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N°546 Du 25 au 31 décembre 2020- 15 dh
Mohammed VI
THE PEACEMAKER
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
1
Edito
L’allégeance
au Roi
Par AHMED CHARAÏ
La visite de la délégation
israélo-américaine, suite à
l’accord de reprise des relations
entre le Maroc et Israël,
est bien évidemment un événement
politique important, au niveau international.
Mais au-delà, c’est un moment
important, pour le Maroc, « Nation pétrie
d’histoire » .
Le chef de la délégation israélienne, qui
est le patron de la sécurité nationale de
ce pays, qui n’est pas né au Maroc, mais
dont les parents sont originaires du
Maroc, a parlé un dialecte marocain et a
fait allégeance au Roi du Maroc.
« Allah Ybarek Fi Aamar
Sidi » c’est la formule
que les citoyens marocains
utilisent depuis
des siècles pour
exprimer leur allégeance
au souverain.
En prononçant ces
mots Meir Ben-Shabbat
en connaissait le
contenu.
Cela va plus loin qu’un
accord diplomatique
international, tripartite. C’est le Maroc
éternel qui s’expose face au monde. Un
Maroc qui a digéré toutes les sédimentations
historiques.
Le rôle central de la monarchie, institution
millénaire, est d’abord celui de l’incarnation
de la Nation. L’allégeance n’est
pas une adhésion aux décisions d’une
direction politique, mais à une nation et
à ses valeurs.
Les Juifs sont présents au Maroc depuis
3000 ans et donc avant l’Islam. Ils font
partie de cette nation, de cette culture.
Une monarchie
inclusive,
des valeurs
d’acceptation
de l’autre ont
fait et feront
le Maroc
exceptionnel.
Haim Mizrahi avait trouvé la bonne formule
« ils vivaient comme l’ensemble
de la population, selon les époques ».
Mais les Juifs marocains n’oublieront
jamais que Mohamed V a refusé d’appliquer
les lois de Vichy, alors que le Maroc
était sous protectorat et qu’il a ensuite
choisi le camp de la libération.
Cette nostalgie est d’abord émotionnelle.
Les Juifs marocains étaient en
majorité ruraux, mais ils ont participé au
fil des siècles, à la construction d’une
culture plurielle, berbère, arabe, andalouse,
juive. Le Maroc est le seul pays
arabe dont la constitution reconnait le
judaïsme comme
un référent identitaire.
Qu’un haut
responsable
israélien fasse
allégeance au Roi
devant les caméras
du monde
entier, n’est que
la continuité de
cette histoire éternelle.
Le Maroc
s’est construit sur
sa diversité avec la monarchie, socle
unificateur. Mais au-delà, cela signifie
que les retrouvailles sont facilitées par
le poids de l’histoire. Les Juifs marocains,
se considèrent marocains là où ils vivent.
Le droit en considérant que la nationalité
est inaliénable, consacre ce fait.
Juifs, arabes, amazighs, nous avons vécu
ensemble depuis des siècles. Cette
continuité fait du Maroc un cas unique.
Une monarchie inclusive, des valeurs
d’acceptation de l’autre ont fait et feront
le Maroc exceptionnel.
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
3
sommaire
N° 546 du 25 au 31 décembre 2020
a la une
06 Mohammed VI, THE PEACEMAKER mOHAMMED ZAINABI - hakim arif
ENTRETIEN EXCLUSIF
25 Avec Jared Kushner & Meir Ben-Shabbat Ahmed charaï
économie
36 Tourisme, une ruée se profile Mounia kabiri kettani
38 Radioscopie de l’économie israélienne Mounia kabiri kettani
42 Qu’attendre de la coopération maroco-israélienne ? Mounia kabiri kettani
Société
50 Juifs marocains d’Israël Le vrai sens d’appartenance Hayat kamal idrissI
54 Maroc, Terre aux mille saints juifs Hayat kamal idrissI
Culture
56 L’Art du « vivre-ensemble » Kawtar Firdaous
59 Musées juifs marocains
Lieux de mémoire par excellence
Kawtar Firdaous
63 Patrimoine
Réhabilitation des synagogues et cimetières juifs au Maroc
Kawtar Firdaous
Directeur de la publication et de la rédaction Ahmed Charai l Directeur Général Hakim Arif l Rédacteur en Chef
Mohammed Zainabi l Secrétaire de Rédaction Kawtar Firdaous l Journalistes Fatima-Zohra Jdily l Mounia Kabiri Kettani l
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Les chroniques publiées ici ne reflètent que les points de vues de leurs auteurs et ne sauraient en aucune manière
représenter une position de L’Observateur du Maroc et d’Afrique.
4 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
a la une | ÉVÈNEMENT
Mohammed VI
THE PEACEMAKER
Un « tournant historique
» vient d’être
réalisé au Maroc en
faveur de la paix et de
la prospérité partagée.
Ses jalons ont été
patiemment posés, l’un après l’autre,
par le Souverain. Le couronnement
de ces efforts, de longue haleine,
vient d’être acté à Rabat entre le
Royaume, les États-Unis et l’État
d’Israël.
Héritier d’une monarchie
militante pour la tolérance
et le rapprochement des
peuples, le Roi Mohammed VI
a contribué à la réussite du
même tournant historique dans
des pays du Moyen Orient,
tout en faisant valoir les droits
inaliénables des Palestiniens.
C’est pour cela que le
Conseiller spécial du Président
américain, Jared Kushner a
Héritier d’une monarchie
militante pour la tolérance
et le rapprochement
des peuples, le Roi
Mohammed VI a œuvré
pour la réussite du
tournant historique,
tout en faisant valoir les
droits inaliénables des
Palestiniens.
réaffirmé publiquement sa
reconnaissance au Souverain
pour son « leadership
visionnaire ». Et c’est pour la
même raison que le Conseiller
à la Sécurité nationale de l’État
d’Israël, Meir Ben-Shabbat a
salué de la même façon le
« leadership courageux » du Roi
Mohammed VI et sa « vision
éclairée ».
Comme vous pouvez le lire dans
ce dossier spécial, ces deux
hauts responsables témoignent
de ce même profond respect et
cette grande reconnaissance
au Roi de la paix dans les
entretiens exclusifs accordés
à Ahmed Charaï pour les
médias du Groupe Medradio-
L’Observateur du Maroc.
Consacré entièrement à
L’ÉVÈNEMENT HISTORIQUE
dont il en donne tous les détails,
le magazine que vous tenez
entre vos mains a été imprimé
spécialement pour immortaliser
la mémorable phase de
l’Histoire que vient de vivre
notre pays.
Bonne lecture !
6 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
La Rédaction
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
7
a la une | ÉVÈNEMENT
Maroc-USA-Israël
Entente cordiale
co-constructive
C’est fait. Le Maroc a acté la reprise de ses relations avec Israël. Les États-Unis en ont été les grands
témoins. Les premiers mots sur cette nouvelle page de l’Histoire, écrite à Rabat, ont été publiés par
le Cabinet royal. Son communiqué a vite informé l’opinion publique de ce que le Souverain venait
de dire aux hauts représentants américain et israélien, qu’il venait de recevoir. Le même document
a énuméré toutes les décisions prises. Dans la foulée, la déclaration conjointe a été publiée aussitôt
qu’elle a été adoptée. Il en a été de même pour le contenu des accords signés.
Les hauts représentants marocain, américain et israélien se sont, eux aussi, exprimés publiquement,
et à chaud, sur le pas de géant qui venait d’être officiellement franchi en faveur de la paix et de la
prospérité partagée. Retour dans ce numéro spécial de L’Observateur du Maroc et d’Afrique sur une
longue nuit qui annonce des lendemains meilleurs pour une coopération pacifique favorable à tous,
et débarrassée des barrières psychologiques du passé.
Par Mohammed Zainabi
8 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
Dès les premières heures de la matinée
de cette journée mémorable du
mardi 22 décembre 2020, l’arrivée
au Maroc d’un avion en provenance
de Tel-Aviv était, partout, au centre
des discussions. C’était aussi le
sujet le plus abordé sur les réseaux sociaux. Pour se
démarquer, certains sont allés jusqu’à scruter virtuellement
le ciel pour pister le vol LY555, pas comme
les autres. Cherchant à se démarquer, certains internautes
marocains et étrangers faisaient accompagner
leurs tweets ou posts Facebook de captures d’écrans
pour prouver l’éminence de l’atterrissage du Boeing
737-900 assurant ce vol exceptionnel. Les plus avisés
retweetaient une vidéo postée mardi à 10H04, par
l’assistant spécial de Donalad Trump et Représentant
spécial pour les négociations internationales, peu de
temps avant le décollage de cet avion de l’aéroport
« Un autre vol
historique avec
l’équipe ! »,
a tweeté
Berkowitz
4
de Tel-Aviv. Avi Berkowitz s’y affiche, tout sourire,
en compagnie de Jared Kushner, sur fond sonore de
l’annonce du capitaine de bord clamant toute sa fierté
d’assurer la liaison aérienne inaugurale entre Israël
et le Maroc.
Pendant ce temps, au Maroc, comme ailleurs, les spéculations
allaient bon train sur les personnalités qui
se trouvaient à bord du Boeing dont le cockpit porte
le dessin de la main de Fatima «Khmissa», à côté des
drapeaux israélien, marocain et américain avec en
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
9
a la une | ÉVÈNEMENT
dessous le mot Salam écrit en anglais, en arabe et en
hébreu.
Les sujets de discussion changent dès l’arrivée de la
délégation américano-israélienne vers 14H47 à l’aéroport
de Rabat-Salé. On voit sortir de l’avion d’abord
le Conseiller spécial du Président américain, Jared
Kushner en compagnie du conseiller à la sécurité
nationale d’Israël, Meir Ben-Shabbat. Ils sont suivis
d’Avi Berkowitz et d’Adam Boehler, PDG de la société
de financement du développement international des
USA et des personnalités israéliennes occupant
diverses responsabilités dans leur pays.
Hommage aux premiers faiseurs
de paix
Comme première étape de sa visite officielle au
Maroc, la délégation américano-israélienne a choisi
de se rendre au Mausolée Mohammed V. En ce haut
lieu de mémoire, les visiteurs se sont recueillis sur
les tombes de Feu SM Mohammed V et Feu SM
Hassan II. Jared Kushner et Meir Ben-Shabbat ont
procédé au dépôt d’une gerbe de fleurs sur les tombes
des regrettés Souverains et ont signé le Livre d’or du
Mausolée Mohammed V.
L’Histoire reconnaît à Feu SM Mohammed V et Feu
SM Hassan II leur engagement en faveur de la paix.
C’est cet engagement, que perpétue aujourd’hui le
Roi Mohammed VI, qu’ont salué les illustres hôtes
du Maroc.
Tournant historique
La visite s’est poursuivie avec l’audience accordée par
le Souverain, au Conseiller principal du Président
des États-Unis d’Amérique, Jared Kushner ; Meir
Ben-Shabbat, Conseiller à la Sécurité Nationale de
l’État d’Israël et à Avrahm Joel Berkowitz, Assistant
spécial du Président des États-Unis d’Amérique et
Représentant spécial pour les négociations internationales.
Cette audience s’est déroulée en présence
d’Adam Seth Boehler, PDG de la société de financement
du développement international des USA
ainsi que du Conseil royal Fouad Ali El Himma et
du ministre des Affaires étrangères, de la Coopération
africaine et des Marocains résidant à l’étranger,
Nasser Bourita,
Aussitôt après cette audience, le Cabinet royal
a publié un communiqué soulignant que le Roi
Mohammed VI a réitéré sa pleine satisfaction
quant aux résultats historiques de l’entretien que le
Souverain a eu, le 10 décembre 2020, avec le Président
américain, Donald Trump.
« La proclamation présidentielle reconnaissant la
5Au Mausolée Mohammed V, l’émotion se lisait sur les visages de Kushner et Ben-Shabbat
10 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
marocanité du Sahara, ainsi que les mesures annoncées
pour la reprise des mécanismes de coopération
avec Israël, constituent des développements majeurs
pour le renforcement de la paix et de la stabilité
régionale », ajoute le Cabinet royal. Il précise que les
mesures dont il s’agit concernent l’autorisation des
compagnies aériennes israéliennes pour transporter
des membres de la communauté juive marocaine
et des touristes israéliens vers le Maroc, la pleine
reprise des contacts et des relations diplomatiques et
officiels avec Israël au niveau approprié, la promotion
d’une coopération économique bilatérale dynamique
et innovante, et l’action en vue de la réouverture des
bureaux de liaison à Rabat et à Tel Aviv.
Le Cabinet royal rapporte aussi que le Roi
Mohammed VI a félicité Jared Kushner pour « le travail
substantiel accompli depuis sa visite au Maroc
en mai 2018, et qui a permis de réaliser ce tournant
historique en faveur de l’intégrité territoriale du
Maroc et ce développement prometteur pour la paix
au Moyen Orient ». La même source indique que le
Souverain, en s’adressant à Meir Ben-Shabbat, a souligné
les liens particuliers avec la communauté juive
marocaine, et notamment ses membres occupant
Le Roi Mohammed VI a félicité Jared
Kushner pour « le travail substantiel
accompli depuis sa visite au Maroc
en mai 2018 ».
des postes de responsabilité en Israël. Il a été aussi
bien précisé que l’audience Royale a été l’occasion de
réaffirmer que l’ensemble des décisions et mesures
annoncées lors de l’entretien téléphonique du 10
décembre entre le Souverain et le Président Donal
Trump, seront intégralement appliquées. «Le Roi
Mohammed VI a réitéré, enfin, la position cohérente,
constante et inchangée du Royaume du Maroc sur la
question palestinienne, basée sur la solution à deux
États vivant côte à côte, dans la paix et la sécurité ; les
négociations entre les parties palestinienne et israélienne
comme seul moyen de parvenir à un règlement
global et définitif ; et l’attachement de Sa Majesté le
Roi, Président du Comité d’Al Qods, à la sauvegarde
du caractère musulman de la Ville Sainte », conclut
le Cabinet royal z
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
11
a la une | ÉVÈNEMENT
Document
Engagements actés
Aussitôt après l’audience que leur a accordée le Roi Mohammed VI, Jared Kushner,
Meir Ben-Shabbat ont signé, chacun au nom de son pays, la déclaration commune
actant officiellement les engagements pris dans le cadre de cette alliance renouvelée
pour la paix, avec Saad Eddine El Otmani. L’Observateur du Maroc publie, comme
document d’Histoire, cette Déclaration Conjointe signée entre le Royaume du Maroc,
les États-Unis d’Amérique et l’État d’Israël.
