NYC double impression de France Meunier et Bruno Jobin
Ce livre nous montre la ville de New-York telle perçue par le regard créatif et la plume poétique de France Meunier et Bruno Jobin.
Ce livre nous montre la ville de New-York telle perçue par le regard créatif et la plume poétique de France Meunier et Bruno Jobin.
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<strong>NYC</strong><br />
<strong>double</strong> <strong>impression</strong><br />
Photos <strong>France</strong> Mercier<br />
Textes <strong>Bruno</strong> <strong>Jobin</strong>
Pour celles <strong>et</strong> ceux que New York intrigue,<br />
fascine par sa vitalité, ses contrastes, ses<br />
excès, son histoire, son <strong>de</strong>venir.
<strong>NYC</strong><br />
<strong>double</strong> <strong>impression</strong>
© <strong>France</strong> Mercier <strong>et</strong> <strong>Bruno</strong> <strong>Jobin</strong><br />
2016<br />
Tous droits réservés sur les images<br />
<strong>et</strong> les textes <strong>de</strong> ce livre.<br />
Réalisé à l'ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s services<br />
d'édition Blurb.
<strong>NYC</strong> <strong>NYC</strong><br />
<strong>double</strong> <strong>impression</strong><br />
<strong>double</strong> <strong>impression</strong><br />
Photos <strong>France</strong> Mercier<br />
Photos <strong>de</strong> <strong>France</strong> Mercier<br />
Textes <strong>Bruno</strong> <strong>Jobin</strong><br />
Textes <strong>de</strong> <strong>Bruno</strong> <strong>Jobin</strong>
1
New York, ville aux mille visages!<br />
Déambuler dans les rues <strong>de</strong> New York, voilà une<br />
aventure qui fait appel à nos sens.<br />
Lever les yeux au ciel, scruter les vitrines, faire son<br />
chemin à travers la foule, être éblouie par les enseignes<br />
clignotantes, observer les différentes couleurs <strong>de</strong> peau.<br />
Entendre le bruit du métro, les oiseaux dans Central<br />
Park, les klaxons <strong>de</strong>s taxis. Sentir l'o<strong>de</strong>ur qui émane <strong>de</strong>s<br />
camions <strong>de</strong> rue, la chaleur qui monte du métro.<br />
Découvrir les nouvelles tendances, accepter la pluralité.<br />
Passer du chaos au silence. Patiner en pleine ville, se<br />
rendre au marché, goûter la nourriture <strong>de</strong> tous les<br />
continents, visiter <strong>de</strong>s musées, aller à l'Opéra ou à<br />
Broadway. Et marcher, marcher, marcher....<br />
Plusieurs visites à New York m'ont permis d'en<br />
rapporter une multitu<strong>de</strong> d'<strong>impression</strong>s. En voici<br />
quelques-unes.<br />
Bonne promena<strong>de</strong>!<br />
<strong>France</strong> Mercier<br />
Juin 2016<br />
New York, ville en mille mots!<br />
Les mots ne remplacent pas les images, ni ne servent<br />
qu’à combler l’espace entre elles. Ils n’ont pas pour<br />
fonction <strong>de</strong> dé<strong>double</strong>r ce qui est représenté, mais bien<br />
d’y ajouter une dimension originale, d’interpeller à la<br />
manière d’un titre sur une œuvre, en glissant parfois du<br />
sens propre au sens figuré.<br />
Ce travail d’écriture est <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> l’interprétation, <strong>de</strong><br />
la mise en relief, <strong>et</strong> parfois <strong>de</strong> la fiction poétique. Il faut<br />
éviter certains pièges : ne pas attirer le spectateur hors<br />
champ, ni l’obliger à focaliser son attention sur un<br />
simple détail. En somme, il s’agit d’orienter son regard,<br />
<strong>de</strong> nourrir sa réflexion, en espérant lui faire aimer ce<br />
qu’il voit.<br />
New York est un mythe que <strong>France</strong> <strong>et</strong> moi fréquentons<br />
souvent, <strong>et</strong> qui vaut d’être perpétué, en images <strong>et</strong> en<br />
mots.<br />
Bonne lecture!<br />
<strong>Bruno</strong> <strong>Jobin</strong><br />
Juin 2016<br />
2
Au coeur <strong>de</strong> c<strong>et</strong> univers d'acier, <strong>de</strong> verre, <strong>de</strong> béton, <strong>de</strong><br />
brique, d'asphalte, votre premier réflexe est celui <strong>de</strong><br />
