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Cercil-role-camps-Pithiviers-Beaune-la-Rolande

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Le rôle des <strong>camps</strong> de <strong>Pithiviers</strong> et de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde<br />

dans l’internement et <strong>la</strong> déportation des Juifs de France1<br />

La rafle du 14 mai 1941<br />

En mai 1941, à Paris, des milliers de Juifs étrangers, dont <strong>la</strong> liste a été établie grâce au fichier du<br />

recensement effectué à partir de septembre 1940 par les autorités françaises sur ordre allemand,<br />

reçoivent une convocation, le « billet vert » : ils sont « invités à se présenter », le 14 mai, dans divers<br />

lieux de rassemblement « pour examen de situation ». Ils doivent être accompagnés d’un membre de<br />

leur famille ou d’un ami. Persuadés qu’il s’agit d’une simple formalité, beaucoup s’y rendent. Ils sont<br />

alors retenus, tandis que <strong>la</strong> personne qui les accompagne est priée d’aller chercher pour eux quelques<br />

vêtements et vivres.<br />

3.700 Juifs sont ainsi arrêtés dans <strong>la</strong> région parisienne : c’est <strong>la</strong> « rafle du billet vert ». Conduits à <strong>la</strong><br />

gare d’Austerlitz en autobus, ils sont transférés le jour même en train vers le Loiret. 1 700 d’entre eux<br />

sont internés à <strong>Pithiviers</strong>, 2 000 à <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde.<br />

Collection Musée de <strong>la</strong> Résistance Nationale – Champigny-sur-Marne<br />

Photo de l’embarquement des hommes, gare d’Austerlitz (14 mai 1941).<br />

Ils vont y rester pendant plus d’un an, dans l’ignorance totale du sort qui leur est réservé. Dès le 8 mai<br />

1942, 289 d’entre eux sont transférés au frontsta<strong>la</strong>g de Compiègne-Royallieu, d’où ils sont<br />

majoritairement déportés le 5 juin 1942, par le convoi 2. En juin - juillet 1942, <strong>la</strong> quasi-totalité des<br />

internés est déportée. Trois convois partent directement vers Auschwitz : le 25 juin et le 17 juillet 1942<br />

de <strong>Pithiviers</strong>, le 28 juin de <strong>Beaune</strong>-La-Ro<strong>la</strong>nde.<br />

1 En 1942, 8 convois partent directement du Loiret pour le camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau.<br />

De nombreuses autres personnes internés dans les <strong>camps</strong> de <strong>Pithiviers</strong> et <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde ont été elles aussi déportées de Drancy,<br />

dans 58 convois différents.


L’arrivée au camp de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde (14 mai 1941)<br />

Les <strong>camps</strong> de <strong>Pithiviers</strong> et de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde sont <strong>la</strong> concrétisation de <strong>la</strong> politique antisémite et de<br />

col<strong>la</strong>boration engagée par le régime de Vichy dès son arrivée au pouvoir. Un décret du 4 octobre 1940,<br />

signé par le Maréchal Pétain, a causé l’internement « de ressortissants étrangers de race juive » dans<br />

des <strong>camps</strong> spéciaux, sur simple décision préfectorale. Le « statut des Juifs », paru <strong>la</strong> veille, avait donné<br />

une définition « française » de <strong>la</strong> « race juive » qui n’est pas <strong>la</strong> même que celle des nazis et qui a édicté<br />

les premières interdictions professionnelles (fonction publique, presse, cinéma …).<br />

En mars - avril 1941, cette politique de persécution antisémite, marquée en particulier par <strong>la</strong> création du<br />

Commissariat Général aux Questions Juives, s’intensifie sous les pressions allemandes, auxquelles le<br />

gouvernement cède en organisant l’internement de 5 000 Juifs de <strong>la</strong> région parisienne.<br />

Le Camp de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde


C’est ainsi que sont créés les <strong>camps</strong> jumeaux de <strong>Pithiviers</strong> et de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde. Le choix de ces<br />

petites villes du Loiret est dû à leur proximité de Paris, à une bonne accessibilité par le chemin de fer, à<br />

<strong>la</strong> possibilité de trouver sur p<strong>la</strong>ce du ravitaillement et à <strong>la</strong> présence d’instal<strong>la</strong>tions sécurisées (barbelés,<br />

miradors) qui ont déjà hébergé des prisonniers de guerre français, transférés depuis en Allemagne. Les<br />