L
e Royaume du Maroc, les Etats-Unis d’Amérique
et l’Etat d’Israël, Se référant à l’entretien
téléphonique qui a eu lieu entre Sa Majesté le
Roi Mohammed VI et Son Excellence le Président
Donald TRUMP, le 10 décembre 2020,
ainsi qu’à leurs déclarations historiques respectives
publiées le même jour, ainsi que par Son Excellence,
le Premier Ministre de l’Etat d’Israël, Benjamin
NETANYAHU, annonçant l’ouverture d’une ère nouvelle
dans les relations entre le Royaume du Maroc et
l’Etat d’Israël ;
Saluant l’opportunité à laquelle ont donné lieu les
extraordinaires efforts des Etats-Unis et leur leadership ;
Mettant en exergue la Proclamation des Etats-Unis
d’Amérique portant sur la reconnaissance de la souveraineté
du Royaume du Maroc sur le Sahara occidental,
et stipulant ce qui suit :
Les « Etats-Unis reconnaissent la souveraineté marocaine
sur l’ensemble du territoire du Sahara occidental
et réaffirment leur soutien à la proposition d’autonomie
sérieuse, crédible et réaliste du Maroc comme seule base
pour une solution juste et durable du différend sur le
territoire du Sahara occidental ».
« Pour faciliter les progrès dans la poursuite de cet objectif,
les États-Unis encourageront le développement économique
et social avec le Maroc, y compris sur le territoire du Sahara
12 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
occidental, et, à cette fin, ouvriront un consulat sur le territoire du
Sahara occidental, à Dakhla, pour promouvoir les opportunités économiques
et commerciales en faveur de la région ».
Rappelant l’échange de vues qui a eu lieu durant ledit entretien
entre Sa Majesté le Roi Mohammed VI et Son Excellence
Donald TRUMP à propos de la situation actuelle au Moyen-
Orient, au cours duquel Sa Majesté le Roi a réitéré la position
cohérente, constante et inchangée du Royaume du Maroc sur
la question palestinienne, ainsi que la position exprimée sur
l’importance de préserver le statut spécial de la ville sacrée
de Jérusalem pour les trois religions monothéistes, pour Sa
Majesté le Roi, en Sa qualité de Président du Comité Al-Qods ;
Reconnaissant le rôle historique dont le Maroc s’est toujours
acquitté pour le rapprochement des peuples et la promotion
de la paix et de la stabilité au Moyen-Orient, et tenant compte
des liens particuliers que Sa Majesté le Roi entretient avec la
communauté juive marocaine vivant au Maroc et partout dans
le monde, y compris en Israël ; Conscients que l’établissement
de relations diplomatiques complètes, pacifiques et amicales
est dans l’intérêt commun des deux pays, et qu’il contribuera
à faire avancer la Cause de la paix dans la région, à renforcer
la sécurité régionale, à ouvrir de nouvelles opportunités pour
l’ensemble de la région ;
Rappelant l’entretien entre Sa Majesté le Roi Mohammed VI et
Son Excellence Donald TRUMP, Sa Majesté le Roi a confirmé
l’intention du Royaume du Maroc et de l’Etat d’Israël :
D’accorder les autorisations de vols directs entre le Maroc et
Israël, y compris via les compagnies aériennes israélienne et
marocaine, et d’octroyer des droits de survol ;
De reprendre sans délai les contacts officiels pleins et entiers
entre homologues marocains et israéliens et d’établir des relations
diplomatiques complètes, pacifiques et amicales ;
De promouvoir une coopération économique bilatérale dynamique
et innovante ;
De poursuivre la coopération dans les domaines du commerce
; de la finance et de l’investissement, en matière d’innovation et
de technologie ; d’aviation civile ; de visas et de services consulaires
; de tourisme ; d’eau, d’agriculture et de sécurité alimentaire
; de développement ; d’énergie et de télécommunications
; et dans d’autres secteurs qui pourraient être définis d’un commun
accord ;
De procéder à la réouverture des bureaux de liaison à Rabat
et à Tel-Aviv.
Sur la base de ce qui précède, le Royaume du Maroc, les États-
Unis d’Amérique et l’État d’Israël conviennent de ce qui suit :
S’engager à respecter pleinement les dispositions de la présente
Déclaration, à les promouvoir et à les défendre ;
Convenir que chaque partie aura pleinement honoré ses engagements
avant fin janvier, et qu’elle aura identifié des actions
nouvelles ;
Œuvrer en conséquence aux niveaux bilatéral, régional et multilatéral.
» . z
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
13
a la une | ÉVÈNEMENT
Maroc-Israël
Quatre accords
pour commencer…
La visite de la délégation américano-israélienne de haut niveau au Maroc a
été marquée par la signature entre le Royaume et Israël de quatre accords
dans divers domaines de coopération.
5Des responsables marocains et israéliens étaient heureux de pouvoir contribuer à l’écriture
de cette nouvelle page de l’Histoire de la coopération Maroc-Israël
14 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
Un premier pas vient d’être franchi
pour la mise en place des outils
nécessaires à l’intensification
des relations économiques et
commerciales entre le Maroc et
Israël.
C
e n’est qu’un début et il est déjà prometteur.
Le premier accord signé concerne
l’exemption de formalités de visa pour
les détenteurs de passeports diplomatiques
et de service. Il a été signé par
le ministre délégué auprès du ministre
des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et
des Marocains résidant à l’étranger, Mohcine Jazouli et
Shlomo Mor-Yosef, Directeur Général de l’Agence de la
Population et de l’Immigration.
Un mémorandum d’entente dans le domaine de l’Aviation
civile a suivi. Il a été signé par Zakaria Belghazi,
Directeur Général de l’Aviation civile au ministre du
Tourisme, de l’Artisanat, du Transport aérien et de
l’Economie sociale et Joel Feldschuh, Directeur de
l’Agence de l’Aviation civile.
En reconnaissant l’importance d’assurer des vols
directs entre Israël et le Maroc, les deux parties s’engagent
à mener des discussions pour la conclusion d’un
Accord sur les services aériens.
Ce n’est pas tout, un mémorandum d’entente sur l’Innovation
et le développement des ressources en Eau qui
prévoit la coopération technique en matière de gestion
et d’aménagement de l’Eau, a été signé par Hammou
Bensaadout, Directeur Général de l’Eau au ministre
de l’Equipement, du Transport, de la Logistique et de
l’Eau et Yechezkel Lifshitz, Directeur Général du ministère
des Ressources en Eaux.
Les Finances et investissements sont l’autre champ de
coopération qui sera exploré. Pour ce faire, un mémorandum
a été signé par Nabyl Lakhdar, Directeur
Général de l’Administration des Douanes et Impôts
Indirectes relevant du ministère de l’Economie, des
Finances et de la Réforme de l’Administration et Shira
Greenberg, économiste en Chef, au ministère des
Finances. Ce document annonce la promotion des
relations économiques entre les deux pays à travers le
commerce et l’investissement.
Le même document prévoit la négociation d’autres
accords devant régir la non double imposition, la promotion
et la protection des investissements ainsi que
l’assistance douanière.
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
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a la une | ÉVÈNEMENT
Maroc-Etats-Unis
Le Maroc
n’oublie pas
l’Afrique
Dans la délégation israéloaméricaine
qui est arrivée au Maroc
mardi 22 décembre, il y a une
personnalité de marque en relation
avec le monde du financement du
développement. Adam Boehler,
le directeur général de la US
International Development Finance
Corporation (DFC).
Par Hakim Arif
D
FC c’est la banque de développement
américaine. Elle s’associe au secteur privé
pour financer des projets essentiels dans
les pays en développement. Elle investit
dans des secteurs tels que l’énergie, la
santé, les infrastructures essentielles et la
technologie. DFC fournit également du financement aux
petites entreprises et aux femmes entrepreneurs afin de
créer des emplois dans les marchés émergents. Les investissements
de DFC sont soumis à des normes élevées et
respectent l’environnement, les droits de l’homme et les
droits des travailleurs.
DFC a été créé en 2019 par l’adoption de la loi BUILD, (Better
Utilization of Investments Leading to Development),
qui a renforcé et modernisé le financement du développement
américain. Le BUILD Act combinait les capacités
de l’Overseas Private Investment Corporation (OPIC) et
de la Development Credit Authority, qui appartenaient
auparavant à l’Agence américaine pour le développement
international (USAID).
La force de DFC réside dans sa capacité financière, sa
limite de crédit est de 60 milliards de dollars.
5Adam Boeler, le DG de DFC et le ministre des Finances signant
le mémorandum d’entente
Lors de cette visite, DFC a signé avec le gouvernement
marocain des accords de coopération destinés à promouvoir
les investissements au Maroc et en Afrique.
Le premier accord, un mémorandum d’entente entre
le gouvernement marocain et la DFC, a été signé par le
ministre de l’Economie, des Finances et de la Réforme
de l’Administration Mohamed Benchaaboun, et Adam
Boehler, PDG de la DFC.
Il prévoit de fournir un soutien financier et technique à
des projets d’investissement privés, d’un montant de 3
milliards de dollars, au Maroc et dans les pays d’Afrique
subsaharienne, en coordination avec des partenaires
marocains.
Le deuxième accord, signé par le ministre délégué auprès
du ministre des Affaires étrangères, de la Coopération
africaine et des Marocains résidant à l’étranger Mohcine
Jazouli, et le DG de DFC, est une lettre d’intention par
laquelle le gouvernement marocain exprime son soutien
à l’initiative américaine Prosper Africa. Une antenne de
cette agence sera ouverte à l’Ambassade des États-Unis à
Rabat afin de faciliter l’accès aux investisseurs américains
et coopérer ensemble vers l’Afrique. z
16 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
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a la une | ÉVÈNEMENT
Jared Kushner
“Je suis
particulièrement
reconnaissant
à SM le Roi
Mohammed
VI pour son
leadership
visionnaire. »
Jared Kushner et
Meir Ben-Shabbat saluent
le leadership royal
Peu de temps après l’audience royale, la signature de la Déclaration commune et
des accords, Jared Kushner et Meir Ben-Shabbat ont réagi à chaud au tournant
historique qui vient d’être marqué au Maroc.
J
e suis particulièrement reconnaissant à SM
le Roi Mohammed VI pour son leadership
visionnaire, qui place le Maroc et l’ensemble
de la région sur une trajectoire très prometteuse”,
a déclaré Jared Kushner lors d’un
point de presse.
Rappelant que le Maroc est l’un des partenaires “les plus
anciens et les plus proches” des Etats-Unis, Kushner a souligné
que les deux pays, qui viennent de célébrer le 243e
anniversaire de la reconnaissance des Etats-Unis par le
Royaume en 1777, entretiennent des relations “plus solides
que jamais”.
“Nous n’oublierons jamais que le Maroc ait été le premier
pays à reconnaître les Etats-Unis”, a affirmé le haut res-
18 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
19
a la une | ÉVÈNEMENT
Meir Ben-
Shabbat
« Il est grand
temps de placer
toute la région
et ses peuples
sur un chemin de
transformation
réelle vers
davantage de
paix, de stabilité
et prospérité. »
ponsable américain.
S’arrêtant sur la question du Sahara marocain, Jared Kushner
a relevé que chacune des administrations américaines,
depuis celle du président Bill Clinton, a affirmé son soutien
à l’initiative “sérieuse, crédible et réaliste” du Maroc pour
une autonomie au Sahara.
En annonçant sa reconnaissance de la souveraineté du
Maroc sur le Sahara, le président Donald Trump “rejette
le statu quo qui ne bénéficie à personne, et choisit d’aller
vers une solution juste, durable et mutuellement acceptable,
une solution qui a du sens et qui a plus de chance
d’améliorer le quotidien des gens”, a ajouté le Conseiller
du président américain.
Une “autonomie réelle” est “l’unique option réalisable”,
a-t-il encore affirmé, réitérant l’appel de son pays à toutes
les parties “à œuvrer de manière constructive avec les
Nations unies afin d’aller de l’avant dans le processus de
négociations”.
Par ailleurs, le haut responsable a affirmé attendre “avec
impatience” l’ouverture d’un consulat américain à Dakhla
“pour faire avancer davantage les efforts diplomatiques et
cueillir les fruits des efforts tangibles du Maroc en faveur
des Provinces du Sud et au delà”.
Il est grand temps de placer toute la région et ses peuples
sur un “chemin de transformation réelle vers davantage
de paix, de stabilité et prospérité”, a lancé, de son côté,
le Conseiller à la sécurité nationale de l’État d’Israël.
Meir Ben-Shabbat a aussi exprimé, au nom du Premier
ministre israélien Benjamin Netanyahu, sa “profonde
estime” au Roi Mohammed VI pour son “leadership
courageux et sa vision éclairée”. Il s’est dit “fier de
se retrouver au Royaume à la tête d’une délégation
israélienne officielle pour établir des relations avec
le Maroc”. Ben-Shabbat n’a pas caché son émotion
pour cette visite à un pays qui a vu naître son père
et ses frères, “ainsi que des milliers de juifs d’origine
marocaine”, soulignant que les us et coutumes des
juifs marocains “se perpétuent” en Israël à travers les
générations actuelles.Le haut responsable israélien
a réaffirmé que les “liens entre le Palais Royal, et en
fait l’ensemble des Marocains, avec les juifs du Maroc
constitueront un pont entre les deux pays, et l’une des
fondations de la paix entre les deux peuples”.
Le Conseiller à la sécurité nationale d’Israël a tenu à
souligner les “possibilités sans limites” de coopération
avec le Maroc dans les domaines de l’aviation, de
la créativité, des sciences, de la santé et de l’agriculture,
entre autres . z
20 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
La nuit des
premières grandes
annonces
:
5De nombreux marocains sont sortis manifester leur joie
après l’annonce par les États-Unis de la reconnaissance du Maroc sur son Sahara
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
21
a la une | ÉVÈNEMENT
Retour sur cette mémorable nuit du jeudi 10 décembre 2020 quand les
premières annonces ont été effectuées concernant la reconnaissance des
Américains de la souveraineté pleine et entière du Maroc et la reprise des
relations du Maroc avec Israël.
