un effet incontestabled’un espace vert sur la température<strong>de</strong> son environnement bâti.Pour finir, la verdure joue aussi unrôle thérapeutique. Des étu<strong>de</strong>sprouvent que les personnes mala<strong>de</strong>squi ont une vue sur un espacevert guérissent plus vite que cellesdont la fenêtre donne sur du bétonou <strong>de</strong>s voitures en stationnement.Réseau vert versusnouvelles constructionsIl ressort <strong>de</strong> ce qui précè<strong>de</strong> que laverdure n’est pas simplement unecerise sur le gâteau, un article <strong>de</strong>luxe réservé aux cadres, c’est unbien essentiel pour tous les habitants<strong>de</strong> la ville.<strong>Bruxelles</strong> Environnement disposeaussi <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s années d’un projet« réseau vert ». Hélas, personnene semble y prêter attention. Pournotre administration <strong>de</strong> l’environnement,le projet n’est pas la principalepriorité et d’autres instancesqui entreprennent <strong>de</strong>s constructionsou accor<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s permis,semblent l’ignorer complètement.Se posent-elles simplement la question<strong>de</strong> savoir si les sites dont elless’occupent doivent correspondre auréseau vert ? Les commissions <strong>de</strong>concertation se préoccupent-elles<strong>de</strong> la nécessité <strong>de</strong> faire passer unaxe vert étroit à travers le site afin<strong>de</strong> préserver le réseau vert ? Ou <strong>de</strong>le compléter ? Nous ne lisons jamais<strong>de</strong> telles préoccupations. La concertationstructurelle entre <strong>Bruxelles</strong>Environnement et les opérateurs dusecteur du logement reste inexistante.Il en résulte que le réseaune se développe pratiquement pas,alors que <strong>de</strong> tous côtés, l’espace librequi subsiste est accaparé.Les cinq à dix années à venir serontdéterminantes pour l’avenir <strong>de</strong> ceréseau vert. Actuellement, <strong>Bruxelles</strong>entame à un rythme effréné ses réservesfoncières. Si la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong>1994 à 2004 fut la décennie <strong>de</strong> larénovation urbaine, nous sommesapparemment arrivés dansl’ère <strong>de</strong> la nouvelle construction.Les zones d’intérêt régional, le Plandu logement, le Plan pour 1.000logements <strong>de</strong> la Ville <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>,les projets <strong>de</strong> la SDRB et une fouled’opérations privées modifierontl’aspect <strong>de</strong> cette ville pour les annéesà venir.Les quartiers rési<strong>de</strong>ntiels urbains peuvent parfaitement être verts quand il faut réserver un espace moindre aux voitures,comme ici dans le quartier <strong>de</strong> Falkenried à Hambourg. Photo Markus Heller, www.autofrei-wohnen.<strong>de</strong>.27


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009Tous ces opérateurs sont-ils ounon conscients <strong>de</strong> l’importance du« modèle <strong>de</strong>s lobes » ? Reprenonsnousce modèle dans notre planificationurbaine ? Faisons-nous ensorte <strong>de</strong> favoriser <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong>construction là où c’est possible et<strong>de</strong>s axes verts là où c’est nécessaire? De réaliser éventuellement <strong>de</strong>spetites expropriations pour fermerun axe vert ? Ou poursuivons-noussimplement sur la voie actuelle ? Ensuivant l’approche actuelle, nousremplirons sans aucun doute <strong>de</strong>constructions une bonne partie <strong>de</strong>smaillons existants ou manquants <strong>de</strong>ce réseau vert.N’oubliez pas les toitsPour concilier une forte occupationdu sol et la durabilité, nous <strong>de</strong>vonsfaire usage <strong>de</strong> tous nos atouts. Et enville, il subsiste un énorme potentield’espace ouvert non utilisé : lestoits. De plus en plus, il est question<strong>de</strong> toits verts et <strong>de</strong> panneaux solaires.Il s’agit là <strong>de</strong> petites opérationsqui ren<strong>de</strong>nt les bâtiments existantsplus durables. Mais les nouvellesconstructions offrent bien davantage<strong>de</strong> possibilités que cette implantationextensive <strong>de</strong> plantes grasses.Lors <strong>de</strong>s nouvelles constructions, onpeut prévoir une structure portantesuffisamment forte pour remplirtoutes sortes <strong>de</strong> fonctions sur letoit. Pourquoi ne pas aménager <strong>de</strong>sterrains <strong>de</strong> sport ou <strong>de</strong>s jardins au<strong>de</strong>ssus<strong>de</strong>s bâtiments ? Aujourd’hui,nous ne pouvons plus nous permettre<strong>de</strong> laisser inutilisé le moindremètre carré. Prévoir un toit vert extensifsur une nouvelle constructionne suffit plus.Étape 4 : éliminezsoigneusementles voituresLes quartiers durables <strong>de</strong>viennentà la mo<strong>de</strong>. Mais souvent, ce quel’on entend par là en pratique n’arien d’extraordinaire. Combien <strong>de</strong>fois n’entend-on pas parler d’unquartier durable parce que les bâtimentsont une isolation épaisse etsont équipés <strong>de</strong> système <strong>de</strong> collecte<strong>de</strong>s eaux <strong>de</strong> pluie ? Soyons clairs : unquartier durable doit être à circulationrestreinte. Et ceci représentepour les opérateurs <strong>de</strong> logementune mission d’importance : canaliserla circulation automobile sur uncertain nombre <strong>de</strong> rues principalesen périphérie, et agencer alors lesrues d’habitations en boucles, fersà cheval, cul-<strong>de</strong>-sac, … <strong>de</strong> sorteque la circulation <strong>de</strong> passage n’ysoit pas possible. Un principe capitalà cet égard : le « shared space 4 »,un aménagement <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> à faça<strong>de</strong>,sans distinction entre trottoiret chaussée. Les séparations entredifférents usagers ont immanquablementpour conséquence que laroute n’a d’autre fonction que lesdéplacements, et ceci est contraireà l’idée même <strong>de</strong> ‘quartier d’habitation’.Une ‘rue d’habitation’ digne<strong>de</strong> ce nom doit aussi viser la rencontre,le délassement, le jeu…Pour que la circulation dans unquartier soit restreinte, l’usage <strong>de</strong>la bicyclette et <strong>de</strong>s transports encommun doit être rendu le plusattrayant possible. Un concepteur<strong>de</strong> projets intelligent doit dès lorsprévoir d’emblée <strong>de</strong>s parkings communspour vélos et discuter avec lacommune et la <strong>Région</strong> <strong>de</strong> l’intégrationdu nouveau quartier au seindu réseau <strong>de</strong> pistes cyclables communaleset régionales. Il n’est pasnécessaire <strong>de</strong> prévoir un station-5 L’espace partagé.nement à proximité immédiate <strong>de</strong>shabitations. On préférera prévoirles parkings un peu plus loin, enpériphérie du quartier. Les emplacements<strong>de</strong> parkings pour voiturespartagées pourront convaincre lepublic <strong>de</strong> ne pas acquérir sa proprevoiture. Pourquoi ne pas imaginer<strong>de</strong>s contrats pour <strong>de</strong>s logementsqui incluraient un abonnement àCambio 5 ?Pour fi nir : agissez avec visionC’est un défi énorme qui se présenteà nous. Si nous développons<strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> constructions <strong>de</strong> manièreirréfléchie dans les dix annéesà venir, nous gaspillons la chanced’obtenir <strong>de</strong>s quartiers durables àtrès long terme. En optant pour unebonne approche, en planifiant leszones à <strong>de</strong>nsifier et à rendre plusvertes, nous pourrons non seulementproposer un logement à <strong>de</strong>smilliers <strong>de</strong> personnes, mais égalementfavoriser une ville plus verte,moins envahie par les voitures, etplus agréable à vivre.Quelles sont nos chances d’arriver àun développement durable ? Selonle Bral, il est clair que nous ne pourronsréussir que si l’État a une visionet une ambition permettant <strong>de</strong> faireévoluer la ville en profon<strong>de</strong>ur, s’ilse donne les moyens <strong>de</strong> mettre surpied une telle évolution et d’assurerla coordination entre les différentsservices pour que chacun poursuivele même objectif. Ce n’est pas laréflexion cloisonnée du passé quinous y ai<strong>de</strong>ra.Piet VAN MEERBEEK,Bral vzw13, Place du Samedi1000 <strong>Bruxelles</strong>6 Cambio est une firme qui propose à sesclients <strong>de</strong>s voitures partagées en plus <strong>de</strong> 50endroits <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>. On réserve un véhiculesur Internet, on va le chercher à l’emplacement<strong>de</strong> parking Cambio le plus proche, enpayant par la suite pour le temps d’utilisationet la distance parcourue.28


