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54' L1IKIVERS. ville de Myrlée, fondée par Myrlus, chef des ...

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<strong>54'</strong><br />

<strong>L1IKIVERS</strong>.<br />

<strong>ville</strong> <strong>de</strong> <strong>Myrlée</strong>, <strong>fondée</strong> <strong>par</strong> <strong>Myrlus</strong>,<br />

<strong>chef</strong> <strong>de</strong>s Colophoniens, fut également<br />

saccagée <strong>par</strong> Philippe. Les Rhodiens,<br />

alliés <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux <strong>ville</strong>s, se liguèrent<br />

avec Attale I er avait tenté <strong>de</strong> l'assassinerlT^uérre futT]<br />

décrétée, et Prusias employa, mais en<br />

vain, son influence auprès <strong>de</strong>s envoyés<br />

dé Rome pour détourner la république<br />

, et déclarèrent la guerre d'un <strong>par</strong>eil projet. (170 av. J.-C.) Pour<br />

au roi <strong>de</strong> Macédoine. Prusias, qui avait rendre son intervention plus utile à son<br />

épousé A pâmée, fille <strong>de</strong> ce prince, reçut beau-frère, Prusias attaqua Eumène,<br />

en présent le territoire <strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s con­ et porta la guerre dans les États du roi<br />

quises ; il rebâtit Cius, et lui donna son <strong>de</strong> Pergame, qui fut ainsi contraint <strong>de</strong><br />

nom. La <strong>ville</strong> fut appelée Prusia<strong>de</strong>, et, rester en Asie. Mais ces événements<br />

pour la distinguer <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> du même servaient mieux la politique <strong>de</strong> Rome<br />

nom, située au pied <strong>de</strong> l'Olympe, on que n'aurait pu faire une guerre directe.<br />

l'appela Pruse sur mer. La <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Les Romains attendaient que les rois<br />

<strong>Myrlée</strong> prit le nom d'Apamée, reine <strong>de</strong> d'Asie se fussent suffisamment affaiblis<br />

Bithynie et femme <strong>de</strong> Prusias. Ce fut, les uns <strong>par</strong> les autres, pour les attaquer<br />

suivant Etienne <strong>de</strong> Byzance ( 1), Nico- ensuite ouvertement.<br />

mè<strong>de</strong> Épiphane qui donna à la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Les armées <strong>de</strong> Prusias remportèrent<br />

<strong>Myrlée</strong> le nom <strong>de</strong> sa mère A pâmée. sur celles d'Eumène <strong>de</strong> nombreux avan­<br />

Lorsque les Romains déclarèrent la tages; elles durent ces succès moins à<br />

guerre à Philippe, Prusias ne soutint l'habileté <strong>de</strong> leurs généraux qu'aux con­<br />

pas son allié, et laissa le roi <strong>de</strong> Pergame seils d'Annibal, qui, errant et proscrit,<br />

passer en Grèce pour porter du secours s'était retiré à la cour <strong>de</strong> Prusias, père<br />

aux Romains. Profitant <strong>de</strong>s dissensions <strong>de</strong> Cynaegus. Le général .carthaginois<br />

suscitées entre <strong>de</strong>s États qui pouvaient combattit lui-même la flotte d'Eu­<br />

voir d'un œil jaloux l'agrandissement <strong>de</strong> mène (1) et mit ses vaisseaux en fuite.<br />

la Bithynie, Prusias résolut d'étendre Des services aussi éclatants ne purent<br />

ses frontières du côté <strong>de</strong> l'Orient. Il cependant détourner Prusias <strong>de</strong> la plus<br />

entreprit le siège d'Héraclée, l'une <strong>de</strong>s lâche trahison. Eumène s'était plaint<br />

principales places <strong>de</strong> la Paphlagonie, aux Romains <strong>de</strong> la conduite <strong>de</strong> ce<br />

et qui fut annexée au royaume <strong>de</strong> Pont prince; déjà la république était l'arbitre<br />

<strong>par</strong> Mithridate. Blessé pendant le siège, suprême auquel se soumettaient les<br />

il renonça aux conquêtes, et finit tran­ monarques d'Asie, quand la voie <strong>de</strong>s<br />

quillement sa vie, après un règne <strong>de</strong> armes n'était pas assez prompte.<br />

quarante ans, laissant la couronne (2) Quintius Flaminius, envoyé du sé­<br />

à un fils qui portait son nom. nat , arriva en Bithynie avec la mission<br />

avouée <strong>de</strong> rétablir la concor<strong>de</strong> entre<br />

PRUSIAS II.<br />

les <strong>de</strong>ux rois. En apprenant que l'implacable<br />

ennemi <strong>de</strong>s Romains vivait en<br />

Ce Prusias, surnommé Cynaegus , le Bithynie comme l'hôte et l'ami <strong>de</strong> Pru­<br />

chasseur, monta sur le trône <strong>de</strong> Bithynie sias, Flaminius ne dissimula pas que le<br />

vers 192 avant J.-C. L'alliance qui avait peuple romain ne consentirait jamais à<br />

existé entre son père et les princes <strong>de</strong> recevoir pour allié un ami d'Annibal.<br />

Macédoine subsistait toujours, malgré C'est alors que le roi <strong>de</strong> Bithynie ne<br />

la conduite équivoque <strong>de</strong> Prusias envers rougit pas <strong>de</strong> solliciter la protection <strong>de</strong><br />

Philippe. Le roi <strong>de</strong> Bithynie épousa Rome, en promettant <strong>de</strong> livrer son<br />

une <strong>de</strong>s sœurs <strong>de</strong> Persée, et prit une hôte ; mais celui-ci, averti à temps du<br />

<strong>par</strong>t active aux intrigues que ce prince complot tramé contre lui, avait pré<strong>par</strong>é<br />

entretenait avec tous les ennemis <strong>de</strong>s du poison, qu'il prit au moment où les<br />

Romains en Orient. Eumène, allié <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>s du roi venaient l'arrêter. Il fut<br />

la république, et jaloux <strong>de</strong> la puissance enterré à Libyssa, village qui était au<br />

<strong>de</strong>s rois <strong>de</strong> Bithynie, se plaignit aux bord <strong>de</strong> la mer (2).<br />

Romains <strong>de</strong> la perfidie <strong>de</strong> Persée, qui<br />

(i) Verbo MupXéia.<br />

(a) Tit. Liv., XXXII, ch. 34 î XXXVII,<br />

en. 3o.<br />

(i) Plut arque, Vie d'Annibal.<br />

(*) « Fuit et Libyssa oppidum, nui nunc<br />

Haunibalis tau turn tumulus... » Pliait Natural.<br />

Histor., lib. V, cap. XXXII.


'•• -v>C!~~<br />

Prusias, obligé <strong>de</strong> rendre à Eumène<br />

les provinces conquises, entreprit le<br />

voyage <strong>de</strong> Rome, pour tâcher <strong>de</strong> se<br />

concuier, <strong>par</strong> sa présence, les intérêts<br />

du sénat. Mais l'attitu<strong>de</strong> suppliante<br />

qu'il prit en abordant le Capitole, la<br />

bassesse <strong>de</strong> ses supplications, lui furent<br />

plus défavorables auprès <strong>de</strong>s fiers républicains<br />

que la conduite hardie qu'il<br />

avait tenue en attaquant leurs alliés.<br />

Renvoyé avec mépris, il revint en Bithynie<br />

pour se venger sur les rois <strong>de</strong><br />

Pergame* et déclara <strong>de</strong> nouveau la<br />

guerre à Attale II, successeur d'Eumène;<br />

il le vainquit, et s'em<strong>par</strong>a <strong>de</strong> sa<br />

capitale ; mais les Romains le forcèrent<br />

<strong>de</strong> nouveau à restituer cette <strong>ville</strong> à son<br />

souverain légitime. Des soulèvements<br />

survenus en Bithynie forcèrent Prusias<br />

à s'enfuir à Nicomédie ; son fils Nicomè<strong>de</strong><br />

vint l'attaquer, à la tête <strong>de</strong>s révoltés,<br />

dans son <strong>de</strong>rnier refuge. Après<br />

l'avoir fait assassiner, il fut proclamé<br />

roi, et reçut le surnom <strong>de</strong> Pnilopator.<br />

Les premieres années <strong>de</strong> son règne se<br />

passèrent dans une paix profon<strong>de</strong>.<br />

I NICOMÈDE il.<br />

L'alliance <strong>de</strong> ces monarques avec les<br />

rois grecs, et leurs relations continuelles<br />

avec les princes asiatiques Jes plus<br />

renommés <strong>par</strong> leur faste, donnent lieu<br />

<strong>de</strong> croire que la cour <strong>de</strong>s rois <strong>de</strong> Bithy»<br />

nie n'était pas moins brillante que celle<br />

<strong>de</strong>s Attale et <strong>de</strong>s Séleuci<strong>de</strong>s. Mais la<br />

Bithynie a été trop souvent envahie et<br />

saccagée, pour qu'on puisse espérer d'y<br />

retrouver quelque monument important<br />

qui date <strong>de</strong> l'époque où elle n'était<br />

pas soumise à la domination étrangère.<br />

NICOMÈDE III.<br />

L'alliance que contracta Nicomè<strong>de</strong><br />

avec Mithridate lui attira la haine <strong>de</strong>s<br />

Romains, mais ne l'empêcha pas <strong>de</strong><br />

conquérir la Cappadoce et la Paphlagonie,<br />

qu'il <strong>par</strong>tagea avec son allié. Les<br />

Romains, appelés pour arbitres dans un<br />

différend qui s'éleva entre eux, s'em<strong>par</strong>èrent<br />

<strong>de</strong> la Cappadoce pour venger<br />

îe roi Ariarathe assassiné <strong>par</strong> Mithridate<br />

(1). Le même sort ne tarda pas à<br />

fi) Appian., Bell. Millir., c. 7-ao.<br />

ASTE MINEURE. "te<br />

atteindre Nicomè<strong>de</strong>, qui laissa cependant<br />

son trône à un fils du même nom.<br />

Ce prince, sous le nom <strong>de</strong> Nicomè<strong>de</strong> III,<br />

soutint d'abord une guerre contre son<br />

frère Socrate, protégé <strong>par</strong> Mithridate;<br />

ce motif seul lui valut l'alliance <strong>de</strong>s<br />

Romains, qui le rétablirent plusieurs<br />

fois sur son trône. Depuis ce moment<br />

la Bithynie fut acquise aux Romains,<br />

et, quelques années plus tard, Nicomè<strong>de</strong><br />

, en mourant, les institua ses héritiers.<br />

Cependant, ils n'entrèrent pas<br />

sans combattre en possession <strong>de</strong> leur<br />

héritage, et Mithridate mit une nombreuse<br />

armée en campagne pour défendre<br />

la Bithynie, qui rut soumise,<br />

malgré ses efforts, <strong>par</strong> Silanus, Lucullus<br />

et Cotta. Ce <strong>de</strong>rnier avait établi<br />

son quartier général à Chalcédoine,<br />

pendant que Lucullus assiégeait Apamée<br />

et Pruse; cerné dans la <strong>ville</strong> <strong>par</strong> Mithridate<br />

, qui avait armé une flotte nombreuse<br />

, il fut secouru à temps <strong>par</strong> son<br />

collègue (1).<br />

La dynastie <strong>de</strong>s rois <strong>de</strong> Bithynie doit<br />

donc être établie <strong>de</strong> la. manière suivante<br />

:<br />

avant J.-C<br />

Bias, régna <strong>de</strong> 378 à 32*<br />

Zipoetès, — 328 à 28J<br />

Nicomè<strong>de</strong> I er , — 281 à 24(<br />

Prusias (Zelas) 246 à 23!<br />

Prusias I er , — 232 a 19]<br />

Prusias II, — 192 à 14!<br />

Nicomè<strong>de</strong> II, — 149 à 9!<br />

Nicomè<strong>de</strong> III, — 92 à 7J<br />

LA BITHYNIE BÉDDITE EN PROVING]<br />

ROMAINE.<br />

Dès lors, ce pays, converti en pro<br />

vince romaine, tombe sous le gouvei<br />

nement <strong>de</strong>s proconsuls et <strong>de</strong>s préteurs<br />

et rentre dans l'administration général<br />

<strong>de</strong> l'empire. Décrétée province du peupl<br />

romain (2), la Bithynie fut gouverné<br />

<strong>par</strong> <strong>de</strong>s proconsuls tirés au sort. Pli:<br />

sieurs empereurs la visitèrent, et sou<br />

vent son territoire <strong>de</strong>vint le champ d<br />

bataille où les prétendants à l'empii<br />

firent valoir leurs droits.<br />

(x) 71 av. J.-C.<br />

(a) Pline, ép, IV, 9; Y, ao; VI, 5; VI<br />

6 et 10.


56<br />

EMPEBEUBS BYZANTINS.<br />

De tous les combats qu'excitèrent les<br />

guerres civiles, il n'en est pas <strong>de</strong> plus<br />

important que celui qui décida du sort<br />

<strong>de</strong> l'empire entre Licinius et Constantin<br />

Chalcédoine, et eut bientôt réuni autour<br />

<strong>de</strong> lui une armée <strong>de</strong> cinquante mille<br />

hommes; mais Constantin, sans lui<br />

donner le temps d'assembler <strong>de</strong>s forces<br />

plus considérables, traversa le Bosphore<br />

et engagea la bataille, qui se donna sur<br />

les hauteurs <strong>de</strong> Chrysopolis, aujourd'hui<br />

Scutari ; tout le champ <strong>de</strong> bataille<br />

est occupé aujourd'hui <strong>par</strong> le vaste cimetière<br />

<strong>de</strong>s musulmans, qui s'étend <strong>de</strong>puis<br />

la <strong>ville</strong> jusqu'au pied du mont<br />

Boulgourlou.<br />

Pendant les règnes suivants, l'empire<br />

, balancé entre <strong>de</strong>s victoires et <strong>de</strong>s<br />

revers, soutint presque constamment<br />

<strong>de</strong>s guerres lointaines, et la Bithynie,<br />

ainsi que les provinces limitrophes,<br />

jouirent d'une sorte <strong>de</strong> tranquillité, que<br />

<strong>de</strong>s soulèvements <strong>par</strong>tiels ne <strong>par</strong>vinrent<br />

L'UNIVERS.<br />

en mettant le siège <strong>de</strong>vant les <strong>ville</strong>s'<br />

qu'ils occupaient. Les soldats <strong>de</strong> Procope,<br />

qui étaient à Nicée, purent<br />

néanmoins faire une sortie, et vinrent<br />

inquiéter l'armée <strong>de</strong> Valens qui entourait<br />

Chalcédoine. La fuite seule mit<br />

ne veut pas <strong>par</strong>ler du lac Ascanins :<br />

car tout le territoire <strong>de</strong> Nicée était<br />

occupé <strong>par</strong> les ennemis, tandis que Nicomédie<br />

tenait pour l'empereur. Cet<br />

événement, qui augmenta le nombre<br />

<strong>de</strong>s <strong>par</strong>tisans <strong>de</strong> Procope, lui donna les<br />

moyens <strong>de</strong> poursuivre le siège <strong>de</strong> Cyzique,<br />

mais ne lui ouvrit pas pour cela<br />

le chemin <strong>de</strong> l'empire. Attaquée <strong>par</strong><br />

Valens dans la plaine <strong>de</strong> Nacolia, en<br />

Phrygie, son armée fut vaincue, et le<br />

général lui-même, arrêté dans sa fuite,<br />

eut la tête tranchée <strong>par</strong> ordre <strong>de</strong> l'empereur,<br />

dont la vengeance ne s'arrêta<br />

pas là, car plusieurs <strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s qui avaient<br />

pris le <strong>par</strong>ti <strong>de</strong> Procope eurent leurs<br />

murailles rasées. Aussi, lorsque les<br />

Perses, sous la conduite <strong>de</strong> Chosroès,<br />

'firentune invasion en Bithynie, il leur<br />

pas à troubler. Julien, à peine monté fut facile <strong>de</strong> s'em<strong>par</strong>en<strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s ainsi<br />

sur le trône, se fit gloire <strong>de</strong> ré<strong>par</strong>er les<br />

édifices <strong>de</strong>s principales <strong>ville</strong>s qui avalent<br />

été endommagées <strong>par</strong> <strong>de</strong>s tremblements<br />

<strong>de</strong> terre. Partant <strong>de</strong> Nicomédie, il traversa<br />

l'Asie pour aller faire la guerre<br />

aux Perses. Son successeur, Jovien,<br />

démantelées. Aux irruptions <strong>de</strong>s Perses<br />

succédèrent celles <strong>de</strong>s Goths et <strong>de</strong>s<br />

Scythes, qui n'avaient pas pour usage<br />

<strong>de</strong> faire une guerre en regle, mais dont<br />

le seul but était <strong>de</strong> <strong>de</strong>scendre sur la<br />

côte pour piller les habitants et brûler<br />

couronné dans Ancyre, ne vit pas même ce qu'ils ne pouvaient emporter,<br />

comme empereur les murailles <strong>de</strong> Malgré la persécution qu'elle<br />

cord avec farinée, l'élut empereur dans<br />

la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nicée. A peine investi <strong>de</strong> cette<br />

dignité, il se rendit à Nicomédie, et<br />

associa son frère Valens à l'empire. Le<br />

grand concours <strong>de</strong> <strong>par</strong>tisans qui s'étaient<br />

réunis autour <strong>de</strong>s nouveaux empereurs<br />

ne put cependant étouffer les<br />

prétentions <strong>de</strong> Procope, allié à la famille<br />

impériale. Malgré la présence <strong>de</strong> l'empereur,<br />

il s'em<strong>par</strong>a <strong>de</strong> Nicée et <strong>de</strong> Chalcédoine.<br />

La mort <strong>de</strong> Valentinien, survenue<br />

sur ces entrefaites, fît passer<br />

l'empire sans <strong>par</strong>tage entre les mains<br />

<strong>de</strong> Valens, dont le premier soin fut <strong>de</strong><br />

poursuivre avec vigueur les rebelles,<br />

avait<br />

du moment qu'elle trouva une protection<br />

près du trône, les fidèles cou-j<br />

vrirent <strong>de</strong> monastères et d'églises les<br />

environs <strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s et les penchants <strong>de</strong>s<br />

montagnes. Toutes les vallées <strong>de</strong> 1*0lympe<br />

virent arriver <strong>de</strong>s anachorètes i<br />

qui formaient <strong>de</strong>s disciples fervents et<br />

dévoués.<br />

DOMINATION MUSULMANE.<br />

Les autres <strong>par</strong>ties <strong>de</strong> l'Asie Mineure<br />

étaient <strong>de</strong>puis longtemps tombées entre<br />

(i) Lib. XXVI, c. 8.


les mains <strong>de</strong> la race musulmane, gui<br />

avait formé <strong>de</strong>s royaumes et <strong>de</strong>s principautés<br />

indépendantes; mais la vigilance<br />

<strong>de</strong>s empereurs byzantins avait<br />

éloigné jusque-là <strong>de</strong>s frontières <strong>de</strong> la<br />

Bithynie les hor<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s émirs et <strong>de</strong>s<br />

califes. Haroun-al-Rachyd, qui s'était<br />

em<strong>par</strong>é d'Angora, et dont l'avant-gar<strong>de</strong><br />

était venue presque à Héraclée, s'était retiré,<br />

<strong>par</strong> suite d'un traité signé avec l'empereur<br />

(1). Les Seldjouki<strong>de</strong>s, d'ailleurs<br />

constamment en guerre avec d'autres<br />

princes musulmans, avaient mollement<br />

attaqué la Bithynie, lorsque ToghruI, le<br />

<strong>chef</strong> <strong>de</strong> la dynastie d'Osman, voulant<br />

aussi conquérir un empire pour les siens,<br />

marcha droit vers l'ouest, et vint mourir<br />

sur les bords du Sangarius, en montrant<br />

à son fills Orkhan les hauteurs <strong>de</strong><br />

Broussa. Ala-Eddin, sultan seldjouki<strong>de</strong>,<br />

lui avait donné en apanage toutes les<br />

terres qu'il pourrait conquérir au <strong>de</strong>là<br />

du Sangarius. La prise <strong>de</strong> Broussa,<br />

dont les Osmanlis firent leur capitale<br />

en Asie, amena la chute du pouvoir<br />

<strong>de</strong>s empereurs en Bithynie. Des guerres<br />

infructueuses, un pouvoir précaire, ne<br />

peuvent être considérés comme la<br />

marque d'une domination. Plus tard,<br />

lorsque les armées <strong>de</strong>s croisés vinrent<br />

occuper ces contrées, les Osmanlis,<br />

quoique vaincus, ne furent jamais complètement<br />

chassés, et la prise <strong>de</strong> Constantinople,<br />

en couronnant les efforts<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux siècles, cimenta pour jamais la<br />

domination musulmane.<br />

Lorsque le sultan Orkhan détermina<br />

les limites <strong>de</strong> la province nouvellement<br />

conquise, il donna les noms <strong>de</strong> ses<br />

lieutenants aux principaux districts<br />

dont ils s'étaient em<strong>par</strong>és. Ainsi, le pays<br />

<strong>de</strong>s Thyniens fut appelé Khodja-Ili, et<br />

la <strong>par</strong>tie occi<strong>de</strong>ntale <strong>de</strong> la province<br />

reçut le nom <strong>de</strong> Khodawenkiar; les<br />

fiers que l'émir s'était réservés autour<br />

<strong>de</strong>. l'Olympe furent appelés Sultan-<br />

OE ni. Mais le sultan ne gardait pas pour<br />

lui seul les terres conquises, et les plus<br />

braves <strong>de</strong> ses émirs recevaient <strong>de</strong>s portions<br />

<strong>de</strong> territoire qui <strong>de</strong>vaient au<br />

trésor public, outre une re<strong>de</strong>vance en<br />

argent, un certain nombre d'hommes<br />

armés; le gouvernement <strong>de</strong> ces districts<br />

(r) De Hammer, Histoire <strong>de</strong> Vempire ottoman,<br />

(orne I,<br />

ASIE MINEURE. 57<br />

leur était dévolu à eux et à leuns <strong>de</strong>scendants.<br />

C'est là l'origine <strong>de</strong> la puissance<br />

<strong>de</strong>s dérébeys (1 ), dont le gouvernement,<br />

tout à fait féodal, fut pendant<br />

plusieurs siècles d'un si grand secours<br />

a la puissance <strong>de</strong>s sultans. Quelquesuns<br />

<strong>de</strong> ces fiefs, donnés pour un certain<br />

nombre d'années, rentraient, à l'extinction<br />

du titre, sous le pouvoir <strong>de</strong> la<br />

Porte. Les guerres <strong>par</strong>ticulières que se<br />

livrèrent ces beys, les vexations <strong>de</strong><br />

toute espèce dont ils accablèrent nonseulement<br />

les chrétiens, mais encore<br />

les différentes tribus musulmanes qui<br />

venaient camper dans leurs districts,<br />

contribuèrent à anéantir les <strong>de</strong>rniers<br />

éléments <strong>de</strong> civilisation et <strong>de</strong> commerce<br />

dans cette contrée. Un <strong>de</strong>s grands<br />

principes <strong>de</strong> la politique^ du sultan<br />

Mahmoud était <strong>de</strong> réunir sous un principe<br />

unique et absolu le gouvernement<br />

<strong>de</strong> l'empire. La puissance <strong>de</strong>s dérébeys<br />

fut attaquée, et ceux qui étaient dans<br />

le voisinage <strong>de</strong> Constantinople furent<br />

obligés <strong>de</strong> se soumettre. Aujourd'hui,<br />

la Bithynie est gouvernée <strong>par</strong> <strong>de</strong>s pachas,<br />

qui reçoivent tous les ans l'investiture<br />

à l'époque du Beyram. On<br />

n'entend plus <strong>par</strong>ler <strong>de</strong> ces soulèvements<br />

hardis qui mettaient en feu <strong>de</strong>s provinces<br />

entières, et maintenant Turcs et<br />

chrétiens, courbés sous le même niveau,<br />

jouissent, <strong>de</strong> la <strong>par</strong>t <strong>de</strong>s autorités, sinon<br />

<strong>de</strong> la même bienveillance, du moins<br />

d'une tranquillité relative.<br />

CHAPITRE III.<br />

FRONTIÈRES DE LA BtTHYNIE.<br />

Le royaume <strong>de</strong> Bithynie, formé du<br />

démembrement <strong>de</strong> plusieurs peuples,<br />

eut naturellement <strong>de</strong>s frontières variables;<br />

néanmoins, du côté <strong>de</strong> l'ouest.<br />

les limites furent constamment fixées<br />

<strong>par</strong> le Rhyndacus. Du côté <strong>de</strong> l'est, il<br />

fut longtemps borné <strong>par</strong> le cours du<br />

Sangarius (2) ; mais après l'adjonction<br />

du pays <strong>de</strong>s Mari and y ni ens, il s'étendit<br />

jusqu'à Héraclée, et même jusqu'au<br />

Parthénius, c'est-à-dire, jusqu'à<br />

la limite extrême du territoire <strong>de</strong> Caucones.<br />

Cette Thrace qui est en Asie,<br />

(i) Dérébey, bey <strong>de</strong>s vallées,<br />

(a) Strabon, liv, XII, p. 54r.


58 i,um<br />

dit Xénophon, commence à l'embouchure<br />

du Pont-Euxin et s'étend jusqu a<br />

Héraclée. Elle est à droite <strong>de</strong> ceux qui<br />

naviguent vers le Pont; <strong>de</strong> Byzance a<br />

Héraclée il y a une journée <strong>de</strong> navigation<br />

pour une trireme dans les plus<br />

longsjours (1).<br />

Les frontières déterminées <strong>par</strong> btrabon<br />

sont un peu différentes. « La Bithynie<br />

est bornée à l'orient <strong>par</strong> les Paphlagoniens<br />

et les Mariandyniens, et<br />

<strong>par</strong> quelques-uns <strong>de</strong>s Epictètes; au<br />

septentrion <strong>par</strong> le Pont-Euxin, <strong>de</strong>puis<br />

l'embouchure du Sangarius jusqu au<br />

Bosphore qui sé<strong>par</strong>e Byzance <strong>de</strong> Chalcédoinc;<br />

à l'occi<strong>de</strong>nt, <strong>par</strong> la Proponti<strong>de</strong>,<br />

et au midi, <strong>par</strong> la Mysie et la<br />

Phrygie surnommée Épietète, laquelle<br />

est aussi appelée Phrygie Hellespontique<br />

(2). »<br />

Sous la domination <strong>de</strong>s Romains, les<br />

limites <strong>de</strong> la Bithynie furent un peu<br />

changées. Toute la côte, dit Strabon<br />

(la <strong>par</strong>tie droite du Pont-Euxin), était<br />

soumise à Mithridate, <strong>de</strong>puis la Colchi<strong>de</strong><br />

jusqu'à Héraclée. Mais le territoire situé<br />

au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> cette <strong>ville</strong> jusqu'à l'embouchure<br />

du Pont-Euxin et jusqu'à<br />

Chalcédoine, était resté sous la dépendance<br />

du roi <strong>de</strong> Bithynie. Après la chute<br />

<strong>de</strong>s rois <strong>de</strong> ce pays, les Romains conservèrent<br />

les mêmes limites, <strong>de</strong> sorte<br />

qu'Héraclée ap<strong>par</strong>tenait au Pont; mais<br />

le pays qui est au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> cette <strong>ville</strong><br />

ap<strong>par</strong>tenait à la Bithynie (3). La détermination<br />

<strong>de</strong> Ptolémée est différente.<br />

La Bithynie, dit-il, est. bornée,<br />

au midi, <strong>par</strong> l'Asie propre, comme le<br />

montre la ligne tirée <strong>de</strong>puis le fleuve<br />

Rhyndacus jusqu'à la frontière ; à l'orient<br />

, <strong>par</strong> la Galatie et la Paphlagonie,<br />

d'après la ligne tirée <strong>de</strong>puis la limite<br />

mentionnée jusqu'à Cytorus, <strong>ville</strong> du<br />

Pont.<br />

Néanmoins, tous les auteurs mo<strong>de</strong>rnes<br />

qui ont traité <strong>de</strong> la Bithynie<br />

ancienne se sont accordés avec Etienne<br />

<strong>de</strong> Byzance et Arrien (4), pour en fixer<br />

les limites au Parthénius du côté <strong>de</strong><br />

l'orient. Au sud, les frontières sont défi)<br />

Xénoph,^. Cyri, liv. V, ch. III,<br />

D. I.<br />

(a) Strabon XII, 563,<br />

(3) Strabon, liv. XII, p. 541.<br />

(4) Périp., liv. I, p. 14, i5.<br />

^rdjSvtfr.f***!<br />

terminées <strong>par</strong> la chaîne <strong>de</strong> l'Olympe,<br />

qui est presque <strong>par</strong>allèle à la cote <strong>de</strong><br />

l'Euxin, et qui étend ses ramifications<br />

dans la Paphlagonie jusqu'au Pont et au<br />

fleuve Halys.<br />

HONOBIADE.<br />

Vers le cinquième siècle, Théodose II<br />

détacha <strong>de</strong> la Bithynie une vaste portion<br />

dont il forma un gouvernement <strong>par</strong>ticulier<br />

qui fut appelé Honoria<strong>de</strong>, du<br />

nom <strong>de</strong> son oncle Honorius. Héraclée<br />

reçut le titre <strong>de</strong> métropole et <strong>de</strong>vint le 1<br />

lieu <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>nce du gouverneur (1).<br />

PABÀGSS DU BOSPHOBE.<br />

La <strong>par</strong>tie <strong>de</strong> la Bithynie qui est bai- j<br />

gnée <strong>par</strong> la mer a été <strong>de</strong> tout temps la<br />

mieux connue et la plus peuplée. Les<br />

vastes ports que forment les sinuosités •<br />

<strong>de</strong> la cote attiraient, avant la fondation<br />

<strong>de</strong> Byzance, le commerce <strong>de</strong> la Grèce<br />

et les colonies <strong>de</strong> l'Europe.<br />

Depuis l'embouchure du Rhyndacus<br />

dans la Proponti<strong>de</strong> jusqu'à l'embouchure *<br />

du fleuve Cius, la côte est peu élevée.<br />

Toute cette plaine est riche en oliviers<br />

et en pâturages. Le fleuve Cius, qui<br />

sort du lac Ascanius, vient se jeter dans<br />

un golfe profond qui prenait son nom<br />

<strong>de</strong> la <strong>ville</strong> la plus importante construite<br />

sur ses bords. Au reste, on n'est pas d'accord<br />

sur cette dénomination ; Pomponius<br />

Mêla s'exprime ainsi : « Il y a au <strong>de</strong>là<br />

<strong>de</strong> Dascylium <strong>de</strong>ux golfes <strong>de</strong> moyenne<br />

gran<strong>de</strong>ur; l'un, qui n'a point <strong>de</strong> nom,?.<br />

baigne la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Cius (2). »<br />

CAP POSIDIUM.<br />

Le promontoire <strong>de</strong> Cius, qui fut appelé<br />

aussi le cap Posidium (3), est formé<br />

<strong>par</strong> un prolongement du mont Arganthonius,<br />

sur le penchant duquel était<br />

bâtie la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Cius. Ce cap est sans<br />

doute le Neptuni fanum <strong>de</strong> Pom ponius<br />

Mêla. Il est couvert <strong>de</strong> forêts : c'est eu<br />

en ce lieu que la fable place l'aventure<br />

d'Hylas enlevé <strong>par</strong> les nymphes.<br />

(1) Jean Malala, Chronog., liv. XIV,<br />

p. 69, 6, éd. Gxon.<br />

(2) Mêla, liv. I, ch. XIX.<br />

(3) Piolomée, liv. V, ch. I.


En remontant vers le nord, et après<br />

avoir doublé le cap Posidium, on entre<br />

immédiatement dans un autre golfe qui<br />

s'étend <strong>de</strong> Test à l'ouest, dont la <strong>par</strong>tie<br />

sud est formée <strong>par</strong> le mont Arganthonius,<br />

et la côte nord <strong>par</strong> la <strong>par</strong>tie sud<br />

<strong>de</strong> la presqu'île <strong>de</strong>s Thyniens.<br />

GOLFE D'ASTACÜS OU DE NICOMÉDIB.<br />

ASIE MINEURE.<br />

Ce golfe, prenant son nom <strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s<br />

les plus importantes construites sur ses<br />

|) , est appelé tantôt Olbianus <strong>de</strong> la<br />

<strong>ville</strong> d'Olbia(l), tantôt Astacenus <strong>de</strong>là<br />

<strong>ville</strong> d'Astacus (2). ufi,<br />

plus tard, la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nicomédie ayant<br />

remplacé la <strong>ville</strong> d'Olbia, ce golfe prit<br />

le nom <strong>de</strong> golfe <strong>de</strong> Nicomédie, qu'il a<br />

conservé jusqu'à nos jours. La côte sud<br />

<strong>de</strong> la presqu'île <strong>de</strong>s Thyniens se prolonge<br />

du nord-ouest au sud-est, <strong>de</strong>puis<br />

le cap <strong>de</strong> Chalcédoine jusqu'à la <strong>par</strong>tie<br />

la plus étrpile du golfe. A ce point, les<br />

terres se rapprochent, forment une<br />

sorte <strong>de</strong> détroit, qui, arrêtant l'impétuosité<br />

<strong>de</strong>s vagues, fait du golfe <strong>de</strong> Nicomédie<br />

un vaste et tranquille port.<br />

PORT HERBUS.<br />

Le cap <strong>de</strong> Chalcédoine, nommé aussi<br />

Heraus, est bordé d'une quantité <strong>de</strong><br />

rochers. Au <strong>de</strong>dans <strong>de</strong> ce promontoire,<br />

la mer forme un golfe, qui, à le voir,<br />

semble être <strong>par</strong>tout d'une égale profon<strong>de</strong>ur.<br />

Cependant il n'y a qu'autant<br />

d'eau qu'il en faut pour couvrir le terrain<br />

(3). Justinien fit ré<strong>par</strong>er ce port<br />

Heraus (4). Il fit faire un nouveau port<br />

dans le même endroit; comme l'ancien<br />

était exposé à la violence <strong>de</strong>s vents et<br />

<strong>de</strong>s tempêtes, il y remédia en faisant<br />

jeter quantité <strong>de</strong> caisses dans la mer,<br />

et il éleva <strong>par</strong> ce moyen <strong>de</strong>ux, môles<br />

jusqu'à la surface <strong>de</strong> l'eau, au-<strong>de</strong>ssus<br />

<strong>de</strong>squels il posa <strong>de</strong>s roches pour résister<br />

à l'impétuosité <strong>de</strong>s vagues. Ainsi, U<br />

rendit ce port extrêmement sûr même<br />

pendant l'hiver et durant les plus, furieuses<br />

tempêtes, «-«vu<br />

(i) Mêla, id. ibid.<br />

(a) Strabori, liv. X.II,p. 563.<br />

(3) Démoslh. <strong>de</strong> Bilhynie, liv. IV. apud<br />

Stephanum Byzant, verbo 'Hpa(a.<br />

(4) Procope, De JBdificirstUv. i or cb.XI.<br />

Depuis Chalcédoine jusqu'à l'embouchure<br />

du Pont-Euxin, la <strong>par</strong>tie <strong>de</strong> la<br />

côte d'Asie qui est baignée <strong>par</strong> les eaux<br />

du Bosphore se prolonge du nord au<br />

sud sans former <strong>de</strong> golfes profonds;<br />

les bâtiments peuvent cependant mouiller<br />

à Scutari, dont le port était autrefois<br />

très-fréquenté, mais qui a été comblé<br />

pendant les guerres civiles. Pierre Gilles<br />

en vit détruire les <strong>de</strong>rniers vestiges,<br />

lorsque la fille du sultan Soliman fit<br />

bâtir une mosquée sur la côte d'Asie.<br />

On voit encore dans la mer quelques<br />

pierres qui ont ap<strong>par</strong>tenu à l'ancien<br />

môle, dont la construction avait pour<br />

but d'arrêter les efforts du courant.<br />

PORT CALPÉ.<br />

La côte baignée <strong>par</strong> les eaux du Pont-<br />

Euxin n'offre aucun abri aux navires <strong>de</strong>puis<br />

l'entrée du Bosphore jusqu'au port<br />

Cal pé,. situé près <strong>de</strong> la rivière <strong>de</strong> ce<br />

nom. Etienne <strong>de</strong> Byzance nous apprend<br />

qu'il y avait également une <strong>ville</strong> <strong>de</strong><br />

Calpé; Xénophon (l) nous a fait une<br />

<strong>de</strong>scription <strong>de</strong> ce port : il est ouvert<br />

Là l'abri d'un rocher escarpé qui s'avance<br />

dans la mer, et qui a vingt aunes<br />

<strong>de</strong> haut à l'endroit le plus bas; et au<strong>de</strong>ssus<br />

un espace d'environ quatre cents<br />

pieds <strong>de</strong> large capable <strong>de</strong> loger dix mille<br />

nommes. Au-<strong>de</strong>ssous* est le port, vers<br />

l'occi<strong>de</strong>nt, avec une source qui ne tarit<br />

jamais et qui coule le long <strong>de</strong> la mer.<br />

Le cap qui forme le port Calpé s'abaisse<br />

du côté <strong>de</strong> l'est, et la côte est<br />

plate et sans acci<strong>de</strong>nt. Le fleuve Sangarius,<br />

qui se jette dans la mer un peu<br />

plus à l'est, servait aussi <strong>de</strong> port pour les<br />

barques. Mais, en réalité, après le port<br />

<strong>de</strong> Calpé, il n'y avait que celui d'Héraclée<br />

qui offrît un abri certain aux navires.<br />

Tels sont les principaux traits <strong>de</strong> la<br />

géographie et <strong>de</strong> l'histoire d'un' pays<br />

qui, à ditférentes époques, a appelé<br />

1 attention <strong>de</strong>s peuples les plus civilisés<br />

<strong>de</strong> l'Europe et la convoitise <strong>de</strong>s hor<strong>de</strong>s<br />

incultes <strong>de</strong> l'Asie. De cette monarchie<br />

bithynienne qui fut l'alliée <strong>de</strong>s plue illustres<br />

rois grecs, et dont la république<br />

romaine, à l'époque <strong>de</strong> sa puissance,<br />

envia l'héritage, il ne reste pas un<br />

monument qui puisse faire juger quels<br />

(i) Exp. CyrL, liv. VI, ch. IV.


60 ** UJ *<br />

principes avaient dirigé les artistes <strong>de</strong><br />

ce pays. 11 n'est pas probable que le<br />

style <strong>de</strong> l'architecture phrygienne, dont<br />

ou retrouve quelques exemples, ait été<br />

pratiqué longtemps <strong>par</strong> les Bithyniens,<br />

qui, voisins <strong>de</strong>s côtes <strong>de</strong> la mer, et en<br />

relations constantes avec les colonies<br />

grecques, durent suivre dans leurs arts<br />

l'impression que donnait aux peuples<br />

d'Asie le génie hellénique.<br />

Tous les monuments <strong>de</strong> l'antiquité<br />

que l'on rencontre en Bithynie sont <strong>de</strong><br />

l'époque romaine. Presque "tout ce que<br />

les princes byzantins avaient bâti avec<br />

une rapidité qui témoignait plutôt du<br />

désir <strong>de</strong> jouir vite que <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s<br />

choses durables, a été anéanti <strong>par</strong><br />

suite <strong>de</strong>s guerres, <strong>de</strong>s tremblements <strong>de</strong><br />

terre et <strong>de</strong>s renouvellements qu'a motivés<br />

une domination nouvelle. Les<br />

débris é<strong>par</strong>s <strong>de</strong> ces temps reculés, <strong>de</strong>venus<br />

plus rares <strong>de</strong> jour en jour, acquièrent<br />

encore plus <strong>de</strong> prix aux yeux <strong>de</strong><br />

1 historien qui les conserve avec respect,<br />

comme les <strong>de</strong>rniers témoins d'une brillante<br />

époque. Les contrées moins favorisées<br />

<strong>de</strong> la nature, dont les sites sauvages,<br />

hérissés <strong>de</strong> rochers, ont été<br />

dédaignés <strong>par</strong> les populations mo<strong>de</strong>rnes,<br />

nous offriront une plus ample moisson<br />

d'antiquités; mais nous avons cru <strong>de</strong>voir<br />

recueillir scrupuleusement les monuments<br />

byzantins <strong>de</strong> Bithynie, qui<br />

ne brillent pas <strong>par</strong> la perfection du<br />

style, mais qui se rattachent <strong>par</strong> <strong>de</strong>s<br />

liens précieux à notre histoire nationale.<br />

CHAPITRE IV.<br />

NICOMÉniE MÉTROPOLE.<br />

M AST A CDS. OLlîIÀ.<br />

Lorsque les premiers colons grecs<br />

arrivèrent sur les côtes d'Asie, ils choisirent<br />

les sites les plus favorables pour<br />

le développement du commerce et <strong>de</strong><br />

l'agriculture. Les Mégariens remontèrent<br />

la Proponti<strong>de</strong> et s'établirent au<br />

fond d'un vaste golfe situé à l'entrée du<br />

Bosphore <strong>de</strong> Thrace.<br />

H ASTACUS.<br />

Tous ces lieux étaient alors sans nom ;<br />

le <strong>chef</strong> <strong>de</strong> la colonie, nommé Astacus, his<br />

d'Olbia, qui en sa qualité <strong>de</strong> navigateur<br />

fut déclaré fils <strong>de</strong> Neptune, fonda une vil le<br />

à laquelle il donna son nom, et le golfe<br />

lui-même prit le nom <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>. Les<br />

Mégariens arrivèrent en Asie vers le<br />

commencement <strong>de</strong> la dix-septième olympia<strong>de</strong>,<br />

c'est-à-dire sept cent douze ans<br />

avant J.-C. Memnon (1) rapporte le]<br />

passage suivant : « Astacus était habitée<br />

<strong>par</strong> une colonie <strong>de</strong> Mégariens au commencement<br />

<strong>de</strong> la dix-septième olympia<strong>de</strong>;<br />

ils donnèrent à la <strong>ville</strong> le nom<br />

d'Astacus pour obéir à l'oracle, en mémoire<br />

d'un certain Astacus, l'un <strong>de</strong>s<br />

S<strong>par</strong>tes habitant <strong>de</strong> Tlièbes. » Si en effet<br />

la <strong>ville</strong> d'Astacus fut détruite <strong>par</strong> Lysimaque,<br />

elle ne dura que pendant une<br />

pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> quatre cents ans, et les<br />

nabi rants furent transportés à Nicomédie<br />

<strong>par</strong> le fondateur <strong>de</strong> cette nouvelle<br />

<strong>ville</strong> (2). La prospérité<strong>de</strong> la colonie naissante<br />

ne tarda pas à porter ombrage aux<br />

<strong>chef</strong>s indigènes, qui attaquèrent et soumirent<br />

les nouveaux colons. Dédalsès,<br />

le <strong>chef</strong> <strong>de</strong> la dynastie bifhynienne,<br />

incorpora dans ses États les <strong>de</strong>ux <strong>ville</strong>s<br />

grecques, et Astacus tomba sous les<br />

coups <strong>de</strong> Lysimaque pendant la guerre<br />

que ce prince livra à Zipœtès. Cet événement<br />

doit être placé entre 328 et 324<br />

av. J.-C., cette <strong>de</strong>rnière date étant celle<br />

<strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> Lysimaque. Le successeur<br />

<strong>de</strong> Zipœtès, Nicomè<strong>de</strong> I er , appela<br />

dans la nouvelle capitale qu'il venait<br />

<strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r les débris <strong>de</strong> la population<br />

d'Astacus; ce qui n'empêcha pas cette<br />

<strong>ville</strong> <strong>de</strong> se relever en <strong>par</strong>tie <strong>de</strong> ses ruines,<br />

tout en laissant à Nicomédie la suprématie<br />

qu'elle avait conquise.<br />

Pausanias (3), en décrivant les objets<br />

d'art conservés dans l'enceinte d'Olympie,<br />

mentionne une statue d'ivoire<br />

<strong>de</strong> Nicomè<strong>de</strong> 1 er , roi <strong>de</strong> Bithynie « qui<br />

a donné son nom à la plus gran<strong>de</strong> <strong>ville</strong><br />

<strong>de</strong> ce royaume, car Nicomédie s'appelait<br />

anciennement Astacus ».<br />

C'est du moins l'opinion <strong>de</strong> Strabon ;<br />

mais il n'en est pas moins vrai que<br />

longtemps après cette époque Astacus<br />

est mentionnée <strong>par</strong> plusieurs auteurs<br />

comme existant sur le rivage du golfe<br />

Astacène concurremment avec Nicomédie;<br />

ce fait est facile à expliquer en<br />

(i) Memuou apud Pbolium, ch. XXI.<br />

(a) Strabon, XII, 563.<br />

(3) Liv. V, ch. ia.<br />


disant qu'Astacus s'est relevée <strong>de</strong> ses<br />

ruines après la mort <strong>de</strong> Lysimaque.<br />

Du temps <strong>de</strong> Constantin Porphyrogénète,<br />

Astacus est mentionnée <strong>par</strong>mi<br />

les <strong>ville</strong>s encore existantes: t° Nicomédie<br />

métropole...; 4° Astacus.Pomponius<br />

Mêla, après avoir décrit le golfe <strong>de</strong><br />

Cius, poursuit en ces termes : « L'autre<br />

golfe, qu'on appelle Olbianus, porte sur<br />

son promontoire un temple <strong>de</strong> Neptune,<br />

et dans son enfoncement Astacus, <strong>fondée</strong><br />

<strong>par</strong>ies Mégariens. » Ce promontoire<br />

est le cap Posidium, aujourd'hui Bouz<br />

bouroun (le cap <strong>de</strong> la Glace), ainsi appelé<br />

non pas <strong>par</strong>ce qu'il y fait plus froid<br />

que dans le voisinage, mais <strong>par</strong>ce que<br />

c'est en ce lieu qu'on embarquait pour<br />

Constantinople les provisions déneige recueillies<br />

dans l'Olympe; c'est donc dans<br />

le voisinage <strong>de</strong> ce cap qu'il faut chercher<br />

l'emplacement encore inconnu <strong>de</strong> l'ancienne<br />

Astacus, et sur cette côte aucune<br />

localité ne <strong>par</strong>aît avoir mieux convenu<br />

à l'assiette d'une <strong>ville</strong> antique que le<br />

site <strong>de</strong>.Kara Moursal.<br />

OLBIf.<br />

Une autre <strong>ville</strong> du nom d'Olbia fut<br />

également <strong>fondée</strong> <strong>par</strong> les Mégariens;<br />

elle prit son nom <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong> leur<br />

