La Vigne Volume 2 – Ravageurs et Auxiliaires
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EDITIONS<br />
AMTRA<br />
<strong>La</strong> vigne <strong>–</strong> <strong>Volume</strong> 2 <strong>Ravageurs</strong> <strong>et</strong> <strong>Auxiliaires</strong><br />
VOLUME<br />
LA VIGNE<br />
2<br />
RAVAGEURS<br />
ET AUXILIAIRES<br />
Agroscope | Amtra<br />
LA VIGNE<br />
VOLUME<br />
2<br />
394 Pages | 175 × 225 mm<br />
<strong>La</strong>ngue : Français<br />
Parution : 2016<br />
ISBN 978-3-85928-099-1<br />
RAVAGEURS<br />
ET AUXILIAIRES<br />
CHRISTIAN LINDER<br />
PATRIK KEHRLI<br />
OLIVIER VIRET<br />
<strong>Ravageurs</strong> <strong>et</strong> <strong>Auxiliaires</strong> présente la faune<br />
très diversifiée qui fréquente la vigne, en<br />
détaillant les espèces qui la menacent mais<br />
aussi celles qui épaulent discrètement le<br />
viticulteur jour après jour. Un important<br />
chapitre est consacré aux stratégies<br />
actu elles de lutte <strong>et</strong> r<strong>et</strong>race la chronologie<br />
des mesures appliquées depuis la fin du 19 e<br />
siècle.<br />
L’équilibre a été maintenu entre images <strong>et</strong><br />
descriptions, afin de présenter de manière<br />
didactique les dégâts, les caractéristiques <strong>et</strong> les<br />
stades de développement de chaque espèce.<br />
Le pre mier niveau de lecture est à la portée de<br />
tous, moyennant un recours occasionnel au<br />
glossaire. Le second niveau, plus spécialisé, se<br />
présente hors-texte sur fond gris. L’ouvrage<br />
se termine par un glossaire <strong>et</strong> par un index<br />
thématique perm<strong>et</strong>tant de s’orienter dans<br />
les chapitres par mots-clés.<br />
Un prix spécial est accordé aux écoles.<br />
S’informer auprès de<br />
j.auer@agora-romandie.ch<br />
Auteurs : Christian Linder, Patrik Kehrli <strong>et</strong><br />
Olivier Vir<strong>et</strong><br />
EDITIONS AMTRA<br />
info@revuevitiarbohorti.ch<br />
www.revuevitiarbohorti.ch<br />
Téléphone direction/rédaction +41 79 157 13 85
LA VIGNE<br />
VOLUME<br />
2<br />
RAVAGEURS<br />
ET AUXILIAIRES<br />
Agroscope | Amtra<br />
CHRISTIAN LINDER<br />
PATRIK KEHRLI<br />
OLIVIER VIRET
I M PRESSUM<br />
© 2016 AMTRA, route de Duillier 50, 1260 Nyon 1<br />
Imprimé en Suisse<br />
Tous droits de reproduction <strong>et</strong> de traduction réservés<br />
Conception graphique: Stutz Druck AG, Wädenswil<br />
Impression: Stutz Druck AG, Wädenswil<br />
ISBN 978-3-85928-099-1<br />
AMTRA<br />
ASSOCIATION POUR<br />
LA MISE EN VALEUR DES TRAVAUX<br />
DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE<br />
www.revuevitiarbohorti.ch<br />
2 | AMTRA
LA VIGNE<br />
2<br />
RAVAGEURS<br />
ET AUXILIAIRES<br />
VOLUME<br />
CHRISTIAN LINDER, PATRIK KEHRLI<br />
ET OLIVIER VIRET<br />
EN COLLABORATION AVEC<br />
JACQUES DERRON<br />
PIERRE-JOSEPH CHARMILLOT<br />
MAURO JERMINI<br />
STÈVE BREITENMOSER<br />
SERGE FISCHER<br />
KATIA GINDRO<br />
lA vigne | 3
Préface<br />
LA VIGNE: RAVAGEURS ET AUXILIAIRES<br />
Un livre de plus, me direz-vous, <strong>et</strong> vous aurez raison puisqu’il s’agit du volume<br />
2 de la vigne d’une série de 4! A l’instar du volume 1 Maladies fongiques, il<br />
est ce qui se fait de plus beau <strong>et</strong> de plus compl<strong>et</strong> sur le thème des ravageurs<br />
<strong>et</strong> auxiliaires de la vigne en langue française. A l’heure du tout électronique,<br />
il est légitime de s’interroger sur la pertinence d’un ouvrage technique imprimé.<br />
S’il est juste de prétendre que la communication vit une véritable mutation<br />
de l’imprimé au numérique, il est aussi vrai que tout homme a besoin,<br />
dans ce monde de mouvance <strong>et</strong> plus que jamais, de pouvoir se référer à des<br />
