n°34 PDF pour site .pub - uevacj-ea
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Gardons la mémoire de notre Yiddish .<br />
T<br />
rès peu parmi nous ont connu leurs<br />
grands-parents qui vivaient en Pologne<br />
ou dans un pays d'Europe centrale.<br />
Que nous reste-t-il de leur vie, de leur<br />
langue ? quelques souvenirs, quelques bribes<br />
d'anecdotes transmises par nos Parents. Plusieurs<br />
traductions d'ouvrages importants viennent de paraître<br />
en Français.<br />
Mais rien ne <strong>pour</strong>ra remplacer la version originale,<br />
tous ces mots, toutes ces expressions et<br />
surtout les intonations entendues chez nos Parents.<br />
Sous la direction de Batia Baum, notre cours de Yiddish,<br />
au fil des années, nous fait découvrir la richesse<br />
de notre patrimoine littéraire.<br />
Bien évidemment, nous ne deviendrons jamais à<br />
nos âges des "érudits" du yiddish. (l'exception étant<br />
la règle) .<br />
Nous pénétrons chapitre après chapitre les romans<br />
des grands écrivains classiques de la littérature<br />
Yiddish.<br />
Tout au long de chaque année scolaire, comme des<br />
élèves tâtonnant, nous avons pris connaissance du<br />
premier roman de Mendele Mokher Sforim <strong>pub</strong>lié<br />
en yiddish en 1864.<br />
Avec ce roman, réapparaît la vie de nos grands<br />
parents ou arrières grands parents , leurs expres-<br />
16<br />
sions, leurs peines, leur vie de labeur, de souffrances<br />
et de prières.<br />
Nous aimerions tellement pouvoir retenir toutes<br />
les expressions imagées, et parfois même ,<br />
les jurons entendus chez nous.<br />
Avec les romans de CHOLEM ALEIKHEM , c'est<br />
la richesse de notre langue, son humour, sa truculence<br />
, que nous découvrons.<br />
Au détour d'une phrase, il nous semble entendre nos<br />
Parents.<br />
Ces lectures, au fil du temps, font revivre ces mots<br />
enfouis au plus profond de nous-mêmes.<br />
Cette année avec Y.L PERETZ, nous parcourons<br />
les ruelles des schtetles. Il retrace ces vies misérables<br />
des 19 ème et 20 ème siècle qui annoncent de grandes<br />
catastrophes.<br />
Avec sensibilité, Batia nous transmet ses<br />
connaissances, et nous apprécions d'autant plus<br />
son grand talent de traductrice.<br />
Alors ne vous privez pas du plaisir de ce voyage<br />
dans le domaine de notre yiddish. Venez nous rejoindre<br />
et goûter les plats a menu de notre langue.<br />
Contactez nous <strong>pour</strong> nous faire part de vos attentes,<br />
de vos souhaits.<br />
A bientôt !<br />
Rose Jaraud<br />
Petits métiers d'antant, métiers d'ailleurs ...<br />
Le repasseur. (El makwagui).<br />
U<br />
ne petite échoppe, une flamme quasi inextinguible sur laquelle reposaient les fers à repasser en fonte, des monc<strong>ea</strong>ux<br />
de linge, draps, nappes, serviettes et rid<strong>ea</strong>ux, des cintres portant jupes, chemisiers, robes de coton, de<br />
soie ou de lainage fin, robes de mariées somptueuses et fragiles, pantalons, chemises et sahariennes, enfin toute<br />
l'intimité des familles entre les mains du maître des lieux, le « makwagui » au visage luisant de sueur, posant un<br />
fer tiédi sur la flamme et en saisissant un autre, brûlant et rougi. La, maîtrise du geste, la dextérité du mouvement de va-etvient<br />
écrasant les plis, exerçait sur nos regards d'adolescentes une fascination admirative. L' échoppe était située dans une<br />
ruelle aujourd'hui, nous dirions une impasse sur laquelle donnait notre balcon et d'où nous pouvions voir le repasseur œuvrer<br />
activement. Nous n'avions pas besoin de nous déplacer <strong>pour</strong> lui confier notre repassage : nous mettions le linge dans<br />
un panier à anse attaché au bout d'une corde et nous n'avions plus qu'à laisser filer. Nous, les filles, étions toujours pressées<br />
de récupérer nos vêtements et si notre makwagui nous disait que ce serait prêt une heure plus tard, alors commençait<br />
un marchandage de minutes,<br />
"Une heure ? Je ne peux pas attendre, il me le faut dans un quart d'heure, un quart d'heure ? Mouch momkéne (ce n'est<br />
pas possible ! "<br />
Et régulièrement, s'engag<strong>ea</strong>it un échange de concessions horaires entre le balcon et l'échoppe, échange dont les filles sortaient<br />
toujours victorieuses Il v avait aussi les grandes occasions : le repassage du trouss<strong>ea</strong>u de la mariée. En cette circonstance,<br />
le makwagui montait lui-même chercher l'ouvrage et négocier, avec le père de la mariée en personne, le forfait global<br />
qui lui serait versé <strong>pour</strong> son travail car, dans ce cas particulier, et vu l'importance de l'ouvrage, il n'était pas payé à la pièce.<br />
Il commençait par se saisir du linge de maison qu'il rapportait ensuite impeccablement repassé et plié, prêt à être rangé<br />
dans les armoires. Puis il emportait la lingerie : chemises de nuit, déshabillés et fonds de robes de soie ou de satin, finement<br />
brodés par les bonnes soeurs de l'Orphelinat Ste Anne et leurs élèves.<br />
Enfin, les robes les tailleurs et chemisiers confectionnés par la couturière car le « prêt-à-porter » était encore fort peu courant.<br />
Mais le plus étonnant était la manière dont notre makwagui humectait le linge avant de le repasser. Il emplissait sa<br />
bouche d'<strong>ea</strong>u et asperg<strong>ea</strong>it alors finement le drap, la nappe ou le vêtement étalé sur sa table en recrachant, en un jet régulier<br />
et puissant, le liquide en question. Personne ne semblait s'en offusquer alors !!<br />
Cinquante ans se sont écoulés depuis Les fers électriques, les fers à vapeur, les « pressings » ont-ils, partout dans le<br />
monde, relégué les vieux fers en fonte parmi les objets du passé ? Y a- t-il encore , au fond d'une nielle oubliée, un artisan<br />
repasseur qui peine à l'ouvrage ?<br />
Régine Zayan