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Safae Draoui Plaquette

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Université Abdelmalek Essaadi<br />

Faculté des lettres et des sciences humaines<br />

Licence professionnelle<br />

des études cinématographiques et audio-visuelles


Sommaire


Né en 1942 à Munich, Michael Haneke grandit bercé par l'univers du cinéma. En effet, sa mère Beatrix von Degenschild est actrice et son<br />

père Fritz Haneke est metteur en scène. Après avoir étudié la philosophie et la psychologie à Vienne, Michael Haneke démarre sa carrière en<br />

montant des pièces de théâtre et en réalisant des téléfilms, notamment Les Lemmings, très remarqué par la critique.<br />

Il réalise son premier long métrage destiné au cinéma en 1989, Le Septième continent, film dépeignant le suicide progressif d'une famille. Dès<br />

ses premières réalisations, Michael Haneke se distingue par son univers conceptuel et sombre. Michael Haneke signe ses deux prochains<br />

films, Benny's video et 71 fragments d'une chronologie du hasard. Les trois longs métrages forment une trilogie basée sur des faits divers,<br />

explorant la désintégration de la sphère familiale. Ils seront tous trois sélectionnés à la Quinzaine des Réalisateurs.<br />

Michael Haneke, alors acclamé par le public français, va prendre ce dernier à rebrousse-poil en présentant son film Funny Games, l'histoire<br />

d'une famille séquestrée et décimée par deux adolescents. Bien qu'ayant défrayé la chronique, Funny Games reste l'un des chefs d'œuvre de<br />

Michael Haneke, qui a toujours assumé ce film.<br />

En 2001, Michael Haneke s'obstine à repousser les limites du 7ème art avec La Pianiste, adaptation du roman de Jelinek mettant en scène<br />

Isabelle Huppert. Bien que le film soit éprouvant pour son public, relatant la vie d'une femme tourmentée, névrotique, et consommatrice de pornographie,<br />

La Pianiste est primé par le Grand Prix du Jury à Cannes.<br />

Durant les années suivantes, Michael Haneke continue de s'entourer des meilleurs acteurs, tels Daniel Auteuil et Juliette Binoche dans Caché,<br />

et adapte Funny Games pour une version américaine. En 2009, il reçoit sa première Palme d'Or pour son film Le ruban blanc. Véritable succès,<br />

ce film rayonne bien au-delà de l'Europe, et remporte le Golden Globes du meilleur film étranger, et l'Oscar de la même catégorie.


En 2012, c'est au tour d'Amour d'être récompensé d'une Palme d'Or. Dans ce film, Michael Haneke a su mettre toute sa sensibilité au service<br />

d'un thème délicat : celui de la vieillesse. Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva y brillent de tout leur talent.<br />

En 2013, Amour, qui est un succès mondial, est récompensé par le Golden Globe, le BAFTA et l'Oscar du meilleur film étranger (premier film à<br />

réussir le triplé) et par les César majeurs : Meilleur film, Meilleur réalisateur, Meilleur acteur pour Trintignant, Meilleure actrice pour Riva et Meilleur<br />

scénario original. Il s'agit du second film de l'histoire des César qui arrive à obtenir les cinq statuettes les plus prestigieuses après Le Dernier<br />

Métro de François Truffaut en 1981. Absent de la 38e cérémonie des Césars, Haneke s'est fait représenter par sa productrice Margaret Ménégoz.<br />

Quelques mois plus tôt, il était devenu le premier long métrage à remporter les quatre trophées majeurs des prix du cinéma européen (film, réalisateur,<br />

acteur et actrice). Aucun film non-anglophone n'avait réussi à cumuler autant de récompenses avant lui.<br />

La même année, Haneke met en scène son deuxième opéra : Così fan tutte de Mozart, présenté au Teatro Real de Madrid. En 2014, il fait l'objet<br />

d'un documentaire, Michael Haneke : Profession réalisateur, réalisé par Yves Montmayeur.<br />

Son prochain film devait être Flashmob, une chronique sociale doublée d'une analyse des médias et de leur influence sur la réalité quotidienne<br />

par le phénomène des flashmobs, un rassemblement éclair de plusieurs personnes inconnues l'une pour l'autre, organisé grâce à Internet et aux<br />

réseaux sociaux. Le film fut annulé quasiment un an après son annonce, après des problèmes de préproductions.<br />

Le nouveau film du cinéaste sera finalement un film français, Happy End, qu'il tournera à l'été 2016. Le cinéaste retrouve Jean-Louis Trintignant<br />

et Isabelle Huppert pour aborder la question des migrants (une référence à l'actualité récente) à travers une famille bourgeoise du Nord Pas de<br />

Calais.


Filmographie


After Liverpool (TV) - Scénario et réalisation (d'après une pièce radiophonique de James Saunders)<br />

Sperrmüll (TV) - Réalisation<br />

Trois pas sur le lac (Drei Wege zum See) (TV) - Scénario et réalisation<br />

(d'après le roman de Ingeborg Bachmann)<br />

Lemmings (Lemminge) (TV) - Scénario et réalisation (1ère partie : Arkadien / 2è partie : Verletzungen)<br />

Variation (TV) - Scénario et réalisation<br />

Qui était Edgar Allan ? (Wer war Edgar Allan?) (TV) - Scénario et réalisation<br />

(d'après le roman de Peter Rosei)<br />

Fraulein (TV) - scénario et réalisation (sur une idée de Bernd Schroeder)<br />

Le septième continent (Der Siebente Kontinent) - scénario et réalisation<br />

Quinzaine des Réalisateurs, Cannes 1989 - Léopard de Bronze, Festival international du film de Locarno<br />

1989 - Prix de la meilleure musique et du meilleur son, Festival international du film de Flandres,Gand 1989<br />

Prix pour la distribution de films de qualité en Belgique, Bruxelles 1989 - Prix Autrichien d'Honneur du<br />

Ministère de l'Éducation et des Arts pour l'Art Cinématographique<br />

Nécrologie pour un assassin (Nachruf für einen Mörder) (TV) - Scénario et réalisation<br />

Prix Autrichien d'Honneur du Ministère de l'Education et des Arts pour l'Art Cinématographique


Benny's video - Scénario et réalisation<br />

Quinzaine des Réalisateurs, Cannes 1992 - Prix Fipresci, Thessalonique 1992 - Vienna Film Awards 1992 - Prix de la meilleure image<br />