valeurs concrètes, visibles <strong>et</strong> palpables. A c<strong>et</strong> égard, un imprimé de haute<br />
qualité trouvera toujours sa place car il incarne le savoir, là, à portée de main,<br />
accessible <strong>et</strong> disponible en tout temps!<br />
Alors que nous vivons restructuration, réorganisation <strong>et</strong> fusion, il nous est<br />
apparu important, avant que tout ne change une fois encore, de prendre le<br />
temps d’établir un bilan de nos connaissances sur la défense de la vigne.<br />
Ainsi, fidèle à une tradition bien établie, bien qu’un peu oubliée, la recherche<br />
agronomique suisse d’Agroscope présente aujourd’hui une collection intitulée<br />
<strong>La</strong> <strong>Vigne</strong> qui reprend, de façon plus ciblée, l’ouvrage la Défense des<br />
plantes cultivées publié une première fois en 1953, réédité à plusieurs reprises<br />
jusqu’en 1979 <strong>et</strong> depuis longtemps épuisé.<br />
De très nombreux progrès ont été accomplis dans la lutte contre les ravageurs<br />
ces dernières années <strong>et</strong> la matière ne manque pas: allant toujours plus au<br />
cœur des interactions entre la vigne <strong>et</strong> ses hôtes, les moyens d’intervention<br />
préventifs, biologiques <strong>et</strong> biotechniques offrent aujourd’hui de multiples<br />
alternatives efficaces à l’usage des insecticides.<br />
naviguant avec aisance du microscopique au «grandeur nature», les auteurs<br />
du volume <strong>Ravageurs</strong> <strong>et</strong> auxiliaires offrent le même confort au lecteur, en<br />
déclinant l’information en différents paliers de spécialisation:<br />
4 | PRéfAce
le premier niveau de lecture est à la portée de tous, moyennant un recours<br />
occasionnel au glossaire pour rafraîchir les notions nécessaires.<br />
b le second niveau plus spécialisé se présente hors-texte sur fond gris. il fait<br />
apparaître la part considérable qui revient aux chercheurs d’Agroscope<br />
dans le progrès des connaissances sur les ravageurs de la vigne <strong>et</strong> les moyens<br />
de maîtriser leurs dégâts.<br />
Dans tout le livre, une attention constante a été portée aux images pour venir<br />
à l’appui du texte, donner vie aux descriptions <strong>et</strong> aider à identifier les espèces<br />
nuisibles <strong>et</strong> utiles.<br />
c<strong>et</strong> ouvrage devrait combler les attentes des scientifiques, formateurs, étudiants,<br />
vulgarisateurs <strong>et</strong> du public intéressé par sa ligne claire, son format<br />
bien pensé <strong>et</strong> son iconographie exclusive. A c<strong>et</strong> égard, nous tenons à remercier<br />
chaleureusement l’équipe de l’AMTRA (Association pour la mise en valeur<br />
des travaux de la recherche agronomique suisse) <strong>et</strong> notamment les rédactrices,<br />
Mmes Judith Auer <strong>et</strong> eliane Rohrer, pour l’excellence de leur art.<br />
nous souhaitons à l’ouvrage <strong>Ravageurs</strong> <strong>et</strong> auxiliaires, ainsi qu’aux deux tomes<br />
à venir, autant de succès qu’au volume 1 Maladies fongiques, lauréat du prix<br />
de l’Oiv en 2015 dans la catégorie «viticulture». nous tenons aussi à exprimer<br />
ici notre gratitude aux auteurs christian linder, Patrick Kehrli <strong>et</strong> Olivier vir<strong>et</strong>,<br />
ainsi qu’à leurs collègues <strong>et</strong> à leurs prédécesseurs de la Station fédérale de<br />
recherche agronomique de changins, sans lesquels il eût été impossible de<br />
poursuivre nos recherches jusqu’à c<strong>et</strong>te publication.<br />
Jean-Philippe Mayor<br />
Responsable de l’Institut des sciences en<br />
Production Végétale IPV d’Agroscope<br />
PRéfAce | 5
Avant-propos<br />
INTRO DUC TION<br />
