ZINE&DIN

ZINE&DIN

Cantada II - 13 rue Moret 75011 PARIS - GPS : 48.867091, 2.379394

LA NUIT FUME
GRAVEMENT
VOTRE SANTE
Les rues d’ma ville me manquent, et avec elles nos errances nocturnes.
Tous ces murs broyés comme la vie mastiquant nos burnes.
Ces soirées où on s’pointe en meute, pour marquer l’territoire et traîner devant l’entrée.
Et celles d’où on s’est fait virer pour un tag bien placé dans les chiottes où les bons clients tapent la C.
La vraie motivation, c’était juste le trajet du point A au point B.
Le but étant d’se tenir loin du chemin des chiens d’la B.A.C.
La nuit danger pousse mes gens à agir comme des dérangés.
La rue terrain de «je» s’débat entre nos poings crispés et nos crocs enragés.
Les tags dégoulinant sur vos murs une autre manière de pisser sur vos morts.
Si t’effaces on repasse.
Si tu repasses on t’laissera des traces.
Adultes ratés enfants pas sages.
L’avenir nous fait défaut autant qu’la rue nous appartient.
Dans tous les coins d’la ville on est tricards, tu peux nous suivre à la crasse.
J’te l’répète, dans cette course à l’égo on est les as désastres.
Cette vie-là, la rue, la nuit.
Les «check ça», les «matte ça», les «téma! téma!».
Les rimes qui fusent, les caps qui s’bouchent et les mines qui s’usent.
Les vannes salaces, les clashs, l’argot qui tâche.
Les dédicaces qui trop souvent passent à l’as.
Et les battements d’cœur qui s’espacent à chaque fois qu’le Scénic de la BAC passe.
Les bouteilles dans la manche, mégots à la bouche et marqueurs dans la poche.
Les tags ratés et les sapes tâchées, les bières éventées et les bédos mal roulés.
Les éclats de rire, les marques d’amour, les cavalcades et les kilomètres à pied.
La nuit qu’on croque à pleines jambes car elle se brûle par les debouts.
Le monde si souvent refait, t’es mon reufré.
Les discutes de tout et les disputes pour rien.
Toujours un tube à la bouche comme le siffleur de verres.
On vit dans les volutes de fumée nous les souffleurs de verte.
Chacun d’entre nous a volé un mot dans la bouche du Rat, de Renaud ou de Léo Ferré.
Pour violer en son nom les rues les routes et les réseaux ferrés.
Un point commun qu’on partage avec les autres rue-fugiés, c’est d’faire si peur à ceux qui
voudraient nous vermifuger.
Leurs râles notre cri d’ralliement.
Chacune de leurs insultes une pépite d’or qu’on arbore fièrement sur nos dents.
Pour toutes ces raisons, les vautours de l’État nous accusent de dégradation.
Regarde comment les politiques nous la mettent.
T’étonne pas qu’on prenne ça pour une dérogation.
On rentrera jamais dans leurs urnes alors on s’écrit sur les murs et les électeurs râlent.
Nos noms côtoient les gueules de cons qu’ils placardent dans les rues à chaque période électorale.
Les bruits, les ombres, les ruelles sombres.
Les frères aussi.
L’encre de sang tâche le blanc des yeux des gars d’mon clan.
Les chiens bleus nous fliquent dans leurs déguisements.
La nuit tous les chacals sont gris et nos soirées finissent parfois en dégrisement.
Les silences qui pèsent, les soucis qui s’entassent et les regards en coin des passants qui toisent.
Les poches vides sous les yeux des potes en chute libre.
Les sourires à moitié pleins tant qu’les bouteilles sont pas vides.
On a tous vu la gueule de Cécile se dépraver au rythme des canettes avalées sur le pavé.
LA NUIT FUME GRAVEMENT VOTRE SANTÉ
C’est écrit en lettre qui clignotent dans les vitrines des supérettes qui ferment jamais.
Alors on s’défonce à fond, sans phare, sans casque, sans frein.
Le carreau du rétro cassé pour plus être touchés par les regrets.
Jamais sans un reufré.
Tu connais l’refrain.
Si t’entends «pshiiiit! pshiiiiit!», c’est qu’seul le chrome paie.
HT.PM.3000.SOT.TPA.AAA
KFC.VAS.VG.LPC.NAV.DPC

13003 48000
Dépôt illégal : août 2020.
ISBN : 3457-13-2020-12
Imprimé sur du papier.
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