Troubles vesicosphincteriens dans le locked-in syndrome - ALIS
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TROUBLES VESICOSHINCTERIENS<br />
DANS LE LOCKED-IN SYNDROME<br />
Dr A. STEFAN - service Médec<strong>in</strong>e Physique Réadaptation, CHU Nantes<br />
L'ur<strong>in</strong>e sécrétée par <strong>le</strong>s deux re<strong>in</strong>s par<br />
filtration du sang descend vers la vessie en<br />
passant <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s uretères.<br />
La vessie comporte un dôme soup<strong>le</strong> et extensib<strong>le</strong> qui sert de réservoir, et une base dont la<br />
forme se modifie lorsque la vessie se contracte. L’urètre est <strong>le</strong> canal évacuateur des ur<strong>in</strong>es.<br />
Il comporte un sph<strong>in</strong>cter lisse qui remonte sur <strong>le</strong> col vésical et un sph<strong>in</strong>cter strié qui<br />
prolonge <strong>le</strong> musc<strong>le</strong> re<strong>le</strong>veur de l'anus, soutien du plancher pér<strong>in</strong>éal.<br />
La vessie a deux fonctions : <strong>le</strong> stockage et l’expulsion des ur<strong>in</strong>es.<br />
La miction est l'évacuation du contenu de la vessie sous l'effet de la contraction du musc<strong>le</strong><br />
qui l'entoure (<strong>le</strong> détrusor), cette dernière est synchrone d’une relaxation du musc<strong>le</strong> lisse<br />
urétra<strong>le</strong> (sph<strong>in</strong>cter <strong>in</strong>terne) et du sph<strong>in</strong>cter strié (externe) de l'urètre.<br />
Les phases de remplissage et d’évacuation des ur<strong>in</strong>es dépendent de l’<strong>in</strong>tégrité des<br />
propriétés viscoélastiques de la vessie et du contrô<strong>le</strong> neurologique assuré par différents<br />
systèmes : <strong>le</strong> cortex, <strong>le</strong> diencépha<strong>le</strong>, <strong>le</strong> tronc cérébral, <strong>le</strong> cerve<strong>le</strong>t, la Moel<strong>le</strong> ép<strong>in</strong>ière et <strong>le</strong><br />
système nerveux périphérique.<br />
Le contrô<strong>le</strong> neurologique :<br />
Lors du remplissage progressif de la vessie, la pression vésica<strong>le</strong> augmente <strong>le</strong>ntement. Des<br />
impulsions sensoriel<strong>le</strong>s émanant de la muqueuse et des fibres musculaires vésica<strong>le</strong>s vont<br />
aboutir au centre sacré de la miction par l’<strong>in</strong>termédiaire des nerfs érecteurs et honteux<br />
<strong>in</strong>ternes. Les <strong>in</strong>formations montent <strong>dans</strong> la moel<strong>le</strong> jusqu’aux noyaux thalamiques et au<br />
cortex pariétal. Parallè<strong>le</strong>ment il existe un réf<strong>le</strong>xe médullaire passant par la voie<br />
sympathique. Ce réf<strong>le</strong>xe a pour départ une stimulation des récepteurs de tension du détrusor<br />
qui envoient des <strong>in</strong>formations au niveau de la moel<strong>le</strong> dorsolombaire via <strong>le</strong>s nerfs érecteurs.<br />
La réponse provoque un relâchement du détrusor avec contraction du sph<strong>in</strong>cter.