<strong>Ravageurs</strong> <strong>et</strong> <strong>Auxiliaires</strong> est le deuxième volume de la collection <strong>La</strong> <strong>Vigne</strong>. le<br />
volume 1. Maladies fongiques, récompensé par le Prix de l’Oiv 2015 dans la<br />
catégorie «viticulture», montre que le format de la collection, la qualité de<br />
l’information <strong>et</strong> de l’iconographie ont su convaincre un public international<br />
spécialisé.<br />
ce nouvel opus présente la faune très diversifiée qui fréquente le vignoble, en<br />
détaillant les espèces qui le menacent comme celles qui aident discrètement<br />
le viticulteur à les maîtriser, jour après jour.<br />
il s’adresse aussi bien aux professionnels confirmés qu’à de jeunes vignerons<br />
en formation, conseillers agricoles, enseignants, étudiants <strong>et</strong> spécialistes<br />
en entomologie viticole <strong>et</strong>, de façon plus large, à tous ceux qu’intéresse<br />
l’écosystème constitué par la vigne. les espèces nuisibles qui se sont adaptées<br />
à la vigne au cours du temps sont devenues à leur tour la proie d’autres acteurs<br />
de la chaîne alimentaire, créant ainsi un équilibre que l’homme peut faire<br />
jouer en sa faveur.<br />
comme les champignons pathogènes, les ravageurs exposés à des traitements<br />
phytosanitaires répétés développent des résistances qui ont invalidé de<br />
nombreuses matières actives. fort heureusement, la plupart d’entre eux sont<br />
aujourd’hui combattus par d’autres moyens que les insecticides, grâce aux<br />
nombreux efforts de recherche liés à la production intégrée. ce progrès,<br />
extraordinaire, a permis de fédérer les viticulteurs soucieux de la protection<br />
de l’environnement <strong>et</strong> de renforcer leur confiance dans la recherche.<br />
les stades phénologiques de la vigne, qui rythment la surveillance des espèces<br />
nuisibles, sont placés dans les premières pages. l’introduction définit la notion<br />
de ravageur <strong>et</strong> passe en revue les grands groupes faunistiques susceptibles<br />
de s’attaquer à la vigne. les caractéristiques générales des insectes <strong>et</strong><br />
des acariens, qui comptent les espèces les plus menaçantes, sont présentées<br />
pour mieux comprendre leur interaction avec la vigne. Un important chapitre<br />
sur la lutte contre les ravageurs termine c<strong>et</strong>te première partie, qui r<strong>et</strong>race les<br />
principes de lutte prophylactique, intégrée, biologique <strong>et</strong> biotechnique,<br />
6 | AvAnT-PROPOS
DESCRIPTION<br />
DES RAVAGEURS<br />
ET AUXILIAIRES<br />
FACILITÉS DE<br />
LECTURE<br />
l’historique des insecticides viticoles en Suisse, la surveillance des ravageurs<br />
au vignoble, le choix des matières actives <strong>et</strong> leur mode d’action.<br />
la partie centrale du livre, richement illustrée, fait l’inventaire des espèces<br />
problématiques <strong>et</strong> bénéfiques, en distinguant les principaux ravageurs, les<br />
ravageurs occasionnels <strong>et</strong> les auxiliaires. chaque chapitre commence par la<br />
présentation des symptômes visibles sur la vigne, suivis des caractéristiques<br />
morpho logiques <strong>et</strong> biologiques des différents arthropodes. la description<br />
des principaux ravageurs est complétée par un cycle de développement situant<br />
les périodes significatives pour la viticulture, qui s’inspire largement des<br />
dessins du Dr. Mario Baggiolini, pionnier de la production intégrée <strong>et</strong> auteur<br />
de l’ouvrage de référence <strong>La</strong> Défense des plantes cultivées. le chapitre se<br />
conclut par le suivi du ravageur au vignoble, les auxiliaires potentiels <strong>et</strong> les<br />
méthodes de lutte à appliquer si le seuil de tolérance est dépassé.<br />
Tous les chapitres se déclinent en deux niveaux de lecture: les textes<br />