<strong>chef</strong>, et le golfe fut indifféremment désigné<br />

<strong>par</strong> les Grecs sous les noms <strong>de</strong><br />

golfe d'Olbia ou d'Astacus. L'examen<br />

attentif <strong>de</strong> ces côtes ne saurait conduire<br />

à reconnaître le site <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>; car ce<br />

golfe attira, pendant tout le cours <strong>de</strong><br />

l'empire byzantin, une population nombreuse,<br />

et un nombre considérable <strong>de</strong><br />

<strong>ville</strong>s, <strong>de</strong> forteresses et <strong>de</strong> châteaux couvrirent<br />

ses rivages.<br />

Scylax ne fait aucune mention d'Astacus<br />

et ne <strong>par</strong>le que <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> d'Olbia<br />

et du golfe-Olbianus. On peut inférer<br />

<strong>de</strong>s documents é<strong>par</strong>s qui nous restent<br />

sur ces <strong>de</strong>ux cités qu'Astacus, <strong>fondée</strong><br />

<strong>par</strong> les Mégariens, vit bientôt sa population<br />

s'augmenter <strong>par</strong> l'arrivée <strong>de</strong> colons<br />

athéniens qui se fondirent dans<br />

la population bithynienne en- allant<br />

s'établir à Nicomédie.<br />

Ammien Marcellin (1) est du nombre<br />

les historiens qui ne font d'Astacus et<br />

(i) Liv. XXII et Trebell. Pollio in Hist.<br />

4ugt<br />

«j?5**? r * *"*»**vt».<br />

ASIE MINEURE. 61<br />

i<br />

<strong>de</strong> Nicomédie qu'une seule et même<br />

<strong>ville</strong>. Ptolémée (1) fait aussi une distinction<br />

entre Astacus et Olbia. Nous<br />

<strong>de</strong>vons en conclure que, malgré les<br />

assertions contraires <strong>de</strong>s historiens romains<br />

, il y eut dans le golfe Astacène<br />

trois <strong>ville</strong>s qui chacune à son tour acquirent<br />

une certaine renommée et dont<br />

les populations vinrent se fondre dans<br />

celle <strong>de</strong> Nicomédie qui resta seule en<br />

possession <strong>de</strong> donner son nom au vaste<br />

golfe dont elle occupe l'extrémité.<br />

Le cap Posidium formait la pointe<br />

sud du golfe Astacène; le cap Acritas<br />

formait la pointe nord : c'est là que<br />

commence le Bosphore. Ce cap s'appelle<br />

aujourd'hui Fanar Baghtehési (le fanal<br />

du Jardin) ; il y a un petit phare pour<br />

signaler l'entrée du golfe.<br />

WICOMÉniE.<br />

Le titre <strong>de</strong> fondateur d'une <strong>ville</strong><br />

était tellement recherché que le premier<br />

soin d'un prince vainqueur ou<br />

puissant était <strong>de</strong> supprimer le nom <strong>de</strong>s<br />

<strong>ville</strong>s déjà existantes et <strong>de</strong> le remplacer<br />

<strong>par</strong> le sien propre. Le même sort est<br />

arrivé à Nicomédie, <strong>fondée</strong> <strong>par</strong> le Thrace<br />

Zipœtès, père <strong>de</strong> Nicomè<strong>de</strong>. Ce <strong>de</strong>rnier<br />

prince, avant <strong>de</strong> faire une secon<strong>de</strong><br />

dédicace <strong>de</strong> la nouvelle capitale<br />

<strong>de</strong> son royaume, offrit un sacrifice<br />

pour se rendre les dieux favorables, et<br />

les prêtres lui annoncèrent, d'après jes<br />

présages <strong>de</strong>s victimes, que la <strong>ville</strong> dont<br />

il allait jeter les fon<strong>de</strong>ments serait une<br />

<strong>de</strong>s plus gran<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s plus florissantes<br />

<strong>de</strong> l'Asie, et que la durée en serait<br />

éternelle (2). Une statue d'ivoire, représentant<br />

Nicomè<strong>de</strong>, fut élevée sur la place<br />

principale; c'est cette même statue que<br />

Trajan transporta à Rome (3).<br />

Suivant l'usage presque général dans<br />

l'antiquité, <strong>de</strong> placer les <strong>ville</strong>s sur <strong>de</strong>s<br />

hauteurs, Nicomédie fut bâtie sur une<br />

<strong>de</strong>s collines qui entourent le golfe.<br />

On voit encore dans la <strong>par</strong>tie la plus<br />

élevée une suite <strong>de</strong> murailles flanquées<br />

<strong>de</strong> tours, qui <strong>par</strong>aissent avoir ap<strong>par</strong>tenu<br />

à l'ancienne cité, et qui plus tard servirent<br />

d'acropole à la <strong>ville</strong> bithynienne,<br />

(i) Liv. V, eh. i.<br />

(a) Libanius, t. II.<br />

(3) Pausanias, lib. Y, en. 12,


62 , L'UNIVERS.<br />

lorsqu'elle fut arrivée aü plus haut <strong>de</strong>gré Près toj^Muàhtm qui<br />

<strong>de</strong> DrosDérité Une gran<strong>de</strong> portion <strong>de</strong> est occupé aujourd nu <strong>par</strong> i arsenal, on<br />

ces S X " s'élèvi à plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux voit les tfébris d'un mol«JOUI, semblable a<br />

& ï U i sol P Les tours, celui <strong>de</strong> Pouzzoles, ^ » ^ a ^<br />

<strong>de</strong>mi-circulaires, sont construites en comme ^ P ^ Ä . <br />

oierres <strong>de</strong> petit ap<strong>par</strong>eil, qui indiquent Romains avait pour but <strong>de</strong> laisser un<br />

S S n ouvrage Liain5\nato passage ^^^J^^ m à^<br />

les soubassements sont formés d'é- entraînant avec^euxdui sablei et du Iinormes<br />

blocs <strong>de</strong> pierre calcaire, restes mon auraientbento.comb e les ports<br />

<strong>de</strong> la construction primitive. Ces mu- exposés a leur action. Ce môle était bâti<br />

railles <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt dans l'intérieur <strong>de</strong> <strong>de</strong> briques et couronne <strong>de</strong> larges assises<br />

la <strong>ville</strong> mo<strong>de</strong>rne. On les reconnaît fa- <strong>de</strong> pierre. Les piles <strong>de</strong>s arches sufficilement<br />

au milieu <strong>de</strong>s maisons ; Nico- saient pour rompre 1 impétuosité <strong>de</strong>s<br />

médie étant <strong>fondée</strong> sur une colline <strong>de</strong> vagues. Les débris <strong>de</strong> cette construction<br />

<strong>de</strong> erès, elles ne peuvent se confondre sont encore baignés <strong>par</strong> les eaux <strong>de</strong> la<br />

avec les roches naturelles. mer; mais la portion la plus consi<strong>de</strong>-<br />

En <strong>de</strong>scendant du côté ouest <strong>de</strong> la rable se trouve au milieu dun terrain<br />

colline principale, les murailles se per- qui n'existait pas du temps <strong>de</strong> lan-j<br />

<strong>de</strong>nt bientôt au milieu <strong>de</strong>s jardins et cienne Nicomedie. En effet, le golfe<br />

<strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> maisons. Cependant, <strong>de</strong> d'Astacus est soumis aux mêmes lois<br />

distance en distance, on remarque <strong>de</strong>s que tous les autres golfes qui coromumurs<br />

<strong>de</strong> soutènement construits en niquent avec <strong>de</strong>s plaines. Des atterrisgrands<br />

blocs, qui formaient sans doute sements considérables ont été formés<br />

<strong>de</strong> magnifiques terrasses sur lesquelles <strong>par</strong> les eaux <strong>de</strong>s torrents, qui ont charrié^<br />

étaient situées les habitations. Le <strong>de</strong>r- les terres sur lesquelles sont bâtis<br />

nier mur <strong>de</strong> ce genre est au pied <strong>de</strong> la maintenant les arsenaux <strong>de</strong> la <strong>ville</strong><br />

colline <strong>de</strong> l'ouest. Il était à cette époque turque.<br />

situé au bord <strong>de</strong> la mer; il est bâti <strong>de</strong> Non loin du môle, et sur la <strong>de</strong>rbricmes,<br />

et soutenu, <strong>de</strong> trois mètres en nière terrasse, se trouve une constructrois<br />

mètres, <strong>par</strong> <strong>de</strong> grands contre-forts tion dont la <strong>de</strong>stination n'est pas facile<br />

<strong>de</strong> pierre, entre lesquels s'ouvraient à expliquer. C'est une plate-forme dont<br />

les égouts, qui étaient aussi au bord <strong>de</strong> l'élévation varie <strong>de</strong> cinq à <strong>de</strong>ux mètres,<br />

la mer. Ces égouts sont encore en <strong>par</strong>- sur la pente du terrain. Elle est bâtie<br />

fait état <strong>de</strong> conservation, et annoncent en grands blocs <strong>de</strong> pierre, ap<strong>par</strong>eillés<br />

les débris d'une opulente et vaste cité., avec le plus grand soin, et forme un<br />

Ce sont <strong>de</strong> grands canaux dans lesquels carré <strong>de</strong> vingt et un mètres cinquante<br />

un homme peut marcher <strong>de</strong>bout. Ils centimètres <strong>de</strong> côté, sur trois <strong>de</strong>squels<br />

pénètrent horizontalement dans Pinte- sont placés <strong>de</strong>s avant-corps carrés. On<br />

rieur <strong>de</strong>s terres. On conçoit, pour la ne voit aucune trace <strong>de</strong> porte ni d'es<strong>ville</strong><br />

<strong>de</strong> Nicomedie, la nécessité d'avoir calier autour <strong>de</strong> ce massif qui est assez<br />

eu <strong>de</strong>s égouts nombreux et bien entre- bien conservé. Le couronnement est<br />

tenus. Située sur la pente d'une colline formé <strong>de</strong> grosses pierres portant une|<br />

, rapi<strong>de</strong>, sur un terrain très-ondulé, elle moulure et percées d'un trou carré,<br />

eut été exposée aux ravages <strong>de</strong>s eaux comme si elles avaient dA supporter,<br />

pluviales, comme on le remarque au- une grille. Sa situation dominant la]<br />

jourd nid dans la <strong>ville</strong> mo<strong>de</strong>rne. baie conviendrait beaucoup à un temple; |<br />

Par la seule observation <strong>de</strong> ses mu- mais ce terre-pleiu <strong>par</strong>aît avoir été<br />

railles et <strong>de</strong>s rares débris <strong>de</strong> l'ancienne primitivement inaccessible <strong>de</strong> tous côtés,<br />

<strong>ville</strong>, on peut rapporter les ruines <strong>de</strong> Ni- Etait-ce le pié<strong>de</strong>stal <strong>de</strong> quelque colosse<br />

comédie à trois époques différentes, l'é- ou <strong>de</strong> quelque trophée, c'est ce qu'il]<br />

poque <strong>de</strong> la Bithynie indépendante, l'é- est impossible <strong>de</strong> déci<strong>de</strong>r. ^<br />

poqueromaineetl'époquebyzantine. Ni- La <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nicomedie fut richement<br />

comédie ne resta pas longtemps au haut dotée <strong>par</strong> les rois <strong>de</strong> Bithynie (1). Nico*<br />

<strong>de</strong> la colline ; ses habitants se portèrent<br />

ffift VerS !?i mer ° Ù ? eS W* Ammien Marcellm lui donne le til J<br />

laient le commerce et la navigation. <strong>de</strong> mère <strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s <strong>de</strong> Biihvnie (liv. %vwj


mè<strong>de</strong> l'orna <strong>de</strong> monuments somptueux<br />

et l'éclat <strong>de</strong> sa cour attira dans ses États<br />

non-seulement les princes ses 'voisins,<br />

mais séduisit le plus illustre <strong>de</strong>s Romains,<br />

qui dut regretter plus d'une fois<br />

letroplongséjourqu'ilfitchezNicomè<strong>de</strong>.<br />

Les empereurs romains, maîtres <strong>de</strong><br />

la Bithynie, traitèrent les habitants<br />

plutôt en alliés qu'en peuples conquis.<br />

Des routes somptueuses furent ouvertes<br />

dans toutes les directions, <strong>de</strong>s<br />

ports furent creusés, <strong>de</strong>s canaux même<br />

entrepris pour mettre les provinces<br />

en rapport direct avec les <strong>ville</strong>s maritimes.<br />

L'exploitation <strong>de</strong>s -forêts qui<br />

couvraient la Bithynie fut un <strong>de</strong>s points<br />

qui attirèrent le plus l'attention <strong>de</strong>s<br />

préteurs. Le luxe <strong>de</strong>s constructions<br />

commençait à se répandre dans Rome,<br />

et l'Europe ne suffisait plus à fournir<br />

les matériaux précieux dont les patriciens<br />

embellissaient leurs riches villas.<br />

L'ile <strong>de</strong> Proconnèse offrait une mine<br />

inépuisable <strong>de</strong> marbre blanc; mais la<br />

passion <strong>de</strong>s roches précieuses et rares<br />

augmentait à mesure qu'elle se trouvait<br />

satisfaite. Les arsenaux <strong>de</strong> Nicomédiè,<br />

riches en matières premières, fournissaient<br />

<strong>de</strong>s navires qui transportaient<br />

jusqu'en Italie les marbres <strong>de</strong> prix, les<br />

jaspes colorés et les métaux qui servaient<br />

pour la décoration. Nicomédiè<br />

profitait, pour ses constructions, du<br />

voisinage <strong>de</strong> tant <strong>de</strong>, carrières magnifiques<br />

: le mont Dindymène <strong>de</strong> Cyzique<br />

lui fournissait <strong>de</strong>s granits, la vallée du<br />

Sangarius <strong>de</strong>s jaspes, les terrains volcaniques<br />

<strong>de</strong> Lybissa <strong>de</strong>s matériaux plus<br />

grossiers, mais non moins soli<strong>de</strong>s. La<br />

pierre calcaire employée dans les constructions<br />

était tirée <strong>de</strong>s montagnes qui<br />

sont en face, <strong>de</strong> l'autre côté du golfe.<br />

car le sol <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> et les environs ne<br />

sont composés que <strong>de</strong> grès.<br />

Pline, nommé préteur <strong>de</strong> Bithynie<br />

sous le règne <strong>de</strong> Trajan, <strong>par</strong>le avec les<br />

plus grands éloges <strong>de</strong> Nicomédiè (1),<br />

ch. XIII), et Pline l'appelle 1» <strong>ville</strong> illustre<br />

(liv. Y, in fine).<br />

(i) Lorsque la Bithynie fut réduite en<br />

province romaine, Nicomédiè <strong>de</strong>vint le siège<br />

<strong>de</strong>s gouverneurs, dont quelques-uns lui procurèrent<br />

<strong>de</strong> grands avantages. Pline l'orna<br />

d'une place publique et y construisit un<br />

aqueduc. Lettres i6, 40, 4*, 5o.<br />

ASIE MINEURE. 63<br />

qui avait reçu <strong>de</strong>s embellissements considérables<br />

, et l'on voib dans ses lettres<br />

à l'empereur quelle était sa sollicitu<strong>de</strong><br />

pour le bien-être <strong>de</strong> la province qu'il<br />

administrait. Parmi les projets <strong>de</strong> travaux<br />

publics que le préteur <strong>de</strong> Bithynie<br />

soumettait à Trajan, il en est un qui est<br />

exposé en détail dans une <strong>de</strong> ses lettres<br />

à l'empereur (1 ). Pline songeait à joindre<br />

à la mer <strong>par</strong> un canal le lac <strong>de</strong> Sabandja,<br />

éloigné <strong>de</strong> Nicomédiè d'une distance<br />

d'environ trente kilomètres; d'autre<br />

<strong>par</strong>t ce lac aurait pu être joint au fleuve<br />

Sangarius, et la navigation aurait pu se<br />

faire directement entre la mer Noire et<br />

le golfe <strong>de</strong> Nicomédiè sans avoir à passer<br />

le Bosphore. Le chemin était abrégé <strong>de</strong><br />

tout le circuit <strong>de</strong> la presqu'île <strong>de</strong>s Thyniens.<br />

Ce projet avait reçu <strong>de</strong> la <strong>par</strong>t<br />

d'un roi <strong>de</strong> Bithynie un commencement<br />

d'exécution ; mais il <strong>par</strong>aît, malgré l'approbation<br />

que Trajan envoie à Pline (2),<br />

qu'aucun travail ne fut exécuté.<br />

Pendant que Pline visitait quelques<br />

<strong>ville</strong>s <strong>de</strong> son gouvernement, un violent<br />

incendie éclata à Nicomédiè et détruisit<br />

non-seulement, plusieurs maisons <strong>par</strong>ticulières,<br />

mais encore <strong>de</strong>ux édifices<br />

publics, le temple d'Isis et la Gérousie<br />

ou palais du sénat. A cette occasion<br />

Pline proposé à Trajan d'établir une<br />

communauté <strong>de</strong> surveillants pour prévenir<br />

les incendies; mais l'empereur,<br />

auquel les conférences <strong>de</strong>s chrétiens<br />

étaient déjà suspectes, refuse l'autorisation,<br />

en faisant remarquer combien<br />

cette province à déjà été troublée <strong>par</strong><br />

<strong>de</strong>s sociétés <strong>de</strong> ce genre (3). En effet,<br />

à peine les premiers chrétiens eurent-ils<br />

prêché la doctrine du Christ<br />

dans ces contrées, que <strong>de</strong> nombreux<br />

a<strong>de</strong>ptes se réunirent à eux. Pline, qui<br />

résidait à Nicomédiè, usa avec modération<br />

du pouvoir que lui donnait l'empereur<br />

pour poursuivre les sectateurs<br />

<strong>de</strong> la nouvelle doctrine.<br />

Il mentionne dans ses lettres les<br />

bains, les aqueducs, les forums et les<br />

temples qu'elle renfermait. C'est à cette<br />

époque que Nicomédiè fut ravagée <strong>par</strong><br />

le terrible incendie qui détruisit ses<br />

monuments publics. Soit <strong>par</strong> flatterie,<br />

(1) Pline le Jeune, liv. X, let. L.<br />

(a) Ibid., let. LI.<br />

(3) Plin. liv. X, lett. XLH, XLUI.


64 L'UNI<br />

soit <strong>par</strong> reconnaissance, c'était un<br />

usage répandu dans toutes les <strong>ville</strong>s<br />

<strong>de</strong> l'Asie Mineure d'élever <strong>de</strong>s temples<br />

en l'honneur <strong>de</strong>s empereurs. Nicomédie<br />

obéit au mouvement général;<br />

mais le sénat, pour donner plus <strong>de</strong><br />

prix à une <strong>par</strong>eille faveur, ne l'accordait<br />

qu'avec une extrême réserve.<br />

Aussi Dion (l) fait-il remarquer comme<br />

une preuve du grand crédit <strong>de</strong> Soater,<br />

natif <strong>de</strong> Nicomédie et favori <strong>de</strong> Commo<strong>de</strong><br />

, la permission qu'il obtint pour<br />

sa <strong>ville</strong> natale <strong>de</strong> faire élever un temple<br />

à l'empereur, et <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s jeux et<br />

<strong>de</strong>s combats en son honneur. Sur un<br />

morceau <strong>de</strong> frise richement orné, on<br />

lit encore quelques lettres qui semblent<br />

être la fin du mot ANTONINUS. Il serait<br />

possible que ce fût un débris du temple<br />

<strong>de</strong> Commo<strong>de</strong>. Ce prince a reçu, en effet<br />

, dans plusieurs capitales <strong>de</strong> l'empire<br />

les honneurs divins.<br />

Dans la lutte qui s'engagea entre<br />

Septime-Sévère et Niger, la <strong>ville</strong> prit<br />

<strong>par</strong>ti pour le premier. Elle resta toujours<br />

fidèle à l'empereur, et <strong>par</strong>mi les<br />

monuments <strong>de</strong> son règne on trouve<br />

une portion d'inscription qui doit avoir<br />

ap<strong>par</strong>tenu à une statue élevée en l'honneur<br />

<strong>de</strong> ce prince <strong>par</strong> ordre <strong>de</strong> son fils<br />

Caracalla; elle est gravée sur un pié<strong>de</strong>stal<br />

dont la <strong>par</strong>tie inférieure manque;<br />

mais on peut la restituer d'après une<br />

inscription i<strong>de</strong>ntique qui existe dans les<br />

ruines <strong>de</strong> Synnada. Ces monumentssont<br />

postérieurs à la prise <strong>de</strong> Ctésiphon <strong>par</strong><br />

Sévère.<br />

A la bonne Fortune, la <strong>ville</strong> (honore)<br />

l'empereur César Manc Aurèle Antonin Auguste,<br />

pieux, sébaste, la n e année <strong>de</strong> sa<br />

puissance tribunitienne, consul, sous l'empereur<br />

CésarSeptime Sévère, pieux, Pertiuax,<br />

auguste, vainqueur <strong>de</strong> l'Arabie, <strong>de</strong> l'Adia-<br />

Jiène, <strong>de</strong>s Parihes, très-puissant et maître<br />

<strong>de</strong> la terre et <strong>de</strong> la mer.<br />

Cette inscription est <strong>de</strong> l'an 202 <strong>de</strong><br />

notre ère. l'année du premier consulat<br />

<strong>de</strong> Caracalla, et la onzième <strong>de</strong>puis que<br />

son père Pavait associé à l'empire.<br />

Héliogabale (218) <strong>par</strong>tant d'Antioche<br />

pour se rendre à%Rome s'arrêta à Nicomédie,<br />

où il passa l'hiver qui suivit<br />

son élection.<br />

Nicomédie rut le séjour favori <strong>de</strong><br />

(i) In Commodo,<br />

Dioclétien, qui songeait déjà sérieusement<br />

à créer en Orient une secon<strong>de</strong><br />

métropole; mais l'activité qu'il dé-1<br />

ploya pour augmenter et embellir cette<br />

<strong>ville</strong>, se changea bientôt en vexations,<br />

que sa cupidité rendait encore plus intolérables.<br />

Lactance s'est plu à recueillir<br />

tous les actes odieux reprochés à Dioctétien<br />

à cause <strong>de</strong> son goût désordonné<br />

pour <strong>de</strong>s constructions faites sans but<br />

et sans projet arrêté; car chaque jour<br />

il donnait I ordre <strong>de</strong> démolir <strong>de</strong>s édifices<br />

construits ou à peine achevés pour<br />

les remplacer <strong>par</strong> d'autres. Le goût <strong>de</strong>s<br />

jeux du cirque s'était répandu au point<br />

que pas une <strong>ville</strong> ne voulait être privée<br />

<strong>de</strong> cette jouissance. Dioclétien fit bâtir<br />

un hippodrome somptueux qui n'existe<br />

plus <strong>de</strong> nos jours, <strong>par</strong>ce que <strong>de</strong> tout<br />

temps cette <strong>ville</strong> ayant été florissante,<br />

les matériaux <strong>de</strong> marbre <strong>de</strong>s monuments<br />

furent taillés à nouveau pour<br />

être employés dans d'autres édifices.<br />

Un hôtel <strong>de</strong>s iribnnaies, un arsenal,<br />

<strong>de</strong>s fabriques d'armes, <strong>de</strong>s palais pour<br />

sa femme et pour sa fille, furent élevés<br />

<strong>par</strong> ses ordres, et les habitants, appelés<br />

<strong>par</strong> corvée, travaillaient à leurs<br />

frais à ces constructions gigantesques,<br />

qui ne s'élevaient qu'aux dépens <strong>de</strong>s<br />

habitations <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>. Tous ces édifices,<br />

construits à la hâte, ne résistèrent<br />

pas à l'effort <strong>de</strong>s siècles. 11 est même<br />

probable que, pour la plu<strong>par</strong>t, ils ne<br />

furent pas achevés. Dioclétien, en<br />

quittant la rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Nicomédie,<br />

coupa court à une fortune aussi inä<br />

prévue. La cérémonie <strong>de</strong> son abdication!<br />

eut lieu l'an 305 <strong>de</strong> J.-C, dans la gran<strong>de</strong><br />

plaine située à l'est <strong>de</strong> Nicomédie. Il<br />

monta immédiatement en litière, et sel<br />

retira à Salone pour y finir ses jours.<br />

Ce fut à Nicomédie, en 303, que<br />

commença la persécution contre les<br />

chrétiens. Galerius vint trouver l'empereur<br />

dans cette <strong>ville</strong>, et obtint, <strong>par</strong><br />

ses instances, que les moyens les plus!<br />

-rigoureux seraient mis en usage pour<br />

forcer les fidèles à abandonner leur foi.<br />

L'église cathédrale fut le premier édifice<br />

qui supporta la fureur du peuple :<br />

on enfonça les portes, on livra au<br />

pillage tous les meubles et les livres<br />

qu'il contenait, et peu s'en fallut qu'il<br />

ne tût incendié; la crainte <strong>de</strong> voir le feu<br />

se propager au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> l'enceinte <strong>de</strong><br />

I


Hl l'édifice sacre put seule empêcher l'em-<br />

11 pereur d'exécuter son <strong>de</strong>ssein. L'évéque<br />

M saint Anthyme eut la tête tranchée. On<br />

Il trouve dans une église grecque <strong>de</strong> la<br />

il Mysie une inscription que nous rap-<br />

' porterons quand nous examinerons<br />

il cette province, et dans laquelle est<br />

rjl mentionné un évêque du même nom<br />

qui administrait le diocèse <strong>de</strong> Scamandria.<br />

Engagée daus la guerre entre les Romains<br />

et les Perses, iNicomédie souffrit<br />

' <strong>de</strong>s maux inouïs lorsque les <strong>de</strong>rniers<br />

' vinrent assiéger Chalcedoine (1). Quelle<br />

ques années plus tard, lesGoths, arrif<br />

vant <strong>par</strong> le canal du Bosphore,'s'em-<br />

I <strong>par</strong>èrent <strong>de</strong> Chalcedoine (2), et cette<br />

[ conquête inattendue leur fournit <strong>de</strong>s<br />

I armes et <strong>de</strong>s provisions <strong>de</strong> toute espèce.<br />

De là ils marchent sur Nicomé-<br />

W' die, et, guidés <strong>par</strong> un transfuge, ils<br />

<strong>par</strong>viennent à se rendre maîtres <strong>de</strong> la<br />

place. Tout ce que cette <strong>ville</strong> renfermait<br />

N| <strong>de</strong> richesses tomba en leur pouvoir; les<br />

[ monuments publics furent livrés aux<br />

Wk flammes, et ce que le feu ne détruisit<br />

|1 pas fut rasé quelque temps après,<br />

HI lorsque les barbares se trouvèrent obli-<br />

I gés <strong>de</strong> lever le siège <strong>de</strong> Cyzique.<br />

Cependant tous ces désastres étaient<br />

Epi facilement ré<strong>par</strong>és; car, malgré les<br />

NiJ expressions exagérées <strong>de</strong>s historiens,<br />

I il est probable que les <strong>ville</strong>s dont ils<br />

lui mentionnent la <strong>de</strong>struction n'étaient<br />

«I pas complètement ruinées; mais lorsque<br />

kl les phénomènes naturels se joignirent à<br />

il tant d'invasions et <strong>de</strong> revers, INicomédie<br />

I vit sa fin approcher, et tout le luxe <strong>de</strong><br />

û\ ses édifices dis<strong>par</strong>ut en un seul jour,<br />

111 anéanti <strong>par</strong> un terrible tremblement <strong>de</strong><br />

sen terre. En examinant la nature <strong>de</strong> la<br />

t H contrée, on est d'autant plus étonné<br />

(B I <strong>de</strong> voir qu'elle ait souffert <strong>de</strong> si violes<br />

lentes secousses, que rien, dans ses<br />

ni! environs, ne décèle une gran<strong>de</strong> force<br />

* <strong>de</strong>s feux souterrains, à peine si l'on<br />

«Il voit près <strong>de</strong> la mer quelques affleureor<br />

y ments <strong>de</strong> terrains volcaniques. Ce fut<br />

11 dans le quatrième siècle que la <strong>ville</strong> eut<br />

h-1 à souffrir les plus ru<strong>de</strong>s atteintes; tous<br />

I Les écrivains du temps ont <strong>par</strong>lé <strong>de</strong><br />

u I cette catastrophe dans les termes les<br />

• plus lamentables; Libanius et Ephrem<br />

(i) Nicéphore Cal liste, VII.<br />

k I (a) Ammien Marcellin, Hv. XXII, cli. IX.<br />

i° Livraison. (ASIE MINEURE.)<br />

ASIE MINEURE. 65<br />

composèrent <strong>de</strong>s poèmes pour chanter<br />

les <strong>de</strong>rniers jours <strong>de</strong> Nicomédie.<br />

Libanius, dans sa Monodie, écrite<br />

vers l'an 354 (l), chante ainsi la ruine<br />

<strong>de</strong> Nicomédie : « INicomédie, naguère<br />

encore une <strong>ville</strong>, mais aujourd'hui<br />

rentrée dans la poussière, doit être<br />

pleurée <strong>par</strong> moi en silence. Tant d'édifices<br />

publics et privés qui faisaient l'ornement<br />

<strong>de</strong> la <strong>ville</strong> croulèrent les uns<br />

sur les autres! <strong>de</strong>puis la cita<strong>de</strong>lle jusqu'aux<br />

jardins, tout s'abîma ; les prétoires<br />

et les tribunaux, la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

temples, la masse <strong>de</strong>s thermes, le magnifique<br />

palais, et le théâtre, qui suffisait<br />

pour illustrer la <strong>ville</strong>.<br />

« Le soleil était à peine arrivé à son<br />

midi. A ce moment les dieux gardiens <strong>de</strong><br />

la <strong>ville</strong> avaient abandonné les temples,<br />

et la <strong>ville</strong> sombrait comme un navire<br />

sans pilote ; les murs tombaient sur les<br />

murs, les colonnes sur les colonnes, les<br />

toits sur les toits, les fon<strong>de</strong>ments même<br />

étaient détruits; le théâtre s'écroula<br />

le premier avec fracas. Alors l'incendie<br />

commence; les toitures propagent les<br />

flammes ; le Cirque lui-même, plus soli<strong>de</strong><br />

que les murs <strong>de</strong> Babylone, est détruit;<br />

les animaux affamés errent à l'aventure ;<br />

les portiques, les musées, le temple <strong>de</strong>s<br />

Grâces et <strong>de</strong>s Nymphes et le grand bain<br />

qui portait le nom <strong>de</strong> l'empereur (2)<br />

tous ces édifices dis<strong>par</strong>aissent, et le<br />

peuple au milieu <strong>de</strong> ces désastres erre<br />

comme <strong>de</strong>s fantômes. »<br />

La relation d'Ammien Marcellin, dans<br />

sa <strong>de</strong>scription du tremblement <strong>de</strong> terre<br />

qu'éprouva Nicomédie, nous fait connaître<br />

un grand nombre d'édifices qui<br />

seraient ignorés sans lui. « Dansces jours<br />

<strong>de</strong> désolation, dit-il, d'horribles tremblements<br />

<strong>de</strong> terre ont ravagé la Macédoine,<br />

l'Asie et le Pont, et <strong>par</strong> leurs secousses<br />

répétées ont anéanti un grand nombre<br />

<strong>de</strong> <strong>ville</strong>s et <strong>de</strong> montagnes. Et au milieu<br />

<strong>de</strong> tant d'affreuses calamités, nous <strong>de</strong>vons<br />

rappeler la ruine <strong>de</strong> INicomédie,<br />

métropole <strong>de</strong> la Bith y nie, dont je vais<br />

donner un vrai et succinct récit :<br />

« Le 24 août, à la pointe du jour,<br />

d'épais nuages s'étant rassemblés, couvrirent<br />

l'a surface du ciel, et la lumière -<br />

(t) Li barri i Monodia <strong>de</strong> Nicomedia, in<br />

oper. ed. Morelk, II, 1675.<br />

(a) Sans doute les thermes d'Antonin.<br />

T. 11. 5


66 ^ UJ *<br />

du soleil, dis<strong>par</strong>ut au point qu'on ne<br />

distinguait pas les objets les plus voisins;<br />

puis, comme si un dieu eût lance<br />

la foudre et excité les vents <strong>de</strong>s quatre<br />

coins du mon<strong>de</strong>, on entendit le bruit<br />

effrayant <strong>de</strong>s tempêtes et le fracas <strong>de</strong>s<br />

flots "débordés; à cela se joignirent <strong>de</strong>s<br />

tourbillons et <strong>de</strong>s torrents <strong>de</strong> vapeurs<br />

enflammées, avec d'affreux tremblements<br />

<strong>de</strong> terre qui renversèrent <strong>de</strong> fond<br />

en comble et la <strong>ville</strong> et les faubourgs.<br />

La plu<strong>par</strong>t <strong>de</strong>s maisons qui se trouvèrent<br />

sur le penchant <strong>de</strong>s collines tombèrent<br />

les unes sur les autres, et les<br />

échos portèrent <strong>de</strong> tous côtés le bruit<br />

<strong>de</strong> cet horrible désastre. Les sommets<br />

<strong>de</strong>s montagnes renvoyaient les cris<br />

plaintifs <strong>de</strong> ceux qui cherchaient leurs<br />

épouses, leurs enfants et leurs proches;<br />

enfin, longtemps avant la troisième<br />

heure du jour, les ténèbres étant dissipées<br />

et l'air <strong>de</strong>venu plus serein, on<br />

découvrit toute l'étendue <strong>de</strong> ces ravages.<br />

« Quelques malheureux, accablés <strong>par</strong><br />

les décombres, périrent écrasés -, d'autres,<br />

ensevelis jusqu'aux épaules, expirèrent<br />

faute <strong>de</strong> secours; ceux-ei se trou*<br />

vèrent suspendus à <strong>de</strong> hautes poutres<br />

sur lesquelles ils étaient tombés; on<br />

vit alors confondus les cadavres d'un<br />

grand nombre d'habitants que le même<br />

coup avait détruits; quelques-uns moururent<br />

<strong>de</strong> crainte et <strong>de</strong> disette dans<br />

leurs maisons ruinées. Ce fut ainsi que<br />

termina misérablement ses jours Aristenète,<br />

qui avait recherché la place <strong>de</strong><br />

vicaire du diocèse créé <strong>par</strong> Constance<br />

pour honorer la piété <strong>de</strong> sa femme Eusébie<br />

On aurait pu sauver une<br />

gran<strong>de</strong> <strong>par</strong>tie <strong>de</strong>s temples* <strong>de</strong>s maisons<br />

et <strong>de</strong>s habitants, si l'ar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s<br />

flammes, qui se répandirent aussitôt,<br />

n'eût pas, pendant cinquante jours et<br />

cinquante nuits, achevé <strong>de</strong> ruiner<br />

tout (l). »<br />

C'est à cette époque que tout ce qui<br />

restait <strong>de</strong> l'art ancien dans la <strong>ville</strong> fut<br />

entièrement détruit. On pourrait dire<br />

que Nicomédie renferme encore les<br />

preuves <strong>de</strong> ce tremblement <strong>de</strong> terre;<br />

ear ses rues et ses cimetière* sont jonchés<br />

<strong>de</strong> colonnes, <strong>de</strong> débris d'architraves<br />

et <strong>de</strong> fragments informes.<br />

(ï) Amin, Marcel!., lib. XVII, cap. VII.<br />

Ce ne fut guère que sous le règne <strong>de</strong><br />

Justinien, vers le milieu du sixième<br />

siècle, que Nicomédie vit renaître une<br />

<strong>par</strong>tie <strong>de</strong> sa prospérité passée (1). Procope<br />

s'étend avec complaisance sur les<br />

nombreux monuments dont l'empereur<br />

dota cette <strong>ville</strong> : c'étaient encore <strong>de</strong>s<br />

bains, <strong>de</strong>s aqueducs et <strong>de</strong>s églises;<br />

mais aucun <strong>de</strong> ces édifices n'a subsisté<br />

jusqu'à nous, et nous <strong>de</strong>vons chercher<br />

au milieu <strong>de</strong>s jardins <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> turque<br />

les débris d'une -cité qui fut si puis»,]<br />

santé.<br />

Sous le rapport <strong>de</strong> l'antiquité, on<br />

ne saurait espérer faire <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s dé- \<br />

couvertes dans une <strong>ville</strong> qui a supporté<br />

<strong>de</strong> si déplorables catastrophes. 11 ne<br />

reste plus rien <strong>de</strong> ces temples, <strong>de</strong> ces]<br />

portiques si nombreux. A l'orient <strong>de</strong> J<br />

la <strong>ville</strong>, vers le quartier appelé Ze'u\<br />

toun, Mahallé-si, et dans le lieu<br />

nommé Imbaher, au milieu <strong>de</strong>s terrains!<br />

du cimetière juif, se trouvent les ruines<br />

d'une gran<strong>de</strong> citerne qui fournissait <strong>de</strong><br />

l'eau à l'ancienne <strong>ville</strong>. Elle est composée<br />

<strong>de</strong> trente-six piliers portant <strong>de</strong>s]<br />

arca<strong>de</strong>s surmontées <strong>de</strong> voûtes en pen<strong>de</strong>ntifs.<br />

Toute la construction est <strong>de</strong><br />

briques : les impostes seules sont d'une<br />

espèce <strong>de</strong> grès volcanique. La surface!<br />

<strong>de</strong> cette citerne est <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux cent cinquante<br />

mètres carrés; elle contenait]<br />

quinze cents mètres cubes d'eau. Pline]<br />

avait trouvé une source considérable]<br />

qu'il proposait à l'empereur d'utiliser |<br />

pour l'usage <strong>de</strong>s habitants, en la con-l<br />

nuisant à la <strong>ville</strong> au moyen d'un ou-l<br />

vrage voûté (arcuato opère), et il<br />

tenait <strong>par</strong>ticulièrement à maintenir lel<br />

niveau <strong>de</strong> la source, afin que les quartiers<br />

élevés pussent en profiter également.<br />

Il proposait, pour cela, <strong>de</strong> restaurer<br />

un aqueduc qui avait coûté aux<br />

habitants trois millions trois cent vingt*!<br />

neuf mille sesterces (644,993 francs) tï<br />

et qui était resté im<strong>par</strong>fait (2). On ne voit<br />

plus <strong>de</strong> traces <strong>de</strong> ce monument ; mais la<br />

position <strong>de</strong> cette citerne, à mi-côte II<br />

donne lieu <strong>de</strong> penser qu'elle a reçu les<br />

eaux <strong>de</strong> la source aujourd nui perdue!<br />

L'intérieur était revêtu d'un enduit<br />

composé <strong>de</strong> trois couches différentes :<br />

la première, appliquée immédiatement<br />

(i) Procope, De JEdif., liv. V.<br />

(a) Epist. XIV, lib. X,


sur les briques, était un blocage composé<br />

<strong>de</strong> chaux et <strong>de</strong> ciment ; la <strong>de</strong>uxième,<br />

un mélange <strong>de</strong> charbon pilé et <strong>de</strong> chaux ;<br />

et la troisième était un stuc fort dur,<br />

formé <strong>de</strong> pierres pilées, <strong>de</strong> chaux et<br />

d'huile. >**•<br />

C'est <strong>de</strong> ce lieu, qui domine une vallée<br />

profon<strong>de</strong>, qu'on jouit du plus beau coup<br />

d'oeil <strong>de</strong> In <strong>ville</strong> et du golfe. Les mi<strong>par</strong>ets<br />

qui s'élèvent au milieu <strong>de</strong>s masses<br />

<strong>de</strong> verdure, et les nombreux jardins <strong>de</strong><br />

Nicomédie, lui donnent cet aspect <strong>de</strong><br />

fraîcheur et <strong>de</strong> richesse <strong>par</strong>ticulier aux<br />

<strong>ville</strong>s <strong>de</strong> Bithyuie. .<br />

Après avoir suivi la fortune <strong>de</strong> la capitale<br />

<strong>de</strong> l'empire d'Orient, Nicomédie<br />

tomba entre les mains <strong>de</strong>s Turcs en l'an<br />

727 <strong>de</strong> l'hégire, ou 1326 <strong>de</strong> notre ère,<br />

après les efforts inutiles que lit Kaloioannès,<br />

frère <strong>de</strong> Marie Paléologue,<br />

pour défendre cette place. Après la<br />

prise <strong>de</strong> Constantinople <strong>par</strong> les Latins,<br />

les princes Comnènes vinrent rési<strong>de</strong>r à<br />

Nicomédie.<br />

Presque toutes les églises furent converties<br />

en mosquées <strong>par</strong>le sultan Orkhan.<br />

Néanmoins, Nicomédie conserva toujours<br />

dans l'Église grecaue les privilèges<br />

et l'importance d'un siège episcopal ; et<br />

dans les gran<strong>de</strong>s fêtes <strong>de</strong> l'Eglise <strong>de</strong><br />

Constantinople, l'évéque <strong>de</strong> Nicomédie<br />

marche à côté <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> Nicée, immédiatement<br />

après le patriarche. On conserve<br />

dans l'église <strong>de</strong> Nicomédie plusieurs<br />

reliques, <strong>par</strong>mi lesquelles on<br />

remarque le bras <strong>de</strong> saint Basile renfermé<br />

dans une châsse d'argent, qui a<br />

la forme d*un bras et qui est richement<br />

ornée <strong>de</strong> rubis et <strong>de</strong> perles.<br />

La mo<strong>de</strong>rne Nicomédie est appelée<br />

<strong>par</strong> les Turcs Isnikmid, <strong>par</strong> suite <strong>de</strong><br />

cette corruption <strong>de</strong> langage qui a altéré<br />

les noms <strong>de</strong>s anciennes cités. Isnikmid<br />

n'est qu'une portion <strong>de</strong> ces mots grecs :<br />

dç NtxopfSstav.<br />

Le grand vizir Koupruli à fait établir<br />

à Nicomédie <strong>de</strong>s arsenaux maritimes qui<br />

ont longtemps fourni les galères et les<br />

caravelles les plus estimées <strong>de</strong> Constantinople.<br />

Tous les armements importants<br />

se font à Constantinople, mais on construit<br />

encore à Nicomédie quelques bâtiments<br />

<strong>de</strong> guerre. Cette <strong>ville</strong> doit à son<br />

heureuse position, à son voisinage <strong>de</strong>s<br />

forêts, et.à l'activité <strong>de</strong> ses habitants,<br />

<strong>de</strong> n'avoir pas déchu du rang 1 Qu'elle<br />

ASÎË MINEURE. 67<br />

occupait. Elle est toujours une <strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s<br />

les plus importantes <strong>de</strong> l'Asie Mineure ;<br />

sa population peut être évaluée à 30,000<br />

âmes, ré<strong>par</strong>ties <strong>de</strong> la manière suivante :<br />

Turcs. « 2,500 familles.<br />

Grecs , Jwi«$ '4* 41* 1,200 id.<br />

Arméniens. 1C * -• fej 800 id.<br />

Juifs. . '4>f*|WHn.!)iJ* 500 id*<br />

Mais on sait combien il est difficile<br />

d'obtenir <strong>de</strong>s renseignements exacts sur<br />

la population réelle <strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s musulmanes<br />

; car tout le mon<strong>de</strong>, les gouverneurs<br />

comme les habitants, ont intérêt<br />

à en dissimuler le chiffre. Quelque confiance<br />

que l'on inspire aux rayas, ils<br />

croiront toujours utile <strong>de</strong> diminuer le<br />

nombre <strong>de</strong> leurs coreligionnaires, <strong>par</strong>ce<br />

que le karatch ou capitation étant établi<br />

<strong>par</strong> tête, et recueilli <strong>par</strong> les tchorbadji A<br />

ou primats <strong>de</strong> chaque nation, on <strong>par</strong>vient<br />

ainsi, en divisant l'impôt sur un plus<br />

grand nombre <strong>de</strong> têtes, à en alléger le<br />

poids, et les gouverneurs <strong>de</strong>vant remettre<br />

au trésor le montant <strong>de</strong>s impôts<br />

établis sur un nombre donné d'habitants,<br />

sont enclins à donner un ehifre moindre<br />

pour qu'il reste une <strong>par</strong>tie notable <strong>de</strong><br />

l'impôt perçu,dans leurs caisses.<br />

Le principal commerce <strong>de</strong> Nicomédie<br />

est le bois et le sel. On a utilisé<br />

les vastes marais qui sont au fond du<br />

golfe, pour établir <strong>de</strong>s salines qui sont<br />

d'un grand produit. La fabrication du<br />

sel est entre les mains <strong>de</strong>s <strong>par</strong>ticuliers ;<br />

le gouvernement se réserve la dime du<br />

sel fabriqué. Le commerce <strong>de</strong> bois est<br />

libre, à la charge <strong>de</strong> vendre au gouvernement<br />

les échantillons <strong>de</strong> choix qui<br />

fieu vent être utiles-à la marine. Mais cette<br />

iherté est chèrement achetée <strong>par</strong> les<br />

charges qui pèsent sur les habitants; car<br />

les Rayas comme les Turcs, qui s'occupent<br />

du commerce <strong>de</strong>s bois, doivent fournir<br />

en corvées les ouvriers nécessaires au<br />

service <strong>de</strong> la marine. 'Le gouvernement<br />

'alloue une journée <strong>de</strong> cinq piastres pour<br />

les ouvriers <strong>de</strong> ces chantiers; mais cette<br />

somme est rarement payée intégralement,<br />

et nul n'oserait la réclamer du<br />

gouverneur. Les Arméniens se livrent<br />

volontiers à la fabrication du maroquin,<br />

qui s'exporte à Constantinople. t \<br />

La <strong>ville</strong> mo<strong>de</strong>rne <strong>de</strong> Nicomédie est<br />

composée <strong>de</strong> vingt-trois quartiers, dont<br />

dix-neuf sont habités <strong>par</strong> les Turcs, trois<br />

~<strong>par</strong> les chrétiens et un <strong>par</strong> les juits.<br />

5.


GS<br />

L'UNIVERS.<br />

La plus ancienne mosquée était au- ca<strong>de</strong>nce du -style; turc primitif date<br />

trefoilrune église grecque qui fut con- du regne du sultan Osman, qui envoya<br />

sacrée <strong>par</strong> le sultani Orkhan au culte <strong>de</strong> en Italie <strong>de</strong>s artistes pour étudier [es<br />

l'Islam Le plus grand temple musulman monuments <strong>de</strong> 1 Occi<strong>de</strong>nt : c était l éa<br />

été bâti <strong>par</strong> Pertew pacha, grand vizir poque ou l'école du Bernin était a son<br />

du sultan Soliman le Grand, et qui resta apogée<br />

pendant sept ans à JNicomédie comme A leur retour, ils introduisirent dans<br />

gouverneur. Cette mosquée est près du les constructions les modèles d'un art<br />

port à l'entrée <strong>de</strong> l'arsenal : Sin a m, qui italien déjà dégénéré, et encore abâtardi<br />

en fut l'architecte, imita dans <strong>de</strong> moin­ en passant dans <strong>de</strong>s mains qui ne le<br />

dres proportions la mosquée que le comprenaient pas. Le faible reflet <strong>de</strong><br />

sultan faisait bâtir à la même époque à l'art <strong>de</strong>s Arabes fut totalement éclipsé,<br />

Constantinople, et qui porte le nom <strong>de</strong> et l'art <strong>de</strong>s Turcs tomba au <strong>de</strong>gré où<br />

Soliman. Le même architecte construisit nous le voyons aujourd'hui.<br />

<strong>de</strong>s bains et un caravanséraï. Ces monuments,<br />

en rapport avec le commerce CONSTITUTION DU SOL AUX ENVIRONS<br />

et la population <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>, n'offrent<br />

DE JNICOMÉDIE.<br />

cependant rien <strong>de</strong> remarquable comme<br />

œuvre d'art. Il n'y a plus <strong>de</strong> traces du Les collines sur lesquelles est bâtie;<br />

magnifique palais que le sultan Mou- la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nicomédie sont un embranrad<br />

IV fit bâtir à JNicomédie, et qui était chement <strong>de</strong> la chaîne qui forme la côte<br />

entouré <strong>de</strong> jardins splendi<strong>de</strong>s. Les nord du golfe et dont le mont Maltépé<br />

palais que les premiers sultans firent est le pointculminant; au nord elles se<br />

construire en Asie Mineure, celui <strong>de</strong> rattachent au mont Sophon ou <strong>de</strong> Sa-<br />

Broussa et celui <strong>de</strong> Magnésie du Sipylus, bandja.<br />

ne sont plus que <strong>de</strong>s amas <strong>de</strong> décombres. Le terrain calcaire bleu qui constitue!<br />

L'arsenal impérial d'où sortirent jadis le sol <strong>de</strong> Scutari eesse bientôt pour faire<br />

les vaillantes galères qui tinrent en place à <strong>de</strong>s roches à base <strong>de</strong> quartz, et<br />

échec les marines <strong>de</strong> Genes et <strong>de</strong> Ve­ fe grès rouge finit <strong>par</strong> dominer. Cette]<br />

nise, aujourd'hui désert et ruiné, ne nature <strong>de</strong> roche s'étend jusqu'au bassin<br />

peut plus servir à la construction <strong>de</strong>s du Sangarius. Dans l'intérieur <strong>de</strong> la<br />

bâtiments d'un fort tonnage; car les at- <strong>ville</strong>, il se présente sous la forme <strong>de</strong><br />

terrissements formés peu à peu au fond stratifications bien distinctes inclinées<br />

du golfe, ont comblé la darse et rendu <strong>de</strong> 30 <strong>de</strong>grés à l'est, les couches ont<br />

le mouillage impraticable pour les grands environ <strong>de</strong>ux mètres d'épaisseur. Elles<br />

vaisseaux.<br />

sont sé<strong>par</strong>ées <strong>par</strong> <strong>de</strong>s lits <strong>de</strong> cailloux <strong>de</strong><br />

Si les ruines <strong>de</strong> Nicomédie, exami­ quartz et <strong>de</strong> jaspe qui dans la <strong>par</strong>tie sunées<br />

en détail, ne sont plus pour périeure <strong>de</strong> la colline ont à peine la<br />

l'antiquaire qu'un souvenir vague et grosseur d'un pois, et en <strong>de</strong>scendant les<br />

confus d'une civilisation effacée; si l'ar­ couches intercalaires et les cailloux augtiste<br />

ne trouve rien qu'un sentiment mentent d'épaisseur, <strong>de</strong> sorte qu'a la<br />

pittoresque dans les constructions éle- base <strong>de</strong> la colline elles forment avec la 1<br />

rébinthes, les vigoureux et noirs cyprès<br />

qui entourent les <strong>de</strong>meures <strong>de</strong>s morts,<br />

les jardins verdoyants qui embellissent<br />

chaque maison, donnent à la <strong>ville</strong> un<br />

aspect général <strong>de</strong> richesse et <strong>de</strong> gaieté<br />

qui s'évanouit quand on entre dans<br />

l'intérieur. Les nombreux cimetières<br />

placés près <strong>de</strong>s mosquées renferment<br />

quelques monuments qui datent <strong>de</strong> l'époque<br />

où l'art <strong>de</strong>s Turcs puisait ses<br />

inspirations dans l'école arabe. La dé-<br />

loux.<br />

La base du terrain <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux autre»<br />

collines est également <strong>de</strong> grès rouge;<br />

mais dans la <strong>par</strong>tie supérieure il est<br />

stratifié <strong>par</strong> un calcaire marneux à cassures<br />

conchoï<strong>de</strong>s d'une désagrégation<br />

facile. Ces couches sont recouvertes <strong>par</strong><br />

une véritable marne, qui s'étend indéfiniment<br />

vers l'est. Nous avons donc ici<br />

l'origine du terrain <strong>de</strong> grès rouge qui<br />

forme une <strong>par</strong>tie du sol <strong>de</strong> la province.