l'oiseau : fuir, s'envoler, en levant bien haut la tête.<br />
Le ciel quand il est bleu, les nuages quand ils sont<br />
blancs, voilà une présence naturelle qui peut apaiser<br />
c<strong>et</strong>te angoisse teintée <strong>de</strong> frénésie, qui vous étreint au<br />
premier abord.<br />
Ici <strong>et</strong> là, <strong>de</strong>s arbres vagabonds semblent avoir quitté<br />
Central Park pour donner à la ville une p<strong>et</strong>ite leçon<br />
d'humanité.<br />
À l'intérieur <strong>de</strong> ces remparts, anonymes souvent,<br />
combien imposants, l'on vit, mange, dort, travaille.<br />
Parfois encore, il arrive que chants <strong>et</strong> prières traversent<br />
les murailles.<br />
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Maintenant, baissez les yeux, comme si vous cherchiez l'horizon. En<br />
pure perte, évi<strong>de</strong>mment. Partout, <strong>de</strong>s murs pareils à <strong>de</strong>s miroirs<br />
portent à réfléchir. Sous vos pieds, le sol bouge. Peu à peu, votre<br />
imagination dérape. Les vibrations du métro annoncent-elles un<br />
séisme?<br />
New York est un cliché qui vous éclate en plein visage.<br />
D'édifice en édifice, <strong>de</strong> face ou <strong>de</strong> profil, la métropole s'interpelle<br />
étrangement. Ici <strong>et</strong> là surgissent, entre les lignes, <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> toiles<br />
improvisées par autant d'artistes hallucinés. Personne ne semble<br />
s'étonner d'un tel chaos. À part vous. Il suffirait d'en témoigner, en<br />
toute folie ou par simple fantaisie.<br />
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Vivre haut perché est un rêve <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur qui condamne au vertige. Drôles d’oiseaux,<br />
les humains. S’ils pouvaient voler, certains iraient se nicher encore plus haut, dans l’un<br />
<strong>de</strong> ces châteaux d’eau, par exemple. À <strong>NYC</strong>, "sky is the limit".<br />
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Ironiquement, Apple s’est incarnée comme un<br />
ver dans la Grosse Pomme, n’exhibant hors<br />
terre que sa tête <strong>de</strong> verre en forme <strong>de</strong> cube, au<br />
centre <strong>de</strong> Manhattan.<br />
Empruntez l’ascenseur ou l’escalier aux<br />
marches vitrées, <strong>et</strong> vous poserez le pied dans<br />
un nouveau mon<strong>de</strong>, là où le temps présent ne<br />
se conjugue plus qu’au futur.<br />
Depuis <strong>de</strong>s lunes, à p<strong>et</strong>its pas scientifiques,<br />
l’humanité fait <strong>de</strong> grands bonds.<br />
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Si Central Park est le poumon <strong>de</strong> Manhattan, un paradis que se disputent, parfois à bout <strong>de</strong> souffle, cyclistes, coureurs,<br />
marcheurs, il est aussi <strong>de</strong>venu un refuge, un lieu <strong>de</strong> culte, sans pour autant ressembler à une église, une synagogue,<br />
une mosquée.<br />
Il est accessible à tous, sans rite obligatoire, sans discrimination <strong>de</strong> race, d’origine, d’idéologie. Les arbres qui<br />
construisent le paysage y sont plus enracinés que les colonnes du temple ou les gratte-ciel dans la cité, car ils<br />
possè<strong>de</strong>nt une âme.<br />
À l’écart, tranquille sur un banc ou près d’un plan d’eau, interrompez la course du temps, <strong>et</strong> un sentiment <strong>de</strong> paix vous<br />
envahira.
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Un balcon sur l’étang, le pont <strong>de</strong>s soupirants. Un lieu béni pour les Roméo <strong>et</strong> Juli<strong>et</strong>te <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>. Il lui<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong> sa main, elle lui offre son cœur. Autrefois, c’était pour la vie, pour le meilleur <strong>et</strong> pour le pire. Promis,<br />
juré, oui-je-le-veux. Une main appuyée sur le cœur. De nos jours, il arrive que les serments soient révoqués, les<br />
paroles, envolées. L’amour ne dure que par exception.