sur fond blanc contiennent les informations de base, que le lecteur<br />
peut compléter par les textes sur fond gris munis d’une loupe, qui donnent un<br />
aperçu des travaux originaux d’Agroscope (l’organe de la recherche agronomique<br />
<strong>et</strong> alimentaire suisse) ou d’autres spécialistes. les mots signalés en rouge<br />
à leur première apparition dans un chapitre sont définis dans le glossaire en fin<br />
d’ouvrage. Un répertoire des noms scientifiques, français, allemands, italiens<br />
<strong>et</strong> anglais des différents ravageurs de la vigne est proposé à la fin du livre,<br />
ainsi qu’un index thématique perm<strong>et</strong>tant de faire une recherche par mot-clé.<br />
les auteurs remercient tous ceux qui ont participé activement à la réalisation<br />
de c<strong>et</strong> ouvrage, par leurs suggestions, rédaction, relecture, commentaires<br />
constructifs ou la mise à disposition d’illustrations. nous remercions tout particulièrement<br />
la direction de l’institut des sciences en production végétale<br />
d’Agroscope à changins <strong>et</strong> l’AMTRA pour leur soutien dans c<strong>et</strong> ambitieux<br />
proj<strong>et</strong> de valorisation des travaux de la recherche agronomique.<br />
Olivier Vir<strong>et</strong><br />
AvAnT-PROPOS | 7
Table des matières<br />
4 Préface<br />
6 Avant-propos<br />
INTRODUCTION<br />
12 Généralités<br />
17 Insectes<br />
27 Acariens<br />
32 Lutte contre les ravageurs viticoles<br />
32 Lutte intégrée<br />
33 Production intégrée<br />
33 Mesures prophylactiques<br />
36 Lutte biologique <strong>et</strong> biotechnique<br />
39 Utilisation des insecticides <strong>et</strong> acaricides en viticulture<br />
41 Contrôle des ravageurs<br />
45 Choix des matières actives<br />
48 Dosage, techniques d’application <strong>et</strong> gestion des produits phytosanitaires<br />
PRINCIPAUX RAVAGEURS DE LA VIGNE<br />
52 Phylloxéra<br />
66 Eudémis<br />
84 Cochylis<br />
96 Pyrale de la vigne<br />
106 Noctuelles de la vigne<br />
118 Boarmie<br />
128 Drosophile du cerisier<br />
140 Thrips de la vigne<br />
152 Punaise verte<br />
162 Cicadelle verte<br />
174 Acarien rouge<br />
188 Acarien jaune commun<br />
8 | TABle DeS MATièReS
200 Acariose de la vigne<br />
210 Erinose de la vigne<br />
VECTEURS DE VIROSES ET DE PHYTOPLASMES<br />
222 Généralités<br />
224 Cochenilles<br />
234 Cicadelle de la flavescence dorée<br />
246 Fulgore du bois noir<br />
RAVAGEURS OCCASIONNELS<br />
260 Lépidoptères<br />
274 Hyménoptères<br />
280 Diptères<br />
288 Coléoptères<br />
298 Orthoptères<br />
306 Hémiptères<br />
AUXILIAIRES<br />
316 Introduction<br />
322 Principaux parasitoïdes<br />
332 Acariens prédateurs<br />
344 Araignées <strong>et</strong> opilions<br />
356 Coccinelles<br />
364 Forficules<br />
APPENDICES<br />
372 Répertoire des noms des ravageurs en français,<br />
latin, allemand, italien <strong>et</strong> anglais<br />
378 Glossaire<br />
386 Index thématique<br />
393 Collaborations <strong>et</strong> crédit des illustrations<br />
TABle DeS MATièReS | 9
Drosophile du cerisier<br />
Drosophila suzukii (Matsumura)<br />
INTRODUCTION<br />
originaire d’extrême-orient, disséminée en Amérique du Nord <strong>et</strong> du sud, la<br />
drosophile du cerisier Drosophila suzukii a été identifiée en europe à la fin de<br />
l’année 2008. Depuis les rivages méditerranéens, c<strong>et</strong> insecte a rapidement<br />
colonisé l’europe centrale <strong>et</strong> atteint la suisse en 2011. les femelles ont un<br />
ovipositeur bien développé <strong>et</strong> denté qui leur perm<strong>et</strong> de transpercer les fruits<br />
mûrs intacts pour y pondre leurs œufs. le développement des larves à l’intérieur<br />
