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1996 - LE TEMPS DE NOUS-MEMES - MICKAEL ELMA

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Mickael Elma

Le temps de nous-memes

Lo tan nou minm



Mickael Elma

Le temps de nous-mêmes

Lo tan nou minm


Ne Ie 5 novembre 1957 â Sainte-Rosc,

La Réunion,

Vit et travaille à Marseille.

1983 - Diplôme National Supérieur d'Expression Plastique à Marseille

Mickael Elma

Expositions

personnelles

1996 - Ecole des Beaux-Arts, Marseille - Gravures

1995 - Galerie Le Laboratoire, Marseille - Sculpture, deşsin

1986 - Theatre Champ-Fleuri, La Reunion - gravure

Expositions

collectives

1996 - Termoli -Italie-Afrique-, Italie - sculpture

1995 - -Fiesta des Sud-, Marseille - Sculpture

1994 - FRAG, La Reunion, -Lieu de Memoire» - sculpture

1992 • Bibliothèque Nationale de Paris, -10 ans d'acquisition- - Gravure

1991 - Cassis - gravure

1989 - Salon Le Trait, Paris - gravure

1988 - Salon de la Nouvelle Peinture, Grand Palais. Paris - gravure

1987 - B

1986 - B

1984 - B

1984 - B


Qui l'universalité ?

Diversalité

Quoi ? multiculturelle,

pluriculturelle

Au lieu de l'universalité,

la diversalité

Au lieu de multi,

pluri-culturelle

Créole

Créole

Car cette chair du monde

Tout' rnoun su la tèr lé pa in

n'est pas cet organe

unicellulaire

Nous sommes de cette

Dan'n fon krater i bouyone

Trap son larder pou fé lavnir

Na minm a li déor, tout' moun'

va konèt

Konm un léripsyon Ki alime

le syèl kan fénoir i tonm

énergie des entrailles

de la terre

Au tréfond de ce sol des

formes inconnues travaillent

à l'avenir

Et nous irons au monde

comme une coulée de lave

Embrasant le ciel

à la tombée de la nuit


(re/dé centrer le regard par période de grands froids

"Each time the question of

cultural difference

emerges as a challenge to

diversity of culture, it

reveals the margins of

modernity [...] America

Ieads to Africa ; the

nations of Europe and Asia

meet in Australia ; the

margins of the nation displace

the centre ; the

peoples of the periphery

return to rewrite the history

and the fiction of

the metropolis. The island

story is told from the eye

of the aeroplane which

becomes the "ornament"

that holds the public and

the private in suspense."

Homi K. Bhabha'

Ce n'est pas par hasard que

Mickael Elma a voulu intituler son

exposition : "Voici venu le temps

de nous-mêmes". C'est par ces

mots qu'il concluait une lettre

dans laquelle il me parlait de son

parcours artistique et humain.

Cette lettre faisait suite â une

longue discussion dans son atelier

marseillais par une froide journée

de février, alors que je découvrais

ses tableaux et ses sculptures, ses

cases Creoles. J'avais déjà pu voir

certaines de ses gravures à

l'arthothèque ainsi que d'autres

oeuvres lors de diverses

expositions, en particulier au

Maido, et j'avaİs eu I'occasion

d'observer de plus près certains de

ses travaux — gravures et dessins

— lors d'une soiree chez Danièle

Sigot et Andre Robert. M'avaient

frappé alors I'extrême minutie de

la réalisation et I'aspect fortement

symbolique, étrangement

mystique, de ce qui etait donné à

voir. De toute évidence, le travail

artistique était la matérialisation

d'une quête. son processus et sa

dynamique. Dans ce ballet de

cercles, de triangles, de spirales,

dans ces danses de traînes et de

jets, se mettait en place, de

manière à la fois inquiétante et

intime, une visualisation de

l'harmonie, ou plutôt de sa

nostalgie et de son désir. Quelque

chose comme cela que nous

connaissons de toute façon, que

nous avons toujours connu de très

près, et que nous ne cessons

d'oublier ou de faire semblant

d'oublier : I'oeuvre d'art comme

procès et objet de cette (re)saisie

de I'encore innommé bien que

toujours apprehendé.