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009■ Évolution <strong>de</strong> la situationdémographique <strong>de</strong> la <strong>Région</strong><strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>Genèse et géographie <strong>de</strong>s quartiers en diffi culté à <strong>Bruxelles</strong> :quelles conséquences pour la cohésion sociale ?1. La péri-urbanisation commemoteur <strong>de</strong> croissanceéconomique après 1945Au XIX e siècle, <strong>de</strong>s quartiers ouvriersse forment en <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>.A cette époque, lesouvriers travaillent dans <strong>de</strong>s conditionsprécaires. Vu les conditions salariales<strong>de</strong> cette époque, les ouvriersse voient contraints <strong>de</strong> se loger dans<strong>de</strong> petits logements situés près <strong>de</strong>leur lieu <strong>de</strong> travail, ce qui forme les« quartiers ouvriers ». La ville connaîtalors une forte <strong>de</strong>nsification due àl’installation massive d’ouvriers (St-Josse, Schaerbeek, Molenbeek, St-Gilles et An<strong>de</strong>rlecht).En réaction à ces conditions <strong>de</strong>travail et aux conditions <strong>de</strong> vie insalubreset dangereuses, la classeouvrière s’organise et force la classebourgeoise à mettre sur pied unesérie <strong>de</strong> droits politiques. Entre les<strong>de</strong>ux guerres, la classe bourgeoise,en réaction à son tour, crée, d’unepart, la couronne <strong>de</strong> cités-jardinsdans la périphérie <strong>de</strong> la ville, selonune logique d’habitations groupéeset, d’autre part, <strong>de</strong>s transports en1 D’après l’exposé oral en mars 2008par Christian Kesteloot <strong>de</strong> ses recherches,« Genèse et Géographie <strong>de</strong>squartiers en difficulté : quelles conséquencespour la cohésion sociale ? ».La lecture <strong>de</strong> cet article sera utilement complétéepar la consultation <strong>de</strong> l’Atlas <strong>de</strong> la santéet du social, publié par l’Observatoire <strong>de</strong>la Santé et du Social et accessible sur le siteinternet .commun pour se rendre sur leslieux <strong>de</strong> travail. A cette époque,les personnes riches s’installent en<strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la ville, réputée commedangereuse, et les plus aisés parmiles ouvriers, ayant les moyens <strong>de</strong> lessuivre, s’installent eux aussi dans lescités-jardins. Par ce phénomène, labourgeoisie divise la classe ouvrièreen séparant les lea<strong>de</strong>rs, venant habiteren périphérie, <strong>de</strong> leurs compagnonsrestés en ville.1.1. Croissance économique baséesur la péri-urbanisationLes années 1930 connaissent la criseéconomique avec la surproduction<strong>de</strong> biens et <strong>de</strong> services ainsi que labaisse sensible du pouvoir d’achat<strong>de</strong> la population générale. Pour répondreaux besoins <strong>de</strong>s ménages,les femmes s’engagent massivementdans le circuit du travail rémunéré.Disposant <strong>de</strong> moyens financiersdoublés, par rapport à leursprédécesseurs, les familles peuventéquiper leurs maisons d’appareilsélectroménagers (réfrigérateurs,aspirateurs, etc.) et ainsi automatisercertains travaux domestiques.L’augmentation <strong>de</strong> la consommation(consommation dite « <strong>de</strong> masse »)qui s’installe <strong>de</strong> cette façon entraînela croissance économique.Les autorités encouragent l’achat etla construction <strong>de</strong> logements en périphérieoù les prix <strong>de</strong>s terrains sontmoins élevés qu’en ville; ce qui facilitel’accès à la propriété pour uneplus large frange <strong>de</strong> la population.On assiste alors à un étalement urbain,sans plan urbanistique, et laville tend à se vi<strong>de</strong>r. Or, les ménagesqui se sont installés en périphérie <strong>de</strong>la ville ont besoin, pour se rendresur leur lieu <strong>de</strong> travail, d’un moyen<strong>de</strong> transport; la voiture <strong>de</strong>vient unélément <strong>de</strong> consommation nécessaire.Dans les années 1960, il y a plus <strong>de</strong>personnes qui s’installent en <strong>de</strong>hors<strong>de</strong> la ville qu’en <strong>de</strong>dans. Généralement,les personnes qui choisissentquand même d’y vivre, sont plutôtjeunes. Commence alors la décroissance<strong>de</strong> la population urbaine,hormis la concentration <strong>de</strong> personnesimmigrées.Les années 1970 connaissent la criseéconomique, qui bloque le mécanisme<strong>de</strong> la péri-urbanisation. Avecla reprise économique <strong>de</strong>s années1985, la péri-urbanisation repren<strong>de</strong>t se maintient, toutefois <strong>de</strong> façonmoins soutenue.1.2. Remplacement <strong>de</strong> la classeouvrière belge par l’immigrationLa hausse du pouvoir d’achat va <strong>de</strong>pair avec la mobilité sociale ascendantepour les ouvriers belges quiaccè<strong>de</strong>nt à la classe moyenne. Lesautorités belges déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> comblerla <strong>de</strong>man<strong>de</strong> excé<strong>de</strong>ntaire dumarché du travail en faisant massivementappel à <strong>de</strong>s travailleurs29


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009étrangers. Désormais, ce sont lesouvriers immigrés qui font fonctionnerle marché du logement urbain.En 20 ans, les communes bruxelloisesdu centre ont à peine vu doublerle total <strong>de</strong> leur revenu imposable : lecentre s’appauvrit tandis que la périphéries’enrichit.Pourtant, l’emploi se localise essentiellementdans le centre <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>.Les travailleurs, eux, viennent<strong>de</strong>s communes <strong>de</strong> la périphériepour travailler à <strong>Bruxelles</strong> et utilisent,par conséquent, les servicescommunaux du centre : les plusdémunis, résidant au coeur <strong>de</strong> la<strong>Région</strong> bruxelloise, paient donc lesservices communaux (voiries, police,etc.) dont bénéficient autant lespersonnes aisées <strong>de</strong> la périphérietravaillant au centre.2. Désindustrialisation et criseLa crise <strong>de</strong>s années 1970-1980 bloquele système <strong>de</strong> l’ascension sociale,touchant davantage les personnesimmigrées qui se voient contraintes<strong>de</strong> rester dans les « quartiers d’immigrés» sans perspective d’ascensionsociale, ne pouvant plus espéreraccé<strong>de</strong>r un jour à la propriété enpériphérie.Depuis les années 1980, les quartiersd’immigrés <strong>de</strong> la <strong>Région</strong> <strong>de</strong><strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> n’ont pas évolué.Si l’on compare la situation aveccelle d’Amsterdam aux Pays-Bas, onconstate que le logement social y représente55 % du parc immobilier.20 % <strong>de</strong>s logements privés locatifssont gérés par l’administration communale.Ce système, où 75 % duparc immobilier est géré par l’État,a été conçu pour répondre à la crisedu logement liée à la croissance