<strong>camps</strong> sont administrés par <strong>la</strong> préfecture du Loiret, à Orléans ; un Service des Camps est mis en p<strong>la</strong>ce.<br />

Collection Musée de <strong>la</strong> Résistance Nationale – Champigny-sur-Marne. Le camp de <strong>Pithiviers</strong> (mai 1941)<br />

La vie dans les <strong>camps</strong><br />

Le camp de <strong>Pithiviers</strong> se situe à proximité immédiate de <strong>la</strong> gare et d’une caserne, à côté de <strong>la</strong> sucrerie<br />

de <strong>Pithiviers</strong>-le-Vieil. Des bâtiments en maçonnerie abritent les services administratifs et médicaux. Le<br />

camp est conçu pour 2 000 internés maximum. 17 baraques sont prévues pour leur logement, sur une<br />

surface de 3 hectares environ. Le camp de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde, situé au nord-est du bourg, est conçu<br />

pour 1 200 à 1 500 internés. 20 baraques sont réparties sur 1,7 hectare environ. Au sud des baraques<br />

s’étend un espace destiné à <strong>la</strong> gestion du camp (stockages, administration, préparation des repas,<br />

infirmerie, corps de garde…). Une partie de <strong>la</strong> route d’Auxy est intégrée au camp. Les internés sont<br />

installés dans des baraques en bois de type Adrian, mesurant 30m sur 6m, avec soubassement de<br />

béton. Dans chaque baraque, de part et d’autre d’un couloir, se trouvent deux rangées de châlits (lits à<br />

deux ou trois étages), remplis de paille ; pail<strong>la</strong>sses et couvertures sont en nombre insuffisant ; 2 poêles<br />

seulement servaient de chauffage, et aucune p<strong>la</strong>ce n’est prévue pour le rangement.<br />

Fonds privé. Internés sur le dernier étage des châlits, sous le p<strong>la</strong>fond


Les conditions de vie au camp sont d’emblée très mauvaises. En particulier les instal<strong>la</strong>tions sanitaires et<br />

médicales ne sont pas opérationnelles à l’arrivée des internés. La situation va un peu s’améliorer, mais<br />

l’alimentation reste insuffisante et carencée, l’hygiène très précaire – <strong>la</strong> prévention des épidémies étant<br />

le seul souci de l’administration –, le logement insalubre (les baraques sont étouffantes en été, très<br />

froides en hiver, à <strong>la</strong> fois mal isolées et non aérées).<br />

Le personnel de surveil<strong>la</strong>nce, français, a une triple origine : des gendarmes venus de <strong>la</strong> banlieue<br />

parisienne, chargés d’assurer <strong>la</strong> sécurité extérieure, des douaniers repliés du sud-ouest, chargés de <strong>la</strong><br />

sécurité intérieure, et, en renfort, des gardiens auxiliaires, recrutés localement.<br />

Le chef de camp est un capitaine de gendarmerie en retraite, plutôt âgé, attiré par le cumul emploiretraite.<br />

Il est assisté d’un gestionnaire à plein temps et d’un médecin-chef, un médecin de ville qui<br />

assure quelques vacations, l’essentiel du travail étant pris en charge par des médecins juifs internés.<br />

Selon le comportement de <strong>la</strong> direction, le régime intérieur du camp oscille entre des périodes de <strong>la</strong>isser<br />

aller indifférent et d’autres où <strong>la</strong> répression s’intensifie, avant finalement de se durcir considérablement<br />

suite aux reproches de <strong>la</strong> hiérarchie préfectorale, de <strong>la</strong> presse col<strong>la</strong>borationniste, et surtout des<br />

Allemands, qui obtiennent, en avril 1942, le remp<strong>la</strong>cement du chef du camp de <strong>Pithiviers</strong> jugé trop<br />