des fruits provoque la décomposition rapide de la pulpe <strong>et</strong> le flétrissement<br />
des fruits. Bien que le raisin ne soit pas la cible favorite du ravageur,<br />
divers cépages perm<strong>et</strong>tent le développement compl<strong>et</strong> de l’insecte. les variétés<br />
rouges précoces à pellicule fine semblent davantage attaquées par D. suzukii.<br />
lors d’années humides <strong>et</strong> chaudes, les baies véreuses constituent un<br />
point de départ pour la pourriture grise <strong>et</strong> la pourriture acétique. ces dégâts<br />
secondaires peuvent avoir un fort impact sur la qualité du vin <strong>et</strong> des conséquences<br />
économiques bien plus importantes que la perte de récolte due aux<br />
larves elles-mêmes.<br />
128 | Drosophile Du cerisier
Drosophile Du cerisier | 129
SYMPTOMES<br />
FIGURE 1<br />
FIGURE 2<br />
FIGURE 3A<br />
FIGURE 3B<br />
FIGURE 4<br />
FIGURE 5<br />
les œufs de D. suzukii se reconnaissent à deux filaments blancs visibles à la<br />
surface des baies saines (figure 1). en outre, des gouttes de jus de raisin<br />
peuvent perler là où la ponte a perforé les baies (figure 2). par la suite, les<br />
baies infestées se signalent par des p<strong>et</strong>its trous de pénétration (figure 3A). la<br />
pulpe se décompose rapidement <strong>et</strong> les raisins attaqués se décolorent progressivement,<br />
se desséchant ou pourrissant (figure 3B) selon les conditions<br />
météorologiques. signalons qu’une fois les grappes contaminées par des<br />
larves (figure 4), l’organisme nuisible ne peut plus être identifié car les stades<br />
larvaires de D. suzukii ne se distinguent pas visuellement de ceux des drosophiles<br />
communes (p. ex. D. melanogaster, voir en page 282). De ce fait, il est<br />
très difficile, voire même impossible, d’attribuer ultérieurement à une espèce<br />
précise la responsabilité des dégâts de pourriture acétique (figure 5).<br />
BILAN DE LA PREMIERE ATTAQUE IMPORTANTE DE DROSOPHILA SUZUKII<br />
DANS LE VIGNOBLE SUISSE<br />
Linder <strong>et</strong> al. 2015<br />
A la fin de l’été 2014, Drosophila suzukii a suscité pour la première fois un grand émoi dans<br />
la viticulture suisse. Présent en abondance, l’insecte s’est attaqué à de nombreux cépages<br />
rouges précoces comme le Garanoir, le Regent, le Cabern<strong>et</strong> Dorsa, le Dornfelder, le Dakapo,<br />
le Mara, l’Acolon ou le Muscat bleu. Le faible ensoleillement <strong>et</strong> les précipitations fréquentes<br />
de l’été 2014 ont été favorables à D. suzukii, mais aussi au développement des maladies<br />
fongiques <strong>et</strong> à l’éclatement de nombreuses baies après une importante absorption d’eau.<br />
C<strong>et</strong>te combinaison de facteurs a engendré la plus forte pression de pourriture acétique<br />
observée depuis 2006. Selon les cépages <strong>et</strong> les situations, l’ampleur des dégâts variait de<br />
l’anéantissement compl<strong>et</strong> de la récolte à l’absence totale de symptômes. Dans l’ensemble, la<br />
pourriture acétique a causé la perte d’environ 10 % de la récolte en Suisse, générant des<br />
travaux de tri fastidieux <strong>et</strong> une charge supplémentaire considérable lors des vendanges, qui<br />
ont été parfois anticipées pour préserver la qualité du raisin. Un lien de causalité absolu n’a<br />
pas pu être établi entre D. suzukii <strong>et</strong> la pourriture acétique.<br />
ORGANISME<br />
RESPONSABLE<br />
la drosophile du cerisier est observée au Japon dès 1916, mais ce n’est qu’en<br />
1931 que Matsumura la décrit sous le nom de Leucophenga suzukii. Kanzawa<br />
(1935) la renomme par la suite Drosophila suzukii. Aujourd’hui, ce diptère de<br />
la famille des Drosophilidae porte aussi le nom de drosophile à ailes tach<strong>et</strong>ées<br />