L'atelier nc faisait que renforcer

cette impression. Formes carrées

des maisons créoles, mais aussi,

avant toute chose, la violence

rouge des demi-planches

arrondies : Mickael Elma me

montrait des tables de la loi ; un

peintre réunionnais, ex-étudiant

des Beaux-Arts, vivant depuis plus

de vingt ans à Marseille entre

galères et coups de coeur,

travaillait à la fois sur des cases

créoles et sur des tables de la loi.

Les siennes ou celles de qui donc?

Etrange, inquiétant et familier ! II

y avait là quelque chose de plus

qu'une classique et traditionnelle

nostalgie du pays natal, qu'une

lyrique déclaration d'amour

picturale dc I'exilé, ou que

I'habituelle "mélancolie" créole,

Quelque chose de plus, et quelque

chose de différent. Si nostalgie il y

avait, elle était d'un espace d'avant

tout pays concret, je veux dire

d'avant tout pays réel comme

d'avant tout pays rêvé. Si

mélancolie il y avait, elle était de

cette espèce qui s'affronte aux

fantômes, qui rencontre sans cesse

le souvenir de ce qui est pourtant

oublié, avant la parole ou hors

d'elle, avant I'oeuvre d'art ou hors

d'elle. Cela qui creuse sans cesse,

qui ne cesse de revenir, et on ne

sait pas vraiment pourquoi, et qui

désigne ce vide que rien ne peut

encore combler. cet espace où

trouver son impossible lieu, ce

pays où avoir lieu.

Et, en même temps, l'atelier

montrait, de manière très claire, un

projet en chantier, longuement

mûri, l'aboutissement d'une

réflexion ancienne en même temps

qu'une forte cnergie et un


La chair du Monde

75x30 cm - huile sur bois

incroyable savoir-faire à l'oeuvre.

La très grande habileté du

plasticien était mise au service

d'un parcours dont elle etait ellemême

un moment et un passage

obligé, une condition sine qua

non, une espèce d'arme

miraculeuse. Parcours plastique,

parcours de la connaissance,

parcours biographique. Lors de

notre conversation, après m'avoir

parlé de sa "créolité" et de sa

réalisation dans son oeuvre, de la

nécessité qu'il ressentait de

manifester en France la culture

créole vivante, de lui donner

consistance, Mickael Elma a ajouté

que pour lui, l'artiste était celui

qui cherche sa différence. Dans sa

lettre, développant sa pensée, il

précisait : "L'art est le moyen de

construction de soi. Et pour

chercher cette différence,

impossible d'être indifférent. Tous

les champs de la connaissance sont

des lieux d'investigation, où

s'exerce la quête de soi."

Dès lors la décision de demeurer à

Marseille après les études prenait

une tout autre signification, tout

comme le choix des Beaux-Arts ou

encore le fait de s'être astreint à la

patiente rigueur de la gravure afin

d'acquérir la plus grande maîtrise

technique possible. Pendant toute

sa formation, l'atelier de gravure a

été le seul qu'il ait vraiment

frequenté de façon assidue et

empressée, ce qui explique sa

connaissance parfaite de

différentes manières de graver,

eau-forte, aquatinte, pointe-sèche,

manière noire, etc. Apprendre,

apprendre. apprendre, parcourir

sans cesse la voie infinie de la

connaissance qui peut {ra)mener à

soi. Rejoindre par ce biais le

chemin qu'on connaît depuis

I'enfance, mais qu'on n'a pas

encore vraiment parcouru. Se

donner les instruments propres à

se forger un destin entrevu depuis

longtemps. Car Mickael Elma se

sait artiste depuis I'enfance, et il a

voulu devenir vraiment ce qu'il

croyait être, donner forme â a

propre realite. Dans une telle

demarche d'appréhension de soi,

l'apprentissage de la gravure est

un moment indispensable car, ditil,

"le souci des outils nécessaires

ramène à I'humilité de l'artisan."