E
n fin de soirée du 10 décembre, le Cabinet
royal avait annoncé dans un communiqué
la reconnaissance officielle par
les États-Unis de la souveraineté pleine
et entière du Maroc sur son Sahara en
même temps que le Président américain
Donald Trump annonçait cette décision. En rapportant
la teneur de l’échange qui a eu lieu à ce propos entre le
Souverain et le chef d’État américain, le Cabinet royal
indique que le Président américain a informé le Roi
Mohammed VI de la décision de son pays d’ouvrir un
consulat général à Dakhla. Il y avait déjà de quoi perdre
son sommeil, de joie pour le Marocain et pour d’autres
raisons pour les ennemis du Royaume. Mais, ce n’était
pas tout.
Dans le même communiqué, annonce a été faite de la
reprise des relations entre le Maroc et Israël dans le
strict respect de la cause palestinienne. D’ailleurs, en
début de la même longue et si palpitante nuit, le Souverain
avait appelé Mahmoud Abbas et lui a tout dit à
propos de la décision américaine vis-à-vis de la marocanité
du Sahara et de la décision marocaine sur la reprise
des contacts officiels avec Israël. Dans les deux cas, c’est
la paix qui est le principal et ultime objectif.
Sans surprise, la plupart des Marocains ont sauté de
joie en apprenant ces bonnes nouvelles. Et sans surprise
aussi, certains ultra-conservateurs nationaux
et étrangers ont ressortis leurs slogans désuets pour
verser les uns dans un anti-américanisme dépassé, les
autres pour jouer aux défenseurs de la cause palestinienne.
Or, en parlant à la place des Palestiniens sans
que ses derniers ne les y autorisent, ils en sont les pires
ennemis. D’autres encore, surtout des voisins galonnés
et des militarisés d’esprit, se voyant dépassés par les
évènements et se trouvant de ce fait plus enragés que
jamais, ont noyé leur «anti-marocanisme» et «anti-marocanisme»
primaire dans un inadmissible antisémitisme.
Une fois encore, ils n’ont fait que se tirer de nouvelles
balles dans le pied.
lobservateur.info invite tous ceux qui crient, sans même
savoir pourquoi, que si le Président américain a officialisé
la reconnaissance de la souveraineté du Maroc
sur son Sahara, Donald Trump n’a fait qu’achever un
processus, lancé depuis plusieurs années, et au cœur
duquel le soutien américain était une constance malgré
Certains ultra-conservateurs nationaux
et étrangers ont ressortis leurs slogans
désuets pour verser les uns dans un antiaméricanisme
dépassé, les autres pour jouer
aux défenseurs de la cause palestinienne.
le changement des administrations. La reconnaissance
du Sahara marocain est désormais officialisée à travers
la proclamation présidentielle publiée dans le Registre
fédéral. Ce document, qui a force de loi, a été soumis à
tous les États américains et même au Conseil de sécurité
de l’ONU. Le trait qui scindait le Sahara marocain
a été officiellement effacé. Cet acte a été effectué,
devant les caméras, par l’ambassadeur des Etats-Unis
à Rabat, aussitôt la proclamation annoncée. Dans son
discours, à chaque fois que David Fischer voulait parler
du Sahara, il avait dit «Sahara marocain» pour mettre
en conformité son discours avec le texte fraîchement
introduit dans l’arsenal juridique de son pays.
Dans la même nuit, le Roi Mohammed VI a informé
le Président américain que le Maroc entend accorder
les autorisations de vols directs pour le transport des
membres de la communauté juive marocaine et des
touristes israéliens en provenance et à destination du
Maroc, reprendre les contacts officiels avec les vis-àvis
et les relations diplomatiques dans les meilleures
délais et promouvoir des relations innovantes dans les
domaines économique et technologique dont, à cet effet,
œuvrer à la réouverture des bureaux de liaison dans
les deux pays, comme cela fut le cas antérieurement et
pendant plusieurs années jusqu’en 2002. Une première
étape vient d’être franchie dans ce sens. Le tout, comme
le précisent le Cabinet royal dans des communiqués du
10 et du 22 décembre, ,sans que ne soit affecté affecté, en
aucune manière, l’engagement permanent et soutenu
du Maroc en faveur de la cause palestinienne et d’une
paix juste et durable au Moyen-Orient . z
22 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
Dates clés
L’amitié séculaire entre le Maroc et les États-Unis est l’élément moteur de l’alliance sans
cesse renouvelée entre les deux pays, comme l’illustrent ces actions marquantes.
Lesquelles viennent de connaître leur aboutissement par l’officialisation de la reconnaissance
américaine de la Souveraineté du Maroc sur son Sahara.
Déjà dans les années 1990. Une “Action Memorandum” a été officiellement développée
entérinant le souhait de l’Administration Clinton de poursuivre une solution politique
négociée, basée sur un plan d’autonomie large qui respecte la continuité de la souveraineté
du Royaume.
Entre 2000 et 2003. James Baker s’était engagé à suivre cette voie
2004. Le président George W. Bush avait adressé une lettre à SM le Roi Mohammed VI,
dans laquelle il avait salué et exprimé le “plein soutien” des États-Unis aux propositions
avancées par le Maroc pour le règlement du différend autour du Sahara.
2004. Le Maroc devient allié majeur des États-Unis hors OTAN
2007. Washington a multiplié les déclarations officielles de soutien en faveur du Maroc
suite à la présentation du plan marocain d’autonomie
2008. W. Bush avait adressé une nouvelle lettre à Sa Majesté le Roi, affirmant « qu’un État indépendant
n’est pas une option envisageable et réaliste » pour le différend sur le Sahara,
soulignant que le plan d’autonomie « est sérieux et crédible ».
2009. La secrétaire d’État Hillary Clinton avait réaffirmé le soutien
de l’Administration Obama au plan d’autonomie marocain en le qualifiant
de “sérieux, crédible et réaliste”.
2013. A l’occasion des entretiens du Souverain avec le président
Barack Obama, un communiqué conjoint a entériné la position de
l’Administration Obama réitérant que “la position des États-Unis reste
inchangée”, tout en qualifiant l’initiative d’autonomie de “sérieuse,
réaliste et crédible”.
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 23
Partenariat stratégique entre
L’Observateur du Maroc et le quotidien
israélien The Jerusalem Post
L’Observateur du Maroc et le quotidien israélien The Jerusalem
Post annoncent un accord stratégique de partenariat à travers cette
déclaration conjointe :
Appuyant l’accord historique
du rétablissement des
relations entre le Maroc
et Israël ainsi que la paix
en cours entre Israël et les
pays arabes, le Jerusalem
Post et L’Observateur du
Maroc, deux grands médias
dans leurs pays respectifs,
annoncent aujourd’hui
un accord de partenariat
stratégique.
Ce partenariat consistera en une
syndication, aboutissant à un
échange de contenu.
Le Jerusalem Post et L’Observateur
du Maroc travaillent
également à l’organisation d’une
conférence conjointe, prévue au
Maroc en 2021, pour mettre en
évidence les liens israélo-marocains.
«Nous sommes ravis de
cette opportunité d’être partenaire
de l’un des principaux médias marocains»,
a déclaré le rédacteur en chef du Jerusalem Post.
Et Yaakov Katz d’ajouter : «C’est un témoignage
de la vague de paix qui déferle actuellement sur
toute la région et il n’y a pas de meilleur moyen
de l’illustrer que de voir deux organes de presse
solidement établis comme les nôtres travailler
ensemble.»
Ahmed Charai, président de Global Media Holding,
éditeur de L’Observateur du Maroc, a salué
ce partenariat en déclarant : «Je me réjouis de ce
partenariat qui marque notre engagement en
tant que médias en faveur de la tolérance et de la
paix entre les peuples. J’espère
que cela servira à briser les barrières
invisibles.
Le Jerusalem Post est le principal
quotidien paraissant en
langue anglaise d’Israël et assurant
la plus grande diffusion
d’informations en ligne, au
niveau mondial, sur Israël et
le monde juif. Sa conférence annuelle
a, au cours des neuf dernières
années, servi de conférence
de premier plan pour
aborder les problèmes critiques
auxquels Israël et le monde juif
sont confrontés, rassemblant
des dirigeants politiques, gouvernementaux,
commerciaux
et universitaires internationaux
pour aborder, entre autres, les
questions d’économie, de sécurité
et de paix. Pour plus d’informations,
veuillez visiter: https://
www.jpost.com. L’Observateur
du Maroc et lobservateur.info
sont édités par Global Media
Holding (GMH). Outre cet hebdomadaire
et son site Internet, GMH est propriétaire
de Medradio, la première radio privée au
Maroc, Pouvoirs d’Afrique (pouvoirsafrique.com
), le site d’information Kifache.com et sa chaîne
YouTube forte de 2 millions d’abonnés, ainsi
que le site exclusivement féminin Lallaplus.ma.
24 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
entretien exclusifs |
À la veille de leur arrivée au
Maroc, Jared Kushner, Conseiller
spécial du Président Donald Trump
et Meir Ben-Shabbat qui dirige le
Conseil de sécurité nationale en
Israël ont accordé ces entretiens
exclusifs à Ahmed Charaï pour
L’Observateur du Maroc et les
autres médias du Groupe.
entretien exclusifs |
Jared Kushner
« Le Roi Mohammed VI
m’a prodigué d’excellents
conseils en faveur
de la paix »
Dans cet entretien exclusif accordé par
le Conseiller spécial du Président des
États-Unis, Jared Kushner, au Groupe
Medradio-L’Observateur du Maroc, ce
haut responsable américain parle du
nouveau processus de paix entre
Israël et les pays arabe qu’il œuvre
depuis longtemps à faire avancer.
Il parle aussi de l’ultime solution
pour régler le problème du
Sahara marocain. que recèle le
partenariat entre les deux pays
et les opportunités pour leurs
jeunes.
26 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
Entretien réalisé par Ahmed Charaï
5Jared Kushner écoutant attentivement le Roi Mohammed VI lors de l’Iftar que le Souverain a offert en son honneur
lors de la visite qu’il avait effectuée au Maroc en mai 2019
L’Observateur du Maroc et d’Afrique :
La région du Moyen-Orient a subi des
changements massifs. Votre vision stratégique
d’une approche régionale a porté
ses fruits. Vous avez travaillé en étroite
collaboration avec le Président Trump
pendant plus de 4 ans sous les attaques
et les critiques. Quelle était votre motivation
au quotidien pour aller de l’avant?
Jared Kushner : Toutes les personnes
concernées méritent mieux qu’un conflit
sans fin, et les habitants de la région
méritent de vivre mieux. Lorsque le Président
Trump est entré en fonction pour la
première fois, la région était en désordre.
L’EI était endémique, l’Iran et ses mandataires
faisaient des ravages, et nos alliés
et partenaires étaient aliénés. Nous avons
travaillé dur pour rétablir la confiance avec
nos partenaires régionaux et identifier les
intérêts communs, en les éloignant des
conflits du passé. Aujourd’hui, les nations
de la région se rendent compte des avantages
de se rassembler. Chaque pays qui
« Plus les gens
peuvent interagir les
uns avec les autres,
moins les extrémistes
et les djihadistes
peuvent justifier les
actes terribles qu’ils
commettent au nom de
la foi islamique qu’ils
pervertissent. »
renoue ses relations avec Israël s’appuiera
sur ceux qui l’ont précédé, apportant la
paix et la prospérité à la région et aux gens
qui y vivent. Grâce à un travail acharné
et à une diplomatie intense, nous avons
réalisé, ce qui était auparavant considéré
comme impensable - quatre avancées
historiques pour la paix en l’espace de
quatre mois seulement.
Des millions de jeunes Arabes en ont
assez des idéologies extrémistes et
xénophobes et veulent les opportunités
et les bénéfices que seuls la paix et le
partenariat peuvent apporter. Comment
les États-Unis devraient-ils les aider
et par quel mécanisme ?
Je pense que lorsque les gens commencent
à travailler ensemble et à réaliser
les opportunités de stabilité et de
prospérité qui ne viennent que de la paix,
cela ne fait qu’accélérer l’effondrement
des vieux préjugés. Dès le début, nous
avons décidé de rejeter l’approche de
politique étrangère ratée du passé qui a
contribué à attiser la division et à maintenir
les gens renfermés. La question
de la mosquée Al-Aqsa, Par exemple
en est une. Elle a été déformée par les
extrémistes et les personnes qui veulent
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 27
entretien exclusifs |
5 Jared Kushner s’est longuement entretenu avec le Premier ministre
israélien Benjamin Netanyahou avant de venir au Maroc
utiliser la question pour diviser les gens.
Ils ont alors utilisé la fausse idée que la
mosquée était menacée ou attaquée par
les Israéliens comme un moyen de susciter
la haine et diviser les gens.
La beauté des accords d’Abraham réside
dans le fait que les personnes de différentes
confessions se concentrent sur
leurs valeurs et leur histoire communes.
Cela leur permet de bâtir un avenir avec
beaucoup plus d’espoir. Grâce à ces
accords de paix, Arabes, Musulmans et
Israéliens peuvent se rendre visite. Ces
échanges culturels qui ont eu lieu et l’accueil
qui leur a été réservé sont vraiment
beau à voir. Le succès dans les relations
de personne à personne, les relations de
religion à religion et les relations d’entreprise
à entreprise vont transformer
la région d’une manière impensable il
y a encore quelque temps. Plus les gens
peuvent interagir les uns avec les autres,
moins les extrémistes et les djihadistes
peuvent justifier les actes terribles qu’ils
commettent au nom de la foi islamique
qu’ils pervertissent.
Le Maroc a joué un rôle historique,
durant des décennies, en rapprochant les
peuples de la région et en soutenant la
sécurité et la stabilité au Moyen-Orient.
Il existe également des liens particuliers
qui lient la communauté juive d’origine
marocaine, y compris celle d’Israël, à la
personne de Sa Majesté le Roi
Mohammed VI. L’accord permettra au
Maroc et à Israël d’œuvrer pour promouvoir
une coopération économique
accrue, de rouvrir les bureaux de liaison
de Rabat et de Tel Aviv et de discuter
d’autres domaines de coopération. Comment
cet accord a-t-il pu
aboutir ?