démographique.3. Précarisationdu logement socialLa précarisation du logement socialpeut s’expliquer par un double phénomène: d’une part, la crise économiquequi appauvrit la populationbruxelloise et, d’autre part, la régionalisationdu logement social impliquant<strong>de</strong> nouvelles conditions <strong>de</strong> financementet le contrôle rigoureux<strong>de</strong>s règles strictes d’attribution.En <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> onassiste, plus encore que dans les<strong>de</strong>ux autres <strong>Région</strong>s, à la polarisationsociale : les riches <strong>de</strong>viennentplus riches et les pauvres plus pauvres.La population vivant dans lelogement social n’échappe pas à cemécanisme et sa situation <strong>de</strong>vient<strong>de</strong> plus en plus précaire.3.1. La polarisation sociales’explique au travers d’unemultitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> facteurs :• la flexibilité du marché du travail;• la restructuration <strong>de</strong> l’État, abandonnantle modèle d’État provi<strong>de</strong>nce: les droits sociaux sont<strong>de</strong> plus en plus conditionnés (cf.Le RIS, Revenu d’Intégration Sociale);• la secon<strong>de</strong> transition démographique: entre les <strong>de</strong>ux guerreset dans les années 1950-1960-1970, le modèle dominant <strong>de</strong>l’organisation <strong>de</strong>s ménages estle modèle classique « couplemarié avec enfants » ; il concernait60 % <strong>de</strong>s ménages en Belgique.Actuellement, ce modèle<strong>de</strong> famille n’est plus dominantparmi les nouvelles formes <strong>de</strong>ménages qui surgissent. Unepersonne va au cours <strong>de</strong> sa vietraverser différentes formes <strong>de</strong>ménage (en tant que enfant,adulte célibataire, partenaire encouple, marié, grand-parent,etc.) ce qui engendre l’instabilité<strong>de</strong>s ressources, la perte ou le rétrécissement<strong>de</strong>s réseaux sociauxet l’effritement <strong>de</strong> la solidarité ;• la polarisation croissante <strong>de</strong> lapopulation civile, reprise dès lesannées 1990, et qui continueaujourd’hui, creuse toujours davantagel’écart entre les riches etles pauvres <strong>de</strong>puis 1980-1985.3.2 <strong>Région</strong>alisation et dépolitisationdu secteur du logement socialLa <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> revoitla législation concernant l’accèsau logement social. Avec la réforme<strong>de</strong> l’État, l’ordonnance <strong>de</strong> 1993, lamise en place <strong>de</strong> l’inscription multiple,le système d’attribution <strong>de</strong>slogements sociaux est dépolitisé et,au vu <strong>de</strong>s conditions d’attribution,les bénéficiaires constituent finalementune population <strong>de</strong> plus enplus précaire.3.3. Évolution <strong>de</strong>s quartierssociaux <strong>de</strong> 1981 à 2001En 1953, l’Abbé Froidure avait faitvisiter les taudis du quartier <strong>de</strong>s« Marolles » au Roi Baudouin. LeRoi déci<strong>de</strong> alors <strong>de</strong> débloquer <strong>de</strong>sfonds pour assainir les taudis <strong>de</strong>sMarolles, ainsi que ceux situés dansles quartiers « Querelle », « Rempart<strong>de</strong>s Moines » et « Meiboom » et <strong>de</strong>les remplacer par <strong>de</strong>s logementssociaux en faisant construire, vul’augmentation du prix du marchéfoncier, <strong>de</strong>s immeubles tours.Christian KESTELOOT,professeur <strong>de</strong> géographie socialeet économique à la KULeuvenet chargé <strong>de</strong> cours à l’ULBDonnées recueillies parAurélie Herremans,assistante sociale, <strong>SLRB</strong>30


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009■ Les femmes et le mal-logementLa crise du logement sévit-elle avecla même intensité pour les femmeset les hommes ? Certes, un loyer élevéest cher pour tout le mon<strong>de</strong>, et lemauvais état d’un logement affecte<strong>de</strong> la même manière son occupant,masculin ou féminin. Et pourtant,un examen plus approfondi révèlevite une réalité trop méconnue : lemal-logement a bien un genre, il sedécline principalement au féminin 1 .Pourquoi ? Notamment parce queles femmes, à la base, ne jouissentpas <strong>de</strong>s mêmes ressources matériellesque les hommes (écart salarialmoyen <strong>de</strong> 25 %). Résultat : le coûtdu logement absorbe une part dubudget plus gran<strong>de</strong> (en chiffresrelatifs) chez la femme que chezl’homme, ce qui risque d’entraînercelle-ci davantage sur la pente dusuren<strong>de</strong>ttement.Indice <strong>de</strong> cette surexposition <strong>de</strong>sfemmes à la précarité : elles sontlargement majoritaires (60 %) dansle logement social.S’adressant en tout état <strong>de</strong> causeaux personnes défavorisées suivantson objet social, le logement publicaccueille fatalement plus <strong>de</strong> femmesdès lors que la pauvreté frappecelles-ci avec davantage d’acuitéencore que leurs homologues masculins,ceci sans compter que lescritères d’attribution d’une habitationsociale font «la part belle»(c’est-à-dire octroient un nombreappréciable <strong>de</strong> points <strong>de</strong> priorité) à<strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> précarité typiquementféminines (état <strong>de</strong> grossesse,ménage monoparental, etc.). Quoiqu’il en soit, la sociologue Pascale1 Disposant <strong>de</strong> statistiques «<strong>de</strong> genre» pluscomplètes que celles <strong>de</strong> la <strong>Région</strong> bruxelloiseet, à la fois, ayant adopté <strong>de</strong>s mesures spécifiquesen cette matière, la <strong>Région</strong> wallonnefera l’objet d’un examen privilégié au cours<strong>de</strong> cet article.Jamoulle n’hésite pas à parler duparc immobilier public comme d’unmilieu «où vivent toujours plus <strong>de</strong>mères seules» 2 . Conséquence : dansles ensembles sociaux, «les hommesadultes sont <strong>de</strong> moins en moinsnombreux» 3 .Concernant spécifiquement les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ursd’un logement social à<strong>Bruxelles</strong>, quatre individus sur dixinscrits sur les listes d’attente sont<strong>de</strong>s isolés, tandis que plus <strong>de</strong> la moitié<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers ont une <strong>de</strong>scendanceà charge 4 . Et, à près <strong>de</strong> 90 %,ces parents seuls sont <strong>de</strong>s femmes 5 .Quoi qu’il en soit, plus <strong>de</strong> la moitié<strong>de</strong>s locataires sociaux en Wallonie(53 %) sont <strong>de</strong>s femmes célibataires(avec ou sans progéniture).Plus généralement, la précarisation<strong>de</strong>s femmes est à relier à la montéeen puissance <strong>de</strong>s ménages monoparentauxqui, à 75 %, sont dirigéspar <strong>de</strong>s femmes. Et, dans près <strong>de</strong>quatre cas sur dix (39 %), ces mèrescélibataires ont un minimum <strong>de</strong><strong>de</strong>ux enfants, ce qui, contrairementaux idées reçues, ne va pas sansinduire un besoin accru en grandslogements.Passablement aiguës, les difficultés<strong>de</strong> logement rencontrées parles femmes <strong>de</strong>meurent paradoxalementpeu visibles dans la mesureoù le sans-abrisme reste encore une2 Pascale JAMOULLE, «Hommes, pères et prises<strong>de</strong> risque», Les hommes et l’égalité, Institutpour l’égalité <strong>de</strong>s femmes et <strong>de</strong>s hommes,2007, p. 49.3 Pascale JAMOULLE, op. cit., p. 50.4 Respectivement 39 % et 54 % (DidierBAUDEWYNS, L’allocation-loyer. Quelquesprojections budgétaires pour la <strong>Région</strong> <strong>de</strong><strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>, Rapport réalisé pourle Conseil consultatif du Logement <strong>de</strong> la<strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>, mai 2005,p. 21).5 Service d’étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la Société du