C'est bien cette alliance d'humilité

et de certitude qui frappe dans la

biographic du plasticien : certitude

d'etre un artiste, humilité de la

demarche. Mickael Elma ne cesse

d'apprendre, dc parcourir les

musées d'Europe, de lire, de se

confronter à toute l'histoire de

l'art et à l'expérience des peintres

vivants. Il ne cesse de remettre

l'ouvrage sur le métier et de se

remettre en cause à chaque

réalisation. Quand je lui demandai

pourquoi il n'était pas rentré à La

Réunion après ses études, il me

repondit que ce retour avait été

programmé, mais qu'une fois en

France sa vision de l'avenir avait

completèment changé. "J'ai

prolongé mon séjour marseillais",

me dit-il, "sans delai precis. Les

incertitudes de la voie de l'art

m'apportaient la peur. Je méditai

alors sur cet episode de l'Evangile,

de la tentation du Christ dans le

désert. J'appris a vaincre cette

peur, mais je n'ai pas été à I'abri

des grandes difficultés matérielles

de l'éxistence. Je sus que je n'étais

pas moins humain que ceux qui

avaient tout. Je continuais ma

voie. Je continue."

Continuer sa voie, se donner

toujours et encore les moyens de

la continuer, envers et contre tout,

voila peut-être ce qui qualifierait

le mieux la démarche de l'artiste.

Une voie empruntée depuis

longtemps, depuis l'enfance

sainte-rosienne sans doute, et qui

n'était alors qu'une tracée, une

sente familière et vicinale, et dont

la patiente et obstinée

continuation conduit à Marseille


et aux cases Créoles d'aujourd'hui.

On comprend mal ce travail de la

forme et de la mémoire sur les

cases, ou cette approche de

l'autoportrait, ou encore cette

rencontre sur bois de l'écriture et

de la chair si on n'a pas en tête le

parcours. MickaeI Elma est né à

Sainte-Rose en 1957, dans une

famille de huit enfants dont le père

était cantonnier. Mais il a été élevé

â Saint-Denis, avec d'autres frères

et soeurs et des cousins, par une de

ses tantes dont le souci essentiel

était de sortir ses neveux et nièces

des difficultés de l'éxistence par le

chemin du savoir et de la réussite

scolaire. Détournement d'un

gradus ad Parnassum, on apprend

à lire dans les livres scolaires, mais

on apprend aussi — c'est beaucoup

plus inattendu — à dessiner.

L'enfance est celle d'un gamin

difficile, renfermé, mais qui est

attiré très tôt par le deşsin : "je

réalisais mes dessins et aussi ceux

des autres, qui devaient être

réalisés en fonction de tel ou tel

cours, en devoir chez soi. Même

les rébarbatives cartes de

géographie. Pour mon plaisir, je

refaisais les vignettes qu'on

trouvait dans les tablettes de

chocolat. Je recopiais aussi des

bandes dessinées. Zembla, Akim,

Blek. Asterix, Lucky Luke. Â

partir de la 6è je m'inspirais des

marges des livres d'histoire et de

français. Tableaux et sculptures de

maîtres. Je me souviens encore

d'une copie au crayon noir

graphite de César Auguste en sa

tenue de chef militaire, armure

sculptée que notre prof d'histoire

qui était aussi prof de dessin nous

avait proposé de réaliser d'après

une photographie."

Cette passion pour le dessin fait

bien entendu de l'enfant un héros

solitaire, à la fois admiré des ses

condisciples et incompris, vivant

dans un monde à part. Mais à la fin

de la 4è, le jeune Mickael rejoint

La chair du Monde

70x51 cm - huile sur bois

l'internat de l'école militaire du

Tampon et la vie en communauté.

Il se découvre footballeur doué et

partage les travaux et les jours de

ses camarades. Il y rencontre aussi.

dit-il, un vrai professeur dc dessin

et commence à prendre au sérieux

sa relation à l'art : "alors que

j'étais venu à l'école militaire pour

être pilote de chasse, je me

découvris footballeur de qualité et

je rêvai de professionalisme. Mais

le dessin, la peinture, devint ma

réalité incontournable et

incontournée." Il revient alors au

lycée du Butor pour une terminale

qu'il bâcle et s'inscrit en 1977 aux

Beaux-Arts de Marseille.