Festival de L'Image de Film, Chalon-sur-Saône - Prix Fripesci, European Film Awards 1993 - Prix Goldener Kader du Meilleur Film,<br />

1994<br />

La rebellion (Die Rebellion) (TV) - Scénario et réalisation (d'après le roman de Joseph Roth)<br />

Prix Goldener Kader du Meilleur Téléfilm 1994, Prix du Meilleur Téléfilm de l'Éducation Nationale<br />

autrichienne 1994, Prix du Meilleur Téléfilm de l'Académie allemande des Beaux-Arts 1994<br />

71 fragments d'une chronologie du hasard (71 Fragmente einer Chronologie des Zufalls) Scénario et réalisation<br />

Quinzaine des réalisateurs, Cannes 1994 , Golden Hugo Award, Chicago Film Festival 1994 , Prix du Meilleur film, Prix du meilleur<br />

scénario<br />

- Prix de la critique, Festival international du Cinéma Fantastique de Sitges 1994<br />

Le château (Das Schloss) (TV) - Scénario et réalisation (d'après le roman de Franz Kafka)<br />

Prix du Meilleur Téléfilm de l'Éducation Nationale autrichienne 1998<br />

Funny Games - Scénario et réalisation<br />

Compétition Officielle, Cannes 1997 - Silver Hugo Award, Chicago Film Festival 1997 - Prix Fipresci<br />

Festival International du Film de Flandres, Gand 1997<br />

13ème Prix Très Spécial Communiqué de Presse, Paris 1997<br />

Konrad-Wolf-Preis pour l'ensemble de son œuvre de l'Académie des Arts, Berlin 1998<br />

Code Inconnu - Scénario et réalisation<br />

Compétition Officielle, Prix du Jury Œcuménique, Cannes 2000


La pianiste - scénario et réalisation (d'après le roman de Elfriede Jelinek)<br />

Grand Prix du Jury, Prix d'Interprétation Féminine pour Isabelle Huppert, Prix d'Interprétation Masculine pour Benoît Magimel, Cannes 2001 - Meilleure<br />

Actrice pour Isabelle Huppert, European Film Awards Berlin 2001<br />

César 2002 du Meilleur Second Rôle Féminin pour Annie Girardot - Prix de la Critique, Prix de la Meilleure Actrice pour Isabelle Huppert, Festival Kinotavr,<br />

Moscou 2002 - Romy 2002 du Meilleur Film Autrichien, Vienne 2002 - German Film Award du Meilleur Film Étranger, Berlin 2002 - Meilleure Actrice<br />

pour Isabelle<br />

Huppert, Festival de Seattle 2002.<br />

Le temps du loup - Scénario et réalisation<br />

Compétition Officielle, Cannes 2003 - Prix du Meilleur Film et Prix de la Critique, Festival international du Cinéma Fantastique de Sitges 2003.<br />

Caché - scénario et réalisation<br />

Prix de la Meilleure Mise en Scène, Prix Fipresci, Prix du Jury Œcuménique, Cannes 2005 - Prix du Jury de la Critique Internationale<br />

Prix du Public pour Christian Berger, Festival Manaki Brothers, Skopje 2005 - Prix Eurimages, Festival de Cine, Séville 2005 - Meilleur Film, Meilleur<br />

Réalisateur, Meilleur Acteur pour Daniel Auteuil, Prix Fipresci, Meilleur Montage pour Michael Hudecek et Nadine Muse<br />

European Film Awards, Berlin 2005 - Meilleur Film Étranger, Los Angeles Film Critics Association 2005 - Meilleur Film Étranger,<br />

San Francisco Film Critics Circle Awards 2005 - Nomination pour le Meilleur Film étranger, Broadcast Film Critics Association 2006 - Crystal Simorgh<br />

Prize<br />

Prix du Public, Festival du Film de Fajr, 2006 - Meilleur Scénario, Académie des Lumières 2006 - Zlota Tasma du Meilleur Film Étranger, Association des<br />

Cinéastes Polonais 2005 - Certified Fresh Rotten Tomatoes (avec un taux de 89%, Caché est parmi les films les mieux notés de l'année) - Sélection<br />

Officielle<br />

Clôture du Festival de New York 2005 - Grand Prix Diagonale pour le Meilleur Film Autrichien 2005/2006 - Prix spécial du Jury International, Festival de<br />

Durban 2006 - Goldener Kader pour Christian Berger, Vienne 2005 - Meeting Point Europe Award, Festival Cinematik de Piest'any 2006 - Prix du Meilleur<br />

Scénario, Festival de Pyongyang 2006 - Meilleur Film Étranger Indépendant, British Independent Film Awards 2006.


« Violence ,Representation ,Responsabilite :<br />

Les Films de Michael HANEKE »


“I try to give back to violence that what it truly is: pain, injury to another..”


LE SEPTIÈME CONTINENT (1993)


RÉALISATEUR : Michael Haneke<br />

CASTING : Birgit Doll, Dieter Berner, Leni Tanzer, Udo Samel,<br />

Silvia Fenz, Robert Dietl<br />

PRODUCTION : Wega Film<br />

DURÉE : 1h44<br />

ANNÉE DE PRODUCTION : 1993<br />

NATIONALITÉ : Autriche<br />

SCÉNARIO : Michael Haneke<br />

GENRE : Fiction<br />

MÉTRAGE : 2880 m<br />

FORMAT SON : Mono<br />

IMAGE : Toni Peschke<br />

SON : Karl Schlifelner<br />

MONTAGE : Marie Homolkova<br />

MUSIQUE : Alban Berg<br />

COSTUMES : Anna Georgiades<br />

CHEF DÉCORATEUR : Rudolf Czettel<br />

Synopsis : Georg et Anna forment un couple stable, cimenté par la présence de leur enfant, la<br />

petite Eva. Au fil des ans, tant de tranquillité et de sécurité ont peu à peu effiloché l'entrain de leur<br />

union. Sans y prendre garde, ils ont laissé une grise monotonie s'immiscer dans leur amour. Au bout<br />

d'un certain temps, un terrible constat s'impose à eux : cette vie ne vaut plus la peine d'être vécue.<br />

Plutôt que de trouver dans cette constatation l'énergie nécessaire au changement, ils décident d'en<br />

finir et, pour ce faire, s'enferment dans leur appartement pour s'y laisser mourir...