Une idée romantique fait son bonhomme <strong>de</strong> chemin dans Central Park.<br />
Vous aurez beau la chasser, elle vous reviendra au galop, au prix d'une poignée <strong>de</strong> dollars.<br />
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N'étaient <strong>de</strong>s édifices qui ferment le décor, l'on ne se croirait pas au milieu d'une ville chiffrée à dix-neuf millions<br />
d'habitants. Et c'est sans compter les nombreux chiens new-yorkais, dont le civisme semble ici à la hauteur <strong>de</strong><br />
l'affection qu'on leur porte.<br />
Dans c<strong>et</strong>te nature qui ne se rêve qu'en couleurs, que ce soit au repos ou en mouvement, toute solitu<strong>de</strong> est inspirante.<br />
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Parcourir le M<strong>et</strong>ropolitan Museum, c'est se plonger dans l'histoire <strong>de</strong> l'humanité.<br />
Au pas ca<strong>de</strong>ncé, un siècle peut fort bien être franchi en une <strong>de</strong>mi-heure, cinq<br />
continents en un <strong>de</strong>mi-jour, mais il est impossible <strong>de</strong> tout appréhen<strong>de</strong>r vraiment.<br />
Il faudrait au moins une <strong>de</strong>mi-vie pour comprendre <strong>et</strong> gar<strong>de</strong>r en mémoire qui nous<br />
étions, hommes <strong>et</strong> femmes, ici <strong>et</strong> ailleurs, naguère <strong>et</strong> jadis.<br />
L'on se prom<strong>et</strong> toujours <strong>de</strong> reprendre le voyage au pas lent, un jour prochain ou<br />
dans une autre existence.<br />
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Imaginez une statue, prenez la pose, ne bougez<br />
plus. De face, <strong>de</strong> dos ou <strong>de</strong> profil, chaque être<br />
humain est une oeuvre d'art dont le seul<br />
avenir se conjugue au temps présent. Elle est<br />
d'autant plus précieuse qu'elle respire sous vos<br />
yeux, alors même que vous la regar<strong>de</strong>z.<br />
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Gare aux tortues <strong>et</strong> aux<br />
lapins! Des autocars <strong>de</strong><br />
touristes sillonnent<br />
paresseusement la ville,<br />
d'où s'élèvent au micro<br />
<strong>de</strong>s voix en langues<br />
étrangères, pendant que<br />
<strong>de</strong>s taxis jaunes les<br />
<strong>double</strong>nt à la vitesse<br />
grand V, entre le point A<br />
<strong>et</strong> le point B.<br />
23
Dans ces artères bondées,<br />
la voiture personnelle fait<br />
déjà figure d'anachronisme.<br />
Les transports en<br />
commun facilitent les<br />
déplacements, toutefois<br />
New York ne se livre<br />
entièrement que si l'on<br />
marche à sa rencontre.<br />
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Les fantômes <strong>de</strong> New York<br />
À une époque où la science prévaut sur la croyance, peut-on<br />
réellement concevoir l'existence d'un centre du mon<strong>de</strong>? Le<br />
peintre Dali soutenait que la gare <strong>de</strong> Perpignan occupait<br />
l'espace en question.<br />
S'il existait, le centre du mon<strong>de</strong> pourrait se situer partout, plus<br />
particulièrement au coeur <strong>de</strong> New York, à Grand Central<br />
Station, un nombril ferroviaire, le plus grand sur la planète<br />
quant au nombre <strong>de</strong> quais <strong>et</strong> <strong>de</strong> voies : 44 <strong>et</strong> 67.<br />
En ce lieu ont transité, transitent <strong>et</strong> transiteront sans doute<br />
pour longtemps encore, <strong>de</strong>s voyageurs, en multitu<strong>de</strong> comme le<br />
sont les lointaines étoiles, bien au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s 2500 miniatures<br />
qui constellent le plafond <strong>de</strong> l'enceinte.<br />
Imaginez maintenant le tableau abstrait, voire<br />
<strong>impression</strong>niste, que produirait un appareil photo qui, <strong>de</strong>puis<br />
l'ouverture <strong>de</strong> la gare en 1871, capterait en mo<strong>de</strong> ininterrompu<br />
le passage <strong>de</strong> ces millions d'êtres humains, qui sont déjà, pour<br />
la plupart d'ailleurs, arrivés à <strong>de</strong>stination, dans l'au-<strong>de</strong>là.<br />
Nous ne laissons qu'une trace fantomatique dans la mémoire<br />
<strong>de</strong> nos semblables, qui s'efface peu à peu au fil <strong>de</strong>s<br />
générations. Une métaphore pour résumer l'histoire <strong>de</strong><br />
l'humanité. En eff<strong>et</strong>, si chacun vit comme s'il était le centre du<br />
mon<strong>de</strong>, quelle empreinte tangible en reste-t-il sur la pellicule<br />
universelle?<br />
À trop s'attar<strong>de</strong>r à ce genre <strong>de</strong> réflexion, l'on risque <strong>de</strong> rater le<br />
départ <strong>de</strong> son train. Il paraît qu'à Grand Central, par égard pour<br />
les r<strong>et</strong>ardataires, les convois partiraient toujours avec une<br />
minute <strong>de</strong> r<strong>et</strong>ard.<br />
À l'écart, l'oeil complice, un chef <strong>de</strong> gare à l'ancienne veille au<br />
respect <strong>de</strong> ce délai <strong>de</strong> grâce.<br />
26
Le<br />
carrousel<br />
<strong>de</strong>s<br />
fantômes<br />
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En course contre elle-même, trois temps <strong>de</strong> la femme: bronze, argent, or.
