Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
Finalement, j’ai compris ce que je venais<br />
faire ici. Enfin j’ai vu les réfugiés, leurs<br />
casseroles et leurs regards vides. Je<br />
dis «voir» car mon incursion dans la vie<br />
de ces gens se résume jusque là à une<br />
séance de voyeurisme. Le HCR gère<br />
des camps abritant vaille que vaille des<br />
Centrafricains et des Congolais fuyant<br />
des conflits ethniques – les»conflits<br />
ethniques», les guerres fourre-tout.<br />
Les camps végètent aux abords de<br />
villages de brousse aussi dénués que les<br />
camps eux-mêmes. «Il faut à tout prix<br />
éviter de rendre les villageois jaloux des<br />
conditions d’accueil des réfugiés», admet<br />
la collègue en charge de l’allocation des<br />
budgets aux différents programmes<br />
de l’agence. En d’autres termes, si les<br />
villageois vivent avec deux fois rien, les<br />
réfugiés devront se contenter de trois fois<br />
rien. Drôle de logique, le sang me monte à<br />
la tête. Les uns et les autres déambulent<br />
sous nos yeux en guenilles, flanqués d’une<br />
meute d’enfants malnutris. Les cases sont<br />
faites de bric et de broc, en bois, en tôles,<br />
en plastique, en bache, en argile- paille. Ni<br />
route, ni eau, ni électricité.