Michael Haneke commence sa carrière comme critique de cinéma, puis travaille durant de nombreuses années pour la télévision Allemande,<br />

mais c'est au début des années 80 qu'il se fait remarquer avec son premier long métrage, Le Septième Continent.<br />

Disposant de très peu de moyens, le réalisateur choisit de raconter un fait divers lu dans un journal, l’histoire d’une famille, à priori banale, dont<br />

les membres choisissent, un jour, de se suicider.<br />

Avec cette première œuvre, Michael Haneke décide de ne donner aucune justification à cet acte, laissant au spectateur le soin de se faire sa<br />

propre opinion sur les éventuelles raisons qui ont poussé le couple à agir ainsi.<br />

« On aurait pu faire un film à partir de l’acte en lui même, comme si ça avait été une libération pour eux. Une œuvre provocatrice, mais ça<br />

aurait été un mensonge » expliquera la réalisateur lors d’une interview<br />

Le metteur en scène envisage de raconter les faits par bribes. Trois extraits de journées vécus par la famille entre 1987 et 1989 défilent ainsi<br />

sous nos yeux.<br />

Les premières minutes du long métrages sont assez singulière puisqu’on ne voit pas les visages des personnages.<br />

Michael Haneke souhaite ainsi montrer à quel point l’ètre humain est gouverné par ses habitudes à travers des gestes répétés.<br />

Un procédé que le cinéaste répétera à de nombreuses reprises, comme lors de la scène de courses où défilent les chiffres sur un cadran, alternant<br />

avec le visage et les mains de la caissière.<br />

C'est justement dans ce coté "ordinaire" qu'on sent venir la tragédie, l'impression que tout peut basculer à n'importe quel moment. Michael<br />

Haneke laisse échapper quelques indices donnant une idée de l'issue du long métrage.


D'abord la gamine qui fait semblant d'être aveugle à l'école, une manière déjà, de se couper du monde autour, puis sa mère qui<br />

lui demande si elle s'ennuie. Plus tard, le couple passe en voiture à côté des lieux d'un accident. On peut apercevoir les civières<br />

emmenant des corps. Une fois dans le lavomatic, la mère éclatera en sanglots, comme si elle n'en pouvait plus de cette existence<br />

sans joie et de la souffrance dont elle avait été témoin.<br />

Réalisé dans un style assez froid qui caractérisera plus tard le cinéma de Michael Haneke, Le Septième Continent est une oeuvre<br />

minimaliste, mais, extrêmement efficace, qui fut d'ailleurs interdit de diffusion à la télévision Allemande, ce qui n'a rien d'étonnant<br />

quand on visionne cette oeuvre choc, désesperée, sombre et indéniablement marquante.<br />

Le cinèaste autrichien Michael Haneke est incontestablement un auteur! Pour<br />

son premier long-mètrage, il dècrit un univers glacè et oppressant sur une<br />

famille ordinaire qui bascule sans explication dans la folie suicidaire!Dans une<br />

sorte d'expèrience mètaphysique de laquelle on ne sort pas indemne, on suit<br />

presque en temps rèel l'agonie d'une famille, d'un système, d'une sociètè! Pour<br />

son coup d'essai, Haneke signe une terrifiante parabole sur le malaise profond<br />

de la sociètè moderne! Son regard clinique crèe une atmosphère particulièrement<br />

angoissante, dans un constat quasi clinique qui fait froid dans le dos!<br />

Brillant et choquant...


Benny’s Video (1992)


RÉALISATEUR : Michael Haneke<br />

CASTING : Arno Frish, Angela Winkler, Ulrich Mühe, Ingrid Stassner,<br />

PRODUCTION : Wega Film<br />

DURÉE :1h45<br />

ANNÉE DE PRODUCTION : 1993<br />

SORTIE EN FRANCE : 14 avril 1993<br />

NATIONALITÉ : Autriche, Suisse<br />

SCÉNARIO : Michael Haneke<br />

GENRE : Fiction<br />

VENTES INTERNATIONAL : Les Films du Losange<br />

MÉTRAGE : 2908 m<br />

FORMAT SON : Mono<br />

IMAGE : Christian Berger<br />

SON : Karl Schlifelner<br />

MONTAGE : Marie Homolkova<br />

COSTUMES : Erika Navas<br />

CHEF DÉCORATEUR : Christoph Kanter<br />

Synopsis : Benny, un adolescent de 14 ans, vit silencieusement avec ses parents, qui n'ont guère<br />

de temps à lui consacrer et s'en disculpent en lui procurant les instruments de sa passion, du matériel<br />

vidéo sophistiqué. Aussi Benny filme-t-il tout ce qui bouge et n'évolue-t-il qu'entre des écrans<br />

allumés. Un jour que ses parents l'ont laissé seul pour le week-end, Benny invite une jeune fille de<br />

son âge à entrer puis l'assassine froidement. Il cache le corps dans un placard et, le lendemain,<br />

montre le film du meurtre à ses parents, qui décident de tout faire pour dissimuler le crime..


Ça commence par une mise à mort filmée en vidéo. L’image n’est pas très bonne. On traîne un cochon dans une cour. Horrible et fascinant spectacle<br />

d’une agonie, là, directement sous les yeux. Retour en arrière, ralenti sur le coup fatal.<br />

Dès les premières images de Benny’s Video, nous voilà acculés à une position de fascination face à la mort en gros plan. Benny, lui, éprouve<br />

un certain plaisir à passer cette image en boucle. Cet adolescent, fils unique gâté de la bourgeoisie viennoise, ne s’intéresse plus au monde qu’à<br />

travers des images. Celles de la télévision allumée en permanence, celles de son caméscope avec lequel il filme tout et n’importe quoi, comme<br />

l’abattage de ce porc. Immergé dans son monde virtuel, il commet un meurtre de sang-froid.<br />

Enième exposé sur les dangers de la télé pour les ados, avec violences à la clé ? Au contraire. Sans jamais avancer la moindre explication,<br />

Michael Haneke se borne avec une distance glaçante à l’enchaînement logique et tragique des faits. Il ne montre pas la violence, il la suggère,<br />

et nous la laisse imaginer en la maintenant hors champ. Du meurtre filmé en plan-séquence, on ne voit rien. Ne nous parviennent que des bruits<br />

étranges, des couinements, des fragments.<br />

A la différence de Benny, le spectateur prend alors conscience de ce qui se passe réellement un réel qui finit par devenir étouffant. Notre fascination<br />

horrifiée se porte sur l’image impassible de ce visage juvénile, d’adolescent frais, innocent, totalement inexpressif, égaré dans son lointain<br />

intérieur, indifférent au bien et au mal.<br />

Chaque séquence, chaque scène, chaque plan même, est travaillé et participe à faire avancer la thèse du film. Les familles aisées modernes<br />

deviennent-elles de plus en plus froides et distantes ? Quelles sont les conséquences de ce manque certain de communication inter-familiales<br />

? Quel rôle endossent les médias dans cette absence de communication ? Des questions que Benny’s Video soulève directement, ou indirectement.<br />

Haneke montre les faits, les éléments qui pourraient contribuer à une réponse au travers de ce film ardu, qui nécessite un bon système<br />

digestif tant il est difficile à digérer ce flux d’insensibilités. Qui aime la réflexion cinématographique y prendra forcément plaisir, et verra en la<br />

personne dHaneke un génie, quitte à ne pas en ressortir indemne.