Matière vivante, s'arrêter dans l'espace, jamais dans le temps.<br />
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Liberté soudaine, cesser tout mouvement, <strong>de</strong>venir statue, à son tour.<br />
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Au signal, à <strong>de</strong>ux ou quatre pattes,<br />
déambuler. À vol d'oiseau, les humains sont<br />
<strong>de</strong>s fourmis, accompagnées très souvent<br />
d'un chien.
Pas à pas ou par bonds prodigieux, s'élever du<br />
sol, en croyant qu'on peut réellement quitter<br />
la terre. Subliminale, la publicité donne <strong>de</strong>s<br />
ailes.<br />
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Pékin ou Shanghai en<br />
plein Manhattan.<br />
Confucius y a déposé<br />
ses pénates.<br />
Entre poissons<br />
exotiques <strong>et</strong> faux<br />
parfums <strong>de</strong> Paris, même<br />
l'air qu'on respire<br />
semble ma<strong>de</strong> in China.<br />
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Si E=mc2 reste une formule gagnante, il en va autrement <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te équation <strong>de</strong> la solitu<strong>de</strong><br />
qu'on doit résoudre à <strong>de</strong>ux, surtout si l'amour est une pure inconnue.
Voilà qui enchante le travail <strong>de</strong> la briga<strong>de</strong> :<br />
la musique adoucit les moeurs, tout en favorisant <strong>de</strong> joyeux attroupements.<br />
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Sucrée, salée, une ville où l'on peut bouffer en tout temps, partout, n'importe quoi, souvent trop.<br />
Statistiquement, jusqu'à l'obésité. Rec<strong>et</strong>te : ce qui serait mauvais doit goûter très bon. Les carottes sont cuites.
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Les USA sont un pays avec ou sans chapeau. Si<br />
on le porte, c'est avec fierté ou soumission, pour<br />
para<strong>de</strong>r ou faire la fête.<br />
Au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s têtes, le drapeau étoilé n'est<br />
jamais assez grand, ni ne flotte assez haut, du<br />
moins dans l'imagination.<br />
C'est un oncle qui serait le vrai père <strong>de</strong> la<br />
nation. Sam, <strong>de</strong> son prénom.<br />
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Plein la vue : Times Square. Passage obligé, paraît-il. Mecque pour touristes, Disneyland <strong>de</strong>s publicitaires,<br />
nombril théâtral, concentré d'Amérique. La réalité s'affiche en trompe-l'oeil, le gadg<strong>et</strong> sert d'écran au rêve.<br />
Deux yeux ne suffisent pas pour tout voir, <strong>et</strong> surtout y croire.