ou de moucheron asiatique. les adultes de D. suzukii mesurent 2 à 4 mm<br />
130 | Drosophile Du cerisier
A<br />
B<br />
FIGURE 1<br />
Œuf de D. suzukii à la base du pédicelle d’une baie de raisin rouge (A) <strong>et</strong> dans un raisin de cépage blanc (B).<br />
A<br />
B<br />
FIGURE 2<br />
Ecoulement de jus de raisin à partir du site de ponte à la surface d’une baie (A) <strong>et</strong> sur une grappe (B).<br />
Drosophile Du cerisier | 131
A<br />
B<br />
FIGURE 3<br />
Perforation de D. suzukii dans une baie fraîche (A) qui se dessèche par la suite (B).<br />
FIGURE 4<br />
<strong>La</strong>rves de drosophiles sortant d’une baie<br />
de raisin rouge.<br />
FIGURE 5<br />
Grappe de Gamay infestée de drosophiles <strong>et</strong> atteinte<br />
de pourriture acétique.<br />
132 | Drosophile Du cerisier
FIGURE 6A<br />
FIGURE 6B<br />
FIGURE 6C<br />
FIGURE 7<br />
FIGURE 8<br />
FIGURE 9<br />
avec une envergure de 6 à 8 mm (Kanzawa 1935). leurs yeux sont rouges <strong>et</strong><br />
leur corps brun jaunâtre. les mâles se reconnaissent aisément à la tache noirâtre<br />
qu’ils portent à l’extrémité de chaque aile (figure 6A), absente chez les<br />
espèces européennes de drosophile. parfois, ces taches alaires sont très claires<br />
ou même inexistantes chez certains jeunes mâles. ceux-ci peuvent alors être<br />
identifiés par deux rangées de soies situées sur les tarses antérieurs. les femelles<br />
(figure 6B) ressemblent fortement aux drosophiles communes mais se<br />
distinguent par leur puissant ovipositeur fortement sclérotisé <strong>et</strong> muni de<br />
grandes dents noires (figure 6c). les œufs de 0,2 à 0,6 mm de long sont pondus<br />
individuellement dans les fruits. D’un blanc laiteux, ils sont ovales avec<br />
deux fins filaments respiratoires blancs caractéristiques (figures 1 <strong>et</strong> 7). les<br />
larves apodes sont de forme cylindrique; leur taille varie de 0,7 x 0,2 mm au<br />
premier stade à 3,9 x 0,9 mm au troisième. elles sont de couleur blanc-crème<br />
(figure 8) <strong>et</strong> possèdent des spinules postérieures. les pupes brun-rougeâtre<br />
font 3 x 1 mm <strong>et</strong> sont pourvues d’excroissances (figure 9), des tubes respiratoires<br />
d’environ 0,3 mm qui portent 7 à 8 branches en éventail à leur extrémité<br />
(Kanzawa 1935; eppo 2013). la forme des branches en éventail est caractéristique<br />
<strong>et</strong> perm<strong>et</strong> de distinguer les pupes de D. suzukii de celles des<br />
drosophiles européennes communes.<br />
BIOLOGIE ET<br />
EPIDEMIOLOGIE<br />
FIGURE 10<br />
Drosophila suzukii hiverne sous forme adulte (figure 10). en europe <strong>et</strong> aux<br />
<strong>et</strong>ats-unis, les individus hivernants sont souvent plus foncés <strong>et</strong> plus grands<br />
que la forme estivale (Vonlanthen <strong>et</strong> Kehrli 2015). Durant l’hiver, ils se cachent<br />
notamment sous le feuillage persistant <strong>et</strong> les feuilles mortes, sortant de leurs<br />
abris <strong>et</strong> cherchant activement de la nourriture dès que la température le perm<strong>et</strong>.<br />
Au printemps, les femelles commencent à pondre dès que des fruits sont<br />
disponibles. Après trois stades larvaires, les asticots sortent des fruits, se pupifient<br />
puis émergent sous forme adulte. sous nos climats, le vol des adultes<br />
peut se succéder sans interruption durant toute l’année. la durée de vie<br />
moyenne d’un adulte est de trois à neuf semaines, mais celle des individus<br />
hivernants peut dépasser six mois. le développement de l’œuf à l’adulte varie<br />
en fonction de la température <strong>et</strong> de la plante hôte, d’environ trente jours au<br />
printemps <strong>et</strong> en automne à seulement dix jours en plein été (Kanzawa 1935;<br />