J’étais au Maroc il y a deux ans avec le
Roi, et j’ai eu une très bonne discussion
avec lui lors d’un Iftar sur la possibilité de
rétablir les relations avec Israël. Il m’a prodigué
d’excellents conseils et partagé avec
moi de nombreuses idées importantes qui
ont conduit à nos succès dans la région.
Depuis, nous avons été en contact permanent
avec lui et son équipe, travaillant
sur les différentes problématiques. Grâce
à beaucoup de travail, nous avons pu, au
fil du temps, bâtir la confiance nécessaire
pour que toutes les parties franchissent
ce grand pas.
Bien entendu, le fait que le Maroc soit
l’un des alliés les plus anciens et les
plus proches des États-Unis a aidé. À
travers cette étape historique, le Maroc
s’appuie sur son lien de longue date avec
la communauté juive marocaine vivant
au Maroc et dans le monde, y compris
en Israël. Ce dernier accord consolide la
sécurité d’Israël, tout en créant des occasions
pour les deux pays d’approfondir
leurs liens économiques et améliorer la
vie de leurs peuples.
Le Roi Mohammed VI n’a surpris personne
en appelant le président de l’Au-
28 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
« Le Maroc et d’autres pays
arabes ont toujours appelé
à une solution au conflit
israélo-palestinien. »
torité palestinienne Mahmoud Abbas
pour lui assurer que le nouvel accord
avec Israël ne ferait que renforcer son
engagement en faveur de la solution à
deux États. Comment le Roi
Mohammed VI peut-il aider davantage à
réinventer le processus de paix et encourager
les pourparlers entre Palestiniens
et Israéliens ?
Le Maroc et d’autres pays arabes ont
toujours appelé à une solution au conflit
israélo-palestinien. Désormais, plusieurs
de ces pays peuvent discuter directement
avec Israël de leurs préoccupations pour
une solution. Des décennies de boycott
d’Israël n’ont fait que laisser les Palestiniens
dans une mauvaise situation. La
reconnaissance de l’État d’Israël et la
recherche d’une solution réaliste pour les
Palestiniens par le biais de négociations
sont le meilleur moyen de parvenir à un
accord de paix global. Les États-Unis
soutiennent cette position, tout comme
presque tous les pays arabes. Avec le
succès des Accords d’Abraham, nous
pensons que les fondations ont été posées
pour faire avancer davantage la vision et
l’espoir de trouver une paix globale, juste,
réaliste et durable entre Israël et les Palestiniens.
Nous devons également reconnaître qu’au
cours des 30 dernières années, de nombreux
pays arabes ont utilisé leur capital politique
pour aider les dirigeants palestiniens, souvent
aux dépens de leurs citoyens chez eux. Cette
tendance touche à sa fin. Les pays peuvent
continuer à soutenir la cause palestinienne et
offrir une assistance et un soutien constructif,
mais en même temps, ils peuvent utiliser
leur capital pour défendre les intérêts de
leur pays et de leurs citoyens.
Sur un sujet très important pour les
Marocains, et dans une démarche sans
précédent, le président Trump a reconnu
la souveraineté du Maroc sur les provinces
du Sahara. Pensiez-vous que la
reconnaissance de la souveraineté du
Maroc pourrait éventuellement débloquer
la situation ?
Les États-Unis estiment que le plan
d’autonomie du Maroc est la seule option
réaliste pour parvenir à une solution
juste, durable et mutuellement acceptable
du différend sur le Sahara occidental.
La vieille pensée a échoué et continuer à
ignorer la réalité ne fait que pénaliser les
Marocains et le Polisario. Un État sahraoui
indépendant n’est tout simplement pas
une option réaliste pour résoudre le conflit.
Nous exhortons les parties à s’engager
immédiatement de manière constructive
avec l’ONU et à envisager des moyens
créatifs et authentiques de faire avancer
le processus de paix, en utilisant le plan
d’autonomie du Maroc comme seul cadre
pour négocier une solution mutuellement
acceptable. Pour faciliter les progrès vers
cet objectif, les États-Unis encourageront
le développement économique et social
du Maroc, y compris sur le territoire du
Sahara, et à cette fin ouvriront un consulat à
Dakhla, pour promouvoir les opportunités
économiques et commerciales pour la
région
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 29
entretien exclusifs |
Meir Ben-Shabbat
« Nos pères ont vécu au Maroc
dans la sécurité, la sérénité
et la prospérité »
Meir Ben-Shabbat est conseiller à
la sécurité nationale et président
du Conseil national de sécurité de
l’Etat d’Israël. C’est lui qui préside
la délégation israélienne qui est
arrivée à Rabat, inaugurant le
premier vol direct de Tel Aviv.
L’entretien qu’il a accordé aux
médias de notre groupe révèle
l’immense potentiel que recèle le
partenariat entre les deux pays
et les opportunités
pour leurs jeunes.
Entretien réalisé
par Ahmed Charaï
30 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
5 Meir Ben-Shabbat a son mot à dire dans toutes les réunions gouvernementales décisives. On le voit souvent
sur les photos, à côté du Premier ministre israélien.
L’Observateur du Maroc et d’Afrique
: Israël et le Maroc ont convenus de
rétablir les relations diplomatiques. Le
Premier ministre Netanyahu a déclaré
que la relation entre les peuples des
deux pays «a longtemps été caractérisée
par la sympathie, le respect, la tendresse
et l’amour», et a salué la «décision
historique» du Roi Mohammed VI de
faire ce pas audacieux vers la paix.
Comment ce nouveau développement
majeur peut-il élargir la coopération
économique et culturelle pour faire
progresser la stabilité régionale?
Meyer Ben Shabba : L’établissement
de relations avec le Maroc porte une
signification particulière au-delà de ses
aspects diplomatiques et économiques
importants. Plusieurs citoyens israéliens
d’origine marocaine espéraient ce
moment.
Plusieurs enfants de la deuxième et
troisième génération de juifs marocains,
qui ont émigré en Israël, dont moi-même,
conservons toutes nos traditions juives
marocaines. Nous les vivons dans nos
« Je remercie le Premier
ministre Netanyahou
qui m’a accordé
l’opportunité d’être
un partenaire dans
l’établissement des
relations avec
le Maroc. »
maisons. Les livres des grands rabbins
marocains se trouvent dans toutes les
bibliothèques israéliennes.
Les relations profondes entre la
monarchie et le peuple marocain
sont connues à travers le monde.
Elles seront un pont entre nos deux
pays et les fondations de la paix entre
les deux peuples. A ces bases, s’en
ajouteront d’autres comme les aspects
technologiques et économiques.
L’invention et la création sont les clés
du développement et Israël dispose de
ces capacités qui portent des concepts
et des idées susceptibles de créer des
partenariats dans les domaines de l’eau,
de l’agriculture, de l’énergie, de la santé et
de la cybersécurité, entre autres.
Le premier vol direct de Tel-Aviv à Rabat
est prévu ce mardi. Comment vous
sentez-vous en tant que fils de Makhlouf
Ben-Shabbat, un juif qui a immigré du
Maroc en Israël ?
Le vol historique entre Tel Aviv et
Rabat représente l’ouverture des lignes
aériennes entre Israël et le Maroc. Cela
engendrera un rapprochement entre
les deux peuples, et donnera envie de
créer des partenariats dans plusieurs
domaines. Nous avons vécu cela dans
nos relations avec les autres pays avec
lesquels nous avons ouvert des lignes
directes.
En ce qui concerne mes sentiments, ce
jour est exceptionnel et pas uniquement
pour son aspect diplomatique. Mon
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
31
entretien exclusifs |
5 En partant de son histoire personnelle dont les premiers chapitres ont été écrits au Maroc, Meir Ben-Shabbat montre
toute sa détermination à faire avancer la paix entre Israël et les pays arabes.
regretté père le rabbin Makhlouf
Khalifa et ma mère Aziza, que Dieu lui
accorde longue vie ainsi que mes grands
frères sont tous nés au Maroc. C’est là
qu’ils ont grandi et fait leurs premiers
apprentissages avant d’arriver en Israël.
Comme des milliers d’Israéliens, nous
avons grandi avec les histoires de nos
pères qui ont vécu au Maroc dans la
sécurité, la sérénité et la prospérité. Ils ne
cessent de louer les traditions et la culture
juives marocaines. Elles sont vivaces
dans nos maisons, nos synagogues, nos
cœurs et chez nos enfants. Je remercie
le Premier ministre Netanyahou qui m’a
accordé l’opportunité d’être un partenaire
dans l’établissement des relations avec le
Maroc.
Dans les pays arabes, des millions de
jeunes en ont assez des idéologies
extrémistes et xénophobes et veulent
des opportunités et des avantages
que seuls la paix et le partenariat
peuvent apporter. Ils voient en Israël un
partenaire solide pour développer leur
économie, diffuser des opportunités et
assurer leur avenir.
Quel est votre message à ces
populations?
Ces jeunes ont raison. Ils savent que
la haine, le radicalisme et la guerre ne
donneront rien de positif. Ils veulent
employer leurs capacités pour la création
de valeurs utiles. Ils attendent de leurs
dirigeants qu’ils les amènent dans
cette direction. C’est la raison de notre
optimisme. Ces jeunes voient qu’Israël
n’est pas le diable comme certains
essaient de le leur faire croire. Israël ne
méprise personne. Au contraire, c’est
un véritable partenaire capable de faire
avancer toutes les parties et générer de
l’optimisme pour les générations futures.
En sa qualité de Commandeur des
croyants et président du Comité Al
Qods, le Roi Mohammed VI, n’a cessé
d’œuvrer pour la paix dans le monde.
Comment le Souverain pourrait-il aider
à établir la paix entre Israéliens et
Palestiniens?
L’attention accordée par Sa Majesté le
Roi Mohammed VI aux juifs du Maroc
constitue un exemple de tolérance et un
modèle de coopération entre les trois
religions monothéistes.
Les relations entre le Maroc et Israël
sont un pas qui va dans ce sens. Israël
garantit la liberté du culte pour toutes
les religions qui y sont représentées. Les
accords d’Abraham renvoient à l’origine
commune des trois religions. Jerusalem
Al Qods et les lieux saints doivent être
des lieux de rapprochement, de paix et de
fraternité et non pas de guerre et de haine
entre les peuples. z
32 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 33
chronique
https://www.israelhayom.com
L’histoire
s’écrit à
nouveau alors
que le premier
vol direct
depuis Tel
Aviv atterrit
mardi à Rabat,
la capitale du
Maroc. Ce vol
est le premier
signe visible
de la nouvelle
relation entre
le Maroc
et Israël,
ouvrant une
nouvelle ère
de reconnaissance
diplomatique.
Le Maroc est désormais le quatrième pays arabe à
conclure de nouveaux accords diplomatiques avec
Israël en autant de mois. Les Émirats arabes unis ont courageusement
ouvert la voie, malgré les menaces de l’Iran et de ses mandataires, en signant un
accord de paix avec Israël en septembre 2020, ce qui en fait le premier pays arabe à le
faire depuis la Jordanie en 1994. Les Émirats ont été aussitôt suivis par le Bahreïn, le
Soudan, et maintenant le Maroc.
La paix entre le Maroc et Israël puise ses racines dans des siècles d’Histoire. Le défunt
Roi du Maroc, Hassan II, a travaillé sans relâche pour promouvoir le rapprochement
entre Israël et ses voisins arabes. Il a facilité toutes les grandes initiatives de paix, de
Camp David dans les années 1970 aux accords d’Oslo dans les années 1990. Dans les
coulisses, le Roi Hassan II a joué un rôle moteur pour faire de l’Égypte la première
nation arabe à signer un traité de paix avec l’État juif. Le Roi Mohammed VI maintient
le même engagement à faire progresser le rapprochement israélo-arabe.
Le Roi Mohammed VI a clairement indiqué, à la fois dans des déclarations publiques
et lors de conversations avec Mahmoud Abbas, que l’accord de normalisation avec
Israël ne signifie pas l’abandon des Palestiniens. Par contre cela signifie que les
Palestiniens sont invités à reprendre les négociations, laissant derrière eux le bagage
de leurs conditions préalables passées. Les dirigeants israéliens devraient également
voir ces percées remarquables comme une opportunité d’apporter de nouvelles idées,
s’inspirant du plan américain «Peace to Prosperity» de 2020.
L’accord entre Israël et le Maroc est historique, tout comme les liens familiaux entre
les deux pays. Un million d’Israéliens sont soit du Maroc, soit ont eu un parent ou
un grand-parent né dans ce pays. Les droits légaux des juifs et des autres minorités
religieuses sont garantis dans la constitution marocaine de 2011. Les écoles juives
existent toujours dans les grandes villes du Maroc, et les Juifs y étudient librement.
Il y a, bien sûr, une frange de la société marocaine qui rejette cet accord avec Israël,
principalement des mouvements islamistes et adeptes de diverses idéologies de
gauche. Cependant, des millions de jeunes Marocains en ont assez des idéologies
Par Ahmed Charaï & Boaz Bismuth*
34 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
extrémistes et xénophobes et veulent les opportunités et les avantages que seuls la paix et le
partenariat peuvent apporter. Ils considèrent Israël comme un partenaire solide pour créer des
emplois, accroître les capacités et susciter l’espoir pour leur avenir.
La nouvelle vague d’accords de paix réaligne le monde arabe. Il y a quelques décennies, «de
l’océan [Atlantique] au Golfe» était le slogan des nationalistes panarabes pro-soviétiques.
Maintenant, ironiquement, le même concept pourrait être utilisé pour décrire le partenariat de
forces - de Rabat et Casablanca sur la côte atlantique à Abu Dhabi et Manama sur le Golfe, et avec
le Caire, Khartoum, Jérusalem et Amman - qui subissent le radicalisme totalitaire, cette fois dans
un costume islamiste, comme une menace commune. Le Maroc, sur le flanc occidental de cette
alliance, a une contribution stratégique cruciale à apporter: sa voix respectée de l’islam modéré
peut faire une différence dans la lutte idéologique avec les radicaux islamistes en Europe, en
Afrique subsaharienne et au Moyen-Orient.
