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Antoine<br />
<strong>Villard</strong><br />
(1867-1934)<br />
UN INDÉPENDANT<br />
AU SERVICE DE L’ART
Préfaces<br />
La peinture d’Antoine <strong>Villard</strong>, redécouverte d’un lien privilégié<br />
avec le Mâconnais<br />
Organiser une rétrospective de l’œuvre<br />
d’Antoine <strong>Villard</strong> est une invitation à célébrer<br />
un peintre dont les toiles constituent<br />
un constant hommage aux paysages<br />
mâconnais. Les jardins des propriétés qu’il<br />
occupe successivement aux Boutteaux<br />
en 1920 et à Hurigny à partir de 1926<br />
deviennent une source d’inspiration inépuisable,<br />
lui permettant d’expérimenter<br />
de nouvelles approches du paysage. Sa<br />
passion pour la nature qui l’environne et<br />
une personnalité ouverte aux différents<br />
courants artistiques qui jalonnent l’époque<br />
font de lui un homme dont le talent mérite<br />
d’être redécouvert.<br />
Il s’agit également pour la Ville de Mâcon<br />
de mettre en œuvre un événement dont<br />
la portée a l’ambition d’être nationale.<br />
Coproduite avec le musée des Beaux-Arts<br />
de Cambrai, l’exposition prend place dans<br />
une salle du musée des Ursulines tout<br />
juste rénovée et désormais entièrement<br />
dédiée. Ce type de manifestations, grâce<br />
aux nombreux partenariats qu’elle sollicite<br />
entre les services culturels et touristiques<br />
municipaux mais aussi régionaux, par la<br />
programmation culturelle diversifiée qui<br />
l’accompagne, entend faciliter l’accès d’un<br />
large public à l’art et mettre en valeur un<br />
patrimoine méconnu.<br />
Jean-Patrick COURTOIS<br />
Maire de Mâcon<br />
Président de Mâconnais-Beaujolais<br />
Agglomération<br />
Antoine <strong>Villard</strong> (1867-1934), un Indépendant au service de l’art<br />
Le musée des Beaux-Arts de Cambrai est<br />
un musée généraliste fort d’un fonds de<br />
près de 22 000 objets ayant trait aux Beaux-<br />
Arts, à l’Archéologie et au Patrimoine de<br />
Cambrai. De provenance multiple, ces<br />
collections sont pour la plupart issues de<br />
dons et de legs de propriétaires d’œuvres<br />
d’art ou d’artistes, et ce depuis sa création<br />
au cours du xix e siècle.<br />
En collaboration avec le musée des<br />
Ursulines à Mâcon, l’exposition « Antoine<br />
<strong>Villard</strong> (1867-1934), un Indépendant au<br />
service de l’art » et le catalogue qui<br />
l’accompagne sont l’occasion de sortir de<br />
l’ombre une part de cette histoire, tout en<br />
redonnant une place légitime à cet artiste<br />
injustement oublié.<br />
C’est bien là le rôle du musée des Beaux-<br />
Arts de Cambrai de valoriser ses collections<br />
auprès des publics et de témoigner, d’une<br />
certaine manière, d’une histoire du goût<br />
et du regard, sensible et subjective,<br />
que toute acquisition d’œuvres d’art<br />
incontestablement renferme.<br />
François-Xavier VILLAIN<br />
Maire de Cambrai<br />
Président de la Communauté<br />
d’Agglomération de Cambrai<br />
2
Ce catalogue est publié à l’occasion de l’exposition « Antoine <strong>Villard</strong> (1867-1934),<br />
un Indépendant au service de l’art », présentée au musée des Ursulines de Mâcon<br />
du 23 novembre 2018 au 21 avril 2019 et au musée des Beaux-arts de Cambrai<br />
du 17 mai au 22 septembre 2019.<br />
Pour les essais :<br />
D r Alain BONNET, professeur<br />
d’histoire de l’art, université<br />
de Bourgogne Centre Georges-<br />
Chevrier – UMR 7366<br />
Alice CORNIER, directrice du musée<br />
des Beaux-Arts de Cambrai<br />
Benoît MAHUET, documentaliste<br />
des musées de Mâcon<br />
Michèle MOYNE-CHARLET,<br />
directrice des musées de Mâcon<br />
Pour les notices :<br />
Michèle MOYNE-CHARLET avec la<br />
collaboration de Benoît MAHUET<br />
Commissariat de l’exposition :<br />
Alice CORNIER, directrice du musée<br />
des Beaux-Arts de Cambrai<br />
Michèle MOYNE-CHARLET,<br />
directrice des musées de Mâcon<br />
Œuvres restaurées en 2018 grâce<br />
au concours de la Société des Amis<br />
du Musée de Cambrai :<br />
Le Grand Sapin, inv. P 266,<br />
musée des Beaux-Arts de Cambrai<br />
L’Île de la Cité – Paris, inv. P 272,<br />
musée des Beaux-Arts de Cambrai<br />
Neige à Hurigny, inv. P 256, musée<br />
des Beaux-Arts de Cambrai<br />
Paysage du Mâconnais peint<br />
des terrasses de Montceau,<br />
inv. P 257, musée des Beaux-Arts<br />
de Cambrai<br />
Paysage du Mâconnais et les collines,<br />
inv. P 258, musée des Beaux-Arts<br />
de Cambrai<br />
MUSÉE DES URSULINES<br />
DE MÂCON :<br />
Documentation :<br />
Émilie GIL<br />
Benoît MAHUET<br />
Katuisia ANDRÉ-CHAUL<br />
Service culturel et pédagogique :<br />
Maxime BOUCHOT<br />
Émilie DECOMBE<br />
Brigitte MAHUET<br />
Claire SANTONI-MAGNIEN<br />
Isabelle SARRON<br />
Communication :<br />
Service Communication<br />
de la Ville de Mâcon<br />
Muséographie :<br />
École Supérieure d’Architecture<br />
Intérieure de Lyon sous la direction<br />
de Jean-Christophe PONCE,<br />
atelier Scénorama<br />
Réalisation :<br />
Entreprise Fixart<br />
Lycée René Cassin<br />
Services Techniques<br />
de la Ville de Mâcon<br />
Régie des œuvres :<br />
Laurent CORDIER<br />
Audrey GAUDIOT<br />
Vincent LIMONON<br />
Daniel DURAND<br />
L’exposition bénéficie du<br />
soutien de la DRAC Bourgogne-<br />
Franche-Comté, de la Région<br />
Bourgogne-Franche-Comté<br />
et de la participation<br />
de la Fondation Solidarités<br />
by Crédit Agricole Centre-est.<br />
MUSÉE DES BEAUX-ARTS<br />
DE CAMBRAI :<br />
Service des collections :<br />
Tiphaine HEBERT<br />
Pauline BERTHELOT<br />
Service des publics :<br />
Claire DEQUIEDT<br />
Régie des œuvres :<br />
Fabien MERCIER<br />
Samuel FREMEAUX<br />
Administration :<br />
Yasmina VERIN<br />
3
Antoine <strong>Villard</strong>,<br />
le peintre paysagiste<br />
au regard<br />
d’architecte<br />
Michèle Moyne-Charlet<br />
Quelque peu oublié aujourd’hui, le nom<br />
d’Antoine <strong>Villard</strong>, lorsqu’il est cité, est la<br />
plupart du temps associé à la réalisation<br />
de paysages 1 . Dès 1911, dans la préface du<br />
catalogue de la toute première exposition<br />
monographique consacrée à l’artiste à la<br />
galerie Le Chevallier, ce sont les paysages<br />
qui sont remarqués par Robert Kemp<br />
« parce que c’est là, […], que <strong>Villard</strong> a trouvé<br />
son domaine 2 ». À son décès en 1934, la<br />
critique retient de son œuvre les séries sur<br />
les oasis tunisiennes, la Bretagne, les vues<br />
de Paris. S’agit-il d’une classification hâtive,<br />
négligeant les portraits et les nombreuses<br />
natures mortes dont il est l’auteur ? L’étude<br />
de la production du peintre entre 1900 et<br />
1934 à travers sa participation aux Salons<br />
de la Société nationale des Beaux-Arts<br />
ou des indépendants à Paris, de l’Essor<br />
à Dijon ou d’autres expositions à Lyon et<br />
à Mâcon révèle la place prédominante des<br />
paysages. Il semble par ailleurs que ce soit<br />
ces derniers qui aient le mieux traduit la<br />
spécificité de son art.<br />
Une stratégie d’exposition qui façonne l’image du peintre<br />
L’importance des paysages parmi les<br />
œuvres envoyées aux différentes expositions<br />
est une constante de l’ensemble de<br />
la carrière d’Antoine <strong>Villard</strong>. Au Salon de la<br />
Société nationale des Beaux-Arts de 1909,<br />
il présente Paris (quai de l’Hôtel de Ville).<br />
Deux ans plus tard, la galerie Le Chevallier<br />
met en évidence les lieux qui l’inspirent.<br />
Paris, Lyon, Mâcon, Moret-sur-Loing, la<br />
Bretagne, sont autant d’étapes qui rythment<br />
l’exposition et façonnent l’image du peintre<br />
paysagiste. La même année, la Société lyonnaise<br />
des Beaux-Arts choisit de montrer<br />
des vues de Fourvière et de son quartier,<br />
présentation diversifiée en 1912 et 1913,<br />
par des témoignages de son séjour tunisien,<br />
mais aussi des réalisations parisiennes.<br />
Il faut attendre la rétrospective que lui<br />
consacre la galerie Bernheim-Jeune du<br />
10 février au 2 mars 1918 pour que la<br />
critique s’intéresse réellement à lui.<br />
« L’exposition à laquelle il vient de nous<br />
convier Galerie Bernheim consacre son<br />
délicat talent de paysagiste. Nous le<br />
savions déjà en possession de la plus sûre<br />
technique ; mais une chose nous frappe et<br />
nous émeut devant ces éblouissements de<br />
1. Schurr et Cabanne 1989, p. 504.<br />
2. Galerie P. Le Chevallier, Paris, 15 au 31 mai 1911.<br />
4
floraisons blanches et roses, devant toutes<br />
ces métamorphoses vivantes de la terre<br />
heureuse : c’est l’inspiration 3 . »<br />
L’exposition laisse une place aux œuvres<br />
de deux jeunes Tunisiens ayant peint avec<br />
Antoine <strong>Villard</strong>, originalité que les journalistes<br />
ne manquent pas de souligner et<br />
qui suscite un intérêt particulier : Louis<br />
Vauxcelles, en particulier, est enthousiaste :<br />
« Des expositions que nous avons vues en ces<br />
derniers temps à Paris, la plus neuve, la plus<br />
forte, la plus significative fut sans contredit<br />
celle de <strong>Villard</strong> chez les Bernheim 4 . »<br />
Chez les deux adolescents, Terzi Ben<br />
Hasnaoui et Mohamed Ben Macri<br />
Roached, il remarque la spontanéité et la<br />
sensibilité. La relation entre la galerie et le<br />
peintre se comprend à l’aune des activités<br />
de la Société coloniale des artistes français<br />
qui octroie une bourse à Antoine <strong>Villard</strong><br />
pour un voyage d’étude en Tunisie en 1912<br />
et 1913. Dès la création de la Société par<br />
Louis Dumoulin en 1908, les lauréats sont<br />
en effet invités à présenter leurs œuvres à<br />
la galerie Bernheim-Jeune.<br />
Cette année-là, les vues de l’oasis de Gafsa<br />
ne sont pas les seuls paysages d’Antoine<br />
<strong>Villard</strong> que les amateurs d’art parisiens<br />
peuvent contempler. L’artiste s’inspire des<br />
décors urbains qui l’environnent, jardins<br />
de Montmartre et boulevard de ceinture,<br />
qu’il montre dans le cadre d’une exposition<br />
collective, « Le Paris moderne », à la<br />
galerie Chaine et Simonson 5 .<br />
Les collaborations ultérieures avec la galerie<br />
Bernheim-Jeune reflètent les expérimentations<br />
d’Antoine <strong>Villard</strong> sur le paysage :<br />
en 1921, les vues de la propriété récemment<br />
acquise aux Boutteaux dans le<br />
Mâconnais prédominent. Le voyage entrepris<br />
l’année suivante à Belle-Île-en-Mer<br />
nourrit la rétrospective des cinquante<br />
tableaux de l’artiste proposée par la galerie<br />
en 1924. Sa participation aux autres événements<br />
de la scène artistique parisienne,<br />
Salon de la Nationale des Beaux-Arts ou<br />
Salon des indépendants, ne diffère pas et<br />
traduit l’évolution des principaux centres<br />
d’intérêt qui se dessine entre 1908 et 1934 :<br />
avant la Première Guerre mondiale, ce<br />
sont les peintures de Paris et de Lyon qui<br />
sont montrées, complétées par les œuvres<br />
issues du voyage tunisien. À partir de 1921,<br />
les vues du Mâconnais alternent avec les<br />
marines bretonnes et les perspectives sur<br />
le chemin de fer de ceinture à Paris.<br />
Fig. 1<br />
Les Manèges<br />
à la Foire du Trône<br />
Huile sur toile<br />
46 × 66 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong>. 1907<br />
Collection particulière<br />
Fig. 2<br />
Neige<br />
à Moret-sur-Loing,<br />
Seine-et-Marne<br />
Huile sur contreplaqué<br />
26 × 35 cm<br />
S.b.c. A. <strong>Villard</strong>.<br />
Collection<br />
M me Claudine Hirou<br />
3. Épardaud 1918.<br />
4. Vauxcelles 1918.<br />
5. Paris-Journal 1918.<br />
5
Fig. 3<br />
Intérieur de l’église<br />
de Montarlot, près<br />
de Moret – La Nef<br />
Huile sur toile<br />
130 × 97 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 262, musée<br />
des Beaux-Arts<br />
de Cambrai<br />
Ailleurs, à l’international comme en<br />
région, la stratégie d’exposition révèle de<br />
nouveau l’importance du genre pictural<br />
dans l’œuvre du peintre. À l’étranger,<br />
à Pittsburgh en 1922, c’est une vue du<br />
boulevard de Grenelle qui est sélectionnée<br />
par le jury. La même année, le<br />
peintre est remarqué à l’exposition internationale<br />
d’art de Düsseldorf. En 1933, un<br />
an avant sa mort, il est présent à Tunis,<br />
à Madrid, à Amsterdam à travers les<br />
paysages qu’il choisit de montrer. À Dijon,<br />
de 1922 à 1934, les sujets sont identiques<br />
à ceux des Salons parisiens. Cette abondante<br />
production révèle un moyen d’expression<br />
privilégié par Antoine <strong>Villard</strong>, à<br />
même de traduire le sens de sa démarche.<br />
En dépit de thématiques récurrentes, son<br />
approche du paysage duquel l’homme est<br />
par ailleurs souvent absent, ne reste pas<br />
uniforme mais révèle au contraire une<br />
multiplicité d’influences.<br />
Le paysage à la loupe,<br />
la vision de l’architecte<br />
Si les scènes parisiennes des débuts<br />
marquent un intérêt pour les habitants et<br />
leurs activités, fête foraine (fig. 1) ou travail<br />
des lavandières notamment, les réalisations<br />
ultérieures témoignent d’une volonté<br />
de focaliser l’attention sur certains motifs :<br />
architectures, reliefs, végétation sont étudiés<br />
minutieusement afin de parvenir à<br />
une synthèse des formes observées. Il est<br />
probable que sa formation initiale, celle<br />
qu’il reçoit à l’École des Beaux-Arts de<br />
Lyon comme élève architecte, influence<br />
son approche. Le choix des sujets tout<br />
d’abord lui fait préférer les représentations<br />
des immeubles lyonnais à celles de leurs<br />
occupants. En voyage à Moret-sur-Loing,<br />
il s’intéresse à l’église dont il peint différents<br />
aspects (fig. 3). Les toiles exécutées<br />