emiljanowicz <strong>et</strong> al. 2014). le nombre exact de générations par année est<br />
difficile à établir à cause de leur chevauchement, mais oscille entre 5 <strong>et</strong> 12<br />
Drosophile Du cerisier | 133
A<br />
B<br />
C<br />
FIGURE 6<br />
Mâle avec les deux points noirs caractéristiques à l’extrémité des ailes (fl èches) (A) <strong>et</strong> femelle (B) de D. suzukii.<br />
Gros plan de l’ovipositeur denté (C).<br />
134 | Drosophile Du cerisier
FIGURE 7<br />
Œuf de D. suzukii avec ses deux fi laments.<br />
FIGURE 8<br />
<strong>La</strong>rve de D. suzukii.<br />
FIGURE 9<br />
Pupe de D. suzukii.<br />
Drosophile Du cerisier | 135
Milieux naturels<br />
Baies sauvages <strong>et</strong> cultivées, cerises, prunes, pruneaux, raisin…<br />
Milieux naturels<br />
larves<br />
pupes<br />
oeufs<br />
Adultes<br />
5 à 12 générations<br />
HIVER PRINTEMPS ÉTÉ AUTOMNE<br />
FIGURE 10<br />
Cycle de développement de la drosophile du cerisier (Drosophila suzukii).<br />
136 | Drosophile Du cerisier
selon la température <strong>et</strong> la situation géographique. la température optimale<br />
pour le développement de D. suzukii est d’environ 25 °c. Au-dessus de 30 °c,<br />
les mâles deviennent temporairement stériles <strong>et</strong>, dès 32 °c, les femelles ne<br />
pondent plus (cini <strong>et</strong> al. 2012). Dans l’ensemble, l’insecte préfère les climats<br />
tempérés <strong>et</strong> les habitats plutôt humides <strong>et</strong> ombragés. Très polyphage, D. suzukii<br />
peut se développer sur une quantité de fruits cultivés <strong>et</strong> sauvages mûrissant<br />
tout au long de l’année. l’insecte est fortement attiré par tous les fruits<br />
foncés, tendres <strong>et</strong> à épiderme fin pour y pondre ses œufs. par conséquent, la<br />
liste des plantes hôtes contient beaucoup de rosaceae telles que cerises,<br />
framboises, ronces, fraises, prunes, pêches <strong>et</strong> abricots, de nombreuses espèces<br />
de sureau, de chèvrefeuille <strong>et</strong> de cornouiller ou encore la myrtille, le<br />
lierre ou la vigne (cini <strong>et</strong> al. 2012). A l’aide de leur ovipositeur denté, les femelles<br />
de D. suzukii pondent en moyenne près de 400 œufs dans des fruits<br />
sains. ce premier dégât fournit une brèche aux champignons ou aux bactéries<br />
<strong>et</strong> stimule par ailleurs la colonisation des drosophiles communes. Bien<br />
que le raisin ne soit pas son menu préféré, D. suzukii peut endommager divers<br />
cépages (linder <strong>et</strong> al. 2013; ioriatti <strong>et</strong> al. 2015). De nombreuses observations<br />
indiquent que, la plupart du temps, les cépages blancs sont moins colonisés<br />
que les variétés rouges, roses ou aromatiques. le risque d’infestation<br />
augmente également avec la maturité du raisin, la précocité du cépage, la<br />
finesse de la pellicule, la compacité des grappes, la densité du feuillage dans<br />
la zone des grappes <strong>et</strong> la hauteur de l’enherbement. en général, l’insecte est<br />
plus abondant dans les parcelles à proximité des forêts, des haies, des vergers<br />
de fruits à noyau ou des cultures de baies que dans les grandes zones de<br />
monoculture viticole. en résumé, l’intensité des attaques est donc fortement<br />
liée aux cépages, aux pratiques agronomiques, au microclimat <strong>et</strong> aux conditions<br />
environnementales (linder <strong>et</strong> al. 2015). l’incidence des attaques de D.<br />
suzukii sur le développement de la pourriture acétique est encore difficile à<br />
évaluer car, jusqu’ici, le taux de pourriture acétique à la récolte a rarement<br />
été corrélé avec le nombre de pontes. le rôle exact de D. suzukii dans le développement<br />