<strong>la</strong>xiste.<br />

Les internés ne voient pratiquement jamais d’Allemands, si ce n’est à l’occasion de quelques visites<br />

d’inspection (comme celle de Dannecker à <strong>Pithiviers</strong> en juin 1941), et lors des « départs » en<br />

déportation, au moment de l’embarquement dans les wagons à bestiaux. En revanche, des pressions<br />

allemandes s’exercent sur <strong>la</strong> préfecture d’Orléans et sont vite suivies d’effets : <strong>la</strong> Feldkommandantur<br />

infléchit ainsi les pratiques d’internement des autorités françaises, au point, finalement, de les piloter. La<br />

seule réticence notable de <strong>la</strong> part des fonctionnaires du Loiret se manifeste lorsqu’ils demandent que<br />

les Allemands respectent <strong>la</strong> voie hiérarchique pour faire passer leurs exigences : en ce<strong>la</strong>, ils sont<br />

d’ailleurs de zélés pratiquants de <strong>la</strong> col<strong>la</strong>boration d’Etat.<br />

Les réactions des internés devant le sort qui leur est fait sont diverses et varient au fil du temps. Ils<br />

cherchent des moyens d’échapper à une situation qui les inquiète de plus en plus, que ce soit un motif<br />

officiel de libération ou une filière c<strong>la</strong>ndestine pour s’évader. L’évasion toutefois devient de plus en plus<br />

difficile au fil des mois, et fait de surcroît l’objet d’un débat complexe entre les internés, entre les<br />

internés et leurs familles, entre les internés et les organisations de résistance. A tout le moins, ils<br />

s’efforcent de trouver des moyens pour améliorer leurs conditions de vie, grâce à un réseau d’amis ou<br />

par quelque affectation qui offrirait des opportunités de sortie (travail ou corvées à l’extérieur du camp).<br />

Archives famille Kreps


Le temps passant, des groupes organisent une vie culturelle (conférences, cours, débats, théâtre,<br />

chorale, ateliers artistiques), nourrie par <strong>la</strong> présence d’artistes, d’artisans et d’intellectuels internés.<br />

L’administration <strong>la</strong>isse faire : ces activités lui garantissent un certain calme, et elle peut user de leur<br />

privation comme d’un moyen de sanction.<br />

Des groupes d’internés réussissent à se structurer en un comité c<strong>la</strong>ndestin de résistance et à établir le<br />

contact avec des mouvements extérieurs au camp. C’est ainsi que s’organise une circu<strong>la</strong>tion<br />

c<strong>la</strong>ndestine de courrier. Deux journaux, c<strong>la</strong>ndestins eux aussi, sont rédigés par des internés, et recopiés<br />

à <strong>la</strong> main dans le camp.<br />

Les internés vivent leur enfermement en se retrouvant au sein de groupes variés : habitants d’une<br />

même baraque, équipes de corvées intérieures ou<br />

extérieures – ces dernières étant les plus prisées car<br />

quand on sort, même sous surveil<strong>la</strong>nce et pour travailler,<br />

on peut nouer des contacts –, groupes d’activités<br />

culturelles, participants aux multiples débats plus ou<br />

moins informels, simples groupes d’affinités (les jeunes,<br />

les croyants, les lecteurs, les peintres etc.).<br />

Certains internés travaillent à l’extérieur – dans des<br />

fermes, des usines, des chantiers forestiers, des carrières,<br />

qui à l’époque manquent tous de main d’oeuvre. Travailler<br />

permet à <strong>la</strong> fois de sortir des barbelés, de tromper l’ennui,<br />

de trouver une meilleure alimentation et un maigre appoint<br />

financier ou de rechercher des opportunités d’évasion.<br />

Les internés peuvent rester en rapport avec leurs familles<br />

encore en liberté (mais confrontées à l’aggravation<br />

progressive de <strong>la</strong> persécution) par le courrier, par les<br />

visites, et même, dans un premier temps, par des<br />

permissions. Ils peuvent également recevoir des colis. Le<br />

lien est certes maintenu, mais il est fragile : il est<br />

quelquefois brutalement interrompu par mesure<br />

disciplinaire.<br />

Bundesarchiv. Visite des familles au camp de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-<br />

Ro<strong>la</strong>nde (été 1941)<br />

Les premières déportations…<br />

En septembre - octobre 1941, puis en mars - avril 1942, à <strong>la</strong> demande des Allemands, le régime des<br />

<strong>camps</strong> se durcit, rendant les évasions bien plus difficiles 2 . Si bien qu’au printemps 1942, lorsque<br />

commence le départ des convois de déportation vers l’Est 3 , les <strong>camps</strong> du Loiret sont pleins. La<br />

préparation des grandes rafles de déportation de l’été 1942 4 implique de les vider de leurs occupants,<br />

2 700 internés réussissent à s’évader, essentiellement avant octobre 1941. Beaucoup sont ensuite repris, puis déportés<br />

3 C’est le début de <strong>la</strong> mise en oeuvre par les nazis, en Europe de l’Ouest, de <strong>la</strong> « solution finale », dont<br />

les modalités ont été décidées lors de <strong>la</strong> conférence de Wannsee, en janvier 1942.<br />

4 Suite aux accords Oberg-Bousquet, c’est <strong>la</strong> police française qui va effectuer les arrestations demandées par les Allemands.