Le nouvel accord maroco-israélien est doublement significatif pour les Marocains car il
s’est également accompagné de la reconnaissance par la Maison Blanche de la souveraineté
marocaine sur ses provinces sahariennes. Cette étape importante reflète la conscience
américaine que Rabat a engagé cent milliards de dollars d’investissements pour sa population
sahraouie - tandis que la milice séparatiste du Polisario, soutenue par l’Algérie et ses camps
enclavés restent un centre de misère, de souffrance et de terrorisme.
Grâce aux progrès accomplis, les mois à venir offrent aux pays arabes l’occasion d’aider à
remodeler le discours et l’ordre du jour internationaux sur le rapprochement israélo-palestinien.
La nouvelle administration Biden peut aider en adoptant une nouvelle approche du
rétablissement de la paix qui tire les leçons de la nouvelle vague de résultats diplomatiques.
Le moment est venu de tirer parti de la promesse des nouveaux accords - pour tous leurs
signataires, les Palestiniens et la région au sens large. Si la vague de rétablissement de la paix
se traduit par des avantages tangibles pour la jeunesse arabe, le soutien panarabe à la paix avec
Israël ne fera que croître.
Abraham Lincoln avait déclaré: «La meilleure façon de prédire votre avenir est de le créer». Il
incombe ainsi aux Américains, aux Arabes, aux Israéliens et à toutes les parties prenantes d’une
région sûre et prospère d’appliquer ce principe pour la paix.
5Co-écrite par le président du Groupe Media Holding et le directeur du premier quotidien
israélien «Israel Hayom», Boaz Bismuth, cette chronique est parue en hébreu dans le quotidien
israélien (Israel Hayom) du mardi 22 décembre. les deux éditorialistes y mettent en perspectives
l’évènement historique du rétablissement des relations entre le Maroc et Israël.
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 35
économie |
Tourisme,
une ruée
se profile
économie
Le tourisme est l’une des
premières activités qui
pourraient bénéficier de
la reprise des relations
entre le Maroc et Israël.
Les avis sont unanimes,
l’impact sera significatif
sur un secteur plombé
par la crise sanitaire.
Par Mounia Kabiri Kettani
La reprise des relations diplomatiques
entre le Maroc et Israël,
est bien accueillie pas les professionnels
du tourisme. «C’est
une très bonne nouvelle », commente
le président de la confédération
nationale du tourisme, Abdellatif Kabbaj
qui table sur un total de 400.000 voire
même 500.000 arrivées annuelles en
provenance d’Israël à partir du deuxième
semestre de l’année prochaine.
Le président de la fédération nationale
de l’industrie hôtelière (FNIH), Lahcen
5Israël compte plus d’un million de juifs d’origine
marocaine qui veulent venir découvrir leurs origines.
Zelmat ne cache pas sa satisfaction suite
à cette reprise. «A moyen terme, cette décision
aura un impact très significatif sur le
tourisme national », assure t-il. Selon ses
estimations, il faut compter un surplus
de 200 à 300.000 touristes à partir de
Mars prochain. « Ce gain, pourra donc
compenser, la perte accusée sur certains
marchés », ajoute Zelmat qui nous confie
par la même occasion, qu’une délégation
regroupant des hôteliers et des
agences de voyages marocaines feront
le déplacement prochainement à Israël
36 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
|
pour officialiser la coopération. «Nous
sommes prêts à partir dès demain. Encore
faut-il attendre l’ouverture des frontières et
la baisse du nombre de contaminations liées
au coronavirus », insiste t-il.
Investissements en vue
Pour le président du conseil régional du
tourisme (CRT) d’Agadir-Souss Massa,
Rachid Dahmaz, la reprise des relations
maroco-israéliennes, est la seule
bonne nouvelle de l’année pour le tourisme,
vu les répercussions positifs que
Une délégation
regroupant
des hôteliers
et des agences
de voyages
marocaines
feront le
déplacement
prochainement
à Israël pour
officialiser la
coopération.
cela entrainerait sur toutes les filières
touristiques notamment , les agences
de voyage, les guides touristiques, les
hôtels, le transport touristique…. «Nous
avons plus d’un million de juifs d’origine
marocaine. La récente annonce, va pousser
non seulement cette communauté à venir
découvrir ses origines…mais va encourager
aussi, les juifs internationaux à visiter
le Royaume», ajoute Rachid Dahmaz qui
prévoit un nombre conséquent de futurs
investissements juifs dans le secteur touristique
national
Les Compagnies israéliennes
s’engagent
Les compagnies aériennes du pays ont
assuré être très satisfaites de la reprise
des relations entre les deux pays. Ces dernières
ont même déjà annoncé des programmes
aériens chargés pour répondre
à la demande croissante des intéressés.
La compagnie aérienne israélienne El
Al annonce qu’elle va opérer au moins
un vol par jour à destination du Maroc.
De son côté, la compagnie Israir Airlines
note qu’elle va programmer au moins
cinq vols hebdomadaires vers et depuis
le Maroc, qui devraient commencer à la
période de Pâques en mars. Et le PDG
de la compagnie estime qu’en 2021, il
pourrait y avoir jusqu’à 150.000 touristes
israéliens en visite au Maroc, contre
30.000 actuellement. Il a ajouté aussi
que les tarifs de ces vols seront compris
entre 400 à 500 dollars. Au Maroc, Le
ministère du Tourisme signera dans les
prochains jours un accord aérien avec le
gouvernement israélien qui permettra à
la RAM et aux compagnies israéliennes
d’assurer des vols quotidiens dans les
deux sens. Outre la question cruciale de
visas, cet accord a pour objectif de préciser
la fréquence des connexions entre
les deux pays, et définir les compagnies
aériennes concernées z
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 37
économie |
Radioscopie
de l’économie
israélienne
Israël possède une économie diversifiée et
technologiquement avancée, affiche des
fondamentaux économiques solides et
demeure l’un des pays les plus dynamiques au
niveau de dépôt de brevets d’invention et de
création d’entreprises.
Par Mounia Kabiri Kettani
Selon le dernier rapport de
l’OCDE, Israël qui compte 9
millions d’habitants, peut se
prévaloir d’un écosystème de
l’innovation performant, d’un
secteur gazier en développement lui
permettant d’assurer son indépendance
énergétique et de fondamentaux économiques
solides.
Innovation et R&D
Le succès du modèle économique israélien
repose largement sur la performance
de son écosystème de l’innovation qui
représente 9% des emplois, 13% du PIB
et près de 50% des flux de biens et services.
Israël, qui compte près de 7.000
start-ups actives, 200 fonds de capitaux
risques et 350 centres de R&D créés par
des multinationales, consacre près de 5%
de son PIB à la R&D civile, soit le taux le
plus élevé de la planète.
D’après les données de Coface, des 5%
réinvestis annuellement dans la R&D,
38 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
une part de moins de 1% seulement provient
de l’État, le reste des financements
est privé. Résultat : le pays est mondialement
reconnu comme étant un pôle d’excellence
technologique.
Le secteur des sciences de la vie constitue
l’un des moteurs de la croissance économique
de l’État hébreux. Environ la moitié
des brevets déposés par Israël concerne
ce secteur. La coopération étroite entre le
monde universitaire et celui des affaires
favorise une capacité d’innovation importante
dans ce domaine.
Malgré sa petite superficie, Israël est un
des pays les plus dynamiques au niveau
de la création d’entreprises. Le pays
compte le plus grand nombre de startups
par habitant. L’esprit entrepreneurial
avancé, une population hautement qualifiée
ainsi qu’une politique industrielle
gouvernementale proactive ont favorisé
l’essor des hautes technologies. Le pays
compte 23 incubateurs technologiques,
créés dans les années 90 dans le but de
fournir des opportunités d’emplois aux
scientifiques et ingénieurs. Près de la
moitié des incubateurs technologiques
israéliens se concentrent sur les sciences
de la vie ou la biotechnologie.
5Le gisement gazier de Leviathan marque une étape clef dans
le développement d’un secteur désormais exportateur.
Malgré
sa petite
superficie,
Israël est
un des pays
les plus
dynamiques
au niveau de
la création
d’entreprises.
Gaz, un atout pour Israël
Si Israël importait, jusqu’à récemment, du
gaz pour satisfaire ses besoins internes,
l’exploration et l’exploitation des champs
offshore de gaz naturel (en particulier
celui du Léviathan entré en production le
31 décembre 2019) a des apports aussi bien
économiques que stratégiques. Outre le
fait d’assurer sa sécurité énergétique et de
contribuer à la diversification du mix, ces
découvertes ont créé les conditions d’un
rapprochement entre les producteurs de
la région et constituent un accélérateur
en termes de coopération régionale, dans
le cadre du East-Med Gas Forum ainsi
que du projet de gazoduc East-Med. Ce
gisement marque une étape clef dans le
développement d’un secteur désormais
exportateur. Jusque-là, la Jordanie et
l’Égypte sont les deux seuls clients étrangers
d’Israël.
L’avènement du gaz contribuera également
à achever la diversification énergétique
du pays. La production d’électricité
issue du gaz est ainsi passée de 35% à 65%
entre 2011 et 2018. En même temps, celle
du charbon a été ramenée de 59% à 30%
et devrait disparaître à l’horizon 2025.
Afin d’atteindre cet objectif, la construction
de deux centrales électriques à cycle
combiné a été approuvée en janvier par
les autorités. Elles seront exploitées par
l’Israel Electric Corp. (IEC) et pourraient
être rapidement mises en service.
Enfin, Le recours au gaz sert également
les objectifs de réduction des émissions
de gaz à effet de serre dans le cadre de
l’accord de Paris qu’Israël a ratifié en
novembre 2016.
Une économie diversifiée
La force d’Israël réside également dans
la large diversification de son économie
qui s’appuie sur l’innovation technologique.
Le secteur agricole emploie 1% de
la population active et représente 1% du
PIB (Banque mondiale, 2019). Les principales
cultures du pays sont les fruits et
légumes, les céréales, le vin et l’élevage.
Le pays est autosuffisant en termes de
production alimentaire, à l’exception des
céréales. Il est devenu l’un des principaux
pays du secteur de l’agro-technologie,
« verdissant » le désert pour produire l’essentiel
de la nourriture exportée.
Autre pilier économique, l’industrie
israélienne excelle dans la production
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 39
économie |
devant les États-Unis avec une part de
marché de près de 30%. On constate,
toutefois dès 2018, une augmentation
des exportations de biens vers l’Asie et
l’Amérique Latine et une légère diminution
de celles vers l’Union européenne et
des États-Unis.
Les principaux produits exportés en
2019 par Israël sont des produits manufacturés
et produits divers, les machines
et matériels d’équipement, des produits
chimiques et des aéronefs. Les importations
israéliennes de biens se sont stabilisées
à 76,6 milliards de dollars américains.
Hors-diamants, elles représentent
93,9% du total et se sont accrues de 2,6%,
passant de 70,1 milliards de dollars en
2018 à 71,9 en 2019. Les produits pétroliers
(-4,9%) et les véhicules automobiles
(+8,5%) en sont les principaux postes et
représentent respectivement 10,8% et
9,1% du total des importations.
Fondamentaux économiques
Israël affiche des fondamentaux économiques
solides. Au-delà du taux de
croissance compris entre 3% et 4% ces
dernières années (3,5% en 2019), la bonne
tenue des comptes extérieurs a accordé
3Les principales
cultures d’Israël
sont les fruits
et légumes, les
céréales, le vin
et l’élevage
aux autorités des marges de manœuvre
non négligeables. Le pays était par ailleurs
en situation de plein emploi fin 2019.
Les autorités peuvent aussi s’appuyer sur
la bonne santé des banques israéliennes.
Piloté de manière conservatrice par la
de produits chimiques (Israël se spécialise
dans les médicaments génériques),
de plastiques et de hautes technologies.
L’industrie dans son ensemble représente
19,4% du PIB et emploie 17% de la population
active (Banque mondiale, 2019).
De nombreuses entreprises, en particulier
celles actives dans des technologies
de pointe, ont bénéficié de leur capacité
à obtenir des fonds de Wall Street et
d’autres centres financiers internationaux.
Israël se classe au deuxième rang,
après le Canada, pour le nombre de
sociétés inscrites sur les marchés boursiers
américains. La haute technologie
(aéronautique, électronique, télécommunications,
logiciels, biotechnologies, etc.)
représente environ 40% du PIB du pays.
Parmi les autres secteurs d’activité importants
figurent la taille des diamants, les
textiles et le tourisme. La majorité de la
main-d’œuvre (82%) est employée dans le
secteur tertiaire, qui représente près de
70% du PIB.
Importations Vs exportations
L’Union Européenne est le premier partenaire
commercial d’Israël. Elle se place
5 L’Union Européenne est le premier partenaire commercial d’Israël. Elle
se place devant les États-Unis avec une part de marché de près de 30%.
40N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
5 L’économie israélienne n’a pas été épargnée par la crise sanitaire en 2020, quand bien même l’activité devrait rebondir en 2021.
Après une année
2020 qui est
marquée par la
crise économicosanitaire,
La
Banque centrale
israélienne table
sur un rebond
du PIB de 6,8% en
2021 quand le FMI
prévoit un taux de
croissance de 5%.
Banque centrale (BOI), le secteur bancaire
affiche de solides ratios, que ce soit
en matière de capitalisation, de liquidité
ou de rentabilité.
Impact Covid-19
Selon l’OCDE, l’économie israélienne
n’pas été épargnée par la crise sanitaire en
2020, quand bien même l’activité devrait
rebondir en 2021, sauf choc exogène. La
croissance du PIB a diminué au T1 2020
de 7,1% soit la plus forte baisse enregistrée
au cours de ces vingt dernières années.
Les prévisions de croissance pour cette
année, tant de la BOI (-4,5%) que du
FMI (-6,3%), pourraient être revues à la
baisse, d’autant plus que ces estimations
ne prennent pas en compte l’hypothèse
d’une seconde vague de l’épidémie.
Le taux de chômage a, quant-à-lui,
dépassé les 25% en avril dernier. La
confiance des marchés financiers et des
agences de notation dans la capacité d’Israël
à surmonter rapidement la crise de la
Covid-19 constitue toutefois un atout. La
Banque centrale table ainsi sur un rebond
du PIB de 6,8% en 2021 quand le FMI prévoit
un taux de croissance de 5%.