logement<strong>de</strong> la <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>, 2007.réalité largement masculine. C’estque les femmes redoutent par-<strong>de</strong>ssustout <strong>de</strong> se retrouver dans cemilieu empreint <strong>de</strong> violence qu’estla rue, qui plus est, lorsqu’elles ontavec elles <strong>de</strong>s enfants (dont la gar<strong>de</strong>leur serait instantanément retirée).Résultat : l’errance au féminin se vitdifféremment, mais <strong>de</strong> manière nonmoins problématique. Elles développent<strong>de</strong>s stratégies <strong>de</strong> débrouillardisepour éviter d’échouer à la rue,ce qui les fait, par exemple, alternerles hébergements <strong>de</strong> fortune chez<strong>de</strong>s connaissances ou <strong>de</strong>s parents.Mais, <strong>de</strong> stabilité, point.A elle seule, l’explication financièrene suffit cependant pas pour rendrecompte <strong>de</strong> l’aggravation <strong>de</strong>s conditions<strong>de</strong> logement <strong>de</strong>s femmes. Parfois,c’est spécifiquement en raison<strong>de</strong> leur sexe que <strong>de</strong>s femmes éprouvent,en tant que femmes, <strong>de</strong>s difficultésd’accès au logement. C’estque certains bailleurs véhiculent <strong>de</strong>sstéréotypes massifs à l’encontre <strong>de</strong>sfemmes (avec enfants <strong>de</strong> surcroît),ce qui les conduit alors à leur préférer<strong>de</strong>s locataires masculins. Il existebien une loi anti-discrimination pourcombattre ce genre <strong>de</strong> comportement(loi du 25 avril 2007), maiselle n’a pas encore déployé tous seseffets, tant s’en faut 6 .Aussi scandaleux qu’ils soient, lesrefus <strong>de</strong> louer à <strong>de</strong>s femmes (monoparentalesou non) ne doivent pasocculter d’autres formes, plus larvées,d’inégalité <strong>de</strong> traitement. À cetégard, le manque criant <strong>de</strong> grandslogements écarte du marché locatif6 Cf. entre autres, Nicolas BERNARD, «Les loisanti-discrimination et le secteur du logement(privé et social)», De nieuwe fe<strong>de</strong>rale antidiscriminatiewetten- Les nouvelles lois luttantcontre la discrimination, sous la direction<strong>de</strong> Sébastien Van Drooghenbroeck et al.,<strong>Bruxelles</strong>, La Charte, 2008, p. 797 et s.DIVERS31


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009les familles — et donc les ménagesmonoparentaux (à la tête <strong>de</strong>squelson trouve donc <strong>de</strong>s femmes dansleur gran<strong>de</strong> majorité) — aussi sûrementque les comportements discriminatoiresdu bailleur. Certes, avecl’augmentation <strong>de</strong>s séparationset divorces, la taille <strong>de</strong>s ménagess’amenuise tandis que la famille sefragmente, ce qui pourrait militer enfaveur <strong>de</strong> petits logements. Cettevue, toutefois, occulte une évolutionsociologique massive : l’émergenceparallèle <strong>de</strong> la gar<strong>de</strong> alternée <strong>de</strong>senfants. Érigé aujourd’hui en normepar défaut par la loi du 18 juillet2006, en modèle courant, ce typed’hébergement (dit «égalitaire») faitque le besoin en grands logements,loin <strong>de</strong> refluer, double quasimentpuisque désormais chaque membre<strong>de</strong> l’ex-couple ou presque doitdisposer d’une habitation susceptibled’héberger — une semaine sur<strong>de</strong>ux — la <strong>de</strong>scendance et ce, dans<strong>de</strong> bonnes conditions (<strong>de</strong> superficienotamment). En tout cas, cette évolutionsociologique n’est pas passéeinaperçue par le législateur wallonpuisque, désormais, par l’arrêté du6 septembre 2007, la société <strong>de</strong> logementsocial doit, pour la définitiondu logement dit proportionné,tenir compte «du ou <strong>de</strong>s enfantsbénéficiant <strong>de</strong> modalités d’hébergementchez l’un ou l’autre <strong>de</strong>smembres du ménage, actées dansun jugement» (art. 1 er , 15°, al. 2).À <strong>Bruxelles</strong>, sur ce point, on en estau sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> la réflexion 7 . On attend7 A cet égard, la Secrétaire d’État au Logementa déclaré que «<strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans, en effet, àla <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la société régionale du logement,je suis amenée à signer <strong>de</strong>s dérogationsdiverses. Il s’agit, notamment, <strong>de</strong>personnes (souvent <strong>de</strong>s pères) qui souhaitentaccueillir leurs enfants, dans le cadre <strong>de</strong> lagar<strong>de</strong> alternée ou non, ou tout simplementvoir leurs enfants, ce qui est crucial. Cespersonnes <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s dérogations aunombre <strong>de</strong> chambres autorisées ou encore<strong>de</strong>s dérogations au loyer à payer. On me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>toujours d’accor<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s dérogations,ce que je peux comprendre, je considèreen tout cas <strong>de</strong>s autorités qu’elless’adaptent à cette évolution familiale,partant du principe qu’un parentdivorcé risque <strong>de</strong> ne pas obtenir lagar<strong>de</strong> — même alternée — s’il nedispose pas d’un logement dotéd’un nombre suffisant <strong>de</strong> chambrespour accueillir sa progéniture (fûtceune semaine sur <strong>de</strong>ux).Il n’y a, en tout cas, pas que l’accèsau logement locatif à être marquépar <strong>de</strong>s pratiques discriminatoires.L’acquisition d’une habitation peut,elle aussi, être le théâtre <strong>de</strong> pratiquesgravement vexatoires (et, entout état <strong>de</strong> cause, illégales). Certainesbanques rechigneraient à accor<strong>de</strong>run prêt hypothécaire à unefemme seule car, plus qu’un homme,elle serait susceptible dans unavenir plus ou moins proche d’avoirun enfant à sa charge exclusive, cequi obérerait lour<strong>de</strong>ment son budgetet altérerait d’autant sa capacité<strong>de</strong> remboursement. Cependant,davantage que leurs homologuesmasculins, les femmes ont dû apprendreà gérer un budget restreintet à composer avec <strong>de</strong>s dépensesimprévues (maladies d’enfants parexemple) ou <strong>de</strong>s baisses importantes<strong>de</strong> revenus (interruptions <strong>de</strong> carrière).Et, <strong>de</strong> fait, l’expérience relatéepar <strong>de</strong>s organismes comme le Fondsdu Logement (qu’il soit bruxelloisou wallon) ou la Société wallonne<strong>de</strong> Crédit social montre que, dansce créneau particulier là, le tauxd’impayés est moindre que dans lesecteur bancaire traditionnel.même que c’est normal actuellement. [...] Jeprécise donc, chaque fois, que je ne certifiepas que la personne a la charge <strong>de</strong> l’enfant,mais que, tenant compte <strong>de</strong>s circonstances,j’autorise ces dérogations. Bien entendu,je suis d’accord avec vous : si ces <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s<strong>de</strong>vaient connaître une ampleur importante,nous ne pourrions plus continuer à procé<strong>de</strong>rainsi.» (Parlement <strong>de</strong> la <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>, Compte-rendu intégral, commissionlogement, session 2005-2006, n° 60, réuniondu 2 mai 2006, p. 3 et s.).S’il convient, en conclusion, <strong>de</strong>s’attaquer au mal-logement <strong>de</strong>sfemmes, les solutions ne sont pastoujours à trouver dans le domaine<strong>de</strong> l’habitat proprement dit. Certes,il serait opportun par exempled’étoffer l’éventail <strong>de</strong>s logements<strong>de</strong> transit pour femmes en ruptureconjugale et d’étendre l’offre d’habitationsdisposant <strong>de</strong> plusieurschambres en vue, notamment, <strong>de</strong>renforcer la capacité d’accueil <strong>de</strong>sménages monoparentaux. Des mesurescependant ont déjà été prises,notamment par le Gouvernementwallon (cf. Supra). Dans la mesure,toutefois, où les problèmes <strong>de</strong> logementdont sont victimes les femmesen priorité ne sont souvent eux-mêmesque le reflet d’une fragilité pécuniaireet sociale plus globale (etelle-même profondément sexuée),c’est également, en amont, sur lapauvreté <strong>de</strong>s femmes en généralqu’il conviendrait <strong>de</strong> concentrerses efforts (lutte contre les discriminationsprofessionnelles, augmentationdu nombre <strong>de</strong> places <strong>de</strong>crèche, extension <strong>de</strong> la couverturefinancière <strong>de</strong>s allocations familiales,etc.). On le voit, le défi est d’importance8 .Nicolas BERNARD,professeur aux Facultésuniversitaires Saint-Louis8 On trouvera <strong>de</strong> plus amples développementssur ce sujet dans Nicolas BERNARD, «Les femmes,la précarité et le mal-logement : unlien fatal à dénouer», Courrier hebdomadairedu CRISP, 2007, n° 1970.32


