MAQ PETIT BULLETIN_GRENOBLE - Le Petit Bulletin
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P06_07 — LE <strong>PETIT</strong> <strong>BULLETIN</strong> N°676 — DU 18.07 AU 28.08.12<br />
NUMÉRO ÉTÉ CINÉMA - TOUTES LES SORTIES DE L’ÉTÉ<br />
— SORTIE LE 18 JUILLET —<br />
La Vie sans principe<br />
La crise de la dette filmée par Johnnie To, on ne pouvait rêver<br />
projet plus improbable. Passé l’étonnement, le dernier maître du polar<br />
honkongais pourrait bien être l’auteur idéal. Depuis longtemps, To ne cesse<br />
de bâtir son cinéma géométrique autour d’un principe de diagramme. Chez<br />
lui, tout est lié et n’est qu’une question de rapport entre les individus. La<br />
Vie sans principe vient approfondir la mathématique de ses films, pour adapter<br />
son économie (stylistique et métaphysique) au capital. Tout repose donc<br />
ici sur trois destins croisés liés à l’argent : une employée de banque sous pression,<br />
une petit malfrat courant après le fric pour son boss, un flic assistant<br />
intimement au sentiment d’effondrement général. To n’a rien perdu de sa<br />
malice, et le film joue avec une espièglerie jubilatoire de l’ironie du destin et<br />
d’un système financier aussi absurde que sans foi ni loi. Si les parties ne sont<br />
pas égales (la première, rapport ultra réaliste sur l’exploitation des petits<br />
épargnants, se révèle la plus passionnante), l’ensemble tient au final par sa<br />
description personnelle et cinglante de la crise. Puisque chez To l’interdépendance<br />
domine, sa vision du darwinisme économique est une belle occasion<br />
pour traiter l’argent comme d’un noeud amoral. Il est surtout une opportunité<br />
pour s’amuser du hasard, ou plutôt du facteur inconnu. Manière de dire<br />
que l’incalculable est la promesse d’un nouveau problème à résoudre, et donc<br />
d’un autre film à imaginer.<br />
JÉRÔME DITTMAR<br />
> La Vie sans principe<br />
De Johnnie To (HK, 1h47)<br />
Avec Lau Ching Wan, Denise Ho, Richie Ren…<br />
— SORTIE LE 8 AOÛT —<br />
Voie rapide<br />
Rencontre improbable entre Fast and furious et le cinéma des<br />
frères Dardenne, ce premier film raconte la culpabilité d’Alex, un amateur<br />
de tuning (Libéreau) qui, un soir, tue un jeune garçon sur la voie rapide qui le<br />
ramenait à son domicile, et décide de cacher l’accident à sa copine Rachel<br />
(Christa Théret, actrice définitivement épatante). Contre toute attente,<br />
Christophe Sahr trouve systématiquement la bonne distance entre réalisme<br />
social et envie de spectacle pour raconter l’errance morale de son héros. La<br />
peinture du milieu est crédible sans sombrer dans la caricature, et le film<br />
choisit de retranscrire le tourment qui s’empare d’Alex en faisant de sa<br />
passion un reflet de sa psyché. Plus Alex s’enfonce dans le remords, plus sa<br />
voiture se déglingue, comme si sa culpabilité atteignait l’ensemble de son<br />
environnement. Parfois démonstrative, la mise en scène n’hésite pourtant pas<br />
à aller fouiller dans des zones dérangeantes, comme lorsqu’Alex se rapproche,<br />
y compris physiquement, de la mère de la vic-time (Isabelle Candelier, inattendue).<br />
Tourné vite et pour un budget ridi-cule, Voie rapide est un objet fragile,<br />
mais évidemment sincère, avec des défauts mais aussi un appétit de cinéma<br />
qui manque souvent aux premiers films français. CHRISTOPHE CHABERT<br />
> Voie rapide<br />
De Christophe Sahr (Fr, 1h30)<br />
Avec Johan Libéreau, Christa Théret…<br />
DR<br />
DR<br />
Mercredi 18 juillet<br />
Laurence anyways<br />