en Bretagne en 1907 comportent quelques<br />
portraits des pêcheurs rencontrés, mais<br />
attestent surtout des préoccupations de<br />
leur auteur pour la nature environnante<br />
qu’il aborde avec un regard d’architecte.<br />
Les études sur bois ou carton qu’il<br />
exécute en extérieur traduisent en effet le<br />
souhait de saisir les volumes structurant<br />
les paysages, appréhendés d’une manière<br />
quasi scientifique, d’en restituer les principales<br />
perspectives.<br />
Ce souci d’exactitude le pousse assez vite<br />
à renoncer à la tentation impressionniste<br />
dont témoignent les premières vues de la<br />
Seine (fig. 4). Il évolue vers des compositions<br />
d’une rigueur toute cézanienne aux<br />
contours puissants, exécutées dans une<br />
gamme de couleurs restreintes mais plus<br />
fortes. Léon Werth, dans la préface du catalogue<br />
de 1921 consacré à l’exposition à la<br />
galerie Bernheim-Jeune, remarque d’emblée<br />
cette particularité chez le peintre :<br />
« Un talent de tout repos, bien réglé par<br />
une dissection de Cézanne, du Douanier<br />
Rousseau ou des deux à la fois. » À la<br />
suite du séjour à Gafsa de 1912 à 1914,<br />
au contact des villages et des oasis tunisiens,<br />
ses toiles offrent une gamme de<br />
couleurs vives qui ravissent les critiques.<br />
6
Quelques années plus tard, une nouvelle<br />
orientation s’affirme : un trait plus appuyé<br />
cerne les volumes, accusés par de<br />
violents aplats de couleurs. Les œuvres<br />
mâconnaises de la décennie 1920, parfaitement<br />
illustrées par la Salle d’ombrage (fig. 5),<br />
se font l’écho de cette pratique, influencée<br />
par l’art d’Henri Rousseau. Exposé en 1922<br />
au Salon des indépendants, ce tableau<br />
manifeste la nouvelle voie empruntée par<br />
Antoine <strong>Villard</strong> : « La peinture, c’est l’art<br />
de supprimer dans un paysage, comme<br />
dans n’importe quel sujet, tout ce qu’il y a<br />
de trop 6 . » Au fur et à mesure des années,<br />
le paysage est appréhendé de manière<br />
plus schématique. Celle-ci l’amène à<br />
bâtir ses compositions à l’aide de lignes<br />
directrices, conférant aux sites observés<br />
une plus grande solidité. Les séries qu’il<br />
consacre au chemin de fer de ceinture,<br />
boulevard de Grenelle, autour des années<br />
trente, témoignent de cette géométrisation<br />
des formes et des recherches entreprises<br />
alors.<br />
L’étude méticuleuse de la nature le pousse<br />
à revenir sur le même motif à plusieurs<br />
reprises. Dans la notice biographique<br />
qu’il consacre à Antoine <strong>Villard</strong> en 1931,<br />
Georges Turpin distingue trois cycles dans<br />
l’œuvre du peintre, les marines de Belle-<br />
Île-en-Mer, les paysages du Mâconnais<br />
et les chemins de fer de ceinture.<br />
Dans chacun d’eux, « Antoine <strong>Villard</strong>,<br />
suivant l’exemple de Claude Monet,<br />
étudiera le même motif sous tous ses<br />
aspects, par tous les temps, à toutes les<br />
heures et à toutes les saisons. Cette fidélité<br />
lui permettra de scruter la nature<br />
jusqu’en ses fibres les plus profondes 7 . »<br />
Certes, les sites bretons choisis ont une<br />
aptitude particulière à susciter l’émotion.<br />
C’est cette caractéristique qui séduit le<br />
peintre et l’incite à s’installer à Belle-<br />
Île-en-Mer. Dans l’un des rares extraits<br />
de sa correspondance où il évoque son<br />
Fig. 4<br />
La Seine au pont<br />
d’Arcole – Paris<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.D.b.g.<br />
A. <strong>Villard</strong>/1910<br />
Inv. P 260, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
Fig. 5<br />
La Salle d’ombrage<br />
Huile sur toile<br />
129,5 × 97,5 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong>.<br />
1921<br />
Inv. 2017.10.1, musée<br />
des Ursulines de Mâcon<br />
6. Gybal 1922.<br />
7. Turpin 1931, p. 192.<br />
7
travail, une lettre datée du 18 mars 1924<br />
adressée au critique d’art René-Jean,<br />
Antoine <strong>Villard</strong> évoque les impressions qui<br />
le saisissent face aux falaises bretonnes :<br />
« Quand je me suis trouvé face à cette lutte<br />
sournoise ou déchaînée de la mer et des<br />
rochers, je n’ai plus pu détourner la tête,<br />
j’ai été pris entièrement, il m’a fallu aller<br />
jusqu’au bout. J’ai pensé que le drame<br />
était assez formidable, avec mes petits<br />
moyens, j’ai essayé d’en fixer le caractère,<br />
la profondeur, l’émotion intense. »<br />
Fig. 6<br />
Le Chemin de fer de ceinture : temps de neige – Paris<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong>.<br />
Collection particulière<br />
Fig. 7<br />
Paysage à Hurigny, depuis le jardin<br />
Graphite et encre de Chine sur papier, feuille détachée d’un carnet<br />
de dessins 18,2 × 20,6 cm<br />
Collection particulière<br />
Cet effort pour capter l’essence de l’émotion<br />
suscitée concerne aussi parfois<br />
des endroits plus anodins. Le panorama<br />
qu’il contemple depuis la fenêtre<br />
de son atelier, square Desnouettes à<br />
Paris, est l’objet de toute son attention<br />
(fig. 6). Les usines, la voie de chemin<br />
de fer, sont analysées et retranscrites<br />
dans une série de peintures auxquelles<br />
il souhaite dédier une exposition.<br />
Des critiques tel Yvanhoé Rambosson<br />
y voient l’expression « du drame qui<br />
se dégage de certains spectacles de la<br />
vie moderne de l’usine et du travail 8 . »<br />
Là encore les compositions sont épurées,<br />
réduites à l’essentiel et la palette restreinte<br />
dans un désir de recentrer l’attention sur<br />
les éléments constitutifs du paysage.<br />
Le Mâconnais où il aime à venir se<br />
ressourcer ne fait pas exception à la<br />
démarche du peintre. Ses motifs préférés,<br />
ceux qu’il perçoit de la fenêtre d’Hurigny,<br />
son jardin et les collines proches, l’accaparent<br />
et suscitent la même vigilance à<br />
saisir les principales formes pour donner<br />
au paysage consistance et assise. Moins<br />
que l’expression d’une tragédie sousjacente,<br />
la vision qu’il exprime d’Hurigny<br />
résume alors sa quête : il dissèque la<br />
campagne comme si elle était observée<br />
à travers les lunettes de l’architecte.<br />
Le résultat visible sur la toile offre parfois<br />
des points de vue originaux, centrés sur<br />
des éléments de toiture (fig. 7, 8 et 9).<br />
8. Rambosson 1934, p. 275.<br />
8
Fig. 8<br />
Paysage mâconnais<br />
(vu depuis<br />
la propriété<br />
d’Hurigny)<br />
Photographie<br />
noir et blanc<br />
8,7 × 20,6 cm<br />
Collection particulière<br />
Fig. 9<br />
Paysage mâconnais<br />
(vu depuis<br />
la propriété<br />
d’Hurigny)<br />
Huile sur toile<br />
54 × 73 cm<br />
S.b.c. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. A. 898,<br />
musée des Ursulines<br />
de Mâcon<br />
La comparaison avec les nombreux clichés<br />
qu’il réalise illustre en effet sa relation<br />
à la photographie dont il se sert pour<br />
parfaire la perception de son environnement.<br />
Il multiplie les points de vue, mêle<br />
les techniques, utilisant volontiers l’encre<br />
ou le crayon pour les études réalisées.<br />
Les dernières années, il semble même que<br />
ce soit surtout à Hurigny où les contrastes<br />
lumineux s’affirment particulièrement,<br />
qu’il trouve la plupart des sujets retranscrits<br />
sur la toile. « Dans le jardin, […],<br />
la nature est encore très fraîche, de verts<br />
très fins, dans une gamme grise, beaucoup<br />
de tons bleutés à la Bonnard, il est vrai que<br />
les ciels très nuageux jouent un grand rôle<br />
dans ce résultat 9 . »<br />
9. Lettre à Jules Cavaillès, 26 juin 1933.<br />
9
La salle Antoine<br />
<strong>Villard</strong> au musée<br />
de Cambrai<br />
Alice Cornier<br />
Lors de la commission du musée du<br />
16 octobre 1935, le conservateur « Monsieur<br />
Gaillard expose qu’à la suite de démarches<br />
personnelles, M me veuve <strong>Villard</strong> a donné<br />
au musée de Cambrai une collection de<br />
vingt et un tableaux de son mari Antoine<br />
<strong>Villard</strong> artiste peintre de grand talent<br />
et dont l’œuvre est accueillie par les<br />
plus grands musées d’Europe. Un crédit<br />
spécial sera demandé à la Ville pour<br />
l’installation d’une salle spéciale pouvant<br />
recevoir cet envoi 1 . »<br />
Cette donation importante d’œuvres d’un<br />
artiste délibérément rattaché à l’art indépendant<br />
est probablement l’exemple le<br />
plus caractéristique de l’ambition du jeune<br />
conservateur : faire du musée de Cambrai<br />
l’« un des plus beaux musées de province<br />
pour la peinture moderne 2 ».<br />
Ernest Gaillard (1893-1976) et l’art moderne au musée de Cambrai<br />
Directeur des Écoles académiques de<br />
dessin de Cambrai et ancien élève de<br />
l’École du Louvre, Ernest Gaillard rejoint<br />
la commission administrative du musée<br />
en 1927 3 . Par son métier d’architecte, il<br />
procède au réaménagement des salles<br />
après les désastres causés par le conflit<br />
mondial. Il est nommé conservateur adjoint<br />
en mars 1933. Le 17 avril 1934, il devient<br />
conservateur général du musée, succédant<br />
à Georges Maroniez (1865-1933), peintre,<br />
décédé l’année précédente. À l’âge de 41 ans,<br />
il devient ainsi le septième conservateur<br />
du musée de Cambrai. Sans pour autant<br />
négliger les collections anciennes, Gaillard<br />
poursuit une politique ambitieuse d’acquisition<br />
d’œuvres d’art moderne, qu’il avait<br />
précédemment commencée 4 . Cette initiative<br />
du conservateur n’est pas isolée dans<br />
ce contexte de l’après-guerre. Au cours<br />
des années 1920-1921, Andry-Farcy fut<br />
le premier à mener en France une telle<br />
démarche pour son musée à Grenoble.<br />
Il est d’ailleurs à noter que les deux conservateurs<br />
entretenaient des liens amicaux<br />
et qu’en avril 1935, Andry-Farcy était à<br />
Cambrai pour une conférence sur l’invitation<br />
de la Société des élèves et anciens<br />
élèves des Écoles académiques, celles-là<br />
mêmes que dirigeait alors Gaillard 5 .<br />
1. Procès-verbal de la commission du musée, séance du 16 octobre 1935, Cambrai, archives du musée.<br />
2. Lettre d’un ami à Ernest Gaillard, datée du 24 avril 1934 (signature illisible), Cambrai, archives du musée.<br />
3. Procès-verbal de la commission du musée, séance du 23 juillet 1927, Cambrai, archives du musée.<br />
4. Par achat en 1932, Gaillard fait entrer dans les collections du musée des toiles d’Albert Marquet (inv. P 175)<br />
et de Maurice Denis (inv. P 141), ainsi qu’une sculpture de Joseph Bernard (inv. Sc 24).<br />
5. Andry-Farcy est conservateur du musée de Grenoble de 1919 à 1949. De 1896 à 1900, il suit les enseignements<br />
de Gustave Guillemin aux Écoles académiques des beaux-arts de Cambrai. Sa conférence, intitulée « Des artistes,<br />
des amateurs et… des autres !!! », concerne l’exposition en cours à Paris, « Les chefs-d'œuvre du musée de Grenoble ».<br />
10
Le conservateur cambrésien reprend<br />
d’ailleurs son principe de « mendicité 6 » afin<br />
de faire rentrer des œuvres d’art moderne<br />
grâce à la libéralité des artistes, reconstituant<br />
par ce biais les collections du musée<br />
alors dévastées. Des toiles d’André Lhote<br />
(1885-1962), d’André Favory (1889-1937),<br />
de Pierre-Eugène Clairin (1897-1980),<br />
de Georges d’Espagnat (1870-1950), des<br />
dessins d’Henri Matisse (1869-1954), de<br />
Marcel Gromaire (1892-1971), d’Yves<br />
Brayer (1907-1990) ou encore des sculptures<br />
de Marcel Gimond (1894-1961),<br />
de Joël Martel (1896-1966) ou de Marcel<br />
Lemar (1892-1941) rejoignent ainsi le<br />
musée en 1934.<br />
Ce mode d’acquisition est complété par<br />
l’achat et le dépôt d’œuvres de l’État. Le<br />
choix des artistes qu’il réalise est celui d’un<br />
visiteur et d’un connaisseur des réseaux et<br />
manifestations officiels, le Salon d’automne<br />
et le Salon des indépendants en particulier.<br />
L’entrée d’Antoine <strong>Villard</strong> au musée de Cambrai<br />
Ses relations professionnelles et amicales<br />
avec des personnalités du monde de l’art<br />
et des musées contribuent également à<br />
l’enrichissement des collections et à la<br />
reconnaissance nationale de son travail.<br />
Fig. 1<br />
Le Chemin de fer<br />
de ceinture :<br />
la tour Eiffel<br />
Huile sur toile<br />
114,5 × 146 cm<br />
S.b.d. A.<strong>Villard</strong><br />
Inv. P 264, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
Les archives actuellement conservées<br />
au musée font remonter les premiers<br />
échanges à février 1934. En effet, il semble<br />
bien qu’Ernest Gaillard ait fait parvenir à<br />
l’artiste une lettre lui exprimant sa volonté<br />
de le rencontrer en vue d’une acquisition 7 .<br />
Sa demande venant à un moment où<br />
<strong>Villard</strong> est malade, son souhait ne sera<br />
pas exaucé dans l’immédiateté 8 . À la suite<br />
du décès de l’artiste survenu le 4 février<br />
1934, sa veuve reprend contact avec le<br />
musée 9 . Un rendez-vous est organisé le<br />
vendredi 20 avril 1934 à 14 heures, « une<br />
excellente heure pour voir la peinture 10 ».<br />
Cette rencontre est la première visite<br />
du conservateur à l’atelier, d’autant plus<br />
importante qu’elle est l’occasion d’effectuer<br />
le choix pour Cambrai. L’œuvre est<br />
décidée : une des multiples versions du<br />
Chemin de fer de ceinture, toile importante<br />
en dimension et en qualité. De<br />
1919 à 1934, <strong>Villard</strong> peint des vues de la<br />
Petite Ceinture, premier chemin de fer<br />
urbain parisien construit entre 1852 et<br />
1869. Depuis la fenêtre de son appartement<br />
« c’est ce paysage que <strong>Villard</strong> a peint<br />
dix fois, vingt fois, cent fois, à toutes les<br />