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009■ Le financement <strong>de</strong> la <strong>Région</strong><strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>Introduction généraleDepuis plus d’un an, le débat sur lebudget <strong>de</strong>s recettes <strong>de</strong> la <strong>Région</strong><strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> (RBC) a étéplusieurs fois évoqué dans les médiasen lien avec le ralentissement<strong>de</strong> l’activité immobilière dans la région: singulièrement, ce sont la fragilisationet le risque <strong>de</strong> diminution<strong>de</strong>s recettes qui sont ainsi mis enévi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> même que la positionspécifique, à cet égard, <strong>de</strong> la <strong>Région</strong>bruxelloise en comparaison aveccelle <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux autres <strong>Région</strong>s.Afin <strong>de</strong> mieux comprendre ces réflexions,il est intéressant <strong>de</strong> récapitulerles termes principaux quiles structurent 1 . C’est l’objectif quepoursuit cet article.Le système <strong>de</strong> fi nancementactuel <strong>de</strong>s <strong>Région</strong>sLa <strong>Région</strong> bruxelloise a connu, <strong>de</strong>puis1989, <strong>de</strong>ux systèmes <strong>de</strong> financementdifférents.La loi spéciale du 16 janvier 1989relative au financement <strong>de</strong>s communautéset <strong>de</strong>s régions 2 , prisedans la foulée <strong>de</strong> la loi spéciale du12 janvier 1989 relative aux institutionsbruxelloises et <strong>de</strong> la loi du 12janvier 1989 réglant les modalités<strong>de</strong> l’élection du Conseil <strong>de</strong> la <strong>Région</strong><strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> 3 , a créé1 Sur cette matière voir :• G. VA N D E R ST I C H E L E et M. VE R D O N C K, « Les modifications<strong>de</strong> la loi spéciale <strong>de</strong> financementdans l’accord du Lambermont », Courrierhebdomadaire, CRISP, n° 1733, 2001 ;• P. Zimmer : « La situation budgétaire <strong>de</strong> la<strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> », Courrier hebdomadaire,CRISP, n° 1941, 2006.2 Moniteur belge, 17 janvier 1989.3 Moniteur belge, 14 janvier 1989.le premier régime <strong>de</strong> financement<strong>de</strong> la <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong>,i<strong>de</strong>ntique à celui <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux autres<strong>Région</strong>s. Celui-ci valorisait la rétrocessionaux <strong>Région</strong>s <strong>de</strong> leur contributionaux recettes <strong>de</strong> l’impôt surles personnes physiques (IPP), aveccependant un système correctif <strong>de</strong>solidarité au bénéfice <strong>de</strong>s <strong>Région</strong>squi risquaient, avec ce régime, <strong>de</strong>voir leur recettes diminuer dansle temps : dans les faits, la <strong>Région</strong>wallonne, dès 1990, et la <strong>Région</strong>bruxelloise, à partir <strong>de</strong> 1997, ont bénéficié<strong>de</strong> ce régime et continuentd’en bénéficier aujourd’hui.Sur la pério<strong>de</strong> qui s’est étendue <strong>de</strong>1990 à 2001, la part d’IPP dans lesrecettes bruxelloises a représentéun peu plus <strong>de</strong> 60 % (voir tableau 1ci-<strong>de</strong>ssous).Le second système a été introduitpar les accords dits « du Lambermont» (2001) 4 et a modifié le systèmeinstauré en 1989 : il a consistéen transfert aux <strong>Région</strong>s d’impôtsopéré par la Loi spéciale du 13juillet 2001, portant refinancement<strong>de</strong>s Communautés et extension <strong>de</strong>scompétences fiscales <strong>de</strong>s <strong>Région</strong>s.Cette loi n’organisait pas un refinancement<strong>de</strong>s <strong>Région</strong>s mais bien unemodification <strong>de</strong>s sources <strong>de</strong> leursrecettes. Il s’agissait donc en principed’une opération blanche, tantpour l’Autorité fédérale que pourles <strong>Région</strong>s : chaque nouvel impôtrégional a été compensé par une réduction5 à due concurrence <strong>de</strong> l’IPPqui revenait à chaque <strong>Région</strong>.4 Loi spéciale du 13 juillet 2001 portant refinancement<strong>de</strong>s communautés et extension <strong>de</strong>scompétences fiscales <strong>de</strong>s <strong>Région</strong>s (Moniteurbelge du 3 août 2001).5 Cette réduction est appelée le « termeSuite à cette réforme du régime <strong>de</strong>financement <strong>de</strong> 2001, les impôtsdésormais régionaux sont les suivants:1.2.3.4.5.6.7.8.9.taxe sur les jeux et paris ;taxe sur les appareils automatiques<strong>de</strong> divertissement ;taxe d’ouverture <strong>de</strong>s débits <strong>de</strong>boissons fermentées ;droits <strong>de</strong> succession et <strong>de</strong> mutationpar décès ;précompte immobilier ;droit <strong>de</strong> donation ;taxe <strong>de</strong> circulation ;taxe <strong>de</strong> mise en circulation ;eurovignette ;610. re<strong>de</strong>vance Radio-TV ;11. droits d’enregistrement sur latransmission à titre onéreux <strong>de</strong>biens immobiliers ;12. droits d’enregistrement sur laconstitution d’hypothèque ;13. droits d’enregistrement sur lespartages partiels et les sessionsentre copropriétaires.En plus <strong>de</strong> cette extension d’autonomie<strong>de</strong>s <strong>Région</strong>s eu égard auxnégatif ». Il est fixé annuellement par leGouvernement fédéral par arrêté aprèsconcertation <strong>de</strong>s gouvernements régionaux.Pour <strong>de</strong>s développements voir les ouvragesmentionnés à la note <strong>de</strong> bas <strong>de</strong> page n° 1.6 L’ordonnance du 21 février 2002 modifiantla loi du 13 juillet 1987 relative aux re<strong>de</strong>vancesradio et télévision (Moniteur belge du 13mars 2002, Édition 2) a fixé à zéro le taux <strong>de</strong>la re<strong>de</strong>vance radio et télévision. Deux taxesrégionales autonomes ont alors été adaptéesafin <strong>de</strong> compenser la perte <strong>de</strong> recettes engendréepar la promulgation <strong>de</strong> ce tarif zéroeuro pour les re<strong>de</strong>vances radio et télévision.33