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Prise 1- Debout dans une rue d'après-guerre en 1945, un French Kiss jugé spontané,<br />
bientôt emblématique.<br />
Prise 2- Au lit, vers 2015, pour une suite publicitaire bien orchestrée, au vu <strong>et</strong> au su,<br />
dans un parking public.<br />
Constat. L'amour définit le sexe, à la verticale ou à l'horizontale.<br />
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Un mardi en septembre<br />
Depuis le trottoir, vous remarquez un large espace vi<strong>de</strong>,<br />
une porte vitrée refoulée vers le haut plafond. Une<br />
lumière encore allumée, mais personne à l'intérieur.<br />
Photo. Quelque part, non loin, un drame se joue.<br />
Boutique d'occasion, repaire d'Ali Baba? Nenni. Plutôt<br />
une salle d'attente, avec stationnement intégré. Les<br />
gamins adorent ce genre <strong>de</strong> camion, ils en possè<strong>de</strong>nt en<br />
miniatures, qui roulent sur le tapis. La couleur ravit, elle<br />
fascinerait un taureau.<br />
Où sont-ils donc? Ils étaient là, il y a à peine un moment.<br />
Hommes <strong>et</strong> femmes en uniforme ignifuge, casqués,<br />
drôlement pressés. L'Homme <strong>de</strong>s casernes, au pluriel, en<br />
équipe. Avec échelles, boyaux, haches. Et un méchant<br />
tintamarre en guise <strong>de</strong> m'as-tu vu, rapi<strong>de</strong>ment, dans les<br />
rues.<br />
Le téléphone a sonné, l'alerte a été donnée. Pas une<br />
minute à perdre. Une question <strong>de</strong> vie ou <strong>de</strong> mort. Un chat<br />
aurait grimpé dans un arbre? Pas c<strong>et</strong>te fois. Il y a fumée,<br />
donc feu.<br />
Tous reviendront, en principe. On reprendra la<br />
conversation, les blagues, la partie <strong>de</strong> cartes, le jeu vidéo<br />
à l'ordinateur, la lecture du journal, les chansons à la<br />
radio, les romans savons à la télé. Pour passer le temps,<br />
on le tue. En n'osant évoquer le pire.<br />
Un jour, tous ne sont pas revenus. Sur un mur, à<br />
l'extérieur, face au trottoir, une plaque <strong>de</strong> bronze<br />
explique. Y sont inscrits <strong>de</strong>s noms <strong>et</strong> prénoms, <strong>de</strong>s âges.<br />
Des visages sont immortalisés. Une pensée inspirante,<br />
sorte <strong>de</strong> prière, offre le <strong>de</strong>rnier repos.<br />
Il était une fois le onze septembre <strong>de</strong>ux mille un. Ce jourlà,<br />
l'Histoire se cherchait <strong>de</strong>s héros.<br />
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New York est une ville en perpétuelle<br />
reconstruction vers le ciel. Le pied cube y remplace<br />
à prix fort le pied carré. L'air y est taxé avant même<br />
d'être construit.<br />
En images ou en mots, résumer New York, entité<br />
complexe, paradoxale, serait vain, si tant est que<br />
l'entreprise soit même possible ou souhaitable.<br />
C'est un être collectif qui fuit vers l'avenir, tout en<br />
sublimant son passé.<br />
Le terrorisme récent a laissé <strong>de</strong>s cicatrices que<br />
l'esthétique d'un mémorial à Ground Zero tente <strong>de</strong><br />
magnifier. La sacralisation du lieu contribue à la<br />
force du symbole que représente c<strong>et</strong>te ville. Bien<br />
avant que <strong>de</strong>s avions percutent les tours, New York<br />
possédait déjà une aura mythique. À l'échelle<br />
planétaire, on la juge ou on l'admire, croyant la<br />
connaître <strong>et</strong> la comprendre. En aucun cas, elle ne<br />
laisse indifférent.<br />
Nous avons longtemps arpenté c<strong>et</strong>te ville qui ne<br />
cesse <strong>de</strong> défier l'imagination. Les photos sont celles<br />
d'une femme inspirée, dont la curiosité nourrit la<br />
passion. Les textes sont <strong>de</strong>s fragments <strong>de</strong> rêve du<br />
marcheur à ses côtés.<br />
Par beau temps, le soleil dévoile New York d'est en<br />
ouest, <strong>de</strong>puis son lever au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> Brooklyn. Par<br />
temps gris, l'orage en provenance <strong>de</strong> l'Atlantique<br />
vient assombrir ses traits, noircir ses fenêtres. Au<br />
crépuscule, sous un lampadaire à Wall Stre<strong>et</strong>,<br />
Harlem ou Central Park, voilà qu'elle <strong>de</strong>vient<br />
indéchiffrable, méconnaissable, fantasmatique.<br />
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On l'imaginera comme on veut, mais <strong>de</strong> préférence<br />
en paix, avec elle-même <strong>et</strong> le reste du mon<strong>de</strong>.
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<strong>France</strong> Mercier photographie par plaisir, curiosité<br />
<strong>et</strong> passion. Elle réinvente le mon<strong>de</strong>, à la<br />
recherche d'un sens nouveau.<br />
<strong>Bruno</strong> <strong>Jobin</strong> est l'auteur <strong>de</strong> sept romans policiers<br />
<strong>et</strong> d'un recueil <strong>de</strong> nouvelles noires. C'est sa<br />
première contribution à une oeuvre conjointe.