heures, par tous les effets, par toutes les<br />
6. Terme employé dans Vincent, 1982, p. 8.<br />
7. À de nombreuses reprises, Antoine <strong>Villard</strong> est sollicité par les musées pour un don. Avant Cambrai, le musée de Belfort<br />
(don en 1932), le musée de Grenoble (don en 1932-33), le musée de La Rochelle (don en 1933) entre autres ont bénéficié<br />
de la générosité de l’artiste.<br />
8. Lettre de Jules Cavaillès à Ernest Gaillard, datée du 2 février 1934 : « Monsieur <strong>Villard</strong>, très malade en ce moment est empêché<br />
de répondre lui-même à votre lettre me charge de vous dire combien votre demande l’a touché. Dès que son état de santé le lui<br />
permettra il sera très heureux d’y répondre », Cambrai, archives du musée.<br />
9. Lettre de M me <strong>Villard</strong> à Ernest Gaillard, non datée, probablement du 5 avril 1934 : « Je me tiens donc à votre disposition pour<br />
vous montrer l’œuvre de mon mari afin qu’il soit représenté dignement au Musée de Cambrai », Cambrai, archives du musée.<br />
10. Lettre de Mme <strong>Villard</strong> à Ernest Gaillard, datée du 13 avril 1934, Cambrai, archives du musée.<br />
11
Fig. 2<br />
Les Pommes de terre<br />
Huile sur toile<br />
73 × 92 cm<br />
A. <strong>Villard</strong> / 1921<br />
Inv. P 255, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
Fig. 3<br />
Belle-Île-en-Mer –<br />
Les Bateaux<br />
Huile sur toile<br />
97 × 130 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 270, musée<br />
des Beaux-Arts<br />
de Cambrai<br />
saisons 11 » et qui se retrouve aujourd’hui<br />
dans les collections de plusieurs musées 12 .<br />
Le tableau destiné à Cambrai donne à voir<br />
au premier plan les deux voies ferrées,<br />
ainsi que les usines André Citroën et ses<br />
maisons ouvrières élancées aux multiples<br />
fenêtres. À l’arrière-plan, on devine dans<br />
la brume la tour Eiffel, titre parfois donné<br />
au tableau. Avant son arrivée à Cambrai,<br />
Le Chemin de fer de ceinture est présenté<br />
à la rétrospective organisée par le Salon<br />
de l’Essor à Dijon, reprise en novembre au<br />
Salon d’automne à Paris 13 . Le tableau « est<br />
très regardé et suscite beaucoup de polémiques<br />
14 », confirmant la justesse de l’œil<br />
et la pertinence du choix du conservateur ;<br />
l’œuvre se révélant « pour [la] nouvelle<br />
collection d’art contemporain [du musée]<br />
un de ses plus beaux joyaux 15 ».<br />
11. Turpin 1931, p. 200.<br />
12. À titre d’exemple, les musées de Grenoble et de Belfort possèdent une version, ainsi que la Tate Modern à Londres<br />
(achat en 1923).<br />
13. L’œuvre figure au n o 475 sous le titre La Tour Eiffel au Salon de l’Essor (Dijon, palais des ducs et des États, 15 septembre –<br />
7 octobre 1934) et au n o 122 au Salon d’automne (Paris, Grand Palais des Champs-Elysées, 1 er novembre – 2 décembre 1934).<br />
14. Lettre de M me <strong>Villard</strong> à Ernest Gaillard, datée du 24 septembre 1934, Cambrai, archives du musée.<br />
15. Lettre du maire de Cambrai à M me <strong>Villard</strong>, remerciements pour le don, datée du 3 novembre 1934, Cambrai, archives du musée.<br />
12
La salle Antoine <strong>Villard</strong><br />
au musée de Cambrai<br />
Gaillard envisage rapidement une suite à<br />
donner à ce premier don remarqué. Dans<br />
un courrier daté de septembre 1934,<br />
M me <strong>Villard</strong> rassure le conservateur sur le<br />
fait « qu’[elle] n’[a] pas oublié la proposition<br />
qu’[il avait] eu l’amabilité de [lui]<br />
faire sur la création d’une salle Antoine<br />
<strong>Villard</strong> 16 ». Après des rendez-vous et<br />
des discussions sur le projet à Paris et à<br />
Cambrai, il semble que dès juin 1935, le<br />
choix, tant de l’espace à réserver au premier<br />
étage du musée que les œuvres – vingt et<br />
une toiles qui témoignent des différentes<br />
périodes de l’artiste 17 –, est déterminé.<br />
Il est à noter l’intérêt porté aux toiles<br />
significatives ayant un certain pedigree en<br />
termes d’expositions et de critiques 18 .<br />
Une fois les œuvres arrivées au musée<br />
vers juillet 1935 et accrochées dans la salle<br />
désormais bien nommée « Antoine <strong>Villard</strong> »,<br />
il est évoqué une inauguration officielle,<br />
à la hauteur de la donation. Une occasion<br />
est toute trouvée : la halte les 25, 26 et<br />
27 octobre 1935 à Cambrai du train-exposition<br />
des artistes 19 qui réunit, la veille,<br />
Georges Huisman, directeur général des<br />
Beaux-Arts, Albert Laprade, inspecteur<br />
général des Beaux-Arts, André Léveillé,<br />
membre du Conseil supérieur des Beaux-<br />
Arts et vice-président du Salon des indépendants,<br />
André Sainte-Lagüe président<br />
de la Confédération des travailleurs intellectuels<br />
et Albert Sancholle-Henraux,<br />
président de la Société des amis du Louvre.<br />
La presse aussi bien locale que spécialisée<br />
se fait l’écho de cet événement et ne cesse<br />
d’être élogieuse quant à l’initiative prise<br />
par le conservateur 20 .<br />
Une photographie actuellement dans les<br />
archives familiales nous permet d’envisager<br />
partiellement cette salle. L’accrochage, rigoureusement<br />
ordonnancé selon les dimensions<br />
des œuvres, privilégie le thème du<br />
paysage et ses composantes, oscillant<br />
entre souvenirs de Bretagne, vues de<br />
Paris et références au Mâconnais. Placées<br />
au centre, trois sculptures, récemment<br />
Fig. 4<br />
Salle Antoine-<strong>Villard</strong>, musée de Cambrai (octobre 1935 ?)<br />
De gauche à droite et de haut en bas :<br />
– Mur de droite : Les Maïs, Belle-Île-en-Mer – Les Bateaux et Nature<br />
morte - Héliotropes et assiette de rubacel, Belle-Île-en-Mer – Le Rocher<br />
de la Vierge (œuvre non localisée), Le Grand Sapin, Belle-Île-en-Mer –<br />
Les Rochers de velours ;<br />
– Mur de gauche : Le Chemin de fer de ceinture, Jardin après la pluie<br />
du printemps (œuvre non localisée).<br />
Sculptures : Jeune fille américaine de Léon-Ernest Drivier (dépôt de<br />
l’État en 1933, inv. 12464), Buste de femme russe de Marcel Gimond<br />
(achat en 1934, inv. Sc 23) et Buste d’Anatole France d’Antoine Bourdelle<br />
(achat en 1933, inv. Sc 25).<br />
Sur les vingt-deux œuvres initialement reçues en don par la veuve<br />
de l’artiste en 1934 et en 1935, dix-neuf toiles sont aujourd’hui<br />
conservées par le musée.<br />
Photographie noir et blanc<br />
12,4 × 14,4 cm<br />
Collection particulière<br />
16. Lettre de M me <strong>Villard</strong> à Ernest Gaillard, datée du 24 septembre 1934, Cambrai, archives du musée.<br />
17. Ses débuts avec des vues de Paris et de Lyon avec trois toiles ; les séjours à Moret-sur-Loing<br />
avec trois toiles ; le voyage à Gafsa en Tunisie avec deux toiles ; la Bretagne avec trois toiles ;<br />
la nature morte avec quatre toiles ; le Mâconnais avec quatre toiles et une scène d’intérieur.<br />
18. À titre d’exemples : Les Pommes de terre, considérées par Yvanhoé « Rambosson et<br />
plusieurs critiques comme digne de Le Nain », sont présentées à l’exposition d’art français<br />
moderne à Stockholm en 1927 et au Salon de l’Essor à Dijon en 1925. Le Bateau pilote, parfois<br />
titré Les Bateaux à Belle-Île, est exposé à Stockholm, Dijon, Autun, à la grande rétrospective<br />
de 1934. Le Grand Sapin est montré, au Salon d’automne de 1920, à la Galerie de la Boétie<br />
en 1921, au Salon de l’Essor de 1925, à la rétrospective au Salon de l’Essor et au Salon<br />
d’automne en 1934.<br />
19. Organisée par la Confédération des travailleurs intellectuels (CTI) et sous le haut<br />
patronage de la Direction générale du Conseil supérieur des Beaux-Arts, ce « musée sur rail »<br />
avait pour objectif de promouvoir et de diffuser l’art contemporain dans les régions. Lancé<br />
en 1934 pour les régions du sud et sud-ouest de la France, il est renouvelé en 1935 pour la<br />
Normandie et le Nord. Voir sur le sujet : Train exposition des artistes : peintures, gravures,<br />
arts décoratifs, sculptures, 1935, Paris, Confédération des travailleurs intellectuels, 1935, 111 p.<br />
20. Rambosson 1935.<br />
13
arrivées dans les collections, terminent<br />
la présentation : la Jeune Américaine de<br />
Léon-Ernest Drivier (1878-1951), le Buste<br />
d’Anatole France d’Antoine Bourdelle<br />
(1861-1929) et le Buste de femme russe de<br />
Marcel Gimond (1894-1961).<br />
Fig. 5<br />
Salle d’art moderne, musée de Cambrai (après 1949)<br />
Sur le mur de droite, aux côtés de Neige à Hurigny et Nature morte<br />
avec fleurs et livre d’Antoine <strong>Villard</strong>, on identifie des toiles d’Albert<br />
Marquet (achat en 1932, inv. P 175), Robert Lotiron (achat en 1935,<br />
inv. P 140).<br />
Sur le mur de gauche, des toiles de Maurice de Vlaminck (dépôt<br />
de l’État en 1937, inv. 15031), Paul Charlemagne (achat à l’artiste<br />
en 1933, inv. P 182), Guillemette Morand (dépôt de l’État en 1949,<br />
inv. 20629), Roland Oudot (don de l’artiste en 1937, inv. P 149),<br />
André Favory (don de l’artiste en 1934, inv. P 166) et Jules Cavaillès<br />
(dépôt de l’État en 1947, inv. 20252)<br />
Au centre, La Jeune Fille à la cruche de Joseph Bernard (achat en 1932,<br />
inv. Sc 24).<br />
À droite, Buste de Firmin Gémier d’Alexandre Descatoire<br />
(provenance inconnue, inv. Sc 22)<br />
Photographie noir et blanc<br />
18 × 23,7 cm<br />
Musée des Beaux-Arts de Cambrai<br />
Après cette « pleine fièvre que la mémoire<br />
de [Antoine <strong>Villard</strong>] était évoquée avec<br />
enthousiasme par les gens qui aiment<br />
la peinture 21 », M me <strong>Villard</strong> s’inquiète de<br />
la survivance de l’espace au sein du<br />
musée 22 . « La salle <strong>Villard</strong> est immuable »,<br />
lui assure Gaillard 23 . « Notre commission<br />
et moi-même en prenons l’engagement et<br />
pourquoi voudriez-vous qu’il en soit autrement<br />
? Douteriez-vous de sa qualité 24 ? »<br />
Dans l’esprit du conservateur, si cette salle<br />
est un hommage à l’artiste, elle l’est ici<br />
en tant que <strong>Villard</strong> artiste, elle doit l’être<br />
aussi en tant que <strong>Villard</strong> collectionneur,<br />
cette complétude assurant la définitive<br />
qualité de la salle. Et là Gaillard est tout<br />
« disposé à la modifier en l’enrichissant d’un<br />
Rousseau, d’un Dufresne ou de tout autre<br />
toile que <strong>Villard</strong> aimait et qui voisinait déjà<br />
avec ses œuvres 25 ». « Vous voyez que je ne<br />
doute de rien », affirme-t-il dans une lettre<br />
adressée à M me <strong>Villard</strong>. Celle-ci répond à<br />
cette sollicitation : « J’ai pensé bien souvent<br />
à ce qu’il m’écrit et que je n’ai pas encore<br />
abandonné cette idée peut-être pas tout<br />
à fait dans l’idée de Monsieur Gaillard 26 . »<br />
Ce courrier est la dernière correspondance<br />
que le musée possède dans ses archives,<br />
clôturant ainsi l’histoire.<br />
21. Lettre d’Ernest Gaillard à M me <strong>Villard</strong>, datée du 22 novembre 1935, Cambrai, archives du musée.<br />
22. Lettre de M me <strong>Villard</strong> à M me Gaillard, datée du 4 novembre 1935 : « J’aurais voulu<br />
demander à monsieur Gaillard ce qu’il pensait d’une lettre qui me serait envoyé par<br />
M. Gaillard d’accord avec les personnes s’occupant du Musée, où l’on me promettrait<br />
que la salle occupée en ce moment par les toiles d’Antoine <strong>Villard</strong> ne serait pas changée<br />
ni son installation modifiée par la suite », Cambrai, archives du musée.<br />
23. Lettre d’Ernest Gaillard à M me <strong>Villard</strong>, datée du 22 novembre 1935, Cambrai, archives du musée.<br />
24. Lettre d’Ernest Gaillard à M me <strong>Villard</strong>, op. cit.<br />
25. Lettre d’Ernest Gaillard à M me <strong>Villard</strong>, op. cit.<br />
26. Lettre de M me <strong>Villard</strong> à M me Gaillard, datée du 14 décembre 1935, Cambrai, archives du musée.<br />
27. Le répertoire alphabétique des œuvres du musée datable de 1939 évoque la salle Antoine-<br />
<strong>Villard</strong> comme l’une des salles constitutives du musée. Les œuvres mentionnées y figurant<br />
sont l’ensemble des toiles données par la veuve ainsi qu’une sculpture de Marcel Bouraine,<br />
Étude originale pour le monument à Renoir à Cagnes, don de l’artiste en 1933, inv. Sc 52.<br />
28. Sur le sujet, les archives du musée sont contradictoires et incomplètes. Il pourrait s’agir<br />
des œuvres suivantes : Paysage du Vieux Lyon, Jardin après la pluie au printemps, Belle-Île –<br />
Le Rocher de la Vierge, La Seine au pont d’Arcole, Intérieur d’église de Montarlot, Paysage<br />
du Mâconnais. Les trois dernières ont été restituées au musée de Cambrai en 1982.<br />
M me <strong>Villard</strong> ne donnera pas suite à la demande<br />
du conservateur, qui continuera, par<br />
le don ou le dépôt principalement, l’enrichissement<br />
des collections d’art moderne.<br />
Le souhait de celle-ci ne sera pas non plus<br />
respecté. La salle <strong>Villard</strong> est encore là en<br />
1939 27 , avant l’évacuation des œuvres en<br />
Bretagne à l’amorce de la guerre. En 1947,<br />
plusieurs toiles de <strong>Villard</strong> partent en dépôt<br />
au tout récent musée Henri-Matisse du<br />
Cateau-Cambrésis 28 . Une photographie issue<br />
des archives du musée, datable des années<br />
cinquante, montre l’angle d’une salle dédiée<br />
à l’art moderne : seules deux toiles<br />
14
d’Antoine <strong>Villard</strong> figurent dans l’accrochage.<br />
Le projet de rénovation du musée dans<br />
les années quatre-vingt-dix écarte définitivement<br />
le peintre du parcours permanent.<br />
Dans le cadre du renouvellement du<br />
département Beaux-Arts en 2018, celui-ci<br />
est de nouveau présent sur les cimaises du<br />
musée, avec un portrait de M me <strong>Villard</strong>, Les<br />