«pour faire p<strong>la</strong>ce à de nouveaux détenus » - qui seront cette fois-ci des familles. Les « hommes du billet<br />

vert » sont donc massivement déportés par les convois 2, 4, 5, et 6 partis respectivement le 5 juin de<br />

Compiègne, le 25 juin de <strong>Pithiviers</strong>, le 28 juin de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde, et le 17 juillet de <strong>Pithiviers</strong>.<br />

Les convois 5 et 6 sont composés principalement « d’internés du billet vert ». Mais d’autres Juifs, parmi<br />

lesquels des femmes et des enfants, ont fait l’objet d’une rafle pour compléter l’effectif théorique<br />

souhaité de 1 000 déportés par convoi. Pour le convoi 5, 111 personnes sont arrêtées dans <strong>la</strong> région<br />

d’Orléans par <strong>la</strong> police française, dont 34 femmes, <strong>la</strong> plus jeune ayant 15 ans. Pour le convoi 6, 193<br />

Juifs, hommes, femmes, enfants sont envoyés par les SS de Dijon, et 52 autres par les SS d’Orléans ;<br />

<strong>la</strong> plus jeune a 12 ans.<br />

Archive famille Nowodworski<br />

Rebecca Nowodworski, Lorris, Loiret. Elle a 13 ans lorsqu’elle est déportée par le convoi 6 et assassinée à Auschwitz<br />

Après <strong>la</strong> rafle du Vel d’Hiv, les femmes et les enfants…<br />

« Le paroxysme de <strong>la</strong> solution finale en France »<br />

Serge K<strong>la</strong>rsfeld<br />

Après <strong>la</strong> rafle du Vel d’Hiv, entre le 19 et le 22 juillet 1942, près de 8 000 personnes – parmi lesquelles<br />

plus de 4 000 enfants, souvent très jeunes- , sont transférées dans les <strong>camps</strong> de <strong>Pithiviers</strong> et de<br />

<strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde, conçus pour en accueillir moitié moins. Pourtant prévenue de l’arrivée de milliers<br />

de personnes, l’administration des <strong>camps</strong> n’a rien prévu, ni pour l’hébergement ni pour l’alimentation, en<br />

particulier pour de très jeunes enfants.<br />

La pagaille est extrême. Tout manque : nourriture, médicaments, couvertures, vêtements.<br />

Nombre de femmes et d’enfants sont installés sur de <strong>la</strong> paille posée à même le sol. A <strong>Pithiviers</strong>, dès le<br />

20 juillet, les baraques sont saturées. Le 21, ce sont plus de 2 000 personnes supplémentaires qui<br />

arrivent : elles sont entassées dans un hangar réquisitionné. La situation sanitaire est catastrophique.<br />

Des épidémies se déc<strong>la</strong>rent. Faute des soins nécessaires, plusieurs enfants meurent.


Dès le 17 juillet, l’administration française a exprimé « le souhait de voir les convois à destination du<br />

Reich inclure également les enfants ». Or, à cette période, les nazis ne réc<strong>la</strong>ment que les adolescents<br />

de plus de 15 ans. En attendant l’autorisation de Berlin pour déporter les enfants, il est envisagé de les<br />

séparer de leurs parents, qui doivent être déportés dans les jours qui suivent. C’est finalement ce qui se<br />

produit fin juillet dans les <strong>camps</strong> d'internement du Loiret.<br />