Benny's video, qui est le deuxième film de la Trilogie de la Glaciation par Haneke est du Haneke<br />

comme je l'aime (contrairement au Septième Continent avec lequel j'ai eu plus de mal). Rigoureux,<br />

avec des plans méticuleux, bien choisis et ses éternels plans fixes, surtout sur les choses<br />

qui dérangent et difficiles à regarder. Un peu dans la veine de Funny Games, il transcrit une<br />

certaine violence, fait subir au spectateur l'atrocité de l'acte et du geste, qui est pour la plupart<br />

du temps minimisée dans les films. Il rend un peu de réalité à toutes ces horreurs. La réalité,<br />

un des thèmes central de Benny's vidéo d'ailleurs. Si le personnage de Benny est un peu mou,<br />

il est en tout cas empreint d'un mutisme réellement inquiétant, dans sa condition de ce qu'on<br />

appellerait aujourd'hui un geek (écran, médias, musique à fond, machines en tout genre dans<br />

sa chambre) et ses parents ne sont pas en reste, désemparés et impuissants, déconnectés de<br />

la réalité. La voilà encore ! Il y en a des choses à dire sur ce film, ce qui est sûr, c'est qu'il est<br />

à voir !


La Pianiste (2001)


Réalisation : Michael Haneke<br />

Scénario : Michael Haneke d'après le roman éponyme (Die<br />

Klavierspielerin) d'Elfriede Jelinek<br />

Sociétés de production : MK2, Les Films Alain Sarde, Arte<br />

France Cinéma ; Wega Films<br />

Photographie : Christian Berger<br />

Montage : Monika Willi<br />

Décors : Christoph Kanter<br />

Costumes : Annette Beaufaÿs<br />

Pays d'origine : Autriche / France<br />

Tournage : à Vienne<br />

Format : Couleurs - 1,85:1 - Dolby Digital - 35 mm<br />

Genre : drame<br />

Durée : 130 minutes<br />

Date de sortie : 5 septembre 2001<br />

Film interdit aux moins de 16 ans lors de sa sortie en France<br />

Synopsis : A 40 ans, Erika Kohut, femme glaciale et dure, mène une triste existence entre<br />

ses cours de piano et l'appartement qu'elle partage toujours avec son étouffante génitrice. Un<br />

rapport sado-masochiste unit les deux femmes, la plus âgée entretenant insidieusement les<br />

névroses de la plus jeune. Complètement inhibée, la vie sexuelle d'Erika se résume à d'étranges<br />

rituels solitaires mêlant voyeurisme et auto-mutilation. Au cours d'un concert donné dans un<br />

salon privé de la bonne société autrichienne, Erika fait la connaissance de Walter Klemmer, un<br />

fougueux et arrogant jeune homme, qui se met aussitôt en tête de devenir son élève...


Dans le film "La Pianiste", le réalisateur Michael Haneke aborde des sujets très difficiles qui relèvent de la psychologie humaine. Le film n'y va<br />

pas par quatre chemins en employant une mise en scène frontale et incisive, à l'image du personnage interprété par la comédienne Isabelle Huppert.<br />

"La Pianiste" est un portrait, une chronique de notre monde moderne où la solitude, la frustration et la violence sont dépeints sans détour.<br />

Erika Kohut (Isabelle Huppert) est professeur de piano dans un conservatoire de Vienne... Ses récitals privés dans des familles bourgeoises et<br />

ses leçons de piano lui permettent d'être une femme à la position sociale assurée. Mais derrière cette façade vit un être renfermé, méprisant,<br />

hautain et qui humilie ses élèves, à la moindre occasion, en dénonçant leur manque de talent et leur incompréhension des grands maîtres du<br />

piano. C'est un personnage antipathique, névrosé, frustré que seule l'exigence de l'étude du piano à haut niveau peut, peut-être, permettre de<br />

comprendre.<br />

Le personnage d'Erika dépeint une femme-enfant, prisonnière d'une mère (Annie Girardot) abusive, bornée par les rêves qu'elle médite sur sa<br />

fille et l'amour possessif qu'elle lui porte. L'amour d'un de ses élèves sera peut-être rédempteur en touchant dans son être profond les limites<br />

de sa souffrance, de sa déviance et de son désespoir. Cet amour sans lendemain lui permettra peut-être de ne pas seulement d'éviter le sacrifice<br />

de ses élèves en les humiliant ou en mutilant leurs mains (par du verre brisé dans les poches)<br />

Erika, effondrée par la vie, tente de mettre en scène ses souffrances au lieu de prendre sur elle. Le réalisateur Haneke évoque un sadomasochisme<br />

au sens large avec sa violence et le sexe dans la suggestion. Il pose en surface ce qui nous fait et nous structure et qui représente la<br />

singularité de chacun. Dans le fond, la seule note apaisante est celle du piano, qui nous livre, ici et là, quelques belles mélodies studieusement<br />

mises en image par Haneke.<br />

Rien n’est laissé au hasard et Haneke joue admirablement avec les sentiments qu’il provoque chez son public. À preuve, la scène d’amour dans<br />

les toilettes. Elle est relativement prévisible, attendue, et pourtant elle surprend par sa rapidité. L’absence de résistance de la pianiste rend superflues<br />

toutes formes de préliminaires et prend au dépourvu un spectateur encore sous le choc de la jalousie maladive dont la professeure de<br />

piano a fait preuve quelques instants plus tôt en s’attaquant à l’une de ses élèves. L’union de Klemmer et de la pianiste promettait de n’être pas<br />

banale, mais son intensité dramatique déjoue toutes les attentes.