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009impôts régionaux, il faut ajoutercomme apport <strong>de</strong>s accords du Lambermontles capacités d’autonomie<strong>de</strong>s <strong>Région</strong>s vis-à-vis <strong>de</strong> l’IPP 7 .Enfin, pour être complet, il faut releverune nouvelle recette affectéepour la <strong>Région</strong> bruxelloise ( acquiseà l’occasion <strong>de</strong>s accords dits « duLombard ») : l’article 46 bis <strong>de</strong> la loispéciale du 12 janvier 1989 relativeaux institutions bruxelloises estvenu compléter l’article 279 <strong>de</strong> laNouvelle loi communale qui organiseun mécanisme <strong>de</strong>stiné à favoriser– et non à garantir – une meilleurereprésentation <strong>de</strong>s mandatairesflamands au niveau communal 8 .Dès l’année budgétaire 2002, <strong>de</strong>smoyens financiers spéciaux à charge<strong>de</strong> l’Autorité fédérale ont étérépartis entre les Communes dontle collège <strong>de</strong>s bourgmestre et échevinsest composé conformément àl’article 279 <strong>de</strong> la Nouvelle loi communaleou dont le centre publicd’ai<strong>de</strong> sociale est présidé conformémentau même article : le montantoctroyé annuellement transite par la<strong>Région</strong> bruxelloise qui le réaffecteaux communes bénéficiaires.Si la réforme du système <strong>de</strong> financement<strong>de</strong> 2001 a fortement modifiéla structure <strong>de</strong>s recettes <strong>de</strong>s entitésrégionales, elle n’a, par contre, pasrépondu à la critique fondamentaledu sous-financement structurel <strong>de</strong>la <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> 9 .7 Nous renvoyons pour ceci aux textes évoquésà la référence n° 1.8 N. LA G A S S E, Les accords du Lambermont etdu Lombard : approfondissement du fédéralismeou erreur d’aiguillage ?, Bruylant, 2003,pp. 180 et s.9 J.-P. LA M B ER T et al., Les mo<strong>de</strong>s alternatifs <strong>de</strong>financement <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>, CERB, avril 1999,FUSL ; P. DE BR U Y C K E R et al, « Le financement<strong>de</strong> la <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> : Étu<strong>de</strong>prospective et comparée <strong>de</strong>s villes-États enBelgique, en Allemagne et en Autriche », avril1999, ULB.34


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009La structure <strong>de</strong>s recettes <strong>de</strong> la <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> avant et après les accords du LambermontTableau 1 : Synthèse <strong>de</strong>s recettes générales <strong>de</strong> la RBC avant et après les accords du LambermontPARTIE 1 : RECETTES GÉNÉRALES Total 1990/2001TITRE 1 : LES RECETTES FISCALESTotal 2002/2009initialSection 1 : les impôts régionauxTaxe sur les jeux et paris 83.808 115.443Taxe sur les appareils automatiques et <strong>de</strong> divertissement 49.524 53.031Taxe d’ouverture <strong>de</strong>s débits <strong>de</strong> boissons fermentées 19.752 864Taxe <strong>de</strong> circulation sur les véhicules automobiles 895.214Taxe <strong>de</strong> mise en circulation 332.924Eurovignette 58.550Droits <strong>de</strong> succession 1.835.969 2.269.828Précompte immobilier 133.962 141.341Droits d’enregistrement totaux 1.004.080Droits d’enregistrement (ventes <strong>de</strong> biens immeubles) 3.425.308Droits d’enregistrement (hypothèque sur un bienimmeuble et partages <strong>de</strong> biens immeubles)273.645Droits <strong>de</strong> donation 266.540Total <strong>de</strong>s impôts immobiliers 2.974.011 6.376.662% <strong>de</strong>s recettes <strong>de</strong>s impôts immobiliersdans les recettes totales21,0 % 35,4 %Total Section 1 3.127.095 7.832.688Total Section 2 : taxes régionales autonomes 717.781 1.097.637Total Titre 1 (section 1 et 2) 3.844.858 8.930.325% recettes fiscales dans les recettes générales 27,1 % 49,5 %TITRE 2 : LES RECETTES NON FISCALES *Section 1 : la part attribuée <strong>de</strong> l’impôt <strong>de</strong>s personnes 8.562.790 5.679.694% part IPP dans les recettes générales 60,4 % 31,5 %Section 2 : les recettes non fiscales propres à la RBCMain morte 156.346 271.234Remise au travail <strong>de</strong> chômeurs 317.068 272.748Transfert en provenance <strong>de</strong> l’Agglomération <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong> 752.751 1.148.866Moyens pour les communes pour l’échevin flamand 227.937Moyens pour les compétences issues du Lambermont 25.086Autres 841.102Total section 2 1.226.166 2.786.973Total Titre 2 9.788.956 8.485.547% recettes non fiscales dans les recettes générales (Titre 2) 69,0 % 47,1 %Total partie 1 (Titre 1 + Titre 2) 13.633.814 17.415.869Autres recettes (dont recettes affectées) 546.072 610.514% autres recettes dans les recettes générales 3,9 % 3,38 %TOTAL DES RECETTES 14.179.886 18.026.383* On <strong>de</strong>vrait dire « non recettes fiscales régionales » car l’IPP participe <strong>de</strong> la fiscalité,mais du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la <strong>Région</strong> la part attribuée <strong>de</strong> l’IPP est une dotation du Fédéral.35


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009Le tableau 1 met en évi<strong>de</strong>nce, parcomparaison, la modification <strong>de</strong> lastructure <strong>de</strong>s recettes <strong>de</strong> la <strong>Région</strong>bruxelloise suite aux accords duLambermont ; il reprend les recettestotales, par source et par typeainsi que leur somme totale, surles <strong>de</strong>ux pério<strong>de</strong>s 1990/2001 et2002/2009 10 .On constate que la part d’IPP, quiprovient du Fédéral, représente,en moyenne, 60,4 % <strong>de</strong>s recettesrégionales totales sur la pério<strong>de</strong>1990/2001 et les recettes fiscalesrégionales 27,1 % ; sur cette pério<strong>de</strong>les impôts immobiliers garantissent21 % <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> la RBC.Changement assez radical après lesaccords du Lambermont : les recettesfiscales régionales – impôts ettaxes – représentent, en moyenne,49,6 % <strong>de</strong>s recettes régionales 11sur la pério<strong>de</strong> examinée 2002/2009– soit la moitié – et la part d’IPP31,5 % ; sur cette même pério<strong>de</strong> ;les impôts immobiliers garantissent,en moyenne, 35,4 % <strong>de</strong>s recettestotales <strong>de</strong> la RBC 12 .La structure <strong>de</strong>s recettes<strong>de</strong>s trois <strong>Région</strong>s avantet après les accords duLambermont (2001)Si on compare les évolutions <strong>de</strong> lastructure <strong>de</strong>s recettes pour les trois<strong>Région</strong>s avant et après les accordsdu Lambermont 13 , on constate <strong>de</strong>ssituations très différentes entre laRBC et les <strong>de</strong>ux autres <strong>Région</strong>s : lesparts d’IPP, qui représentaient, en10 Pour les années 1990 à 2006, les donnéesreprises sont les recettes réalisées ; pour 2007et 2008, ce sont les recettes ajustées et, pour2009, les recettes initiales.11 Et ceci sans tenir compte <strong>de</strong>s recettes provenant<strong>de</strong> l’ex-Agglomération qui sont aussi <strong>de</strong>srecettes fiscales et qui représentent <strong>de</strong> 6 à7% <strong>de</strong>s recettes régionales selon les années.12 Comme relevé dans le tableau.13 En prenant 2001, 2005 et 2006 comme annéestémoins.Tableau 2 : Evolution <strong>de</strong> la structure <strong>de</strong>s recettes régionales en %RBC RW R FL *Part IPP2001 61,5 76,3 75,62005 31,2 56,5 55,22006 31,2 53,9 54,3Recettes fiscales régionales2001 27,7 13,3 12,52005 50,7 35,1 41,92006 53,1 35,8 42,7Autres2001 10,8 10,3 11,92005 18,1 8,5 2,982006 15,7 10,2 2,9Total 100 100 100* Pour la <strong>Région</strong> flaman<strong>de</strong>, nous ne reprenons dans ce tableau que les strictes recettes régionales distinguéesbien entendu <strong>de</strong>s recettes <strong>de</strong> la Communauté flaman<strong>de</strong>.2001, 75 % <strong>de</strong> leurs recettes, restentclairement la source principale<strong>de</strong> recettes pour les <strong>Région</strong>s flaman<strong>de</strong>et wallonne alors que, pourla RBC, ce sont désormais les recettesfiscales régionales.C’est la différence essentielle entreles structures <strong>de</strong>s recettes <strong>de</strong>s trois<strong>Région</strong>s.C’est ce qui peut faire dire que laRBC est plus autonome financièrementque les <strong>de</strong>ux autres <strong>Région</strong>s.Il faut relever que la notion d’autonomiefiscale est ambivalente : ellepeut signifier, selon son usage, à lafois recettes ou dépenses fiscales,voire la suppression <strong>de</strong> certains impôts; ces termes