De Xavier Dolan (Fr-Can,<br />
2h41) avec Melvil Poupaud…<br />
Voir l’article en page 04.<br />
Effraction<br />
De Joel Schumacher<br />
(ÉU, 1h31) avec Nicole<br />
Kidman, Nicolas Cage...<br />
Plus indéfendable que Joel<br />
Schumacher, tu meurs. En chute<br />
libre depuis dix ans, c’est à croire<br />
qu’il n’a plus rien à perdre, enchaînant<br />
avec une certaine malice<br />
suicidaire des projets toujours<br />
plus borderline. Effraction n’enlèvera<br />
rien aux pulsions droitières du bonhomme<br />
qui, dans ce proto remake de<br />
Desperate Hours, embarque Nicolas<br />
Cage et Nicole Kidman (couple bourgeois<br />
en crise) dans une spirale<br />
infernale de violence. Jouant d’une<br />
intrigue à tiroirs où une banale histoire<br />
de prise d’otage et d’argent<br />
débouche sur des trahisons en<br />
cascade, Schumacher dépeint un<br />
portrait malade de la famille et des<br />
relations conjugales, engoncées dans<br />
leurs mensonges et désirs inavoués.<br />
En ressort un objet tendu, souvent<br />
hystérique et écoeurant de mauvais<br />
goût, mais qui prend progressivement<br />
forme pour accoucher d’une vision<br />
radicale et déviante. Jusqu’au-boutiste,<br />
problématique, ambigu, aberrant,<br />
Schumacher trace sa route au mépris<br />
des conventions et sans se soucier<br />
de plaire. Pour ça, respect. JD<br />
La Vie sans<br />
principe<br />
De Johnnie To (HK, 1h47) avec<br />
Lau Ching Wan, Denise Ho…<br />
Voir l’article ci-contre.<br />
PAS VUS !<br />
<strong>Le</strong> Lorax<br />
De Chris Renaud (ÉU, 1h27)<br />
animation<br />
Ted vit à Thneedville, une cité artificielle<br />
où toute végétation a disparu.<br />
Pour séduire sa jolie voisine, il part en<br />
quête d’un arbre et rencontre un vieil<br />
ermite qui lui raconte la légende du<br />
Lorax.<br />
Paris Manhattan<br />
De Sophie <strong>Le</strong>llouche (Fr,<br />
1h17) avec Alice Taglioni,<br />
Patrick Bruel…<br />
Alice, pharmacien, jeune, belle, célibataire<br />
et passionnée par Woody Allen,<br />
doit résister à la pression familiale<br />
qui voudrait la voir casée à tout prix.<br />
A.C.A.B. (All Cops<br />
Are Bastards)<br />
De Stefano Sollima (It-Fr,<br />
1h52) avec Pierfrancesco<br />
Favino, Filippo Nigro…<br />
Trois «flics bâtards» selon l’appellation<br />
que leur donnaient les skinheads<br />
anglais dans les années 70,<br />
n’ont qu’un seul but : faire appliquer<br />
la loi, y compris par l’usage de la force.<br />
Bowling<br />
De Marie-Castille<br />
Mention-Schaar (Fr, 1h30)<br />
avec Catherine Frot…<br />
Catherine, DRH, est envoyée à Carhaix<br />
pour restructurer l’hôpital de la ville<br />
et fermer sa maternité. Elle va se lier<br />
d’amitié avec trois femmes : une<br />
sage-femme, une puéricultrice et la<br />
tenancière d’un bowling.<br />
Trois sœurs<br />
De Milagros Mumenthaler<br />
(Arg-Suisse, 1h38) avec<br />
Maria Canale…<br />
Marina, Sofia et Violeta passent la<br />
fin de l’été dans la maison familiale<br />
de Buenos Aires où leur grand-mère<br />
vient de mourir. Ente complicité et<br />
rivalités, le trio gère le quotidien,<br />
jusqu’à la disparition de Violeta.<br />
The Exchange<br />
D’Eran Kolirin (Israël, 1h34)<br />
avec Dov Navon…<br />
Oded rentre chez lui au beau milieu<br />
de la journée, et regarde sa maison<br />
avec un œil nouveau, celui de l’enfant<br />
qu’il était. Un changement qui<br />
va peu à peu affecter sa vie toute<br />
entière. Par le réalisateur de La Visite<br />
de la fanfare.<br />
Mercredi 25 juillet<br />
Guilty of romance<br />