CHAPITRE V.<br />

PÉRIPLE DU GOLFB DE NICOMÉDIE.<br />

Pour entreprendre le périple du golfe<br />

• J <strong>de</strong> Nicomédie, il faut retourner à cette<br />

S» <strong>ville</strong> et suivre la côte nord. Il est bien<br />

important pour les voyageurs qui s'occupent<br />

<strong>de</strong> recherches d'antiquité <strong>de</strong> ne<br />

jamais traverser un ancien cimetière<br />

sans examiner avec soin les pierres tumulaires;<br />

car on peut presque toujours<br />

y recueillir <strong>de</strong>s inscriptions; les stèles<br />

et les colonnes votives étant d'un<br />

transport facile, les habitants les emploient<br />

volontiers pour décorer les<br />

tombes.<br />

J -La route <strong>de</strong> caravane entre Nico-<br />

| médie et Constantinople suit la côte<br />

nord du golfe. Après cinq heures <strong>de</strong><br />

marche, on arrive à Yarimdjé, et on<br />

couche au khan <strong>de</strong> Héréké. On distingue<br />

sur la route les ruines d'un château byzantin<br />

qui domine la montagne voisine<br />

et qui <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt jusqu'à la mer. Héréké<br />

<strong>par</strong>aît occuper la place <strong>de</strong> l'ancienne<br />

Ancyron, petite <strong>ville</strong> <strong>de</strong>s environs <strong>de</strong><br />

PI Nicomédie, où Constantin avait une<br />

t I villa et où il est mort; ce qui explique<br />

P pourquoi les uns placent le lieu <strong>de</strong> sa<br />

p mort à Nicomédie, les autres à Ancyron.<br />

w En effet cette place pouvait être regardée<br />

il comme un faubourg <strong>de</strong> la capitale. Toute<br />

js cette côte était jadis occupée <strong>par</strong> <strong>de</strong>s<br />

I villas <strong>de</strong>s patriciens <strong>de</strong> Byzance.<br />

[n Bouz bouroun forme le point <strong>de</strong> seie<br />

<strong>par</strong>ation entre le golfe <strong>de</strong> Nicomédie et<br />

ni celui <strong>de</strong> Cius ou <strong>de</strong> Moud an ia. Pour se<br />

Dl rendre à Nicée en droite ligne, on peut<br />

[a <strong>de</strong>scendre au village <strong>de</strong> Samanli, et <strong>de</strong><br />

l'I là se diriger <strong>par</strong> la rive sud du lac en<br />

el passant <strong>par</strong> Kurla.<br />

pi Un neu plus à l'ouest est le village<br />

>l <strong>de</strong> Yalovatch qui marque la position<br />

cj ie Drépanon appelé ensuite Héléno-<br />

1 polis. Il faut chercher <strong>de</strong> ce côté les<br />

yl bains chauds où la princesse Hélène<br />

[J aurait fait faire <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s constructions.<br />

j'|| "es bains étaient fréquentés <strong>par</strong> les<br />

1 labitants <strong>de</strong> l'ancienne Byzance, comme<br />

al lujourd'hui <strong>par</strong> ceux <strong>de</strong> Constantinople,<br />

J [ui les préfèrent à ceux <strong>de</strong> Broussa à<br />

J ause <strong>de</strong> la proximité <strong>de</strong> la capitale.<br />

)J -»eur situation dans une. vallée om-<br />

,1 jreuse en fait un lieu <strong>de</strong>s plus agréajj<br />

<strong>de</strong>s dans la saison d'été, ta cure est<br />

ASTE MINEURE. 69<br />

ordinairement <strong>de</strong> quinze jours; on profite<br />

<strong>de</strong> la saison <strong>de</strong>s cerises; l'usage <strong>de</strong><br />

ce fruit ai<strong>de</strong>, dit-on, singulièrement l'action<br />

<strong>de</strong>s eaux.<br />

Les coupoles qui couvrent le bain<br />

sont dit-on, celles qui furent construites<br />

<strong>par</strong> l'impératrice Hélène. Non loin <strong>de</strong><br />

là sont quelques ruines qui ap<strong>par</strong>tenaient<br />

sans doute à l'hospice et au palais<br />

d'Hélène et <strong>de</strong> Constantin (i). C'est<br />

à son retour <strong>de</strong> Jérusalem qu'Hélène<br />

fit construire ces édifices sur l'emplacement<br />

<strong>de</strong> l'ancienne Drépanon, et<br />

Constantin, pour honorer sa mère,<br />

éleva le bourg au rang <strong>de</strong> <strong>ville</strong>, et lui<br />

donna le nom <strong>de</strong> Hélénopolis; luimême,<br />

aux <strong>de</strong>rniers temps <strong>de</strong> sa vie,<br />

s'y rendit quelquefois et mourut dans<br />

sa villa d'Ancyron, petite place voisine<br />

<strong>de</strong> Nicomédie.<br />

C'est à Hélénopolis que se retira<br />

l'armée <strong>de</strong>s croisés commandée <strong>par</strong><br />

Pierre l'Ermite et Gauthier sans Avoir,<br />

lorsqu'elle abandonna Nicée pour se<br />

mettre en communication avec la côte,<br />

et .pour renforcer l'armée dans le but<br />

d'attaquer Nicée. Après le malheureux<br />

combat contre les Sarrazins, ces <strong>de</strong>rniers<br />

élevèrent une pyrami<strong>de</strong> avec les<br />

ossements <strong>de</strong>s Francs tombés sur le<br />

champ <strong>de</strong> bataille; ils étaient au nombre<br />

<strong>de</strong> vingt-cinq mille, si l'on en croit Alexis<br />

Comnène.<br />

Entre Yalovatch et Hersek coule un<br />

petit ruisseau dont les eaux forment<br />

mille détours; on l'appelle aujourd'hui<br />

Kirk ghetcliid; c'est l'ancien fleuve<br />

Draco, auquel ses détours sans nombre<br />

avaient valu cette dénomination. Il prend<br />

sa source dans les montagnes qui sé<strong>par</strong>ent<br />

le lac <strong>de</strong> Nicée <strong>de</strong> la mer (2). Ce<br />

petit fleuve formait la limite entre l'em-<br />

{ >ire <strong>de</strong>s Byzantins et celui <strong>de</strong>s Seldjouti<strong>de</strong>s,<br />

quand Alexis Comnène, menacé<br />

du côté <strong>de</strong> l'ouest <strong>par</strong> le duc <strong>de</strong> Normandie<br />

, et du côté <strong>de</strong> l'est <strong>par</strong> Soliman,<br />

fut obligé <strong>de</strong> conclure la paix; Il abandonna<br />

a ce <strong>de</strong>rnier toutes les terres<br />

qu'il avait conquises <strong>de</strong>puis Nicée jusqu'au<br />

fleuve Draco, et il ne resta plus<br />

au prince grec que l'étroit territoire<br />

compris entre le fleuve et la mer. Le<br />

village <strong>de</strong> Hersek est bâti sur un pro«<br />

(0 Procope, De JEdif., V, a.<br />

(a) Procope, De A£dif.t loc. cit.,


**£ 'A *A!i (C)<br />

!WB^[ ap aaUBISip aps§3 -JOiCinv ftgfagfi i» «(Bqmuy (tj'<br />

) sajiaiuojnj xis B aam<br />

Lied auuaiouBj 'ifipuad aa»|d «I a?ui?i


.u&inj inb auiciuoj<br />

IQBBiCu (an8uê[<br />

[ ltd iuqad<strong>de</strong>ts mb<br />

1U04 9[ aSeuisiOA<br />

'md<strong>de</strong>j e aAnajd<br />

l SM.>3J dp S9U0S<br />

sanbjcq sand] ijjj<br />

juaks 'aa|quioa aj|ôs<br />

jieuSreio 4 aifcuisioA<br />

Messed 00s jaXed<br />

p 8JJO8 3| JdSJdABJ)<br />

) un aed aiiej aid<br />

sA*ed np siUBiiqeq<br />

JIUSJ nad is ijBjBd<br />

1 awaD 'Jajjaa A"tp<br />

^dtua na aaeninoiu<br />

aipauiooiKjapajjoS<br />

UMOj Tnb ao %sdp<br />

KMBJ ua iiiaiuaioexa<br />

aiuiod uq an«uBj<br />

d<strong>de</strong> uo(| anb asuaa<br />

ouu[ aim B aqojBui<br />

un saa<strong>de</strong> SAIJJI.» uo<br />

I juenniiuoa ug<br />

5|So| np sjoq ajjOA<br />

bp jnd| mb ajSaj e|<br />

ibinj sauuuaj sd'j<br />

qei un jsata i jaqjos<br />

jpa/to ap 'suipi'ieq<br />

ajnoi aun (rpaeqa<br />

iea sap uosies e\ ap<br />

8[ stiBp juajnauiap<br />

p anoinB saiuai sap<br />

nBakp sjnaAnq sap<br />

sa|{i^|OA ap auiiSaj<br />

ja l a|qes ap suteq<br />

uo ' qajEAOjiBjt ap<br />

mo aaaicuajti auao<br />

nan ne juaAnos<br />

1 Biti jnod aauapisaj<br />

lapajip no JIZBU aj<br />

inepuaj -suorjeno<br />

\b uoiita un 03AB<br />

p no apeuouiq e(<br />

zainb no xip aïfcnd »ueÂe 'efpo}i afpiqSv »P sauqejp soon*<br />

non zu né i'a|nod -cduioo sap un 'lesjnoft -ueiuso ueijns<br />

01 id inof Jßd sio} np aiioiow ajaiuiaad BJ anad<strong>de</strong>a uiou<br />

siueAins sanol SIOJLI<br />

I e\90 'luauiapneqo<br />

> assei apuBiif aun<br />

louaramoo uo anof<br />

A ap aaadsa ainoi<br />

I ap *uaiisqBts uo<br />

•qOlBAOfBJL Ç 9Xaa<br />

lUBAB jipueqanoBX<br />

30 4 .a|donuuBisuoo<br />

SHaMKLfl*!<br />

ap 1U3AUJB assBjo ainoi ap sapeiem<br />

saj anboda awao y !UABtp sioui a| suep<br />

woians siBOJ 'uosies aijaq ef awoi lUBp<br />

-uad sa^6uua|ad xnajquiou ap jnq a|<br />

luos inb %9 *a§Bi|iA np sajiauio|i3[<br />

SIOJI B luamoa mb sa|ejauiiu saoanos<br />

sap jed ajqajao jsa |j -a^go BJ a^no;<br />

ap anbsajonid sn|d a( ja ajqEjapisuoa<br />

sn|d aj npajjuoa SUBS isato i auiji'oo B[<br />

ap sop aj ans aAaja^s uiou amaui np<br />

aSejjiA soaS UQ "ajAan apanSuB^ B^<br />

•iiaNVHonoTJ.<br />

ia|duioaaanipa una<br />

-nB aisixatu |i sieiu isa||iBanuj saiiuaio<br />

-UBcp saSiisaA sap sed ânbeqa B UO-J<br />

-aAnoji- issnB i sauiiuBz.(q SB|]IA saqou<br />

ap suaAnoo luaieia saS'BAia sao snox<br />

'jaui B[ ap pjoq np saasseqo<br />

sanbaajS sa||ituej sa| jßd adnaao isa 'auis<br />

-10A auoBjuoui B| ans anus aoBjiu l i|^? J k<br />

inoejo 'eaîqiag.p uiou aj snos aauiajoy<br />

Jed aauuoiiuaui ^sa auiA auiaui auaD<br />

•uojoqug ap aae|d B| aadnaao ^ieaed<br />

mb ' i|äajg(p uiou a'| auod a)oa CJ ^UBA<br />

-ins ua ajjuoouaa uoj anb aSejjiA ai<br />

•inBij sn;d )ip SUOAB snou àuiuio^<br />

*sifodoua|aH ap uiou af ajmsua iud<br />

jnb ' uouedajQ auuajauej l qaiBA0|ex<br />

ap spneqo suieq saj inaAnoj) as )iojp<br />

-ua iao ap sanaq sanb|anb v« aipaiuoa<br />

~!W ap 3DBI ua » snoeisy aapuoj ajnop<br />

sues inj anb iioapua ;aa ua isa.a taâB[<br />

-|IA untp ajjuao a{ nuaAap isa ia uiou<br />

uos aaoaua auod ajjoâ np pns açued<br />

ej stiBp ajinjjsuoa in i|tnb nBajçqo<br />

U£l '(9581) aianbuoa BS ap uoiiBAjasuoo<br />

B| e JaujaA a nod saauiJB sanbasq sap<br />

iiB.Tpuatia.iiua |t.nb iiojiipuoa Bjap ua<br />

aauuop'inj inj mb 'aipauioo^iap ajjoS<br />

np ajBuoipiJaui aiiJBd B[ ap eaedtoats<br />

'(jioKt a|)'|Bsanoi\i'BJB-x ap iuou 9\ sud<br />

a| luop |Bsmo]j\[ BJB^I ap a«B[(iA a] isa<br />

^SJ3H ap uio| uoM iBjasuR\B4Ba un aa<br />

aanbsoui aunjiicqiu LW\ uamb 'BqoBd<br />

pauiqv spsaaH J,S,A PUBJS np uiou uos<br />

luau a§Bi|iA ao -'saiaatupirq xis ap snjd<br />

SBd Btu jna8iBi es anb awassai luatu<br />

-aim usa aipauioaiM ap a.Jio8 aj imod<br />

ao uatnb agio's ap \ \\a ap Piaa ap aoej<br />

ua luauiaioaiip aAno« as mb axioiuoui<br />

OL


70<br />

L'UNIVERS.<br />

montoire qui se trouve directement en Constantmoole ; on prend les eaux <strong>de</strong><br />

See <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> Dil ; <strong>de</strong> sorte qu'en ce Taouchandif avant d'aller terminer sa L<br />

E le golfe <strong>de</strong> Vicomédie est telle- cure à Jâlovatch Pendant trois jours<br />

ment res^rré que sa largeur n'a pas on s'abstient <strong>de</strong> tout me s salé et, <strong>de</strong><br />

plus <strong>de</strong> six kilomètres. Ce village tient toute espèce <strong>de</strong> vian<strong>de</strong>; le quatrième<br />

son nom du grand visir Hersek Ahmed jour on commence a prendre le matin<br />

pacha, qui en1457 fit bâtir une mosquée une gran<strong>de</strong> tasse d eau et I on se tient<br />

et un aratanséraï. Non loin <strong>de</strong> Hersek chau<strong>de</strong>ment. Gela dure trois jours ; les<br />

est le village <strong>de</strong> Kara Moursal dont le trois jours suivants on boit <strong>de</strong> 1 eau trois<br />

nom rappelle la première victoire du fois <strong>par</strong> jour et Ion ne mange quedu<br />

sultan Osman. MoUrsal,uri <strong>de</strong>s compa- poulet au riz non salé. Quand on s est<br />

gnons d'armes <strong>de</strong> Aghidjé Kodja, ayant purgé dix ou quinze fois, on prend <strong>de</strong><br />

pris le nom <strong>de</strong> KaraiMoursal (le Noir), la limona<strong>de</strong> ou <strong>de</strong> la soupe acidulée I<br />

s'em<strong>par</strong>a <strong>de</strong>TjT<strong>par</strong>tie méridionale du avec un citron qui procure <strong>de</strong>s éva^l<br />

golfe <strong>de</strong> Nicomédie, qui lui fut donnée cuations. Pendant le temps <strong>de</strong> la cure,<br />

en fief a condition qu'il entretiendrait te nazir ou directeur <strong>de</strong>s eaux y fait sa]<br />

<strong>de</strong>s barques armées pour veiller à la rési<strong>de</strong>nce pour maintenir l'ordre pub lief<br />

conservation <strong>de</strong> sa conquête (1326). Un Souvent au lieu <strong>de</strong> faire succé<strong>de</strong>r s<br />

château qu'il fit construire dans la cette première cure l'usage <strong>de</strong>s bains]<br />

<strong>par</strong>tie sud du golfe porte encore son <strong>de</strong> Talovatch, on le remplace <strong>par</strong> <strong>de</strong>s! I<br />

nom et est <strong>de</strong>venu le centre d'un vil­ bains <strong>de</strong> sable, et alors on continue le|<br />

lage; c'est en cet endroit que fut sans régime <strong>de</strong> volailles et <strong>de</strong> riz. La plu<strong>par</strong>t<br />

doute <strong>fondée</strong> Astacus « en face <strong>de</strong> Ni­ <strong>de</strong>s buveurs d'eau sont installés.sous<br />

comédie »..A quelques lieues <strong>de</strong> cet en­ <strong>de</strong>s tentes autour <strong>de</strong> la source; d'autres<br />

droit se trouvent les bains chauds <strong>de</strong> <strong>de</strong>meurent dans le village. Cette époque<br />

Yalovateh, l'ancienne Drépanon, qui <strong>de</strong> la saison <strong>de</strong>s eaux rassemble à Taou-|<br />

prit ensuite le nom <strong>de</strong> Hélénopolis. chandil une foule <strong>de</strong> marchands, <strong>de</strong><br />

Comme nous avons dit plus haut. baladins, <strong>de</strong> cafédji qui pré<strong>par</strong>ent le<br />

Le village que l'on rencontre en sui­ sorbet ; c'est un tab.eau <strong>de</strong>s plus animés.<br />

vant la côte porte le nom d'Erégli, qui Les femmes turques se dispensent <strong>de</strong><br />

<strong>par</strong>aît occuper la place <strong>de</strong> Eribolon. la règle qui leur défend <strong>de</strong> <strong>par</strong>aître sans<br />

Cette même <strong>ville</strong> est mentionnée <strong>par</strong> voile hors du logis.<br />

Ptolémée sous le nom d'Eribaea. Giaour En continuant <strong>de</strong> côtoyer le golfe,<br />

Erégli, village situé sur la montagne Voi­ on arrive après une heure et <strong>de</strong>mie dé]<br />

sine, est occupé <strong>par</strong> les familles grecques marche à une langue <strong>de</strong> terre sablon­<br />

chassées du bord <strong>de</strong> la mer.<br />

neuse que l'on appelle Dil, c'est-à-dire<br />

Tous ces rivages étaient couverts <strong>de</strong> langue. La pointe <strong>de</strong> Dil est placée<br />

riches villas byzantines; aussi trouve- exactement en face <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> Hersek I<br />

t-on à chaque pas <strong>de</strong>s vestiges d'an­ c'est ce qui forme l'étranglement du 1<br />

ciennes murailles; mais il n'existe au­ golfe <strong>de</strong>JNicomédieetén fait un excellent<br />

cun édifice complet.<br />

mouillage en empêchant la mer du large<br />

d'y entrer. Cette terre est si basse et<br />

<strong>par</strong>aît si peu tenir au continent que les<br />

TAOUCHANDIL.<br />

habitants du pays racontent qu'elle a<br />

été faite <strong>par</strong> un <strong>de</strong>rviche qui voulait<br />

La Langue <strong>de</strong> Lièvre. Un gros village traverser le golfe et n'avait pas <strong>de</strong> quoi<br />

du même nom s'élève sur le dos <strong>de</strong> payer son passage; les bateliers du<br />

la colline ; c'est sans contredit le plus voisinage, craignant <strong>de</strong> voir l'entrée du<br />

considérable et le plus pittoresque <strong>de</strong> golfe comblée, s'empressèrent <strong>de</strong> lui of'<br />

toute la côte. Il est célèbre <strong>par</strong> <strong>de</strong>s frir leurs barques; et comme dans cesJ<br />

sources minérales qui coulent à trois sortes <strong>de</strong> réiïts/jT<br />

|1 y a toujours une<br />

kilomètres du village, et qui sont preuve à l'appui, on montre dans le<br />

le but <strong>de</strong> nombreux pèlerinages pen­ voisinage le tombeau d'un <strong>de</strong>rvichl<br />

dant toute la belle saison, mais surtout qui s'appelait Dil Baba (le père <strong>de</strong>li<br />

dans le mois d'avril. A cette époque les langue ). Il y a à Dil un petit<br />

khan et um<br />

mala<strong>de</strong>s <strong>de</strong> toute classe arrivent <strong>de</strong> fontaine qui<br />

ru rent* construits en 1638


<strong>par</strong> Mustapha Bostandji, <strong>chef</strong> <strong>de</strong>s jardiniers<br />

du sultan Mourad 111.<br />

On arrive après une heure <strong>de</strong> marche<br />

au village nommé Mahallé-ul-Alime (le<br />

quartier <strong>de</strong>s aimées) qui n'offre rien <strong>de</strong><br />

remarquable.<br />

Guébizé, dont le nom n'est autre<br />

qu'une altération <strong>de</strong> Lybissa, est située à<br />

six kilomètres <strong>de</strong> Taoucbandil; c'est en<br />

ce. lieu que mourut Annibal. Il y a, dit<br />

Plutarque (1), en Bithynie un village sur<br />

le rivage <strong>de</strong>là mer, que ceux du pays appellent<br />

Lybissa duquel on dit qu'il se<br />

trouvait un oracle tout commun en cette<br />

sorte :<br />

Terre Lybisse engloutira le corps<br />

De Annibal, quand l'âme en sera hors.<br />

Annibal, retiré à Lybissa, avait fait<br />

creuser <strong>de</strong>s souterrains autour <strong>de</strong> sa<br />

maison pour prendre la fuite dans le<br />

cas où il serait poursuivi. Mais sa retraite<br />

ayant été cernée <strong>par</strong> <strong>de</strong>s gar<strong>de</strong>s,<br />

il se décida à mourir pour ne pas<br />

tomber entre les mains <strong>de</strong>s Romains.<br />

Plutarque rapporte qu'il s'empoisonna<br />

en buvant du sang <strong>de</strong> taureau. Cette<br />

croyance, généralement répandue dans<br />

l'antiquité, n'est basée sur aucun fait<br />

réel ; le sang <strong>de</strong> taureau n'est pas plus<br />

malfaisant que celui <strong>de</strong> tout autre animal.<br />

Il faut donc s'en tenir à l'autre version<br />

rapportée également <strong>par</strong> Plutarque que<br />

le général carthaginois mourut en<br />

buvant un poison qu'il portait toujours<br />

avec lui. Le monument ou plutôt la<br />

colline qu'on regar<strong>de</strong> comme le tombeau<br />

d'Annibal est un tumulus qui est<br />

aujourd'hui couvert <strong>de</strong> gazon et qui<br />

ne présente au <strong>de</strong>hors aucune trace<br />

<strong>de</strong> construction ; c'est un emplacement<br />

vierge pour les futurs faiseurs <strong>de</strong><br />

fouilles.<br />

Pline <strong>par</strong>le <strong>de</strong> Libyssa comme d'une<br />

<strong>ville</strong> qui n'existait plus <strong>de</strong> son temps (2).<br />

« On y voyait la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Libyssa, dont<br />

il ne reste plus que le tombeau d'Annihal.<br />

»<br />

Etienne <strong>de</strong> Byzance (8) ne la cite<br />

pas moins comme une <strong>ville</strong> maritime;<br />

tout cela s'explique, attendu qu'elle était<br />

très-voisine <strong>de</strong> la mer. Ptolémée la place<br />

(i) Annibal, in fine; Amvot.<br />

(a) Liv. V, 3a.<br />

(3) V. Libyssa. .<br />

ASIE MINEURE. '¥i<br />

dans les terres (1), Pierre Gilles donne<br />

au village mo<strong>de</strong>rne le nom sa.<br />

Tous les itinéraires mentionnent cette<br />

<strong>ville</strong> comme lieu d'étape; ce qui prouve<br />

qu'elle existait encore sous l'empiré byzantin.<br />

L'itinéraire d'Antonin place Libyssa<br />

entre Chalcédoine et IN icomédie <strong>de</strong><br />

cette manière :<br />

ANTON IN.<br />

Chalcedonia.<br />

Pantichium. ... M. P. XV.<br />

Libyssam M. P. XXIV.<br />

Nicomediam . '.iir M. P. XXll.<br />

Tables <strong>de</strong> Peutinser.<br />

Calcedonia.<br />

Liuissa XXXVII.<br />

Nicomédia .... XXIII.<br />

Itinéraire <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux.<br />

Chalcedonia.<br />

Nasseie. . . , i . M. P. VU.<br />

Pandicia . . .*-. M. P. VII.<br />

Pontamus... . '.. . M. P. XIII.<br />

Libyssa. . . . * . M. P. IX.<br />

Ibi positus est rex Annibalianus qui<br />

fuit At'roi uni.<br />

Brunga. . . . . . M. P. XII.<br />

Nicomédia .... M. P. XIII.<br />

Le Port <strong>de</strong> Guébizé était autrefois<br />

défendu <strong>par</strong> un château fort <strong>de</strong> construction<br />

byzantine dont il ne reste<br />

que quelques vestiges. Sous le règne<br />

<strong>de</strong> Soliman le Grand, une mosquée fut<br />

construite à Guébizé <strong>par</strong> Tchoban Mustapha<br />

pacha; cette place était au nombre<br />

<strong>de</strong>s conquêtes du sultan Orkhan.<br />

En quittant Guébizé pour suivre la<br />

route <strong>de</strong> Constantinople, on commence<br />

à entrer dans l'intérieur du pays ; mais<br />

on ne perd jamais la mer <strong>de</strong> vue. Daridjé,<br />

petit village, est situé sur le rivage;<br />

c'était du temps <strong>de</strong>s Byzantins<br />

un château fort qui fut pris <strong>par</strong> Mahomet<br />

II en 1423. Il y a aussi a Paridjé<br />

comme à Taouchandil une source minérale<br />

qui est fréquentée <strong>par</strong> les Grecs<br />

comme la première l'est <strong>par</strong> les Turcs.<br />

Pendik, l'ancienne Pantichium est située<br />

à six kilomètres <strong>de</strong> Guébizé et à<br />

égale distance <strong>de</strong> Kartal ; c'est la pre-<br />

(i) Liv. V, eh. t.


72<br />

L'UNIVERS.<br />

mière étape après Constantinople. Ici le selon Pline, éloignée <strong>de</strong> soixante-<strong>de</strong>ux|<br />

rivage est très-acci<strong>de</strong>nté et se découpe mille cinq cent pas <strong>de</strong> meomeme*(i)^<br />

en une inGnité <strong>de</strong> promontoires. On ar­ Les fondateurs <strong>de</strong> Byzance ayant été^<br />

rive enfin au pied d'une montagne d'où consulter l'oracle pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

la vue s'étend sur toute la capitale; en quel lieu ils <strong>de</strong>vaient fon<strong>de</strong>r une)<br />

c'est le Maltépé, c'est-à-dire la colline <strong>ville</strong> : Allez, leur répondit-il, établissez-!<br />

du trésor. On raconte que bien <strong>de</strong>s re­ vous <strong>de</strong>vant la <strong>ville</strong> <strong>de</strong>s aveugles. Cette<br />

cherches inutiles ont été faites à sa satyre contre les habitants <strong>de</strong> Chalbase<br />

pour retrouver <strong>de</strong>s trésors ima- cédoine fut répétée <strong>par</strong> Mégabyze (2),|<br />

ginaires; c'est le point culminant d'une général perse. Ces gens-la, dit-il ,|<br />

petite chaîne <strong>de</strong> collines qui va aboutir étaient donc aveugles pour avoir été<br />

a la mer. Maltépé est à seize kilomè- choisir un territoire si ingrat lorsqu'ils<br />

très <strong>de</strong> Scutari et à douze <strong>de</strong> Chalcé- avaient <strong>de</strong>vant eux une contrée si madoine;<br />

ce lieu <strong>par</strong>aît marquer l'empla- gnifique. Byzance en effet fut tondée<br />

cernent <strong>de</strong> Pélékanon ; mais ce n'est dix-sept ans après Chalcédoine.<br />

qu'une conjecture, car il ne reste aucun Sous le règne <strong>de</strong> Darius Chalcédoine<br />

indice suffisant pour s'assurer <strong>de</strong> cette fut soumise au pouvoir <strong>de</strong>s Perses.!<br />

position.<br />

Pharnabases'em<strong>par</strong>a <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>, et après<br />

avoir réduit tous les jeunes gens à l'état<br />

CHAPITRE VI. d'eunuques, il hsenvoya à Darius.<br />

Polyen raconte la manière dont les<br />

CHALCÉDOINE.<br />

Perses s'em<strong>par</strong>èrent <strong>de</strong>*Ja <strong>ville</strong> (3). Ils<br />

creusèrent un souterrain <strong>de</strong> quinze<br />

L'ancienne Chalcédoine est située sta<strong>de</strong>s qui avait son entrée sur le flanc<br />

entre Scutari et Kadi-Keui,dans la plaine d'une colline et qui pénétrait sous les<br />

qu'on appelle Doghandjiiar méidani murailles jusqu'à la place du marché.<br />

(la place <strong>de</strong>s Fauconniers). C'est aujour­ Une nuit que les assiégés étaient dans<br />

d'hui le champ <strong>de</strong> manœuvres <strong>de</strong>s la plus gran<strong>de</strong> quiétu<strong>de</strong>, Jes Perses en­<br />

troupes cantonnées à Scutari. Au fond trèrent <strong>par</strong> le souterrain et la <strong>ville</strong> fut<br />

d'une petite baie formée <strong>par</strong> la pointe prise.<br />

<strong>de</strong> Kadi-Keui se trouve le jardin <strong>de</strong> Pendant la guerre entre les rois Pru-<br />

Haï<strong>de</strong>r Pacha avec une fontaine om- sias et Philippe, les Rhodiens, d'abord<br />

bragée <strong>par</strong> un magnifique platane. alliés <strong>de</strong>s Jitoliens ensuite <strong>de</strong> Pfai-<br />

Dans l'antiquité cette fontaine portait lippe, s'em<strong>par</strong>èrent <strong>de</strong> Lysimachie, <strong>ville</strong><br />

le nom <strong>de</strong> source d'Hermagoras. <strong>de</strong> Troa<strong>de</strong>, ensuite <strong>de</strong> Cius et enfin <strong>de</strong><br />

Kadi-Keui,. c'est-à-dire le village du Chalcédoine.<br />

juge, s'élève sur l'emplacement <strong>de</strong> l'an- Dans la guerre contre Mithridate,<br />

cienne Chalcédoine dont les ruines cette <strong>de</strong>rnière <strong>ville</strong> fut prise <strong>par</strong> le prémunie<br />

ont dis<strong>par</strong>u, et qui ne vit plus que teur Au retins Cotta, 76 ans avant J.-C.<br />

dans les souvenirs historiques. Lorsque Mithridate <strong>de</strong>vint <strong>de</strong> nouveau<br />

Chalcédoine fut <strong>fondée</strong> l'an 675 maître <strong>de</strong> la Bitbynie, il marcha contre<br />

avant J.-C. <strong>par</strong> Arch in s, qui conduisait Chalcédoine; Cotta se retira dans la<br />

une colonie <strong>de</strong> Mégariens. Elle prit son place, et laissa Nudus, le commandant<br />

nom du fleuve Chalcédon, qui arrose la <strong>de</strong> la flotte, occuper la plaine <strong>de</strong>vant la<br />

plaine voisine, et qui lui-même tenait <strong>ville</strong>. Chassé <strong>de</strong> cette position, ce <strong>de</strong>r­<br />

son nom soit d'un fils <strong>de</strong> Saturne, soit nier voulait se retirer vers les portes ;<br />

du fils du <strong>de</strong>vin Chalcas. Les autres mais dans le tumulte <strong>de</strong> la retraite, il<br />

traditions découlent probablement <strong>de</strong> perdit beaucoup <strong>de</strong> mou<strong>de</strong> (4)<br />

J oracle local, qui avait une gran<strong>de</strong> cé­ La gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s portes fit <strong>de</strong>scendre<br />

lébrité. 11 était placé dans le temple d'A­ du haut <strong>de</strong>s murailles un panier dans<br />

pollon et n'avait pas moins d'autorité<br />

que l'oracle <strong>de</strong> Delphes.<br />

Cette <strong>ville</strong> reçut aussi les noms <strong>de</strong><br />

(i) Pline, 1. V, c. XXXII.<br />

Procérastis et <strong>de</strong> Colpusa, sans doute à (a) Hérod., IV, 114. J<br />

cause <strong>de</strong> sa position <strong>de</strong>vant la Corne d'or, (3) Polyanus, Strata?., VII, XI, 5, «p.<br />

qui est le golfe <strong>de</strong> Bvzance. Elle était,<br />

Hammer.<br />

(4) Appieu, Bell. Mit/tr.


lequel furent hissés INudus et quelques<br />

officiers ; le reste fut mis en déroute.<br />

Mithridate, qui ne perdait aucune<br />

occasion, vint le même jour se<br />

placer avec sa flotte <strong>de</strong>vant rentrée du<br />

port, brisa les chaînes qui le fermaient,<br />

brûla quatre vaisseaux ennemis, amarra<br />

le reste, au nombre <strong>de</strong> soixante, à la<br />

suite <strong>de</strong>s siens, tandis que Cot ta et Nudus<br />

qui se trouvaient dans la <strong>ville</strong> ne<br />

pouvaient opposer aucune résistance;<br />

dans cette action, Mithridate ne perdit<br />

que peu <strong>de</strong> mon<strong>de</strong>. I<br />

Pierre Gilles emprunte à Denys <strong>de</strong><br />

Byzance un récit qui montre à quelles<br />

fourberies avaient recours les <strong>de</strong>vins <strong>de</strong><br />

Chalcédoine pour attirer la foule à leurs<br />

prétendues révélations.<br />

Un faux <strong>de</strong>vin, nommé Alexandre,<br />

s'étant associé à Byzance avec un chronographe<br />

diffamé nommé Cocconas,<br />

avaient remarqué que les trésors pieuvalent<br />

dans les temples <strong>de</strong> Delphes,<br />

Claros, Delos, et que l'art <strong>de</strong> la divination<br />

donnait <strong>de</strong> grands profits; ils<br />

entreprirent <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r eux aussi un<br />

oracle. Cocconas préférait Cbalcédoine<br />

comme un lieu fréquenté <strong>par</strong> les marchands.<br />

Alexandre penchait pour une<br />

<strong>ville</strong> <strong>de</strong> Paphlagooie nommée A boni<br />

reich os ries murs d'Abon), et son avis<br />

l'emporta. Ils <strong>par</strong>tirent donc pour Cbalcédoine,<br />

et imaginèrent <strong>de</strong> faire déterrer<br />

près du temple d'Apollon <strong>de</strong>s<br />

tables <strong>de</strong> bronze portant une inscrip-<br />

:ion dont le sens était : que bientôt Esiulape<br />

avec son père Apollon arriverait<br />

îans le royaume <strong>de</strong> Pont, et s'établirait<br />

laub la <strong>ville</strong> d'Aboni Teiehos. La frau<strong>de</strong><br />

ut assez bien concertée pour que le<br />

nuit <strong>de</strong> cet événement se répandît<br />

api<strong>de</strong>ment dans la Bitbynie et arrivât<br />

usqu'à la <strong>ville</strong>, qui s'empressa <strong>de</strong> faire<br />

»âtir un temple à Apollon. Cocconas<br />

esta à Cbalcédoine, distribuant les orales<br />

avec succès. On pense, ajoute<br />

'ierre Gilles, qui rapporte ce fait d'a-<br />

•rès Lucien, que les tables <strong>de</strong> bronze<br />

rouvées dans les fondations <strong>de</strong>s murs<br />

e Chalcédoine, quand Valens les fit<br />

émolir, remontent à cette époque,<br />

illes contenaient quelques vers hexamètres<br />

annonçant à Byzance <strong>de</strong>s évéements<br />

sinistres.<br />

Chalcédoine fut assiégée <strong>par</strong> Alciia<strong>de</strong><br />

pendant la guerre du Pélopon­<br />

ASIE MINEURE. 73<br />

nèse et en <strong>par</strong>tie ruinée; mais l'invasion<br />

<strong>de</strong>s Scythes dans le courant du troisième<br />

siècle, sous le règne <strong>de</strong> l'empereur<br />

Gallien, porta le comble à ses<br />

malheurs; la <strong>ville</strong> fut entièrement rasée.<br />

Constantinople venait à peine d'être<br />

<strong>fondée</strong>, quand les Gotbs firent une irruption<br />

dont les ravages furent ré<strong>par</strong>és<br />

<strong>par</strong> Cornélius A vi tus.<br />

Dans la vingt et unième année <strong>de</strong> son<br />

règne, le 28 juin 326, jour <strong>de</strong> la Saint-<br />

Pierre, Constantin fit détruire les temples<br />

<strong>de</strong> Chalcédoine, ou les convertit<br />

en églises. L'oracle d'Apollon fut englouti<br />

sous les décombres, et le temple<br />

<strong>de</strong> Vénus fut transformé en église <strong>de</strong><br />

S Cette église était située<br />

dans le faubourg du Chêne (Drys ).<br />

C'était le plus brillant quartier <strong>de</strong><br />

Chalcédoine ; c'est là que Rufin, le ministre<br />

favori d'Arcadius, possesseur <strong>de</strong><br />

richesses immenses, avait fait construire<br />

une splendi<strong>de</strong> villa, qui englobait tellement<br />

les constructions environnantes<br />

que tout le quartier était appelé Rufinopolis<br />

; elle s'élevait sur la colline qui<br />

avait favorisé la prise <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> <strong>par</strong> les<br />

Perses. Ses colonnes <strong>de</strong> inarbre précieux<br />

se miraient dans les eaux du Bosphore.<br />

L'or et les mosaïques ornaient <strong>de</strong><br />

somptueux ap<strong>par</strong>tements, et Rufin, quoi«<br />

que non baptisé, avait fait bâtir une église<br />

sous l'invocation <strong>de</strong>s apôtres Pierre et<br />

Paul. Tout ce luxe et ces démonstrations<br />

religieuses plaisaient à Théodose, défenseur<br />

ar<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la foi orthodoxe. L'empire<br />

d'Orient était infecté d'arianisme<br />

<strong>de</strong>puis Valens ; les ariens triomphaient;<br />

le désordre était dans l'Église ; chaque<br />

église avait sa règle, et les e venues se<br />

lançaient mutuellement <strong>de</strong>s anatnèmes.<br />

Le polythéisme profitait <strong>de</strong> ces dissensions,<br />

et les sacrifices païens se multipliaient.<br />

Rufin, n'étant encore que néophyte,<br />

s'était déclaré avec vigueur pour<br />

le clergé orthodoxe ; mais il ne pouvait<br />

rester plus longtemps sans entrer dans<br />

le giron <strong>de</strong> l'Eglise, et le jour où le<br />

monastère et le temple qu'il avait fait<br />

bâtir furent achevés, la dédicace en fut<br />

faite avec une splen<strong>de</strong>ur inusitée, et<br />

Rufin reçut le baptême le 24 septembre<br />

394. Les évêques turent man<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s divers<br />

diocèses <strong>de</strong> l'Asie; un concile <strong>de</strong><br />

dix-neuf prélats procéda à la dédicace et<br />

au baptême. Les anachorètes <strong>de</strong> la Thé-


74<br />

^UNIVERS<br />

baï<strong>de</strong> et <strong>de</strong> l'Egypte avaient été appelés ; ment eu face. L'ensemble <strong>de</strong>s cons­<br />

ils étaient arrives sous Ja conduite <strong>de</strong> tructions se composait <strong>de</strong> l'église et <strong>de</strong><br />

leurs abbés couverts <strong>de</strong> peaux <strong>de</strong> chèvres, <strong>de</strong>ux vastes monastères avec <strong>de</strong>s por­<br />

d'autres presque nus, les cheveux et la tiques et <strong>de</strong>s promenoirs. C'est là qu'en<br />

barbe en désordre ; ils rappelaient les l'année 451 se tint le concile contre<br />

Bosci ou anachorètes broutans, qui vi­ l'hérésie d'Eirtyenès et qui prit son<br />

vaient dans les montagues <strong>de</strong> Césarée. nom <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> où il eut lieu. Hiéro-<br />

La cuve baptismale était entourée d'un clès classe Chalcédoine <strong>par</strong>mi les <strong>ville</strong>s<br />

ri<strong>de</strong>au <strong>de</strong> pourpre, et RuGn y <strong>de</strong>scendit <strong>de</strong> la Pontica prima, et lui assigne le<br />

soutenu <strong>par</strong> Ammonius, le célèbre soli­ premier rang <strong>par</strong>mi les évêchés <strong>de</strong> la<br />

taire du Pont.<br />

province. ..<br />

Trois fois on lui plongea la tête dans Dans la secon<strong>de</strong> année du règne <strong>de</strong><br />

l'eau baptismale, et au sortir <strong>de</strong>s fonts« Justinien, en 569, le 21 mars, le général<br />

Ammonius lui donna l'accola<strong>de</strong>. De ri­ sarrasin Almunzar s'em<strong>par</strong>a d'un fauches<br />

eulogies (les présents baptismaux) bourg <strong>de</strong> Chalcédoine, et le réduisit en<br />

furent envoyées aux principaux habi­ cendres. Cest <strong>de</strong> ce moment qu'une<br />

tants <strong>de</strong> Chalcédoine. Cette cérémonie croyance s'établit dans Chalcédoine que i<br />

fut illustrée <strong>par</strong> l'homélie <strong>de</strong> Grégoire le vingt et unième jour du mois était«<br />

<strong>de</strong> Nysse, plus que <strong>par</strong> la pompe théâ­ un jour malheureux. On se rappelai«<br />

trale qui raccompagnait. Ce fut pour <strong>de</strong> sinistres événements arrivés à cette<br />

ainsi dire le <strong>de</strong>rnier éclat <strong>de</strong> la splen­ même date.<br />

<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> Chalcédoine (!)•<br />

L'invasion <strong>de</strong>s Perses suivit à peu<br />

Sur le promontoire Heroeon s'élevait près la même marche que celle <strong>de</strong>s Sar-J<br />

un somptueux palais qui ap<strong>par</strong>tenait rasins ; ils se présentèrent <strong>de</strong>vant Chal-P<br />

à Théodose ; ce Heu était célèbre chez cédoiue, la cinquième année du régna<br />

les Byzantins. C'est <strong>de</strong> là que Théodose dHéraclius, en 715, et comme ils ne]<br />

écrivit aux <strong>chef</strong>s <strong>de</strong>s ariens <strong>de</strong> Constanti­ pouvaient pas s'en .rendre maîtres im-J<br />

nople, qu'ils eussent à rentrer dans la médiatement, ils laissèrent un corps<br />

communion <strong>de</strong> Nicée ou à abandonner d'observation, et Tannée d'après ils]<br />

les églises dont ils étaient en posses­ l'emportèrent (l). Enön la <strong>ville</strong> étant<br />

sion. Une assemblée <strong>de</strong> ces sectaires tombée entre les mains <strong>de</strong>s Turcs peu<br />

ayant eu lieu, les ariens se soumirent <strong>de</strong> temps avant la prise <strong>de</strong> Constante<br />

à la sentence <strong>de</strong> Théodose et quit­ nople, ils détruisirent les <strong>de</strong>rniers v<br />

tèrent les édifices qu'ils possédaient tiges <strong>de</strong> ses riches monuments pouij<br />

dans la <strong>ville</strong>, pour s'installer dans ceux bâtir dans leur nouvelle capitale <strong>de</strong>s)<br />

du faubourg. D'après cette maxime mosquées et <strong>de</strong>s bains. Aujourd'hui on|<br />

qu'ils avaient adoptée : Si vous êtes per- cherche en vain l'emplacement <strong>de</strong> ses<br />

sécutés dans une <strong>ville</strong>, retirez-vous dans murs et <strong>de</strong>, ses édifices ; irais la fon­<br />

une autre.<br />

taine d'Hermagoras continue <strong>de</strong> rai<br />

L'église <strong>de</strong> Sainte-Euphémie, décrite fraîchir le sol ; et le petit fleuve Chalcèj<br />

<strong>par</strong> Évagrius (2), <strong>fondée</strong> comme nous don, sous le nom peu poétique <strong>de</strong><br />

avons dit <strong>par</strong> Constantin, était distante Kadi-Keui-Souiou, porte toujours se»<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux sta<strong>de</strong>s ( 368 m. )du Bosphore, eaux à la mer après avoir arrosé quel­<br />

sur le penchant d'une colline dépendant ques jardins.<br />

d'un faubourg <strong>de</strong> Chalcédoine. On Pierre Gilles vit détruire les <strong>de</strong>rniers<br />

avait voulu que les fidèles qui se ren­ vestiges du palais <strong>de</strong> Rufin, qui fut plu]<br />

daient à L'église pussent en même tard occupé <strong>par</strong> Bélisaire. Les pierre?<br />

temps jouir du spectacle <strong>de</strong> la nature, <strong>de</strong> taille étaient transportées à Constj<br />

du murmure <strong>de</strong>s flots et <strong>de</strong> la verdure tantinople pour construire la mosquée*<br />