Fin juillet, <strong>la</strong> décision est prise de déporter les adultes, pour compléter l’effectif des convois prévu lors<br />

des accords franco-allemands. Brutalement séparés de leurs enfants les plus jeunes, les mères et les<br />

grands adolescents sont alors massivement déportés par 4 convois partant<br />

directement des gares de <strong>Pithiviers</strong> et <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde vers Auschwitz,<br />

du 31 juillet au 7 août (convois 13 à 16). Les enfants restent seuls, livrés à<br />

une détresse absolue, matérielle et psychique.<br />

Aline Korenbajzer est assassinée à<br />

Auschwitz le jour anniversaire de ses 3 ans.<br />

Le 13 août, l’accord écrit pour <strong>la</strong> déportation des enfants arrive de Berlin.<br />

Entre le 15 et le 25 août, les enfants sont transférés à Drancy , d’où ils sont<br />

déportés à Auschwitz-Birkenau, majoritairement par les convois 20 à 26 (du<br />

17 au 28 août 1942). Les autres partiront un peu plus tard, notamment le 21<br />

septembre par le convoi 35, depuis <strong>la</strong> gare de <strong>Pithiviers</strong> (<strong>la</strong> plus jeune a 2<br />

ans).<br />

Aucun des enfants déportés n’est revenu.<br />

« Sous le titre anodin et administratif d'un document extrait des archives du Loiret, défilent, page après<br />

page, des listes interminables de noms. A travers ces noms et prénoms, adresse et domicile, lieu de<br />

naissance et destination, on découvre <strong>la</strong> liste des déportés juifs des <strong>camps</strong> de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde et de<br />

<strong>Pithiviers</strong> à l'été 1942. Puis dans une colonne, surgissent les dates de naissance : 1933, 1935, 1936,<br />

1939. Ainsi apparaît, sur papier administratif, le spectacle de l'horreur absolue : <strong>la</strong> déportation des<br />

enfants. Des 3 000 à 5 000 cartons d'archives que j'ai eu à dépouiller pour mon travail sur les <strong>camps</strong><br />

d'internement, celui-ci, par sa réalité froide, m'a le plus bouleversé».<br />

Denis Peschanski.<br />

Les <strong>camps</strong> après l’été 1942<br />

Après septembre 1942, les internés juifs de <strong>Pithiviers</strong> sont transférés à <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde. Le camp de<br />

<strong>Pithiviers</strong> enferme désormais, de septembre 1942 à août 1944, des « internés administratifs »,<br />

essentiellement des communistes internés par décision préfectorale.<br />

Le camp de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde absorbe, pour des durées provisoires, les sureffectifs du camp de<br />

Drancy, ou encore « héberge » les « catégories » d’internés jugées, au moins pour un temps, « non<br />

déportables ». La vie du camp est alors rythmée par le départ de quelques convois pour Drancy, par un<br />

va-et-vient de groupes de centaines d’internés, constamment rec<strong>la</strong>ssés et dép<strong>la</strong>cés. Les Allemands<br />

décident, et l’administration française applique systématiquement leurs décisions.<br />

En juillet 1943, après une inspection d’Aloïs Brünner dans le Loiret, les internés sont tous rassemblés à<br />

Drancy, et le camp de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde est fermé.


Archives départementales du Loiret<br />

Transfert des derniers internés du camp de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde à Drancy (12 juillet 1942)<br />

Conclusion<br />

On estime que 16 000 à 18 000 Juifs ont été internés dans ces deux <strong>camps</strong>, certains pendant plus<br />

d’une année, d’autres pour quelques jours. Internés avant d’être déportés et de disparaître, assassinés<br />

dans les <strong>camps</strong> d’extermination d’Auschwitz et, pour quelques-uns, de Sobibor. 4 700 enfants ont été<br />

internés dans ces deux <strong>camps</strong> entre juin 1942 et juillet 1943. 4 400 ont été déportés et assassinés. 26<br />

adolescents ont survécu. 3 enfants sont morts à Bergen-Belsen, 15 en sont revenus. 14 enfants sont<br />

morts dans les <strong>camps</strong> de <strong>Beaune</strong>-<strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde, <strong>Pithiviers</strong> et Drancy. L’ouverture à Orléans, en janvier<br />

2011, d’un centre d’histoire et de mémoire, ainsi que l’imp<strong>la</strong>ntation d’une baraque du camp de <strong>Beaune</strong><strong>la</strong>-Ro<strong>la</strong>nde,<br />

c<strong>la</strong>ssée Monument historique, dans <strong>la</strong> cour du centre, seront les témoins de cette histoire<br />

auprès des générations futures.<br />

Comprendre le mécanisme du passé pour mieux appréhender le présent

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