Le plan qui ne montre que le haut du corps du jeune homme, le visage tordu à l’approche du plaisir, a une dimension comique manifestement<br />

prévue par Haneke. Et pourtant la scène est grave puisque le déchaînement de passion ne provoque pas chez la pianiste la faille attendue. L’enjeu<br />

de la scène n’est plus la révélation qui aurait dû changer la vie de la musicienne, il n’est que l’avènement ou le non avènement du plaisir<br />

éphémère et égoïste de son partenaire. Le décalage se confirme avec le pied de nez final constitué par la chorégraphie euphorique que la<br />

frustration inspire au jeune homme...<br />

Ce passage n’est qu’un exemple de la distorsion des sentiments qui caractérise ce film. On voudrait s’attacher au comique qui revient sans<br />

cesse, mais les scènes où coule le sang placent l’ensemble de l’oeuvre dans un tout autre registre. La mutilation génitale que s’inflige la pianiste<br />

marque irrémédiablement le film du sceau de l’insoutenable. Et pourtant l’ambiguïté demeure, car on sourit encore lorsque sa mère lui parle de<br />

sa mauvaise humeur en apercevant le sang qui coule le long de sa jambe. L’atrocité de la blessure que la pianiste inflige à la jeune Shöbert<br />

n’efface pas tout à fait le rire que le trac de l’élève a suscité quelques minutes plus tôt. De même, dans la scène finale, le rire n’est pas loin du tragique<br />

tant semblent incongrus le couteau de cuisine et la petite fleur de sang qui s’épanouit sur la poitrine de la pianiste.


Un film glacial, "La pianiste" fait à peu près le même effet que tous les autres films de Haneke. Au fur et à<br />

mesure, le téléspectateur est aspiré dans une spirale froide et malsaine où l'être humain est placé au centre<br />

des attentions pour le confronter à ses propres démons. Michael Haneke a toujours aimé traité des comportements<br />

humains dans ses oeuvres. Eh bien autant dire que l'histoire d'amour qui est traitée entre les deux protagonistes<br />

est ambigu, très froide et plus que malsaine ! Benoît Magimel et Isabelle Huppert sont d'ailleurs deux<br />

excellents acteurs. L'histoire d'amour est certes bouleversante mais reste très moyenne au final, on reste légèrement<br />

sur sa faim, il y a certaines choses à éclaircir dans ce film, c'est très ambigu et ça aurait mérité d'être<br />

davantage approfondi. Et pis l'ambiance de la réalisation nous met plus que mal à l'aise, autant dire qu'un<br />

scénario avec un couple à la sexualité perturbée qui s'excite en se frappant dessus, ce n'est pas du goût de<br />

tout le monde ! On veut bien croire que ça partait d'une idée de démontrer le sadisme et le côté malsain dans<br />

une relation, mais bon voilà cela ne m'a pas mis dans le bain, j'ai plus été mal à l'aise qu'autre chose et n'ai<br />

pas eu un grand plaisir à regarder cette histoire d'amour sado-maso.


Caché (2005)


RÉALISATEUR : Michael Haneke<br />

CASTING : Daniel Auteuil, Juliette Binoche, Maurice Benichou, Annie Girardot,<br />

Bernard Le Coq, Walid Afkir,<br />

PRODUCTION : Les Films du Losange, Wega Film, Bavaria Film, Bim Distribuzione<br />

DURÉE : 1h55<br />

ANNÉE DE PRODUCTION : 2005<br />

NATIONALITÉ : France<br />

SCÉNARIO : Michael Haneke<br />

VENTES INTERNATIONAL : Les Films du Losange<br />

COPRODUCTEURS : Arte France Cinéma, France 3 Cinéma, ORF<br />

Film/Fernseh-Abkommen<br />

IMAGE : Christian Berger<br />

SON : Jean-Paul Mugel, Jean-Pierre Laforce<br />

MONTAGE : Michael Hudecek, Nadine Muse<br />

COSTUMES Lisy Christl<br />

CHEF DÉCORATEUR : Emmanuel De Chauvigny(France), Christoph Kanter<br />

(Autriche)<br />

Synopsis : Georges, journaliste littéraire, reçoit des vidéos - filmées clandestinement depuis la<br />

rue - où on le voit avec sa famille, ainsi que des dessins inquiétants et difficiles à interpréter. Il n'a<br />

aucune idée de l'identité de l'expéditeur.<br />

Peu à peu, le contenu des cassettes devient plus personnel, ce qui laisse soupçonner que l'expéditeur<br />

connaît Georges depuis longtemps.<br />

Ce dernier sent qu'une menace pèse sur lui et sur sa famille, mais comme cette menace n'est pas<br />

explicite, la police lui refuse son aide..


Michael Haneke est à son meilleur quand ses fictions et ses personnages pèsent d’un poids égal ou supérieur à sa volonté de dispositif et de message<br />

(Le Septième Continent, La Pianiste…). En revanche, Code inconnu ou Le Temps du loup n’étaient que sécheresse théorique, didactisme<br />

culpabilisant et modernité vieillotte. Le spectateur se retrouvait dans la peau d’un élève recevant des coups de règles sur les doigts de la part<br />

d’un cinéaste-instituteur assénant des leçons déjà sues.<br />

Caché appartient heureusement à la première catégorie, et cette histoire de culpabilité et de paranoïa en fait l’un des meilleurs films de son auteur.<br />

Tout commence un peu comme dans le Lost Highway de David Lynch : une famille reçoit des cassettes vidéo anonymes recelant des plans fixes<br />

de la façade de leur maison. Tout de suite, la tension et le suspense s’installent. Qui réalise ces cassettes ? Qui épie cette famille ? Pour quel<br />

motif ? Dans quel but ?<br />

Pendant la première partie, le spectateur épouse le point de vue inquiet de la famille déstabilisée. Il s’identifie à des frayeurs communes, ces<br />

cassettes constituant une variation sophistiquée de l’appel anonyme bien connu de tout le monde. Une variation sophistiquée mais bien de notre<br />

époque de démultiplication des écrans, de facilité d’accès aux images (tant côté consommation que production), de caméras de surveillance de<br />

plus en plus largement saupoudrées sur nos villes.<br />

Toujours est-il qu’Haneke réussit à installer et maintenir une angoisse croissante. Juliette Binoche s’affole, Daniel Auteuil garde une façade de<br />

calme impavide mais semble de plus en plus rongé intérieurement. Auteuil est présentateur vedette d’un talk-show culturel façon Pivot. Il semble<br />

donc puni par où il “pêche”, par l’image. Mais il sait sauver les apparences, c’est son métier. Il est possible qu’animateur télévisuel ne soit pas<br />

l’activité la plus admirable du monde, il est probable que ces gens-là soient trop payés et que leur célébrité soit disproportionnée par rapport à<br />

celle de grands chercheurs (c’est juste un exemple), mais de là à les transformer en cobayes involontaires d’un Loft Story réel, il y a de la marge.<br />

On décèle là une forme de puritanisme d’Haneke vis-à-vis de l’argent, du succès et des médias, un côté fabuliste moral, et aussi un léger degré<br />

de perversion envers ses acteurs principaux : eux aussi sont liés à l’image et à la célébrité, et nul doute que le film résonne en eux de façon particulière.<br />

Mais le plus important, c’est que l’on oublie un tant soit peu le vouloir-signifier de l’auteur et que l’on soit tenu par une histoire, une<br />

efficace mécanique de suspense.