Boules de neige.<br />
Liste exhaustive des œuvres données par la veuve <strong>Villard</strong><br />
au musée de Cambrai en 1934 et 1935 :<br />
• La Seine au pont d’Arcole – Paris, 1910, huile sur toile, 65 × 81 cm, don en 1935, inv. P 260 ;<br />
• L’Île de la Cité – Paris, 1910, huile sur toile, 65 × 81 cm, don en 1935, inv. P 272 ;<br />
• Paysage du Vieux Lyon, huile sur toile, 97 × 130 cm, don en 1934,<br />
localisation aujourd’hui inconnue ;<br />
• Marché à Moret-sur-Loing, 1910, huile sur toile, 65 × 81 cm, don en 1935, inv. P 261 ;<br />
• Intérieur de l’église de Montarlot, près de Moret – La Nef, 1910, huile sur toile,<br />
130 × 97 cm, don en 1935, inv. P 262 ;<br />
• Intérieur de l’église de Montarlot, près de Moret – Le Choeur, 1910, huile sur toile,<br />
130 × 96 cm, don en 1935, inv. P 263 ;<br />
• Les Boules de neige, 1914, huile sur toile, 97 × 130 cm, don en 1935, inv. P 265 ;<br />
• Abricotiers en fleur, 1914, huile sur toile, 38 × 46 cm, don en 1935, inv. P 267 ;<br />
• Chemin dans l’oasis, 1914, huile sur toile, 65 × 81 cm, don en 1935, inv. P 268 ;<br />
• Le Grand Sapin, 1920, huile sur toile, 100 × 81 cm, don en 1935, inv. P 266 ;<br />
• Paysage du Mâconnais peint des terrasses de Montceau, 1920, huile sur toile,<br />
73 × 92 cm, don en 1935, inv. P 257 ;<br />
• Paysage du Mâconnais et les collines, 1920, huile sur toile, 73 × 92 cm, don en 1935,<br />
inv. P 258 ;<br />
• Les Pommes de terre, 1921, huile sur toile, 73 × 92 cm, don en 1935, inv. P 255 ;<br />
• Belle-Île-en-Mer – Les Rochers de velours, 1922, huile sur toile, 81 × 100 cm,<br />
don en 1935, inv. P 271 ;<br />
• Belle-Île-en-Mer – Le Rocher de la Vierge, 1922, huile sur toile, 81 × 100 cm,<br />
don en 1935, localisation aujourd’hui inconnue ;<br />
• Belle-Île-en-Mer – Les Bateaux, 1922, huile sur toile, 97 × 130 cm, don en 1935, inv. P 270 ;<br />
• Les Maïs, 1925, huile sur toile, 81 × 81 cm, don en 1935, inv. P 259 ;<br />
• Nature morte – Héliotropes et assiette de rubacel, 1928, huile sur toile, 81 × 81 cm,<br />
don en 1935, inv. P 269 ;<br />
• Le Jardin après la pluie au printemps, 1928, huile sur toile, 54 × 73 cm, don en 1935,<br />
localisation aujourd’hui inconnue ;<br />
• Neige à Hurigny, 1929, huile sur toile, 81 × 103 cm, don en 1935, inv. P 256 ;<br />
• Le Chemin de fer de ceinture, 1931, huile sur toile, 114 × 146 cm, don en 1934, inv. P 264 ;<br />
• Nature morte – Fleurs et livre, 1932, huile sur toile, 81 × 65 cm, don en 1935, inv. P 254.<br />
15
La revue L’Essor<br />
et la vie artistique<br />
en Bourgogne au<br />
début du xx e siècle<br />
Alain Bonnet<br />
En 1927, la Revue des Provinces de France<br />
fut fondée à Paris. Portant en sous-titre<br />
« Organe de synthèse du régionalisme<br />
intellectuel dans l’unité nationale », elle se<br />
donnait pour mission d’être le témoin et<br />
le relais de la vitalité culturelle en France<br />
au sortir de la Première Guerre mondiale.<br />
Elle entendait faire connaître « dans son<br />
ensemble et dans son détail, le mouvement<br />
intellectuel des provinces et des pays<br />
d’outre-mer de langue française » en célébrant<br />
l’histoire, la géographie et l’art des<br />
terroirs, et en présentant méthodiquement<br />
les publications qui concouraient au mouvement<br />
de décentralisation culturelle 1 . Dans la<br />
seconde moitié du xix e siècle, l’animation de<br />
la vie artistique a souvent pris la forme de<br />
Sociétés des amis des arts, qui se donnaient<br />
pour tâche de soutenir par des commandes<br />
et des achats les artistes ayant choisi de<br />
poursuivre leur carrière loin de Paris et<br />
de stimuler la vie culturelle en organisant<br />
des expositions régulières. La promotion<br />
des productions artistiques locales, pour<br />
nous en tenir à cet aspect seulement du<br />
renouveau régionaliste, était portée par des<br />
personnalités attachées à la célébration de<br />
leur petite patrie. La Société des amis des<br />
arts de Nantes, fondée en 1890, voulait<br />
« servir d’intermédiaire gratuit entre les<br />
artistes et les amateurs et faire l’éducation<br />
du public qui vient à [ses] expositions 2 ».<br />
Au début du xx e siècle, ce mouvement<br />
ajouta aux fonctions économique et pédagogique<br />
celle de valorisation de l’histoire<br />
culturelle locale et de régénération des<br />
traditions et des coutumes vernaculaires 3 .<br />
La revue L’Essor est un exemple parmi bien<br />
d’autres du réveil régionaliste au début<br />
du xx e siècle 4 (fig. 1). Le Miroir dijonnais<br />
et de Bourgogne, qui fut publié entre 1920<br />
et 1940, et portait pour sous-titre « Revue<br />
régionaliste mensuelle, lettres, théâtre,<br />
musique, beaux-arts, tourisme et voyages,<br />
cinémas, sports, bibliographie, échos et<br />
nouvelles », l’avait précédée de quelques<br />
années. Elle entretenait également des<br />
liens plus ou moins suivis avec des titres qui<br />
pouvaient lui être comparés, comme L’Élan.<br />
1. Sur ce point, voir Thiesse 1991.<br />
2. Bourcard 1894.<br />
3. Voir par exemple Houssais et Lagrange 2010.<br />
4. Notre étude s’appuie sur la collection conservée dans les archives du département d’histoire de l’art de l’université de<br />
Bourgogne. Cette collection, sans doute lacunaire, mais riche d’une centaine de numéros, peut être complétée par la collection de<br />
la Bibliothèque nationale, numérisée et mise en ligne sur le site Gallica. L’Essor continua à publier annuellement, dans la seconde<br />
moitié du xx e siècle, des fascicules qui se réduisaient au catalogue des expositions qu’elle organisait, loin donc de la richesse<br />
rédactionnelle des premiers numéros. La collection universitaire s’arrête au catalogue publié en 1977 à l’occasion du 48 e Salon de<br />
l’association, bien qu’elle ait organisé en 2017 sa 88 e exposition dans la salle de Flore du palais des ducs et des États de Bourgogne.<br />
16
Revue illustrée de l’activité artistique et<br />
littéraire du Bourbonnais ou La Tramontane.<br />
Revue mensuelle du régionalisme.<br />
Art et Littérature, publiée à Perpignan, avec<br />
lesquelles elle partageait quelquefois les<br />
mêmes contributeurs ou les mêmes illustrateurs.<br />
Organe de l’association éponyme,<br />
fondée quelques années auparavant, L’Essor<br />
énonça son programme, dès sa première<br />
parution en octobre 1925, dans un article<br />
signé de la rédaction. Celui-ci ne différait<br />
guère des proclamations d’intention qui<br />
pouvaient se lire dans les adresses au lecteur<br />
de ses consœurs d’autres provinces : le<br />
premier principe qui devait servir de charte<br />
était la pondération, appuyée sur la bienveillance.<br />
La revue voulait pénétrer tous les<br />
foyers, « aussi bien chez l’ouvrier intelligent<br />
que chez le bourgeois et le millionnaire » ;<br />
elle voulait accueillir et rendre compte des<br />
différentes tentatives artistiques à la seule<br />
condition qu’elles « ne recouvrent point<br />
l’ignorance ou la vulgarité, mais la recherche<br />
de l’Art » ; elle garantissait la liberté d’opinion<br />
et de critique, pourvu qu’elle ne soit<br />
« ni venimeuse ni partiale » ; elle entendait<br />
enfin faire place à « l’humour, l’humour<br />
bourguignon », mais en écartant « les trivialités,<br />
les farces d’atelier, les gaudrioles et,<br />
plus encore tout ce qui pourrait ressembler<br />
à de la pornographie […] 5 ». Cette proclamation<br />
de principes était complétée, dans<br />
le même numéro, par un article signé de<br />
Robert Guillou, écrivain, critique d’art et<br />
directeur de la Palette française, ainsi qu’il<br />
le précisait dans le sommaire. Guillou était<br />
un homme de lettres, né à Paris en 1887,<br />
qui devait occuper sous le régime de Vichy<br />
certaines fonctions officielles, devenant<br />
également en 1943 le président de l’Association<br />
des critiques d’art 6 . Le critique affirme<br />
dès la première phrase de son article, un peu<br />
témérairement sans doute, qu’il ne saurait<br />
plus y avoir en art de nouveaux systèmes,<br />
que plus rien ne restait à découvrir dans<br />
le domaine de la création plastique. Après<br />
cette forte affirmation, il définissait les<br />
formes d’une critique, sympathique aux<br />
tentatives, mais sévère face au charlatanisme.<br />
Pour compléter enfin cette présentation<br />
liminaire des objectifs et des mobiles<br />
de l’organe de l’association bourguignonne,<br />
le premier numéro était agrémenté d’une<br />
apologie adressée à la revue elle-même<br />
par Max Cappe qui, après l’avoir exhortée à<br />
Fig. 1<br />
Catalogue de L’Essor<br />
Octobre 1925<br />
Imprimé<br />
5. L’Essor. Revue mensuelle bourguignonne, octobre 1925, première année, n o 1, « Notre programme ».<br />
6. Le sculpteur Paul Landowski évoque dans son journal ces individus « agités et encombrants »<br />
qui « finissent par se faire une sorte de profession d’organisateurs d’expositions. À l’affût de tout<br />
ce qui se fait et surtout de ce qui va se faire, ils s’emparent de certaines idées, les considèrent<br />
comme leur bien, tout en s’empressant de les porter à tous. Ainsi ce jeune Robert Guillou,<br />
fondateur et président d’un groupement, La Palette française et fondateur et président<br />
également d’un autre groupement : l’Art sportif. » 30 mars 1922, en ligne.<br />
17
Fig. 2<br />
Article consacré<br />
à Antoine <strong>Villard</strong><br />
Catalogue de<br />
L’Essor, 1925<br />
Imprimé<br />
garder « ce parfum de Terroir que nous te<br />
donnons afin que la Bourgogne se mire en<br />
tes feuillets », la comparait à « une mère<br />
dont le sein gonflé nous offre la Vie » et à<br />
« une source intarissable où nos esprits<br />
s’abreuvent pour perpétuer au loin l’âme de<br />
nos coteaux fertiles » et pour « atteindre les<br />
Sommets où règnent les Impondérables ! »<br />
Toute la revue ne se réduisait toutefois pas<br />
au lyrisme exalté chantant la terre fertile et<br />
aux admonestations prudhommesques de<br />
ses critiques. Chaque numéro était orné de<br />
bois gravés signés par Paul Devaux, Paul-<br />
Louis Nigaud ou Albert Montmerot, artistes<br />
qui n’ont laissé qu’une trace bien légère dans<br />
l’histoire de l’art du xx e siècle 7 . Elle publiait<br />
18
également des pièces en vers dont la sentimentalité<br />
n’a pas assuré à leurs auteurs,<br />
Pierre Moriss, Roger Pochard, Auguste Caix,<br />
de rester dans les mémoires, et des études<br />
d’érudition touchant à l’histoire locale.<br />
On perçoit cependant, à travers ces tentatives<br />
d’expression artistique, l’émulation<br />
qui pouvait agiter un cercle de jeunes gens<br />
et leur aspiration à, sinon rivaliser avec les<br />
modèles parisiens, du moins participer aux<br />
mouvements artistiques de la capitale dont<br />
ils percevaient les échos 8 .<br />
La revue recèle cependant un matériau<br />
digne d’intérêt pour l’historien de l’art dans<br />
la mesure où elle renseigne sur l’organisation<br />
et les activités d’un cercle artistique<br />
ou, de façon plus large, sur les expositions<br />
et les festivités organisées sous l’égide des<br />
autorités locales, depuis les excursions<br />
touristiques autour de Dijon aux banquets<br />
et aux bals costumés organisés à la Grande<br />
Taverne ou à l’Hôtel Chambellan. Le numéro<br />
de janvier 1926 donnait la liste détaillée des<br />
membres de la société artistique, présidée<br />
par deux sénateurs et un général 9 ; parmi<br />
les membres d’honneur, on peut relever<br />
les noms de Jean Dampt (1854-1945),<br />
formé à l’école des Beaux-Arts de Dijon,<br />
d’Albert Joliet (1839-1928), le conservateur<br />
du musée de Dijon, de François Pompon<br />
(1855-1933), gloire locale domiciliée à Paris,<br />
d’Adolphe Willette (1857-1926), célèbre<br />
caricaturiste montmartrois qui avait étudié<br />
au Lycée impérial de Dijon, ou encore<br />
d’Hubert Yencesse (1900-1987), sculpteur<br />
parisien fils d’Ovide, directeur de l’école des<br />
Beaux-Arts de Dijon et devenu l’élève de<br />
Pompon. Ces réseaux de sociabilité, locale<br />
et parisienne, permettaient de pousser des<br />
artistes qui ne recevaient pas, dans la capitale,<br />
l’attention des titres de presse importants,<br />
qu’ils soient généralistes comme<br />
les quotidiens nationaux, ou spécialisés,<br />
comme les nombreuses publications qui,<br />
depuis la seconde moitié du xixe siècle,<br />
s’occupaient des choses de l’art. L’Essor<br />
entretenait au demeurant une antenne<br />
parisienne, ouverte aux artistes et aux<br />
littérateurs bourguignons exilés à Paris, qui<br />
organisait des conférences et des banquets.<br />
L’association L’Essor, et la revue du même<br />
nom qui en était l’organe, jouèrent un rôle<br />
dans la carrière d’Antoine <strong>Villard</strong> (fig. 2),<br />
mais un rôle discret qui contraste avec son<br />
titre de membre d’honneur et sa position<br />
au sein de certaines instances artistiques<br />
parisiennes. La revue lui consacra en effet,<br />
Fig. 3<br />
Paysage<br />
du Mâconnais<br />
Reproduction<br />
en noir et blanc<br />
Catalogue de<br />
L’Essor, 1925<br />
7. Paul-Louis Nigaud (1895-1937), membre de l’association nivernaise « Le Groupe » et de « L’Essor » a exposé aux Salons des<br />
indépendants, de la Société nationale des Beaux-Arts et d’automne ; Paul Devaux (1894-1949), graveur sur bois, auteur du Vieux<br />
Dijon (1928), a illustré des ouvrages de Valéry Larbaud et de Charles Maurras ; Albert Montmerot (1902-1942) a eu une carrière<br />
d’artiste bohème à Montparnasse, Dijon et Autun, et a exposé dans les Salons parisiens.<br />
8. Après une interruption de quelques mois, due à des difficultés financières, la revue parut de nouveau en 1927. L’occasion<br />
pour Roger Thiblot, son rédacteur en chef, de rappeler encore une fois les objectifs de la société et de son organe, et de préciser<br />