Entrecoupées par un service

militaire où il fut amené à être le

porte-parole de ses camarades

contre la hiérarchie, ce furent, de

son propre aveu, des années

difficiles : "5 années où j'ai été

comme un noyé au fond de l'eau.

Je m'ensevelis sous ma

détermination à être artiste." Le

désir de faire les Beaux-Arts était

dû à la volonté de suivre un

enseignement artistique de qualité,

mais il y avait plus. L'enfant de

Sainte-Rose qui avait découvert

l'art européen dans les marges des

livres de classe, l'adolescent forme

â l'école militaire préparatoire

était fasciné par une France

mythique mère des arts et des

lettres, centre de la culture ; il

voulait aller y voir de près, voir les

oeuvres en vrai, et pas seulement

sur les photographies. Il allait

rencontrer la France réelle, celle

qui peut faire si mal à un jeune

Réunionnais métis. Mais, en même


La chair du Monde 1-2-3-4

15x30 cm - huile sur bois

temps, c'était bien là. d'une

certaine façon, le projet initial,

connaître la France réelle et pas la

France idéale, travailler avec de

grands artistes et, dans ce

mouvement de la praxis et du

savoir, Ies démystitier. Voir et se

confronter, attendre que vienne,

par le travail, dans la

confrontation, le conflit et la

rencontre, "le temps de nousmêmes."

Est-cela qui explique cette absence

totale de references visibles et de

citations dans I'oeuvre d'un artiste,

dont la venue au dessin a pour

origine les livres de l'école, forme

aux Beaux-Arts, cultivé et curicux

dc tout ce que la culture

européenne a produit ? "Le temps

de nous-mêmes" serait-il le temps

de la rupture, ou d'une absorption

telle que dans le travail de

transformation — j'allais dire de

créolisation — il ne reste plus de

traces des origines, en tout cas de

l'oriğine européenne ? En réalité,

on le voit bien, les enjeux sont

ailleurs. La question de la créolité

qui se matérialise ouvertement

dans les cases créoles et, d'une

autre façon, dans l'autoportrait,

renvoie à une problématique non

pas du refus ou du rejet, mais de

I'habiter, de l'habitable. Â la fois

du réellement habitable, de ce qui

est habitable dans le réel, et de la

façon d'habiter réellement, de

cesser de passer, d'errer. Mickael

Elma dit qu'il s'agit d'amener sa

pierre à la fondation, de conforter

un être-au-monde créole. Le

travail sur les cases créoles est

explicitement, un travail critique

sur I'architecture et sur les

matériaux, contre l'architecture

actuelle et, en particulier. les

tendances kitsch néo-créoles.

Cette recherche qui thématise

concrètement la question de

I'habiter s'intègre à une réflexion

sur le paysage. Le travail sur la

couleur comme celui sur les

matériaux suppose une réflexion

sur le mode de vie {ou de non vie)

contemporain. Chaque façade est

travaillée différemment pour

illustrer la variété et la variation

contre le même et I'homogène, et

l'association des matériaux — tôle

et bois — permet de jouer sur le

raccommodage, le rapiéçage, le

bricolage qui est au centre même

du processus de créolisation. Le

"négligeable", ce qui, dans le

monde de la consommation

spectaculaire, est devenu la marge,

le reste, est ici réhabilité.

Conjugué au souci décoratif des

facades, à la minutie des

réalisations graphiques, cela

contribue à nier I'uniformité et


La chair du Monde

70x51cm - huile sur bois

pose dans le même mouvement la

question des identités collectives

et des identités particulières.

Qu'habitez-vous et comment

habitez-vous ? Habitez-vous

vraiment ? Habitez-vous !