Petit à petit, Haneke dévoile le pourquoi du comment des envois de cassettes. Sans trop déflorer le film, on peut dire qu’il est question<br />

d’une culpabilité enfouie dans l’enfance (très belle scène de trauma originel), et plus généralement de l’histoire récente de la France<br />

et de la coupure Nord-Sud. D’un film lynchéen, on passe alors à un mélange étrange entre le dernier Cronenberg, A History of<br />

Violence (retour du refoulé), et une allégorie simpliste sur la fracture (voire la facture) postcoloniale.<br />

Le côté pédago-rigide d’Haneke réapparaît ainsi en dernière instance et c’est dommage, non pas que ce qu’il dit sur le passé qui<br />

ne passe pas ne soit pas juste, mais il l’inscrit trop dans un ordre de la faute et de la punition. Il est d’ailleurs instructif de comparer<br />

ce film au Cronenberg pour s’apercevoir que, sur un sujet voisin, le Canadien se montre plus modeste, moins culpabilisant, plus<br />

cinéaste, moins Auteur, et livre un meilleur film. Mais malgré ses scories historico-didactiques, Caché mérite amplement d’être vu.


Le Ruban Blanc (2009)


RÉALISATEUR : Michael Haneke<br />

CASTING : Christian FRIEDEL, Leonie BENESCH, Ulrich TUKUR, Ursina<br />

LARDI, Michael KRANZ, Burghart KLAUSSNER<br />

PRODUCTION : Stefan Arndt (X Filme Creative Pool), Veit Heiduschka<br />

(Wega Film), Margaret Menegoz (Les films du losange), Andrea Occhipinti<br />

(Lucky Red)<br />

DURÉE : 2h25<br />

ANNÉE DE PRODUCTION : 2009<br />

SORTIE EN FRANCE : 21 octobre 2009<br />

NATIONALITÉ : Allemagne, Autriche, France, Italie<br />

SCÉNARIO : Michael Haneke, avec la contribution de Jean-Claude<br />

CarrièreVENTES INTERNATIONAL : Les films du losange<br />

IMAGE : Christian Berger<br />

SON : Guillaume Sciama, Jean-Pierre Laforce<br />

MONTAGE : Monika Willi<br />

COSTUMES : Moidele Bickel<br />

CHEF DÉCORATEUR : Christoph Kanter<br />

Synopsis : Dans un village de Prusse au début du XXe siècle. Tout y est bien rodé : chacun est<br />

à son labeur ; l'éducation est stricte et religieuse ; les enfants chantent dans la chorale dirigée par<br />

l'instituteur. C'est une société efficace, irréprochable. Jusqu'à ce qu'un cheval trébuche sur un câble<br />

tendu, blessant le docteur ; que des maris tyrannisent leur femme ; qu'on retrouve des enfants ligotés<br />

et battus ; que d'autres laissent s'exprimer le monstre cruel qui sommeille en eux. Sous la férule des<br />

adultes, les enfants voient leur épanouissement bridé. Les violences dont ils sont les victimes se<br />

répercutent dans leurs comportements. Un instituteur progressiste tente d'alerter les notables, mais<br />

ceux-ci restent sourds à ses avertissements...


Michael Haneke commence le Ruban blanc par deux déclarations. Tout d’abord, le sous-titre « Une histoire allemande d’enfants » (par opposition<br />

à « Une histoire d’enfants allemands »), tend à conférer une dimension universelle à l’histoire qui s’ouvre, avant que les premiers mots du narrateur<br />

ne semblent contredire immédiatement le propos inaugural, en réduisant sa portée à une étude des causes du nazisme. Une fois ses intentions<br />

un peu floues annoncées, Haneke entreprend une description dénonciatrice de la société fermée et quasi féodale d’un petit village du nord<br />

de l’Allemagne puritaine. Les adultes y prodiguent une éducation ultra-rigide et religieuse. Les notables du village, sous la houlette du baron et<br />

du pasteur, y protègent farouchement leurs privilèges en annihilant toute velléité de libéralisation. Mais, à la veille de la Première Guerre mondiale,<br />

l’apparente tranquillité de cette petite communauté bien réglée commence à se fissurer. Des épisodes violents dont on ne parvient pas à identifier<br />

les responsables viennent perturber le labeur quotidien et instaurer un climat d’inquiétude. Violence psychologique et violence physique s’installent<br />

alors sur le terreau fertile de ce village en se nourrissant mutuellement. Haneke montre ainsi comment le désir absolu de pureté et de droiture<br />

(représenté dans le film par l’éducation puritaine et symbolisé par le ruban blanc du titre) ne peut engendrer que le noir le plus sombre de la<br />

violence.<br />

Le Ruban blanc est une vraie réussite au niveau du casting, les acteurs étant pour la plupart bluffants de présence physique, y compris les enfants.<br />

Cette présence est intensifiée par une grande maîtrise des cadres et par un noir et blanc somptueux (que dire de ces magnifiques paysages de<br />

campagne dans lesquels les épis de blés se dissolvent dans une luminosité saturée, et qui englobent en une seule image les notions d’ordre,<br />

de pureté, de travail et de rigueur qui définissent si parfaitement les valeurs de la société décrite par Haneke ?). Mais si les personnages sont<br />

pour la plupart individuellement très réussis, c’est le tableau collectif qui soulève quelques questions. On a affaire dans Le Ruban blanc à des<br />

tortionnaires (le baron, le pasteur, le docteur), à des victimes (qui sont soit consentantes et résignées comme le père de famille paysan ou bien<br />

déjà transformées en monstres violents et incontrôlables comme la bande d’enfants), à des fuyards (la baronne) et à quelques paumés (la secrétaire<br />

du médecin, l’instituteur et sa fiancée qui, broyés eux aussi par la lourde chape du puritanisme et des conventions sociales, s’inscrivent par<br />

réflexe et par faiblesse dans le seul système qu’ils connaissent).