<strong>de</strong> la campagne. Son plus bel orne­ <strong>de</strong> Soliman le Grand. Cette <strong>de</strong>stinée<br />

ment, ajoute l'écrivain, était l'admi­ <strong>de</strong>s pierres <strong>de</strong> Chalcédoine inspire âlf<br />

rable tableau que présentait la vue <strong>de</strong> savant écrivain <strong>de</strong> Hammer une tristl<br />

Constantinople qui s'élevait directe- monodie dans le genre <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> Libanius<br />

sur Nicomédie! « Ah si ces pierres<br />

(i) Améd. Thierry, fra*., i860.<br />

(a) Gillius, De /¥«!•% 7%rac, lib. III. (1) Théophane, ans 6 et 7 <strong>de</strong> rifèraclius.


pouvaient <strong>par</strong>ler, s'écrie-t-il, elles nous<br />

rediraient les hymnes chantés dans les<br />

fêtes nocturnes <strong>de</strong> Vénus, les psaumes<br />

qui retentirent dans l'église <strong>de</strong> Saiute-<br />

Eupbémie-, aujourd'hui, au lieu <strong>de</strong>s exhortations<br />

<strong>de</strong>s Pères <strong>de</strong> l'Eglise, elles<br />

n'enten<strong>de</strong>nt plus gue la voix du mollah<br />

qui leur crie cinq rois <strong>par</strong> jour : // n'est<br />

d'autre Dieu que Dieu, et Mahomet est<br />

son prophète.... Jusqu'à ce qu'un tremblement<br />

<strong>de</strong> terre ou une révolution<br />

inattendue leur donne une autre <strong>de</strong>stination<br />

! »<br />

Les anciens écrivains attestent que<br />

les habitants <strong>de</strong> Chalcédoine ne se distinguèrent<br />

jamais dans les lettres ; mais<br />

ils s'adonnaient avec ar<strong>de</strong>ur à la pêche<br />

<strong>de</strong>s thons et <strong>de</strong>s péiami<strong>de</strong>s, et étaient<br />

<strong>de</strong>venus très-adroits dans l'art <strong>de</strong> fabriquer<br />

et <strong>de</strong> tendre les lilets. Les poissons<br />

du genre scombre sont en effet<br />

très-nombreux dans le Bosphore ; à<br />

certaines saisons ils remontent le courant<br />

pour aller frayer daus la mer<br />

Noire, et re<strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt ensuite pour<br />

gagner la Méditerranée et continuer<br />

leur pérégrination autour du globe. La<br />

<strong>ville</strong> <strong>de</strong> Chalcédoine avait <strong>de</strong>ux ports<br />

formés <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux promontoires •, l'un,<br />

nommé Aeritas, portait à son extrémité<br />

un temple <strong>de</strong> Vénus Marine;<br />

l'autre, qui s appelle aujourd'hui Fanar<br />

bouroun, est regardé <strong>par</strong> Pierre<br />

Gilles comme l'ancien Hœreum Promontorium.<br />

Le grand port fut défendu<br />

<strong>par</strong> un môle, ouvrage du questeur et<br />

protospathaire Eutrope, qui lui donna<br />

sou nom. L'autre port plus au nord<br />

s'ouvrait sur le Bosphore, Justinien y<br />

tit faire quelques ouvrages et notamment<br />

<strong>de</strong>s casemates pour les barques<br />

que l'on tirait à sec sur le rivage. Cet<br />

usage est encore suivi à Constantinople,<br />

et ces sortes <strong>de</strong> remises sont appelées<br />

Kaïk-Hané, maisons <strong>de</strong> bateaux.<br />

Justinien fit construire un palais non<br />

loin du promontoire Hœreon, nous<br />

avons dit que Théodose en possédait<br />

déjà un au même lieu. On y voyait aussi<br />

une église <strong>de</strong> Saint-Jean ; et comme le<br />

rivage était couvert <strong>de</strong> plantes marines,<br />

on appelaitcette plage Calamotum. Procope<br />

nous apprend que <strong>par</strong> les ordres<br />

<strong>de</strong> Justinien un môle, supporté <strong>par</strong> <strong>de</strong>s<br />

arca<strong>de</strong>s, fut construit dans le but <strong>de</strong><br />

rendre le grand port plus sur. De nom-<br />

ASIE MINEURE.<br />

75<br />

breuses constructions en ornèrent les<br />

abords.<br />

Lorsque les habitants du mo<strong>de</strong>rne,<br />

village <strong>de</strong> Kadi K.eui font quelques'<br />

fouilles pour planter <strong>de</strong>s arbres ou<br />

élever quelque muraille, il est rare<br />

qu'ils ne tombent pas sur d'antiques<br />

fondations. Tous les fragments qu'on a<br />

mis a découvert datent <strong>de</strong>s temps byzantins<br />

; il y a longtemps que le <strong>de</strong>rnier<br />

vestige <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> grecque a dis<strong>par</strong>u.<br />

Les médailles qu'on exhume à <strong>de</strong> rares<br />

intervalles sont aussi du bas empire ; il<br />

est même difficile <strong>de</strong> s'en procurer.<br />

LA FONTAINE ZÀRETA.<br />

Il y aurait aux environs <strong>de</strong> Chalcédoine<br />

une curiosité archéologique et<br />

naturelle à rechercher : c'est la fontaine<br />

Zaréta, citée <strong>par</strong> plusieurs écrivains<br />

anciens et qui nourrissait <strong>de</strong> petits crocodiles.<br />

Etienne <strong>de</strong> Byzance la mentionne en<br />

ces termes (I) : « Il y a une fontaine au<strong>de</strong>ssus<br />

<strong>de</strong>là mer<strong>de</strong> Chalcédoine nourrissant<br />

<strong>de</strong> petits crocodiles, » etStrabon(2),<br />

« on trouve dans la Bithynie la <strong>ville</strong> <strong>de</strong><br />

Chalcédoine..., le bourg Ile Chrysopolis<br />

et le temple chalcédonien ; au <strong>de</strong>ssus <strong>de</strong><br />

ceslieuxetnonloin <strong>de</strong>là mer la fontaine<br />

Azaiétia. qui nourrit <strong>de</strong> petits crocodiles.<br />

» D'autres écrivains, notamment<br />

Stace (3) et Antigonus <strong>de</strong> Caryste (4),<br />

tarleut aussi <strong>de</strong> ces animaux ; le premier<br />

f<br />

es appelle <strong>de</strong>s lézards byzantins ( By-<br />

zantiacos lacer los). C'était sans doute<br />

une espèce <strong>de</strong> salamandre et non pas<br />

<strong>de</strong> lézards (5), car ces animaux ne vivent<br />

pas dans l'eau.<br />

Le faubourg <strong>de</strong> Drys à Chalcédoine<br />

avait pris l'accroissement d'une <strong>ville</strong> ;<br />

aussi est il désigné <strong>par</strong> les écrivains du<br />

temps comme une <strong>ville</strong> et un port <strong>de</strong><br />

mer (6). Cédrénus n'en <strong>par</strong>le que comme<br />

d'un faubourg qu'on nommait <strong>de</strong> son<br />

temps Ruliniana. Du temps <strong>de</strong> N. Caliste,<br />

il gardait encore le nom <strong>de</strong> Buûn.<br />

(i) V. Zarela.<br />

(2) XII, 563.<br />

(3) Liv. 4.<br />

(4) Histor. Mirai/,, cap. 164.<br />

(5) Voy, Slrabon, traduction française,<br />

torn. 4, p. 79.<br />

(6)- Socrat., But, eccles., 1. VI, eh. 14.


76<br />

L'UNIVERS<br />

Le faubourg <strong>de</strong> Drys ou du Chêne avait navires qui traversaient le Bosphore en<br />

pris son nom d'un chêne gigantesque veuant au Poot-Euxin. Une flotte <strong>de</strong>l<br />

qui en faisait l'ornement. On disait alors trente voiles sous <strong>de</strong>ux commandants<br />

le faubourg <strong>de</strong> Rupbin.<br />

veillait à Ja sûreté du port. Une <strong>par</strong>tie<br />

<strong>de</strong> ce port fut comblée, lorsque la <strong>ville</strong><br />

CHAPITRE VII.<br />

<strong>de</strong> Chalcédoine fut détrqjte, et l'autre<br />

<strong>par</strong>tie, sous les empereurs byzantins,<br />

pour empêcher les barbares d'y trouver<br />

CHBYSOPOL1S. r SCUTAHI. — USKÜ- un refuge. Les <strong>de</strong>rniers vestiges <strong>de</strong> ce<br />

DÀB.<br />

port dis<strong>par</strong>urent au commencement du<br />

seizième siècle lorsque la fille du sultan<br />

A dix sta<strong>de</strong>s environ <strong>de</strong> Chalcédoine Soliman fit bâtir la mosquée qui porte<br />

et dans le territoire appelé Chalcedo- son nom. Quelle que fut son impornia<br />

(1) se trouvait l'arsenal <strong>de</strong>s Chalcétance commerciale du temps <strong>de</strong>s Grecs,<br />

doniens, qu'on appelait Cbrysopolis, et<br />

dout l'emplacement est occupe <strong>par</strong> la Chrysopolis ne subit aucun accroisse<strong>ville</strong><br />

mo<strong>de</strong>rne <strong>de</strong> Scutari, nommée Us- ment pendant le regne <strong>de</strong>s rois <strong>de</strong> Bikudar<br />

<strong>par</strong> les Turcs. La <strong>ville</strong> s'élève sur thynie. Strabon ne la mentionne que<br />

une pente douce au pied du mont Boul- comme un village dépendant <strong>de</strong> Cha[gourlou,<br />

du haut duquel on jouit du cédoine. Son nom acquit quelque célé­<br />

plus magnifique panorama qu'il soit brité, <strong>par</strong>ce que c'est dans le voisinage<br />

possible d'imaginer ; en aucun lieu <strong>de</strong> <strong>de</strong> Chrysopolis que Licinius fut vaincu<br />

fa côte la vue du Bosphore et <strong>de</strong> Cons­ <strong>par</strong> Constautin en l'an 324, et la dixtantinople<br />

ne se développe d'une maneuvième année <strong>de</strong> son règne. Licinius,<br />

nière aussi splendi<strong>de</strong>.<br />

prisonnier, fut conduit à Thessalonique,<br />

L'antique Chrysopolis était, sous où il eut la tête tranchée. Le nom <strong>de</strong><br />

l'empire <strong>de</strong>s Perses, le lieu où se ver­ Scutari, qu'on ne trouve pas dans les<br />

saient les tributs levés sur les peuples auteurs anciens, vient sans doute <strong>de</strong> ce<br />

<strong>de</strong> la presqu'île ; c'est <strong>de</strong> là que lui vint que cette <strong>ville</strong> renfermait un corps <strong>de</strong>s<br />

le nom <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> d'Or. Etienne <strong>de</strong> scutarii, porte-boucliers, équités primi<br />

Byzance, qui rapporte les lraditions <strong>de</strong>s scutarii, créé avec les sagittarii <strong>par</strong><br />

Grecs, nous les montre fidèles à leur ha­ l'empereur Valens. Ils précédaient le<br />

bitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> faire dériver tous les noms <strong>de</strong>s corps <strong>de</strong>s seconds scutaires et se trou­<br />

<strong>ville</strong>s et <strong>de</strong>s peuples <strong>de</strong> quelque héros vaient sous les ordres du maître <strong>de</strong>s mi­<br />

<strong>de</strong> leur race; selon cet auteur Chrylices pour l'Orient (1). Selon M. <strong>de</strong>Hamsès,<br />

fils <strong>de</strong> Chryseis et d'Agamemnon, ruer, le nom uskudar est perse et corfuyant<br />

la persécution d'y£giste et <strong>de</strong>Cly- respond au mot <strong>de</strong> astandar, que Xéno-<br />

temnestre, se retira en Asie, et mouphon emploie pour désigner les courriers<br />

rut en ce lieu, où il eut sa sépulture. En impériaux, les angari <strong>de</strong>s Perses.<br />

commémoration <strong>de</strong> ce fait, la <strong>ville</strong> fut<br />

appelée Chrysopolis. Quoique le voisi­ LES COURRIERS EN OBIENT DAWS<br />

nage <strong>de</strong> Byzance ait toujours été un L'ANTIQUITÉ ET DE NOS JOUBS.<br />

obstacle à l'accroissement <strong>de</strong> cette <strong>ville</strong>,<br />

comme elle se trouve être le point <strong>de</strong> Les Perses avaient établi à Chryso­<br />

l'Asie le plus avancé du côté <strong>de</strong> l'Eupolis une station <strong>de</strong> courriers qui porrope,<br />

elle fut toujours un lieu <strong>de</strong> trantaient les ordres dans tout l'empire, et<br />

sit assez fréquenté Les Dix mille, après cette institution fut soigneusement con­<br />

avoir quitte Trébizon<strong>de</strong>, s'arrêtèrent servée <strong>par</strong> l'empire romain. Auguste<br />

pendant sept jours à Chrysopolis pouf imita les Perses en établissant une cor­<br />

y vendre leur butin (2). Les Athéniens poration <strong>de</strong> veredarii ou courriers qui<br />

«'étant em<strong>par</strong>és <strong>de</strong> Chrysopolis, l'en­ avaient <strong>de</strong>s stations tous les cinquante<br />

tourèrent d'une muraille, et en firent milles. Là on trouvait non-seulement <strong>de</strong>s<br />

une place où se versait l'argent prove-<br />

chevaux <strong>de</strong> rechange, mais encore <strong>de</strong>s<br />

nant <strong>de</strong>s dîmes perçues sur tous les voitures à <strong>de</strong>ux et à quatre roues qui<br />

pouvaient porter jusqu'à mille livres,<br />

(i) Xénophon, Anab., VI, 6, 36,<br />

(*) Xénoph., I. 6, (l) Police <strong>de</strong> l'Empire, p. 59.


Le nombre <strong>de</strong>s animaux, chevaux ou mulets,<br />

qui <strong>de</strong>vaient être attelés était fixé<br />

<strong>par</strong> <strong>de</strong>s règlements (1); les voitures à<br />

<strong>de</strong>ux roues ne pouvaient porter que cinq<br />

cents; le cheval <strong>de</strong> poste ne portait<br />

qu'un excédant <strong>de</strong> trente livres; l'été<br />

on attelait huit mules et l'hiver dix ; les<br />

voitures à <strong>de</strong>ux roues étaient attelées <strong>de</strong><br />

trois mules. Valentinieu défendit <strong>de</strong> se<br />

mettre plus <strong>de</strong> trois personnes dans ces<br />

<strong>de</strong>rnières voitures (2). Outre ces transports,<br />

il y avait <strong>de</strong>s chevaux <strong>de</strong> course<br />

appelés veredi qui franchissaient rapi<strong>de</strong>ment<br />

<strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s distances (3). La<br />

selle et la bri<strong>de</strong> ne <strong>de</strong>vaient pas excé<strong>de</strong>r<br />

le poids <strong>de</strong> soixante livres sous peine<br />

d'amen<strong>de</strong>. Chaque station <strong>de</strong>vait être<br />

garnie <strong>de</strong> vingt chevaux et jamais elle<br />

ne <strong>de</strong>vait être vi<strong>de</strong>. Les patriciens affichaient<br />

un grand luxe dans l'équipage<br />

<strong>de</strong> leurs montures ; les mors et souvent<br />

les bri<strong>de</strong>s étaient dorés ; enfin un vétérinaire<br />

payé <strong>par</strong> la commune était attaché<br />

à rétablissement.<br />

Chaque année le nombre <strong>de</strong>s chevaux<br />

était renouvelé <strong>par</strong> quart, et c'était la<br />

province qui avait la charge <strong>de</strong> les remplacer.<br />

Par le moyen <strong>de</strong> ces courriers, les<br />

nouvelles se répandaient avec la plus<br />

gran<strong>de</strong> célérité ; <strong>de</strong>s esclaves se tenaient<br />

constamment prêts pour seller les chevaux<br />

; <strong>de</strong>s greniers bien approvisionnés<br />

servaient non-seulement aux chevaux <strong>de</strong><br />

poste, mais encore aux cavaliers qui<br />

voyageaient <strong>par</strong> détachement. Les empereurs<br />

eux-mêmes faisaient usage <strong>de</strong><br />

ce moyen <strong>de</strong> transport. Titus tomba<br />

mala<strong>de</strong> dans une maison <strong>de</strong> poste/<br />

Les <strong>par</strong>ticuliers pouvaient faire usage<br />

<strong>de</strong>s postes impériales moyennant une<br />

permission du praefectus praetorio, qui<br />

délivrait <strong>de</strong>s diplômes. Pline, préteur <strong>de</strong><br />

Bithynie, <strong>par</strong>aît avoir été très-difficile<br />

pour délivrer ces permis <strong>de</strong> poste, et il<br />

écrit à Trajan qu'il n'en donne que dans<br />

le cas d'absolue nécessité. Lui-même,<br />

lorsqu'il <strong>par</strong>courait sa province, ne voyageait<br />

pas a cheval mais dans <strong>de</strong>s voitures ;<br />

c'est ainsi qu'il se rendit d'Éphèse à<br />

Pergame. Mais ce voyage le fatigua beaucoup,<br />

et il se rembarqua à Pitane, le port<br />

<strong>de</strong> Pergame pour se rendre en Bithy-<br />

(x) L. 8, Cod. Th.<br />

(a) L. 17, 3o, Cod.Theod.<br />

(3) Procop., De Bella Pers.% lib. a.<br />

ASIE MINEURE. 77<br />

nie (1). Cette institution <strong>de</strong>s angari ou<br />

<strong>de</strong>s postes publiques commençait a dégénérer<br />

sous l'empire byzantin, les aubergistes,<br />

<strong>par</strong> faveur ou à prix d'argent, obtenaient<br />

la faculté <strong>de</strong> servir les courriers,<br />

et ils louaient leurs chevaux à tout<br />

venant. Le mauvais entretien <strong>de</strong>s routes<br />

rendait inutile l'emploi <strong>de</strong>s chariots;<br />

le désordre se mettait dans l'administration<br />

quand les Turcs se sont rendus<br />

maîtres du pays. En leur qualité <strong>de</strong> peuples<br />

cavaliers et noma<strong>de</strong>s, leurs princes<br />

n'ont pas laissé tomber en désuétu<strong>de</strong><br />

une institution dans laquelle le cheval<br />

joue le principal rôle. Aux mansiones<br />

romaines succédèrent les mensil-hané,<br />

que le sultan Soliman organisa d'une<br />

manière régulière. Les diploma délivrés<br />

<strong>par</strong> le préfet du prétoire furent remplacés<br />

<strong>par</strong> <strong>de</strong>s bouyourdi délivrés <strong>par</strong> le<br />

pacha, et les agents seuls du gouvernement<br />

avaient le droit <strong>de</strong> se servir <strong>de</strong>s<br />

chevaux. Mais dans cette institution <strong>de</strong>s<br />

transports, le commerce n'était pas oublié;<br />

les routes, mal entretenues, il est<br />

vrai, autant <strong>par</strong> incurie que comme<br />

question <strong>de</strong> défense, ne pouvaient plus<br />

servir aux voitures, et la rheda <strong>de</strong>s Latins,<br />

dont les Turcs ont fait le mot<br />

araba, la voiture, finit <strong>par</strong> <strong>de</strong>venir en<br />

Asie un objet <strong>de</strong> curiosité. Mais en revanche<br />

ils ont mis un grand soin à fon<strong>de</strong>r<br />

<strong>de</strong>s établissements magnifiques sous<br />

le nom <strong>de</strong> caravanséraï, c'est-à-dire palais<br />

<strong>de</strong>s caravanes. Ces établissements<br />

contiennent au rez-<strong>de</strong>-chaussée <strong>de</strong> vastes<br />

écuries, <strong>de</strong>s magasins pour les marchandises<br />

et au premier étage <strong>de</strong>s chambres<br />

pour les voyageurs. Il y a ordinairement<br />

une dotation attachée à l'établissement<br />

pour défrayer le personnel, et les<br />

caravanes sont reçues moyennant une<br />

très-minime re<strong>de</strong>vance. Les caravanserai's<br />

sont classés <strong>par</strong>mi les fondations<br />

pieuses, comme les fontaines et les hospices,<br />

et la création d'un tel édificedispense<br />

un musulman du voyage <strong>de</strong> la Mecque.<br />

Aux angari <strong>de</strong>s Persans, aux veredar/i<br />

<strong>de</strong>s Romains a succédé chez les Turcs<br />

une corporation qui tenait <strong>de</strong> près à<br />

celle <strong>de</strong>s janissaires et qui cependant<br />

existe encore, c'est le corps <strong>de</strong>s latars,<br />

qui sont considérés comme courriers <strong>de</strong><br />

cabinet pour porter les ordres <strong>de</strong> la Porte.<br />

(x) Pline, liv. X, lett. XVIII.


Non-seulement ils ont le droit <strong>de</strong> prendre<br />

dans chaque mensil-hané les chevaux<br />

qui leur sont nécessaires; mais<br />

dans les villages ou même sur les routes<br />

nul cavalier n'oserait refuser <strong>de</strong> troquer<br />

son cheval contre celui d'un Tatar en<br />

mission, quitte à retrouver sa monture<br />

dans la maison <strong>de</strong> poste prochaine. Les<br />

tatars sont reconnaissables à leur costume<br />

<strong>par</strong>ticulier ; ris portent un grand<br />

béniche, sorte <strong>de</strong> robe rouge avec le fez,<br />

et tout l'attirail <strong>de</strong> campagne ne les<br />

quitte jamais.; nous voulons <strong>par</strong>ler <strong>de</strong>s<br />

armes <strong>de</strong> toute sorte et <strong>de</strong>s accessoires<br />

<strong>de</strong> Ja pipe.<br />

TÉLÉGRAPHIE CHEZ LES BYZANTINS.<br />

Tndépen<strong>de</strong>mment <strong>de</strong> cette transmission<br />

terrestre <strong>de</strong>s ordres impériaux, les<br />

souverains <strong>de</strong> Byznnce avaient établi<br />

une ligne <strong>de</strong> télégraphie aérienne<br />

nocturne entre Tarsus et la <strong>ville</strong> <strong>de</strong><br />

Scutari. La première station était placée<br />

sur le moût Boulgourlou. Ce système <strong>de</strong><br />

signaux correspondait avec Constantinople,<br />

soit à la tour <strong>de</strong>s ve<strong>de</strong>ttes (l),<br />

soit à la tour du centenier voisine du<br />

palais. L'invention <strong>de</strong> ces signaux remonte<br />

aux plus anciens temps historiques.<br />

La prise <strong>de</strong> Troie fut annoncée à<br />

la Grèce <strong>par</strong> <strong>de</strong>s signaux nocturnes qui<br />

se répétèrent <strong>de</strong> proche en proche sur<br />

les sommets <strong>de</strong> toutes les montagnes (2).<br />

Les Gaulois connaissaient le même<br />

moyen <strong>de</strong> correspondance; mais l'organisation<br />

régulière dès signaux télégraphiques<br />

ne date que du neuvième<br />

siècle <strong>de</strong> notre ère. Ils furent perfectionnés<br />

sous le règne <strong>de</strong> Théophile <strong>par</strong><br />

Léon le Philosophe, évéque <strong>de</strong> Tbessalonique.<br />

La nécessité <strong>de</strong> connaître les<br />

mouvements <strong>de</strong>s Sarrasins avait fait organiser<br />

ce service ; les feux étaient disposés<br />

<strong>de</strong> manière à former <strong>de</strong>s chiffres<br />

qui correspondaient à <strong>de</strong>s phrases; huit<br />

stations étaient établies entre Tarsus et<br />

la capitale. La première à Kula dans<br />

le voisinage <strong>de</strong> Tarsus (sans doute<br />

ICuIek-Boghaz )(3), une secon<strong>de</strong> sur les<br />

hauteurs du mont Argée (4). Les autres<br />

(i) Cohortes vigilium.<br />

(2) Eschyle, Agamemnon, v. 281,285.<br />

(3) Voyez page 3t.<br />

(4) Continua loi- Theophanis, IV, § 35, ap<br />

Hammer, Joe. cil.<br />

stations étaient sur les sommets Isamos,<br />

jEgylos, Marnas, Kyrizos, M okilas (1),<br />

et la <strong>de</strong>rnière sur le sommet du mont<br />

Auxent (Boulgourlou), où était le monastère<br />

<strong>de</strong>s Àcœmites (quine dorment pas).<br />

Ce <strong>de</strong>rnier point correspondait directement<br />

avec*le palais. Il est fait mention<br />

<strong>de</strong> cette télégraphie dans l'histoire byzantine<br />

au sujet <strong>de</strong> l'empereur Mi-|<br />

chel III en 842. Ce prince, abandonnant<br />

les soins <strong>de</strong> l'empire, se livrait avec emportement<br />

aux jeux du cirque. Un courrier<br />

du palais vint au moment <strong>de</strong>s courses<br />

lui annoncer que les Sarrasins venaient<br />

d'envahir une <strong>de</strong>s provinces <strong>de</strong><br />

l'empire. Il fit écarter cet importun et<br />

ordonna d'éteindre les feux qui dans les<br />

temps d'alarme avertissaient tous les)<br />

pays situés entre Constantinople et Tarsus<br />

(2).<br />

Le promontoire <strong>de</strong> Scutari forme la<br />

véritable limite entre le Bosphore et la<br />

Proponti<strong>de</strong>; c'est à cette place que, selon<br />

la tradition <strong>de</strong>s Grecs, la vache Io<br />

aurait traversé la mer ; aussi le cap <strong>de</strong><br />

Scutari était-il appelé Damalis ou le cap<br />

<strong>de</strong> la Vache. Si l'on veut chercher une<br />

source historique à ce nom <strong>de</strong> Damalis,!<br />

il faut franchir plusieurs siècles et arriver<br />

à l'époque d'Alexandre. Philippe<br />

<strong>de</strong> Macédoine assiégeait Byzance, qui<br />

était défendu <strong>par</strong> Charès, général athénien.<br />

Sa femme Damalis étant morte<br />

pendant le siège, les Byzantins, pour<br />

reconnaître les services que leur avait<br />

rendus Charès, élevèrent un tombeau à<br />

Damalis sur le cap <strong>de</strong> Scutari et dressèrent<br />

une colonne portant la figure emblématique<br />

d'une vache (3).<br />

Scutari est du petit nombre <strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s<br />

d'Asie qui n'ont pas vu leur prospérité<br />

déchoir avee la domination musulmane.<br />

Faubourg <strong>de</strong> Constantinople<br />

comme elle l'était <strong>de</strong> Chalcédoine, c'est<br />

toujours le lieu <strong>de</strong> casernement <strong>de</strong>s<br />

principales troupes réunies autour <strong>de</strong><br />

la capitale, et <strong>de</strong> magnifiques casernes,!<br />

qui s'augmentent tous les jours, peuvent<br />

recevoir <strong>de</strong>s corps d'artillerie et <strong>de</strong> cavalerie.<br />

Autant <strong>par</strong> esprit <strong>de</strong> religion que<br />

(1) Aujourd'hui inconnus,<br />

(a) Gibbon, règne <strong>de</strong> Michel. I<br />

(3) Codin d'après Deuys <strong>de</strong> Byzance (Damalis).<br />

v


pour plaire aux troupes »cantonnées à<br />

Scutari, la plu<strong>par</strong>t <strong>de</strong>s sultans ont contribué<br />

à embellir Scutari <strong>de</strong> plusieurs<br />

monuments remarquables ; les fontaines<br />

y sont décorées avec goût et <strong>de</strong> nombreuses<br />

mosquées rompent, <strong>par</strong> la forme<br />

élégante <strong>de</strong> leurs coupoles et la multiplicité<br />

<strong>de</strong> leurs minarets, l'uniformité<br />

<strong>de</strong>s ligues du paysage.' Moins voisine <strong>de</strong><br />

Constantinople, Scutari passerait pour<br />

une <strong>ville</strong> remarquable.<br />

MOSQUÉE DTI SULTAN SOLIMAN.<br />

Le sultan Soliman, fils <strong>de</strong> Sélim, fit<br />

bâtir en 1547, en l'honneur <strong>de</strong> sa fille<br />

Mihrma sultane, une musquée qui est<br />

restée la plus belle <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>. Elle est<br />

située au bord <strong>de</strong> la mer ; les nombreuses<br />

coupoles <strong>de</strong> sou avant-cour (harem)<br />

sont couvertes <strong>de</strong> plomb et soutenues<br />

<strong>par</strong> <strong>de</strong>s colonnes <strong>de</strong> marbre.<br />

La mosquée bâtie <strong>par</strong> la mère du sultan<br />

Mahomet III est située dans la <strong>par</strong>tie<br />

sud <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>; elle fut bâtie en<br />

1507, et est imitée d'une église grecque<br />

<strong>de</strong> Constantinople qu'on appelle Kilicé-<br />

Bjàmwsi. La gran<strong>de</strong> coupole est entourée<br />

<strong>de</strong> six autres <strong>de</strong>mi-coupoles disposées<br />

en polygone et quatre autres s'élèvent<br />

dans les quatre angles. Cet édifice<br />

est situé sur une eminence non loin du<br />

marché aux chevaux (at bazari) et domine<br />

presque toute la <strong>ville</strong>.<br />

Différentes sultanes et princesses ont<br />

suivi le même exemple et ont orné la<br />

<strong>ville</strong> <strong>de</strong> Scutari d'édifices religieux, <strong>de</strong><br />

tekkès ou couvents <strong>de</strong> <strong>de</strong>rviches et<br />

d'hospices pour les pauvres. Tous ces<br />

monuments ont été bâtis aune époque<br />

où l'architecture turque abandonnait<br />

l'école arabe, dont elle avait été un reflet<br />

original, pour se jeter dans l'architecture<br />

bâtar<strong>de</strong> qui n'est ni musulmane<br />

ni chrétienne. La mosquée <strong>de</strong> Sélim III<br />

en est un exemple déplorable. Quoique<br />

bâtie en marbre et décorée avec un certain<br />

luxe, on ne trouve ni dans son ensemble<br />

ni dans les détails <strong>de</strong> ses orne*<br />

mentsrien qui, rappelle plutôt l'orient<br />

que l'occi<strong>de</strong>nt ; c'est un style qui n'a pas<br />

même pour lui l'originalité <strong>de</strong> la- barbarie.<br />

Les princes musulmans qui ont<br />

doté la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Scutari <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> monuments<br />

religieux n'ont pas oublié d'y<br />

joindre ceux qulLb\en que se rapportant<br />

ASlïÏMlNEUlH 79<br />

à la vie civile, n'en sont pas moins regardés<br />

com me <strong>de</strong>s fondations pieuses. Nous<br />

voulons <strong>par</strong>ler <strong>de</strong>s bains et <strong>de</strong>s caravanserais;<br />

Ces <strong>de</strong>rniers édifices sont dignes<br />

d'une <strong>ville</strong> qui est la première place <strong>de</strong><br />

transit entre l'Asie et l'Europe, ils sont<br />

nombreux et largement installés. On<br />

est toujours certain d'y rencontrer <strong>de</strong>s<br />

caravaneurs arméniens pour <strong>de</strong>s voyages<br />

<strong>de</strong> long cours; ils sont aussi disposés à<br />

<strong>par</strong>tir pour la Perse et 1'Afganistan que<br />

pour les environs <strong>de</strong> Smyrne ; mais<br />

pour tout ce qui concerne l'équipement<br />

du voyage, c'est à Constantinople seulement<br />

qu'on peut se les procurer.<br />

La <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Scutari est entourée d'un<br />

immense champ <strong>de</strong>s morts planté <strong>de</strong> cyprès<br />

séculaires, qui font <strong>de</strong> ce lieu un<br />

<strong>de</strong>s sites les plus remarquables <strong>de</strong>s environs<br />

<strong>de</strong> la capitale. Il n'y a pas en<br />

Asie d'autres jardins publics que les cimetières.<br />

Ce sont <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> promena<strong>de</strong><br />

aussi bien que <strong>de</strong> recueillement. La<br />

mort n'est pas envisagée <strong>par</strong> les musulmans<br />

sous le même point <strong>de</strong> vue que <strong>par</strong><br />

les chrétiens, et l'idée d'une autre vie leur<br />

cause plutôt un sentiment <strong>de</strong> quiétu<strong>de</strong><br />

que <strong>de</strong> tristesse. La terre d'Asie étant<br />

la patrie commune <strong>de</strong> tous les Osmanlis<br />

,. les principaux habitants <strong>de</strong> Constantinople<br />

attachent un certain prix à<br />

l'idée d'aller reposer où reposent leurs<br />

ancêtres, et font transporter leur dépouille<br />

mortelle à Scutari. Cependant<br />

le grand cimetière n'est pas décoré <strong>de</strong><br />

monuments somptueux, <strong>de</strong> chapelles<br />

sépulcrales ou Turbék, comme on en<br />

voit un grand nombre à Constantinople.<br />

Autrefois la dignité du mort était indiquée<br />

sur sa tombe <strong>par</strong> la forme du turban<br />

qui couronnait la pierre tumulaire;<br />

aujourd'hui c'est le simple fez qui indique<br />

la sépulture <strong>de</strong>s grands comme<br />

<strong>de</strong>s marchands. Les tombeaux <strong>de</strong>s femmes<br />

sont décorés d'une simple inscription<br />

au milieu <strong>de</strong> laquelle est sculpté<br />

un cyprès la tête penchée ; c'est le symbole<br />

<strong>de</strong> l'âme qui s'est envolée au ciel.<br />

Une fois le mort déposé dans ta tombe,<br />

la famille vient quelquefois rendre visite<br />

à la sépulture; mais le tombeau<br />

reste sans gardien sous la protection<br />

<strong>de</strong> la piété publique,'sans que jamais on<br />

songe à sa ré<strong>par</strong>ation ou a son entretien.<br />

Aussi quoique le cimetière <strong>de</strong> Scutari<br />

date <strong>de</strong> l'établissement <strong>de</strong>s Turcs


à Constantinople, on y découvre à<br />

peine un seul tombeau qui remonte au<br />

<strong>de</strong>là d'un siècle. Les nombreuses inscriptions<br />

peuvent cependant offrir quelque<br />

intérêt à l'orientaliste ; il y trouvera<br />

toujours le sentiment religieux exprimé<br />

sans emphase, et quelquefois <strong>de</strong>s extraits<br />

<strong>de</strong>s poètes persans ou arabes les<br />

plus aimés <strong>de</strong>s musulmans.<br />

Le mont BOULGOUBLOU est l'ancien<br />

Damatrys ; les environs étaient couverts<br />

<strong>de</strong> jardins et <strong>de</strong> maisons <strong>de</strong> plaisance.<br />

L'Anonyme <strong>de</strong> Constantinople, dans sa<br />

nomenclature <strong>de</strong>s palais et <strong>de</strong>s monastères<br />

construits au <strong>de</strong>là du Bosphore ( l ),<br />

cite le palais <strong>de</strong> Bryas, ainsi nommé,<br />

dit-il, <strong>par</strong>ce que le <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>s empereurs<br />

byzantins, fuyant sa capitale pour<br />

se retirera Jérusalem, pourra dans son<br />

palais <strong>de</strong> Bryas entendre les cris <strong>de</strong> désespoir<br />

<strong>de</strong>s habitants.<br />

Il fut construit <strong>par</strong> les empereurs Tibère<br />

et Maurice, qui bâtirent aussi le<br />

palais <strong>de</strong> Damatrys, où se trouvait le<br />

Lois <strong>de</strong> Constantin l'Aveugle, fils d'Irène.<br />

Le port d'Eutrope, ainsi nommé du<br />

protospathaire <strong>de</strong> l'empereur Constantin,<br />

qui le fit construire, était voisin <strong>de</strong><br />

ces lieux.<br />

Les princes byzantins avaient pris les<br />

mœurs <strong>de</strong>s Orientaux avec lesquels<br />

ils étaient en communication constante,<br />

et le goût <strong>de</strong>s jardins appelés Paradis<br />

chez les Perses, s'était introduit chez les<br />

Grecs ; ils étaient établis <strong>de</strong> préférence<br />

sur la côte d'Asie; le palais <strong>de</strong> Damatrys<br />

était entouré d'un vaste <strong>par</strong>c rempli <strong>de</strong><br />

gibier, où les empereurs et les princes<br />

leurs fils allaient se livrer à l'exercice <strong>de</strong><br />

la chasse. Tous ces palais ont dis<strong>par</strong>u ;<br />

mais les fontaines qui les arrosaient circulent<br />

encore au milieu <strong>de</strong>s fard ins <strong>de</strong>s<br />

Turcs.<br />

LÀ TOUB DE LÉANDBE.<br />

A quelques encablures du rivage,<br />

dans le voisinage <strong>de</strong> Scutari, s'élève une<br />

tour <strong>de</strong> construction mo<strong>de</strong>rne, que les<br />

Turcs appellent Kiz-Koulé-si (la Tour <strong>de</strong><br />

la Fille), et qui est connue <strong>de</strong>s Européens<br />

sous le nom <strong>de</strong> Tour <strong>de</strong> Léandre. Elle<br />

est bâtie sur un écueil à fleur d'eau.<br />

(i) Anonymi, Pars HI, liv. III, p. 5o,<br />

ap Randuri.<br />

L'ancienne tour était un ouvrage <strong>de</strong> l'em»<br />

pereur Manuel; c'est en ce point qu'était<br />

attachée la gran<strong>de</strong> chaîne qui fermait<br />

l'entrée du Bosphore et dont l'autre extrémité<br />

était reliée au continent d'Europe.<br />

L'ancienne tour, dont il reste<br />

quelques <strong>de</strong>ssins, fttait un bâtiment massif,<br />

couronné <strong>de</strong> créneaux et couvert <strong>par</strong><br />

un toit pyramidal. Une jetée sous-marine<br />

reliait cet écueil au continent d'Asie.<br />

L'édifice byzantin que P. Gilles a<br />

vu et décrit a été démoli au commencement<br />

<strong>de</strong> ce siècle, et remplacé <strong>par</strong> un<br />

pavillon dans le goût mo<strong>de</strong>rne et dont<br />

Ja coupole est surmontée d'un fanal.<br />

Il est entouré <strong>de</strong> quelques corps <strong>de</strong><br />

gar<strong>de</strong> où stationne un poste. Déjà du<br />

temps <strong>de</strong> P. Gilles on croyait que l'intérieur<br />

<strong>de</strong> ce petit fort était alimenté<br />

<strong>par</strong> une source d'eau vive; mais il est<br />

constant qu'il n'y a qu'une citerne qui<br />

reçoit les eaux pluviales. Les Turcs racontent<br />

au sujet du nom <strong>de</strong> l'édifice,<br />

la Tour <strong>de</strong> la Fille, une histoire romanesque<br />

d'une princesse qui y fut détenue;<br />

c?est sans doute ce conte qui a<br />

motivé <strong>de</strong> la <strong>par</strong>t <strong>de</strong>s Européens le nom<br />

<strong>de</strong> Tour <strong>de</strong> Léandre, quoiqu'elle n'ait<br />

rien <strong>de</strong> commun avec l'événement poétique<br />

dont Sestos fut le théâtre.<br />

I CHAPITRE VIII.<br />

LES ILES DES PRINCES. DA1MONISI.<br />

Les Iles <strong>de</strong>s Princes forment un petit<br />

archipel peu éloigné <strong>de</strong> la côte <strong>de</strong><br />

Bithynie et à l'entrée du golfe <strong>de</strong> Nicomédie<br />

; les Grecs les appelaient Daimonisi<br />

(les Iles <strong>de</strong>s Génies). Il est assez<br />

difficile d'i<strong>de</strong>ntifier avec les noms mo<strong>de</strong>rnes<br />

les nombreuses ties qui sont mentionnées<br />

<strong>par</strong> Pline (t) sur toute la surface<br />

<strong>de</strong> la Proponti<strong>de</strong> ; nous ne pouvons<br />

reconnaître que l'île Proconnèse ou <strong>de</strong><br />

Marmara, l'île <strong>de</strong> Besbicus ou Calolimno,<br />

et le groupe <strong>de</strong>s Iles <strong>de</strong>s Princes. Ces<br />

<strong>de</strong>rnières sont mentionnées soUs les!<br />

noms suivants : Élée, les <strong>de</strong>ux Rbodusse,<br />

Érébinthe, M égalé, Chalcite et Pityo<strong>de</strong>.<br />

Le caractère <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong> ces îles,<br />

leur position respective, permettent <strong>de</strong><br />

se reconnaître dans cette sèche nomenclature.<br />

(x) Pline, liv. V, ch. XXXII.


Comme ces ties sont nommées, d'après<br />

leur position à l'égard <strong>de</strong> Cbalcédoine,<br />

Élée s'i<strong>de</strong>ntifie avec Proté ou la<br />

première. Etienne <strong>de</strong> Byzance (1) cite<br />

ce passage d'Artémidore. « En <strong>par</strong>tant<br />

du cap Acritas, après avoir navigué<br />

cent dix sta<strong>de</strong>s (2), on arrive au cap<br />

Hyris. Il y a dans ce voisinage l'île Pityo<strong>de</strong>,<br />

une autre île nommée Ghalcitis,<br />

célèbre <strong>par</strong> ses mines <strong>de</strong> cuivre, et une<br />

autre île nommée Prota; <strong>de</strong> là à la <strong>ville</strong><br />

<strong>de</strong> Chalcitis il y a quarante sta<strong>de</strong>s ( sept<br />

kilomètres et <strong>de</strong>mi). Les <strong>de</strong>ux Rhodusse<br />

sont aujourd'hui Rhobito et Anti-<br />

Rhobito, très-voisines l'une <strong>de</strong> l'autre ;<br />

Chalcitis n'a pas changé <strong>de</strong> nom; c'est<br />

l'île <strong>de</strong> Chalki. Pityo<strong>de</strong> est Pita; Erébinthe<br />

est alors Antigone ; car l'île <strong>de</strong><br />

Megalé, la plus gran<strong>de</strong> <strong>de</strong> toutes, est certainement<br />

l'île du Prince, qui a donné<br />

son nom à tout le groupe. La distance<br />

donnée <strong>par</strong> Artémidore sert à fixer les<br />

positions du cap Acritas, qu'il faut<br />

placer dans le voisinage <strong>de</strong> Scutari. »<br />

Les noms turcs diffèrent complètement<br />

<strong>de</strong> ceux donnés <strong>par</strong> les Grecs ; les<br />

difficultés que nous avons signalées<br />

pour la nomenclature <strong>de</strong>s fleuves et <strong>de</strong>s<br />

montagnes se retrouvent encore dans<br />

celles <strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s. 11 en est plusieurs qui,<br />

même aujourd'hui, portent plusieurs<br />

noms, les uns turcs, les autres grecs, et<br />

d'autres donnés <strong>par</strong> les marins étraners.<br />

L'archipel <strong>de</strong>s Princes est connu<br />

es Turcs sous le nom <strong>de</strong> Kizil Adalar<br />

(les îles Rouges). C'est aussi le nom <strong>de</strong><br />

l'île Prinkipo, la plus gran<strong>de</strong> du groupe.<br />

Elles doivent donc être classées d'après<br />

la nomenclature suivante (3) :<br />

PILOTA. Proté. Kinali ada si.<br />

Saoi signification.<br />

MEGALÉ. Prinkipo. Kizil ada si.<br />

L'Ile Rouge.<br />

EREBENTHUS. Antigone. Boghazli ada si.<br />

L'Ile du Détroit.<br />

CHALCITIS. Chalki. Heibeli ada si.<br />

L'Ile Rrufléf.<br />

RHODDSSEI«. Rhobito. Taouchaoadasi.<br />

L'île <strong>de</strong>s Lièvres.<br />

RIIODUSSEII*. Anti Rhobito. Sa<strong>de</strong>f ada si.<br />

L'Ile <strong>de</strong>* Coquilles.<br />

(ï) V. Chalcitis.<br />

(a) Vingt kilomètres.<br />

(3) Le premier nom est en romain, le second<br />

en grec mo<strong>de</strong>rne, le troisième en<br />

turc.<br />

ASIE MINEURE. êl<br />

Les ties « <strong>de</strong>s Princes » furent ainsi<br />

nommées <strong>par</strong> les Byzantins, <strong>par</strong>ce que<br />

durant toute la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> cet empire<br />

elles furent couvertes d'églises et <strong>de</strong> monastères<br />

gui servirent <strong>de</strong> lieux <strong>de</strong> retraite<br />

forcée ou volontaire à un grand<br />

nombre <strong>de</strong> princes détrônés ou chassés<br />

<strong>de</strong> la cour.<br />

PROTE.<br />

L'empereur Romain Diogène, qui fut<br />

prisonnier <strong>de</strong> Alp-Arslan, recouvra sa<br />

liberté moyennant trois cent soixante<br />

mille pièces d'or, pour venir expirer<br />

comme prisonnier religieux dans un<br />

monastère <strong>de</strong> l'île <strong>de</strong> Proté, qu'il avait<br />

fondé (ï). Cent trente ans au<strong>par</strong>avant<br />

l'empereur Romain I er avait éprouvé<br />

un sort semblable. Renfermé <strong>par</strong> ses<br />

fils dans un monastère, il y finit ses<br />

jours.<br />

Le plus ancien cloître <strong>de</strong> l'île <strong>de</strong><br />

Proté lut bâti dans la première année<br />

du neuvième siècle ; c'était une prison<br />

d'État aussi bien qu'une maison religieuse,<br />

et chaque révolution accomplie<br />

dans Constantinople fournissait un<br />

contingent au personnel <strong>de</strong>s moines du<br />

couvent. Les successeurs <strong>de</strong> Nicéphore<br />

furent rasés et renfermés dans le couvent<br />

<strong>de</strong> cette île ; il arrivait quelquefois<br />

que ceux <strong>de</strong>s reclus qui n'avaient pas eu<br />

les yeux crevés ou arrachés trouvaient<br />

moyen, à l'occasion <strong>de</strong> quelque révolution<br />

<strong>de</strong> palais, <strong>de</strong> jeter <strong>de</strong> coté la haire<br />

pour reprendre la cuirasse.<br />

ANTIGONE.<br />

Du temps <strong>de</strong>s empereurs byzantins<br />

Antigone avait reçu le nom <strong>de</strong> Panor*<br />

mus ; on y avait bâti un château formidable<br />

dont l'anonyme <strong>de</strong> Constantinople<br />

(2) fait une <strong>de</strong>scription romanesque<br />

<strong>de</strong> laquelle il ressort que Chosroës assiégea<br />

cette place avant d'attaquer Chalcédoine.<br />

Outre ses hautes murailles, le<br />

château était protégé <strong>par</strong> un buste <strong>de</strong><br />

femme à <strong>de</strong>ux têtes qui était placé dans<br />

la tour du nord au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la porte<br />