« Le taux de chômage retrouverait son
niveau pré-crise en 2022, dans le meilleur
des cas », note l’OCDE. Concernant
les exportations, on relève une diminution
de 20,4% au premier trimestre 2020,
entrainant une contraction des échanges
commerciaux d’Israël de 13,6% au premier
trimestre 2020 par rapport à la
même période en 2019.
Plusieurs secteurs sont touchés: le tourisme,
le secteur de l’évènementiel, les
transports aériens, le secteur de l’industrie
(y compris la prometteuse industrie
gazière qui souffre de la chute brutale
du cours des hydrocarbures) et le Hightech.
Même les start-up, moteur de la
croissance israélienne, éprouvent des
difficultés à lever des fonds ou à conclure
de nouveau contrats.
L’officialisation de l’ouverture sur le
marché marocain ne peut être qu’une
bonne nouvelle dans la morosité
ambiante z
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
41
économie |
Economie verte
Une stratégie
bien pensée
Le succès de la révolution que
le Maroc a opérée en matière
de développement des énergies
renouvelables ne cesse de s’affirmer
faisant du Royaume un modèle
que les institutions internationales
œuvrent pour élargir dans d’autres
régions d’Afrique, continent appelé
à relever d’importants défis de
développement.
Par Fatima-Zohra Jdily
5 Complexe solaire Noor Ouarzazate
Le Maroc s’est doté de réels
atouts, notamment de par sa
position stratégique au cœur
d’un carrefour énergétique.
Cette position justifie largement
la transition énergétique en
un temps record. Il faut dire que les
ambitions énergétiques du Maroc sont
de taille. Ces objectifs prometteurs
ont commencé à se concrétiser à la
faveur de la mise en place de plusieurs
programmes et plans d’actions. Cette
stratégie, qui s’inscrit dans le cadre de
la nouvelle dynamique du développement
que connait le Royaume sous
l’impulsion du Roi Mohammed VI,
vise à porter à 42 % en 2020 et à 52 %
en 2030 la part des énergies renouvelables
dans le mix énergétique natio-
42 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
Le Maroc est
aujourd’hui
l’un des pays les
mieux classés
en Afrique et au
Moyen-Orient
en matière
d’attractivité
pour les
énergies
renouvelables.
nal, et à réduire de 12 % la consommation
de l’énergie en 2020 et 15 %
en 2030 à travers une politique d’efficacité
énergétique. Ce n’est pas tout,
pour sécuriser l’approvisionnement,
diminuer les émissions de gaz à effet
de serre et se défaire de la forte dépendance
énergétique à l’importation, le
Royaume veut atteindre 24 800 MW
de capacité de production électrique
en 2030.
Le Royaume veille à ce que cette stratégie
soit basée sur une utilisation
efficace et rationnelle de l’énergie, une
préservation de l’environnement et la
lutte contre les changements climatiques.
Et pour la réalisation et la coordination
des programmes d’efficacité
énergétique, Une agence a été créée il
s’agit de L‘AMEE. Elle a pour principale
mission la réalisation et la coordination
des programmes d’efficacité
énergétique. Cette agence nationale
propose également un plan national
et des plans sectoriels et régionaux
de développement de l’efficacité énergétique.
L’AMEE joue aussi un rôle
important dans la sensibilisation et la
promotion de l’efficacité énergétique.
Coopération et communication.
A moins de quelques années de
l’échéance intermédiaire de 2030, les
réalisations sont encourageantes.
Résulats ! Le Maroc est aujourd’hui
l’un des pays les mieux classés en
Afrique et au Moyen-Orient en
matière d’attractivité pour les énergies
renouvelables z
5 Said Mouline,
Directeur Général de L‘AMEE
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 43
économie |
Qu’attendre de la coopération
maroco-israélienne ?
En décidant le 10
décembre dernier de
reprendre ses relations
avec Israël, le Maroc a
ouvert la voie à une étroite
coopération économique
avec l’Etat hébreu. Des
experts s’accordent à
affirmer que le climat est
désormais propice aux
échanges et le business.
Par Mounia Kabiri Kettani
Aussitôt après l’annonce
de la reprise des relations
maroco-israéliennes, un
enthousiasme tacite se fait
déjà sentir de la part des
communautés d’affaires des deux pays.
Des secteurs à grande valeur ajoutée
pourraient connaître une forte collaboration
entre Marocains et Israéliens.
Le quotidien israélien Jerusalem Post
souligne que le gouvernement israélien
cite l’énergie comme première source
potentielle de coopération bilatérale avec
le Royaume. «Le Maroc cherche à développer
son utilisation des énergies renouvelables.
Et Israël exporte du gaz naturel et
possède une expertise en énergie solaire »,
note le média.
Le Jerusalem Post met aussi l’accent sur
un éventuel partenariat dans le secteur
agricole qui serait axé sur les innovations
agro-technologiques israéliennes.
Pour le président de la Fédération des
industries des matériaux de construction
et membre du conseil d’administration
de la CGEM David Toledano,
« une coopération bilatérale est possible
dans des secteurs comme la gestion de l’eau,
la climatologie, l’agroalimentaire, le halal,
l’agriculture en milieu aride … ». Un autre
économiste ajoute que le dessalement
de l’eau, peut aussi être un créneau por-
teur. «Le Maroc veut recourir massivement
à cette méthode pour répondre aux besoins
grandissants en eau. Et Israël est un pays
leader dans ce domaine avec des entreprises
de renommée mondiale comme IDE Technologies,
qui a construit 400 usines de dessalement
dans 40 pays », explique-t-il.
Un autre secteur à fort potentiel : la
santé. «Le Maroc est en phase du développement
de son secteur de santé notamment
à travers la généralisation de la couverture
médicale annoncée par le Roi Mohammed
VI. Il aura besoin aussi du renforcement
de ses infrastructures hospitalières. Une
coopération avec Israël pourra être fructueuse
dans ce sens », affirme David Toledano.
Dans un article sur les business
clés à forts potentiels entre le Maroc
et Israël, IsraelValley cite également le
secteur aéronautique et spatial et les
Biotechnologies et sciences du vivant. Il
ajoute aussi que l’industrie électronique
pourrait être à l’avenir un domaine clé
44 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
de coopération hightech entre les deux
pays. Dans une récente sortie médiatique,
le ministre de l’industrie, Moulay
Hafid Elalamy a noté de son côté que
le Royaume peut avoir accès à tous les
brevets d’innovation dont Israël est l’initiateur,
dans des domaines à très forte
valeur ajoutée: télécoms, technologies
aérospatiales ou à usage civil, objets
connectés, cybersécurité, innovations
médicales…
Au-delà de la coopération
bilatérale
Incarnant les valeurs du vivre-ensemble,
eOutre la coopération bilatérale entre
les deux pays, David Toledano évoque
la possibilité d’une éventuelle coopération
multilatérale. «Le Maroc a signé des
accords de libre échange, avec les Etats Unis,
l’Europe et bien d’autres pays…Malheureusement,
la balance commerciale n’est pas en
sa faveur. La mise en place d’une plateforme
avec Israël afin d’atteindre ces marchés
pourrait redresser la barre», préconise
Toledano. Concernant la coopération
Sud-Sud, il ajoute que «le modèle maroco-israélien
pourrait servir d’exemple à
suivre. « Le Maroc est l’un des rares pays
qui a choisit une ouverture sur l’Afrique. Et
le contient occupe une place primordiale aux
yeux d’Israël. Une opportunité à saisir et
donc les deux pays peuvent conjuguer leurs
efforts et se compléter économiquement pour
réussir leur challenge africain ».
Conjoncture favorable
Sur l’initiative du Président de la
Chambre de Commerce-Israël France
à Tel-Aviv, Daniel Rouach, né à Meknès
des leaders marocains et des personnalités
du monde des affaires (banque, hightech,
agro-industrie, consulting, …) vont
se réunir fin décembre 2020 pour constituer
les actes fondateurs d’une Chambre
de Commerce Israël-Maroc. Et plusieurs
accords bilatéraux sont attendus à l’issue
de la visite de Jared Kushner, conseiller
principal et gendre du président américain
sortant Donald Trump accompagné
des délégations israélienne et américaine
à partir 22 décembre, à bord du premier
vol commercial Tel-Aviv-Rabat. «Le
Maroc a fait beaucoup de progrès dans le
5 David Toledano président de la Fédération des industries des matériaux
de construction et membre du conseil d’administration de la CGEM.
doing business et occupe aujourd’hui une
place honorable dans le classement. Et
nous sommes dans une conjoncture très
favorable à l’investissement surtout avec
la politique de substitution adoptée par le
Royaume. Donc, c’est le moment de bascule,
pour bénéficier pleinement des accords avec
le soutien des américains, des israéliens,
des européens… améliorer notre balance
des échanges et devenir un exportateur de
matières premières et pourquoi pas de produits
finis made in Maroc », conclut David
Toledano.
Des échanges discrets
Jusqu’au 10 décembre dernier, le Maroc
et Israël n’entretenaient officiellement
aucune relation diplomatique et a fortiori,
économique. Pourtant, les médias
israéliens parlent de relations commerciales
discrètes qui existaient déjà entre
les deux pays depuis de longues décennies.
Selon le Bureau central des statistiques
israélien, sur les 22 partenaires
commerciaux africains d’Israël, le Maroc
figure parmi les quatre premiers pays en
termes d’importations, et au neuvième
rang des exportations.
Le site IsraelValley, classe le Maroc
parmi les cinq plus importants clients
africains d’Israël. Le Royaume arrive
ainsi juste après l’Egypte, suivi de la
Mauritanie, l’Ethiopie, l’Ouganda et le
Ghana. En chiffres, les échanges entre le
Maroc et Israël ont atteint plus de 71 millions
de dollars en 2019, indique Israël
export Institute. La même source relève
que les exportations marocaines vers
En plus de
l’énergie, selon
David Toledano,
la coopération
maroco-israélienne
pourrait concerner
des secteurs comme
la gestion de l’eau,
la climatologie,
l’agroalimentaire, le
halal, l’agriculture
en milieu aride, etc.
l’Etat hébreu sont estimées à quelques 67
millions de dollars au cours de la même
année, en progression continue depuis
2015 où ils ne dépassaient guère les 28
millions de dollars. Les importations de
produits d’Israël au Maroc sont évaluées
cependant, à près de 4 millions de dollars,
en baisse considérable par rapport
à 2015 où le volume avoisinait les 23 millions
de dollars. Les vêtements, les véhicules,
les olives, le poisson en conserve et
le sucre sont en tête des exportations des
entreprises marocaines vers Israël. Les
équipements mécaniques et électriques
ainsi que le plastique et le matériel d’optique
occupent les parts de lion sur le
total des importations. «Ces échanges sont
susceptibles de croitre», commente David
Toledano. Selon lui, «le Maroc et Israël
disposent d’un énorme potentiel pour stimuler
leur coopération dans divers secteurs » z
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 45
société
Juifs marocains, un pont
entre Israël et le Maroc
5 L’annonce de la reprise des relations entre le Maroc et Israël a suscité
joie chez les Marocains de confession juive résidants au Maroc.
C’est dans la joie et l’émotion que la communauté juive du Maroc a accueilli
l’annonce de la reprise des relations entre le Maroc et Israël. Témoignages.
Par Mounia Kabiri Kettani
La communauté juive de
Casablanca a organisé lundi
dernier une cérémonie virtuelle
pour célébrer avec des
Marocains dispersés dans
le monde entier, la fête tradition-
nelle de « Hanouka » et le « miracle
» de non seulement la reprise des
relations israélo-marocaines mais
aussi la reconnaissance américaine
de la souveraineté marocaine sur
le Sahara. Quelques dizaines de
fidèles, parmi lesquels l’humoriste
franco-marocain Gad El Maleh, ont
participé à distance à cette fête, avec
des invités de marque comme l’ambassadeur
des Etats-Unis au Maroc,
David Fischer.
46 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
La communauté
juive marocaine
à son rôle à
jouer dans cette
reprise des
relations entre
le Maroc et
Israël
5 Musée du Judaïsme Marocain à Casablanca.
Fraternité officialisée
«En tant que juifs marocains, la question
de la marocanité du Sahara est très importante
pour nous. Notre intérêt avant tout
est l’intérêt du Maroc. Et nous sommes très
contents de cette reconnaissance américaine.
Ensuite, pour nous, la reprise des relations
entre le Maroc et Israël officialise la fraternité
et les liens qui existaient depuis toujours
entre les musulmans et juifs au Maroc ».
estime le Rabbin Levi Banon, directeur
de la Jeunesse Habad du Maroc. Il ajoute
aussi «Le Maroc a toujours été un pays de
paix. Et on pense que c’est un message fort
que sa Majesté le Roi Mohammed VI envoie
au monde entier aujourd’hui à travers cette
décision ».
Pour Fanny Mergui, c’est une décision
plus que révolutionnaire. Cette juive
marocaine qui se présente comme une
« militante pour la paix israélo-palestinienne
», parle de retrouvailles communautaires
de personnes qui étaient
dispersés aux quatre coins du monde
ou qui ont été acheminés vers un pays
où il n’y avait pas de relation. « Ces gens
ont souffert de cette séparation. Et cette décision
de sa Majesté le Roi Mohammed VI, est
pour moi, une forme de réhabilitation et je
la considère comme un cadeau immense
qu’il nous fait aujourd’hui ». En gros, elle
ajoute que «c’est une opportunité de consolider
une relation qui existe depuis de nombreuses
années, et une riche histoire et un
partenariat qui sera désormais officiel ».
Respect et tolérance
De son côté Georges Sebbat chargé de
mission chez le conseil des communautés
Israélites du Maroc note que cette
remise en marche des relations entre les
deux pays, est un exemple à suivre. Il
vante ainsi la vie juive au Maroc comme
un modèle de coexistence judéo-musulmane
et un témoignage du Maroc
embrassant un patrimoine diversifié.
« Le Maroc est un porte drapeau en matière
de paix, de tolérance et de vie commune.