Mais aucun personnage adulte n’est doué d’humanité, de compassion ou de bons sentiments. Dans ce contexte, le film a malheureusement<br />

tendance à emprunter des chemins à sens unique et la démonstration s’en trouve un peu biaisée. Haneke parvient néanmoins à rectifier un peu<br />

le tir en choisissant de traiter l’histoire sur le mode du souvenir, ce qui permet de justifier – en partie – le point de vue systématiquement négatif<br />

sur ses personnages.<br />

La fameuse stratégie de distanciation du cinéaste autrichien – qui est souvent décrite comme étant destinée à détacher le spectateur de l’histoire<br />

afin de provoquer sa réflexion – est encore à l’œuvre dans Le Ruban blanc : Haneke y choisit de ne pas identifier formellement les criminels et<br />

de conserver la violence physique hors champ. Mais ce procédé a pour effet collatéral de nous tenir à distance du cœur du problème : la genèse<br />

de la violence. On aimerait pourtant l’ausculter, s’approcher de ce moment où tout bascule, appréhender les âmes au plus près. Mais, bien plus<br />

que les individus, ce sont les systèmes, les concepts, les messages qui semblent intéresser Haneke. On souhaiterait également que le film puisse<br />

exister par lui-même, qu’il puisse naître de son propre intérieur, que s’y produise une alchimie naturelle entre dialogues, personnages et mise en<br />

scène. Mais ce petit miracle, qui tient probablement à si peu de choses intangibles, ne parvient pas à se produire. On est plutôt face à une illustration<br />

– parfois virtuose mais toujours très calibrée et un peu programmatique – d’un propos humaniste que l’on ne peut cependant que cautionner.<br />

On pourrait presque qualifier ce film noir et blanc de film arc-en-ciel, où l’évidente pureté des couleurs ne parvient qu’à générer une harmonie<br />

qui manque quelque peu de raffinement.<br />

Avec son absence de musique et son magnifique noir et blanc, le film de Michael Haneke fait<br />

froid dans le dos et ne manque pas d'originalitè! Ici, le mal court sans que jamais la violence<br />

èclate! Même si la Palme d'or du festival de Cannes 2009 n'est peut-être pas le meilleur film de<br />

la sèlection ("Le prophète" de Jacques Audiard ètait un sèrieux client et pouvait ègalement<br />

prètendre à la Palme), force est de reconnaître que Haneke a rèussi une fois de plus à nous<br />

glacer les sangs, en distillant un malaise durant tout le mètrage! "Le ruban blanc" est souvent<br />

impressionnant parce que le cinèaste autrichien ne fait que suggèrer avec des images chocs<br />

(l'atroce mutilation du fils handicapè de la sage-femme). Des ombres, des lumières, sont là que<br />

pour renforcer un message, dont la misère à tous les ètages de la vie au coeur de nos villages<br />

d'Europe du XIX et XXème siècle est dènoncèe, avec des acteurs, tous remarquables, qu'ils<br />

soient adultes ou enfants! Austère, beau et dèrangeant...


Amour (2012)


REALISATION : Michael Haneke<br />

PRODUCTION : Les Films du Losange, France 3 Cinéma…<br />

AVEC : Jean-Louis Trintignant, Emmanuelle Riva, Isabelle<br />

Huppert, Alexandre Tharaud, William Shimell…<br />

SCENARIO : Michael Haneke<br />

PHOTOGRAPHIE : Darius Khondji<br />

MONTAGE : Nadine Muse<br />

ORIGINE : Allemagne, France, Autriche<br />

GENRE : Palme d’or, Drame<br />

DATE DE SORTIE : 24 octobre 2012<br />

DUREE : 2h07<br />

Synopsis : Georges et Anne sont octogénaires, ce sont des gens<br />

cultivés, professeurs de musique à la retraite. Leur fille, également<br />

musicienne, vit à l’étranger avec sa famille. Un jour, Anne est<br />

victime d’une petite attaque cérébrale. Lorsqu’elle sort de l’hôpital<br />

et revient chez elle, elle est paralysée d’un côté. L’amour qui unit<br />

ce vieux couple va être mis à rude épreuve.


CINÉMA. S’il sera bien question d’amour, la douceur suggérée par le mot sera mêlée à la douleur, celle d’une femme, d’un homme, de ce<br />

couple âgé dont le quotidien rassurant va lentement mais inexorablement à sa perte suite à l’attaque cérébrale dont est victime l’épouse. Il y a<br />

un avant et un après comme on a coutume de dire. Et c’est de cet après dont il va être question.<br />

Michael Haneke est maître dans l’art de créer une atmosphère troublante, glaçante et dérangeante au sein même d’un quotidien sur le point de<br />

perdre sa banalité. On retrouve cela dans son dernier film, qui lui a valu la Palme d’Or au Festival de Cannes, mais c’est avant tout de pudeur<br />

dont il est question, celle d’un amour qui perdure quand tout devient dur.<br />

La petite musique de la mort<br />

Anciens professeurs de piano, Anne (Emmanuelle Riva) et Georges (Jean-Louis Trintignant) vivent des jours paisibles dans leur grand appartement<br />

haussmannien, entre deux concerts de musique, leur vie est faite des petits gestes du quotidien, anodins mais communs à nous tous. La<br />

scène du concert est d’ailleurs filmée sans contrechamp : de façon spéculaire, nous nous retrouvons spectateurs d’autres spectateurs. Comme<br />

pour mieux nous dire que ce n’est pas sur scène que réside l’intérêt mais bien là, chez les gens qui regardent et écoutent, chez eux, chez<br />

nous.<br />

Car le film nous renvoie forcément à des choses vécues par soi-même ou par procuration, à savoir la diminution physique d’un proche âgé.<br />

Et c’est de l’intérieur, d’où le choix du huis clos, dans la sphère intime de quelques pièces d’appartement que le film nous fait partager la petite<br />

musique de la mort, les dernières notes d’un accord qui s’est joué à deux.<br />

Et cette musique, c’est avant tout celle du silence, plus oppressante que tout autre effet. Le générique s’inscrit sur fond noir, sans un bruit, pour<br />

mieux nous causer un choc sonore quand brutalement surgissent et l’image et le son. Ceux de l’ouverture fracassante de la porte d’entrée par<br />

les pompiers. Cette effraction marque le début et la fin puisqu’il s’agit d’une anticipation sur l’histoire à venir : Anne est morte, l’appartement n’est<br />

plus ce lieu clos, on a brisé, au sens propre comme au figuré l’intimité instaurée. Mais cela n’est plus important puisque plus rien ne vit.<br />