n’ont, forcément,pas la même lisibilité dans la présentation<strong>de</strong> la structure <strong>de</strong>s recettes.L’ampleur <strong>de</strong> la mise en œuvre <strong>de</strong>ces nouvelles compétences fiscalesa dépendu <strong>de</strong>s marges budgétairesdont dispose chaque <strong>Région</strong> puisquetoute suppression d’impôt ou<strong>de</strong> taxe régionaux entraîne une réduction<strong>de</strong>s recettes (et ferait apparaîtrel’entité comme disposant <strong>de</strong>moindres recettes à partir <strong>de</strong> la fiscalitérégionale dans notre tableau<strong>de</strong> synthèse 2).Une diminution <strong>de</strong> la fiscalité régionalepeut, toutefois, avoir <strong>de</strong>s effetsambivalents puisqu’elle peut signifierune croissance ou une diminution<strong>de</strong>s recettes : il est clair queles réformes en matière <strong>de</strong> droitsd’enregistrement, revus à la baissedès 2002 et 2003, correspon<strong>de</strong>nten <strong>Région</strong>s flaman<strong>de</strong> et bruxelloise,à une croissance <strong>de</strong>s recettesmais c’est aussi, et surtout, le tauxd’activité et le niveau <strong>de</strong>s valeurssur leur marché acquisitif qui a permiscette croissance. « La Flandrea, dès l’élaboration <strong>de</strong> son budget2002, mis en œuvre une partie <strong>de</strong>ses nouvelles compétences fiscales :l’imposition d’un tarif zéro pour lare<strong>de</strong>vance radio-télévision et la taxed’ouverture <strong>de</strong>s débits <strong>de</strong> boissonsau 1 er janvier 2002, la modification<strong>de</strong>s mécanismes <strong>de</strong> restitution et,d’exemptions et <strong>de</strong>s taux sur lesdroits d’enregistrement au 1 er janvier2002 ainsi qu’une nouvelle modification<strong>de</strong>s taux en matière <strong>de</strong>droits <strong>de</strong> succession 14 . »14 B. BAY E N E T et S. TU R N E R, « Le pouvoir fiscal <strong>de</strong>sentités fédérées en Belgique », pp. 312 et 313in M. Mignolet, Le fédéralisme fiscal : leçons<strong>de</strong> la théorie économique et expérience<strong>de</strong> quatre états fédéraux. De BoeckUniversité, 2005.36


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009La marge <strong>de</strong> manœuvre <strong>de</strong>s <strong>de</strong>uxautres <strong>Région</strong>s, vu leur situationbudgétaire plus problématique, estplus limitée et les mesures prises ouenvisagées concernent davantageune série <strong>de</strong> réaménagements que<strong>de</strong> véritables réductions d’impôts :• la <strong>Région</strong> wallonne a mis surpied à l’époque une réforme fiscaleportant sur quatre points :la taxe sur les déchets ménagers,la radio-re<strong>de</strong>vance, le précompteimmobilier et les droits<strong>de</strong> succession ;• la <strong>Région</strong> bruxelloise a suppriméla taxe d’ouverture <strong>de</strong>s débits <strong>de</strong>boissons fermentées qui a étécompensée par une augmentation<strong>de</strong>s tarifs <strong>de</strong> la taxe sur lesappareils automatiques <strong>de</strong> divertissementet la suppression <strong>de</strong> lare<strong>de</strong>vance radio et télévision aété compensée par une modification<strong>de</strong>s tarifs <strong>de</strong> la taxe régionaleautonome en 2002. Uneréforme <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> successionet d’enregistrement est entréeen vigueur au 1 er janvier 2003.Benoît Bayenet et Samantha Turnerindiquent, cependant, la difficultéd’avoir désormais une vision consolidée<strong>de</strong> la situation <strong>de</strong>s entités enmatière d’autonomie fiscale, actantque « les budgets, notamment, <strong>de</strong>la Communauté flaman<strong>de</strong>, ne sontplus représentatifs <strong>de</strong> l’importance<strong>de</strong> la fiscalité mise en œuvre. Unepartie <strong>de</strong>s recettes propres <strong>de</strong> laCommunauté flaman<strong>de</strong> 15 est allouéeà <strong>de</strong>s services à gestion séparée(tels que le Fonds <strong>de</strong> préventionet d’assainissement en matière <strong>de</strong>protection <strong>de</strong> l’environnement et <strong>de</strong>la nature ou Fonds Mina) et n’apparaissentplus dans le budget <strong>de</strong>l’entité flaman<strong>de</strong>. La réaffectation<strong>de</strong> ces ressources explique ainsi, enpartie, le niveau <strong>de</strong> la fiscalité propredans le budget <strong>de</strong> la Commu-15 Liées aux compétences régionales.nauté flaman<strong>de</strong>. Une évaluation <strong>de</strong>ces recettes nécessite donc l’analyse<strong>de</strong>s budgets <strong>de</strong> tous les fondsbénéficiant directement <strong>de</strong>s taxesrégionales 16 . » Des évolutions <strong>de</strong>ce type se sont également développéesdans la <strong>Région</strong> bruxelloise et la<strong>Région</strong> wallonne.Pour Robert Deschamps, « cettelarge autonomie fiscale <strong>de</strong>s <strong>Région</strong>sest une bonne chose dans notre systèmefédéral : les <strong>Région</strong>s peuventexercer plus largement leur pouvoirpolitique non seulement par lechoix <strong>de</strong>s dépenses, mais aussi parla fiscalité. Elles peuvent ainsi, parexemple, mener une politique foncièrespécifique, s’attaquer <strong>de</strong> façonplus adéquate aux problèmes d’environnement,différents d’une <strong>Région</strong>à l’autre, ou réduire la fiscalitésur les revenus <strong>de</strong> leurs habitants.Une question fondamentale est <strong>de</strong>savoir si l’autonomie fiscale <strong>de</strong> chaque<strong>Région</strong> risque d’entraîner par laconcurrence <strong>de</strong>s effets défavorablespour une ou <strong>de</strong>s autres <strong>Région</strong>s oupour la stabilité du système fédéral17 . »Il reste que la taille et la spécificité<strong>de</strong>s assiettes fiscales régionalesconcernées par cette autonomie,plus importante, ne permettent pasles mêmes marges <strong>de</strong> manœuvre<strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s trois <strong>Région</strong>s.On peut retenir que le pourcentage<strong>de</strong> recettes provenant <strong>de</strong> la fiscalitérégionale autonome – taxes et impôtsrégionaux – indique autant letaux <strong>de</strong> la nécessité d’utilisation <strong>de</strong>ces recettes pour l’entité concernéequ’il n’approche son taux d’autonomiefiscale réelle.16 B . BAY E N E T et S. TU R N E R, « Le pouvoir fiscal<strong>de</strong>s entités fédérées en Belgique », op. cit.,p. 303.17 R . DE S C H A M P S , « Le fédéralisme fiscal enBelgique : financement <strong>de</strong>s entités fédérées,autonomie et concurrence fiscale, solidarités,coordination » in Le fédéralisme fiscal,De Boeck et Larcier, 2005, p. 130.La place <strong>de</strong>s impôtsimmobiliers dans la structure<strong>de</strong>s recettes <strong>de</strong> la RBCUn autre élément essentiel à mettreen évi<strong>de</strong>nce dans le débat concernela part que représentent les impôtsstrictement immobiliers dans lesrecettes régionales. Le tableau 3indique ce taux sur la pério<strong>de</strong>2002/2009 – moyenne 35,4 % (cfrtableau 1) – pour la <strong>Région</strong> bruxelloise: le taux le plus élevé rencontréest celui <strong>de</strong> 2006 : 39 %, soit quasi2/5 <strong>de</strong>s recettes.Ce taux est inférieur pour les <strong>de</strong>uxautres <strong>Région</strong>s : ainsi, en 2005, alorsqu’il était <strong>de</strong> 35,96 % pour la <strong>Région</strong>bruxelloise, il était <strong>de</strong> 29,30 % pourla <strong>Région</strong> flaman<strong>de</strong> et <strong>de</strong> 21,28 %pour la <strong>Région</strong> wallonne.37