De Sono Sion (Jap, 1h52)<br />
avec Megumi Kagurazaka…<br />
Voir l’article en page 04.<br />
<strong>Le</strong>s Trois<br />
Corniauds<br />
De Peter et Bob Farrelly<br />
(ÉU, 1h32) avec Sean Hayes,<br />
Chris Diamantopoulos...<br />
Trésor national outre-Atlantique, The<br />
Three Stooges n’a jamais traversé<br />
nos frontières. Pas facile, en l’état,<br />
d’attirer la curiosité du non initié, qui<br />
verra dans ce nouveau Farrelly (forcément<br />
rebaptisé) un ersatz de<br />
Benny Hill avec trois compères<br />
demeurés passant leur temps à se<br />
mettre sur la tronche. Adaptation pur<br />
jus où chaque baffe est ponctuée<br />
d’un boing sonore, ce 3 Stooges est<br />
aussi suicidaire que courageux. Avec<br />
son humour ultra daté, naïf, crétin,<br />
descendant d’un slapstick sans<br />
génie venu des années 30 où sont<br />
nés les personnages, le film serait à<br />
la limite du regardable, s’il ne disait<br />
quelque chose des Farrelly. De leur<br />
volonté, revendiquée, de ressusciter<br />
leurs idoles pour payer un tribut qui<br />
soit aussi une prise de position<br />
sur l’époque et leur cinéma. <strong>Le</strong>s<br />
meilleurs morceaux du film sont<br />
ainsi quand l’univers des Stooges<br />
percute celui de la télé réalité façon<br />
Loft Story. L’humanisme maison<br />
l’emporte alors sur le cynisme. Mais<br />
avait-on vraiment besoin de ça ? JD<br />
360<br />
De Fernando Meirelles<br />
(Ang-Fr-Aut-Brésil, 1h50)<br />
avec Jude Law, Rachel Weisz...<br />
Pour mémo : songer à laisser La<br />
Ronde au passé, et se contenter de<br />
l’adaptation d’Ophüls, jamais dépassée<br />
depuis. Malgré le bien<br />
qu’on peut penser ici de Fernando<br />
Meirelles, lui confier une énième<br />
version de la pièce de Schnitzler<br />
n’était pas forcément une bonne<br />
idée. Sur les traces d’Innaritu, en<br />
plus aimable avec ses personnages,<br />
360 tient du Babel de l’amour.<br />
Film choral mondialisé, ce tour<br />
operator du désir, du sexe et des<br />
sentiments voudrait être partout,<br />
refaire la lutte des classes, parler<br />
famille, raconter l’ironie du destin,<br />
résumer l’univers à coup de chasséscroisés<br />
lelouchiens. Mais il est nulle<br />
part, suivant mollement le petit<br />
ordre moral du scénario, affaiblissant<br />
ses images d’une adéquation<br />
balourde entre son montage et son<br />
titre (360, la ronde, le monde, etc.).<br />
Meirelles découvre le split screen<br />
et bricole. C’est fluide, pas moche,<br />
le casting international (de Jude<br />
Law à Jamel) fait le job. Sauf que<br />
tout est publicitaire, pas finaud, survolé<br />
et sans enjeux. JD<br />
Jane Eyre<br />
De Cary Fukunaga (Ang-ÉU,<br />
1h55) avec Mia Wasikowska,<br />
Michael Fassbender…<br />
La folle passion entre Edward<br />
rochester et sa gouvernante Jane<br />
Eyre. Par le réalisateur de Sin nombre,<br />
d’après l’œuvre de Charlotte Brontë.<br />
PAS VUS !<br />
The Dark Knight<br />
rises<br />
De Christopher Nolan (ÉU,<br />
2h45) avec Christian Bale,<br />
Tom Hardy, Anne Hathaway…<br />
La conclusion de la trilogie du chevalier<br />
noir, qu’on annonce épique et<br />
noirissime, conforme au lifting opéré<br />
par Christopher Nolan au personnage<br />
de Batman. Impatience !<br />
Cendrillon<br />
au far-west<br />
De Pascal Hérold (Fr, 1h21)<br />
animation<br />
Tout est dans le titre : le conte de<br />
Cendrillon transposé dans l’univers<br />
du western. Après, faut voir ce que<br />
les gens fument…<br />
A little closer<br />
De Matthew Petock (ÉU,<br />
1h12) avec Sayra Player…<br />