Cette vie fut donc bouleversée soudainement par un moment d’absence, de silence, Anne a été déconnectée de la vie pendant un petit moment<br />

puis est revenue comme si de rien n’était et pourtant tout a changé. Paralysée du côté droit, elle vit mal cette immobilité et la dépendance qu’elle<br />

engendre. Et le piano qui trône au centre du salon n’est plus que le vestige d’un passé figé. Même écouter le CD d’un de ses anciens élèves<br />

devient une épreuve. Elle préfère le silence du présent et les photos jaunies, sachant que la vie n’est désormais plus à venir.


Repli sur soi et cocon<br />

Michael Haneke utilise une majorité de plans fixes pour dépeindre ce quotidien, à l’image de cette mobilité réduite où tout mouvement est<br />

devenu un parcours du combattant, la rigidité de la réalisation joue de ce nouvel état des choses. De même, le côté labyrinthique de l’espace<br />

avec ses nombreuses portes qui s’ouvrent et se ferment, créant ainsi des endroits étriqués, devient vite ce carcan qui se referme sur ses habitants.<br />

Témoignage visuel d’un repli sur soi, il est aussi paradoxalement une protection, un cocon, Georges a en effet promis à Anne de ne jamais<br />

l’envoyer à l’hôpital. Et à la manière d’un tombeau, il condamnera d’ailleurs la chambre pour qu’elle reste le plus longtemps possible inviolée.<br />

Les dernières images montreront les portes en enfilades grandes ouvertes, le contraste est là, le sanctuaire n’ayant plus lieu d’être à ce moment.<br />

Une sobriété bouleversante<br />

La fin de vie, abordée récemment dans le film de Stéphane Brizé, "Quelques heures de printemps", trouve ici une ampleur à la fois touchante<br />

et froide car le réalisateur nous met face à la déchéance de façon parfois crue, sans effets dramatiques, simplement en nous montrant la triste<br />

réalité. Et ce face à face est parfois difficile.


Une scène marque de façon forte ce décalage qui s’instaure entre la malade et celle qui ne l’est pas. Eva (Isabelle Hupert, très juste en fille<br />

aimante mais dépassée) tente de comprendre ce que dit sa mère et doit se résoudre à avouer son échec de compréhension, ce qui la bouleverse.<br />

Georges est au final le plus pragmatique : il n’y a rien d’autre à faire que d’être là et de faire au mieux. Et c’est avec tendresse et dévouement<br />

qu’il se donne.<br />

Les deux acteurs qui vivent ce déclin, eux-mêmes âgés, concentrent beaucoup de l’émotion de l’histoire, leur rythme est celui des personnages,<br />

et, à l’instar du film, leur sobriété bouleverse plus que n’importe quelle envolée.<br />

Comme lorsque Georges aide Anne à se lever du fauteuil roulant, serrés comme pour un slow, ils semblent prêts pour un pas de danse. Il y a<br />

dans ce geste le résumé mélancolique du film : soutenir l’autre, étreindre le passé et se désenlacer, pour un instant, pour une éternité. Quand<br />

revient le silence, le spectateur y répond par le sien, on vient d’assister à quelque chose de terrible. Pour nous aussi il y aura un après, un après<br />

ce film.


Amour, de Michael Haneke, est une ode à ce que l’amour conjugal peut avoir de plus beau, de plus<br />

apuré, de respectueux et de terriblement intime aussi. Pour transcender véritablement ce moment<br />

de vie d’un couple qu’est la possible disparition de l’un d’entre eux, Haneke construit son film à la<br />

manière d’un morceau de musique choisi, calme, sans être apaisé, quoi que inéluctable parce qu’il<br />

aura forcément une fin.<br />

Les sentiments comme la douceur, la révolte, la ténacité, le désespoir sourd et enfin la détermination,<br />

rythment comme des notes de musique, à chaque fois variées, les différentes étapes de l’histoire,<br />

mais pour composer un seul et même morceau symbolisé par la quasi unité de lieu du film.<br />

Pour explorer cette ultime étape de vie qu’il s’agit de réussir, Haneke n’épargne rien et évoque tout de<br />

façon non traditionnelle, à commencer par le rapport parents-enfants. Longtemps on se souviendra<br />

de ce père (le précis Jean-Louis Trintignant) qui prie instamment et sûrement sa fille (la menue<br />

Isabelle Huppert) de se mêler de ce qui la regarde, parce que ce qui se passe au sein d’un couple<br />

ne concerne que lui.<br />

C’est la simple leçon du film : être un couple c’est l’être jusqu’au bout.


Conclusion<br />

J'ai vu la plupart des films de ce réalisateur autrichien<br />

pour avoir rédiger ce document. Et j'ai découvrit une<br />

autre figure du cinema que je n'ai jamais essayer avant un<br />

genre du cinema visé par un philosophe qui met la<br />

violence dans une forme acceptable pour le spectateur.<br />

Venu du théâtre et de la télévision, l’Autrichien a le<br />

mérite de placer la notion de représentation au centre de<br />

son œuvre, ceci en fait un cinéaste particulièrement<br />

utile, notamment dans cette manière de questionner le<br />

cinéma, et plus largement l’image, dans sa relation avec<br />

le regard du spectateur. Pour ce dernier, la position,<br />

parfois dans le rang des accusés, n’est pas des plus<br />

confortables.<br />

Le réalisateur autrichien Michael Haneke est reconnu pour<br />

les films qui explorent les questions sociales les plus<br />

pressantes de notre temps tout en poussant les limites du<br />

style avec des pratiques visuelles et sonores innovantes.<br />

Sur Michael Haneke est l'une des considérations premières<br />

et les plus étendues de l'œuvre de Haneke. Michael Haneke<br />

est à la fois une introduction au travail d'une figure<br />

majeure dans le cinéma mondial et un modèle de critique<br />

médiatique moderne. Les chercheurs d'études cinématographiques<br />

et cinématographiques, les cinéphiles et tous<br />

ceux qui s'intéressent à la culture cinématographique<br />

contemporaine apprécieront Michael Michael Haneke.

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