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009Tableau 3 :les impôts immobiliers <strong>de</strong>puis 20022002 2003 2004 2005 2006 2007aj.. 2008 aj. 2009 in.Droits <strong>de</strong> succession 218.695 194.936 285.680 287.540 320.009 310.037 319.706 333.325Précompte immobilier 18.118 23.142 15.955 13.177 16.820 17.426 17.939 18.764Droits d’enregistrement (ventes<strong>de</strong> biens immeubles)Droits d’enregistrement (hypothèqueet partages <strong>de</strong> biens)303.187 360.521 388.986 410.250 469.979 493.910 540.715 511.73119.049 26.410 32.803 37.411 40.713 37.259 44.481 38.399Total <strong>de</strong>s droits d’enregistrement 322.236 386.931 421.789 447.661 510.692 531.169 585.196 550.130% <strong>de</strong>s droits d’enregistrementdans les impôts immobiliers57,1 % 63,4 % 57,6 % 56,2 % 56,5 % 58,8 % 60,2 % 57,9 %Droits <strong>de</strong> donation 4.938 5.745 8.415 47.872 55.368 45.407 48.851 47.496Total <strong>de</strong>s impôts immobiliers 563.987 610.754 731.839 796.250 902.889 904.039 971.692 949.715% <strong>de</strong>s impôts immobiliers dansles recettes générales32,3 % 34,3 % 36,1 % 35,9 % 39,0 % 35,7 % 36,7 % 34,3 %Total <strong>de</strong>s impôts régionaux 714.784 784.890 883.936 962.587 1.085.943 1.114.771 1.121.219 1.164.555Total <strong>de</strong>s taxes régionales 150.922 159.967 156.966 161.719 141.690 114.531 104.124 253 436Total <strong>de</strong>s impôts régionauxet <strong>de</strong>s taxes régionales865.706 944.857 1.040.902 1.124.306 1.227.633 1.229.302 1.225.343 1.417.991Part attribuée <strong>de</strong> l’impôt <strong>de</strong>s personnes 555.837 590.521 616.392 691.554 721.049 772.039 867.988 864.314% part IPP dans les recettes générales 31,9 % 33,2 % 30,4 % 31,2 % 31,2 % 30,50% 32,80% 31,2 %Recettes totales 1.744.289 1.780.805 2.027.248 2.217.257 2.313.179 2.531.053 2.644.762 2.767.790Le tableau 3 met aussi en évi<strong>de</strong>ncela place relative <strong>de</strong> chaque impôt immobilierdans la production <strong>de</strong> recettesbruxelloises. Globalement, sur lapério<strong>de</strong> examinée, la hiérarchie estclaire : les droits d’enregistrementont produit 58,4 % <strong>de</strong>s recettesprovenant <strong>de</strong>s impôts immobiliers,les droits <strong>de</strong> succession 35,3 %, lesdroits <strong>de</strong> donation 4,1 % et le précompteimmobilier 2,2 % <strong>de</strong>s recettesrégionales.Il faut donc remarquer que la majeurepartie <strong>de</strong>s recettes fiscales immobilières<strong>de</strong> la RBC est basée surles transactions ou les successions– <strong>de</strong>s flux – plutôt que <strong>de</strong>s stocks,qui par définition sont peu mobiles.Or, les recettes régionales seraientnettement plus prévisibles, etmieux maîtrisées, sans doute, si ellesétaient construites sur <strong>de</strong>s élémentsplus stables.Par ailleurs, ces impôts immobiliersne concernent pas que les logements: ils concernent aussi le secteurtertiaire, par exemple. À cetégard, la création prochaine d’unefuture administration fiscale régionale<strong>de</strong>vrait, à terme, permettre unemeilleure vision <strong>de</strong> l’importance etdu taux <strong>de</strong> production <strong>de</strong>s sources<strong>de</strong> ces différentes recettes et, ainsi,induire un affinement <strong>de</strong>s politiquesfiscales immobilières et <strong>de</strong> leur caractèrerégulateur.En synthèse, on peut dire, à cesta<strong>de</strong>, que la <strong>Région</strong> bruxelloise estplus captive, pour ses recettes, queles <strong>de</strong>ux autres <strong>Région</strong>s <strong>de</strong> sa fiscalitépropre et, singulièrement, <strong>de</strong>srecettes provenant <strong>de</strong> la fiscalité immobilière.Par ailleurs, l’activité sur lemarché immobilier joue <strong>de</strong> manièreambivalente sur les problématiquesdu logement : elle permet un niveau<strong>de</strong> recettes appréciable en pério<strong>de</strong>d’activité importante – et donc <strong>de</strong>smoyens pour les politiques régionales– mais, dans le même temps, elleproduit <strong>de</strong> l’exclusion par le surenchérissement<strong>de</strong>s coûts qui accompagnece type <strong>de</strong> conjoncture.Pol ZIMMER, expert,<strong>SLRB</strong>, cellule « étu<strong>de</strong>s »38


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009■ Les loyers se stabilisent à <strong>Bruxelles</strong>Les résultats <strong>de</strong> l’enquête 2008 <strong>de</strong>l’Observatoire <strong>de</strong>s loyers en <strong>Région</strong><strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> sont publiés.L’enquête porte sur un échantillon<strong>de</strong> 3.000 logements.Quelques chiffres ?Le montant moyen d’un loyeren <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> :553 euros.En 2005, il était <strong>de</strong> 508 euros.L’étu<strong>de</strong> révèle que les loyers ontaugmenté <strong>de</strong> 3% entre 2007 et2008, alors que l’indice santé estmonté <strong>de</strong> 4%.Il y aurait donc une stabilisation <strong>de</strong>l’accès au marché locatif et le rétablissementdu lien entre les loyers etl’indice santé.D’autres informations ?La publication « Observatoire <strong>de</strong>sloyers 2008 » <strong>de</strong> l’Observatoirerégional <strong>de</strong> l’Habitat est disponible<strong>de</strong>puis le 15 juin 2009 sursimple <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à la bibliothèque<strong>de</strong> la Société du Logement <strong>de</strong>la <strong>Région</strong> <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>-<strong>Capitale</strong> :tél. 02/533.19.83 – email :biblio.slrb@slrb.irisnet.be39


S.L.R.B.-INFO, N° 58 • JUIN 2009■ « Le bail <strong>de</strong> logement socialà <strong>Bruxelles</strong> et en Wallonie »Approche <strong>de</strong>scriptive,comparative et critiqueEditions Larcier, CollectionDroit immobilier, 2008Hébergeant pas moins d’un locatairesur cinq en moyenne à l’échelledu pays, le secteur du logementsocial s’impose comme un acteurincontournable <strong>de</strong> la politique <strong>de</strong>l’habitat. Et pourtant, cet acteurreste trop méconnu <strong>de</strong>s juristes. Aucroisement du droit civil (vu la nature<strong>de</strong> la convention locative) et du droitadministratif (eu égard au statut dubailleur), la réglementation du bailsocial est foncièrement hybri<strong>de</strong>, etdonc complexe. C’est à l’éclairerque s’attelle le présent ouvrage.L’approche privilégiée par les auteursse veut à la fois <strong>de</strong>scriptive (histoire<strong>de</strong> donner au lecteur une informationcomplète sur les dispositifs envigueur aussi bien à <strong>Bruxelles</strong> qu’enWallonie) et comparative (aux fins<strong>de</strong> pointer les différences entre <strong>Région</strong>s— Flandre comprise — maiségalement entre les réglementationsfédérées et le droit fédéral dubail), sans préjudice d’un essentielregard critique qui parcourt l’ouvrage(tant les textes appellent <strong>de</strong>s interprétationsmultiples).Impossible, par ailleurs, <strong>de</strong> dissocierla thématique du bail social <strong>de</strong>s missions<strong>de</strong> service public que les sociétés<strong>de</strong> logement ont à assumer.Dans quelle mesure, ainsi, la finalitésociale <strong>de</strong>s prérogatives exercéespar les bailleurs publics influe-t-ellesur la gestion et la conduite <strong>de</strong>s relationslocatives ?Enjeu social <strong>de</strong> premier ordre, enfin,le bail en vigueur dans le parcpublic se retrouve plus souvent qu’àson tour sous les feux <strong>de</strong> l’actualité.Qu’il s’agisse <strong>de</strong> l’imposition récented’un contrat à durée déterminée enWallonie (une première), <strong>de</strong> l’assujettissementéventuel du bail socialà la loi du 25 avril 2007 modifiant lerégime du bail à loyer ou encore <strong>de</strong>l’obligation pour le candidat locataired’apprendre le néerlandais enFlandre, ces questions d’actualité neseront pas oubliées.Nicolas BERNARD,Professeur aux Facultés universitairesSaint-Louis.Laurent LEMAIRE,Chercheur aux Facultés universitairesSaint-Louis.40

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