6 e (ï) Voyez Hammer, Comtantinapolis und<br />

<strong>de</strong>r ßosphoros, p. 36z. Brunet <strong>de</strong> Preslc,<br />

La Grèce, p. 909.<br />

(2) Anonyme <strong>de</strong> C. P., liv. V, p. 83<br />

Livraison. (ASIK MINEURE.) T. II. 6


^l'Wffeli<br />

d'entriéè. Le feu avant été mis au château,<br />

et toute la place réduite en cendres,<br />

la tour seule subsistait encore<br />

grâce à la vertu <strong>de</strong> la statue bicéphale<br />

qui écartait les flammes <strong>de</strong> quinze aunes<br />

<strong>de</strong>s murailles. Chosroès emporta<br />

cette statue en Perse, où elle fut l'objet<br />

d'un culte.<br />

Les ruines du château <strong>de</strong> Panormus<br />

existent encore au bord <strong>de</strong> la mer près<br />

du port ; on les appelle Bourghaz ; les<br />

ruines <strong>de</strong> citernes et <strong>de</strong> murailles que<br />

l'on découvre au sommet <strong>de</strong> la colline<br />

ap<strong>par</strong>tiennent au monastère, prison d'État<br />

dont ilest'.souvent fait mention.<br />

C'est là que Méthodius, ayant d'être<br />

élevé au patriarcat <strong>de</strong> Constantinople,<br />

souffrit un long et cruel .supplice; Renfermé<br />

dans un cachot obscur avec <strong>de</strong>ux<br />

brigands, l'un creux vint à mourir, et<br />

on laissa le cadavre infect' avec le prisonnier.<br />

Ce supplice dura sept ans, lia<br />

suite <strong>de</strong>squels Méthodius fût tiré <strong>de</strong> sa<br />

prison <strong>par</strong> Michel, (ils <strong>de</strong> ïnéôphilë, et<br />

nommé patriarche.<br />

tmÂxciTis.<br />

fil .M ;<br />

Chalcïtïs prît son nom <strong>de</strong>s anciennes<br />

mines <strong>de</strong> cuivre qu'on y exploitait ; on<br />

reconnaît encore quelques traces <strong>de</strong>s anciens<br />

travaux dans les environs du port.<br />

Elle est couverte d'une magnifique végétation,<br />

abondamment arrosée, et s'élève<br />

comme un cône <strong>de</strong> verdure au milieu du<br />

groupe d'îles dont elle fait presque le<br />

centre.<br />

Elle <strong>par</strong>aît avoir été dès les plus anciens<br />

temps un séjour àé paix et <strong>de</strong> tranquil«<br />

ité, étrangère à toutes les catastrophes<br />

lolitiqueS'qtii retentissaient dans les<br />

les voisines. 1 1! Le cuivre <strong>de</strong> ses raines<br />

était <strong>de</strong>s plus "estimes-et était'surtout<br />

employé pour fabriquer les statues <strong>de</strong>s<br />

dieux. C'est <strong>de</strong> l'airain-<strong>de</strong> Ch'alcitis<br />

qu'avait été faite la statue d'Apollon à<br />

Sicyone. L'île produisait outre le cuivre<br />

du lapis lazuli et du borax ou chrysocolle.<br />

Aristote lui-même mentionne ces<br />

Iles comme dignes <strong>de</strong> remarque. L'île<br />

entière 'affecte la forme triangulaire ;<br />

vue du côté du sud, elle se présentesous<br />

Ja forme d'un cône unique ; mais vue<br />

en travers on y découvre trois sommets<br />

couronnés tous trois ; <strong>par</strong> <strong>de</strong>s monastères,<br />

celui <strong>de</strong> Saint-Georges, celui <strong>de</strong><br />

la Vierge et le troisième dédié à la sainte<br />

Trinité, où l'on est conduit <strong>par</strong> une allée<br />

<strong>de</strong> cyprès séculaires. I<br />

PRINKIPO.<br />

Il y a toute ap<strong>par</strong>ence que Hie appelée<br />

aujourd'hui Prinkipo doit être<br />

i<strong>de</strong>ntifiée avec celle que Pline appelle<br />

Megalé ; c'est la plus considérable du<br />

groupe. Les Turcs lui donnent le nom<br />

<strong>de</strong>Kizil ada si, c'est-à-diré I y îlë Rouge,<br />

H,â cause dé la couleur <strong>de</strong> ses montagnes.<br />

Chalki et Prinkipo sont placées<br />

vis-à-VisTune<strong>de</strong> l'autre et ne sont sé^j<br />

<strong>par</strong>ées que <strong>par</strong> un étroit canal. Son<br />

étendue ne dépasse pas cinq kilomètres;<br />

elle est allongée dans la direction<br />

nord-est sud-ouest, et traversée <strong>par</strong> une<br />

ligne <strong>de</strong> petites collines.<br />

La nature du sol est calcaire É<br />

quartzeusë; elle renferme <strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> I<br />

fer oxydié. A la pointe nord est situé!<br />

le grand village qui porte le même<br />

nom que l'île ; il renferme trois monasfl<br />

tères ; l'un bâti dans la plaine et <strong>de</strong>ux<br />

autres sur une coïfine. Le village est I<br />

entouré <strong>de</strong> vergers, d'oliviers, et <strong>de</strong> d<br />

chès Cultures ; les bois <strong>de</strong> cyprès et d'ar- [<br />

bres fruitiers donnent à ce petit coin <strong>de</strong> I<br />

Tile un aspect <strong>de</strong> fraîcheur bien rare<br />

aux environs <strong>de</strong> la capitale. Du côté du<br />

nord on trouve au contraire une con-j<br />

trée sauvage et ari<strong>de</strong> qui contraste avec I<br />

la fertilité <strong>de</strong>s jardins du village. Il ne<br />

reste en fait <strong>de</strong> ruines <strong>de</strong>s anciennes<br />

constructions byzantines que quelques<br />

pans <strong>de</strong> murailles ayant ap<strong>par</strong>tenu à<br />

<strong>de</strong>s monastères.<br />

A la pointe sud <strong>de</strong> l'île se trouve le j<br />

monastère <strong>de</strong> Saint-Georges. Du haut <strong>de</strong>l<br />

la colline voisine on jouit du magnifique<br />

panorama <strong>de</strong> toute l'Ile. Deux belles<br />

sources ombragées <strong>par</strong> <strong>de</strong>s platanes coulent<br />

non loin du chemin ; c est le lieu <strong>de</strong><br />

ren<strong>de</strong>z-vous <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong> Constantinople,<br />

principalement <strong>de</strong>s Grecs qui<br />

s'y ren<strong>de</strong>nt le dimanche en caïk.<br />

Une si heureuse situation fut appréciée<br />

<strong>par</strong> les princes byzantins qui éle-1<br />

vèrent à l'envi <strong>de</strong>s villas et <strong>de</strong>s monastères<br />

dans les vallées <strong>de</strong> l'île. Justinien<br />

y fit bâtir un palais dont- les ruines sont<br />

peut-être celles que l'on observe près<br />

du couvent <strong>de</strong> Saint-Nicolas, et c'est<br />

sans doute du règne <strong>de</strong> cet empereur


nue Mégalé a pris le nom <strong>de</strong> nie du<br />

Prince (1). Cette île fut, comme les autres,<br />

le théâtre <strong>de</strong> ces revers <strong>de</strong> fortune<br />

si communs au moment <strong>de</strong> la<br />

chute <strong>de</strong> Byzance, et il semblait que<br />

les princes et les impératrices ne fissent<br />

bâtir <strong>de</strong>s monastères que dans la prévision<br />

<strong>de</strong> leur chute. Ltmpératricelrene,<br />

dont le rèjjne jeta unsi vif éclat, termina<br />

ses jours dans un monastère <strong>de</strong><br />

Prlnkipo, etTimpératrice Zoé, forcée <strong>de</strong><br />

prendre le voile, fut un moment renfermée<br />

à'arïs cette île <strong>par</strong> Michel Calafate.<br />

Mais' elle en sorti? bientôt pour<br />

remonter sur le trône. L'usurpateur fut<br />

privé <strong>de</strong> la vue et renfermé'a son tour<br />

dans le monastère <strong>de</strong> Sergius.<br />

Aujourd'hui ce petit archipel a perdu<br />

toute son importance stratégique au<br />

point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l'attaque et <strong>de</strong> la défense<br />

<strong>de</strong> la capitale;, mais à l'époque<br />

byzantine il vît 1 plus d'une fdisses flottes<br />

<strong>de</strong>s Perses vet <strong>de</strong>s'Torcs se glisser au<br />

mfflieu du dédale <strong>de</strong>s îles pour fondre<br />

sur Constantinople.<br />

L'île <strong>de</strong> Platée est tout à Êaït-nué et<br />

désolée; elle servit <strong>de</strong> lieu d'exil àMn<br />

çhël Rhangabé, qui, au commencement<br />

du neuvième siècle, y Ait renfermé dans<br />

un monastère et forée <strong>de</strong> prendre la<br />

tonsure avec son fils. Il y vécut encore<br />

trente-<strong>de</strong>ux ans Sous le nom d'A.thanase.<br />

Ses <strong>de</strong>ux fils, dans la fleur <strong>de</strong> Page, furent<br />

privés <strong>de</strong> leur virilité ; le premier,<br />

Eustratius, mourut peu <strong>de</strong> temps après,<br />

et fut enterré du côté gauche <strong>de</strong>l'église",<br />

et le tombeau du père fut placé-à droite.<br />

Le second fils, Ignatius', arriva à la dignité<br />

<strong>de</strong> patriarche et <strong>de</strong>vint le fondateur<br />

du monastère <strong>de</strong> Satyrus^ qui-fut<br />

bâti sur le mont Maltépé ; c'est là ijo*il<br />

eut sa sépulture.<br />

À cinq kilomètres <strong>de</strong> Pandik, sur la<br />

route <strong>de</strong> Chalcédoine et à douze kilomètres<br />

<strong>de</strong> Scutari, se trouve le port <strong>de</strong><br />

Kartal dans le voisinage duquel s'élevait<br />

le palais <strong>de</strong> Bryas et lie monastère Satyrûs<br />

; fis se trouvaient entre le port et<br />

le mont Maltépé qui en est peu éloigné.<br />

On y voit en effet quelques ruines qui<br />

ont pu ap<strong>par</strong>tenir à un palais. Le palais<br />

<strong>de</strong> Bryas fut construit <strong>par</strong> les empereurs<br />

Maurice et Tibère ; le monastère<br />

! «I .VMVH. -ait<br />

ASrß'lWftoEUftE > 83<br />

<strong>de</strong> Satyrus fut construit <strong>par</strong> le patriarche<br />

Ignatius.<br />

La petite île d'Oxeia est voisine <strong>de</strong><br />

Platée. Son nom^quisigniûe^ro<strong>de</strong>âpre,<br />

est bien d'accord avec son aspect désolée<br />

Les autres îlots, ne sont^ue <strong>de</strong>s rochers<br />

où séjournent pendant-& belle saison<br />

quelques familles <strong>de</strong> pêcheurs.<br />

CHAPITRE IXlw<br />

PARAGES DE LA MER NOIRE; LE MONT<br />

GÉANT.<br />

La montagne située sur la 'côte d'Asie<br />

immédiatement en face du golfe <strong>de</strong><br />

Buyukdéré est connue <strong>de</strong> tous'les' navigateurs<br />

qui traversent le Bosphore. Les<br />

Turcs lui donnent lé nom <strong>de</strong> TTotus<br />

dagh ; on l'appelle aussi quelquefois<br />

Juscha dagh (la montagne <strong>de</strong> Josuè). Les<br />

indigènes préten<strong>de</strong>nt que c'est-iâ que<br />

fut enferré le prophète <strong>de</strong>s Hébreux. Au<br />

haut <strong>de</strong> la montagne od trouve une enceinte<br />

carrée, entourée d'un mur <strong>de</strong><br />

pierres sèches. Ce lieu correspond au<br />

site appelé leiit'VHïerclile. Un marabout<br />

avec quelques arbustes auxquels<br />

sont suspendus <strong>de</strong>s Chiffons, marquent<br />

le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> superstition tyue* les indigènes<br />

ont au sujet' <strong>de</strong> certaines pierres<br />

ou <strong>de</strong> certains arbres ; cette" eroVariee<br />

dés"musulmans rè^anttué^sur'touted la<br />

'iêrre<strong>de</strong> l'islam mente quelques dévëloppétne'nts<br />

que noiife donnerons èn : <strong>par</strong>lant<br />

<strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> pèleriuages célèbres'.<br />

LE TEMPLE DE JUPITER ÜRIDS.<br />

(OUIt - • ) B<br />

' Ce templefurbâti <strong>par</strong>PhryxUS. Il était<br />

situé à l'entrée du Bosphore, dans la <strong>par</strong>tie<br />

la plus étroite'd'u'Canal, aü point où<br />

la' chaîne <strong>de</strong> F Olympe Myslen' vient rCncontrene.<br />

rivage? cet ehOToftfurdëa-'les<br />

temps ie'S"|31iisfèCulés regardé eom'nâe le<br />

plus important pour la défense dé* la dote<br />

d'Asie; et dans les <strong>de</strong>rniers siè les il<br />

<strong>de</strong>vint la possession <strong>de</strong>s Génois cfuiy bâtirent<br />

Un château aujourd'hui eu ruines,<br />

mais qui porte encore le nom <strong>de</strong> Djinévise<br />

kalé si (le chateau génois). Ce Heu<br />

est généralement désigné <strong>par</strong> les auteurs<br />

anciens sous le nom <strong>de</strong> Hiéroh ou <strong>de</strong><br />

temple <strong>de</strong> Jupiter. Jason, à son retour<br />

(f) Hammer, Constaiü'mopolis un


84<br />

Euxin étaient dans l'usage d y consacrer<br />

<strong>de</strong>s offran<strong>de</strong>s. La possession <strong>de</strong> ce<br />

territoire fut longtemps un objet <strong>de</strong> contestation<br />

entre les Byzantins et les habitants<br />

<strong>de</strong> Chalcédoioe. Prusias finit <strong>par</strong><br />

s'en rendre maître et s'y fortifia ; mais<br />

it fut contraint <strong>de</strong> le rendre aux Byzantins<br />

avec tous les objets qu'il avait enlevés<br />

du temple, les bois, les tuiles, et<br />

les caissons.<br />

D'après la tradition conservée <strong>par</strong><br />

Diodore <strong>de</strong> Sicile, les Argonautes revenant<br />

<strong>de</strong> Colclios, étant arrivés à<br />

l'embouchure du Bosphore, y sacrifièrent<br />

aux douze dieux. Le temple <strong>par</strong>aît<br />

avoir alors été consacré à Jupiter<br />

et à Neptune ; car l'un et l'autre dieu<br />

étaient honorés dans l'Hiéron du Bosphore<br />

(1). Pausanias, vainqueur <strong>de</strong> Maroon<br />

ius à Platée, consacra une coupe<br />

d'airain à Neptune Sauveur, et fit élever<br />

une statue à ce dieu avec le concours<br />

<strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong> Chalcédoine.<br />

Cicéron fait mention d'une statue <strong>de</strong><br />

Jupiter Urius qui existait également dan s<br />

ce lieu sacré.<br />

Pierre Gilles décrit ainsi le château<br />

fort tel qu'il existait <strong>de</strong> son temps; les<br />

Grecs lui donnent encore le nom <strong>de</strong><br />

Hiéron. C'est un petit fort défendu aussi<br />

bien <strong>par</strong> la nature que <strong>par</strong> l'art, placé<br />

sur la pointe la plus avancée du promontoire<br />

qui est formé <strong>de</strong> plusieurs<br />

eminences, sé<strong>par</strong>ées <strong>par</strong> <strong>de</strong>s vallées boisées.<br />

11 restait encore à cette époque<br />

quelques débris <strong>de</strong>s anciens édifices<br />

composés <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s pierres détaille<br />

que les Turcs enlevaient pour les porter<br />

à Constantinople.<br />

Ce rem<strong>par</strong>t <strong>de</strong> Byzance ne put arrêter<br />

les invasions <strong>de</strong>s barbares. En 248<br />

<strong>de</strong> J.-C. les Hérules firent une <strong>de</strong>scente<br />

au moyen d'une flotte <strong>de</strong> cinq cents<br />

barques, et vinrent assiéger Chrysopolis;<br />

mais après un combat naval ils furent<br />

obligés <strong>de</strong> battre en retraite jusqu'au<br />

Hiéron. Vers la même époque, en<br />

268, les Goihs firent une invasion en ßithynie<br />

et ravagèrent le pays jusqu'à Nicomédie<br />

; ils s'em<strong>par</strong>èrent du fort <strong>de</strong> Hiéron<br />

où ils déposèrent leur butin. Une<br />

garnison <strong>de</strong> Chalcédoine gardait les<br />

abords du château et du temple <strong>de</strong> Ju-<br />

(i) P. Gilles, <strong>de</strong> Bospli. Thracico, liv. III,<br />

ch. V.<br />

L'UNIVERS.<br />

niter ; les Grecs étaient supérieurs aux]<br />

barbares ; mais ils s'enfuirent à l'arrivée<br />

<strong>de</strong>s Gotbs et livrèrent Chalcédoine qui<br />

fut mise au pillage. ^ j<br />

La première ap<strong>par</strong>ition <strong>de</strong>s Russes<br />

dans le Bosphore eut lieu en 866 ; ils s'avancèrent<br />

jusqu'au Hiéron. Us revinjj<br />

rent une secon<strong>de</strong> fois en 942, dans la<br />

vingt-troisième année du règne <strong>de</strong> l'empereur<br />

Rotnanus, brûlèrent Sténia,, la<br />

flotte grecque, et s'em<strong>par</strong>èrent <strong>de</strong> Hiéron<br />

; enfin ils arrivèrent jusqu'à Byzance.<br />

Les Génois, maîtres <strong>de</strong> Galata, s'em-j<br />

<strong>par</strong>èrent du Hiéron, et y construisirent<br />

le château dont on voit encore aujourd'hui<br />

les ruines. L'écusson <strong>de</strong> la repu-]<br />

blique <strong>de</strong> Gênes subsiste au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la<br />

porte d'entrée.<br />

Au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> ce château jusqu'à l'eml<br />

bouchure <strong>de</strong> la mer Noire, il y avait<br />

plusieurs autres places qui ne sont plus<br />

connues que <strong>de</strong> nom; mais que P. Gil-]<br />

les, d'après Denys <strong>de</strong> Byzance, place!<br />

dans l'ordre suivant : Chelae, c'est-à-dire<br />

les échelles qui sont situées entre le fa-j<br />

num Jovis et Pantichium ; aujourd'hui<br />

ce lieu est complètement sauvage et<br />

désert, les montagnes couvertes <strong>de</strong> ver4<br />

dure <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt jusque dans la mer]<br />

Pantichium, différent <strong>de</strong> celui qui]<br />

était sur le golfe d'Astacus, est ainsi)<br />

nommé <strong>de</strong>s fortifications qui l'entouraient.<br />

Le cap Coracium, aujourd'hui le<br />

fort Poirus, est entouré <strong>de</strong> rochers ari-j<br />

<strong>de</strong>s où les corbeaux ont l'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

venir nicher; c'est à cause <strong>de</strong> ce fait<br />

que les Grecs lui ont donné le nom <strong>de</strong><br />

cap <strong>de</strong>s Corbeaux.<br />

Après ce cap vient la tour <strong>de</strong> Médée<br />

qui se présente sous la forme d'un rocher<br />

arrondi et dans le voisinage sont<br />

les Cyanées d'Asie qui sont loin <strong>de</strong> présenter<br />

l'aspect singulier <strong>de</strong>s Cyanées<br />

d'Europe. Strabon estime à vingt sta<strong>de</strong>s<br />

la distance entre ces <strong>de</strong>ux écueils.<br />

Vient ensuite le promontoire Ancyraeum<br />

où Jason prit une ancre <strong>de</strong> pierre<br />

qu'il abandonna plus tard. On arrive 1<br />

enfin au fleuve Rhebas dont l'embouchure<br />

est située à quatre-vingt-dix sta<strong>de</strong>s<br />

du Hiéron ; ce cours d'eau forme la<br />

limite <strong>de</strong> la presqu'île <strong>de</strong>s Thyniens, et<br />

marque, selon les Byzantins, l'entrée<br />

du Bosphore. Il porte encore le nom <strong>de</strong><br />

Riva ; un petit fort ou kavak est bâti I<br />

l'embouchure pour surveiller les côtes.


CHAPITRE X.<br />

HONOBIADE. DUSJE PBOS OLYMPUM.<br />

PBUSE SUB L'HYPIUS.<br />

Dans le principe, le cours du Sangarius<br />

formait la frontière orientale <strong>de</strong> la<br />

Bithynie; mais le roi Prusias, s'étant<br />

em<strong>par</strong>é <strong>de</strong> la côted'Héraclée, annexa tout<br />

ce territoire à ses États et en porta la<br />

frontière jusqu'à cette <strong>de</strong>rnière <strong>ville</strong> (1 ).<br />

Voilà pourquoi dans la même page du<br />

géoaraphe grec on trouve <strong>de</strong>ux limites<br />

différentes assignées à ce royaume.<br />

Nous avons dit que la province d'Honoria<strong>de</strong><br />

fut détachée <strong>de</strong> la Bithynie <strong>par</strong><br />

l'empereur Théodose qui voulut créer<br />

un nouveau dé<strong>par</strong>tement <strong>de</strong> l'empire en<br />

l'honneur <strong>de</strong> son oncle Honorius. Toute<br />

cette contrée fut dans l'origine détachée<br />

<strong>de</strong> la Paphlagonie, et cette <strong>de</strong>rnière<br />

province réunie au royaume <strong>de</strong> Pont<br />

n'eut plus même d'administration <strong>par</strong>ticulière.<br />

La province <strong>de</strong> l'Honoria<strong>de</strong><br />

est portée dans le synecdème <strong>de</strong> Hiéroclès<br />

comme contenant six <strong>ville</strong>s : Prusias,<br />

Héraclée, Tium, Claudiopolis, Hadrianopolis<br />

et Cratîa. Les trois premières<br />

sur la côte, les trois autres dans l'intérieur<br />

<strong>de</strong>s terres. Les noms d'Héraclée<br />

(Heraclea Pontica) et <strong>de</strong> Tium sont trop<br />

intimement liés à l'histoire du royaume<br />

<strong>de</strong> Pont pour en être détachés; nous<br />

nous occuperons <strong>de</strong> l'histoire <strong>de</strong> ces<br />

<strong>ville</strong>s quand nous étudierons cet ancien<br />

royaume.<br />

DDSTCHÉ.<br />

Après avoir, franchi le Sangarins,<br />

on arrive au village <strong>de</strong> Tchandak où<br />

se trouve une maison <strong>de</strong> poste. On<br />

rencontre çà et là quelques vestiges<br />

d'antiquité qui prouvent qu'on se tient<br />

toujours sur la gran<strong>de</strong> voie romaine<br />

qui conduisait dans l'est; on traverse<br />

ensuite une plaine découverte et assez<br />

bien cultivée, et l'on arrive au village<br />

<strong>de</strong> Dustché, dont le nom rappelle celui<br />

<strong>de</strong> Dusae Pros Olympum, petite <strong>ville</strong><br />

plus connue <strong>par</strong> les cartes itinéraires<br />

que <strong>par</strong> l'histoire. Otter, dans ses voyages,<br />

est le premier qui ait i<strong>de</strong>ntifie la<br />

rille.antique avec le petit village, et les<br />

observations faites <strong>de</strong>puis lors n'ont fait<br />

(i) Strabôn, XII, 543,<br />

ASIE MINEURE. 85<br />

que confirmer son opinion. Quelques<br />

restes d'antiquité prouvent qu'en effet<br />

ce village est situé sur une station antique.<br />

En continuant vers l'est, on arrive<br />

au bord d'une petite rivière nommée<br />

Milan sou, qui n'est autre que le<br />

fleuve Hypius, dont le cours n'a pas une<br />

gran<strong>de</strong> étendue. Il se jette dans la mer<br />

à cent quatre vingts sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> l'embouchure<br />

du Sangarius. On ne peut douter<br />

qu'il ne soit i<strong>de</strong>ntique avec la rivière<br />

nommée Milan tchnï <strong>par</strong> les Turcs.<br />

Dans l'antiquité l'embouchure <strong>de</strong> l'Hypius<br />

offrait un assez bon mouillage aux<br />

navires, et la flotte <strong>de</strong> Mithridate y<br />

trouva un refuge momentané pendant<br />

une violente tempête.<br />

La rivière prend sa source dans les<br />

montagnes voisines <strong>de</strong> Boli, qui sont appelées<br />

indistinctement mont Liperus et<br />

mont Hypius (I). Elle traverse un petit<br />

lac, et après avoir contourné une colline<br />

boisée, va sejeterà la mer après un cours<br />

<strong>de</strong> trentre kilomètres environ. Tout ce<br />

territoire fut conquis sur les Maryandîniens<br />

<strong>par</strong> les Bebryces, qui s'avancèrent<br />

jusqu'au fleuve Hypius, et l'on bâtit en<br />

ce lieu une <strong>ville</strong> qui fut nommée Hypia<br />

(2).<br />

La dynastie <strong>de</strong>s Prusias regardait<br />

comme une gloire d'attacher à la fondation<br />

d'une <strong>ville</strong> un nom qui <strong>de</strong>vait<br />

rester à jamais célèbre. A près <strong>de</strong>ux <strong>ville</strong>s<br />

<strong>de</strong> Pruse <strong>fondée</strong>s l'une au pied <strong>de</strong><br />

l'Olympe et l'autre au bord <strong>de</strong> la mer,<br />

Prusias IV voulut créer une <strong>ville</strong> <strong>de</strong> son<br />

nom dans la province qu'il avail récemment<br />

conquise et fut te fondateur <strong>de</strong><br />

Pruse sur l'Hypius, épithète qui lui fut<br />

donnée pour la distinguer <strong>de</strong>s autres<br />

<strong>ville</strong>s du même nom. Comme les historiens<br />

ne font plus aucune mention <strong>de</strong> la<br />

<strong>ville</strong> d'Hypia, il est à croire que le nom<br />

<strong>de</strong> Pruse fut donné à cette <strong>ville</strong> d'Hypia<br />

et qu'on créa Prusa ad Hypium.<br />

Cette <strong>ville</strong> est connue <strong>par</strong> ses médailles;<br />

elle est mentionnée <strong>par</strong> Pfolémée, et un<br />

<strong>de</strong> ses évêques, nommé Hesychius <strong>de</strong><br />

Pruse surl'Hypius, Élisait <strong>par</strong>tie du concile<br />

<strong>de</strong> Nicée.<br />

Les ruines <strong>de</strong> Pruse sur FHypius ont<br />

été retrouvées sur l'emplacement même<br />

<strong>de</strong> la petite <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Eski bagh, que les<br />

(1) Pline, V, ch. 3a.<br />

(i)Schol. Apoll., I. II, v. 797.<br />

«


habitants prononcent Uskubi. Eski<br />

bagh signifie ancien jardin, rappelant<br />

sans doute un <strong>de</strong> ces grands <strong>par</strong>cs <strong>de</strong><br />

plaisance nommés <strong>par</strong>adis, dans lesquels<br />

les princes d'Orient se livraient aux plaisirs<br />

<strong>de</strong> lâchasse.<br />

La <strong>ville</strong> turque s'élève au milieu <strong>de</strong>s<br />

jardins sur le penchant d'une colline<br />

qui était couronnée <strong>par</strong> l'acropole <strong>de</strong><br />

Pruse ; c'est encorda-rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>l'agha.<br />

Les murailles <strong>de</strong> l'ancienne <strong>ville</strong>, encore<br />

conservées, se prolongent en <strong>par</strong>tie<br />

sur la colline et en*<strong>par</strong>tie dans la<br />

plaine. Elles sont <strong>de</strong> diverses époques<br />

et l'on observe même quelques <strong>par</strong>ties<br />

qui sont faites avec <strong>de</strong>s débris <strong>de</strong> monuments<br />

antiques. Une <strong>de</strong>s portes attire<br />

surtout 1 l'attention ; elle est composée<br />

d'énormes pierres, et l'architrave qui<br />

la couronne est d'une seule pièce et n'a<br />

pas moins <strong>de</strong> quatre mètres <strong>de</strong> long;<br />

mais les fortes dimensions <strong>de</strong>s pierres<br />

ne suffisent pas pour «donner le cachet<br />

<strong>de</strong> la haute antiquité ; cette porte ne <strong>par</strong>aît<br />

pas antérieure aux murailles romaines.<br />

A- l'exception do théâtre, dont la cai'éa<br />

ou salle, creusée dans le flanc <strong>de</strong><br />

la colline, est assez bien conservée. 11 ne<br />

reste que <strong>de</strong>s débris <strong>de</strong>s autres monuments<br />

; les gradins du théâtre sont encore<br />

en <strong>par</strong>tie à leur place; le proscenium<br />

est détruit et Von ne peut, le restituer<br />

que <strong>par</strong> conjecture. Les-buissons<br />

qui «ouvrent le soi, les hautes herbes<br />

qui envahissent les monuments antiques<br />

sont un obstacle à <strong>de</strong>s recherches<br />

superficielles; mais il est certain que<br />

<strong>de</strong>s fouilles entreprises en cet endroit<br />

qui n'a jamais été exploite comme carrière<br />

donnerait lieu a <strong>de</strong>s découvertes<br />

intéressantes. Il ne faut pas oublier que<br />

moins une <strong>ville</strong> a eu d'importance dans<br />

les temps mo<strong>de</strong>rnes, plus on doit espérer<br />

d'y faire <strong>de</strong>s découvertes d'antiquités.<br />

M. Bore, dans sa correspondance, fait<br />

mention d'une ancienne statue <strong>de</strong> la<br />

Vierge qu'il aurait découverte dans un<br />

jardin. Il est à croire qu'il aura confondu<br />

quelque statue antique aveo la<br />

représentation <strong>de</strong> la Vierge; car nonseulement<br />

ce n'est pas dans l'usage <strong>de</strong><br />

l'Église d'Orient d'avoir <strong>de</strong>s figures <strong>de</strong><br />

ron<strong>de</strong> bosse, mais on peut dire que bien<br />

peu <strong>de</strong> bas-reliefs chrétiens ont ré­<br />

L'UNIVERS;<br />

v<br />

sisté à la fureur ? «les iconoclastes 11<br />

Les habitants <strong>de</strong> tous ces districts]<br />

<strong>par</strong>aissent mener une vie assez heureuse»<br />

Le pays est extrêmement fertile, et <strong>de</strong><br />

belles forêts, qui ap<strong>par</strong>tiennent toujour»<br />

au pays boisé <strong>de</strong> l'Olympe ( la mer <strong>de</strong>s<br />

arbres), couronnent les montagnes. L'exploitatioo<br />

<strong>de</strong>s bois est une source in]<br />

cessante <strong>de</strong> travail, et <strong>de</strong> nombreuses<br />

immunités sont accordées aux paysans<br />

bûcherons en compensation <strong>de</strong>s charl<br />

ges que leur impose le gouvernement]<br />

Le bétail est nombreux ; mais dans ces<br />

pays trop humi<strong>de</strong>s, le mouton ne pros-j<br />

père pas aussi bien que dans la région<br />

<strong>de</strong>s hauts plateaux. La nature sylvestre<br />

est peu différente <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> l'ItalieJ<br />

mais infiniment plus belle et plus abonjï<br />

dante que celle <strong>de</strong>s côtes <strong>de</strong> Provence»<br />

Le goût <strong>de</strong> la marine n'est pas tres-rél<br />

paudu dans, les villages d'alentour, et<br />

les Turcs <strong>par</strong>aissent plus disposés à se<br />

livrer aux travaux <strong>de</strong>s champs.<br />

CHAPITRE XL<br />

ITINÉRAIRE DE NICOMÉDIE AU LAC<br />

DE SABANDJA (SOPHON).<br />

La route <strong>de</strong> Nicomédie à Sabandja se<br />

dirige vers l'est. On côtoie d'abord les<br />

salines, qui peuvent avoir <strong>de</strong>ux kilomel<br />

très <strong>de</strong> long sur huit <strong>de</strong> large. Ici les<br />

collines cessent <strong>de</strong> suivre les contour!<br />

<strong>de</strong> la baie pour se diriger vers le nord]<br />

et forment ainsi une large vallée qui a<br />

environ huit kilomètres d'étendue et<br />

dont la culture est riche et variée. Après<br />

six kilomètres <strong>de</strong> marche, on traverse<br />

sur un pont la petite rivière Kérès, qui<br />

va se jeter dans le golfe. Pendant les<br />

vingt-quatre kilomètres que l'on <strong>par</strong>court<br />

<strong>de</strong> JSicomédie à Sabandja on ne<br />

quitte pas cette vallée, on marche touf<br />

jours sur le terrain d'alluvion qui renferme<br />

peu <strong>de</strong> cailloux; il est arrosé <strong>par</strong><br />

un certain nombre <strong>de</strong> ruisseaux qui <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong>s montagnes du nord; <strong>de</strong> là<br />

sa gran<strong>de</strong> fertilité. Tout porte à croiie<br />

que dans la haute antiquité, le régime<br />

<strong>de</strong>s eaux <strong>de</strong> ces régions était tout à fait<br />

différent. Le Sangarius, dont le cours<br />

moyen est <strong>de</strong> l'est a l'ouest, <strong>de</strong>vait suivi<br />

la ligne <strong>de</strong>s montagnes <strong>de</strong> Sabandja et<br />

(0 E. Bore, Correspond.^ 197-300.


venir déboucher dans le goljfe <strong>de</strong> Nicomédie<br />

en traversant la dépression du<br />

lac <strong>de</strong> Sabandja, comme le Rhyndacufj<br />

traverse le lac Apollonias (1),, Les all|ivions<br />

ayant exhaussé le terrain entre, le<br />

lac et le golfe, le fleuve fu% forcé <strong>de</strong><br />

prendre la direction qu'il suit aujourd'hui.,<br />

et le Sangarius alla se jeter dans<br />

la mer Noire, en laissant <strong>de</strong>s marécages<br />

qui marquent son ancien lit. ; ,".'<br />

A droite <strong>de</strong> la route <strong>de</strong> Nicom^die à<br />

Sabandja,la chaîne <strong>de</strong> collines s'élève insensiblement<br />

et se couvre <strong>de</strong> taillis qui<br />

plus loin <strong>de</strong>viennent uue véritable forêt<br />

ap<strong>par</strong>tenant à cette région <strong>de</strong> l'Olympe,<br />

que les indigènes appellent Aga-tcty <strong>de</strong>nisia<br />

Mer<strong>de</strong>s arbres).<br />

On arrive après six heures <strong>de</strong> marche<br />

à Sabandja, située dans la <strong>par</strong>tie sud du<br />

lac, mais non pas sur la rrveimmédiate,<br />

dont elle est sé<strong>par</strong>ée <strong>par</strong> <strong>de</strong>s jardins et<br />

<strong>de</strong>s cultures..<br />

Sabandja n'est qu'une <strong>ville</strong> <strong>de</strong> transit; I<br />

elle doit son existence aux nombreuses<br />

caravanes qui la traversent en venant<br />

<strong>de</strong> Test ou du sud <strong>de</strong> la presqu'île. On<br />

y compte <strong>de</strong> cinq à six cents maisons,<br />

une mosquée <strong>de</strong> chétive ap<strong>par</strong>ence, et<br />

<strong>de</strong>s khans pour les 'voyageurs. Aucun<br />

monument <strong>de</strong> l'ancienne <strong>ville</strong> ne subsiste<br />

plus, on trouve çà et là dans les<br />

rues <strong>de</strong>s fragments d architecture qui<br />

sont presque tous <strong>de</strong> l'époque du Bas-<br />

Empire.<br />

LE LA.C DE SOPHON.<br />

A défaut d'autres renseignements,<br />

la présence du lac suffirait pour permettre<br />

d'i<strong>de</strong>ntifier Sabandja avec l'an«<br />

(Ï) Sollte Texters Angabe richtig sein.'<br />

dass die ganze Einsenkung vom Nicoraedia<br />

Golf ostwärts zum Sabandscha-See nur aus<br />

aufgeschwemmtem Land 'von Sand und-<br />

Kieselchutt bestän<strong>de</strong>, so wäre es nicht un-;<br />

warscheinlich, das <strong>de</strong>r Sangarius einst dort;<br />

seine Ausladung zum Meere hatte,... und<br />

sein Bette nordwärts erst eiuem jungem<br />

Durchbruche verdankte, Carl. Ritler : Erdkun<strong>de</strong>,<br />

18 <strong>par</strong>i. 3° vol., pag. 676.<br />

Nous, ne pouvons développer plus longuement<br />

un sujet qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait un mémoire<br />

special; nous recommandons celte question<br />

aux voyageurs géologues qui visiteront celle<br />

province.<br />

m<br />

cienne Sopbpn (IV. Le jaç <strong>de</strong> Sophon a<br />

reçu dans le Bas-Empire différentes dénominations<br />

;\r\mmien Marcellin l'appelle<br />

le lac <strong>de</strong> Sunon, Sunonensis lacus<br />

(2); Anne Comnène lui' donné 1 lié<br />

nom <strong>de</strong> Baana (3). il ej>t sé<strong>par</strong>é <strong>de</strong> là.'<br />

<strong>ville</strong> <strong>par</strong> <strong>de</strong>s jardins assez étendus. Saf*<br />

longueur est d'environ dix kilomètres,<br />

et sa largeur n'en a pas plus dè-six. Du<br />

côté <strong>de</strong> Sabandja, c'est-a-dire <strong>de</strong> la<br />

gran<strong>de</strong> vallée, cest une plage sablonneuse;<br />

mais du côté du nord et du sud,<br />

le lac est encaissé dans une chaîne <strong>de</strong><br />

montagnes boisées qui <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt jus-<br />

Tu*au l)ord <strong>de</strong> l'eau, ta circonférence'<br />

3<br />

S, lac est estimée <strong>par</strong> Otter à quinze<br />

milles, soit vingt sept kilomètres et <strong>de</strong>mi.<br />

Tchihatchéff estime son pourtour à<br />

trente-six kilomètres : Les eaux sont<br />

douces et potables.<br />

Il est une loi générale sur les lacs,<br />

c'est que leurs eaux sont douces toutes<br />

les fois qu'ils sont en communication<br />

avec la mer ; du moment qu'ils sont sans<br />

communication, ils <strong>de</strong>viennent <strong>de</strong> petites<br />

mers intérieures : leurs eaux sont<br />

saumàtres ou salées.<br />

La pensée d'utiliser les eaux <strong>de</strong> ce<br />

lac pour créer un canal <strong>de</strong> navigation<br />

entre ce pays et le golfe <strong>de</strong> Nicomédie<br />

a souvent été agitée dans l'antiquité<br />

et examinée <strong>de</strong> nos jours. M. <strong>de</strong> Harri-\<br />

mer (4) a fait, au point <strong>de</strong> vue historique,<br />

une étu<strong>de</strong> approfondie <strong>de</strong> la<br />

question; mais le projet proposé <strong>par</strong><br />

Pline le Jeune à Trajan ne <strong>par</strong>ait pas<br />

avoir reçu un commencement d'exééUf<br />

tion, du moins il n'en existe aucune<br />

trace (5).<br />

Pour se rendre au pont du Sangarius,<br />

qu'on appelle dans le pays Bech-Kouprou<br />

(les Cinq ponts), on commence<br />

a côtoyer le lac; mais bientôt les collines'<br />

abruptes venant jusque dans les eaux,<br />

on est obligé <strong>de</strong> marcher pendant plus<br />

d'une heure dans le lac même sur un<br />

fond <strong>de</strong> sable; dans quelques endroits<br />

les chevaux ont <strong>de</strong> ieau jusqu'aux<br />

sangles. Les collines sont composées <strong>de</strong><br />

roches quartzeuses avec du sable rou-<br />

(1) Cédrénus, II, p. 628, Hist, mêlée. 11<br />

(a) Ammieu Marcellin, liv. XXVI, ch. vin.<br />

(3) X, 28a.<br />

(4) Uublick auf einer Reise nach Broussa.<br />

jj5) Pline, jSjRJ liy. X, )«$ 4V,'


88<br />

L'UNIVERS.<br />

ceâtre qui contient du fer hydraté. Les Justinien a commencé d y faire un<br />

eaux du lac en minant constamment la pont, et il s'applique avec une telle arbase<br />

<strong>de</strong>s collines ont causé <strong>de</strong>s éboule- <strong>de</strong>ur à cet ouvrage, que je ne doute pas<br />

ments qui ont taillé presque à pic le ter- qu'il ne l'achève en peu <strong>de</strong> temps (1). »<br />

rain <strong>de</strong> la rive; cependant <strong>de</strong> distance en L'ouvrage tut en effet terminé dans<br />

distance s'ouvrent <strong>de</strong> petites vallées dont la trente-quatrième année du règne <strong>de</strong><br />

la verdure contraste agréablement avec Justinien, c'est-à-dire en 561 <strong>de</strong> J.-C.f<br />

ce sable ari<strong>de</strong>.<br />

D'après Pau! Diacre, on détourna le San­<br />

Bientôt on abandonne les bords du<br />

garius <strong>de</strong> son lit pour exécuter la fon­<br />

lac pour entrer dans <strong>de</strong>s terrains madation<br />

<strong>de</strong>s piles.<br />

récageux mais cultivés; ce n'est qu'au Constantin Porphyrogénète rappelle!<br />

bout d'une heure que l'on rencontre la en ces termes la construction <strong>de</strong> ce mo­<br />

petite rivière qui sort du lac <strong>de</strong> Sabandja nument. « Le thème Optimatum est tra­<br />

et qu'on appelle Kilissou; elle passe sous versé <strong>par</strong> le fleuve Sangarius, dont les<br />

un pont romain d'une seule arche, et rives sont jointes <strong>par</strong> un pont digne<br />

tourne ensuite vers le sud. A peu <strong>de</strong> d'être vu. Il fut bâti <strong>par</strong> l'empereur<br />

distance <strong>de</strong> là, on franchit une colline Justinien, qui ne sera jamais assez glori­<br />

<strong>de</strong> grès rouge, et l'on arrive au pont, fié. Sur une <strong>de</strong>s pierres du pont est<br />

monument d'une rare magnificence et placée l'inscription suivante :<br />

qui mérite tous les éloges qu'en ont fait<br />

les contemporains.<br />

Toi aussi, comme l'orgueilleuse Hespérie,<br />

les peuples médiques et toutes les bor<strong>de</strong>s<br />

barbares, Sangarius, dont le cours impé­<br />

CHAPITRE XII.<br />

tueux est rompu <strong>par</strong> ces voûies, tu coules<br />

maintenant esclave d'un travail souverain, ja­<br />

PONT DE JUSTINIEN SUB LE SANGA- dis rebelle aux navires,, jadis indompté,<br />

BIUS.<br />

m a aliénant tu gis sous les entraves d'une<br />

pierre inflexible (aj.<br />

L'empereur Justinien, pour faciliter<br />

les communications d'un bout à l'autre Cette inscription n'existe plus, mais le<br />

<strong>de</strong> l'empire, songea <strong>par</strong>ticulièrement, monument est presque intact. Il est<br />

dans les travaux qu'il entreprit, à éta­ composé <strong>de</strong> huit arches et a quatre cent<br />

blir <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s routes et à restaurer vingt-neuf mètres <strong>de</strong> longueur. L'ou­<br />

celles qui existaient déjà. La plus imverture <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s arches est <strong>de</strong> vingtportante<br />

était celle qui conduisait <strong>de</strong> trois mètres, et la longueur <strong>de</strong>s piles <strong>de</strong><br />

Nicomédie aux confins <strong>de</strong> la Syrie en six mètres cinquante centimètres. Il est<br />

traversant la Phrygie et la Cappadoce. bâti en grands blocs <strong>de</strong> pierre calcaire ; I<br />

Cette route était coupée à peu <strong>de</strong> dis­ les arches sont à plein ceintre et s'élètance<br />

<strong>de</strong> Sophon <strong>par</strong> le fleuve Sangavent toutes à la même hauteur, <strong>de</strong> sorte I<br />

rius; c'est là que l'empereur entreprit que le tablier du pont est <strong>par</strong>faitement)<br />

<strong>de</strong> construire le pont monumental qui horizontal. Au niveau dû pont sont<br />

existe encore. Il fut sans doute com­ ménagées sur chaque pile <strong>de</strong>s héxèdres<br />

mencé vers l'an 553, lorsque Justinien exactement comme au Pont-Neuf àj<br />

fit la paix avec les Perses. Il n'était pas Paris.<br />

encore achevé lorsque Procope écrivait A l'extrémité du côté du lac est une<br />

son livre, Des Edifices. « Le Sangarius, gran<strong>de</strong> porte en forme d'arc <strong>de</strong> triom­<br />

dit l'historien <strong>de</strong> Justinien , ce fleuve phe renfermant un escalier en hélice<br />

dont le cours est si rapi<strong>de</strong>, dont la pro­ pour monter au sommet<br />

fon<strong>de</strong>ur est un abîme et dont la largeur A l'autre extrémité est une gran<strong>de</strong><br />

ne peut être com<strong>par</strong>ée qu'à l'étendue <strong>de</strong><br />

niche <strong>de</strong> la même dimension que fare :<br />

1 Ocean, n avait jamais souffert <strong>de</strong> pont, c'était un lieu <strong>de</strong> repos pour les vova-<br />

Ceux qui étaient assez hardis pour le BRUTS. geurs.<br />

sieurs traverser bateaux attachaient et passaient ensemble <strong>de</strong>ssus; mais plu- En ce point la route se bifurque ; une<br />

cela ne se faisait pas sans danger, car branche se dirige vers le nord pour enle<br />

fleuve, rompant les cordages, disper­ (i) Procope, De Mdif.t lïv. V, ch. ai.<br />

sait les bateaux et noyait les hommes. (a) C. Porphyrogénète, De Them., V.


teer dans la Paphla&onie ; l'autre embranchement<br />

tournait vers le sud pour<br />

conduire en Phrvgie.<br />

Une chose curieuse, c'est que le fleuve<br />

Sangarius, si ru<strong>de</strong>ment traité dans<br />

l'inscription <strong>de</strong> Justinieu, n'a pas con-,<br />

sentie se soumettre à l'éternel esclavage<br />

dont il était menacé ; peu à peu son<br />

cours s'est porté à l'est, et aujourd'hui<br />

il ne passe plus sous ce pont qu'un mince<br />

ruisseau marécageux : le grand courant<br />

s'est transporté a l'est; ceci tendrait à<br />

prouver qu'en effet le pont <strong>de</strong> Justinien<br />

fut établi sur un lit factice qui s'est peu<br />

à peu trouvé encombré <strong>par</strong> le limon du<br />

fleuve.<br />

Ces mouvements <strong>de</strong>s rivières <strong>de</strong> l'Asie<br />

ne sont pas sans exemple ; on peut<br />

en cjter plusieurs qui se sont ouvert<br />

<strong>de</strong> nouvelles embouchures <strong>de</strong>puis les<br />

temps historiques.<br />

Lorsque l'empire byzantin se vit menacé<br />

<strong>par</strong> tous les peuples <strong>de</strong> l'Islam,<br />

les Perses, les Mongols et les Tartares,<br />

qui, <strong>de</strong>s régions <strong>de</strong> l'est, se ruaient sur<br />

Constantinople, le cours du Sangarius<br />

<strong>de</strong>vint une ligne <strong>de</strong> défense bien plus<br />

importante qu'au<strong>par</strong>avant. Aussi les<br />

Comnènes eurent-ils soin <strong>de</strong> faire construire<br />

sur ses rives <strong>de</strong>s châteaux pour<br />

surveiller les. ennemis. Les abords du<br />

pont furent laissés dans l'abandon;<br />

les marécages commencèrent à se former<br />

et le fleuve peu à peu changea la<br />

direction <strong>de</strong> son lit.<br />

Les culées du pont sont assises <strong>de</strong><br />

<strong>par</strong>t et d'autre sur <strong>de</strong>s collines <strong>de</strong> grès<br />

rouge dont l'inclinaison concor<strong>de</strong>. Du<br />

côté du lue elles forment un éperon qui<br />

resserre le défilé <strong>par</strong> où les eaux s'échappent<br />

pour aller au Sangarius. ^fl |<br />

Attenant à la culée orieutale du pont,<br />

on remarque une construction, encore<br />

bien conservée, qui se compose d'un<br />

certain nombre <strong>de</strong> salles voûtées ; tout<br />

est bâti en pierres <strong>de</strong> grand ap<strong>par</strong>eil<br />

comme le reste <strong>de</strong> l'édifice. Il y a lieu<br />

<strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r cette annexe comme une station<br />

