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27 e Semaine DE LA PRESSE ET DES MÉDIAS DANS L’ÉCOLE ß © CLEMI 2016<br />

Économie des pure players d’information<br />

fiches infos ⁄ conseil<br />

L’une des originalités du paysage des nouveaux médias d’information français tient au nombre<br />

et à la diversité des éditeurs numériques indépendants, couramment appelés « pure players<br />

d’information ». La plupart de ces pure players d’information ont été et sont créés par des<br />

journalistes. Il faut, parmi eux, distinguer les éditeurs d’information spécialisée et les éditeurs<br />

d’information politique et générale (IPG). C’est sur l’économie de ces derniers que porte<br />

la présente fiche.<br />

En 2015, les modèles économiques des pure players d’information<br />

diffèrent profondément selon les choix que ceux-ci ont opéré quant<br />

aux ressources sur lesquelles ils s’appuient : publicité/gratuit ou<br />

abonnement/payant ? Dans la première catégorie figurent des sites<br />

comme Rue89, Slate, Atlantico, etc. Dans la seconde se retrouvent<br />

des sites « anciens » comme Médiapart ou Arrêt sur images, mais<br />

aussi récemment créés ou qui vont ouvrir comme LeQuatreHeures<br />

ou LesJours.<br />

L’option gratuite repose sur la nécessité de constituer des<br />

audiences importantes ou très « qualifiées », qui seules intéressent<br />

les annonceurs. Elle exige également le plus souvent d’associer des<br />

ressources complémentaires telles que la formation (Rue89) ou la<br />

vente d’information à des tiers (Slate). Dans ce modèle dit gratuit<br />

rares sont les sites qui ont trouvé l’équilibre. Il exige une maîtrise<br />

très précise des coûts et notamment des effectifs et des formes de<br />

rémunération des journalistes (pigistes, stagiaires, etc.). Faute de<br />

quoi, les arrêts se sont révélés nombreux, notamment en région.<br />

C’est ce qui explique l’engouement récent pour l’approche payante,<br />

qu’est venu conforter le succès de Médiapart, avec désormais plus<br />

de 100 000 abonnés. En principe la démarche par abonnement permet<br />

de mieux doser les conditions de la montée en puissance des<br />

moyens rédactionnels et commerciaux. C’est ainsi que Médiapart<br />

devait débuter avec une rédaction d’une vingtaine de journalistes,<br />

alors qu’aujourd’hui la rédaction de ce site dépasse la trentaine<br />

pour un effectif global d’une cinquantaine de personnes. Les sites<br />

qui font leurs premiers pas dans cette voie (LeQuatreheures, Limprévu)<br />

reposent sur quelques journalistes, souvent à temps partiel.<br />

impose alors d’imaginer des regroupements ou des alliances. C’est<br />

bien ce qui se dessine autour de L’Obs, avec le rachat de Rue89 et la<br />

création de Le Plus. Des éditeurs traditionnels peuvent faire le choix<br />

de l’association avec de tels pure players, voire d’en créer, comme<br />

le fit Le Monde avec LePost. C’est aussi l’approche privilégiée par<br />

PubliHebdos (groupe Ouest-France) avec la création d’une galaxie<br />

de pure players locaux (76actu, 27actu, Normandieactu, etc.).<br />

C’est peu dire donc que l’économie des pure players d’information<br />

est diverse et évolutive, qu’il s’agisse des ressources ou des formes<br />

d’organisation et d’activités, générant des coûts moins élevés au<br />

regard des éditeurs traditionnels. Du côté des ressources, des pure<br />

players font davantage usage du « crowdfunding » via des plates<br />

formes spécialisées telles que Ulule ou KissKissBankBank, parfois<br />

en y recourant régulièrement (UpMagazine, StreetPress). Dans les<br />

manières de penser l’organisation de la production de l’information<br />

des pure players comme Rue89, LePlus, Atlantico ou HuffingtonPost<br />

ont appris à maîtriser la coproduction entre journalistes et experts<br />

(issus du public). Ce ne sont que quelques exemples qui pourraient<br />

bien marquer le fait que les pure players d’information sont des<br />

laboratoires en vraie grandeur, du point de vue éditorial, mais également<br />

de l’économie du média.<br />

Cependant, les chances de succès dans ce modèle par abonnement<br />

reposent sur l’originalité et le caractère singulier de l’information<br />

proposée. Il ne peut y avoir « de paiement d’information » par un<br />

public donné sans que celle-ci ait une valeur ajoutée reconnue<br />

que celle-ci tienne au genre (investigation, reportage, data journalisme,<br />

etc.) ou à l’angle, la sensibilité éditoriale dans lequel le<br />

public puisse se reconnaître. Telle semble être l’explication du succès<br />

de Médiapart, mais aussi d’échecs tel que celui de Dijonscope.<br />

Faut-il en conclure que l’option payante, de sites de niches en<br />

quelque sorte, est la seule qui s’imposera à terme ? Il est probable<br />

que de tels sites ont des chances de s’installer dans le paysage,<br />

moyennant une excellence éditoriale et une efficacité commerciale.<br />

Pour autant cela ne condamne pas la démarche basée sur la gratuité,<br />

qui coïncide avec les usages d’une grande partie du public,<br />

à commencer par les plus jeunes, qui bien souvent accèderont à<br />

un contenu via un réseau social ou un moteur de recherche. Cela<br />

Jean-Marie Charon, sociologue spécialiste des médias,<br />

chercheur associé à l’EHESS<br />

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