son rapport à la capitale : « Nous ne nourrissons pas d’hostilité de principe à l’égard de Paris ; la capitale française se comporte<br />
comme le merveilleux carrefour de tous les courants de pensée et de sensibilité ; c’est le champ privilégié des activités les plus<br />
fécondes […]. » (Nouvel Essor, mars 1927, deuxième année, n o 1).<br />
9. Claude Chauveau (1861-1940), sénateur de Côte-d’Or de 1910 à sa mort ; Émile Humblot (1862-1931), sénateur de Haute-Marne<br />
de 1920 à sa mort ; Robert Duplessis (1857-1929), général qui présidait également l’association dijonnaise « Les Amis du Beau ».<br />
19
dès son premier numéro, un article de trois<br />
pages, placé en encart. Cette étude était<br />
signée par Émile Rondinet (1879-1962),<br />
secrétaire général de l’association, lui-même<br />
peintre et ami de François Pompon ; elle<br />
était illustrée d’un portrait photographique<br />
du peintre et de deux reproductions de ses<br />
tableaux, en noir et blanc, Belle-Île-en-Mer<br />
(fig. 4) et Paysage du Mâconnais (fig. 3).<br />
La suite de l’encart était consacrée à la<br />
reproduction de quelques œuvres ayant<br />
figuré au troisième Salon de l’Essor,<br />
signées de Jehan Moreau, M. Zévort ou<br />
Paul-Louis Nigaud. C’est à l’occasion de ce<br />
Salon que <strong>Villard</strong> exposa une vaste rétrospective<br />
de son œuvre, qui justifiait l’étude<br />
qui lui était consacrée. Le peintre devait<br />
d’ailleurs transporter à Paris, à la Galerie<br />
Devambez boulevard Malesherbes, puis<br />
à Mâcon à l’exposition des Amis des Arts,<br />
quelques-uns des tableaux accrochés à<br />
Dijon. Émile Rondinet, après un bref rappel<br />
biographique qui mentionnait le passage<br />
de l’artiste à l’École des beaux-arts de<br />
Paris dans les ateliers de Jules Lefebvre<br />
(1834-1912) et de Benjamin-Constant (1845-<br />
1902), relatait son parcours professionnel<br />
marqué par son échec aux concours<br />
scolaires de l’établissement parisien, qu’il<br />
justifiait par l’indépendance de caractère de<br />
<strong>Villard</strong>, et son refus de participer aux expositions<br />
de la Société des artistes français,<br />
qu’il imputait à un manque de relations.<br />
Ces échecs, subis ou cherchés, poussèrent<br />
<strong>Villard</strong>, selon Rondinet, à embrasser une<br />
carrière indépendante, sanctionnée par des<br />
expositions au Salon d’automne, au Salon<br />
des indépendants, à la Société nationale<br />
des Beaux-Arts, et le poussèrent à devenir<br />
en 1923 membre fondateur du Salon des<br />
Tuileries. Le critique parisien concluait<br />
son article en citant ses confrères, parmi<br />
lesquels Louis Vauxcelles (1870-1943) était<br />
le plus éminent, mais pas le moins laudateur.<br />
Le critique parisien, dont le titre de gloire<br />
avait été de baptiser ironiquement les deux<br />
principaux mouvements stylistiques du<br />
début du siècle, le fauvisme et le cubisme,<br />
affirmait ainsi que l’exposition de <strong>Villard</strong> à<br />
la galerie Bernheim-Jeune, avenue Matignon,<br />
était de toutes celles qu’il avait pu<br />
visiter « la plus neuve, la plus forte, la plus<br />
significative… ».<br />
Le troisième Salon de L’Essor, organisé au<br />
palais des ducs et des États de Bourgogne<br />
de Dijon, fut inauguré par le préfet et par le<br />
maire. <strong>Villard</strong> bénéficia, pour sa rétrospective,<br />
d’une salle entière et de l’attention de<br />
la critique dans la presse dijonnaise, reproduite<br />
dans le deuxième numéro de la revue :<br />
« Cet artiste bourguignon a un tempérament<br />
vigoureux, fait d’ardeur et d’indépendance,<br />
de sincérité absolue, de lyrisme qu’exalte<br />
encore le culte de la nature. Son style, un<br />
style bien à lui, est ferme et résolu. Sa peinture<br />
est toute spontanéité ; sur un dessin fin<br />
et vigoureux, il procède par touches grasses<br />
et savoureuses, avec le souci constant des<br />
valeurs. » Passé ce moment de gloire dans<br />
la revue artistique locale, les mentions de<br />
<strong>Villard</strong> dans les numéros suivants furent<br />
brèves et éparses. Il faut les chercher principalement<br />
dans les rubriques placées à la fin<br />
de la revue, qui détaillaient les nouvelles et<br />
se faisaient l’écho des expositions en dehors<br />
de Dijon. La rédaction adressa ainsi en<br />
février 1926 ses félicitations au peintre qui<br />
venait de voir l’une de ses toiles, illustrant<br />
le pittoresque du chemin de fer de ceinture<br />
à Paris, être acquise par l’État et promise<br />
à l’accrochage au musée du Luxembourg,<br />
le musée national des artistes vivants.<br />
Sa présence régulière aux Salons de l’Essor<br />
était signalée, sans être cependant détachée<br />
de la cohorte de ses confrères :<br />
un critique nota, en 1927, que <strong>Villard</strong><br />
« reste toujours aussi puissant et aussi<br />
pathétique avec ses couleurs sombres » ou<br />
« sa vision forte et synthétique ». Ses expositions<br />
parisiennes ne firent le plus souvent<br />
l’objet que d’un entrefilet.<br />
20
Que peut-on conclure de cette plongée dans<br />
les pages jaunies de L’Essor concernant la<br />
fortune et le renom de <strong>Villard</strong> ? À l’évidence,<br />
s’il fut très tôt célébré par les cercles dijonnais,<br />
le peintre natif de Mâcon ne constitua<br />
jamais un pilier de la vie artistique locale.<br />
Ses activités à Paris ne lui permettaient sans<br />
doute pas de participer autant qu’il l’aurait<br />
souhaité aux activités de l’association dont il<br />
était sociétaire, et il entretenait trop peu de<br />
liens avec la région pour pouvoir se rappeler<br />
aux souvenirs de ses compatriotes bourguignons.<br />
La rétrospective au troisième Salon<br />
de l’Essor et sa couverture dans la revue<br />
qui anticipait l’hommage de même nature<br />
rendu à Pompon furent un coup sans lendemain<br />
et le souvenir de <strong>Villard</strong>, bien qu’il<br />
ait participé avec fidélité aux Salons de<br />
l’association, ne laissa pas une trace bien<br />
marquée dans les colonnes de la revue.<br />
Fig. 4<br />
Belle-Île-en-Mer<br />
Reproduction<br />
en noir et blanc<br />
Catalogue<br />
de L’Essor, 1925<br />
21
Antoine <strong>Villard</strong>,<br />
collectionneur<br />
Benoît Mahuet<br />
« Le divin Rousseau »<br />
La carrière de collectionneur d’Antoine<br />
<strong>Villard</strong> accompagne étroitement sa vie de<br />
peintre. Elle ne se limite pas à la simple<br />
contemplation ; elle est un support et une<br />
justification de son engagement en faveur<br />
de l’art, notamment celui de ses contemporains<br />
et des grands maîtres qui les ont<br />
inspirés. Une interview du journal Paris-Soir<br />
(18 septembre 1924) résume l’esprit du<br />
peintre : « Il n’y a pas de supériorité du sujet<br />
et s’il me fallait choisir entre Les Pèlerins<br />
d’Emmaüs et le Bœuf écorché, je prendrais<br />
ce dernier d’emblée […]. Quelles actions de<br />
grâce ne devons-nous pas à des peintres<br />
comme Pissarro, Van Gogh, Seurat, Cézanne<br />
et à ce divin Henri Rousseau, le Douanier !<br />
Après Chardin, ils nous ont prouvé qu’on<br />
pouvait créer une œuvre pathétique et<br />
éternelle avec quelques fruits, quelques<br />
arbres, quelques pauvres hommes. »<br />
Ce sont indéniablement les peintures<br />
d’Henri Rousseau qui firent la réputation<br />
de la collection d’Antoine <strong>Villard</strong>. Les deux<br />
artistes vont se croiser au Salon des indépendants.<br />
Rousseau y expose ses dernières<br />
toiles entre 1907 et 1910, alors que <strong>Villard</strong><br />
entame une nouvelle carrière à partir de<br />
1907. Ce court laps de temps justifie que l’on<br />
ne retrouve aucune correspondance entre<br />
eux dans les archives du peintre mâconnais.<br />
Son carnet d’adresses (dans lequel figurent<br />
pourtant des dizaines de noms de galeristes,<br />
d’artistes aussi divers que Man Ray,<br />
Emmanuel Gondouin ou André Lhote et<br />
Fernand Léger) ne laisse pas d’indices sur<br />
un contact direct. Enfin, parmi les peintures<br />
de Rousseau de la collection <strong>Villard</strong>, aucune<br />
n’a été exposée au Salon des indépendants<br />
entre 1907 et 1910 (à l’exception de<br />
Le Présent et le Passé en 1907). Antoine<br />
<strong>Villard</strong> ayant noué des relations avec<br />
Paul Guillaume, Serge Jastrebzoff, Oscar<br />
Miestchaninoff ou Ambroise Vollard, cette<br />
collection s’est donc constituée auprès des<br />
marchands d’art ainsi qu’en vente publique.<br />
Les premières acquisitions<br />
Antoine <strong>Villard</strong> figure parmi les tout<br />
premiers admirateurs d’Henri Rousseau.<br />
Sa première acquisition, La Passerelle de<br />
Passy, premier tableau passé en vente<br />
publique 1 s’effectue certainement en mai<br />
1914, lors de la vente Kuhlmann.<br />
<strong>Villard</strong> va alors très rapidement détenir des<br />
œuvres importantes telles qu’Éclaireurs<br />
attaqués par un tigre, La Carriole du père<br />
Junier, Le Lion dans la forêt au clair de Lune,<br />
La Famille, Le Canal, La Promenade (Parc<br />
Montsouris), Le Mariage du peintre, ainsi<br />
que des Bouquets de fleurs (fig. 1).<br />
1. Hoog, Luncher et Rubin 1984, p. 152-153.<br />
22
Fig. 1<br />
Bouquet de fleurs<br />
d’Henri Rousseau<br />
(ancienne collection<br />
Antoine <strong>Villard</strong>)<br />
François Antoine<br />
Vizzavona (1876-1961)<br />
Photographie<br />
Collection particulière<br />
Durant les années vingt, sa réputation<br />
de dénicheur de talent suscite la curiosité<br />
d’une presse spécialisée étonnée par<br />
« l’œil » dont il fit preuve en reconnaissant<br />
précocement le génie du Douanier<br />
Rousseau. Cette position privilégiée,<br />
doublée de son activité en tant que<br />
peintre figurant dans les nombreux Salons<br />
de l’entre-deux-guerres, le place alors<br />
au centre des débats de la vie artistique.<br />
Il prend position dans le questionnement<br />
autour de la pertinence de Salons<br />
démesurés, de l’avenir du Salon des<br />
indépendants, prônant « l’affirmation des<br />
tendances contemporaines 2 », et saluant<br />
« le bénéfice du placement par affinités 3 ».<br />
Il devient naturellement chef de file,<br />
s’entourant d’une jeune génération de<br />
peintres de l’école de Paris comme Véra<br />
Rockline, Roger Limouse, Jules Cavaillès,<br />
Michel Kikoïne, Henry Ramey, Zina<br />
Gauthier ou Charles Kvapil et participe à<br />
l’organisation de nombreux Salons 4 .<br />
En revanche, il existe peu de photographies<br />
de la collection visible au mur de son<br />
appartement (fig. 2). Malgré l’abondante<br />
documentation, la disposition nous en<br />
est inconnue. Seul <strong>Villard</strong> lui-même s’est<br />
représenté, notamment dans des autoportraits,<br />
avec en arrière-plan, des œuvres de<br />
sa collection 5 (fig. 3).<br />
2. Le Bulletin de la Vie artistique 1924, p. 89-90.<br />
3. Ibid. 1925, p. 152-153.<br />
4. Sociétaire du Salon des indépendants, de la Société nationale des Beaux-Arts, d’automne, de l’Essor ; membre fondateur du<br />
Salon des Tuileries et du Salon de l’art français indépendant.<br />
5. En 1921, à la galerie Bernheim-Jeune, <strong>Villard</strong> expose Devant le tableau de Rousseau (cat. 26).<br />
23
Fig. 2<br />
Antoine <strong>Villard</strong><br />
dans son<br />
atelier – Square<br />
Desnouettes<br />
Jean Gilbert<br />
Photographie<br />
5,7 × 8,5 cm<br />
Collection<br />
particulière<br />
Une collection d’art moderne<br />
La collection d’Antoine <strong>Villard</strong> ne se limite<br />
pas aux seules peintures de Rousseau.<br />
Celles-ci firent sa notoriété et nombre de<br />
personnalités de l’art et de journalistes se<br />
déplacèrent pour l’admirer.<br />
Le premier à lui consacrer une étude est<br />
Charles Fegdal qui, dans un recueil intitulé<br />
Ateliers d’artistes 6 livre trente-cinq<br />
portraits dont celui d’Antoine <strong>Villard</strong>.<br />
Ce projet est probablement déjà abouti<br />
en 1923 puisque des indications de<br />
corrections sont données par le peintre<br />
à cette date 7 . Le texte du critique d’art –<br />
compte rendu rédigé de visite des œuvres<br />
exposées – livre des renseignements précieux<br />
quoique imprécis sur le contenu de<br />
la collection. Il cite Les Harengs saurs de<br />
Van Gogh ainsi qu’une peinture de Picasso<br />
datée de 1911 8 . Il mentionne également<br />
la présence de figures artistiques comme<br />
Asselin, Jacquemot, Prax, Lhote, Léger,<br />
Dufresne, Utrillo.<br />
D’autres articles permettent de compléter<br />
ce vaste ensemble estimé à cent peintures 9 :<br />
« Le Grand Nu [de Modigliani] que j’ai vu,<br />
si je ne m’abuse, longtemps chez le peintre<br />
<strong>Villard</strong>, est une simple merveille », écrira<br />
Louis Léon-Martin 10 .<br />
6. Fegdal 1925.<br />
7. Lettre d’Antoine <strong>Villard</strong> à Charles Fegdal, 20 mai 1923.<br />
8. L’Huilier, prêté par <strong>Villard</strong> à la Galerie Georges Petit (cat. 70) et au Kunsthaus de Zurich (cat. 61) en 1932.<br />
9. Warnod 1930.<br />
10. Léon-Martin 1929.<br />
24
Fig. 3<br />
Autoportrait<br />
Huile sur toile<br />
55 × 46 cm<br />
S.D.b.d. A. <strong>Villard</strong> 1932<br />
Collection particulière<br />
À travers cette intentionnelle mise<br />
en lumière, Antoine <strong>Villard</strong> souhaite<br />
défendre la jeune peinture. À l’instigation<br />
d’André Warnod, il adresse une<br />
lettre à la revue Conférencia, Journal de<br />
l’université des Annales 11 , plaidoyer pour<br />
un nouveau visage de l’art, et propose<br />
à son tour un panorama de l’atelier :<br />
« Vous n’avez pas oublié la somptuosité<br />
des toiles de Dufresne. Les œuvres de<br />
Dufy me comblent de joie. Quelle sobriété<br />