<strong>de</strong> veredarii, ou une <strong>de</strong> ces maisons<br />

<strong>de</strong> poste qui jalonnaient cette gran<strong>de</strong><br />

voie jusqu aux confins <strong>de</strong> la Cilicie.<br />

Après avoir traversé le pont, on rejoint<br />

la route qui se dirige au nord-est,<br />

et l'on arrive au peut village <strong>de</strong> Adabazari<br />

(le Bazar <strong>de</strong> 111e), ainsi nommé<br />

d'un Ilot formé <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux branches du<br />

ASIE MINEURE. 89<br />

Sangarius. Ce village est situé sur la<br />

rive gauche du fleuve, qui en cet QH<br />

droit a une largueur d'environ cent<br />

mètres, et se divise ensuite en <strong>de</strong>ux<br />

branches qui forment ce qu'on appelle<br />

l'île. Pendant l'été, ces <strong>de</strong>ux branches<br />

sont presque à sec ; ce qui explique le<br />

nom <strong>de</strong> Xérobates que les anciens donnaient<br />

quelquefois au Sangarius (1).<br />

Les <strong>de</strong>ux branches du fleuve sont<br />

réunies <strong>par</strong> Un double pont que l'on<br />

nomme Uzun-kouprou, et la route se<br />

continue vers l'est jusqu'à ce qu'on rencontre<br />

un autre petit fleuve nommé<br />

Milan sou, l'ancien Hypius.<br />

CHAPITRE XIII.<br />

ITINÉRAIRE DE SABANDJ A A GEÏVEH (2),<br />

L'ANCIENNE TOTTOEUM , ET A NICEE.<br />

En sortant <strong>de</strong> Sabandja, on suit la<br />

gran<strong>de</strong> route <strong>de</strong> caravane qui traverse<br />

obliquement l'Asie, et l'on fait quelques<br />

kilomètres dans la direction <strong>de</strong> l'est. Le<br />

terrain que l'on <strong>par</strong>court est très-acci<strong>de</strong>nté.<br />

Il est presque entièrement composé<br />

d'argile plastique entremêlée <strong>de</strong><br />

marnes verdâtrès contournées, talqueuses,<br />

qui <strong>par</strong>aissent servir <strong>de</strong> lit à l'argile.<br />

La nature <strong>de</strong>s cailloux roulés <strong>par</strong> les<br />

torrents indique que ces terrains ne s'éten<strong>de</strong>nt<br />

pas fort loin ; car les ruisseaux<br />

charient <strong>de</strong> nombreux fragments <strong>de</strong><br />

quartz et <strong>de</strong> serpentine.<br />

Après neuf kilomètres <strong>de</strong> marche, on<br />

se retrouve sur le terrain <strong>de</strong> grès rouge<br />

<strong>de</strong> la même formation que les collines<br />

du pont <strong>de</strong> Sabandja, et sans doute le<br />

même que Ton retrouve à Nicomédie.<br />

Après avoir franchi cette colline, la nature<br />

du terrain et du pays change subitement;<br />

on <strong>de</strong>scend dans une vallée<br />

profon<strong>de</strong> enclavée dans <strong>de</strong>s montagnes<br />

presque à pic, composées d'un poudingue<br />

dans lequel il entre <strong>de</strong>s cailloux <strong>de</strong><br />

quartz et <strong>de</strong> jaspe, et d'une roche blanche<br />

analogue à la baryte sulfatée. Le ciment<br />

naturel qui unit ces différentes natures<br />

<strong>de</strong> roche n'offre aucune solidité, <strong>de</strong><br />

sorte qu'elle se désagrège facilement,<br />

et ses <strong>par</strong>ties constituantes vont se répandre<br />

dans le lit <strong>de</strong>s torrents.<br />

(i) Plutarch,, <strong>de</strong> Muvïis, 1. U, p. 34.<br />

(a) Prononcez Ghéïveh.


go I/UWVERS* jH<br />

Le cours do fleuve qui arrose cette d'antiquité pour être certain qu'elle ocj<br />

vallée, grossi <strong>par</strong> les eaux et la fonte cupe la situation d'une Ville antique : «<br />

<strong>de</strong>s neiges, vient chaque année ronger y a sur la gran<strong>de</strong> place plusieurs dé-'*<br />

neu à peu la base <strong>de</strong>s falaises, qui s'é- bris <strong>de</strong> sarcophages, et un autel ornéI<br />

croulent en élargissant la vallée. Il n'est <strong>de</strong> palmettes sur lequel on ht en grands<br />

pas difficile <strong>de</strong> trouver au milieu <strong>de</strong>s caractères le nom AXIAAM^; un autre<br />

cailloux qui encombrent le lit <strong>de</strong>s ruis- fragment <strong>de</strong> cippe en marbre porte sur<br />

seaux <strong>de</strong>s fragments <strong>de</strong> jaspe rubané sa <strong>par</strong>tie supérieure _jr trace <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

rouge et vert d'une gran<strong>de</strong> beauté; les pieds qui ap<strong>par</strong>tenaient à une statue <strong>de</strong><br />

<strong>par</strong>ties polies <strong>par</strong> les eaux laissent voir gran<strong>de</strong>ur naturelle.<br />

les plus brillantes couleurs.<br />

En jetant les yeux sur les itinéraires<br />

En continuant la route, on se trouve anciens, on reconnaît une <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Totsur<br />

une formation schisteuse qui engendre<br />

<strong>de</strong>s rocs pointus et <strong>de</strong>s formes<br />

très-tourmentées; on arrive ensuite à<br />

une vallée transversale qui est un <strong>de</strong>s<br />

affluents du Sangarius,; c'est une rivière<br />

rapi<strong>de</strong>, dont les eaux sont jaunâtres<br />

et charrient beaucoup <strong>de</strong> sableelle<br />

coule au milieu d'une formation<br />

<strong>de</strong> poudingue très-dur, qui s'étend presque<br />

jusqu'à Nicée.<br />

La <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Geïveh est située sur la<br />

rive droite du Sangarius ; on traverse le<br />

fleuve sur un pont musulman <strong>de</strong> six<br />

arches, ouvrage du sultan Bayazid. La<br />

vallée a environ quatre kilomètres <strong>de</strong><br />

large. Geïveh est dans la plaine, et du<br />

côté du sud Ja vue est bornée <strong>par</strong> la<br />

ligne <strong>de</strong>s montagnes du Toumandji<br />

dagh, qui fait <strong>par</strong>tie <strong>de</strong> la chaîne <strong>de</strong> l'Olympe.<br />

De nombreuses cultures <strong>de</strong> mûrier<br />

et <strong>de</strong>s jardins bien arrosés couvrent<br />

les environs. Les melons et les<br />

fruits <strong>de</strong> Geïveh sont célèbres dans la<br />

contrée ; mais la difficulté <strong>de</strong> transport<br />

gui existe dans toute la Turquie d'Asie<br />

force <strong>de</strong> les consommer presque sur<br />

place; on en porte cependant jusqu'à<br />

Broussa. Geïveh était autrefois une <strong>ville</strong><br />

assez considérable; elle avait au <strong>de</strong>là <strong>de</strong><br />

trois cents maisons; elle fut totalement<br />

ruinée <strong>par</strong> une inondation du Sangarius<br />

qui la rasa presque entièrement sous le<br />

règne <strong>de</strong> Mourad IV (1640); jamais<br />

elle ne s'est relevée <strong>de</strong> cet échec. Les<br />

maisons construites <strong>de</strong>puis cette époque<br />

<strong>par</strong>aissent avoir été bâties en prévision ont démontré être la même que fe fleuve<br />

d'une autre inondation ; elles sont pour Qallus, qui, selon Strabon, prenait sa<br />

la plu <strong>par</strong>t élevées sur <strong>de</strong> grands piliers <strong>de</strong><br />

bois et bâties en terre battue.<br />

Il y a plusieurs caravanserais et une<br />

1<br />

tœum, située sur la route <strong>de</strong> Constantinople<br />

à Antioche, entre Oriens Medio<br />

et Dablis, à vingt-huit milles <strong>de</strong> la pre"]<br />

mière et à égale distance <strong>de</strong> l'autre.<br />

Tottceum se trouve également sur la<br />

route <strong>de</strong> Nicée à Ancyre, et dans la<br />

vallée du Sangarius elle est marquée k<br />

quarante milles <strong>de</strong> Nicée, distance qui*<br />

convient <strong>par</strong>faitement à Geïveh (ijj)<br />

Dabls est à vingt-huit milles, «t Dadas**<br />

tana, où mourut l'empereur Jovien (2)J<br />

à quarante-cinq milles. La table<strong>de</strong> Peutinger<br />

est aussi d'accord avec ces dis*'<br />

tances. Dadastana est marquée <strong>par</strong> Am*<br />

mien Marcellin comme étant sur Ia 5 |<br />

frontière <strong>de</strong> la Bithynie et <strong>de</strong> la Galaue.<br />

Il y a sept heures <strong>de</strong> marche ou<br />

vingt-huit kilomètres entre Sabandja et<br />

Geïveh.<br />

Ak serai, la Maison blanche (douze<br />

kilomètres <strong>de</strong> Geïveh ), petite <strong>ville</strong> sans<br />

importance, est située sur la rive gauche<br />

du Sangarius, que l'on traverse sur un<br />

bac en venant <strong>de</strong> Geïveh ; les fragments<br />

d'architrave et <strong>de</strong> colonnes que l'on peut<br />

trouver dans Ak serai proviennent <strong>de</strong><br />

Lefké, l'ancienne Leueae, qui en est dis*<br />

tante <strong>de</strong> huit kilomètres ; mais elle n'est<br />

pas sur la route directe <strong>de</strong> Nicée.<br />

LEUCiE.<br />

La <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Leueae est située sur une<br />

petite rivière appelée Lefké sou que lé ]<br />

colonel Leake et d'autres géographes<br />

source dans la Phrygie Hellespont!que<br />

(3) et allait se jeter dans le San*<br />

gariusà trois cents sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong>Nicomédie;<br />

chétive mosquée; autrefois elle avait<br />

plusieurs écoles et <strong>de</strong>s mosquées, qui ont<br />

dis<strong>par</strong>u.<br />

On trouve à Geïveh assez <strong>de</strong> vestiges<br />

(x) itinér. Ant, p. 141§<br />

(a) Ammien Marc.,, 1. XXV, ch. x*.<br />

(3) Strabon, XII, 543.


ASIE MINEURE. »t<br />

nous pensons cependant qu'il est difc nombreux dissémjnés^sur les collines<br />

férent du fleuve Gallus cité <strong>par</strong> Pline(l), vertes animent le paysage, dont le fond<br />

duquel les Galles, prêtres <strong>de</strong> Cybele,<br />

avaient pris leur nom ; ee <strong>de</strong>rnier fleuve<br />

doit couler aux epvirons <strong>de</strong> Pessinunte.<br />

Le Gallus qu'on appelle Lefké sou<br />

prend sa source dans le versant orientale<br />

<strong>de</strong> l'Olympe ; on l'appelle Bedrè<br />

tchaï, il coulé vers l'est, rassemblant tous<br />

les cours d'eau secondaires et notamment<br />

celui qui s'échappe du lac d'Ainefa<br />

gheul (le Lac du Miroir), voisin<br />

<strong>de</strong> la petite <strong>ville</strong> du même nom dont le<br />

site répond à celui d'Angelocomé <strong>de</strong>s<br />

Byzantins; enfin il va se jeter dans le<br />

Sangarius à l'est <strong>de</strong> Lefké. Dans leur<br />

habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> confondre ensemble tous<br />

les cours d'eau, les Turcs, donnent aussi<br />

à cette rivière Je nom <strong>de</strong> Sakkaria (le<br />

Sangarius), ce qui ta pendant longtemps<br />

apporté beaucoup <strong>de</strong> confusion dans<br />

l'hydrographie <strong>de</strong> cette province^<br />

Aineh gheul est une <strong>ville</strong> <strong>de</strong> trois mille<br />

habitants dont la principale industrie,<br />

consiste dans l'exploitation <strong>de</strong>s forêts.<br />

Us cultivent aussi <strong>de</strong> la soie, qui se vend<br />

sous le titre <strong>de</strong> soie <strong>de</strong> Broussa. Sa situation<br />

sur la gran<strong>de</strong> route <strong>de</strong> Constantinople<br />

à Kutayah la rend assez florissante.<br />

B<br />

De Geïveh à Nîcée en ligne directe<br />

on compte quarante-huit kilomètres, on<br />

laisse Lefké au sud. La première poste<br />

est à Ak serai, douze kilomètres, la<br />

vallée du Sangarius qui s'étend à perte<br />

<strong>de</strong> vue est peuplée <strong>de</strong> nombreux villages<br />

composés chacun <strong>de</strong> quinze ou vingt<br />

maisons. On fait une courte halte à<br />

Mécridjé, huit kilomètres. A <strong>par</strong>tir <strong>de</strong> ce<br />

point on abandonne le bassin du Sangarius<br />

pour entrer dans celui du lac Aseanius<br />

ou <strong>de</strong> Nicée. En sortant <strong>de</strong> Met<br />

Cridjé, on franchit un col élevé ; le terrain<br />

<strong>de</strong> grès rouge que l'on n'a pas<br />

quitté jusqu'à Ak serai fait place à une<br />

nature <strong>de</strong> roches schisteuses et <strong>de</strong> mica-,<br />

schiste.<br />

Arrivé au baut <strong>de</strong> la montagne, un<br />

splendi<strong>de</strong> spectacle se déroule aux regards.<br />

Le lac <strong>de</strong> Nicée étend à l'horizon,<br />

sa nappe argentée; <strong>de</strong> loin en loin, <strong>de</strong>s<br />

se compose <strong>de</strong>s sommets resplendissants<br />

<strong>de</strong> l'Olympe. Tant <strong>de</strong> silence et <strong>de</strong> solitu<strong>de</strong><br />

ont succédé aux marches guerrières<br />

<strong>de</strong>s nations. Cet amas rouge <strong>de</strong><br />

briques, c'est Nicée où se sont battus<br />

avec acharnement presque tous les<br />

anciens possesseurs du sol, les Romains<br />

comme les Byzantins, les musulmans<br />

et les croisés, et maintenant<br />

à peine l'habitant <strong>de</strong> ces lieux sait-il le<br />

nom <strong>de</strong> cette <strong>ville</strong> qui fut si chèrement<br />

disputée. En <strong>de</strong>scendant dans la vallée<br />

du lac, on arrive, après une heure <strong>de</strong> marche,<br />

à un ancien camp retranché en ruines.<br />

C'est une enceinte carrée flanquée<br />

<strong>de</strong> tours; l'endroit <strong>par</strong>aît abandonné.Les<br />

habitants donnent à cet endroit le nom<br />

<strong>de</strong> Kara eddin (la Religion noire). C'est<br />

un <strong>de</strong>s anciens camps construits <strong>par</strong><br />

les croisés pendant qu'Us assiégeaient<br />

Nicée.<br />

CHAPITRE XIV.<br />

NICÉE.<br />

Nicée, l'ancienne capitale <strong>de</strong> la Bithynie,<br />

célèbre à tant <strong>de</strong> titres dans les<br />

annales <strong>de</strong>s chrétiens, aujourd'hui doublement<br />

déchue du rang qu'elle occupait<br />

comme place <strong>de</strong> guerre et comme<br />

métropole, n'offre plus dans son enceinte<br />

que les débris é<strong>par</strong>s <strong>de</strong> la cité byzantine<br />

; mais l'importance et la conservation<br />

<strong>par</strong>faite <strong>de</strong> son système <strong>de</strong> défense<br />

en font un <strong>de</strong>s lieux les plus intéressants<br />

à étudier, pour l'intelligence<br />

<strong>de</strong> la poliorcétique ancienne, et <strong>de</strong>s<br />

sièges nombreux que cette <strong>ville</strong> a soutenus<br />

contre les Arabes, les Grecs et<br />

les Latins.<br />

Comme point stratégjquejNicée comman<strong>de</strong><br />

la gran<strong>de</strong> vallée dans laquelle<br />

est situé le lac Ascanius, l'un <strong>de</strong>s plus<br />

grands <strong>de</strong> l'Asie Mineure, et défend le<br />

col qui sé<strong>par</strong>e le bassin du Sangarius<br />

du bassin <strong>de</strong> la Proponti<strong>de</strong>. Aussi les<br />

premiers peuples qui, venant <strong>de</strong> la<br />

Thrace, se sont établis dans la Bithyuie,<br />

ont dû nécessairement choisir <strong>de</strong> préfé-<br />

groupes d'arbres indiquant <strong>de</strong>s villages rence un point si important et si facile<br />

ombragent le tableau, et les troupeaux à défendre. Sé<strong>par</strong>é au nord du. golfe<br />

iiivijfj <strong>de</strong> Nicomédie <strong>par</strong>'la chaîne du mont<br />

(i)Liv. v, ch. 3. Arganthonius, et défendu au sud <strong>par</strong>


92<br />

L'UNIVERS.<br />

les contre-forts inférieurs <strong>de</strong> l'Olympe, puisqu'elle la portait encore vers l'an<br />

Je bassin du lac a été <strong>de</strong> tout temps cé­ 120 <strong>de</strong> J.-C A cette époque, elle était<br />

lèbre <strong>par</strong> sa fertilité; mais les anciens le lieu <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s proconsuls;<br />

avaient déjà remarqué que la pureté <strong>de</strong> sous Néron, Caius Pétronitw (I); sous<br />

l'air ne répondait pas a Ja beauté du Hadrien, Sévère, qui <strong>de</strong>puis fut em-<br />

pays, et que les habitants alors, comme pereur; sous Jl Trajan, Servilras Cal-<br />

aujourd'hui, achetaient <strong>par</strong><strong>de</strong>s maladies vus, y exercèrent cette dignité. Constanépidémiquesles<br />

avantages du climat (1 ). tin, en témoignage du respect pour le<br />

Suivant Etienne <strong>de</strong> Byzance (2), elle fut premier concile général qui s y était asdans<br />

l'origine colonisée pap les Bottaei, semblé (2), affranchit Nicée <strong>de</strong> la juri­<br />

qui lui donnèrent le nom d'Ancora diction <strong>de</strong> Nicomédie. Mais l'empereur<br />

( 'Ayxi&pT) ). Mais on a peu <strong>de</strong> docu­ Valens, qui persécuta les chrétiens <strong>de</strong><br />

ments sur cette <strong>ville</strong> du temps <strong>de</strong> la cette contrée, lui enleva le titre <strong>de</strong> mé­<br />

Bithynie indépendante ; il n'est pas même tropole pour le rendre définitivement à<br />

bien certain qu'elle ait existé à cette Nicomédie. C'est sans doute alors qu'elle<br />

époque; car, selonStrabon, son origine dut l'effacer <strong>de</strong> ses monuments, comme<br />

est moins ancienne. Elle a été <strong>fondée</strong> nous l'avons vu dans les inscriptions ci­<br />

<strong>par</strong> Antigone, Gis <strong>de</strong> Philippe, qui la tées plus haut.<br />

nomma Antigonia; ce qui ferait re­ Les tremblements <strong>de</strong> terre qui ravamonter<br />

son origineà l'an 315 avant J.-C, gèrent cette <strong>par</strong>tie <strong>de</strong> l'Asie, à différentes<br />

époque où Antigone <strong>de</strong>vint maître <strong>de</strong> époques, n'é<strong>par</strong>gnèrent pas la <strong>ville</strong> <strong>de</strong><br />

toute cette <strong>par</strong>tie <strong>de</strong> l'Asie. après la Nicée. L'empereur Hadrien, vers 120 <strong>de</strong><br />

mort d'Eumène. Après la chute d'An­ J.-C. (3), rebâtitles murailles, et fit constigone,<br />

la <strong>ville</strong> tomba entre les mains <strong>de</strong> truire les <strong>de</strong>ux portes <strong>de</strong> marbre blanc<br />

Lysimaque, qui l'appela Nicée, du nom qui existent encore au nord et à l'est.<br />

<strong>de</strong> sa femme, fille d'Antipater.<br />

Sous le règne <strong>de</strong> Valerien, en 259.<br />

Voilà à peu près tout ce que nous sa­ les Scythes, qui avaient fait invasion en<br />

vons <strong>de</strong> l'origine <strong>de</strong> la Nicée grecque, Bithynie, prirent et pillèrent Nicée ; <strong>de</strong><br />

dont l'histoire avait été écrite <strong>par</strong> Mé- là, ils se dirigèrent vers Cyzique, mais<br />

nécratès, cité <strong>par</strong> Plutarque dans la vie furent arrêtés <strong>par</strong> le fleuve Rbyndaeus, |<br />

<strong>de</strong> Thésée. Quoique Strabon donne à subitement grossi <strong>par</strong> les pluies; ils brû­<br />

Nicée le titre <strong>de</strong> métropole, Ni comédie lèrent Nicomédie et Nicée, qu'ils s'é­<br />

lui contesta toujours ce privilège, et taient d'abord contentés <strong>de</strong> ravager. Le<br />

l'antipathie qui existait entre ces <strong>de</strong>ux séjour <strong>de</strong> ces barbares en Bithynie ne<br />

<strong>ville</strong>s se manifesta dans plusieurs occa­ fut pas <strong>de</strong> longue durée, et les <strong>ville</strong>s<br />

sions; ainsi, dans la lutte entre Niger qui avaient souffert <strong>de</strong> leurs invasions<br />

et Sévère, Nicomédie s'étant déclarée se relevèrent bientôt <strong>de</strong> leurs ruines. On<br />

pour ce <strong>de</strong>rnier, Nicée, <strong>par</strong> haine pour employa dans la construction <strong>de</strong>s murs<br />

les Nicomédiens, embrassa le <strong>par</strong>ti <strong>de</strong> les débris <strong>de</strong>s édifices que les Scythes<br />

son adversaire, et les <strong>de</strong>ux <strong>ville</strong>s pri­ avaient renversés ; les plus beaux fragrent<br />

les armes pour soutenir les <strong>chef</strong>s ments d'architecture, les stèles et les<br />

qu'elles avaient choisis (3). Les rois <strong>de</strong> pié<strong>de</strong>staux qui contenaient les actes pu­<br />

Bithynie habitèrent constamment cette blies <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> et qui mentionnaient les<br />

<strong>de</strong>rnière <strong>ville</strong>, dans laquelle se trouvait services rendus <strong>par</strong> les citoyens, furent<br />

leur palais. Dans les médailles frappées employés pêle-mêle avec les matériaux<br />

sous les empereurs, Nicée n'est point bruts. Les colonnes <strong>de</strong>s temples, cou­<br />

désignée comme métropole ; cependant chées comme <strong>de</strong>s pièces <strong>de</strong> bois, servi*<br />

plusieurs inscriptions tracées sur les rent à affermir les fondations <strong>de</strong>s tours<br />

portes semblent attester qu'elle prenait ébranlées <strong>par</strong> les machines. Peu à peu, |<br />

ce titre sur ses monuments publics. tout ce qui restait <strong>de</strong> l'ancienne Nicée<br />

Il <strong>par</strong>aîtrait que Nicée conserva cette dis<strong>par</strong>ut <strong>de</strong> son enceinte et fut remplacé<br />

qualification pendant plus d'un siècle, <strong>par</strong> <strong>de</strong>s édifices bâtis à la hâte, qui ne<br />

(i) Strabon, Iiv. XII, p. 565.<br />

(a) Voce Nicaea.<br />

(3) Cf. Herodien, liv. III, ch. a.<br />

(0 Tacite, lib. XVI, i8.<br />

(a) Dion Chrysostome, Oral. XXXVIII.<br />

(3) Eusèbe, Chronioon,


appelaient, ni <strong>par</strong> leur goût ni <strong>par</strong> la<br />

solidité <strong>de</strong> leur construction, les monuments<br />

élevés à la belle époque <strong>de</strong> Fart.<br />

L'empereur Clau<strong>de</strong> II, trente ans<br />

plus tard, éleva les <strong>de</strong>ux portes qui existent<br />

aujourd'hui au sud <strong>de</strong> la <strong>ville</strong><br />

et à l'ouest du côté du lac; les inscriptions<br />

qu'on lai encore sur les architraves<br />

lui attribuent la reconstruction <strong>de</strong>s murailles.<br />

^UWÎ<br />

L'époque brillante <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nioée<br />

est celle où la religion chrétienne,<br />

protégée <strong>par</strong> l'empereur, prit son essor<br />

et sortit victorieuse <strong>de</strong>s persécutions du<br />

paganisme que les chrétiens dissi<strong>de</strong>nts<br />

tentaient <strong>de</strong> renouveler. Le premier<br />

concile œcuménique, dans lequel trois<br />

cent dix-huit évêques déterminèrent les<br />

actes <strong>de</strong> la foi catholique, fixèrent le<br />

temps <strong>de</strong> Pâques, posèrent les bases <strong>de</strong><br />

la discipline ecclésiastique, et condamnèrent<br />

l'hérésie d'Arius ; ce célèbre<br />

concile se tint, non pas dans<br />

une église, mais dans le palais impérial.<br />

Sous le règne <strong>de</strong> Valens, la <strong>ville</strong><br />

souffrit encore <strong>de</strong>s atteintes d'un<br />

tremblement <strong>de</strong> terre qui endommagea<br />

ses édifices publics; ils furent reconstruits<br />

<strong>par</strong> la libéralité <strong>de</strong> l'empereur<br />

(l).<br />

Sous le règne <strong>de</strong> Justinien, la <strong>ville</strong><br />

reçut <strong>de</strong>s embellissements considérables<br />

, et les temples détruits furent<br />

remplacés <strong>par</strong> <strong>de</strong>s églises et <strong>de</strong>s monastères.<br />

Procope nous apprend que<br />

cet empereur fonda plusieurs établissements<br />

religieux pour les hommes et<br />

pour les femmes. Il restaura le palais<br />

qui avait été presque entièrement détruit,<br />

et rétablit un aqueduc mis hors<br />

d'usage <strong>par</strong> la vétusté; c'est probablement<br />

celui qui apporte encore aujourd'hui<br />

ses eaux dans la <strong>ville</strong> <strong>par</strong> la porte<br />

<strong>de</strong> Lefké. Nous savons, <strong>par</strong> le même<br />

auteur, que Justinien fit construire <strong>de</strong>s<br />

thermes près <strong>de</strong> l'hôtellerie <strong>de</strong>s courriers<br />

(2). L'importance <strong>de</strong> cet établissement<br />

ressortait du grand nombre <strong>de</strong><br />

routes qui, <strong>de</strong> tous les points <strong>de</strong> l'empire,<br />

venaient converger vers cette <strong>ville</strong>.<br />

(t) Chronicon Paschale, page 557, éd. <strong>de</strong><br />

Bonne.<br />

(a) Veredariorum Dïversorio Procope,<br />

<strong>de</strong> JEdificiis.<br />

ASIE MINEURE. 93<br />

Il n'existe plus rien <strong>de</strong>s thermes d6<br />

Justinien, et les grands bains bâtis <strong>par</strong><br />

les sultans, abandonnés à la dévastation<br />

et à l'incurie, ne sont plus que <strong>de</strong>s<br />

ruines ajoutées à celles qui jonchent le<br />

sol <strong>de</strong> Nicée.<br />

La célébrité que Nicée s'était acuise<br />

<strong>par</strong> les <strong>de</strong>ux conciles qui se tinrent<br />

3<br />

ans son enceinte, la plaça toujours<br />

au premier rang <strong>de</strong>s métropoles ecclésiastiques.<br />

Favorisée <strong>de</strong> toutes les manières<br />

<strong>par</strong> les empereurs grecs, elle<br />

<strong>de</strong>vint le principal objet <strong>de</strong>s attaques<br />

<strong>de</strong>s conquérants arabes, qui, arrivés<br />

comme <strong>chef</strong>s <strong>de</strong> tribus errantes dans le<br />

sud <strong>de</strong> l'Asie Mineure, avaient en peu<br />

<strong>de</strong> temps fondé un État dont. la puissance<br />

<strong>de</strong>vint redoutable an vieil empire<br />

<strong>de</strong> Byzance. Sous les premiers califes,<br />

les Arabes s'avancèrent en vainqueurs<br />

jusqu'à Héraciée <strong>de</strong> Bithynie, et ne se<br />

retirèrent qu'après avoir signé avec les<br />

empereurs byzantins <strong>de</strong>s traités qui<br />

accordaient aux musulmans <strong>de</strong> grands<br />

avantages. Mais la paix ne fut pas <strong>de</strong><br />

longue durée, et leurs armes victorieuses<br />

vinrent se briser contre les rem<strong>par</strong>ts<br />

<strong>de</strong> Nicée, qui, malgré les échecs<br />

réitérés qu'elle avait éprouvés, était encore<br />

la place forte la plus redoutable<br />

<strong>de</strong> toute la contrée. Les empereurs<br />

Léon le Philosophe et Constantin Porphyrogénète,<br />

son fils, qu'il avait eu <strong>de</strong><br />

Zoé, sa troisième femme, élevèrent les<br />

murailles <strong>de</strong> marbre avec les tours qui<br />

se voient au nord-est <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>, et<br />

constatèrent <strong>par</strong> une inscription leur<br />

victoire sur les Arabes, vers 912.<br />

Ces succès éloignèrent pour quelque<br />

temps les entreprises <strong>de</strong>s Arabes ; mais<br />

vers le milieu du onzième siècle {1074),<br />

Soliman le Seldjouki<strong>de</strong>, sultan d'Iconium,<br />

conquît Nicée, qui lui fut cédée<br />

en toute propriété <strong>par</strong> l'empereur grec,<br />

Nicéphore Botoniates; il y établit sa<br />

rési<strong>de</strong>nce. Les <strong>de</strong>ux fils <strong>de</strong> Soliman,<br />

s'étant, à la mort <strong>de</strong> leur père, échappés<br />

<strong>de</strong> la prison où ils étaient retenus,<br />

se rendirent à Nicée, où ils furent reçus<br />

avec tous les honneurs dus au sang<br />

<strong>de</strong>s sultans, et le gouverneur <strong>de</strong> la <strong>ville</strong><br />

la remit entre leurs mains, comme un<br />

bien qui leur ap<strong>par</strong>tenait <strong>par</strong> droit <strong>de</strong><br />

naissance. Kilidj-Arslan, l'aîné <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux frères, voulant augmenter la population<br />

<strong>de</strong> la <strong>ville</strong> et lui rendre son


94<br />

L'UNIVERS.<br />

ancienne importance, fit rassembler lès i riches débris <strong>de</strong> monuments anciens<br />

femmes et les enfants <strong>de</strong>s nommes qui é<strong>par</strong>s sur le sol, pour que cet art, créé<br />

étaient en garnison dans Nicée, et leur dans le but <strong>de</strong> suppléer à la disette<br />

ordonna <strong>de</strong> venir habiter la <strong>ville</strong> (1). <strong>de</strong> matériaux <strong>de</strong>stines à l'ornement,<br />

C'était un usage qui se perpétuait <strong>de</strong>­ pût subsister dans cette contrée. La<br />

puis les anciens conquérants, <strong>de</strong> trans­ fabrique <strong>de</strong> Nicée fournit également |<br />

porter <strong>par</strong> une simple ordonnance les <strong>de</strong> ses produits à Constantinople, et<br />

populations d'un district dans un autre. un poète persan était attaché a l'éta­<br />

Les sultans dépeuplèrent ainsi Méliblissement pour composer les inscrip- I<br />

tène, qui, sous Justinien, était une <strong>de</strong>s tions reproduites sur les émaux (1).<br />

plus gran<strong>de</strong>s <strong>ville</strong>s <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> Ar­ Nous arrivons maintenant à l'époque<br />

ménie, et en transportèrent les habi­ où l'histoire <strong>de</strong> Nicée efface celle <strong>de</strong>s<br />

tants à Constantinople. C'est <strong>de</strong>puis autres <strong>ville</strong>s <strong>de</strong> l'Asie, <strong>par</strong> le rôle impor- '<br />

ce temps que la nation arménienne est tant qu'elle joue dans les annales du i<br />

<strong>de</strong>venue si nombreuse dans cette capi­ christianisme.<br />

tale.<br />

L'arrivée <strong>de</strong>s croisés en Bithynie, en .<br />

(j Nicée se ressentit; bientôt du goût 1095, fut signalée <strong>par</strong> la malheureuse I<br />

pour les arts qui distinguait les princes expédition <strong>de</strong> Pierre l'Ermite et <strong>de</strong> j<br />

seldjouki<strong>de</strong>s, et elle commença à voir Gauthier sans Avoir. A son dé<strong>par</strong>t <strong>de</strong> I<br />

fleurir dans ses murs une ère nouvelle Constantinople, l'armée s'embarqua sur I<br />

<strong>de</strong> civilisation arabe. Rivaux <strong>de</strong>s ca­ <strong>de</strong>s vaisseaux que lui avait fournis I<br />

lifes <strong>de</strong> Bagdad et <strong>de</strong> Cordoue, ces l'empereur grec, et se dirigea vers Ni-1<br />

princes rassemblaient à leur cour tous comédie, où elle séjourna peu <strong>de</strong><br />

les hommes distingués dans les arts et temps. Elle alla ensuite dresses son<br />

dans les sciences. L'élan qu'ils don­ camp aux environs <strong>de</strong> Kemlik, l'annèrent<br />

à l'art <strong>de</strong> construire ouvrit bien­ Cienne Cius, appelée Civitot <strong>par</strong> les his- J<br />

tôt une phase nouvelle et une route in­ toriens <strong>de</strong>s croisa<strong>de</strong>s, et que les Grecs<br />

connue où se jetèrent les artistes orien­ appellent aujourd'hui Ghio. C'est <strong>de</strong> ce<br />

taux. Ils avaient appelé <strong>de</strong> l'Arabie et point que l'armée, <strong>par</strong>courant les bords I<br />

<strong>de</strong> la Perse les astronomes et les poètes. du lac, exerça ses déprédations sur le î<br />

Ce fut aussi à cette contrée qu'ils <strong>de</strong>­ territoire <strong>de</strong> Nicée. Les soldats enle- '<br />

mandèrent <strong>de</strong>s artistes pour élever les vaient le gros et le menu bétail ap<strong>par</strong>­<br />

élégants édifices ornés d'émaux dont tenant à <strong>de</strong>s Grecs serviteurs <strong>de</strong>s Turcs.<br />

l'antique empire <strong>de</strong> la Chine avait ré­ Le pays était gouverné alors <strong>par</strong> So- I<br />

pandu peu a peu le goût dans l'Asie lim an le Jeune, surnommé Kilidj-Ars- j<br />

occi<strong>de</strong>ntale. Ils marchaient, emprun­ lan (1).<br />

tant toujours aux peuples chez lesquels<br />

ils s'établissaient quelque chose <strong>de</strong> Le succès <strong>de</strong>s Latins encouragea les<br />

leurs'arts et <strong>de</strong> leurs Usages, mais con­ Teutons à tenter une entreprise sem- I<br />

servant comme <strong>par</strong> instinct le type niable; s'étantrassemblés au nombre <strong>de</strong><br />

d'ornementation créé <strong>par</strong> les Arabes et trois mille hommes d'infanterie, ils j<br />

fondé uniquement sur les règles <strong>de</strong> la prirent la route <strong>de</strong> Nicée, et vinrent at- 1<br />

géométrie.<br />

taquer une <strong>ville</strong> située au pied d'une ji<br />

montagne, à quatre milles environ <strong>de</strong><br />

L'art d'émaiîler la faïence, si utile Nicée. Guillaume <strong>de</strong> Tyr ne nomme I<br />

pour orner <strong>de</strong>s monuments construits point cette place, mais il atteste que c'é­<br />

dans les plaines <strong>de</strong> la Cappadoce, où tait un point fortiGé et capable <strong>de</strong> ré­<br />

Je marbre et la pierre à bâtir sont trèssister à une attaque ; en effet, il fallut<br />

rares, fut transporté à Nicée. Cette fa­ toute l'impétuosité <strong>de</strong>s Teutons pour<br />

brique donna quelques produitâ qui vaincre les efforts <strong>de</strong>s habitants, qui<br />

turent employés à la décoration <strong>de</strong>s furent presque tous massacrés; Soli­<br />

monuments.' Nicée et Broussa en ont<br />

conservé dés traces ; mais la Bithynie<br />

man, apprenant le succès <strong>de</strong>s chré­<br />

était irob riebe en matériaux <strong>de</strong> toute<br />

tiens , rassemble quinze mille hommes,<br />

espèce, en marbres blancs et veinés, en<br />

et revient à Nicée pour chasser les<br />

(î) kïexia<strong>de</strong>, Üb. Vi, cap. II,<br />

(î) Mouradgea-D'Ohsson, t. IIL<br />

(a) Guillaume <strong>de</strong> Tyr, Uv. I,-p. ! 66;


Teutons du fort qu'ils occupaient £1).<br />

Les prodiges <strong>de</strong> courage <strong>de</strong> ceux-ci ne<br />

peuvent éloigner les Turcs, qui- unissent<br />

<strong>par</strong> mettre le feu à la porte du<br />

château et <strong>par</strong> entrer dans la place.<br />

Les hardis auteurs du coup <strong>de</strong> main<br />

sont massacrés'sans pitié; <strong>de</strong>ux cents<br />

jeunes gens sont conservés pour l'esclavage,<br />

et tout le reste périt <strong>par</strong> le<br />

glaive. »wwn<br />

Sur la route directe <strong>de</strong> Nicée à Ghio<br />

on ne trouve aucune trace du château<br />

mentionné dans Guillaume <strong>de</strong> Tyr ;<br />

mais, en remontant à quatre milles a<br />

l'est dans la gran<strong>de</strong> vallée qui conduit<br />

au Sangarius, on reconnaît près du village<br />

Kara eddin un vaste camp retranché<br />

ou cassaba , <strong>de</strong> forme carrée, que nous<br />

avons décrit plus haut. Il y a lieu <strong>de</strong><br />

croire que les Teutons, dans leurs excursions<br />

, avaient tourné la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nicée<br />

, et étaient venus s'em<strong>par</strong>er <strong>de</strong> cette<br />

position (2).<br />

Toutes les communications entre les<br />

contrées <strong>de</strong> l'est et la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nicée se<br />

sont toujours faites <strong>par</strong> la rive sud du lac.<br />

A cette époque, la gran<strong>de</strong> voie romaine,<br />

restaurée <strong>par</strong> Néron, qui conduisait <strong>de</strong><br />

Nicée à Apamée, <strong>de</strong>vait être bien plus<br />

praticable que <strong>de</strong> nos jours ; d'ailleurs,<br />

a rive sud du lac suit une ligne presque<br />

f<br />

(x) Albert d'Aix, Hv. I, p. 26.<br />

(a) Les historiens <strong>de</strong>s croisa<strong>de</strong>s n'ont pas<br />

laissé assez <strong>de</strong> doc pour que l'on puisse<br />

<strong>de</strong>terminer d'une manière positive la position<br />

du château appelé. Exerogprgum <strong>par</strong> le<br />

moine Robert, Exorogorgum <strong>par</strong>Guibert <strong>de</strong><br />

Nogent, et Xeiigordon <strong>par</strong> Anne Comnène.<br />

La distance <strong>de</strong> quatre journées <strong>de</strong> Nicomédie<br />

n'est pas une donnée suffisante, puisque<br />

nous ignorons quel chemin suivaient les<br />

croisés, et qu'ils peuvent avoir 'employé<br />

quatre jours s'ils ont passé <strong>par</strong> Sabandja et<br />

Ak-Seraï pour gagner la gran<strong>de</strong> vallée- <strong>de</strong><br />

Nicée. Cette route est plus longue, mais il<br />

n'y a pas <strong>de</strong> montagne à franchir. Guillaume<br />

<strong>de</strong> Tyr, e la défaite <strong>de</strong>s Teutons<br />

dans ce château » n'ça. donne point le nom ;<br />

mais il dit qu'il était situé au pied d'une montagne<br />

à quatre milles environ <strong>de</strong> Nicee. Il<br />

<strong>par</strong>ait que ce passage a échappé à M. <strong>de</strong><br />

Hammer quand il a discuté la position<br />

d'Rxorogorgum, qu'il place à Ak-Sou, <strong>ville</strong><br />

située sur le Versant nord-est <strong>de</strong> l'Olympe,<br />

et sé<strong>par</strong>ée du bassin <strong>de</strong> Nicée <strong>par</strong> une chaîne.<br />

<strong>de</strong> montagnes d'un accès difficile,<br />

ASIE MINEURE. 95<br />

droite <strong>de</strong> l'est à l'ouest, tandis que du<br />

côté du nord la côte est bien plus sinueuse<br />

et les montagnes plus escarpées.<br />

'<br />

La nouvelle <strong>de</strong> la défaite <strong>de</strong>s Teutons<br />

arriva cependant au camp <strong>de</strong> Civitot,<br />

et plongea les pèlerins dans la<br />

consternation^ mais bientôt le désespoir<br />

fit place à la soif <strong>de</strong> la vengeance,<br />

et une multitu<strong>de</strong> sans ordre vint assaillir<br />

la tente <strong>de</strong> Gauthier-sans-Avoir,<br />

qui résista longtemps, niais finit <strong>par</strong> se<br />

mettre à 'M tête <strong>de</strong>s siens, et marcha<br />

avec <strong>de</strong>ux cent cinquante mille hommes<br />

sur Nicée pour surprendre Soliman.<br />

Le sultan, averti <strong>par</strong> ses espions,<br />

sort <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> et se cache dans les défilés<br />

<strong>de</strong>s montagnes formant les contreforts<br />

du moût Olympe. Surpris <strong>par</strong> les<br />

Turcs, les croisés sont massacrés, et un<br />

petit nombre <strong>de</strong> pèlerins <strong>par</strong>vint seul à<br />

s'échapper, et se retira dans une forteresse<br />

ruinée qui se trouvait près <strong>de</strong> Civitot.<br />

C'est dans cette malheureuse affaire<br />

que pérît Gauthïèr-sans-Avoïr, qui<br />

tomba percé <strong>de</strong> sept flèches.<br />

Deux ans après l'expédition <strong>de</strong> Gauthier^<br />

la gran<strong>de</strong> armée <strong>de</strong>s croisés,<br />

composée <strong>de</strong> sept cent mille hommes,<br />

vint, sous la conduite <strong>de</strong> Go<strong>de</strong>froi <strong>de</strong><br />

Bouillon, <strong>de</strong> Tancrè<strong>de</strong> et <strong>de</strong> Bohémond,<br />

faire le siège <strong>de</strong>jNlcée. Soliman Kilidj-<br />

Arslan, sultan dlconium, l'un <strong>de</strong>s plus<br />

célèbres princes seid jouki<strong>de</strong>s, étendait<br />

alors Son pouvoir sur la majeure <strong>par</strong>tie<br />

<strong>de</strong> l'Asie Mineure. Au moment où<br />

il avait été informé <strong>de</strong> la marche <strong>de</strong>s<br />

croisés, il 's'était rendu Chez les princes<br />

ses voisins, et leur avait persuadé que<br />

ia cause était celle <strong>de</strong> tout f islamisme.<br />

Il en avait obtenu <strong>de</strong>s renforts considérables<br />

(1) et <strong>de</strong>s secours en argent et en<br />

matériel. Mais, avec une gran<strong>de</strong> intelligence<br />

<strong>de</strong> la stratégie, il avait compris<br />

que son action serait beaucoup plus<br />

efficace s'il se tenait hors <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>,<br />

au lieu <strong>de</strong> s'enfermer dans les murailles.<br />

EU conséquence, il'se retira dans<br />

les défilés <strong>de</strong> rOlympe aiVec une troupe<br />

d'environ cinquante mille soldats sur<br />

lesquels il comptait pour attaquer à dos<br />

les Chrétiens. Il mit d'ailleurs tous ses<br />

soins à prémunir Tïicëè contre un/long<br />

siège. Toutes les fortifications élevées<br />

(1) Guillaume <strong>de</strong> Tyr; liv. II, p. ia8.


