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Anthropophage au Manoir

Nouvelle fantastique écrite par les 4G

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Ce soir-là, ma mère partit au travail, comme à son habitude. Je me

retrouvais seul, en cette soirée pluvieuse, le jour de l'anniversaire de la mort

de mon père, il y a seize ans.

Cette année, j’avais décidé de noyer mon désespoir dans cet alcool que

mon père buvait si souvent comme le montrait cette seule et unique photo qui

ornait le mur de ma chambre. Je l’avais faite encadrer il y a quelques années,

ainsi j’avais l’impression qu’il veillait sur moi… Mais un élément bizarre sur

celle-ci me hantait l'esprit. Quelle était cette silhouette étrange derrière

mon père sur la photographie ? Cette personne, est-ce que je la connaissais ?

Était-elle de mon entourage, de ma famille ? Chaque regard porté sur la photo

de mon père me ramenait à cette silhouette inquiétante et ces tonnes de

questions me remontaient en tête. J'avais toujours souffert de ce manque

d'amour paternel. Même si ma mère était toujours là pour moi, elle ne

comblerait jamais ce vide. J'étais accablé par cette solitude.

Après avoir bu deux verres d'alcool, je décidai d'aller prendre l'air dans

la campagne alentour, en pensant à mon père. Je savais que cette soirée serait

difficile pour moi mais je n’avais pas imaginé à quel point... Je me baladai donc,

lorsque soudain je vis un chat noir traverser la route et se diriger vers une

maison délabrée. La porte entrouverte attisa ma curiosité… Pourquoi ne pas

aller explorer ? Je n’avais rien d’autre à faire, et l’alcool me rendait plus

téméraire. La demeure était visiblement abandonnée, les fenêtres étaient

bloquées par des planches de bois ornées de clous, les murs extérieurs

étaient tapis de lière et de nombreuses tuiles manquaient sur le toit.

J'ouvris la porte qui grinça sur ses gonds. Dans la maison tout était

sombre et il y faisait très froid. C’était normal puisqu’elle ne devait plus être

chauffée depuis des années ! Je sortis mon téléphone pour m'éclairer et me

rassurer. Alors que je m'avançais dans ce qui m'avait paru être un hall, la

porte que j'avais laissée ouverte claqua si fort que je crus qu'elle était sortie

de ses gonds. Surpris, je me retournai, mais il n'y avait personne. Je me

souviens m’être dit que ce ne devait être que le vent. Je repris mon

exploration de bon train mais méfiant tout de même, un peu moins sûr de moi.

Le hall d’entrée était très spacieux et avait visiblement été assez luxueux

mais la plupart de l'espace était alors rempli par des débris en tout genre :

crottes de rats, morceaux de murs et plafond, trace d'ancien squatters... Au


sol, le carrelage en damier noir et blanc était fissuré et cassé un peu partout.

Il y avait aussi de petites pousses d'herbe qui se laissaient distinguer à

certains endroits. La nature reprenait ses droits sur cette bâtisse

abandonnée. Au mur, il y avait un vieux papier peint tout défraîchi, déchiré à

certains endroits. De drôles de dessins dont je ne comprenais pas le sens

ornaient les murs mais je ne m’y arrêtai pas très longtemps et poursuivis ma

route. À la droite de l'entrée se trouvait une majestueuse cheminée couverte

de cendre et de toiles d'araignée. En face se trouvait sous des couches de

poussière un petit canapé assorti de ses fauteuils. Je ne m'y serais pas assis

car les termites avaient probablement mangé les pieds. Sous le petit ensemble

de fauteuils, je vis un vieux tapis tout élimé. Il était de style oriental ; à mon

humble avis il devait être de grande beauté auparavant mais les trous béants

et les tâches brunâtres qui le parsemaient l'enlaidissaient. De l'autre côté de

l'entrée, j’aperçus un très vieux piano à corde enseveli sous des gravats qui

provenaient sûrement du trou du plafond. Quel dommage, un si bel instrument,

il n'était clairement plus utilisable.

Alors que je continuais mon chemin, un détail de grande importance me

frappa. Les fenêtres étaient barricadées... Mais oui, je l’avais pourtant vu de

l’extérieur, je ne devrais pas être étonné ! L’alcool ne me réussissait

décidément pas et je décidai de sortir. Sans réfléchir je me précipitai sur la

porte et essayai de l'ouvrir. En vain, elle avait claqué si fort qu’elle était

coincée… C'était peine perdue... Je réfléchis à toute vitesse, puis je conclus

qu'il devait probablement y avoir une autre sortie. Lorsque je retournai dans

le hall, près du très grand escalier, je sentis un frôlement dans mes jambes.

Je n’y voyais pas grand-chose, impossible de comprendre ce qui se passait !

Mes muscles se contractèrent et je tentai de fouiller du regard les alentours.