Je le certifie pour l’avoir vécu », souligne
t-il avant d’ajouter « nous avons près d’un
million de juifs marocains à Israël de différentes
couches sociales avec une deuxième et
troisième générations qui aspirent à s’identifier
, à se retrouver, à faire leurs papiers et
crier haut et fort qu’ils sont marocains. Voir
des jeunes à Israël attachés à leur culture
marocaine, donne des frissons. Quand on
fait le tour des maisons, on trouve automatiquement
les photos de feu sa Majesté Hassan
II et celles de sa Majesté le Roi Mohammed
VI accrochées aux murs. A l’extérieur, Il y
a aussi un boulevard sous le nom de Hassan
II et un rond point qui porte le nom de
Mohammed VI… ».
Les vols de retrouvailles
«En ouvrant les portes vers le Maroc via
des vols directs, cela génère un sentiment
de liberté. Plus besoin de passer par des
escales, on gagne du temps. Et aussi de
l’argent », jubile Fanny Mergui qui reconnait
avoir déjà vécu cette expérience en
1995, lorsque près de 80 juifs et musul-
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 47
société
mans ont fait un voyage direct à Israël
à bord d’un avion de la RAM. «On va
pouvoir se rencontrer, on pourra voyager
ensemble, prendre des initiatives dans le
champ culturel, économique… », ajoute
t-elle. Même la jeunesse ne cache pas sa
satisfaction quant à la reprise des relations
maroco-israéliennes. Pour Debora
Mergui, une jeune juive marocaine de 37
ans, enseignante à Marrakech, c’est une
nouvelle façon de vivre pleinement son
judaïsme loin des tabous. Elle pourra
3LL’histoire des
juifs marocains
est considérée
comme une partie
indissociable de
l’histoire marocaine.
aujourd’hui crier haut et fort qu’elle est
juive dans une ville où la communauté
est très réduite et ne dépasse pas la
centaine. Elle va aussi renouer les liens
familiaux avec certains membres de
la famille qu’elle n’a pas vu depuis son
enfance grâce aux vols directs entre les
deux pays. « C’est un pas de plus dans la
reconnaissance marocaine de notre identité
en tant que marocains juifs », insiste celle
qui a participé auprès des membres de
la Communauté juive marocaine de
la région Marrakech-Safi à la marche
organisée récemment dans la ville ocre
pour célébrer la décision des Etats-Unis
de reconnaître la pleine souveraineté du
Royaume sur son Sahara.
Communauté juive,
rôle renforcé
De nombreux observateurs estiment que
communauté juive marocaine à son rôle
à jouer dans cette reprise des relations
entre le Maroc et Israël. Si le président
de la Fédération des industries des matériaux
de construction David Toledano
parle du rôle de facilitateur dans les
affaires, Georges Sebbat estime qu’elle
pourra être un pont de paix et de liaison
entre les communautés. «La communauté
s’occupait de tout ce qui relève de
la logistique pour les locaux notamment
lors des naissances, des décès…ce rôle va
s’amplifier aujourd’hui avec toutes ces
visites attendues», explique Sebbat. De
l’avis de Fanny Mergui, l’espace public
va s’organiser différemment. «Mon rêve
est de pouvoir faire un travail en direction
de la jeunesse marocaine musulmane, organiser
des ateliers qui leur donner la parole
librement, exprimer leurs préjugés, et traiter
tout ces sujets qui leur tiennent à cœur
notamment ceux concernant la question
palestinienne », tient à souligner Fanny
Mergui. Le rabbin Lévi Banon qui avait
l’habitude d’accueillir tous les juifs de
passage au Maroc, assure qu’il a hâte
d’accueillir les hommes d’affaires et
investisseurs israéliens qui viendront
pour investir et contribuer au développement
du Maroc z
Marocains avant tout
Bien qu’il n’y ait encore qu’environ 3.500 Juifs vivant encore au Maroc, dont 3000 à Casablanca seulement, les Juifs d’origine marocaine
qui ont immigré dans d’autres pays tels que la France, le Canada, les États-Unis et l’Espagne sont toujours culturellement, spirituellement et
socialement proches de Maroc. En Israël, un million de juifs d’origine marocaine, ont souvent gardé des liens très forts avec le royaume,
son dialecte darija, ses traditions culinaires et musicales. La plupart sont partis en famille au début des années 50, après la création de l’Etat
hébreu. A l’époque, le Maroc accueillait la plus importante communauté juive d’Afrique du Nord, de 250.000 à 300.000 personnes, selon
les estimations.
48 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 49
société
5 L’attachement des juifs marocain à leurs traditions est un point d’ancrage identitaire.
Juifs marocains d’Israël
Le vrai sens d’appartenance
C’est une histoire passionnelle et passionnante que celle des juifs d’origine marocaine
d’Israël. Une affaire de cœur qui, au fil des générations, continue de lier des milliers
de juifs à leur Maroc d’origine. En témoigne cet attachement sans faille à leur identité
et à leurs racines marocaines.
Par Hayat Kamal Idrissi
50 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
Ils étaient nombreux à sortir dans
les rues de Jérusalem pour manifester
leur joie à l’annonce du
rétablissement des relations entre
le Maroc et Israël. Des Israéliens
d’origine marocaine, heureux de pouvoir
enfin retourner au pays natal de
leurs parents sans devoir faire d’escale,
n’ont pas hésité à exprimer leur attachement
infaillible à leurs origines. Représentant
quelque 800.000 personnes,
soit près d’un dixième de la population
israélienne, les juifs marocains ont
gardé des liens étroits avec le royaume.
Une relation exceptionnelle qui ne date
pas d’hier et qui remonte à près de deux
mille cinq cents ans, au tout début de la
présence juive au Maroc suite aux premiers
exodes.
De nombreux
Israéliens sont
sortis dans
les rues de
Jérusalem pour
manifester leur
joie à l’annonce du
rétablissement des
relations entre le
Maroc et Israël.
vitables... Le peuple ne fuit pas le Maroc,
mais sa propre misère », décrivait en 1959,
l’intellectuel Carlos de Nesry, au sujet
des motivations économiques de l’émigration
juive marocaine.
Arrivés en terre nouvelle, les juifs
marocains se devaient de s’intégrer…
mais sans toutefois « trahir » leurs origines,
leur culture, leur identité. Un
état d’esprit qui est analysé par Donath
Bensimon, sociologue des religions et
spécialiste du devenir des communautés
juives marocaines ayant émigrées
en Israël. Ce dernier explique en effet
Loin des yeux,
proche du cœur
Si l’émigration d’une grande majorité
des juifs marocains vers Israël
(220.000 personnes) entre 1948 et 1964,
les a éloignés géographiquement de
leur pays natal, elle n’a pas pu pour
autant rompre les liens solides entre
cette communauté et le Maroc. « C’est la
situation économique qui a été et demeuré
à l’origine des départs… En fait, l’exode des
Juifs marocains a commencé, insensiblement,
subrepticement. Exode qui n’est au
fond, désiré par personne, mais les impératifs
économiques rendent souvent inécomment
les juifs marocains avaient
maintenu leur affiliation à leur pays
d’origine : « Lorsque le jeune lycéen commence
à se demander : Qu’est-ce qu’un
Juif ?, ses maîtres laïcs répondaient : « Au
Maroc il n’y a ni Juifs, ni Musulmans, il
n’y a que les Marocains ». Lorsqu’il se
posa en Marocain devant les Musulmans,
on lui affirma que tous les sujets
du Sultan étaient égaux, mais on lui fit
sentir que certains droits n’étaient pas
pour le « dhimmi ». Quant aux autorités
du Protectorat, elles le considéraient
comme « israélite marocain ». Quand,
enfin il se décida à émigrer en Israël,
on le considérait, pour la première fois,
comme « Marocain », tente le sociologue.
Témoignages émouvants
La confirmation de cette analyse, on la
retrouve dans une déclaration émouvante
d’une juive marocaine ayant
quitté Tinghir dans les années cinquante
pour s’installer en Israël. Elle
a été interviewée par le réalisateur
marocain Kamal Hachkar dans son
documentaire « Tinghir-Jérusalem : Les
Échos du mellah ». L’interrogeant sur sa
nationalité, Aicha répond naturellement
et avec un large sourire aux lèvres,
« Je suis marocaine ». Même nostalgie et
même amour pour le Maroc et pour les
Marocains dans les propos émus de
Shalom également cité par le réalisateur
marocain. Au bout de toutes ces années,
il garde intacts ses souvenirs et les partage
avec nostalgie avec Hachkar, dans
un berbère et un arabe parfaits. Les
noms de ses anciens voisins, ses relations
amicales empreintes de bienveillance
et de tolérance avec eux… tout est
gravé dans sa mémoire d’immigré. Les
yeux brouillés par l’émotion, il évoque
avec beaucoup de tendresse ce passé
toujours vivant.
Une belle démonstration d’un attachement
indéfectible que la communauté
d’origine marocaine entretient jalousement
et d’une manière particulière. En
parallèle avec les mécanismes d’intégration
dans leur nouvelle société en Terre
promise, « les juifs originaires du Maroc
« avaient découvert enfin leur marocanité
: La fierté d’être originaire d’un pays
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
51
société
Loin d’être une
quelconque
nostalgie,
l’identité
marocaine est
une certaine
conception du
monde »,
Robert Assaraf.
qui sans être un « paradis », était pour le
moins hospitalier et respectueux des spécificités
», explique la chercheuse Hanane
Sekkat dans son rapport « L’émigration
collective des Juifs marocains vers Israël »,
datant de 2016.
Identité marocaine
En s’adaptant, les juifs marocains
convertissent leur mal du pays en un
sentiment positif. Ce dernier leur a servi
de point d’ancrage d’appartenance identitaire.
Dans son livre « Juifs du Maroc
à travers le monde : émigration et identité
retrouvée », Robert Assaraf met le doigt
sur la particularité de ces liens: « Le
Maroc et ses communautés juives constituent
un véritable cas d’école. Aucune autre
communauté juive n’a, en effet, conservé un
rapport aussi fort et aussi fructueux avec
sa terre d’origine », explique l’écrivain.
D’après ce dernier ce rapport est d’autant
plus intense car ne recelant rien
de conflictuel. « Cette conception apaisée
et sereine du passé, fondée sur le souvenir
de la multiséculaire coexistence mutuelle
entre musulmans et juifs, vaut aussi pour
le présent et pour l’avenir. Loin d’être une
quelconque nostalgie, l’identité marocaine
est une certaine conception du monde »,
résume Assaraf.
Même constat de la part du linguiste
Simon Levy dans une interview datant
de 1994. « Cette communauté garde un
souvenir ému, parfois même magnifié, de
sa vie au Maroc, et symbolise son attachement
sentimental par les portraits des
Souverains marocains qui sont exposés
dans de nombreux foyers », décrivait alors
Levy. « Ces Israéliens savent qu’ils ont
leurs racines ici, au Maroc dont ils n’ont
jamais été chassés. La position constante et
officielle du Maroc à leur adresse est qu’ils
peuvent revenir quand ils le veulent, la
nationalité marocaine ne se perdant pas »,
ajoutait-il en insistant sur cette réciprocité
entre le Maroc et ses ressortissants
juifs. Ces derniers gardant en mémoire
une heureuse cohabitation au Maroc
avec l’Islam et l’Arabité. Mais aussi le
souvenir de l’attitude courageuse et
historique du Roi Mohamed V qui avait
protégé les juifs marocains contre les
décrets racistes de Vichy.
Aujourd’hui, les juifs marocains d’Israël
ne ratent pas les occasions pour
honorer cette composante principale
de leur identité. Fêtes religieuses,
occasions familiales, célébrations ou
vie quotidienne… Toutes les occasions
sont bonnes pour préparer des mets
délicieux de la cuisine judéo-marocaine,
de chanter des mélodies marocaines, de
raviver les traditions et les us profondément
liés à leur terre d’origine. Un hommage
ému et émouvant pour le pays de
leurs ancêtres et pour leur passé sur
une terre de tolérance et d’heureuse
coexistence z
52 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 53
société
5Temple Beth-El à Casablanca
Maroc, Terre aux
mille saints juifs
Visités annuellement par des milliers de fidèles,
les hauts lieux de pèlerinage juifs au Maroc ne
désemplissent pas. La plupart d’origine marocaine,
les pèlerins viennent des quatre coins du monde,
notamment d’Israël pour rendre hommage aux 1200
saints juifs enterrés dans notre pays.
Par Hayat Kamal Idrissi
5Le pèlerinage religieux juifs attire
chaque année des milliers de touristes
54 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
Véritable destination de tourisme
religieux, le Maroc
attire chaque année des
milliers de pèlerins israélites.
Séfarades ou même
Ashkénazes, de plus en plus de juifs
viennent renouer avec la tradition et se
recueillir dans leurs lieux saints. En 2018,
ils étaient environ 80.000 touristes juifs à
visiter le Maroc avec un taux d’évolution
de l’ordre 32% entre 2017 et 2018. Pendant
5temple rabbi haim pinto à Essaouira
le Souccot, période
de vacances où
coïncident trois
fêtes de pèlerinage
juives représentant
le summum de la
haute saison, ou
durant le reste de
l’année, les fidèles
juifs viennent en
masse se recueillir
auprès de leur millier
de saints.
Une demande spécifique
et assez particulière
à laquelle
agences de voyage
et hôtels marocains
essaient de répondre. Offres spéciales,
cuisine et voyages organisés casher… les
pèlerins qu’ils soient des séfarades originaires
du Maroc ou Ashkénazes en quête
de spiritualité trouvent leur bonheur au
Royaume. Ainsi durant les périodes de
Hiloulas, le Maroc accueille jusqu’à 6000
juifs. L’une de leurs destinations les plus
prisées, reste saint Amran Ben Diouane,
le plus important des sanctuaires juifs au
Maroc. Ce dernier se repose depuis 250
ans au dessus des montagnes de Ouazzane…
mais il n’en est pas le seul pour
Ainsi durant
les périodes
de Hiloulas, le
Maroc accueille
jusqu’à 6000 juifs.
autant, le Maroc étant l’un des lieux les
plus « peuplés » au monde par les saints
juifs, des marabouts qui sont dispersés
dans les différents cimetières juifs
du royaume. Tout comme ceux musulmans,
ces saints sont réputés pour avoir
réalisé des miracles de leur vivant : Des
malades guéris, des femmes stériles tombées
enceintes, des fortunes offertes, des
objets retrouvés …
Tradition ancestrale
Rappelons que la vénération des saints
personnages, le pèlerinage à leurs sanctuaires
et le recours à leur protection est
une tradition largement répandue chez
les Juifs du Maroc. Cette pratique reste
l’une de leurs caractéristiques culturelles
la plus importante. « Si le culte des saints
est un phénomène universel, pour les Juifs du
Maroc, il est particulièrement berbère et ceci
depuis l’aube du temps. Il n’a fait qu’adopter,
successivement les couleurs des trois
religions monothéistes. Sa nature parareligieuse
et hérétique est gardée », explique Dr
Hassan Majd dans sa thèse intitulée « Le
culte des saints et les pèlerinages des juifs au
Maroc ». Ce dernier note d’ailleurs que la
vénération populaire des saints constitue
un élément fondamental de l’identité
collective des juifs marocains. Au-delà de
sa portée spirituelle, le pèlerinage annuel
à l’occasion de Hiloulas, reste une occasion
pour effectuer un retour aux sources
pour un bon nombre des membres de la
communauté originaire du Maroc z
3Jared Kushner
en pèlerinage au
temple de rabbi
haim pinto
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 55
Culture
5Maitre David Edry lors de la 17e édition virtuelle du festival des Andaousies Atlantiques.