96 *-unu<br />

<strong>par</strong> les empereurs grecs avaient été<br />

mises en bon état, et la triple ligne <strong>de</strong><br />

circonvallation qui défendait son enceinte<br />

fit l'admiration <strong>de</strong>s croisés, et,<br />

loin <strong>de</strong> les intimi<strong>de</strong>r, redoubla leur<br />

courage. Un large fossé communiquant<br />

avec le lac était toujours rempli d'eau ,<br />

et le revers du côté <strong>de</strong> la place était<br />

défendu <strong>par</strong> un agger flanqué <strong>de</strong> tours,<br />

formant un chemin couvert <strong>de</strong> seize<br />

mètres <strong>de</strong> large en avant du rem<strong>par</strong>t,<br />

lequel avait dix mètres <strong>de</strong> hauteur sur<br />

une épaisseur <strong>de</strong> quatre mètres. De distance<br />

en distance, <strong>de</strong>s tours <strong>de</strong> dix-neuf<br />

mètres <strong>de</strong> hauteur et <strong>de</strong> dix mètres <strong>de</strong><br />

diamètre protégeaient la muraille et le<br />

chemin <strong>de</strong> ron<strong>de</strong> qui circulait tout au<br />

tour <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>. JÜ $<br />

La forme <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> est irrégulière,<br />

et son grand axe se dirige du nord au<br />

sud ; toute la <strong>par</strong>tie sud est défendue<br />

<strong>par</strong> le lac, sur lequel il n'y avait pas<br />

d'embarcations. La porte du Word conduisait<br />

vers le mont Arganthonius,<br />

dont les collines sont boisées et couvertes<br />

<strong>de</strong> jardins. La porte <strong>de</strong> Pest<br />

s'ouvre sur la gran<strong>de</strong> vallée qui forme<br />

le prolongement du bassin du lac, et la<br />

porte du sud communique avec la route<br />

qui conduit à Broussa <strong>par</strong> la montagne.<br />

Toutes ces portes étaient défendues <strong>par</strong><br />

un double rang <strong>de</strong> tours et <strong>par</strong> <strong>de</strong>s chemins<br />

tortueux que formaient les ressauts<br />

<strong>de</strong> Tagger, et qui forçaient l'assaillant<br />

<strong>de</strong> passer immédiatement sous<br />

les traits <strong>de</strong> la place. Telle était la <strong>ville</strong><br />

que les chrétiens vinrent assiéger au<br />

nombre <strong>de</strong> six cent mille fantassins et<br />

cent mille cavaliers cuirassés. Le duc<br />

Go<strong>de</strong>froi se chargea d'attaquer l'est <strong>de</strong><br />

la <strong>ville</strong>, c'est-à-dire, la porte <strong>de</strong> Lefké<br />

et les rem<strong>par</strong>ts qui la défendaient.<br />

Bohémond et Tancrè<strong>de</strong> occupèrent la<br />

osition du nord L'ouest <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> fut<br />

loque avec difficulté <strong>par</strong> Hugues le<br />

Grand et l'évêque Adhémar. Le valeureux<br />

comte <strong>de</strong> Toulouse, arrivé <strong>de</strong>puis<br />

peu, défendit la position du sud; ce<br />

rut ce corps d'armée qui eut à soutenir<br />

le premier engagement avec les Sarrasins.<br />

Soliman, qui était en embusca<strong>de</strong><br />

dans les défilés situés au sud du lac<br />

C il occupait probablement le territoire<br />

<strong>de</strong> Yenicheher ), voulant dégager les<br />

abords <strong>de</strong> Wicée occupés <strong>par</strong> les chrétiens,<br />

s'élance sur la troupe <strong>de</strong> Ray­<br />

mond <strong>de</strong> Saiùt-Gilles, et est repoussé<br />

après <strong>de</strong>s prodiges <strong>de</strong> valeur. Les chrétiens,<br />

non moins barbares que leurs<br />

ennemis, coupèrent les têtes <strong>de</strong>s morts,<br />

et les jetèrent dans la <strong>ville</strong> rà l'ai<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

leurs machines.<br />

La <strong>ville</strong> était investie <strong>de</strong> trois côtés,<br />

et les chrétiens veillaient jour et nuit &<br />

ce qu'aucun convoi <strong>de</strong> vivres ou <strong>de</strong><br />

munitions ne pût être introduit dans<br />

ISicée. Mais à l'ouest les murs étaient<br />

baignés <strong>par</strong> les eaux du lac Ascanius,<br />

qui offraient une communication facile<br />

avec le <strong>de</strong>hors. Les chrétiens, n'ayant<br />

à leur disposition ni barques ni bateaux,<br />

se trouvaient dans l'impossibilité <strong>de</strong> réduire<br />

la <strong>ville</strong> <strong>par</strong> la famine. Soliman<br />

lui-même prenait souvent la voie du lac;<br />

pour aller voir sa femme et son fils j<br />

qu'il laissait dans la place pour mieux<br />

encourager les assiégés à résister aui<br />

croisés.<br />

Plusieurs semaines s'étaient écoulée!<br />

sans que les croisés eussent tenté un<br />

assaut; chaque jour on inventait <strong>de</strong>s!<br />

machines pour renverser les murailles!<br />

Parmi les princes les uns dirigeaient lëâ<br />

batistes, les autres fabriquaient <strong>de</strong>s bé-j<br />

liers <strong>de</strong> fer pour "battre en brèche lea<br />

rem<strong>par</strong>ts, mais le génie <strong>de</strong>s Sarrasius<br />

ne le cédait pas à celui <strong>de</strong>s Francs. Les<br />

portes avaient été fermées avec soin<br />

<strong>par</strong> <strong>de</strong>s herses <strong>de</strong> fer glissant dans <strong>de</strong>s<br />

rainures, et les murailles garnies <strong>de</strong>l<br />

machines <strong>de</strong> toutes sortes écrasaient les<br />

assiégeants sous <strong>de</strong>s quartiers <strong>de</strong> rocliej<br />

ou enlevaient avec <strong>de</strong>s crochets <strong>de</strong> fer<br />

les combattants qui s'approchaient trop<br />

près <strong>de</strong>s murailles, et les laissaient reî<br />

tomber morts ou mutilés. Les têtes<br />

<strong>de</strong>s vaincus servaient <strong>de</strong> <strong>par</strong>t et d'autre<br />

<strong>de</strong> projectiles, et chaque fois que les<br />

Sarrasins effectuaient une sortie, leao<br />

têtes <strong>de</strong> ceux qui succombaient étaient<br />

coupées et portées à l'empereur <strong>de</strong><br />

Constantinople, comme un sanglant<br />

trophée. En récompense, Alexis envoyait<br />

aux croisés <strong>de</strong>s vivres et <strong>de</strong>s chariots<br />

chargés d'armes, <strong>de</strong> munitions et d'habillements.<br />

Les <strong>chef</strong>s <strong>de</strong> l'armée, fermement<br />

résolus à s'em<strong>par</strong>er <strong>de</strong> Nicée, pourra<br />

pas laisser entre les mains <strong>de</strong> leurs ennemis<br />

une place aussi importante, se<br />

décidèrent à pousser le siege avec vigueur.<br />

Deux seigneurs croises, Henri


<strong>de</strong> Hache et le comte Herman, Grent<br />

construire une machine appelée le Renard<br />

t faite en bois <strong>de</strong> chêne, et recouverte<br />

<strong>de</strong> claies d'osier et <strong>de</strong> cuir. Cet<br />

ap<strong>par</strong>eil, qui pouvait contenir vingt<br />

hommes, <strong>de</strong>vait être approché <strong>de</strong>s murailles<br />

pour en saper les fon<strong>de</strong>ments;<br />

mais, pendant qu'on le traînait, tous<br />

les bois s'affaissèrent et écrasèrent les<br />

nommes qui s'y étaient renfermés.<br />

Quoique les murailles ne fussent bâties<br />

que <strong>de</strong> briques, les machines <strong>de</strong>s Francs<br />

étaient si im<strong>par</strong>faites, qu'ils purent à<br />

peine entamer le ciment qui les reliait.<br />

Cependant, à force d'attaques réitérées,<br />

ils <strong>par</strong>vinrent à pratiquer quelques fentes<br />

dans les murs. La résistance désespérée<br />

<strong>de</strong>s Turcs arrêtait l'élan <strong>de</strong>s chfétiens,<br />

et dès qu'une muraille était entamée,<br />

on en rebâtissait une autre <strong>de</strong>rrière. Ils<br />

combattaient du haut <strong>de</strong> leurs rem<strong>par</strong>ts<br />

avec un zèle infatigable, et lançaient<br />

sur les chrétiens <strong>de</strong> la poix, <strong>de</strong> l'huile,<br />

<strong>de</strong>s torches enflammées, et toutes les<br />

matières propres à incendier les machines<br />

<strong>de</strong>s assiégeants.<br />

En voyant les efforts <strong>de</strong> courage déployés<br />

dans ce siège mémorable, en<br />

comptant le nombre <strong>de</strong>s assiégeants,<br />

qui <strong>de</strong>vait s'élever au moins à quatre<br />

cent mille hommes effectifs, il y a lieu<br />

<strong>de</strong> s'étonner qu'une place comme Nicée<br />

n'ait pas été enlevée : car située en<br />

plaine, elle n'est défendue que <strong>par</strong> <strong>de</strong>s<br />

ouvrages d'art, sans que la disposition<br />

<strong>de</strong>s lieux vienue ajouter à la difficulté<br />

<strong>de</strong> l'attaque. Elle a été néanmoins regardée<br />

<strong>par</strong> les historiens <strong>de</strong>s croisa<strong>de</strong>s<br />

comme la place la plus forte <strong>de</strong> toute<br />

l'Anatolie. Robert le moine regar<strong>de</strong> la<br />

reddition <strong>de</strong> Nicée comme une preuve<br />

<strong>de</strong> la protection divine : « Car, dit-il,<br />

nulle force humaine n'aurait pu l'emporter<br />

sans le secours <strong>de</strong> Dieu, et il<br />

était bien juste que cette <strong>ville</strong>, qui avait<br />

vu sanctionner tous les dogmes <strong>de</strong> l'Église<br />

catholique, fût enlevée aux ennemis<br />

<strong>de</strong> notre sainte foi et réconciliée au<br />

Seigneur, et qu'elle rentrât dans le sein<br />

<strong>de</strong> notre sainte mère Église comme un<br />

<strong>de</strong> ses membres. » Malheureusement,<br />

la croix ne brilla pas longtemps sur les<br />

églises <strong>de</strong> Nicée, car peu d'années après,<br />

elle retomba entre les mains <strong>de</strong>s Ottomans.<br />

Cependant les chrétiens, voyant que<br />

V Livraison. ( ASIE MTNBURE.)<br />

ASIE MINEURE. 97<br />

la <strong>ville</strong> était constamment ravitaillée<br />

<strong>par</strong> les navires, jugèrent qu'elle ne tomberait<br />

jamais entre leurs mains, s'ils ne<br />

<strong>par</strong>venaient à fermer cette voie. En<br />

conséquence, ils s'adressèrent à l'empereur<br />

pour qu'il leur fût donné <strong>de</strong>s<br />

barques, qui furent transportées sur<br />

<strong>de</strong>s traîneaux tirés <strong>par</strong> <strong>de</strong>s chevaux et<br />

<strong>par</strong> <strong>de</strong>s hommes, du port <strong>de</strong> Civitot<br />

jusqu'au lac <strong>de</strong> Nicée, dans une longueur<br />

<strong>de</strong> sept milles; les bâtiments étaient<br />

assez grands pour contenir jusqu'à cent<br />

combattants. Cette entreprise lut achevée<br />

dans l'espace d'une nuit.<br />

L'histoire mentionne plusieurs faits<br />

<strong>de</strong> ce genre. Au siège <strong>de</strong> Tarente, les<br />

Romains, maîtres <strong>de</strong> la cita<strong>de</strong>lle, investis<br />

<strong>de</strong> tous côtés <strong>par</strong> l'armée d'Annibal,<br />

avaient cependant la mer libre,<br />

et reçurent <strong>de</strong> Meta ponte assez <strong>de</strong> renforts<br />

pour détruire les ouvrages avancés<br />

<strong>de</strong>s Carthaginois. Annibal, pour intercepter<br />

toute communication entre la<br />

cita<strong>de</strong>lle et la mer, fit fabriquer <strong>de</strong>s<br />

machines pour traîner les galères, qui<br />

furent transportées à travers la <strong>ville</strong>,<br />

du port jusqu'à la pleine mer (1). Dans<br />

la guerre contre Mithridate, Lucullus<br />

étant venu pour délivrer Cyzique, bloquée<br />

<strong>par</strong> l'armée <strong>de</strong> ce prince, fit prendre<br />

sur le lac Dascylitis une gran<strong>de</strong> barque<br />

qu'il fit traîner sur un chariot jusque<br />

dans la mer, et ayant embarqué <strong>de</strong>s<br />

soldats, il l'introduisit dans la <strong>ville</strong> (2).<br />

Plus tard, au siège <strong>de</strong> Constantinople<br />

<strong>par</strong> Mahomet II, les Ottomans, voulant<br />

s'em<strong>par</strong>er du port, dont l'entrée<br />

était fermée <strong>par</strong> <strong>de</strong>s chaînes, tirent<br />

passer sur <strong>de</strong>s chariots <strong>de</strong>s barques<br />

armées en guerre, <strong>de</strong>puis le point du<br />

Bosphore appelé aujourd'hui Château<br />

d'Europe (3), jusqu'à la <strong>par</strong>tie supérieure<br />

<strong>de</strong> la Corne d'Or. Mais <strong>de</strong><br />

toutes ces entreprises, celle <strong>de</strong>s croisés<br />

fut la plus difficile, puisqu'en une nuit<br />

les barques <strong>par</strong>coururent sept milles <strong>de</strong><br />

chemin <strong>par</strong> terre. Ils suivirent probablement<br />

la vallée d'écoulement du lac<br />

au pied <strong>de</strong>s collines, où coulait la rivière<br />

appelée <strong>par</strong> les anciens fleuve Ascanius.<br />

(i) Tite-Live, II, chap. III.<br />

(2) Plutarch., in Lucullo.<br />

(3) Roumili-Hissar. Hammer", fi h t. <strong>de</strong>s Ottomans<br />

, torn. II.<br />

T. H. 1


98<br />

L'UNIVERS.<br />

Cette flottille était sous les ordres du pour fuir <strong>par</strong> Je lac ; mais elle fut ar­<br />

capitaine Butumites, que les historiens rêtée avec son fils, et livrée aux princes<br />

<strong>de</strong>s croisa<strong>de</strong>s appellent Tatin, et qui croisés. C'est alors que les musulmans<br />

était <strong>par</strong>ticulièrement attaché à la per­ envoyèrent <strong>de</strong>s députés à Go<strong>de</strong>froi pour<br />

sonne <strong>de</strong> l'empereur. Lorsque les mu­ traiter <strong>de</strong> la reddition <strong>de</strong> la place; Busulmans<br />

virent les murailles du côté du tumites, qui avait reçu <strong>de</strong>s instructions<br />

lac cernées <strong>par</strong> les barques <strong>de</strong>s chrétiens, secrètes <strong>de</strong> l'empereur Alexis, pénétré<br />

leur courage commença à les abandon­ dans la <strong>ville</strong>, et déci<strong>de</strong> les Ottomans à<br />

ner. Du côté <strong>de</strong>s chrétiens, au contraire, rendre <strong>de</strong> préférence la <strong>ville</strong> à Tempe»<br />

l'attaque fut poussée plus vigoureuse­ reur. Cette proposition fut acceptée,<br />

ment; le côté du midi, c'est-à-dire <strong>de</strong> et les princes croisés virent sans envie<br />

la porte <strong>de</strong> Yéni cheher, où comman­ une trahison qui les privait du fruit <strong>de</strong><br />

dait le comte <strong>de</strong> Toulouse, était remar­ leur victoire. Mais, sous le rapport poquable<br />

<strong>par</strong> une tour d'une gran<strong>de</strong> élélitique, ils avaient atteint leur but :<br />

vation; près <strong>de</strong> là se trouvait le palais car, <strong>de</strong>vant s'enfoncer dans l'intérieur,<br />

<strong>de</strong>s sultans, qu'Anne Comnène nomme ils étaient sûrs <strong>de</strong> ne pas laisser sur<br />

sultanîkon, et où <strong>de</strong>meuraient la femme leurs <strong>de</strong>rrières un ennemi redoutable.<br />

et la sœur <strong>de</strong> Soliman. Ce palais était En 1106, la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nicée fut remise<br />

sans doute le même que celui qui fut <strong>par</strong> l'empereur Alexis aux princes seld-<br />

construit <strong>par</strong> les empereurs grecs et jouki<strong>de</strong>s. A la mort du jeune Alexis,<br />

restauré <strong>par</strong> Justinien. Tous les efforts Andronic Comnène, peu <strong>de</strong> temps après I<br />

<strong>de</strong>s croisés se tournèrent vers ce point, son avènement à l'empire, en 1183, se I<br />

et les machines les plus puissantes fu­ présenta <strong>de</strong>vant les <strong>ville</strong>s <strong>de</strong> Pruse et <strong>de</strong><br />

rent approchées pour battre en brèche Nicée, qui lui refusaient l'obéissance: •<br />

et renverser la tour. Ils <strong>par</strong>vinrent, à Nicée ayant été réduite, fut saccagée<br />

l'ai<strong>de</strong> d'un bélier très-soli<strong>de</strong>, traîné à <strong>par</strong> les troupes impériales, qui y com­<br />

force <strong>de</strong> bras, à faire dans la muraille mirent <strong>de</strong>s cruautés inouïes (i); mais \<br />

une ouverture assez gran<strong>de</strong> pour que elle revint aux Comnènes, au moment<br />

<strong>de</strong>ux hommes pussent y passer. La nuit <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> Constantinople <strong>par</strong> les<br />

ayant mis un terme aux travaux du Latins, et l'empereur Théodore Las<br />

siège, les chrétiens s'aperçurent avec ris, qui s'y fit couronner en 1203, y éta­<br />

découragement que les Turcs avaient blit le siège <strong>de</strong> Vempire <strong>de</strong> Nicée. '<br />

profité <strong>de</strong> leur repos pour ré<strong>par</strong>er tous<br />

les dommages <strong>de</strong> la veille. Un <strong>de</strong>s as­<br />

A la chute <strong>de</strong> 1 empire <strong>de</strong>s Seldjousaillants,<br />

Lombard <strong>de</strong> naissance, proki<strong>de</strong>s,<br />

les Osmanlis s'em<strong>par</strong>èrent rapi- j<br />

pose enfin <strong>de</strong> construire une machine<br />

<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> leurs anciennes provinces,<br />

au moyen <strong>de</strong> laquelle la muraille sera<br />

Orkhan eut d'abord à se rendre maître<br />

sapée sans danger pour les assaillants.<br />

<strong>de</strong>s places <strong>de</strong> Broussa et <strong>de</strong> Nicée,. I<br />

Les <strong>chef</strong>s <strong>de</strong>s croisés lui fournissent<br />

dont son père avait pré<strong>par</strong>é la conquête.<br />

l'argent et les matériaux nécessaires,<br />

A cette époque, Andronic le Jeune ré­<br />

et bientôt les Turcs voient une tour <strong>de</strong><br />

gnait à Constantinople (1330). La prise<br />

bois, dont la hauteur égale celle <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>.Nicée n'offrit pas à l'armée ottomane<br />

rem<strong>par</strong>ts, s'avancer lentement, et venir<br />

moins <strong>de</strong> difficultés qu'à celle <strong>de</strong>s croi­<br />

s'appliquer contre la muraille,, sans que<br />

sés,, et la marche du siège fut exacte­<br />

les combattants qu'elle contient soient<br />

ment la même. Orkhan s'em<strong>par</strong>a <strong>de</strong>s pe­<br />

exposés aux traits <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>. La mutits<br />

forts construits dans les plaines enraille<br />

est minée; les pierres <strong>de</strong> la base<br />

vironnantes , et bloqua la place assez<br />

sont remplacées <strong>par</strong> <strong>de</strong>s pièces <strong>de</strong> bois,<br />

étroitement pour que les habitants, |<br />

et bientôt le feu, consumant ces sup­<br />

pressés <strong>par</strong> la famine, songeassent à lui<br />

ports, amène la chute du rem<strong>par</strong>t, qui<br />

ouvrir leurs portes. Il s'em<strong>par</strong>a du fort<br />

s'écroule en entraînant la tour, objet<br />

<strong>de</strong> Karatekin, voisin <strong>de</strong> Nicée, ce qui<br />

d'une attaque si bien combinée. Cet<br />

acheva d'intercepter toute communica­<br />

événement acheva <strong>de</strong> démoraliser les<br />

tion avec le <strong>de</strong>hors. Enfin, les habi­<br />

assiégés, d'autant plus que la femme<br />

tants, épuisés <strong>par</strong> <strong>de</strong>s assauts multipliés<br />

<strong>de</strong> Soliman, voyant sa retraite menacée<br />

et <strong>par</strong> un blocus <strong>de</strong> plusieurs années,<br />

<strong>par</strong> la,çhute <strong>de</strong> la tour, fit une tentative<br />

(i) Art tlç vérifier les dates, p. 445.


ÄMiTä<br />

traitèrent <strong>de</strong> leur reddition, dont les<br />

conditions furent acceptées <strong>par</strong> te sultan.<br />

La garnison pouvait sortir avec ses<br />

bagages, et se retirer à Constantinople,<br />

près <strong>de</strong> l'empereur, et les habitants qui<br />

resteraient à Nicée, en acceptant la loi<br />

du vainqueur, conservaient la liberté<br />

<strong>de</strong> pratiquer leur religion. Ces conditions<br />

acceptées, les habitants se portèrent en<br />

foule au-<strong>de</strong>vant du sultan, qui fit son<br />

entrée triomphale <strong>par</strong> la porte <strong>de</strong> Yéni<br />

ebener.<br />

La première pensée d'Orkhan fut d'élever<br />

<strong>de</strong>s mosquées et d'établir <strong>de</strong>s écoles<br />

religieuses. Plusieurs églises ap<strong>par</strong>tenant<br />

aux Grecs furent converties en<br />

mosquées; on remarque encore aujourd'hui<br />

les ruines <strong>de</strong> l'église appelée<br />

Aghia-Sophia?qui était, comme la métropole<br />

<strong>de</strong> Constantinople, consacrée à<br />

la sagesse du Verbe incarné. Toutes les<br />

peintures et les mosaïques représentant<br />

<strong>de</strong>s sujets religieux, tous les versets <strong>de</strong>s<br />

livres saints inscrits sur les murailles<br />

furent détruits et recoqverts <strong>de</strong> chaux,<br />

et on leur substitua <strong>de</strong>s sentences du<br />

Coran, dont il reste encore aujourd'hui<br />

<strong>de</strong> nombreux vestiges', mais <strong>de</strong>puis<br />

plus d'un siècle, <strong>de</strong>puis la déchéance<br />

complète <strong>de</strong> la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nicée,<br />

cette mosquée même est abandonnée ;<br />

la coupole s'est écroulée, et tout Je<br />

quartier environnant n'est plus qu'un<br />

amas <strong>de</strong> décombres; •<br />

ÉGLISE DE SAINTE SOPHIE.<br />

Les voyageurs ont souvent cherché<br />

les traces <strong>de</strong> l'église illustrée <strong>par</strong> le<br />

grand concile œcuménique qui détermina<br />

les actes <strong>de</strong> la foi catholique, et<br />

posa les bases <strong>de</strong> la discipline ecclésiastique.<br />

Paul Lucas avait cru reconnaître<br />

cette église dans les ruines du théâtre<br />

romain que Éon observe encore dans<br />

la <strong>par</strong>tie sud-ouest <strong>de</strong> Ja viMe. Cette<br />

opinion n'a pas besoin d'être discutée.<br />

M. <strong>de</strong> Hammer croit que l'église d'Aghia-Sophia<br />

est la même que celle où<br />

se tint ce premier concile. Mais pour<br />

ceux qui ont suivi les phases <strong>de</strong> l'architecture<br />

byzantine <strong>de</strong>puis Constantin<br />

jusqu'à la chate <strong>de</strong> Constantinople, il<br />

est facile <strong>de</strong> déterminer les limites chronologiques<br />

<strong>de</strong>s différents styles d'architecture.<br />

Jusqu'à l'époque où Justi-<br />

KËURE. ~T~ 99<br />

nien fit construire la gran<strong>de</strong> église <strong>de</strong><br />

Saiiite-Sophie, à Constantinople, en 538,<br />

toutes les gran<strong>de</strong>s, églises reçurent la<br />

forme d'une basilique. On peut citer, à<br />

l'appui <strong>de</strong> cette opinion, le monastère<br />

<strong>de</strong> Saint-Jean-àtndius, qui subsiste encore<br />

dans cette <strong>ville</strong>, et l'église <strong>de</strong> Bethléem,<br />

bâtie <strong>par</strong> l'impératrice Hélène,<br />

mère <strong>de</strong> Constantin, <strong>de</strong>ux monuments<br />

dont la date est certaine. Ces églises<br />

sont formées <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux rangs <strong>de</strong> colonnes<br />

intérieures, supportant une toiture<br />

en charpente. Au fond flje l'église est<br />

l'hémicycle (TO ßfii+a^, où était placé<br />

l'autel. Cette forme primitive a été imitée<br />

<strong>de</strong> la basilique <strong>de</strong>s anciens, où se<br />

tenaient les assemblées ( l/.xXr)aiat ). Plusieurs<br />

<strong>de</strong> ces églises <strong>de</strong> premier style<br />

n'étaient que d'anciens temples, dont<br />

l'intérieur avait été élargi en entourant<br />

d'une muraille la colonna<strong>de</strong> du péristyle.<br />

Cène fut qu'à l'imitation du <strong>chef</strong>d'œuvre<br />

d'Anthemius que les architectes<br />

d'une époque postérieure à Justinien<br />

construisirent <strong>de</strong>s églises à coupole.<br />

L'église <strong>de</strong> Sainte-Sophie est un monument<br />

trop peu connu et trop peu étudié,<br />

car c'est <strong>de</strong> sa, création que date<br />

une ère nouvelle pour rarchjîteetune byzantine.<br />

L'église d'Aghia-Sophia à Nicée<br />

était couverte <strong>par</strong> un dôme en pen<strong>de</strong>ntif<br />

sur un plan carré. Ce caractère<br />

seul indique qu'elle est plus récente<br />

que la secon<strong>de</strong> moitié du sixième siècle.<br />

Nous pensons donc que l'église qui existait<br />

à l'époque du premier concile <strong>de</strong>vait<br />

être, comme toutes les autres, en forme<br />

<strong>de</strong> basilique. Il nous reste trop peu d'éléments<br />

pour baser une opinion sur l'étendue<br />

et la position <strong>de</strong> cette église,<br />

mais il ne faut pas la chercher <strong>par</strong>mi<br />

celles qui subsistent encore. Il n'est pas<br />

certain d'ailleurs, que le premier concile<br />

général, qui s'assembla le 19 juin<br />

325, se soit tenu» dans une église; l'empereur<br />

Constantin, qui le présida en<br />

personne, n'était pas encore baptisé. Selon<br />

['Histoire <strong>de</strong>s conciles (1), le saint<br />

syno<strong>de</strong> se tint dans le palais impérial.<br />

L'empereur, pour honorer les évéques,<br />

prit sa place au milieu d'eux sur un<br />

siège d'or fort bas. die'palais <strong>de</strong>vait être<br />

le"même qu'occupaient les préteurs romains<br />

et les empereurs grecs, et qui<br />

(x) Tome I, page ao3.<br />

7,


100<br />

LTTfflVERS.<br />

était au centre <strong>de</strong> Ta <strong>ville</strong>. Mais les ca­ tellement malsain pendant l'été, que<br />

ractères <strong>de</strong> l'église d'Aghia-Sophia se le métropolitain est autorisé à habiter<br />

rapportent <strong>par</strong>faitement a ceux <strong>de</strong>s mo­ la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Ghio. Les habitants n'ont<br />

numents du huitième siècle, et, <strong>par</strong> d'autre industrie qu'un peu <strong>de</strong> jardi-j<br />

conséquent, il ne serait pas impossible nage et la récolte <strong>de</strong> la soie. Quelques<br />

que le second concile, qui se tint en 787, familles grecques fabriquent <strong>de</strong>s tissus<br />

rf*y fût rassemblé.<br />

qui se confon<strong>de</strong>nt dans le commerce!<br />

Orkhan fit élever à Nicée le premier avec ceux <strong>de</strong> Broussa.<br />

imaret ( hospice pour les pauvres) que<br />

les Ottomans aient construit dans cette<br />

CHATITRE XV.<br />

<strong>par</strong>tie <strong>de</strong> l'Asie; mais les sultans seidjouki<strong>de</strong>s<br />

avaient déjà créé, dans la <strong>par</strong>­<br />

LBS MUBS.<br />

tie orientale <strong>de</strong> l'Asie Mineure, <strong>de</strong> ces<br />

fondations pieuses où Ton distribuait Tant <strong>de</strong> maîtres divers, tant <strong>de</strong> sièges<br />

aux pauvres et aux vieux soldats <strong>de</strong>s vi­ et <strong>de</strong> catastrophes, ont apporté trop]<br />

vres et <strong>de</strong>s secours. Ces monuments <strong>de</strong> changements dans la forme <strong>de</strong> l'en*]<br />

recevaient toujours <strong>de</strong> la piété du fon­ ceinte <strong>de</strong> Nicée, pour qu'on puisse e&û<br />

dateur, ou <strong>de</strong>s donations <strong>par</strong>ticulières, pérer d'y rien rencontrer qui date <strong>de</strong> la<br />

un revenu en immeubles <strong>de</strong>stiué à l'en­ Nicée <strong>de</strong> Lysimaque, ni même <strong>de</strong> celle<br />

tretien <strong>de</strong> l'établissement. Ces biens, d'Hadrien. Du temps <strong>de</strong> Strabon, la<br />

désignés sous le nom <strong>de</strong> vakouf, con­ <strong>ville</strong> avait seize sta<strong>de</strong>s ou <strong>de</strong>ux mille<br />

sistaient en terres conquises sur les neuf cent quarante-quatre mètres <strong>de</strong><br />

chrétiens, en bazars et en bains, dont circuit; le pied <strong>de</strong> ses murailles était|<br />

la location revenait à la mosquée <strong>de</strong> la­ baigné <strong>par</strong> les eaux du lac, qui la déquelle<br />

les imarets dépendaient générafendaient du côté <strong>de</strong> l'ouest. Le géolement.graphe<br />

grec remarque, en outre, que<br />

Un <strong>de</strong>s soins du sultan Orkhan après<br />

ses quatre portes pouvaient être aper­<br />

la conquête <strong>de</strong> Nicée fut d'organiser<br />

çues d'une pierre située au milieu du<br />

l'administration, et <strong>de</strong> déterminer les<br />

gymnase. Ce gymnase avait été com-|<br />

limites ou sandjaks nouvellement con­<br />

m en ce un peu avant l'arrivée <strong>de</strong> Pline<br />

quis. Nicée fut déclarée capitale du<br />

en Bithynie, pour remplacer l'ancien<br />

sandjak <strong>de</strong>Kodjà-Uli ; mais, sous Ma­<br />

édifice- que le feu avait détruit. On le]<br />

homet II, le <strong>chef</strong>-lieu fut transporté à<br />

reconstruisait sur un plan beaucoup)<br />

Ni comédie, et ce fut le signal <strong>de</strong> l'anéan­ ilus vaste, mais Pline blâme beaucoup!<br />

tissement <strong>de</strong> Nicée.<br />

f'architecte. Il trouve que l'édifice est:<br />

Aujourd'hui la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nicée est gou­ irrégulier, et que les <strong>par</strong>ties en sont<br />

vernée <strong>par</strong> un mutzeilim ressortissant mal ordonnées, et, d'après l'avis d'un<br />

au pachalik <strong>de</strong> Broussa.<br />

architecte, il pense que les murs ne<br />

La <strong>ville</strong> mo<strong>de</strong>rne, appelée <strong>par</strong> les Turcs pourront soutenir la charge qu'on leur<br />

Isnik, corruption <strong>de</strong>s mots grecs EÏÇ <strong>de</strong>stine, quoiqu'ils aient vingt-<strong>de</strong>ux<br />

Newcafav, occupe la <strong>par</strong>tie centrale <strong>de</strong> la pieds <strong>de</strong> large, dimension prodigieuse!<br />

cité byzantine. En entrant <strong>par</strong> la porte pour un monument <strong>de</strong> cette espèce (1)J<br />

<strong>de</strong> Lefké, on <strong>par</strong>court un grand espace Le peu <strong>de</strong> solidité <strong>de</strong>s édifices <strong>de</strong> Nicée<br />

planté en jardins, avant d'arriver a la tenait <strong>par</strong>ticulièrement à la mauvaise)<br />

<strong>ville</strong> mo<strong>de</strong>rne, dont les maisons bâties qualité du terrain, qui, composé<br />

d'argile offrent l'aspect le plus miséra­ d'atterrissements, n'a pas la solidité<br />

ble ; la rue principale, formant le ba­ nécessaire pour soutenir <strong>de</strong> lour<strong>de</strong>s)<br />

zar, est la seule dont l'aspect soit un masses.<br />

peu vivant. La population grecque ne<br />

dépasse pas douze a quinze cents âmes,<br />

Au premier coup d'oeil, on serait<br />

et habite un quartier sé<strong>par</strong>é, voisin <strong>de</strong><br />

tenté <strong>de</strong> croire que les murailles n'ont |<br />

l'église actuelle, dont le métropolitain<br />

pas changé <strong>de</strong> forme, ear les portes se<br />

tient sous sa juridiction tout le pays<br />

trouvent encore aujourd'hui aux extré»)<br />

environnant, <strong>de</strong>puis Ak-séraï, à l'est,<br />

mités <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux axes qui se coupent à<br />

jusqu'à Ghio, à l'ouest, et jusqu'à Yéni<br />

angles droits. Mais, ainsi que nous IV<br />

cheher, au sud. Mais l'air <strong>de</strong> Nicée est<br />

(i) Plia., Epist., lib. X, lettre XLTIII.


vons observé, les rem<strong>par</strong>ts sont beaucoup<br />

plus mo<strong>de</strong>rnes, et renferment <strong>de</strong><br />

nombreux débris <strong>de</strong> monuments anciens<br />

; le système <strong>de</strong> défense, un <strong>de</strong>s<br />

plus complets et <strong>de</strong>s mieux conservés<br />

<strong>de</strong> toutes les <strong>ville</strong>s <strong>de</strong> l'Asie Mineure,<br />

est encore presque entier; il se compose<br />

d'une enceinte.fortifiée, flanquée<br />

<strong>de</strong> tours <strong>de</strong>mi-circulaires, c'était le<br />

mœnium ou rem<strong>par</strong>t <strong>de</strong>s Latins. En<br />

avant du mœnium et à une distance <strong>de</strong><br />

seize mètres s'élève une <strong>de</strong>uxième enceinte<br />

également flanquée <strong>de</strong> tours, disposées<br />

en échiquier <strong>de</strong>vant celles du<br />

rem<strong>par</strong>t, et qui défendaient les abords<br />

du rossé. C'était Yaqqer <strong>de</strong>s fortifications<br />

anciennes qui, dans le principe,<br />

était tout simplement composé <strong>de</strong>s<br />

terres du fossé rejetées du côté <strong>de</strong> la<br />

<strong>ville</strong>. Plus tard, l'agger fut une fortification<br />

construite, défendue <strong>par</strong> <strong>de</strong>s<br />

tours qui correspondaient aux intervalles<br />

<strong>de</strong>s tours du mœnium. Enfin, le<br />

fossé, vallum, dont la largeur est aujourd'hui<br />

indéterminée <strong>par</strong> suite <strong>de</strong>s<br />

éboulements, complétait la défense <strong>de</strong><br />

la <strong>ville</strong>. Des canaux communiquant<br />

avec le lac servaient à inon<strong>de</strong>r le fossé<br />

dans les cas d'attaque. Les tours et les<br />

murailles <strong>de</strong> l'agger sont moins élevées<br />

que celles du mœnium, afin que les<br />

machines placées sur le sommet <strong>de</strong>s<br />

tours du mœnium puissent agir aussi<br />

près que possible <strong>de</strong> l'enceinte <strong>de</strong>s murailles.<br />

Les tours <strong>de</strong> Nicée, engagées<br />

dans le rem<strong>par</strong>t <strong>de</strong> la largeur d'un diamètre,<br />

ont une saillie égale à ce même<br />

diamètre, c'est-à-dire qu'elles sont<br />

formées <strong>par</strong> un cercle tangent aux murailles<br />

et relié <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux plans perpendiculaires.<br />

Ces tours ne sont cependant<br />

pas toutes égales ou semblables, car on<br />

en voit quelques-unes qui n'ont <strong>de</strong><br />

saillie que les <strong>de</strong>ux tiers d'un diamètre,<br />

et d'autres qui sont carrées ; mais ces<br />

<strong>de</strong>rnières sont d'une époque plus récente.<br />

Elles ne sout pas également espacées;<br />

il y en a qui n'ont que dix mètres<br />

d'intervalle d axe en axe, d'autres<br />

ont jusqu'à vingt-cinq mètres.<br />

La construction générale <strong>de</strong>s murailles<br />

est eu briques, qui ont <strong>de</strong> trente<br />

à quarante centimètres <strong>de</strong> longueur sur<br />

une largeur <strong>de</strong> vingt-cinq à trente. Le<br />

ciment qui les relie est très-épais; le lit<br />

<strong>de</strong> mortier a <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux à trois centi­<br />

ASIE MDVEUJIE.<br />

101<br />

mètres <strong>de</strong> largeur, et l'intérieur <strong>de</strong>s<br />

murailles est un béton composé <strong>de</strong> gros<br />

sable et <strong>de</strong> cailloux. Généralement,<br />

l'ap<strong>par</strong>eil <strong>de</strong>s murailles est en assises<br />

réglées; mais, soit caprice <strong>de</strong>s ouvriers,<br />

soit pour donner plus <strong>de</strong> solidité à<br />

certaines tours, on en remarque quelques-unes<br />

dont les assises sont ajustées<br />

obliquement pour former une espèce<br />

d'épi ou d'ajustement bizarre. Dans<br />

plusieurs endroits, la muraille est ap<strong>par</strong>eillée<br />

avec trois assises <strong>de</strong> moellons<br />

et <strong>de</strong>ux assises <strong>de</strong> briques alternant. Il<br />

n'existe point d'inscription qui nous<br />

apprenne à quel règne remonte la construction<br />

<strong>de</strong>s murailles, mais le système<br />

général <strong>de</strong> défense est tellement<br />

semblable à celui <strong>de</strong> Constantinople,<br />

qu'on doit penser que ces <strong>de</strong>ux <strong>ville</strong>s<br />

ont été fortifiées à la même époque,<br />

c'est-à-dire, dans le courant du quatrième<br />

siècle.<br />

Du côté <strong>de</strong> l'orient, les murs suivent<br />

une ligne droite, dirigée du nord au<br />

sud , <strong>de</strong>puis l'angle sud jusqu'à la<br />

porte principale, qu'on appelle encore<br />

aujourd'hui porte <strong>de</strong> Lefké ou <strong>de</strong> Leueae.<br />

Cette muraille est défendue <strong>par</strong> vingt et<br />

une tours.<br />

La tour <strong>de</strong> l'angle sud-est est fendue<br />

dans toute sa hauteur ; elle ne porte<br />

néanmoins à l'extérieur aucune trace<br />

<strong>de</strong> l'effet <strong>de</strong>s machines. A la hauteur<br />

du rem<strong>par</strong>t elle contient une gran<strong>de</strong><br />

chambre voûtée et éclairée sur la <strong>ville</strong>.<br />

On peut facilement cheminer sur le<br />

<strong>par</strong>apet dans toute la longeur <strong>de</strong>s<br />

murailles. Le chemin <strong>de</strong> ron<strong>de</strong> est<br />

pavé <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s dalles <strong>de</strong> marbre, extraites<br />

<strong>de</strong>s monuments anciens. On remarque<br />

surtout un grand nombre <strong>de</strong><br />

pié<strong>de</strong>staux <strong>de</strong> i œ ,19 <strong>de</strong> hauteur sur<br />

0,86 <strong>de</strong> large, et qui portent tous <strong>de</strong>s<br />

bases <strong>de</strong> colonne attenant au même<br />

bloc, et, <strong>de</strong> <strong>par</strong>t et d'autre, <strong>de</strong>s arrachements<br />

<strong>de</strong> marches. Il est évi<strong>de</strong>nt que<br />

tous ces pié<strong>de</strong>staux ont ap<strong>par</strong>tenu à un<br />

même monument, qui <strong>de</strong>vait être construit<br />

dans la forme d'une basilique. On<br />

compte soixante-quatre pié<strong>de</strong>staux d'é<br />

gale dimension, qui proviennent évi<strong>de</strong>mment<br />

du même lieu. Les autres<br />

blocs sont <strong>de</strong>s morceaux d'architrave,<br />

<strong>de</strong>s stèles sépulcrales et d'autres débris<br />

sculptés. Sur ce chemin <strong>de</strong> ron<strong>de</strong> était<br />

place le <strong>par</strong>apet avec les créneaux. Une


! 02 L'UNIVERS, - •<br />

<strong>de</strong>s tours <strong>de</strong> cette muraille est surtout re­ On arrive à la plate-forme supérieure<br />

marquable ; la gran<strong>de</strong> chambre avait été <strong>de</strong> la tour <strong>par</strong> un escalier pratiqué<br />

murée il y a plusieurs siècles, et n'a été dans l'intérieur <strong>de</strong> la muraille. Cette<br />

ouverte que vers Farinée 1834. Elle of­ plate-forme est défendue <strong>par</strong> <strong>de</strong>s crl|<br />

frait dans toute leur intégrité les disposi­ neaux qui subsistent encore. Au <strong>de</strong>hors'<br />

tions intérieures et la décoration.' Dans les tours <strong>de</strong> Nicée sont complètement I<br />

la <strong>par</strong>tie inférieure <strong>de</strong> la tour est une ro­ unies, sans ressaut ni mâchicoulis. La<br />

ton<strong>de</strong> voûtée, qui servait sans doute <strong>de</strong> ligne qui joint la porte <strong>de</strong> Leucae à la<br />

magasin pour les machines. Ou arrive porte du Nord ou <strong>de</strong> Constantinople<br />

sur le rem<strong>par</strong>t, <strong>par</strong> un escalier ex­ (Stamboul-Kapou-Sou) suit une ligne<br />

térieur, dans une salle <strong>de</strong>s gar<strong>de</strong>s <strong>de</strong> sinueuse, dont la direction générale<br />

plain-pied avec le chemin <strong>de</strong> ron<strong>de</strong>, et est nord-est et sud-ouest. 11 y a dix-<br />

également circulaire et voûtée. Elle est neuf tours dans cette <strong>par</strong>tie, et une po-<br />

éclairée <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux fenêtres fort étroites terne <strong>de</strong> marbre donne accès dans l|<br />

ou barbacanes, qui communiquent avec térieur <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>. Vers la pointe nord<br />

<strong>de</strong>ux cellules ménagées danstl'intérieur on remarque une longue portion <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>s murs (1). Chacune <strong>de</strong> ces cellules a muraille dans une longueur <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

<strong>de</strong>ux niches avec un banc pour les ve­ cent quatre-vingt-quatorze mètres, toute<br />

<strong>de</strong>ttes. Ce qui donue à cette tour un bâtie en marbre blanc. Elle est défen-<br />

intérêt tout <strong>par</strong>ticulier, ce sont les due <strong>par</strong> trois tours carrées également!<br />

peintures qui décorent la salle <strong>de</strong>s gar­ en marbre, et ornées d'une corniche $<br />

<strong>de</strong>s; elles sont exécutées à l'encaustique <strong>de</strong>nticules. La muraille porte onze asj<br />

sur le stuc qui recouvre les briques. sises <strong>de</strong> 0<br />

Ces peintures représentent <strong>de</strong>s prêtres<br />

ou <strong>de</strong>s saints, dont la tête est ornée<br />

d'un nimbe d'or, et qui portent <strong>de</strong>s<br />

costumes en usage dans l'ancienne liturgie.<br />

Quelques-uns avaient leurs<br />

noms écrits, selon l'usage byzantin, en<br />

colonne verticale. Une gran<strong>de</strong> figure<br />

<strong>de</strong> saint George, monté sur un cheval<br />

gris, était trop endommagée pour qu'il<br />

soit possible <strong>de</strong> la retracer; le cheval<br />

portait aux jambes <strong>de</strong>s anneaux ornés<br />

<strong>de</strong> pierreries. La voûte <strong>de</strong> la salle est<br />

peinte en bleu avec <strong>de</strong>s étoiles en rouge.<br />

Ces peintures portent tous les caractères<br />

<strong>de</strong> l'art du douzième siècle; mais<br />

on sait que les peintres byzantins ont nouvellement planté et entouré <strong>de</strong>mur}<br />

m ,50 <strong>de</strong> hauteur, et la tour<br />

vingt assises. La hauteur <strong>de</strong> la corniche<br />

est <strong>de</strong> 0 m ,ô6, et supporte un rang <strong>de</strong><br />

créneaux. L'ap<strong>par</strong>eil <strong>de</strong> cette construction<br />

est fait avec soin , aussi quelques<br />

voyageurs ont-ils regardé cette portion<br />

<strong>de</strong>s murs comme un reste <strong>de</strong> la Nicée <strong>de</strong><br />

Lysimaque; mais du côté <strong>de</strong> la/<strong>ville</strong> ce|<br />

ap<strong>par</strong>eil est infiniment moins soigné;<br />

on voit une inscription dont les caractères<br />

taillés en relief à la manière <strong>de</strong>s<br />

inscriptions arabes, attestent une l<br />

que <strong>de</strong> déca<strong>de</strong>nce; elle est tracée en cinq<br />

lignes sur une table <strong>de</strong> marbre <strong>de</strong> l m ,80<br />

<strong>de</strong> longueur, et placée à sept ou huit<br />

mètres au-<strong>de</strong>ssus du sokJLTu jardin<br />

plus que tous les autres cherché à conserver<br />

un type déterminé dans leurs<br />

figures religieuses, et que même à<br />

uotre époque les tableaux <strong>de</strong>s Grecs<br />

sont copiés sur ceux du moyen âge. Il<br />

serait donc difficile <strong>de</strong> dire positivement<br />

à quelle époque remontent ces<br />

peintures. A peine cette tour fut-elle<br />

ouverte, que les Grecs s'y transportèrent<br />

en foule, et couvrirent les murailles<br />

d'inscriptions qui détruisaient<br />

ces curieuses peintures ; il est à craindre<br />

que d'ici à quelques années elles ne<br />

<strong>de</strong>viennent tout a fait méconnaissables.<br />

(t) Voyez Asie Mineure, t. I er attenant aux rem<strong>par</strong>ts intercepte la cijr|_<br />

culation sur le chemin <strong>de</strong> ron<strong>de</strong> inter<br />

rieur. Il faut entrer dans le jardin pour<br />

voir l'inscription.<br />

Ici est le trophée <strong>de</strong> mort <strong>de</strong>s ennemis e<br />

<strong>de</strong>s Sarrasins couverts <strong>de</strong> honte ;<br />

Ici nos empereurs fidèles au Christ, Léon<br />

et Constantin, *n<br />

Ont ré<strong>par</strong>é la <strong>ville</strong>, et, à cause du mauvais<br />

état <strong>de</strong> L'ouvrage,<br />

Ont élevé <strong>de</strong>puis les fon<strong>de</strong>ments la tour<br />

<strong>de</strong>s Centeniers,<br />

Qu'ils ont achevée dans l'espace <strong>de</strong> sept<br />

ans. Panéus, fils du patrice Flavius Kuropalate,<br />

a (présidé). ^<br />

, planche<br />

X".<br />

De la porte do Constantinople à eelle


du Lac. la ligne <strong>de</strong>s murailles se dirige<br />

au sud-ouest-, il y a seize tours, dont<br />

quelques-unes sont carrées. La porte <strong>de</strong><br />

Constantinople se trouve donc au sommet<br />

d'une espèce <strong>de</strong> grand triangle. Depuis<br />

la porte lui Lac jusqu'à celle dé<br />

Yeni cheher. au sud, les murailles suivent<br />

une série d*augles rentrants et<br />

saillants qui donnent une gran<strong>de</strong> force<br />

à îa défense. C'est le coté le plus fort<br />

<strong>de</strong> la place. Vers la porte <strong>de</strong> Yeni<br />

cheher, elles enveloppent, en formant<br />

une saillie rectangulaire, une enceinte<br />

assez étendue. Cette enceinte rappelle<br />

<strong>par</strong>faitement le Caslrum ou camp <strong>de</strong>s<br />

soldats qu'on observe dans les murailles<br />

<strong>de</strong> Rome. Les fouilles que Ton fait dans<br />

les champs qui occupent une <strong>par</strong>tie <strong>de</strong><br />

l'intérieur <strong>de</strong> Nicée mettent souvent a<br />

découvert les fondations <strong>de</strong> divers édifices.<br />

Les débris qu'on trouve en ce lieu,<br />

uniquement composés <strong>de</strong> briques <strong>de</strong><br />

différentes sortes, indiquent que les<br />

constructions qui l'occupaient étaient<br />

faites dans un but d'utilité plutôt que<br />

<strong>de</strong> luxe.<br />

Depuis la porte du Lac jusqu'à l'angle,<br />

sud-est <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>, la muraille est<br />

défendue <strong>par</strong> vingt-trois tours, et ou^<br />

verte <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux poternes. La tour <strong>de</strong><br />

l'angle sud-ouest est carrée, et forme<br />

une saillie considérable, tant en <strong>de</strong>dans<br />

qu'au <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s murs. A la hauteur du<br />

chemin <strong>de</strong> ron<strong>de</strong>, il y a une gran<strong>de</strong><br />

chambre voûtée, dont les mûrs sont<br />

presque entièrement construits avec <strong>de</strong>s<br />

fragments antiques. Une tour voisine,<br />

dont la construction n'a rien <strong>de</strong> remarquable<br />

, porte sur une tablette <strong>de</strong> marbre<br />

l'inscription suivante :<br />

I Tour <strong>de</strong> Michel. ,.<br />

le grand roi.»<br />

empereur eu Jésus-Christ.<br />

m i l<br />

Depuis la porte <strong>de</strong> Yeni cheher jusqu'à<br />

l'angle sud-est <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>, la muraille<br />

suit une ligne qui est à peu près<br />

dans la direction du nord-est, Elle est<br />

défendue <strong>par</strong> quinze tours dont la construction<br />

ne diffère en rien <strong>de</strong> celles <strong>de</strong><br />

Test.<br />

On compte aujourd'hui aux murailles<br />

du Mœnium cent huit tours et a<br />

f Agger cent trente, qui sont disposées<br />

ainsi :<br />

ASIE MINEURE. 103<br />

Au nord. 42<br />

A l'est 58<br />

Au sud 74<br />

A l'ouest 64<br />

Total. . . 238 tours.<br />

Quant à la disposition indiquée <strong>par</strong><br />

Strabon, bien que les quatre portes se<br />

trouvent encore placées vers les quatre<br />

points cardinaux, on ne saurait retrouver<br />

ni la forme carrée, ni la mesure du<br />

périmètre qu'il a indiquée ; en effet,<br />

Strabon donnant seize sta<strong>de</strong>s au périmètre,<br />

on trouve, en mesurant le<br />

pourtour <strong>de</strong>s murailles (1) :<br />

De la porte du Sud ou <strong>de</strong> Yeni<br />

cheher à celle <strong>de</strong> Lefké. . . 1125 m.<br />

De la porte <strong>de</strong> l'Est ou <strong>de</strong><br />

Lefké à celle du nord. . . 1119<br />

De la porte du Nord ou <strong>de</strong><br />

Stamboul à celle du Lac. . 1119<br />

De la porte du Lac à celle <strong>de</strong><br />

Yeni chéber; ... . . . . 1064<br />

Total pour le pourtour <strong>de</strong> la<br />

<strong>ville</strong>. . . .£ 4427 I<br />

Les seize sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Strabon équivalent<br />

à <strong>de</strong>ux mille neuf cent cinquanteneuf<br />

mètres. Ainsi, la circonférence actuelle<br />

<strong>de</strong> la <strong>ville</strong>, qui est presque <strong>de</strong><br />

vingt-quatre sta<strong>de</strong>s, est <strong>de</strong> moitié plus<br />

gran<strong>de</strong> que celle indiquée <strong>par</strong> Strabon,<br />

c'est-à-dire que pour arriver à la mesure<br />

<strong>de</strong> Strabon, il faudrait prendre le<br />

carré formé <strong>par</strong> les lignes qui joindraient<br />

les quatres portes <strong>de</strong>ux à <strong>de</strong>ux,;<br />

ce qui donne un carré <strong>de</strong> trois mille<br />

<strong>de</strong>ux cents mètres <strong>de</strong> pourtour, ou dixsept<br />

sta<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>mi. Mais, en examinant<br />

les portes, nous verrons qu'elles ont<br />

été construites après l'époque où Strabon<br />

écrivait, et nous <strong>de</strong>vons en conclure<br />

que la viîle a été augmentée sous les<br />

empereurs Hadrien, Clau<strong>de</strong> II et Léon.<br />

CHAPITRE XVI.<br />

LES POBTES.<br />

Les quatre portes principales <strong>de</strong> la<br />

<strong>ville</strong> <strong>de</strong> N icée subsistent encore dans un<br />

état <strong>de</strong> conservation suffisant pour qu'on<br />

(z) Yoyez Desc, <strong>de</strong> l'Asie Mineure, plan-«<br />

ches V et VI.