Les façades de ces cases créoles ne

vont pas jusqu'au sol et sont

comme suspendues. Cela Ieur

donne très clairement un aspect de

temple renforce par l'ouverture

ronde au sommet qui désigne une

relation au cosmos, de la même

façon que la porte évidée signifie,

dans le cadre de cette symbolique

précise, le passage, la voie. Le

traitement de la case créole qui

renvoie, on l'a vu, à la question

concrète du mode d'habiter,

renvoie aussi à une problématique

plus large de l'habiter. Habiter le

monde, habiter le cosmos, habiter

le Réel. La voie croise plusieurs

niveaux et les incorpore. La case

créole, objet et lieu où habiter, est

aussi, selon cette perspective, un

organe de la chair du monde. On

comprend mieux alors la

cohérence générale de l'exposition

et le rapport de la case Creole aux

bois rouges. Il s'agit, dans ce cas,

d'un travail sur l'écriture et la

chair, sur le signe et la chose, sur

le symbolique et le Réel. On

rejoint, par un autre cheminement.

ce qui est en jeu dans les cases

créoles comme dans l'autoportrait.

La forme ici montree est à la fois

très matérielle et très signifiante.

Du bois, un rectangle, un triangle,

tout cela rougeoyant. On ne peut

qu'y voir la rencontre du principe

masculin et du principe féminin,

comme une sorte de

représentation nouvelle du linga et

de la yoni. Le symbolisme ici

renverrait au travail de lecture de

la case créole comme temple, du

fait des Couleurs vives, des dessins

minutieux et des ouvertures. Mais

le rectangle se termine aussi par

{ou comme) une voûte. Qui ne

lirait là, dans cet étrange rappel

des tables de la loi, la rencontre de

la terre et du ciel ? Mais cette terre

et ce ciel, c'est aussi un corps, une

silhouette humaine : l'homme est

la chair du monde, et la case créole

est l'un de ses organes. Saisissant

renversement de perspective qui

montre comment la question de

I'habiter est infiniment plus

complexe que ne semblent le faire

croire les approches

fonctionnalistes de I'humain et de

son environnement. Ici I'humain

est nécessairement son

environnement. L'homme n'habite

la case créole que dans la mesure

où elle est une partie de lui-même

qui est chair du monde. Exigence

centrale et en acte de la totalité,

exigence de la vraie vie, mise en

question de la séparation et du

secret. Et l'artiste travaille à cette

exigence de la totalité, puisque

l'essentieI de la recherche sur

l'écriture de la chair consiste

precisément à faire de celle-ci (et

ce n'est ni un jeu de mots ni une

simple figure de style) la chair

même de l'écriture. Dans une telle

démarche, c'est la représentation

elle-même qui est éffacée, c'est

l'écriture qui devient invisible,

c'est la picturalité elle-même qui

est la matière, qui est la chair.

"Voici venu le temps de nousmêmes",

du Mickael Elma.

Derrière la certitude des paroles et

le ton propre aux discours sacrés,

la demande est forte. Celle de la

recherche constante de l'accord

parfait. En peinture, étrangement,

pour cesser d'être en

représentation.

Homi K Bhabha, Nation and

narration, London and Ney York-,

Routleze, 1990, p 6

Carpanin Marimoutou

Mai 1996


Couleur la case

90x61 cm - laque et bois


Autoportrait

33,05x41 cm - huile sur toile


La poin persone?

— La poin persone ? O, Félisien !

Moin lé dobout koté lo baro také, dovan la kaz mon dalon Félisien. moin lé sir

lo boug lapou ral ankor in karang ! E pourtan, ier, nou lavé bien konvni, ke so

maiin avan six z'èr Bondié i fé gang, mi vien kri ali pou alé la sas mous a miel,

la o la fore... D'avoir la pa dor bonèr - bonèr é la, aster la fini guing'tatann ...

— O té Félisien !

An atandan, kom sak foi, mi pé pa san pasé, mi admir la kaz mon kamarad. Lo

soley ankor tann, é ankor roz, i klat si la toitir rouz an tapemak sé-t-in flataz

lo kèr ; sé-t-in pamine lo zié, zot i pé kroir amoin ...