de moyens chez Derain, mais quelle<br />
maîtrise ! […]. Braque, style, pureté.<br />
– Picasso, génie. Léger, vie. […] Les petits<br />
tableaux de Daumier sont grands parce<br />
que l’homme est un colosse. Quelle<br />
distinction, certes, la plus grande chez<br />
Laprade ! » Antoine <strong>Villard</strong> cite encore<br />
Camille Pissarro ou Marius Borgeaud :<br />
« Borgeaud, mon brave ami Borgeaud, le<br />
riche ouvrier, quand comprendra-t-on la<br />
valeur de ce grand peintre ? »<br />
Le peintre traverse ces années avec<br />
enthousiasme. Il participe à plus de cent<br />
cinquante expositions et les artistes qu’il<br />
soutient ne se limitent pas à ceux de<br />
sa collection. L’interview qu’il donne à<br />
André Warnod (Comoedia, 29 mai 1928)<br />
révèle le défenseur de la modernité : « Je<br />
ne me chargerai pas d’expliquer la peinture<br />
de Miró, mais ses œuvres me donnent de<br />
la joie […]. Nous venons de traverser une<br />
période formidable avec les fauves, le<br />
cubisme et non seulement pour les conséquences<br />
que ces mouvements ont eues.<br />
Ce sont des époques durables par les<br />
monuments qu’elles ont laissés. »<br />
11. Warnod 1930.<br />
25
Fig. 4<br />
Reproductions<br />
de peintures<br />
d’Henri Rousseau<br />
appartenant à<br />
Antoine <strong>Villard</strong><br />
in Les Hommes<br />
du Jour, 1926,<br />
accompagnant<br />
un article de<br />
Georges Clairet<br />
Collection<br />
particulière<br />
L’atelier du peintre : une collection vivante et visible<br />
Durant les années vingt-trente, Antoine<br />
<strong>Villard</strong>, fait de sa collection un outil d’éducation<br />
et de promotion de l’art, organisant<br />
des visites commentées de son atelier.<br />
La presse se fera régulièrement l’écho de<br />
l’événement.<br />
Il s’implique dans l’organisation du Salon<br />
des Échanges, manifestation mise en œuvre<br />
à partir de 1922. L’objectif est d’aider les<br />
artistes en situation de précarité par le<br />
troc d’œuvres d’art contre des produits de<br />
première nécessité avec le public.<br />
De même, Antoine <strong>Villard</strong> fut régulièrement<br />
sollicité pour le prêt d’œuvres de<br />
sa collection. En 1926, la rétrospective<br />
« 30 ans d’art indépendant 1884-1914 12 »,<br />
présente une série d’expositions posthumes<br />
dont celle consacrée à Rousseau. (fig. 4)<br />
Cinq des six œuvres exposées appartiennent<br />
à Antoine <strong>Villard</strong> : Éclaireur attaqué par un<br />
tigre, Le Canal, La Carriole du père Junier,<br />
Singes dans la forêt d’orangers, Le Repas du<br />
lapin. À cette occasion, il prête également<br />
Le Vannier de Van Gogh.<br />
Désireux de contribuer à l’émergence<br />
de talents méconnus, Antoine <strong>Villard</strong>,<br />
dont les amitiés artistiques sont riches et<br />
diversifiées, met à profit un séjour estival<br />
en Bourgogne pour faire connaître de<br />
nouveaux artistes. En 1928, on le retrouve<br />
aux Écharmeaux, dans le Beaujolais, où,<br />
en compagnie du journaliste Louis Léon-<br />
Martin, il découvre les œuvres laissées<br />
par un sabotier, sculpteur inconnu, Jean<br />
Molette (1819-1889).<br />
12. Société des artistes indépendants, Trente ans d’art indépendant 1884-914, Exposition rétrospective, Paris, Grand Palais<br />
des Champs-Élysées, 20 février – 21 mars 1926.<br />
26
Épilogue d’une grande collection<br />
Durant la première grande rétrospective<br />
consacrée au Douanier 13 , Antoine <strong>Villard</strong> prête<br />
Le Pont, La Promenade (Parc Montsouris),<br />
Malakoff, Dame en brun dans la forêt.<br />
Il décède prématurément en février 1934.<br />
À cette époque, la réputation de cette<br />
collection subsiste dans la mémoire<br />
des conservateurs de musées. La veuve<br />
d’Antoine <strong>Villard</strong> s’efforcera de faire vivre<br />
cette collection par des prêts réguliers.<br />
Lors de l’exposition « Les maîtres de l’art<br />
indépendant, 1895-1937 » organisée au<br />
Petit Palais en 1937, il est présent à titre<br />
posthume avec six peintures dont Pompe à<br />
sulfates, 1921 14 . Les œuvres de sa collection<br />
ne sont pas oubliées telles Parc Montsouris,<br />
Dame en brun dans la forêt et La Carriole<br />
du père Junier 15 de Rousseau. M me <strong>Villard</strong><br />
prête également Les Deux Sœurs de Marie<br />
Laurencin, L’Escale de Charles Dufresne,<br />
Nu de dos et Paysage de Maurice Loutreuil,<br />
Les Négresses d’Emmanuel Gondouin.<br />
En 1934, après son décès, des expositions<br />
rétrospectives sont organisées par ses<br />
amis et confrères au Salon des Tuileries, de<br />
l’Essor ou d’Automne. L’année suivante le<br />
Salon des Échanges et le Salon des indépendants<br />
mettent en valeur son travail.<br />
Durant le temps de cette visibilité,<br />
M. Gaillard, conservateur du musée de<br />
Cambrai et compatriote mâconnais entre<br />
en contact avec M me <strong>Villard</strong> qui fera don<br />
de vingt et une peintures de son mari.<br />
Souhaitant participer au renouveau des<br />
musées de province, M. Gaillard entame,<br />
en vain, des démarches visant à compléter<br />
cet ensemble « en l’enrichissant d’un<br />
Rousseau, d’un Dufresne ou tout autre toile<br />
que <strong>Villard</strong> aimait et qui voisinait déjà avec<br />
ses œuvres 16 . »<br />
En province, dans sa région natale, il n’est<br />
pas oublié. Le sculpteur Maxime Descombin<br />
(1909-2003) organise en 1946, au sortir<br />
de la guerre, l’exposition Les Maîtres et les<br />
Jeunes sous le patronage des Amis des arts<br />
de Gaston Diehl. Antoine <strong>Villard</strong> figure au<br />
catalogue et quelques toiles de sa collection,<br />
Les Deux Sœurs de Marie Laurencin<br />
et un Nu de Maurice Loutreuil, sont<br />
empruntées à M me <strong>Villard</strong>.<br />
De cette collection (fig. 5), on retrouve<br />
quelques peintures dans des institutions<br />
publiques. M me <strong>Villard</strong> fait don au musée<br />
d’Art moderne de la Ville de Paris en 1936<br />
de deux œuvres importantes de Charles<br />
Dufresne : Le Plâtre (1918) et Maternité<br />
(1920). La Carriole du père Junier quant à<br />
elle rejoint la collection Walter-Guillaume<br />
au musée de l’Orangerie.<br />
Fig. 5<br />
Buste de l’Agenouillée<br />
D’après Wilhelm<br />
Lehmbruck<br />
v. 1912-1915<br />
Buste en terre cuite,<br />
moulage d’édition<br />
Collection particulière<br />
13. Henri Rousseau, Kunsthalle Basel, 1 er mars –2 avril 1933.<br />
14. Collection du musée du Petit Palais.<br />
15. Peinture vendue en 1927 par Antoine <strong>Villard</strong> à Paul Guillaume ; désormais conservée au musée de l’Orangerie<br />
(collection Walter-Guillaume).<br />
16. Lettre de M. Gaillard à M me <strong>Villard</strong>, 22 novembre 1935.<br />
27
28
La ville,<br />
laboratoire<br />
d’expériences<br />
La formation reçue par Antoine <strong>Villard</strong> à l’École des Beaux-Arts de<br />
Lyon constitue une étape déterminante qui oriente résolument la<br />
manière dont l’artiste appréhende son environnement. Inscrit en<br />
1883, il est admis dans la section architecture l’année suivante.<br />
Les dessins qu’il réalise alors, élévations de façade ou éléments de<br />
décor, correspondent à l’enseignement prodigué. S’il quitte l’établissement<br />
en 1886, ses œuvres postérieures témoignent d’un intérêt<br />
pour les sujets d’architecture observés depuis l’appartement lyonnais<br />
du quai Saint-Antoine. Parmi les tableaux exposés aux différents<br />
Salons de la Société lyonnaise des Beaux-Arts de 1911 à 1914, les<br />
paysages du Vieux-Lyon et de Fourvière occupent une place prépondérante.<br />
C’est pourtant à Paris où il réside dès 1886 qu’il trouve un<br />
champ d’expérimentation nouveau. Il est alors domicilié chez ses<br />
parents, boulevard de Port-Royal, et exerce la profession d’architecte<br />
1 . D’après ses biographes, Émile Rondinet, Georges Turpin ou<br />
Yvanhoé Rambosson, il suit les cours d’architecture de l’École des<br />
Beaux-Arts pendant deux ans, puis complète son apprentissage de<br />
la peinture à l’Académie Julian en 1889 et 1890 comme élève de<br />
Jules Lefebvre (1834-1912) et de Benjamin-Constant (1845-1902) 2 .<br />
La Vue de Lyon qu’il exécute alors reflète son approche de la peinture<br />
: représenter la ville constitue un axe de recherche privilégié<br />
que les vues des bords de Seine illustrent parfaitement.<br />
1. D’après son livret militaire.<br />
2. Antoine <strong>Villard</strong> ne figure pas dans le Dictionnaire des élèves architectes<br />
de l’école des Beaux-Arts de Paris (1800-1968).<br />
29
La Seine au pont d’Arcole (fig. 4 p. 7) de facture impressionniste<br />
traduit le mouvement incessant des véhicules et promeneurs.<br />
D’autres œuvres, les Matelassières par exemple, préparées en<br />
extérieur par des croquis et des études sur bois, retranscrivent<br />
plus spécifiquement l’activité qui entoure le peintre. L’animation<br />
urbaine capte ici son attention et devient sujet principal. Puis la<br />
présence humaine s’atténue, comme le montrent certains paysages<br />
de 1907, La Maison en construction ou L’Avenue Philippe-Auguste.<br />
Les panoramas en contre-plongée et la touche impressionniste<br />
cèdent peu à peu la place à des compositions aux contours plus<br />
nets, au cadrage raccourci, recentrées sur des vues frontales,<br />
telles le Quai Notre-Dame, davantage susceptibles de mettre en<br />
valeur les bâtiments. L’appartement du boulevard de Clichy qu’il<br />
occupe entre 1909 et 1911 l’amène à s’intéresser à Montmartre et<br />
à travailler depuis sa fenêtre.<br />
Les autres genres ne sont pas pour autant délaissés.<br />
La représentation de sa mère qu’il dédie au Salon des artistes<br />
français de 1907, les études de nus et les natures mortes,<br />
révèlent dès cette période une attention portée au répertoire<br />
de Paul Cézanne. Cette orientation vers une géométrisation<br />
des formes le conduit à recentrer ses compositions autour<br />
de quelques lignes principales. Cette pratique se généralise à<br />
partir de 1922, date à laquelle Antoine <strong>Villard</strong> emménage square<br />
Desnouettes, dans un atelier tout proche du boulevard de ceinture.<br />
La période coïncide aussi avec un voyage à Belle-île-en-Mer<br />
où, comme Claude Monet, il multiplie les variations autour d’un<br />
même motif. Le chemin de fer du boulevard de ceinture et les<br />
usines attenantes, visibles depuis son atelier, occupent désormais<br />
la plupart des toiles parisiennes et lui procurent l’inspiration<br />
et la satisfaction attendues. Deux ans avant sa mort, il envisage<br />
même de leur consacrer une exposition intitulée « Le chemin<br />
de fer de ceinture ». « Je n’ai encore rien trouvé de plus beau,<br />
[…] de plus humain, j’ai encore tout à dire sur ce spectacle prodigieusement<br />
émouvant 3 . »<br />
3. Hurigny, 21 août 1932, lettre à Charles Fegdal.<br />
30
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Portrait photographique d’Antoine <strong>Villard</strong><br />
G. L. Manuel Frères, Paris<br />
Tirage argentique contrecollé sur carton<br />
30 × 15 cm<br />
Collection particulière<br />
31
Étude d’architecture : élévation de façade<br />
Plume et aquarelle sur papier<br />
44 × 30 cm<br />
Collection particulière<br />
32
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Vue de Lyon<br />
Huile sur carton<br />
48 × 31 cm<br />
S.D.b.g. A <strong>Villard</strong>-1890<br />
Collection particulière<br />
33
34
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Autoportrait<br />
Huile sur toile<br />
81 × 65 cm<br />
S.D.b.d. A. <strong>Villard</strong>-1921<br />
Collection particulière<br />
Autoportrait<br />
Graphite et encre<br />
de Chine sur papier<br />
26,7 × 21,6 cm<br />
Collection particulière<br />
35
Études pour<br />
le portrait de la mère<br />
d’Antoine <strong>Villard</strong><br />
Mine de plomb<br />
et graphite sur papier<br />
36,1 × 18,5 cm<br />
Collection particulière<br />
36
La ville, laboratoire d’expériences privilégiée<br />
Portrait de ma mère<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong>. 1907<br />
Collection particulière<br />
Étude pour le portrait<br />
du père d’Antoine <strong>Villard</strong><br />
Mine de plomb<br />
et graphite sur papier<br />
15,5 × 18,1 cm<br />
Collection particulière<br />
37
Nu au livre<br />
Huile sur toile<br />
54,7 × 46 cm<br />
Collection particulière<br />
La Toilette<br />
Huile sur carton<br />
46 × 55,3 cm<br />
Collection particulière<br />
38
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Les Matelassières<br />
Huile sur bois<br />
26 × 34,5 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Sur les quais.<br />
Les Matelassières<br />
Crayon brun sur papier<br />
25 × 32,6 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
39
Dans l’atelier – Montmartre<br />
Huile sur panneau<br />
59 × 79 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection Lyssandre et Tess Dupuy-Marchi<br />
Jardin à<br />
Montmartre –<br />
Automne<br />
Crayon brun sur papier<br />
25 × 32,6 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
40
La ville, laboratoire d’expériences<br />
La Maison en construction – Paris<br />
Huile sur toile<br />
81 × 60 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong>. 1907<br />
Collection particulière<br />
41
L’Île de la Cité –<br />
Paris<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 272, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
Projet pour<br />
un paravent<br />
Huile sur toile<br />
44 × 41 cm<br />
Collection particulière<br />
42
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Boulevard de Picpus – Paris<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong>. 1907<br />
Collection particulière<br />
43
Avenue<br />
Philippe-Auguste,<br />
Paris<br />
Huile sur toile<br />