Mon regard se posa sur deux billes jaunes qui me fixaient du haut des

marches… C’est alors qu’en éclairant les marches avec mon téléphone, je vis un

petit chat noir inoffensif. Quel idiot, je me montai la tête tout seul ! Rassuré,

je décidai donc de reprendre l’exploration. Alors que j'entreprenais de

monter l'escalier, j’entendis l’orage gronder dehors… Posée au milieu du palier

de l’escalier se trouvait une grande statue dont il manquait la tête.

En montant à l'étage, j'entendis un léger grincement, on aurait dit un

vieux volet. Normal avec ce vent… Une fois en haut je vis une porte ouverte.


Je rentrai dans la pièce qui était une chambre d'enfant. Une petite fille

devait vivre ici auparavant car je vis un lit à baldaquin rose très poussiéreux.

A côté se trouvait une imposante armoire en bois massif avec des poignées en

forme de petites gargouilles colorées. Au fond de la pièce était posé un

étrange canapé en velours noir où étaient assises des poupées en porcelaine.

Chacune était plus effrayante que celle d'à côté. Comment une petite fille

pouvait avoir des poupées si effrayantes ? Au-dessus du canapé se trouvait

une fenêtre moisie avec des volets battants. Je voulus m'avancer pour

observer les poupées de plus près mais je trébuchai sur un petit train en bois.

Je me relevai et je vis un grand tableau noir où était écrit "Il te cherche le

Cann..." . La phrase était inachevée… Un frisson me parcourut le corps. Au sol

une craie blanche était tombée. Qui pouvait bien avoir écrit ça ? Le

grincement que j’avais entendu en montant ne venait peut-être pas du volet en

fait ! Oui, c’était sûr, le grincement devait provenir de la craie sur le tableau !

Mais qu’est-ce que cela signifiait ? Lorsque je relevai la tête, j’eus l’impression

que toutes les vieilles poupées s’étaient tournées vers moi et me fixaient...

Je sortis précipitamment de cette horrible chambre pour me retrouver

à nouveau dans le couloir sombre. L’adrénaline accélérait ma respiration,

finalement c’était précisément cette sensation que j’étais venu chercher ! Il

fallait garder la tête froide, rester rationnel et.. continuer l’exploration.

Tout à coup je m’arrêtai pour écouter un bruit qui me tracassait depuis

un bon moment déjà, c’était comme un robinet mal fermé. Je réfléchis un

instant. Cela devait provenir d'une salle de bain. Je suivis ce son jusqu’à une

porte, j’hésitai un instant avant de l’ouvrir. Elle était vieillie par toutes ces

années sans entretien. Je l'ouvris, un grincement horrible retentit et l'évier

se vida. Cette salle de bain était dévastée par le temps. Si insalubre que de la

végétation y avait poussé. A gauche l'évier qui venait de se vider, à droite un

placard rongé par les termites, sur lequel une pelle était adossée. D’un coup,

elle tomba et un grand fracas retentit dans cet effroyable silence. Je

m'interrogeai : que faisait cette pelle dans une salle de bain ? J’eus une

impression étrange lorsque je me tournai, je crus voir une silhouette dans le

miroir fissuré. Je m'approchai pour mieux voir mais… rien ! Juste mon reflet !

J'avais dû rêver ! Ou était-ce l'alcool ?

J’avais beau tenter de me rassurer, la peur me saisissait vraiment...Je


descendis donc les escaliers délabrés pour sortir de cette maison étrange.

Chaque marche était abimée, l'une était cassée, l'autre arrachée... Pourquoi

étais-je venu ici ? Mes jambes tremblaient de peur, mes mains moites

glissaient le long de la rambarde. C’est alors que je trébuchai sur une marche

fendue et tombai à plat ventre dans l'escalier en me réceptionnant du mieux

que je pus pour ne pas me cogner la tête. A cet instant, je crus apercevoir

entre deux marches d'escalier un marteau et des clous neufs posés sur le sol

poussiéreux. L'orage accompagné du vent fit tomber quelques tuiles qui me

firent sursauter. Je me relevai et me dirigeai vers la porte, mais elle était

toujours coincée ! Je me précipitai donc, vers les fenêtres, celles-ci étaient

barricadées avec des planches fixaient par des clous brillants, qui me

semblaient familiers. Quelques secondes plus tard, j'eus un flash,je me

rappelai avoir vu ces mêmes clous sous l'escalier lors de ma chute. Cette

maison était-elle vraiment inhabitée ? Cette question tournoyait dans ma tête.

Je me précipitai dans toutes les pièces de cette vieille maison avec l'espoir de

trouver une issue, en vain. J'essayai d'appeler ma mère, mais le réseau n'était

pas disponible : j'étais pris au piège dans cette misérable demeure. Je sentis

la panique monter en moi, j'avais des sueurs froides et la gorge nouée.