Bien sir, la kaz Félisien i rosamb pa sad mésie X, Mesie Y, ki sèy mézir ék lo

sièl, ki gonf lo zabo kom in maldène sanm la markiz sak koté, é ki tal dsi sé pa

konbien d'larzer !... La pa, non pli, parey lo 2, 3 boukan a koté, fé an fond

bak, sansa an tol ferblan, akoz la ont, somanké akoz la timidité, somanké akoz

sé pa kosa, sad la i zoué lou kasièt derièr gro gro pié zak, gro gro pié mang,

sansa gran gran zerb amayé èk tout kalité liane ... Ek pêne i voi zot port lantré

nadkou in fénèt, san koi in bout la toi manzé èk la rouy.

La kaz Félisien, li, li amont tou sak na pou amontré, li sré pito in pti kaz

vantar-vantar. Kom pou la plipar bann kaz la Renion, la kaz Félisien le kouver

èk tol ondilé é lo kor lé an boi. Lo 2 koté ansamm larier lé souflé bardo tandık

lo fasad, lé an plans nat, si télman bien aligné k'on dire in paz kayé lo tré tiré â

la reg...

In lale betone i avans ziska 2 peron an pier taye pou rant sou in pti varang ;

sak koté lo lalé na tout migue ki bord lo parter. Dann parter-la, la pa fler i fe

in mank ; tout sort kalite nana : zerbèra aou, dalia aou, roz, zeyédène, pansé ...

E ou, mounoir ! ou la pa vni tèr la pou fé bavet out zié desi flèr kom in fanm

an voi d'famiy !... Vodremie wi kri out dalon pito !


Té Félisien ! kosa larive ? la obli respiré, kosa ?

I repond pa mem. Somanké lé malad ? E si te mor pou d'bon ? Dirk

in boug dan la sinkantene i dor tou sel, ki koné kosa ki pé s'pasé ? Somanké ...

Aret ek out "somanké", don ! Wi antan pa boug-la i ronf la ba dan !... Lo

bezsamèr ! ali, kom in bien éré, ann dan. Amoin, kom in simaguingné, déor !

ler soir li la mèm pa ramas rien sou la varang tansion kamayang gran min 2 bèl

touf kapilèr i débord kom pou kasièt zot fanzan pose en lèr 2 sélèt an boi

verni. Kanmèm lo fotey rotin é èk lo 2 sèz de Gol la rès déor : on diré i atand

domoun i poz lo dérièr dsi zot. Sé dam fotey ke lo soir, lerk la salèr la fini

tombé, Félisien i larg son kor, i alim in sigaret épisa i ral in tous, loin, loin, an

rogardan lo siel tène son fanal dousman, dousman...

O fon la varang, la port dantré li la kantmèm pa obli fermé. Mé lo 2 fenèt, sak

koté la varang, lo volé d'boi lé rouvèr : na rien k'lo bann sasi vitré abiyé èk

rido blan ke lé antrobayé. Sa doitèt pou k' lo zalan èk lo pasan i admir lo

linpos an dsi sak sasi : sa lé travayé, sa lé santourné, i fo voir baya ! La varang

lé sirmonté par in spès lavansé an plans nat galman é in gran lozanz, pène an

vèr le désiné o milié. I rosort bien si la fasad krèm ...

— Ope, Félisien !

A ! On diré moin la antand lo li kraké ... Pa tro to, foutor, va !

Par dérièr la kaz, dann fon la kour, i pé voir la kuizine ousa mon dalon i fé kui

son tiap-tiap li mèm ; dopi ké son madam la parti péi Bondié. Toudinkou,

Nénès ki koné amoin bien, i vien koté baro, pou di amoin adié. "groin !

groin !". Nénès se-t-in pti mizing tiou-tiou ki viv larg dan la kour Félisien an

parmi in tralé volay ; pou anpès lo koson fouy la tèr partou é sirtou dan lo

partèr, Félisien la mèt in zano fèr dann né lo zanimo.

— Kosa ton mèt lapou fé, Nénès ?