38 × 46 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong>. 1907-3-<br />
Collection particulière<br />
Marché<br />
à Moret-sur-Loing<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 261, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
44
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Quai Notre-Dame – Paris<br />
Huile sur toile<br />
55 × 46 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
45
Montmartre<br />
Huile sur toile<br />
96,5 × 130 cm<br />
S.D.b.d. A. <strong>Villard</strong>-1910<br />
Collection particulière<br />
46
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Vue de Lyon<br />
Huile sur toile<br />
61 × 46 cm<br />
S.D.b.d. A. <strong>Villard</strong>. 1910<br />
Collection particulière<br />
47
48
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Fourvière et les toits<br />
Huile sur toile<br />
130 x 97 cm<br />
S.D.b.d. A. <strong>Villard</strong>/1910<br />
Collection particulière<br />
Le Vieux Lyon sous la neige<br />
Huile sur toile<br />
80 × 64 cm<br />
S.D.b.d. A. <strong>Villard</strong>/1910<br />
Inv. 3434, dépôt du musée<br />
des Beaux-Arts de la Ville de Dijon<br />
au musée des Ursulines de Mâcon<br />
Intérieur de l’église de Montarlot,<br />
près de Moret – Le Choeur<br />
Huile sur toile<br />
130 × 96 cm<br />
S.D.b.d. A. <strong>Villard</strong>/1910<br />
Inv. P 263, musée des Beaux-Arts de Cambrai<br />
49
Les Boules de neige<br />
Huile sur toile<br />
97 × 130 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong>. 1914<br />
Inv. P 265, musée des Beaux-Arts de Cambrai<br />
50
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Atelier d’Antoine <strong>Villard</strong> – Paris<br />
Huile sur toile<br />
81 × 81 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
51
Chemin de fer<br />
de ceinture –<br />
Paris<br />
Huile sur toile<br />
57 × 73 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Le Chemin de fer<br />
de ceinture –<br />
Les Fumées<br />
Huile sur toile<br />
96,5 × 130 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
52
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Étude pour le chemin de fer de ceinture – Paris<br />
Encre de Chine sur papier<br />
21,6 × 26,7 cm<br />
Collection particulière<br />
53
Le Chemin de fer de ceinture, toits et balcons – Paris<br />
Huile sur toile<br />
110,5 × 110,5 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
54
La ville, laboratoire d’expériences<br />
Le Chemin de fer de ceinture sous la neige – Paris<br />
Huile sur toile<br />
55 × 46 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
55
56
Gafsa,<br />
l’épisode<br />
tunisien<br />
C’est par le biais de la Société coloniale des artistes français fondée<br />
en 1908 par Louis Dumoulin qu’Antoine <strong>Villard</strong> a la possibilité de<br />
partir en Tunisie. La bourse coloniale qu’il obtient en juin 1912<br />
de la Société lui permet d’aller peindre dans l’oasis de Gafsa.<br />
Le contact avec un univers différent, où la lumière crée de violents<br />
contrastes, amène le peintre à modifier son style de manière significative.<br />
La présence d’architectures simples, aux toits en terrasse,<br />
le conduit vers une schématisation des formes. La luxuriance de la<br />
végétation l’incite également à diversifier sa palette qui s’enrichit<br />
de couleurs vives.<br />
En 1913, il bénéficie d’un encouragement spécial du ministère de<br />
l’Instruction publique, récompense plus importante qui l’autorise<br />
à prolonger son séjour et à enseigner la peinture localement. Deux<br />
de ses élèves tunisiens réalisent des œuvres aux thématiques<br />
proches, mais dont certains dessins conservent une originalité<br />
propre. Invité à présenter son travail et celui de ses élèves à la<br />
galerie Bernheim-Jeune en 1918, le peintre conquiert une critique<br />
particulièrement élogieuse.<br />
57
Sur les terrasses en hiver – Gafsa, Sud tunisien<br />
Huile sur toile<br />
53,5 × 64,5 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Gafsa – La Piscine<br />
Huile sur toile<br />
55 × 38 cm<br />
S.b.c. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
58
Gafsa, l’épisode tunisien<br />
59
Le marché aux grains – Gafsa, Sud tunisien<br />
Huile sur toile<br />
54 × 65 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. 687, collection Ville de Lyon<br />
60
Gafsa, l’épisode tunisien<br />
Café maure – Gafsa<br />
Huile sur toile<br />
46 × 55 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
La Casbah –<br />
Sud tunisien<br />
Huile sur toile<br />
65 × 46 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
61
Oasis de Gafsa<br />
Photographie sur papier albuminé<br />
9,2 × 12 cm<br />
Collection particulière<br />
62
Gafsa, l’épisode tunisien<br />
Le Reflet<br />
Huile sur toile<br />
54,5 × 38 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Chemin de l’oasis – Gafsa<br />
Huile sur toile<br />
46,3 × 33 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
63
Chemin dans l’oasis – Gafsa<br />
Huile sur toile<br />
55 × 38 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
64
Gafsa, l’épisode tunisien<br />
Jardin de<br />
l’oasis de Gafsa<br />
Huile sur toile<br />
96,5 × 130 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Les Amandiers<br />
Huile sur toile<br />
45 × 65 cm<br />
Collection particulière<br />
65
Poiriers en fleur<br />
Huile sur toile<br />
46,2 × 38,5 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
66
Gafsa, l’épisode tunisien<br />
Chemin dans l’oasis<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 268, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
Abricotiers en fleur<br />
Huile sur toile<br />
38 × 46 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 267, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
67
Jeune Arabe<br />
à l’orange –<br />
Gafsa, Sud<br />
tunisien<br />
Huile sur toile<br />
64,8 × 53,5 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Terzi Ben Hasnaoui<br />
(1903-1986)<br />
Portrait<br />
Gouache sur carton<br />
40,9 × 33 cm<br />
S.b.d. Terzi H.<br />
Collection particulière<br />
68
Gafsa, l’épisode tunisien<br />
Portrait<br />
Huile sur toile<br />
41 × 32,9 cm<br />
Collection particulière<br />
69
Terzi Ben Hasnaoui<br />
Monsieur<br />
Antoine <strong>Villard</strong><br />
Crayon et aquarelle<br />
sur papier<br />
31 × 21 cm<br />
Collection particulière<br />
Terzi Ben Hasnaoui<br />
Scène décorative<br />
Crayon et gouache<br />
sur papier cartonné<br />
36,5 × 22,8 cm<br />
Collection particulière<br />
Céramique<br />
tunisienne<br />
Céramique polychrome<br />
21 × 17,5 cm<br />
(base 8,5 cm)<br />
Collection particulière<br />
Terzi Ben Hasnaoui<br />
Scène décorative<br />
Crayon et gouache sur feuille d’écolier<br />
36,2 × 23,5 cm<br />
Collection particulière<br />
70
Gafsa, l’épisode tunisien<br />
Mohamed Ben<br />
Macri Roached<br />
Vue de Gafsa<br />
Gouache sur carton<br />
32,9 × 41,1 cm<br />
S.b.g. mohammed m.<br />
Collection particulière<br />
Terzi Ben Hasnaoui<br />
Piscine à Gafsa<br />
Gouache sur carton<br />
32,9 × 40,9 cm<br />
S.b.d. Terzi H.<br />
Collection particulière<br />
71
72
La Bretagne<br />
Le périple breton constitue pour Antoine <strong>Villard</strong> une manière<br />
d’approfondir sa connaissance du paysage à l’instar de la plupart<br />
des peintres de sa génération. Le premier séjour qu’il entreprend<br />
en 1907 le mène à Locquirec. Les toiles en rapport avec cette<br />
période illustrent sa démarche, celle qui le pousse à effectuer<br />
des dessins au crayon, puis des huiles sur bois de petit format,<br />
faciles à réaliser en plein air. La population locale apparaît parfois<br />
au détour de quelques portraits mais ne retient pas l’essentiel de<br />
son attention. Cette tendance se vérifie à l’occasion du second<br />
voyage qui le mène à Belle-Île-en-Mer en 1921 et 1922. La nature,<br />
vierge de toute présence, et plus particulièrement les marines,<br />
est propice à de nombreuses études à l’encre, préalables aux<br />
peintures de grande taille. La palette est restreinte à des gammes<br />
de verts et de bleus aptes à conférer un caractère dramatique<br />
au spectacle environnant.<br />
73
Locquirec,<br />
les marronniers<br />
Huile sur bois<br />
26,5 × 34,5 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Vue de Locquirec<br />
Huile sur carton<br />
33,2 × 41,3 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
74
La Bretagne<br />
Chemin à Locquirec<br />
Huile sur toile<br />
26,4 × 34,8 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Vue de Locquirec<br />
Huile sur toile<br />
46 × 61 cm<br />
S.D.b.d. A. <strong>Villard</strong> /1908<br />
Collection particulière<br />
75
Femme de pêcheur<br />
Huile sur toile<br />
55 x 38 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong>/1908<br />
Collection particulière<br />
76
La Bretagne<br />
Femme de pêcheur<br />
Encre de Chine sur papier, feuille détachée d’un carnet de dessins<br />
14 × 11,1 cm<br />
Collection particulière<br />
77
Bord de mer à<br />
Belle-Île-en-Mer<br />
Huile sur toile<br />
38,5 × 46 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Belle-Île-en-Mer.<br />
Le Sémaphore<br />
Huile sur toile<br />
32,2 × 41,3 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
78
La Bretagne<br />
Belle-Île-en-Mer. Cabanes dans le champ<br />
Huile sur toile<br />
38 × 46 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
79
Marine<br />
Encre de Chine<br />
sur papier, contrecollée<br />
dans la cuvette<br />
d’un papier rigide<br />
12,1 × 16,8 cm<br />
S.b.d. A. V.<br />
Collection particulière<br />
Marine<br />
Graphite sur papier,<br />
feuille détachée<br />
d’un carnet de dessins<br />
18,2 × 20,7 cm<br />
Collection particulière<br />
80
La Bretagne<br />
Belle-Île-en-Mer.<br />
Le Bateau pilote<br />
Huile sur toile<br />
33 × 41 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
81
Phare<br />
de Port-Haliguen<br />
Graphite sur papier,<br />
feuille détachée<br />
d’un carnet de dessins<br />
18,2 × 20,7 cm<br />
Collection particulière<br />
Sauzon<br />
Photographie<br />
noir et blanc<br />
8 × 10,6 cm<br />
Collection particulière<br />
82
La Bretagne<br />
Poulains<br />
Photographie<br />
noir et blanc<br />
8 × 10,6 cm<br />
Collection particulière<br />
83
Clapotis<br />
à Taillefer<br />
Photographie<br />
noir et blanc<br />
8 × 11,5 cm<br />
Collection particulière<br />
Port-Coton<br />
Photographie<br />
noir et blanc<br />
8 × 11,5 cm<br />
Collection particulière<br />
84
La Bretagne<br />
Falaise et plage à<br />
Belle-Île-en-Mer<br />
Photographie<br />
noir et blanc<br />
11 × 8,5 cm<br />
Collection particulière<br />
Falaises à<br />
Belle-Île-en-Mer<br />
Photographie<br />
noir et blanc<br />
11 × 8,5 cm<br />
Collection particulière<br />
85
La Côte à Belle-Île-en-Mer<br />
Encre de Chine sur papier, contrecollé sur carton<br />
12,8 × 22,2 cm<br />
Collection particulière<br />
86
La Bretagne<br />
Les Falaises<br />
de Belle-Île-en-Mer,<br />
étude avec indications<br />
de couleurs<br />
Graphite et encre<br />
de Chine sur papier,<br />
feuilles détachées<br />
d’un carnet de dessins<br />
17,4 × 13,2 cm<br />
Collection particulière<br />
Les Falaises<br />
de Belle-Île-en-Mer,<br />
étude avec indications<br />
de couleurs<br />
Graphite sur papier,<br />
feuille détachée d’un<br />
carnet de dessins<br />
13,2 × 17,4 cm<br />
Collection particulière<br />
87
Belle-Île-en-Mer.<br />
Falaises<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Belle-Île-en-Mer –<br />
Les Rochers<br />
de velours<br />
Huile sur toile<br />
81 × 100 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 271, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
88
La Bretagne<br />
Belle-Île-en-Mer. Falaises<br />
Huile sur bois<br />
41 × 32,7 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
89
La Grotte<br />
Huile sur bois<br />
32,8 × 40,9 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
90
La Bretagne<br />
Cartons d’invitation aux expositions d’Antoine <strong>Villard</strong><br />
chez Bernheim-Jeune en 1924 et 1925<br />
Imprimés sur papier<br />
12,8 × 16,5 cm<br />
Collection particulière<br />
91
92
Un lien<br />
constant avec<br />
le Mâconnais<br />
Si Antoine <strong>Villard</strong> naît à Mâcon 11, rue Bel-Air, dans une famille de<br />
banquiers, il quitte la ville pour poursuivre ses études à l’École des<br />
Beaux-Arts de Lyon en 1883, puis gagne Paris où son père dirige<br />
une entreprise de cartonnages située 95, boulevard de Charonne<br />
et à laquelle son fils est associé à partir de 1897. Le peintre<br />
ne rompt pourtant pas le lien qui le rattache au Mâconnais.<br />
La propriété qu’il acquiert en 1920 aux Boutteaux est le lieu où<br />
il aime retrouver le contact avec la nature et sa famille. « Nous<br />
sommes arrivés aux Boutteaux avant la grande nuit ; j’ai même<br />
fait un tour de jardin ; Je crois que c’est une maladie chez moi 1 . »<br />
Sa participation aux expositions locales, celles qu’organise la<br />
Société mâconnaise depuis 1907, n’est réelle qu’à partir de son<br />
installation aux Boutteaux. Il y montre des œuvres en rapport avec<br />
la région et dont les sujets sont empruntés à son proche environnement<br />
; le jardin, essentiellement celui d’Hurigny, maison<br />
qu’il achètera en 1926 à la suite de la vente de la précédente,<br />
lui fournit la matière nécessaire à l’exécution des natures-mortes<br />
qu’il appréhende à la manière des paysages. À Mâcon, il parvient<br />
petit à petit à gagner une forme de reconnaissance et au Salon<br />
de 1929, la critique loue le tableau Jardin en hiver comme l’« un<br />
des plus remarquables du Salon 2 ». Certains sont déroutés par<br />
sa modernité, sa façon de présenter « des pommes cubiques et<br />
tricolores 3 ». Pourtant, depuis Paris, ce lien avec sa région natale<br />