104<br />

L'UNIVERS.<br />

R<br />

I<br />

B<br />

I<br />

I<br />

I<br />

I<br />

m<br />

|L<br />

I<br />

f<br />

[<br />

I<br />

puisse juger <strong>de</strong> leur ancienne disposition.<br />

Mais, lorsqu'on a construit les<br />

murailles actuelles, on a cru <strong>de</strong>voir renforcer<br />

les portes antiques <strong>par</strong> <strong>de</strong>s ouvrages<br />

qui, au premier coup d'oeil, en<br />

altèrent les proportions. Deux tours<br />

massives ont été ajoutées à droite et à<br />

gauche <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong> ces portes f et<br />

sur l'attique <strong>de</strong> marbre on a construit<br />

une salle communiquant avec le chemin<br />

<strong>de</strong> ron<strong>de</strong> supérieur, et servant <strong>de</strong><br />

corps <strong>de</strong> gar<strong>de</strong> aux ve<strong>de</strong>ttes. Toutes ces<br />

annexes étant <strong>de</strong> briques, se distinguent<br />

<strong>par</strong>faitement <strong>de</strong> la construction romaine,<br />

qui est <strong>de</strong> marbre. La porte <strong>de</strong><br />

Lefké et celle <strong>de</strong> Stamboul sont tout à<br />

fait semblables. Nous nous contenterons<br />

d'en examiner une en détail.<br />

En entrant dans la <strong>ville</strong> du côté <strong>de</strong><br />

l'orient, on franchit d'abord une porte<br />

<strong>de</strong> peu d'ap<strong>par</strong>ence, flanquée <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

tours, et près <strong>de</strong> laquelle sont encastrés<br />

quelques bas-reliefs mutilés; c'était<br />

la porte <strong>de</strong> l'Agger. On passe ensuite<br />

dans une petite cour qui se trouve à<br />

droite et à gauche sur le prolongement<br />

du chemin couvert, dont la communication<br />

est interceptée <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux fortes<br />

murailles. Un arc <strong>de</strong> triomphe en marbre<br />

, engagé entre <strong>de</strong>ux tours, et écrasé<br />

<strong>par</strong> une massive construction <strong>de</strong> briques,<br />

sé<strong>par</strong>e cette cour d'une secon<strong>de</strong><br />

porte <strong>de</strong> construction byzantine qui<br />

donne accès dans la <strong>ville</strong>. A droite et à<br />

gauche <strong>de</strong> cette porte, du côté <strong>de</strong> la<br />

<strong>ville</strong>, étaient <strong>de</strong>ux tours massives en<br />

briques et en pierres, dont l'ap<strong>par</strong>eil est<br />

formé <strong>de</strong> différents <strong>de</strong>ssins (1). Latour<br />

<strong>de</strong> gauche cornmunique avec un château<br />

d'eau, dépendant probablement <strong>de</strong> l'aqueduc<br />

construit <strong>par</strong> l'empereur Justinien.<br />

L'arc <strong>de</strong> triomphe se compose<br />

d'une gran<strong>de</strong> arca<strong>de</strong> <strong>de</strong> 4 m mais chaque. membre se pourtourne|<br />

pour venir former sur le chapiteau du)<br />

pied-droit une espèce d'architrave. Li<br />

couronnement clés portes latérales est<br />

orné <strong>de</strong> d en tic u les; l'entablement estj<br />

d'ordre dorique, et la frise porte une!<br />

inscription; il n'a pas été possible <strong>de</strong>]<br />

déterminer les dimensions <strong>de</strong> l'attique ;|<br />

il y a même lieu <strong>de</strong> croire qu'il a été<br />

démoli. Dans la frise et dans Parchi|<br />

trave qui regar<strong>de</strong> l'extérieur <strong>de</strong> la <strong>ville</strong><br />

on voit une longue inscription qui estj<br />

assez fruste, et dont les caractères <strong>de</strong><br />

bronze étaient incrustés dans le marbre. |<br />

On ne peut donc lire aujourd'hui quel<br />

d'après la trace <strong>de</strong>s crampons et d'après<br />

les entailles très-peu profon<strong>de</strong>s qui<br />

avaient été faites pour maintenir les ca><br />

ractères. J<br />

A la maison impériale et à l'empereur<br />

César Hadrien la très-illustre métropole le<br />

Nicée a élevé ces murailles, sous la survend<br />

lance et la direction <strong>de</strong> Cassius Chrestus.<br />

Et sur l'architrave :<br />

A l'empereur César, fils du divin Hadrien,]<br />

petit-fils du divin Trajan, à Titus .321)us Hadrien,,<br />

auguste x l'année..... <strong>de</strong> sa puissance<br />

tribuni tienne, la <strong>ville</strong> a élevé cette porte en<br />

conséquence <strong>de</strong>s fonds donnés <strong>par</strong> le trésor<br />

<strong>de</strong>s empereurs.<br />

Ce monument, élevé <strong>par</strong> l'empereur<br />

Hadrien, remonte probablement à l'année<br />

120 <strong>de</strong> J.-C. Il est remarquable en<br />

ce que, contrairement au caractère in><br />

primés à l'architecture <strong>de</strong> cette époque,<br />

sa structure est excessivement simple.<br />

Les moulures sont d'un bon style, et se<br />

ressentent <strong>de</strong> la finesse du ciseau grec;<br />

Les <strong>de</strong>ux niches placées à droite et à<br />

,23 d'ouver­<br />

gauche du grand arc ne font pas un<br />

ture ; à droite et à gauche étaient <strong>de</strong>ux<br />

bon effet r <strong>par</strong>ce qu'elles écrasent les<br />

petites portes carrées qui donnaient<br />

proportions <strong>de</strong>s petites portes. Du côtél<br />

passage aux piétons. Au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> ces<br />

droit, l'archivolte et la <strong>par</strong>tie sphériquej<br />

portes sont <strong>de</strong>ux niches construites sur<br />

<strong>de</strong> la niche sont d'un seul bloc <strong>de</strong> mar­<br />

un plan circulaire, et dont la <strong>par</strong>tie subre.<br />

'•'*<br />

périeure est cintrée. L'entablement <strong>de</strong> L'inscription placée sur la porte <strong>de</strong><br />

l'arc <strong>de</strong> triomphe est soutenu <strong>par</strong> doux Stamboul était également <strong>de</strong> bronze,<br />

pilastres doriques <strong>de</strong> peu d'importance. mais on n'avait pas eu soin d'entailler<br />

L'archivolte du grand arc ne vient pas je marbre pour inscruster les caractères;!<br />

poser d'aplomb sur les supports (2), il s'ensuit qu'elle est <strong>de</strong>venue à peu près<br />

illisible. J<br />

(i) Voyez planche 40.<br />

(a) Voyez les planches 38 et 39.<br />

La <strong>par</strong>tie supérieure <strong>de</strong> l'arca<strong>de</strong> est<br />

ouverte pour donner passage à la herse,<br />

qui servait, en tombant, a fermer une


forte à <strong>de</strong>ux ventaux, en madriers <strong>de</strong><br />

chêne et garnie <strong>de</strong> fer ; ce système <strong>de</strong><br />

clôture était fort usité dans les fortifications<br />

romaines. On en voit <strong>de</strong>s traces<br />

nombreuses en France et en Italie.<br />

POETE DE CONSTANTINOPLE.<br />

A la porte du Nord, indépendamment<br />

<strong>de</strong> la double clôture qui existe à<br />

l'est, on voit encore les traces d'une enceinte<br />

<strong>de</strong> dix-neuf mètres <strong>de</strong> long sur<br />

vingt mètres <strong>de</strong> large, et qui communique<br />

avec la <strong>ville</strong> <strong>par</strong> trois portes qui<br />

sont à moitié ruinées. Les pilastres sont<br />

en marbre.<br />

L'empereur César Marc*Aurèle Clau<strong>de</strong>,<br />

pieux, heureux, auguste,<br />

Grand pontife, la secon<strong>de</strong> année <strong>de</strong> sa<br />

puissance tribunitienne, consul, père <strong>de</strong> la<br />

patrie,<br />

' Proconsul (a fait élever) les murs <strong>de</strong> la<br />

très-illustre Nicée, sous la direction <strong>de</strong> Vel-<br />

Ijus Macrinus, très-illustre légat consulaire<br />

et pro pré leur <strong>de</strong> l'empereur, et <strong>de</strong> Sallius<br />

Antonius, le très-illustre logiste.<br />

Marcus-Aurelius Claudius, qui est<br />

plus généralement connu sous le nom<br />

<strong>de</strong> Clau<strong>de</strong> II, fut appelé à l'empire l'an<br />

268 <strong>de</strong> J.-C. Il <strong>de</strong>vint consul Tannée<br />

suivante, et mourut l'an 270. Cette inscription<br />

a donc été placée l'année <strong>de</strong> sa<br />

mort.<br />

PORTE DE YENI GHEHEB.<br />

Au sud <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>; il existe une troisième<br />

porte souvent ré<strong>par</strong>ée <strong>par</strong> les Ottomans<br />

, car c'est celle qui a souffert<br />

les plus nombreux assauts. C'est <strong>par</strong> là<br />

que les musulmans introduisirent les<br />

troupes d'Alexis, plutôt que <strong>de</strong> rendre<br />

ïa <strong>ville</strong> aux croisés, et <strong>par</strong> là encore<br />

que le sultan Orkhan entra en triomphateur<br />

dans Nicée. Il <strong>par</strong>aît que quelques<br />

indices avaient fait comprendre aux ingénieurs<br />

(fui ont construit les rem<strong>par</strong>ts<br />

que ce point <strong>de</strong>vait être principalement<br />

en butte aux attaques <strong>de</strong>s ennemis, car<br />

il est fortifié d'une manière toute <strong>par</strong>ticulière.<br />

Deux énormes tours, se rattachant<br />

à un avant-corps quadrangulaire,<br />

sont construites obliquement en avant<br />

du rem<strong>par</strong>t. Ces tours ont 10 m ,03 <strong>de</strong><br />

diamètre et sont sé<strong>par</strong>ées <strong>par</strong> un espace<br />

ASIE MINEURE. 10*<br />

<strong>de</strong> l l m 65. Les murailles <strong>de</strong> l'agger forment<br />

en ce lieu <strong>de</strong>s angles rentrants et<br />

saillants qui défen<strong>de</strong>nt d'abord l'entrée<br />

du chemin couvert, car il faut passer entre<br />

<strong>de</strong>ux tours très-rapprocbées <strong>de</strong> l'agger<br />

pour arriver à la première porte, laquelle<br />

ne se trouve pas dans 1 axe <strong>de</strong> la<br />

gran<strong>de</strong> porte <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>, mais s'ouvre<br />

ierpendiculairement sous les traits <strong>de</strong><br />

f<br />

a tour <strong>de</strong> l'Ouest. Ce passage franchi,<br />

on <strong>de</strong>vait encore traverser une porte<br />

fermée <strong>par</strong> une forte herse, et on se<br />

trouvait dans une espèce <strong>de</strong> cour carrée,<br />

semblable à celle <strong>de</strong> la porte <strong>de</strong> Stamboul<br />

; cette cour communiquait <strong>par</strong> trois<br />

portes avec la <strong>ville</strong>.<br />

Les murailles <strong>de</strong> l'agger avaient dans<br />

l'intérieur <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s casemates, mais<br />

qui sont trop ruinées pour qu'on puisse<br />

en lever le plan. Ces ouvrages étaient<br />

<strong>de</strong> briques comme les gran<strong>de</strong>s tours du<br />

rem<strong>par</strong>t, et l'intérieur était en béton.<br />

Les fondations <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s tours sont<br />

faites avec <strong>de</strong>s blocs <strong>de</strong> marbre enlevés<br />

aux anciens monuments, et avec <strong>de</strong>s<br />

colonnes couchées horizontalement<br />

comme <strong>de</strong>s morceaux <strong>de</strong> bois dans un<br />

chantier. L'architecture <strong>de</strong> la porte ne<br />

présente rien <strong>de</strong> remarquable ; mais du<br />

côté <strong>de</strong>là <strong>ville</strong>, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux pilastres qui<br />

fermaient la cour carrée, il y en a encore<br />

un qui existe dans toute sa hauteur,<br />

et qui porte dans sa <strong>par</strong>tie supérieure<br />

un morceau d'architrave sur lequel<br />

on lit un fragment d'inscription.<br />

Plusieurs pierres é<strong>par</strong>ses sur le sol portent<br />

également <strong>de</strong>s fragments d'inscriptions<br />

que <strong>de</strong>s voyageurs ont copiées à<br />

différentes époques, et qu'on a reconnues<br />

au bout d'un siècle seulement ap<strong>par</strong>tenir<br />

à l'inscription du pilastre.<br />

La très-illustre, très-gran<strong>de</strong>, et très-noble<br />

<strong>ville</strong> <strong>de</strong> Nicée a élevé les murailles et les a<br />

consacrées à l'empereur César Marc-Aurèle,<br />

Clau<strong>de</strong>, pieux, heureux, auguste, la secon<strong>de</strong><br />

année <strong>de</strong> sa puissance tri bu ni lien ne, proconsul,<br />

père <strong>de</strong> la patrie, et au sacré sénat et<br />

peuple romain, sous la direction <strong>de</strong> l'illustie<br />

Vellius Macrinus, légat consulaire et propreleur<br />

<strong>de</strong> l'empereur, et <strong>de</strong> Sallius Antoninus,<br />

le très-illustre logiste.<br />

Quoique cette inscription soit <strong>de</strong> la<br />

même année que celle <strong>de</strong> la porte du<br />

Lac, elle semble <strong>de</strong>voir être postérieure<br />

<strong>de</strong> quelques mois, puisque l'empereur


106 1/îJNIVERS.<br />

Clau<strong>de</strong> n'y est pas nommé en qualité <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> <strong>par</strong>tie, et cependant inachevé,<br />

consul. Ce sont les mêmes magistrats a déjà absorbé, m'a-t-on dit, plus <strong>de</strong><br />

qui ont présidé à l'érection <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux dix millions <strong>de</strong> sesterces (1,937,509<br />

portes, qui n'avaient rien <strong>de</strong> remarqua- francs) ; et je crains que cette dépense<br />

blesousle rapport <strong>de</strong> l'architecture. ne soit inutile. De gran<strong>de</strong>s fentes m<br />

sont manifestées <strong>par</strong> suite <strong>de</strong>s affaisse»<br />

ITÏTÉBIEUR DE LA VILLE. ments, soit à cause du terrain qui est<br />

humi<strong>de</strong> et mou, soit à cause <strong>de</strong> la mau-<br />

En entrant dans l'intérieur <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>, vaise qualité <strong>de</strong> la pierre, qui est minci<br />

on est frappé <strong>de</strong> l'aspect <strong>de</strong> tristesse et et sans consistance. Il y a lieu <strong>de</strong> déli-j<br />

<strong>de</strong> désolation répandu sur ces lieux, bérer si on l'abandonnera, ou même<br />

L'espace compris entre la porte <strong>de</strong> s'il faut le détruire, car les appuis et let<br />

Yeni cheher et le bourg mo<strong>de</strong>rne d'Is- constructions donton l'étaye <strong>de</strong> temps<br />

nik est occupé <strong>par</strong> <strong>de</strong>s jardins, du mi- en temps me <strong>par</strong>aissent peu soli<strong>de</strong>s et]<br />

lieu <strong>de</strong>squels s'élèvent cà et là quelques fort coûteux. Des <strong>par</strong>ticuliers ont promasures<br />

ap<strong>par</strong>tenant à d'anciennes cons- mis nombre d'utiles accessoires, <strong>de</strong>s<br />

tructions turques. En se dirigeant un basiliques autour du théâtre et <strong>de</strong>sgapeu<br />

vers le sud, on aperçoit quelques leries dans la <strong>par</strong>tie supérieure (poM<br />

arca<strong>de</strong>s élevées sur un tertre entouré <strong>de</strong> ticus supra caveam); mais ces trajg<br />

broussailles. Ce sont les ruines d'un vaux sont ajournés <strong>de</strong>puis qu'on a sus*<br />

théâtre antique qui est aujourd'hui pendu la construction du théâtre. J<br />

presque entièrement enfoui sous terre. L'empereur répond à Pline : « C'est à<br />

Il est du petit nombre <strong>de</strong>s théâtres <strong>de</strong> vous qui êtes sur les lieux d'examiner<br />

l'Asie qui ne sont pas adossés à une et <strong>de</strong> régler Ce qu'il convient <strong>de</strong> faire<br />

montagne; aussi, la cavea que forment relativement au théâtre <strong>de</strong> Nîcée Le<br />

les gradins, n'étant soutenue que <strong>par</strong> théâtre achevé, n'oubliez pas <strong>de</strong> ré*<br />

<strong>de</strong>s voûtes, s'est-elle affaissée en plu- clamer <strong>de</strong>s <strong>par</strong>ticuliers les accessoi-1<br />

sieurs endroits. La courbure du théâtre res qu'ils ont promis. » Ce n'est pas se<br />

regar<strong>de</strong> le nord; la scène a soixante- jeter dans <strong>de</strong>s conjectures très-hasar«<br />

dix-neuf mètres <strong>de</strong> diamètre; mais il ne dées que <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r les ruines qui<br />

reste plus rien <strong>de</strong> cette <strong>par</strong>tie <strong>de</strong> l'édi- existent comme celles du théâtre bâti<br />

fice. Les vomitoires, dont la voûte sup- <strong>par</strong> les soins <strong>de</strong> Pline. L'ap<strong>par</strong>eil étant<br />

portait les gradins, sont bâtis en gros en pierre <strong>de</strong> taille, il est à croire que<br />

blocs <strong>de</strong> pierre calcaire, unis sans ci- l'ancienne construction a été démoment<br />

, et <strong>par</strong>aissent remonter à une lie pour faire place à celle que nous<br />

époque assez reculée. Dans ce qui reste voyons. .<br />

<strong>de</strong> la construction générale <strong>de</strong> cet édifice,<br />

on n'observe rien qui ne rentre MONUMENTS MUSULMANS.<br />

dans les dispositions connues. Aussi,<br />

dans un pays où les théâtres antiques Le sultan Orkhan , pour répandre et<br />

sont si nombreux et si bien conservés, affermir les principes <strong>de</strong> l'islamisni 3<br />

celui-ci mériterait-il peu d'attention, avait fait construire dans la <strong>ville</strong> pltu<br />

s'il ne rappelait <strong>de</strong>s souvenirs historï- sieurs édifices religieux, que nous nous<br />

ques, car il est probable que le théâtre sommes contentes <strong>de</strong> mentionner,<br />

dont nous voyons les ruines est le même <strong>par</strong>ce qu'ils sont ruinés et ne présen*<br />

que celui qui futcommencé <strong>par</strong> les ha- tent que peu d'intérêt sous le rapport<br />

bitants <strong>de</strong> Nicée pendant que Pline <strong>de</strong> l'art. Pour imiter l'exemple du suletait<br />

préteur <strong>de</strong> Bithynie, et qu'il <strong>de</strong>- tan, plusieurs <strong>de</strong> ses lieutenants étamanda<br />

l'autorisation <strong>de</strong> ré<strong>par</strong>er ou d'à- blirent aussi <strong>de</strong>s fondations pieuses, et<br />

chever. II est certain que si ce n'est pas créèrent <strong>de</strong>s wakoufs pour leur entrele<br />

même édifice, remplacement, du tien. Chacun croyait foire une action<br />

moins, n a pas changé. Pluie s'exprime agréable a Dieu en consacrant une <strong>par</strong>t<br />

|en ces termes dans sa lettre à Trajan (1) : du butin, soit au culte <strong>de</strong> l'islam, soit<br />

« Le théâtre <strong>de</strong> Nicée, bâti en très- au soulagement <strong>de</strong>s pauvres. Ainsi,<br />

outre lesmédrécés (écoles religieuses),<br />

(j) c. Piton Epist.» lib. x, XLvm. où les jeunes gens étaient instruits gra-


tuitement ou moyennant une faible re<strong>de</strong>vance,<br />

il y avait <strong>de</strong>s cuisines publia<br />

blîques ( imarets ) et <strong>de</strong>s bainsj entretenus<br />

aux frais d'un fondateur, qui<br />

étaient ouverts 5 aux pauvres à certains'<br />

jours et à certaines heures. Ce zèle religieux<br />

ne se ralentit pas sous les successeurs<br />

d'Orkban ; la <strong>ville</strong> <strong>de</strong> Broussa<br />

fut richement dotée <strong>de</strong> monuments publics<br />

<strong>par</strong> le sultan Mourad. Nicée ne<br />

fut pas oubliée <strong>par</strong>les lieutenants <strong>de</strong><br />

ce prince, et le plus gracieux monument<br />

d'architecture arabe, qui existe encore<br />

à Nicée, le temple appelé vulgairement<br />

la Mosquée verte ( Yechil-Djamy) est<br />

une <strong>de</strong>s fondations <strong>de</strong> Khayr-Eddin pacha,<br />

grand vizir <strong>de</strong> Mourad P r . Ce'<br />

ministre, célèbre dans l'histoire ottomane<br />

<strong>par</strong> la prise <strong>de</strong> Salonique, dont<br />

il s'em<strong>par</strong>a après un siège sanglant,<br />

laissa dans l'histoire une brillante réputation<br />

<strong>de</strong> sagesse et <strong>de</strong> bravoure. Il mourut<br />

à Yeni cheher, en Europe, en 1386,<br />

peu <strong>de</strong> temps après la prise <strong>de</strong> Salonique.<br />

L'obligation où sont tous les musulmans<br />

<strong>de</strong> faire au moins une fois dans<br />

leur vie le pèlerinage <strong>de</strong> la Mecque peut<br />

être rachetée <strong>par</strong> aes aumônes proportionnées<br />

au rang et à la fortune dés<br />

croyants. C'est pour payer leur <strong>de</strong>tte<br />

<strong>de</strong> pèlerinage que les sultans ont élevé<br />

dans Constantinople ces mosquées qui<br />

font l'ornement <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>. Le grand vizir<br />

Khayr-Eddin, constamment engagé<br />

dans <strong>de</strong>s guerres qui ne lui laissèrent<br />

pas le loisir d'accomplir ce pieux <strong>de</strong>voir,<br />

fonda la mosquée <strong>de</strong> Nicée, conformément<br />

à cette sentence du Coran :<br />

«• 'Celui qui élève une mosquée en l'honneur<br />

du Seigneur notre maître, Dieu<br />

lui élève une maison dans Le Paradis. »<br />

ffedifiee que nous décrivons a cela <strong>de</strong><br />

remarquable qu'il doit être regardé ',<br />

non comme une œuvre <strong>de</strong>s artistes turcs,<br />

mais comme le <strong>de</strong>rnier vestige <strong>de</strong>s arts<br />

<strong>de</strong>s Seldjouki<strong>de</strong>s dans l'occi<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l'Asie<br />

Mineure.<br />

L'édifice est quadraûgulaire ; il a<br />

26 mètres <strong>de</strong> long sur 12 m ,74 <strong>de</strong><br />

large. En avant du temple, il existe<br />

un porche en marbre blanc composé,<br />

sur la faça<strong>de</strong>, <strong>de</strong> trois arca<strong>de</strong>s ogivales,<br />

portées <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux colonnes <strong>de</strong> granit<br />

rouge, et en retour <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux arca<strong>de</strong>s que<br />

sé<strong>par</strong>e une seule colonne. Les <strong>de</strong>ux ar?<br />

ASIE MINEURE. 107<br />

ca<strong>de</strong>s latérales sont formées <strong>par</strong> <strong>de</strong>s<br />

barrières <strong>de</strong> marbre, découpées à jour<br />

avec une délicatesse extrême. Au-<strong>de</strong>ssus<br />

<strong>de</strong> la'porte, on lit cette inscription,<br />

dont les caractères sont gravés en relief,<br />

selon l'usage <strong>de</strong>s musulmans :<br />

Au nom du Dieu élément et miséricordieux,<br />

ce noble imaret a été bâti et consacré<br />

dans un esprit <strong>de</strong> piélé sous le règne du<br />

grand prince Cheub-Eçldin Mourad I er , fils<br />

d'Ourkbân^r./Khayr-Eddin^ fils d'Ali Aldjiudéré,<br />

que Dieu fasse miséricor<strong>de</strong> à lous<br />

<strong>de</strong>ux, dans l'année sept cent quatre-vingt.<br />

Louange au Dieu uniqne.<br />

Sur la porte du portique on lit cette<br />

autre inscription, tracée sur une seule<br />

ligne :<br />

« Cette mosquée, asile <strong>de</strong>s oulémas,<br />

a été bâtie <strong>par</strong> le vizir Khayr-Eddin-<br />

Pacha, l'an 775 (1373-1378). » La différence<br />

<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux dates indique sans<br />

doute l'époque <strong>de</strong> la fondation et l'époque<br />

<strong>de</strong> la consécration. Quant au mot<br />

imaret employé dans la première, il est<br />

usité chez les Arabes pour désigner indistinctement<br />

toute fondation pieuse.<br />

Chez les Turcs, il désigne un hospice<br />

où les pauvres reçoivent chaque jour<br />

une distribution <strong>de</strong>" vivres.<br />

Dans l'intérieur d'un <strong>de</strong>s gros murs<br />

est pratiqué un escalier qui conduit au<br />

minaret. Au fond du sanctuaire se trouve<br />

la niche Vers laquelle tout musulman<br />

doit se tourner en faisant sa prière, et<br />

qui indique la direction <strong>de</strong> la Mecque;<br />

c'est ce qu'on appelle le Mirhab. Près<br />

<strong>de</strong> là, à la droite <strong>de</strong> l'assistant, se<br />

trouv^ une chaire, dont la forme est la<br />

même dans tome's les mosquées musulmanes<br />

, et qui consiste en un escalier<br />

très-rapi<strong>de</strong>, conduisant à une espèce <strong>de</strong><br />

pavillon, où se. place le mollah pour<br />

les instructions religieuses; cette chaire<br />

porte le nom <strong>de</strong> Minnber.<br />

ÉGLISE GBECQUE.<br />

Malgré tous les efforts <strong>de</strong>s musulth<br />

ils ne <strong>par</strong>vinrent pas à anéantir<br />

la religion chrétienne dans la <strong>ville</strong> <strong>de</strong><br />

Nicée. La nation grecque s'y est perpétuée<br />

fidèle à son culte, et entretient <strong>de</strong><br />

ses offran<strong>de</strong>s l'unique église que les<br />

vainqueurs ombrageux leur aientjaissée.<br />

Elle est; située dans la <strong>par</strong>tie méridïo-


108<br />

L'UNIVERS<br />

nale du quartier grec, et, malgré les<br />

nombreuses ré<strong>par</strong>ations qu'elle a subies,<br />

il est facile <strong>de</strong> voir que sa construction<br />

remonte au <strong>de</strong>là du douzième siècle.<br />

La nef est couverte <strong>par</strong> une coupole qui<br />

était ornée <strong>de</strong> mosaïques, aujourd'hui<br />

en <strong>par</strong>tie détruites ; mais l'hémieyle du<br />

fond conserve encore toute sa décoration<br />

primitive. Dans la <strong>de</strong>mi-coupole<br />

qui le couronne, on voit une figure <strong>de</strong><br />

la Vierge portant l'enfant Jésus ; <strong>de</strong> <strong>par</strong>t<br />

et d'autre sont <strong>de</strong>s anges revêtus d'un<br />

riche costume orné <strong>de</strong> pierreries et <strong>de</strong><br />

perles, et qui portent un étendard.<br />

Le premier vestibule ou narthex conserve<br />

aussi quelques tableaux en mosaïque.<br />

Au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la porte principale,<br />

on remarque une figure <strong>de</strong> la Vierge,<br />

Jes mains étendues, et vêtue d'un manteau<br />

bleu. Cette mosaïque est à fond<br />

d'or, et dans le champ du tablean on lit<br />

ces mots :<br />

Seigneur, secours ton serviteur Nicéphore,<br />

pairice, préposé au vestiaire, et grand étériarque.<br />

On sait que la charge <strong>de</strong> vestiarius,<br />

qui correspond à celle <strong>de</strong> chambellan,<br />

était une <strong>de</strong>s hautes fonctions <strong>de</strong> la cour<br />

<strong>de</strong> Byzance. La charge d'étériarque, qui<br />

s'exprime en latin <strong>par</strong> comitum duxy<br />

ap<strong>par</strong>tenait aussi à un <strong>de</strong>s grands officiers<br />

du palais. Le nom <strong>de</strong> Nicéphore,<br />

inscrit sur la principale porte <strong>de</strong> l'église,<br />

est probablement celui du fondateur;<br />

mais on a négligé d'inscrire la date <strong>de</strong><br />

la construction.<br />

On remarque dans l'église <strong>de</strong> Nicée<br />

un sarcophage très-précieux en pierre<br />

spéculaire, et dont la face antérieure<br />

est décorée d'ornements dans le goût<br />

byzantin, d'une bonne exécution. Ce<br />

monument ne porte pas d'inscription.<br />

On peut supposer, d'après le caractère<br />

<strong>de</strong> la sculpture, qu'il remonte au quatrième<br />

siècle. Eu mettant <strong>de</strong>s cierges<br />

allumés dans l'intérieur, la pierre laisse<br />

passer une lumière douce et uniforme,<br />

et les ornements se découpent en noir<br />

sur le fond qui est plus éclairé. Cette<br />

pierre se tirait <strong>de</strong> Galatie.<br />

VOIE BOMAINB.<br />

En sortant <strong>par</strong> la porte <strong>de</strong> Yeni<br />

ebener, et en suivant la rive méridionale<br />

du lac, on se trouve sur l'ancienne void<br />

qui traversait toute l'Asie, et allait <strong>de</strong>s<br />

côtes <strong>de</strong> la Proponti<strong>de</strong> aux confins <strong>de</strong><br />

la Syrie. Cette route franchissait m<br />

Sangarius sur le grand pont <strong>de</strong> Sabandja;<br />

elle passait <strong>par</strong> Pessinunte, etj<br />

<strong>de</strong> là s'inclinait au sud pour aller gagner<br />

la Pisidie, en traversant la y<br />

C'est encore la voie la plus fréquentée<br />

<strong>par</strong> les caravanes qui viennent <strong>de</strong> Bagdad<br />

et <strong>de</strong> la Syrie; mais <strong>de</strong>puis long-|<br />

temps on ne songe plus à l'entretenir<br />

ou à la ré<strong>par</strong>er. L'état <strong>de</strong> dégradation<br />

où 6e trouvent les routes <strong>de</strong> l'empire ottoman<br />

est une <strong>de</strong>s marques les plus<br />

évi<strong>de</strong>ntes <strong>de</strong> l'incurie et <strong>de</strong> l'imprévoyance<br />

<strong>de</strong> l'administration <strong>de</strong>s provinces<br />

, qui se trouvent forcées <strong>de</strong> con-J<br />

sommer sur place leurs produits, et ne<br />

peuvent tirer qu'à grands frais les <strong>de</strong>nrées<br />

du <strong>de</strong>bors. C'est surtout en voyant)<br />

le soin que mettaient les anciens à ouvrir<br />

<strong>de</strong>s communications faciles et di-|<br />

rectes entre tous les points <strong>de</strong> l'empire ,1<br />

que l'on peut juger du contraste entre<br />

les <strong>de</strong>ux époques et <strong>de</strong> la déchéance où<br />

ce pays est tombé. Dès les premiers<br />

temps <strong>de</strong> la conquête, Jes Romains ouvrirent<br />

une voie <strong>de</strong> communication entre<br />

les <strong>ville</strong>s d'Apamée et <strong>de</strong> Cius. places<br />

maritimes assez importantes et l'intérieur<br />

du pays. Elle fut ré<strong>par</strong>ée pad<br />

Néron, qui fit trancher un rocher dont<br />

le prolongement interceptait la roi<br />

Ce rocher est connu <strong>de</strong>s habitants sous<br />

le nom <strong>de</strong> Sari-Kaïa (la pierre jaune);<br />

c'est un calcaire jurassique, jaunâtre à I<br />

la surface, mais gris à l'intérieur. Il se<br />

présente en plusieurs mamelons, et ap- j<br />

<strong>par</strong>tient à l'un <strong>de</strong>s contreforts <strong>de</strong>s montagnes<br />

qui encaissent le lac.<br />

La base <strong>de</strong>s collines est composée <strong>de</strong><br />

grès rouges, mais dans la <strong>par</strong>tie su- I<br />

périeure on retrouve le calcaire jurassique<br />

avec ces roches abruptes qui sur« ''<br />

gissent du sol en formant <strong>de</strong>s pitons<br />

aux flancs déchirés. Cette formation se<br />

continue pendant trois heures <strong>de</strong> route,<br />

jusqu'à un vallon environné <strong>de</strong> rochers<br />

qui s'avancent jusque dans le lac. C'est<br />

la que les travaux ont été Jes plus considérables.<br />

I<br />

Une inscription bilingue, tracée en.<br />

grands caractères, atteste que ces travaux<br />

sont dus à l'empereur Néron, qui I<br />

les fît faire la quatrième année <strong>de</strong> sa


*<br />

ASIE M<br />

puissance tribunitienne, <strong>par</strong> conséquent<br />

Pan <strong>de</strong> J.-C. 68 ou 69. Voici cette inscription<br />

:<br />

Néron Clau<strong>de</strong>, fils du divin Clau<strong>de</strong>, petit -<br />

fils <strong>de</strong> Germanicus César, arrière-pet it-fife<br />

<strong>de</strong> Tibère César Auguste, arrière-pelit-fils du<br />

divin César Auguste, César Auguste Germanicus,<br />

grand pontife, la quatrième année <strong>de</strong><br />

sa puissance tribunitienne, empereur pour<br />

la <strong>de</strong>uxième fois, consul pour la troisième"<br />

fois, » fait ré<strong>par</strong>er la route <strong>de</strong> Nicée à<br />

Apamée,détruite <strong>par</strong> le temps,<strong>par</strong> les soins<br />

<strong>de</strong> Caïus Julius Aqiiila, procurateur impérial.<br />

CHAPITRE XVII..<br />

LA PYRAMIDE DE CASSIUS ASCLKPIO-<br />

DOTUS.<br />

Les environs <strong>de</strong> Nicée, aujourd'hui<br />

presque déserts, étaient certainement,<br />

dans les premiers siècles <strong>de</strong> notre ère,<br />

couverts <strong>de</strong> nombreux villages et <strong>de</strong><br />

maisons <strong>de</strong> campagne ; tout cela a dis<strong>par</strong>u,<br />

ruiné <strong>par</strong> les sièges et les guerres<br />

civiles. On ne reconnaît aucun vestige<br />

<strong>de</strong> la nécropole. Il existe cependant au<br />

nord, et à quatre kilomètres <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>,<br />

un monument qui date du règne <strong>de</strong> Trajan<br />

et qui mérite d'être vu ; c'est la pyrami<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> Cassius, connue dans le pays sous<br />

le nom <strong>de</strong> Bech tasch (les Cinq pierres).<br />

On trouve facilement à Nicée <strong>de</strong>s gui<strong>de</strong>s<br />

qui connaissent ce monument.<br />

La route suit d'abord les rives du lac<br />

et se rapproche <strong>de</strong>s collines qui bornent<br />

l'horizon du côté du nord-est. Elles<br />

sont <strong>de</strong> formation jurassique, entrecoupées<br />

<strong>par</strong> les lits <strong>de</strong> schiste ; la roche<br />

est un calcaire gris blanc compacte et<br />

un peu cristallin; elle se présente en<br />

masses non strati liées, s'élëvant en falaises<br />

presque verticales. C'est la même<br />

formation que l'on rencontre déjà à Ak<br />

serai et qui <strong>par</strong>ait se prolonger sur<br />

toute la côte nord du lac.<br />

On a employé cette roche qui est<br />

presque aussi belle et plus dure que le<br />

marbre dans presque tous les monuments<br />

anciens <strong>de</strong> la <strong>ville</strong>.<br />

A une <strong>de</strong>mi-heure <strong>de</strong> distance hors<br />

<strong>de</strong>s murs, sur les flancs <strong>de</strong> la colline,<br />

se trouve un sarcophage antique <strong>de</strong><br />

gran<strong>de</strong> dimension ; il a 2 m 60 <strong>de</strong> large<br />

SEURE. 109<br />

et 4 m 35 <strong>de</strong> longueur et est taillé dans<br />

un seul bloc <strong>de</strong> pierre calcaire. Sa<br />

forme est celle d'un aedicule ; la faça<strong>de</strong><br />

se compose d'un fronton soutenu<br />

aux angles <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux pilastres d'ordre<br />

dorique, la corniche est ornée <strong>de</strong> <strong>de</strong>nticules.<br />

Dans l'intérieur sont taillées, à<br />

droite et à gauche, <strong>de</strong>ux banquettes<br />

pour déposer les corps. La forme et la<br />

dimension <strong>de</strong> ce mausolée ont déjà attiré<br />

l'attention <strong>de</strong> quelques observateurs.<br />

Pococke a cru reconnaître sur<br />

l'une <strong>de</strong> ses faces une inscription hébraïque<br />

dont il n'y a pas <strong>de</strong> vestiges ;<br />

car on ne peut prendre pour tels quelques<br />

traits informes dus au caprice <strong>de</strong>s<br />

passants. Les alternatives <strong>de</strong>s saisons<br />

ont déjà contribué à la ruine <strong>de</strong> ce monument<br />

; <strong>de</strong>s fissures se sont ouvertes et<br />

l'ont fendu dans toute sa hauteur.<br />

Il est certain que cette masse <strong>de</strong><br />

pierre, qui présente un volume <strong>de</strong> près<br />

<strong>de</strong> dix-huit mètres cubes, a été transportée<br />

à cet endroit ; car le sol sur<br />

lequel elle repose est <strong>de</strong> toute autre nature<br />

; c'est un banc <strong>de</strong> schiste.<br />

La route <strong>de</strong> Bech tasch quitte les<br />

collines pour se diriger au milieu <strong>de</strong>s<br />

cultures <strong>de</strong> vignes et <strong>de</strong> mûriers; la végétation<br />

est magnifique dans cette région<br />

comme dans tous les environs <strong>de</strong><br />

Nicée.<br />

Bientôt on retrouve les montagnes,<br />

mais ari<strong>de</strong>s et pelées. Un grand soubassement<br />

sur lequel on arrive <strong>par</strong> un escalier<br />

<strong>de</strong> quatorze marches est entièrement<br />

taillé dans le roc; c'était sans<br />

doute l'emplacement <strong>de</strong> quelque petit<br />

temple ou d'un autel <strong>de</strong> carrefour.<br />

En cet endroit la montagne est composée<br />

<strong>de</strong> roches <strong>de</strong> marbre blanc, mais<br />

d'une qualité médiocre ; il est imprégné<br />

<strong>de</strong> <strong>par</strong>ticules cuivreuses qui forment<br />

<strong>de</strong>s taches verdâtres. On arrive bientôt<br />

dans une gran<strong>de</strong> plaine au milieu <strong>de</strong><br />

laquelle est la pyrami<strong>de</strong>, ou plutôt l'obélisque<br />

<strong>de</strong> Cassius. Ce monument est<br />

construit en calcaire gris <strong>de</strong> la contrée.<br />

Il se compose d'un soubassement carré,<br />

couronné <strong>par</strong> une corniche, sur lequel<br />

s'élève l'obélisque, <strong>de</strong> forme triangulaire;<br />

ce qui n'est pas d'un goût très-pur. La<br />

base porte une moulure dans le style attique-L'obélisque<br />

était com posé <strong>de</strong> six bl ocs<br />

<strong>de</strong> pierre; mais le couronnement est<br />

tombé; il ne reste plus qne cinq assises.


110<br />

L'ÛNtVÈRS.<br />

Voila pourquoi les Turcs appellent ce<br />

monument Been tasch.<br />

Le côté qui regar<strong>de</strong> le couchant est<br />

<strong>par</strong>allèle à la face du pié<strong>de</strong>stal, au<strong>de</strong>ssus<br />

<strong>de</strong> la plinthe <strong>de</strong> l'obélisque, on<br />

lit la courte inscription suivante :<br />

C. Cassins, fils d'Asclépiodotus, a vécu quatre-vingt-trois<br />

ans.<br />

Asclépiodote <strong>de</strong> Bithynié était ami<br />

intime du poète Valerius Soranus qui<br />

vivait du temps <strong>de</strong> Cicéron et <strong>de</strong> César.<br />

Lorsque ce poète fut mis en accusation,<br />

Asclépiodote lui témoigna toujours le<br />

même attachement ; ses biens furent<br />

confisqués et lui-même envoyé en exil ;<br />

Soranus fut condamné à mort (1). Si<br />

Ton ajoute à la date <strong>de</strong> ces _ faits les<br />

quatre-vingt-trois ans <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> Càssius,<br />

on arrive à la fin du premiersiècle,<br />

c'est-à-dire au temps où Pline était préteur<br />

<strong>de</strong> Bithynié. On est donc à peu<br />

près certain <strong>de</strong> la date <strong>de</strong> ce monument.<br />

CHAPITRE XVIII<br />

BOUTE DE NICÉE A CIUS, GHIO, PAB<br />

LA BIVE SUD DU LAC. LE LAC ASCA­<br />

NIUS. PYTHOPOLIS.<br />

Nicée se trouve en communication<br />

avec la mer <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux routes, la première<br />

que nous avons indiquée, plus<br />

haut (2) <strong>par</strong> Hélénopojis et la vallée du<br />

fleuve Draco, la secon<strong>de</strong> <strong>par</strong> la rive méridionale<br />

du lac et le port <strong>de</strong> Cjus ;. c'est<br />

cette route que nous allons suivre.<br />

I LE LAC ASCANIUS.<br />

Les murailles <strong>de</strong> Nicée du côté <strong>de</strong><br />

l'ouest plongent dans les eaux mêmes<br />

du lac, qui s'étend dans une direction<br />

moyenne <strong>de</strong> l'est a l'ouest, et dont le<br />

grand axe a environ vingt-<strong>de</strong>ux kilomètres<br />

<strong>de</strong> longueur, tandis que le petit axe<br />

nord et sud n'en a pas plus <strong>de</strong> dix. Il est<br />

encaissé entre <strong>de</strong>ux chaînes <strong>de</strong> montagnes;<br />

celle du nord, qui n'est autre que<br />

?e mont Arganthonius, aujourd'hui Katern"<br />

dagh, offre <strong>de</strong>s lignes assez unifor-<br />

(0 TaciL, Annale, XVI, ch. 33.<br />

(a) Voy. page 69.<br />

mes. La chafne du sud, qui est comme<br />

la première ceinture d'un <strong>de</strong>s plateaux<br />

<strong>de</strong> l'Olympe, est couverte d'une végétation<br />

abondante et alpestre qui donne à<br />

cette région un aspect..<strong>de</strong>s plus rian|fl<br />

Le lac Ascanius, d'après les anciens géographes,<br />

ap<strong>par</strong>tenait à la Mysie et fut 1<br />

ainsi nommé <strong>de</strong> la région Ascania dont<br />

il faisait <strong>par</strong>tie. Le bourg d'Ascaniej<br />

était bâti sur les bords du lac dont le!<br />

eaux s'épanchaient dans la mer en fori<br />

niant le fleuve Ascanius. La contre!<br />

était aussi appelée Dolioni<strong>de</strong> (1). La sS<br />

tuation et la raison d'être <strong>de</strong> ce lac sont<br />

<strong>par</strong>faitement indiquées <strong>par</strong> la nature<br />

même du pays, La gran<strong>de</strong> vallée cou*<br />

rant est et ouest et qui se termine à<br />

l'est <strong>par</strong> les montagnes <strong>de</strong> Ak serai (2)*<br />

<strong>de</strong>ux chaînes <strong>par</strong>allèles au nord et au<br />

sud, et enfin à l'ouest une barrière dé<br />

collines peu élevées qui donne passage<br />

au trop plein <strong>de</strong>s eaux du lac.<br />

Toutes les eaux pluviales ne pouçg<br />

raient cependant suffire à l'entretien, àj<br />

^evaporation et à l'épanchement <strong>de</strong>l<br />

cette nappe d'eau ; il faut <strong>de</strong> plus sup*<br />

poser <strong>de</strong>s sources souterraines qui entretiennent<br />

son niveau. M<br />

Si l'on examine bien la rive nord, on<br />

verra que <strong>de</strong> ce côté les eaux ten<strong>de</strong>nt!<br />

à se retirer. Ce n'est que la conséquence]<br />

<strong>de</strong>s atterrissements formés <strong>par</strong> les<br />

pentes du mont Raterli. Les eaux Oui<br />

lac sont très-saumâtres. Aristote attri*<br />

bue cette <strong>par</strong>ticularité au nitre qu'elles)<br />

tiennent en dissolution et non pas au<br />

sel marin (3). Les eaux du lac nourrissent<br />

plusieurs espèces <strong>de</strong> poissons qutj<br />

ne sont pas encore étudiés ; il y en a qui<br />

ont plus <strong>de</strong> soixante centimètres <strong>de</strong> longueur<br />

et qui ressemblent au sterlet*]<br />

mais il est très-difficile <strong>de</strong> s'en procurer<br />

; à peine peut-on trouver un ba-l<br />

teau sur le lac <strong>de</strong> Nicée. Toute la <strong>par</strong>tiel<br />

d'histoire naturelle du lac, coquilles<br />

mollusques et poissons, est encore à.<br />

étudier.<br />

Peu <strong>de</strong> plantes aquatiques croissent<br />

sur ses bords, qui sont néanmoins fréuentés<br />

<strong>par</strong> <strong>de</strong> nombreuses troupes<br />

'oiseaux, <strong>par</strong>mi lesquels on remarque'<br />

(1) StraboD,XlV, 68r;>K, 564. Homère» j<br />

It., b. 862, n. 79a.<br />

(a) Voyipl. haut.<br />

(3) Aristote, <strong>de</strong> Mir ab., ch. 54.

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