Dans un coin perdu de Virginie, une<br />
femme se bat pour ses deux enfants<br />
et tente de rencontrer l’âme sœur<br />
afin de leur offrir un père. Nouvelle<br />
étape de la reconquête du sud par<br />
les cinéastes américains indépendants,<br />
après Summertime et avant<br />
Beasts of the southern wild…<br />
Gangs of<br />
Wasseypur - Part 1<br />
D’Anurak Kashyap (Inde,<br />
2h40) avec Manoj Bajpai…<br />
Guerre des gangs sur trois générations<br />
dans un film-fleuve (5h30)<br />
dont voici la première partie (la suite<br />
sortira en décembre).<br />
Mercredi 1 er août<br />
Friends With Kids<br />
De Jennifer Westfeldt (USA,<br />
1h47) avec Adam Scott,<br />
Jennifer Westfeldt...<br />
Dans l’enfer moderne de la comédie<br />
romantique, Friends With Kids sort<br />
étonnamment son épingle du jeu.<br />
Tout en reprenant la tendance lourde<br />
actuelle (l’amour sécuritaire, le nonengagement,<br />
le zéro risque), le film<br />
de Jennifer Westfeldt en sape tranquillement<br />
les impasses. <strong>Le</strong> sujet du<br />
jour : comment faire un enfant hors<br />
couple, entre amis, pour fuir les aléas<br />
du mariage, se voit ainsi traité avec<br />
une intelligence que la première<br />
bobine, un peu manichéenne, ne<br />
présumait pas. Embrassant la question<br />
avec sensibilité et humour, le<br />
film surprend graduellement à<br />
force d’étoffer son classicisme. La<br />
moralité est toujours la même : nul<br />
ne peut se préserver des sentiments,<br />
mais Westfeldt l’impose en quelques<br />
scènes clés où les idées s’entrechoquent<br />
avec une étonnante lucidité.<br />
Contre l’arrogance de ceux qui<br />
croient gérer leur vie amoureuse<br />
comme leur carrière professionnelle,<br />
le film balance des vérités nuancées<br />
comme ses personnages. C’est tendre,<br />
démocratique, et assez réussi. JD<br />
Rebelle<br />
De Mark Andrews, Brenda<br />
Chapman (ÉU, 1h35) animation<br />
Dans les highlands écossaises du<br />
Moyen-âge, Merida, fille du roi<br />
Fergus et de la Reine Elinor, préfère<br />
manier l’arc et les flèches plutôt que<br />
d’endosser son rôle de princesse. <strong>Le</strong><br />
nouveau Pixar, gage de qualité s’il<br />
en est un !<br />
5 ans de réflexion<br />
De Nicolas Stoller (ÉU,<br />
2h05) avec Jason Segel…<br />
Alors qu’ils sont prêts à se marier,<br />
Tom et Violet doivent différer leurs<br />
noces pour des raisons professionnelles.<br />
D’événements en événements,<br />
cinq ans vont s’écouler. Par le réalisateur<br />
de Sans Sarah rien ne va et<br />
American trip.<br />
Mercredi 8 août<br />
À cœur ouvert<br />
De Marion Laine (Fr, 1h28)<br />
avec Juliette Binoche…<br />
Un couple de chirurgiens spécialisés<br />
dans les opérations du cœur s’aiment,<br />
puis se déchirent, l’alcoolisme du mari<br />
entrant en conflit avec la maternité<br />
non désirée de sa femme. Sur le papier,<br />
c’est assez banal, et c’est effectivement<br />
tout le problème : Marion Laine<br />
ne sait jamais trop s’il faut contourner<br />
le cliché (option psychodrame)<br />
ou s’y enfoncer (option mélodrame),<br />
et À cœur ouvert louvoie longuement<br />
entre ces deux écueils, jusqu’à<br />
un dernier acte complètement raté,<br />
avec une embardée onirique mal<br />
maîtrisée et passablement cucul.<br />
Pourtant, dans la première partie,<br />
elle réussissait l’impossible : rendre<br />
crédible à l’écran le couple Binoche-<br />
Ramirez, en arrivant à instaurer une<br />
troublante complicité physique entre<br />
eux. Si elle s’était contentée de