est mis en avant. Dans le compte rendu qu’il donne à l’occasion<br />
de l’exposition des toiles d’Antoine <strong>Villard</strong> aux Tuileries en 1934,<br />
Georges Turpin trouve que l’artiste « aura été surtout le peintre<br />
de son Mâconnais natal ».<br />
1. Lettre à Amandine, 7 décembre 1920.<br />
2. Éclaireur du Mâconnais, 7 octobre 1929.<br />
3. Éclaireur du Mâconnais, 22 octobre 1931.<br />
93
Paysage<br />
du Mâconnais<br />
peint des terrasses<br />
de Montceau<br />
Huile sur toile<br />
73 × 92 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong> 1921<br />
Inv. P 257, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
Paysage<br />
du Mâconnais<br />
et les collines<br />
Huile sur toile<br />
72 × 92 cm<br />
S.D.b.d. A. <strong>Villard</strong> 1921<br />
Inv. P 258, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
94
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
Le Grand Sapin<br />
Huile sur toile<br />
100 × 81 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong>/1920<br />
Inv. 266, musée des Beaux-Arts de Cambrai<br />
Parc des Boutteaux<br />
Huile sur toile<br />
130 × 96 cm<br />
S.D.b.d. A. <strong>Villard</strong> 1920<br />
Collection particulière<br />
95
Le Vieux Saint-Vincent – Mâcon<br />
Graphite et encre de Chine sur papier,<br />
Feuille détachée d’un carnet de dessins<br />
20,5 × 18,2 cm<br />
Collection particulière<br />
La Roche de Solutré<br />
Graphite et encre de Chine sur papier,<br />
feuille détachée d’un carnet de dessins<br />
18,2 × 20,7 cm<br />
S.b.d. A. V.<br />
Collection particulière<br />
Rue du village – Hurigny<br />
Graphite et encre de Chine sur papier,<br />
feuille détachée d’un carnet de dessins<br />
20,7 × 18,2 cm<br />
Collection particulière<br />
Rue Saint-Jean – Mâcon<br />
Graphite et encre de Chine sur papier,<br />
feuille détachée d’un carnet de dessins<br />
20,5 × 18,2 cm<br />
S.b.g. A. V.<br />
Collection particulière<br />
96
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
Rue Rochette – Mâcon<br />
Graphite et encre de Chine sur papier,<br />
feuille détachée d’un carnet de dessins<br />
20,5 × 18,2 cm<br />
S.b.g. A. V.<br />
Collection particulière<br />
97
La Sulfateuse<br />
Huile sur toile<br />
65,4 × 81,2 cm<br />
S.D.b.g. A. <strong>Villard</strong>. 1921<br />
Inv. CMP5492, Fonds municipal d’art contemporain de la Ville de Paris<br />
98
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
L’Arrosoir vert<br />
Huile sur toile<br />
81 × 81 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
99
Timbale, poires<br />
roses et vertes<br />
Huile sur toile<br />
16 × 22 cm<br />
S.h.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Abricots<br />
Huile sur carton<br />
12,4 × 17,3 cm<br />
S.h.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
100
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
Nature morte<br />
Huile sur toile<br />
130 × 162 cm<br />
S.D.h.g. A. <strong>Villard</strong>/1920<br />
Collection particulière<br />
101
Nature morte<br />
Graphite et encre<br />
de Chine sur papier,<br />
feuille détachée<br />
d’un carnet de dessins<br />
21,6 × 26,7 cm<br />
Collection particulière<br />
Pêches<br />
Huile sur carton<br />
12 × 17,1 cm<br />
S.h.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
102
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
Nature morte<br />
Huile sur toile<br />
87,2 × 82,3 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
103
Nature morte<br />
dans l’atelier<br />
Huile sur toile<br />
73,5 × 92,5 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
La Cafetière noire<br />
Huile sur toile<br />
27,5 × 19,5 cm<br />
S.h.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
104
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
Nature morte<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.b.c. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Anonyme<br />
Scène décorative<br />
perse<br />
Peinture sur verre<br />
20 × 35 cm<br />
Collection particulière<br />
105
Nature morte –<br />
Fleurs et livre<br />
Huile sur toile<br />
81,7 × 65,5 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 254, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
Nature morte –<br />
Héliotropes<br />
et assiette<br />
de rubacel<br />
Huile sur toile<br />
81 × 81 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 269, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
106
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
Bouquet rose<br />
Huile sur toile<br />
41 × 33 cm<br />
Collection particulière<br />
107
Atelier – Maison d’Hurigny<br />
Encre de Chine et graphite sur papier, feuille détachée d’un carnet de dessins<br />
20,7 × 18,2 cm<br />
Collection particulière<br />
108
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
Atelier – Maison d’Hurigny<br />
Huile sur toile<br />
81,5 × 81,5 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
109
Les Maïs<br />
Huile sur toile<br />
81 × 81 cm<br />
S.h.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 259, musée des Beaux-Arts de Cambrai<br />
110
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
Nature morte à la timbale<br />
Huile sur bois<br />
22,2 × 27,1 cm<br />
Collection particulière<br />
111
La Maison<br />
d’ Hurigny<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Anonyme<br />
La Maison d’ Hurigny, la Galerie et le Jardin<br />
Photographie noir et blanc<br />
8,9 × 8,9 cm<br />
Collection particulière<br />
Anonyme<br />
La Maison d’ Hurigny, la Galerie<br />
Photographie noir et blanc<br />
8,3 × 6,3 cm<br />
Collection particulière<br />
112
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
La Maison d’ Hurigny depuis le jardin<br />
Huile sur toile<br />
65 × 81 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
113
La Maison<br />
d’Hurigny –<br />
La Galerie<br />
Huile sur toile<br />
100 × 81 cm<br />
S.b.g. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Anonyme<br />
M et M me <strong>Villard</strong><br />
depuis la galerie<br />
de la maison<br />
d’Hurigny<br />
Photographie<br />
noir et blanc<br />
9,1 × 9,1 cm<br />
Collection particulière<br />
114
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
L’Atelier à Hurigny<br />
Huile sur toile<br />
100 × 80 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection M me Claudine Hirou<br />
115
Neige à Hurigny<br />
Huile sur toile<br />
81 × 100 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. A.809, musée des<br />
Ursulines de Mâcon<br />
Neige à Hurigny<br />
Huile sur toile<br />
81 × 103 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Inv. P 256, musée des<br />
Beaux-Arts de Cambrai<br />
116
Un lien constant avec le Mâconnais<br />
Neige à Hurigny<br />
Huile sur toile<br />
45 × 65 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
Rue du village – Hurigny<br />
Huile sur toile<br />
54 × 65 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
La Porte du hangar – Hurigny<br />
Huile sur toile<br />
55 × 46 cm<br />
S.b.d. A. <strong>Villard</strong><br />
Collection particulière<br />
117
Bibliographie<br />
OUVRAGES<br />
DUGNAT Gaïté, Les Catalogues des Salons<br />
de la Société nationale des Beaux-Arts,<br />
1921-1925, Dijon, L’Échelle de Jacob,<br />
t. V-VI, 2005<br />
FEGDAL, Charles, Ateliers d’artistes, Paris,<br />
Éditions Librairie Stock, 1925<br />
LOBSTEIN, Dominique, Dictionnaire des<br />
indépendants, 1884-1914, t. III, Paris, 2004<br />
SANCHEZ, Pierre, Les Salons de Dijon,<br />
1771-1950, Dijon, L’Échelle de Jacob, 2002<br />
SANCHEZ, Pierre, Dictionnaire du Salon<br />
d’automne répertoire des exposants et<br />
liste des œuvres présentées : 1903-1945,<br />
Dijon, L’Échelle de Jacob, 2006<br />
SANCHEZ, Pierre, Dictionnaire des<br />
Indépendants, répertoire des exposants et<br />
liste des œuvres présentées : 1920-1950,<br />
Dijon, L’Échelle de Jacob, 2008<br />
SANCHEZ, Pierre, La Société coloniale des<br />
artistes français puis Société des beaux-arts<br />
de la France d’outre-mer : répertoire<br />
des exposants et liste de leurs œuvres,<br />
1908-1970, Dijon, L’Échelle de Jacob, 2010<br />
SCHURR, Gérald ; CABANE, Pierre, Les<br />
Petits Maîtres de la peinture : 1820-1920,<br />
t. II, 1989<br />
THIESSE, Anne-Marie, Écrire la France.<br />
Le mouvement littéraire régionaliste de<br />
langue française entre la Belle Epoque et<br />
la Libération, Paris, Presses universitaires<br />
de France, coll. « Ethnologies », 1991<br />
TURPIN, Georges, Dix-huit peintres<br />
indépendants, Paris,<br />
Georges Girard Éditeur, 1931<br />
Marché(s) de l’art en province, 1870-1914,<br />
actes du colloque tenu à Bordeaux,<br />
bibliothèque municipale, 30 janvier –<br />
1 er février 2008, organisé par le Centre<br />
de recherches François-Georges Pariset,<br />
université de Bordeaux-3 et le musée<br />
des Beaux-Arts de Bordeaux, études<br />
rassemblées par Laurent Houssais<br />
et Marion Lagrange ; préface de<br />
Raymonde Moulin<br />
PÉRIODIQUES<br />
BOURCARD, Gustave, Le Phare de la Loire,<br />
14 février 1894<br />
ÉPARDAUD, Edmond, La Presse, 23 février<br />
1918<br />
GYBAL, André, « Le Salon des<br />
indépendants », Journal du Peuple,<br />
30 janvier 1922<br />
LÉON-MARTIN, Louis, « La collection<br />
Paul Guillaume », Paris-Soir, 29 mai 1929<br />
Paris-Journal, « Les arts, Les peintres<br />
du Paris moderne », 7 avril 1918<br />
RAMBOSSON, Yvanhoé, « Quel<br />
prestigieux ensemble qui saura défendre<br />
une mémoire que nous vénérons ! »,<br />
Mobilier & Décoration, janvier 1935<br />
RONDINET, Émile, « Antoine <strong>Villard</strong> »,<br />
L’Essor, revue mensuelle bourguignonne,<br />
octobre 1925, première année, n o 1,<br />
« Notre programme », octobre 1925<br />
118
VAUXCELLES, Louis, Le Pays, 2 mars 1918<br />
VILLARD, Antoine, in Le Bulletin de la vie<br />
artistique, 15 février 1924, p. 89-90<br />
Le Bulletin de la vie artistique, « Antoine<br />
<strong>Villard</strong> », 1 er avril 1925, p. 152-153<br />
VILLARD, Antoine, in Conférencia, journal<br />
de l’université des Annales, n o 21,<br />
20 octobre 1930<br />
WARNOD, André, « Chez le peintre<br />
Antoine <strong>Villard</strong> », Conférencia, journal<br />
de l’université des Annales, n o 21,<br />
20 octobre 1930<br />
EXPOSITIONS<br />
Bâle 1933 - Henri Rousseau, Bâle,<br />
Kunsthalle Basel, 1 er mars – 2 avril 1933<br />
Dijon 1934 - RAMBOSSON, Yvanhoé,<br />
En mémoire d’Antoine <strong>Villard</strong>, Dijon, Palais<br />
des ducs et des États, XII e Salon de l’Essor,<br />
15 septembre – 7 octobre 1934<br />
Grenoble 1982 - VINCENT, Hélène,<br />
Andry-Farcy, un conservateur novateur.<br />
Le musée de Grenoble de 1919<br />
à 1949, musée de Grenoble,<br />
28 juin – 11 octobre 1982<br />
Paris 1911 - Exposition Antoine <strong>Villard</strong>,<br />
Paris, galerie P. Le Chevallier,<br />
15-31 mai 1911<br />
Paris 1918 - Printemps dans l’oasis<br />
de Gafsa, tableaux d’Antoine <strong>Villard</strong>,<br />
de Terzi Ben Hasnaoui et de Mohamed Ben<br />
Macri Roached, Paris, galerie Bernheim-<br />
Jeune, 18 février – 2 mars 1918<br />
Paris 1921 - Exposition Antoine <strong>Villard</strong>,<br />
Paris, galerie Bernheim-Jeune,<br />
21 mars – 5 avril 1921<br />
Paris 1926 - SARRAULT, Albert (dir.),<br />
Trente ans d’art indépendant 1884-1914,<br />
exposition rétrospective, Paris,<br />
Grand Palais des Champs-Élysées,<br />
20 février – 21 mars 1926<br />
Paris-New York 1984-1985 - HOOG,<br />
Michel, LANCHNER, Carolyn, RUBIN,<br />
William, Le Douanier Rousseau, Paris,<br />
Galeries nationales du Grand Palais,<br />
New York, Museum of Modern Art,<br />
1984-1985<br />
119
Remerciements<br />
Les organisateurs adressent leurs remerciements<br />
aux institutions et aux entreprises qui<br />
ont accompagné les Villes de Mâcon et de<br />
Cambrai dans la réalisation de l’exposition :<br />
le Conseil régional de Bourgogne-Franche-<br />
Comté ; la Direction régionale des Affaires<br />
culturelles de Bourgogne-Franche-Comté ;<br />
la Fondation Solidarités by Crédit Agricole<br />
Centre-est qui apporte un soutien financier<br />
exceptionnel au projet ; le Directeur des<br />
Affaires Culturelles des Hauts-de-France, la<br />
Société des Amis du Musée de Cambrai ;<br />
la Caisse d’Épargne et de prévoyance de<br />
Bourgogne-Franche-Comté.<br />
Les organisateurs expriment tout particulièrement<br />
leur reconnaissance aux responsables<br />
des collections publiques et privées<br />
qui ont accordé les prêts des œuvres<br />
de l’exposition : la Ville de Lyon ; Lyssandre<br />
et Tess DUPUY-MARCHI ; M me Claudine<br />
HIROU, nièce de M me Antoine <strong>Villard</strong> ;<br />
la Ville de Paris ; la Ville de Dijon ;<br />
la Ville du Havre ; le musée d’art moderne<br />
André-Malraux ; la Ville de Grenoble ;<br />
le musée de Grenoble ; la Ville de Belfort ;<br />
le musée des Beaux-Arts de Belfort.<br />
Les auteurs adressent leur reconnaissance<br />
à tous ceux qui par leur aide ont contribué<br />
à la réalisation de ce projet : Marie LAPALUS<br />
qui en est à l’origine, mais aussi Violette<br />
ANDRES ; Dominique BARDIN ; Maël BELLEC ;<br />
Sylvain BESSON ; Julien CLÉMENT ; Annie<br />
CORDELIER ; Sabrina DALIBARD ; Camille<br />
DUCASTEL ; Clémence DUCROIX ; Christelle<br />
FAURE ; Barbara FAVREAU ; Estelle<br />
FAVRE-TAYLAZ ; Adélaïde GARAY ; Josette<br />
GONZALVES ; Khadidja et Ali LARABI ;<br />
Claire MARTIN ; Franck METROT ; Florence<br />
MILLE ; Camille MORANDO ; Lucile PIERRET ;<br />
Didier SCHULMANN ; Thierry SÉBILLON,<br />
Nadine SKILBECH ; Martine TISON ; les<br />
services communication et technique de<br />
la Ville de Mâcon ; les équipes des musées<br />
de Mâcon et de Cambrai.<br />
Cette exposition rend tout particulièrement<br />
hommage à M me Colette LAURENT-MEYER,<br />
M me Anne-Marie PERRON et M me Geneviève<br />
ZHERINGER dont la générosité et l’implication<br />
méritent d’être soulignées.<br />
120