L’Art du « vivre-ensemble »
Réputé dans le monde pour sa diversité artistique et musicale, le Maroc s’est
distingué depuis des siècles en tant que carrefour et haut lieu de brassage des
cultures et des civilisations.
Par Kawtar Firdaous
56 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
S
i dans les années 1950, près de
300.000 citoyens de confession
juive vivaient au Maroc, ils ne
sont désormais aujourd’hui
plus que 3000 âmes, constituant
toutefois la principale communauté
juive d’Afrique du Nord.
Craignant de voir le Judaïsme Marocain
disparaître au fil du temps, les Juifs
Marocains, constitués en associations,
n’ont cessé ces 20 dernières années
d’inciter le Maroc à rechercher sa part
Juive, à la revendiquer et à la légitimer.
Certains ont misé sur la musique et
son pouvoir fédérateur pour mettre en
avant le patrimoine judéo-marocain, une
des composantes essentielles de l’identité
culturelle du Royaume aux divers
affluents. C’est le cas du festival des
Andalousies Atlantiques d’Essaouira
créé en 2003 par l’Association Essaouira
Mogador et qui a fêté cette année sa 17e
édition en mode virtuel, malgré les
conditions difficiles liées au Covid-19.
Devenu la messe de la musique
judéo-marocaine par excellence, ce rendez-vous
musical, en partenariat avec
la Fundacion Tres Culturas, célèbre
chaque année la diversité de la culture
marocaine et invite les aficionados de
musiques judéo-arabe-andalouses du
monde entier à se retrouver à Essaouira,
afin de partager de purs moments
musicaux et humains lors d’un festival
incarnant le métissage et la richesse du
patrimoine culturel marocain, ravivant
la paix et la fraternité entre des héritages
religieux et artistiques uniques au
monde. « C’est au Maroc, au Maghreb et
en terre d’Islam que chaque année des
milliers de Musulmans et de Juifs se
donnent rendez-vous pendant plusieurs
jours pour chanter ensemble, jouer
de la musique ensemble et fêter dans
la joie leurs histoires partagées, leurs
mémoires mêlées et leur patrimoine
musical interprété à 4 mains et comme
souvent à Essaouira alternativement
en arabe et en hébreu. », affirme André
Azoulay, président fondateur de l’Association
Essaouira Mogador.
5 Ouverture de la 16e édition Festival des Andalousies Atlantiques
d’Essaouira
5 Abderrahim Souiri en compagnie du grand Rabbin Haim Louk
5 Sanaa Marahati et Benjamin Bouzaglo
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 57
Culture
Le festival
transporte le
public dans un
voyage à travers
le temps pour
se remémorer
avec un brin
de nostalgie
différents
genres musicaux.
5Hajja Hamdaouia et Raymonde El Bidaouia
5Haim Louk
L’exception culturelle
Incarnant les valeurs du vivre-ensemble,
et véhiculant des messages de paix, de
tolérance et d’ouverture, le festival transporte
le public dans un voyage à travers
le temps pour se remémorer avec un brin
de nostalgie différents genres musicaux,
-Chegouri et Matrouz- dont la chanson
populaire, le chaâbi, la musique andalouse,
le gharnati, le malhoun mais également
le Tarab à travers l’interprétation
les pièces les plus emblématiques et
rayonnantes de notre patrimoine musical
commun.
Le festival où juifs, musulmans et chrétiens
partagent la scène à Mogador et
s’accordent à faire vivre chaque année
l’esprit de la convivencia a vu ainsi
défiler au fil des éditions des concerts
mémorables et des duos improbables
entre les grands noms du tarab andaloussi
à l’image du rabbin Haim Louk
et Abderrahim Souiri et des maîtres
Hamza Jorti et David Edri, mais aussi
entre les stars du chaâbi marocain telles
que Hajja Hamdaouia et Raymonde El
Bidaouia, en passant par la jeune génération
comme Sanaâ Marahati ou Benjamin
Bouzaglo. Un bel exemple de l’art du
vivre ensemble et du partage qui donne à
la musique et à la culture ses plus belles
couleurs, celles du sens et de la résistance
au repli à l’oubli ou à la fracture.
58 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 59
Culture
Musées juifs marocains
Lieux de mémoire
par excellence
5Roi Mohammed VI en visite à Bayt Dakira Essaouira le 15 janvier 2020.
60N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
Restaurer la mémoire juive marocaine, tel est l’objectif des musées qui ont vu le jour
au Maroc à partir des années 1990, période à laquelle le royaume, sous l’impulsion
du roi Mohammed VI, a entamé un processus de reconnaissance des ses différentes
identités, d’origine juive et berbère, qui ont contribué à la formation de l’identité
marocaine à travers le temps. K. F
M
arginalisé au lendemain
de l’indépendance du
Maroc, lorsque le panarabisme
balayait tous les
particularismes identitaires,
le patrimoine judéo-marocain a
été valorisé et mis en lumière ces 20 dernières
années dans de nouveaux espaces
culturels dédiés à la préservation de la
mémoire juive marocaine.
Musée du Judaïse
Marocain
Fondé en 1997 à Casablanca, le Musée du
Judaïse Marocain est le seul du genre dans
le monde arabe. Exceptionnel, historique
et culturel, cet espace de mémoire a
pour « objectif principal la préservation
du patrimoine marocain dans sa totalité
», affirme Zhor Rhihil, conservatrice du
musée. Étendu sur une surface de 600
m2, le Musée présente divers objets tels
que des lampes à huile, des costumes,
des photos, des bijoux, des tableaux...
tous issus de l’artisanat et de l’art judéomarocain.
Le musée ethnographique se
compose également d’une bibliothèque,
d’une photothèque, d’une vidéothèque
et de plusieurs salles polyvalentes où sont
organisées des expositions. Deux pièces
sont consacrées à la présentation des
synagogues.
7
5Musée du judaisme marocain
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546
61
Culture
5Le 16 décembre 2016, le roi Mohammed VI inaugure la synagogue
Ettedgui de Casablanca et le musée juif de Casablanca.
8
Musée juif de
Casablanca
Le 16 décembre 2016, le roi Mohammed
VI inaugure la synagogue Ettedgui
de Casablanca et le musée juif de
Casablanca. Restaurés dans le cadre de
la deuxième phase d’un programme
gouvernementale visant à réhabiliter la
vieille ville de Casablanca, la synagogue
et le musée adjacent d’El Mellah de la
ville blanche qui raconte l’histoire juive
au Maroc visent à « préserver l’identité
marocaine authentique », selon Serge
Berdugo, secrétaire général du Conseil
des communautés juives marocaines et
ancien ministre du Tourisme qui a aussi
déclaré que la restauration de ces lieux
de mémoire montrait « l’engagement
du roi à la conservation des espaces de
dialogue culturel et de coexistence ».
Bayt Dakira,
espace de la mémoire
judéo-marocaine
à Essaouira
Nouvellement restauré, cet espace historique,
culturel et spirituel, abrite la Synagogue «Slat
Attia», la maison de la mémoire et de l’histoire
« Bayt Dakira » et le Centre international de
recherches Haim et Célia Zafrani sur l’histoire des
Relations entre le Judaïsme et l’Islam.
Ayant pour centre de gravité la Synagogue
«Slat Attia», Bayt Dakira est un lieu de mémoire
et d’histoire qui raconte par les objets, les
textes, la photo et le film l’exceptionnelle
saga du Judaïsme dans la ville d’Essaouira et
de ses patrimoines : du cérémonial du thé à
l’art poétique hébraïque, de l’orfèvrerie du
filigrane de l’or et de l’argent à la broderie et à
la confection de somptueux caftans, des arts
culturels à la littérature et des rituels souiris à la
synagogue aux grands comptoirs du négoce
qui ont fait le rayonnement de Mogador aux 18è
et 19è siècles.
8
5Bayt Dakira
62 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
Patrimoine
Réhabilitation des
synagogues et cimetières
juifs au Maroc
5Visite du Roi du Maroc Mohammed VI à la synagogue Ettedgui de Casablanca le 16 décembre 2016
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 63
Culture
Ces dernières années, sous l’impulsion royale, plusieurs programmes de
réhabilitation de Lieux Juifs ont été lancés. Cimetières, Mellahs, Synagogues,
Musées,… autant d’initiatives qui s’inscrivent dans la démarche du roi
Mohammed VI, concernant la sauvegarde de toutes les facettes du Patrimoine
Culturel National dont l’héritage Juif est partie intégrante. K. F
Alors que dans le monde
entier, les profanations
ou la destruction de
sépultures Juives se multiplient,
« l’opération de
réhabilitation du patrimoine funéraire
Juif initiée par le roi Mohammed VI
depuis 2010 mérite d’être saluée et érigée
comme exemple », estime Serge
Berdugo, secrétaire général du Conseil
de la Communauté Israélite du Maroc et
président-fondateur de la fondation du
Patrimoine judéo-marocain.
Le Maroc, un modèle
de tolérance dans le monde
Depuis une vingtaine d’années, la
Fondation du Patrimoine Culturel
Judéo-Marocain reconnue d’Utilité
Publique en 2001 s’est concentrée sur la
réhabilitation de Synagogues Berbères
ou Séfarades de plusieurs régions du
Maroc.
Ainsi, entre 2010 et 2015, le projet « Les
Maisons de la Vie » a abouti à la réhabilitation
de 167 cimetières situés dans
toutes les régions du Maroc, à l’édification
de 40 km de murs et à la restauration
de plus de 12.000 sépultures.
Une seconde phase entamée en 2018, a
permis la réhabilitation des Cimetières
d’El Jadida, Essaouira, Oujda, Souk El
Arba, Safi et des Synagogues Nahon et
Akiba (Tanger), Oufrane (anti-Atlas),
Errachidia (Tafilalet). D’autres chantiers
sont ouverts à El Jadida (Synagogue
Bensimon), Azzemour (Sanctuaire
Abraham Moul Ness) et le cimetière
historique de Meknès avec ses tombes
insérées dans les remparts de Moulay
Ismail sera inscrit sur la liste des monuments
nationaux dès l’achèvement des
travaux en cours.
5Le cimetière juif de Fès, qui compte de nombreux rabbins éminents,
plus que tout autre cimetière juif du Maroc.
5Cimetiere juif Essaouira.
64 N° 546 L’Observateur du 25 au 31 décembre 2020
3Synagogue
Slat Fassiyine
à Fès
Unique en son genre, cette entreprise
royale a fait l’admiration de tous lors des
présentations organisées, notamment à
Paris (IMA), Washington (US Senat) et
New York (MOMA).
En plus des 167 cimetières réhabilités,
plus de 15 synagogues, et plus de 630
lieux saints ont été rénovés, restaurés
et réparés à ce jour. Ce processus a
permis de transformer ces sites en véritables
archives à ciel ouvert, ainsi qu’une
fenêtre sur la culture et la civilisation
marocaines à travers sa composante
hébraïque.
Parmi les points d’orgue de cette dynamique
figure la restauration de la Synagogue
Slat Al Fassiyine dans le quartier
Mellah de la vieille ville de Fès. Sanctuaire
du judaïsme fassi, la synagogue
a été restaurée et transformée en lieu de
mémoire juive en 2013. La synagogue
Simon Attias du 19ème siècle d’Essaouira
a été elle restaurée en 2015.
Tout comme deux autres synagogues
rénovées à Tanger, Assayag et Nahon.
En 2016, ce sera au tour de la Synagogue
Ettedgui de Casablanca d’être
rénovée, avant l’inauguration en 2020
de « Dar Dakira » (La Maison de la
mémoire) à Essaouira et la construction
du Musée de la Culture Juive
Marocaine à Fès qui devra bientôt
ouvrir ses portes au public z
5 Mellah de Fès
du 25 au 31 décembre 2020 L’Observateur N° 546 65
Culture
5 Sur ordre du Roi Mohammed VI, le vieux quartier de Marrakech Essalam (« paix » en arabe) a été rebaptisé
en 2017 par son appellation Juive d’origine El Melah (quartier où vivaient les juifs « endroit où on tirait du sel »
Enseignement de la culture juive
dans les écoles marocaines
En vue de la promotion des valeurs de tolérance, de diversité et de coexistence au sein des établissements scolaires et universitaires,
le Maroc a décidé, sous l’impulsion du roi Mohammed VI, d’enseigner dès 2021 la culture et l’histoire juives dans les écoles publiques
marocaines. Bien accueillie par la communauté israélienne, cette mise en avant de la « diversité identitaire » marocaine jouera un rôle
fondamental dans la lutte contre l’antisémitisme. Pour André Azoulay, conseiller du roi Mohammed VI, cette action permettra de montrer
« à nos enfants la profondeur et la place du Judaïsme marocain dans l’histoire longue de notre pays ». Une initiative qui selon le violoniste
Elad Levi devrait se faire dans les deux sens : « les instituts israéliens doivent adopter la même idée, et c’est urgent ! Israël se trouve au
Moyen-Orient, tous ses voisins parlent arabe et sont pour la plupart de culture arabe. Si la jeunesse israélienne apprend la langue, la
culture, la musique, cela changera tout pour les générations futures ».
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