de c<strong>et</strong>te maladie doit encore être clarifié.<br />
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PREFERENCES DE DROSOPHILA SUZUKII POUR L’OVIPOSITION ET SENSIBILITE DE<br />
DIVERS CEPAGES<br />
Linder <strong>et</strong> al. 2013<br />
Des études conduites par Agroscope en laboratoire ont confirmé que l’oviposition de Drosophila<br />
suzukii était possible dès le début de la véraison. Les femelles déposent leurs œufs dans<br />
les baies intactes, mais la ponte est plus abondante dans des raisins préalablement blessés.<br />
Cependant, aucun des œufs pondus à une époque aussi précoce ne s’est développé jusqu’au<br />
stade adulte. Dans des essais menés avant les vendanges sur divers cépages, les taux de<br />
développement de l’œuf à l’adulte sont restés inférieurs à 9 %. Le cépage rouge Bondol<strong>et</strong>ta<br />
est apparu comme le plus favorable à la ponte de l’insecte, suivi du Gamay, du Pinot noir, du<br />
Divico <strong>et</strong> des deux cépages blancs Müller-Thurgau <strong>et</strong> Chasselas. Ce constat confirme la<br />
moindre attractivité des cépages blancs par rapport aux rouges. Parmi ces derniers, l’épaisseur<br />
de l’épiderme des baies est prépondérante pour le nombre d’œufs pondus (Ioriatti <strong>et</strong> al.<br />
2015).<br />
CONTROLES<br />
ET SEUILS<br />
les adultes sont attirés par l’odeur du vinaigre, des levures <strong>et</strong> d’autres substances<br />
volatiles (hamby <strong>et</strong> al. 2012; Keesey <strong>et</strong> al. 2015). leur utilisation dans<br />
des pièges alimentaires perm<strong>et</strong> de surveiller l’évolution des populations de<br />
D. suzukii dans une zone donnée, mais ne donne pas d’indications sur le taux<br />
d’attaque d’une parcelle. pour estimer l’infestation, il est impératif de suivre<br />
l’évolution du nombre de pontes. ces contrôles doivent être effectués dans<br />
des parcelles de cépages sensibles (p. ex. Dunkelfelder, Dornfelder, Gamay),<br />
notamment de variétés rouges/roses précoces. Dès la véraison, il est recommandé<br />
de contrôler toutes les semaines 50 baies saines par parcelle en prélevant<br />
chaque fois une baie dans la moitié supérieure d’une grappe. les œufs,<br />
repérables à leurs deux filaments blancs (figure 1), sont souvent pondus à<br />
proximité du pédicelle <strong>et</strong> s’observent aisément avec une loupe grossissant 5<br />
à 20X. il est encore trop tôt actuellement pour fixer un seuil d’intervention,<br />
qui doit tenir compte du cépage, de l’environnement <strong>et</strong> du temps restant<br />
jusque à la récolte.<br />
AUXILIAIRES<br />
ET LUTTE<br />
plusieurs parasitoïdes potentiels de D. suzukii ont été d’ores <strong>et</strong> déjà identifiés<br />
(chabert <strong>et</strong> al. 2012; rossi stacconi <strong>et</strong> al. 2013), bien que ce ravageur se soit<br />
récemment installé dans notre région. la protection phytosanitaire consiste<br />
pour l’instant à appliquer dans le vignoble tous les moyens préventifs dispo-<br />
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nibles: il est notamment recommandé de réguler la charge avant la véraison,<br />
d’effeuiller la zone des grappes, de maintenir un enherbement court avant<br />
les vendanges <strong>et</strong> de renoncer à épandre du marc frais dans les parcelles non<br />
vendangées. D’autres mesures comme le piégeage de masse, l’usage de fil<strong>et</strong>s<br />
à mailles fines <strong>et</strong> l’application de produits répulsifs sont en cours d’étude. en<br />
cas de pontes avérées, une lutte avec un insecticide peut être envisagée en<br />
dernier recours. en dehors de la prévention, toutes les autres mesures<br />
semblent avoir une efficacité limitée <strong>et</strong> de courte durée.<br />
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