— Lo tiou-tiou i répond pa moin in tiok é, aprè z'avoir santi lo baro deux

trois kou, li ardevir son do, la ké an tir-bouson, kom si moin lavé di in

kouyonis ...

— La poin d'moun ? Té Félisien !

— Opé !


A ! Anfin ? la pokor pèt lof , lo bèsamèr !

— Ebin ! Ou la oubli lèr don ?

— Eskiz, eskiz !... Mi pas in linz, mi vien !...

On diré lo bann volay la antandi la voi zot mèt : ala ke zot tout i desand dan

ler lo bann brans pié zavoka A la vol. In kok lespès i larg son santé :

Koukoukoukou. Kom di lo provèrb : kok é lo bel mal mani i répond : "Asoir,

asoir, asoir !"... Na ziska in pintad ké la perd la bann parské lé zot i èm pa son

ménièr fé lo filozof é ki irl lo non son lidol : "Sokraaat ! Sokraaat !

Ousa Félisien i trouv lo tan okip tou so bann zanimo la ? Lo zardin ? Lo

manzay ! Lo nétoyaz la kaz ? ... Bondié tou sèl i koné !

Sak i doi prand ali plis lo tan sé sirman lantrotien son kaz. Ali mèm i répar sak

i kas. Ali mèm i ropène... Ziska lo lambrokin, li mont si lésèl pou alé netoyé

tanzantan. I fo rokonèt ke lanbrokin-la lé zoli domand pa koman ! Sa i garni

tout lo robor la devantir épi osi sad lo bann lovan... Dantel zipon in madam de

la ot la pa pli fin, la pa pli an retournel.

Sak foi mi rogard la kaz Félisien, komsa, mi kalkil ke si lo boug lavé in pe pli

d'moyen ankor, moin noré konsey ali fé konstri in pti zédo dovan. Kom noré

té kalou karès lo zié si lo fasad krem é lo toitir rouz derièr un rido farine do

lo...

in rev la zamé fé d'tor persone !

O bou di kont, lé preske domaz Félisien la lévé : moin noré kontinié ankor un

pé admir son pti kaz ! Mé mous a miel i atand amoin la o.

Daniel Honoré


Couleur la case â Marseille

68x68x56,05 cm - laque, tôle, onduline, bois


Couleur la case a Marseille

68x68x56,05 cm - laque, tôle, onduline, bois


Façade

90x61 cm - laque, tôle, bois, onduline


Façade

90x61 cm - laque, onduline, tôle


Dessin

7x9 cm - crayon de couleur


"La façade d'une maison n'appartient pas à celui qui

la possède, elle appartient â celui qui la regarde".

Penseur chinois

"La devantir in kaz le pa pou sat i abit anmdan, lé

pou sat i rogard a li"


Dessin

9,5x12 cm - crayon de couleur


Case

68x68x56,05 cm

laque, tôle, onduleur, bois


Case

68x68x56,05 cm - laque, tôle, bois


La chair du Monde

La chair du Monde

62x90 cm - huile sur toile


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Les "rendez-vous de I'Arlothèque seront annoncés dans les médias

et communiqués aux abonnés de I'Artothèque.

catalogue réalisé à l'occasion de I'exposition

Le temps de nous-mêmes. lo tan nou minm

dans le cadre de la série 2 OR 97 4 - 96

à l'artothèque du département

du 15 juın au 15 juillet

conception : OZIMA wz

realisation metis'

credit pholographique B Lesaig

Visuel de I'affiche et de la couverture du catalogue

detail du billet de1OOO F CFA du département de La Réunion.

impression : CKC

Ont participé à cette opération

les ateliers départementaux de la direction du Patrimoine.

la direction de la Logistique.

la direction de la Presse et de la Communication.

la direction de la Promotion culturelle et sportive.

du Conseil Général de La Réunion.

le personnel de l'Artothèque du Département,

le personnel de I'Office Départemental de la Culture

Remerciements à I'association OZIMA,

au service Environnement de la mairie de Saint-Denis

Artothèque du Département

52, rue Roland Garros

97400 Saint-Denis

TéI :41 75 50

Fax: 21 05 03



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