Je me mis à courir,je regardais autour de moi pour chercher une sortie.

Je crus me souvenir d'avoir trouvé une porte, en fait deux portes qui

n’étaient pas des issues vers l’extérieur. Je me précipitai vers la porte de

droite et l’ouvris mais elle n’amenait qu’à un placard à balai. Après ma

découverte, je décidai donc de prendre celle de gauche. Celle-ci débouchait

sur une sorte de galerie de portraits avec environ une vingtaine de tableaux.

Sur l’un de ces cadres, je vis le portrait d’un homme avec un visage pâle. Ses

yeux ouverts n’avaient pas de cils. Et surtout… il avait la bouche cousue.

Quelle image effroyable ! La pièce était poussiéreuse, il y avait des piliers en

pierre sur les extrémités. A ce moment-là j’eus un frisson, un courant d’air

venait de me frôler... Je me souvins que le vent passait entre les planches qui

condamnaient la maison. Quand je me retournai vers les tableaux, il me sembla

que tous les visages avaient été changés par d’autres ! C’est alors que je crus

distinguer… le visage de mon père ! Mais c’était impossible ! Quand je clignai

des yeux, tout était redevenu normal. Je me demandais comment de telles

hallucinations pouvaient arriver et conclus que c’était la fatigue. Il fallait


vraiment que je sorte de cette maudite demeure...

Je me mis à courir dans le couloir, et vis une porte tout au bout. Je

l'ouvris précipitamment et entrai dans la pièce. Ce que je découvris me

tétanisa : une table ronde décorée de chandeliers et sur laquelle le couvert

était mis. Mais surtout… les bougies étaient allumées ! Il y avait donc vraiment

quelqu’un ici ! La table était dressée comme si quelqu’un s’apprêtait à passer à

table... Je crus comprendre ce qui était écrit sur le tableau. Un cannibale me

cherchait ! Mais qui pouvait bien avoir laissé ce message pour me prévenir ?

Je revis en flash le portrait de mon père… Il essayait de me sauver la vie !

J'étais paniqué, je ne savais plus quoi faire. Je sortis de la salle à manger.. Il

faisait très sombre donc j'essayai de rallumer mon téléphone au moins pour

m’éclairer ou appeler des secours ! Sans succès, plus de batterie. Tout à coup,

j'entendis un bruit qui venait de la cave probablement. En tremblant j'allai

vers les escaliers quand j'entendis un bruit effroyable, comme un miaulement

interminable. Je repensai au petit chat noir que j’avais vu en entrant dans la

maison. J’avais les mains moites et je fis tomber mon téléphone. Je tâtonnai

dans le noir pour le retrouver quand je sentis sous mes doigts un liquide

visqueux sur quelque chose de doux… Je retirai ma main précipitamment.

Dehors, un éclair zébra le ciel et éclaira fugacement la pièce. Je vis alors ce

que j’avais touché. Le petit chat noir ! Il avait été égorgé ! Ecoeuré, je m'

écartai et abandonnai la recherche de mon téléphone pour aller vers une porte

que j' avais aperçue pendant l'éclair.

C’est à ce moment que j'aperçus une silhouette ronde portant une

toque. Une odeur nauséabonde s’en dégageait. Elle tenait une pelle semblable à

celle que j'avais vu quelques instants plus tôt. Soudain, je me pétrifiai tant

mon corps était submergé par la peur. Je ne bougeai plus, j'étais cloué sur

place. Son visage bouffi me fixait. Tout à coup, la créature s'avança et, dans

un éclair, je vis le visage affreux du cannibale. Ce que je vis m'épouvanta, ses

yeux étaient injectés de sang, sa lèvre inférieure était enflée et un filet de

sang coulait le long de son cou. Je crus distinguer une autre silhouette

derrière lui mais tout se passa si vite… Avec une rapidité soudaine, le monstre

s'approcha de moi et brandit la pelle…

***

Je me réveillais dans ma chambre avec une migraine des plus


douloureuses. Tout me semblait flou mais il faisait jour ce qui me rassura. Les

événements de la veille me revinrent d’un coup et se bousculèrent dans ma

tête. Tout ceci n'était donc qu'un affreux cauchemar ! Je me relevai et

regardai mon portable : la batterie était pleine. Quel soulagement… Une telle

nuit affreuse ! C’était décidé, j’arrêtais définitivement l’alcool !

Soudain, il y eut un bruit fracassant. Je me retournai en sursaut, le seul

cadre de la pièce tomba. Je le ramassai et le retournai, je vis le costume de

mon père. Mon regard glissa vers le haut de la photographie. Ce que je

découvris me pétrifia !

Sur la photographie, mon père n'avait plus de visage..…

Fin...

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