Au niveau de la protubérance, deux zones<br />
actives <strong>dans</strong> la miction ont été identifiées :<br />
• La M-région, médiane : qui<br />
provoque la miction par activation<br />
des neurones parasympathiques<br />
sacrés.<br />
• La L-région qui assure la<br />
cont<strong>in</strong>ence par activation des<br />
motoneurones sacrés contractant <strong>le</strong>s<br />
sph<strong>in</strong>cters.<br />
Les centres frontaux <strong>in</strong>terviennent <strong>dans</strong> <strong>le</strong> recueil et<br />
l’analyse des <strong>in</strong>formations sensitives issues de l’appareil<br />
vésicosph<strong>in</strong>ctérien, <strong>dans</strong> l’établissement et <strong>dans</strong><br />
l’exécution des programmes de miction ou de<br />
cont<strong>in</strong>ence.<br />
Lorsque la sensation de beso<strong>in</strong> est <strong>in</strong>tégrée au niveau<br />
cortical, <strong>le</strong>s centres mictionnels encéphaliques lèvent <strong>le</strong>s<br />
<strong>in</strong>fluences <strong>in</strong>hibitrices et donnent une volée d’<strong>in</strong>flux<br />
facilitateur.<br />
Ces <strong>in</strong>flux activent <strong>le</strong>s centres médullaires sacrés S2, S3,<br />
S4 (système parasympathique) à l’orig<strong>in</strong>e d’une<br />
contraction du détrusor. L’activation parasympathique<br />
provoque aussi l’ouverture du col vésical, <strong>le</strong><br />
relâchement du sph<strong>in</strong>cter strié urétral et du plancher<br />
pér<strong>in</strong>éal par <strong>in</strong>hibition du sympathique.<br />
La coord<strong>in</strong>ation entre la contraction vésica<strong>le</strong> et <strong>le</strong><br />
relâchement sph<strong>in</strong>ctérien se fait en partie au niveau de la<br />
protubérance, par <strong>le</strong> noyau de Barr<strong>in</strong>gton ou PMC<br />
(centre mictionnel pontique) encore appelé la M-région.<br />
D ’après F.M. Block et al.: Bra<strong>in</strong> activation dur<strong>in</strong>g micturition <strong>in</strong> women. Bra<strong>in</strong> 1998; 121: 2033-2042<br />
Le Locked-<strong>in</strong> <strong>syndrome</strong> qui associe une tétraplégie complète, une paralysie bucco- labioglosso-pharyngo-laryngée<br />
est <strong>le</strong> plus souvent consécutif à une lésion de la partie antérieure<br />
de la protubérance. Nous savons qu’il existe des centres mictionnels au niveau du pont,<br />
mais <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s vésicosph<strong>in</strong>ctériens sont peu étudiés chez <strong>le</strong> LIS.<br />
Les études de la littérature portant sur <strong>le</strong>s LIS sont essentiel<strong>le</strong>ment descriptives. Des<br />
passages en rétention ur<strong>in</strong>aire (1) ou des troub<strong>le</strong>s ur<strong>in</strong>aires divers évoluant <strong>le</strong> plus souvent<br />
favorab<strong>le</strong>ment (2, 3) ont été rapportés. Les LIS présentent des complications ur<strong>in</strong>aires<br />
fréquentes. Certa<strong>in</strong>es études considèrent <strong>le</strong>s <strong>in</strong>fections ur<strong>in</strong>aires et <strong>le</strong>s lithiases vésica<strong>le</strong>s<br />
comme <strong>le</strong> premier facteur de morbidité <strong>dans</strong> cette population (4).<br />
Selon <strong>le</strong>s pratiques <strong>le</strong>s patients sont dra<strong>in</strong>és par sondage vésical, sont porteurs d’un<br />
col<strong>le</strong>cteur d’ur<strong>in</strong>e ou ont des mictions considérées comme plus ou mo<strong>in</strong>s norma<strong>le</strong>s (5).<br />
Très peu d’<strong>in</strong>vestigations complémentaires sont réalisées pour préciser <strong>le</strong> statut vésicosph<strong>in</strong>ctérien<br />
alors qu’il existe des difficultés de communication à la phase <strong>in</strong>itia<strong>le</strong> et que<br />
l’examen cl<strong>in</strong>ique est <strong>in</strong>suffisant.
Une étude nantaise portant sur 23 LIS (15 hommes 8 femmes, moyenne d’âge 45 ans)<br />
retrouve l’existence de troub<strong>le</strong>s vésicosph<strong>in</strong>ctériens <strong>dans</strong> presque 50% des cas.<br />
Les résultats urodynamiques (BUD) sont pathologiques pour 11 patients avec <strong>dans</strong> 6 cas une<br />
acontractilité vésica<strong>le</strong>. L’évaluation cl<strong>in</strong>ique <strong>in</strong>itia<strong>le</strong> est très diffici<strong>le</strong>. La plupart (78%) des<br />
patients du fait de l’atte<strong>in</strong>te neurologique majeure sont sondés de façon systématique ce qui<br />
permet une protection des voies ur<strong>in</strong>aires.<br />
11 patients ont bénéficié d’une IRM. Il apparaît qu’en cas de lésion antérieure isolée <strong>le</strong>s<br />
BUD sont <strong>le</strong> plus souvent normaux (2/3). Alors qu’en cas de lésion postérieure ou<br />
antéropostérieure étendue ils sont <strong>le</strong> plus souvent pathologiques avec une prédom<strong>in</strong>ance<br />
d’acontractilité (5/8).<br />
Aucune corrélation n’a été retrouvée entre <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s vésicosph<strong>in</strong>ctériens et <strong>le</strong> tab<strong>le</strong>au<br />
cl<strong>in</strong>ique <strong>in</strong>itial. Ils sont à rechercher de façon systématique. De même, aucune corrélation<br />
n’a été montrée entre l’évolution cl<strong>in</strong>ique et l’évolution des troub<strong>le</strong>s vésicosph<strong>in</strong>ctériens qui<br />
évoluent favorab<strong>le</strong>ment <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s ¾ des cas. Il faut donc <strong>in</strong>dépendamment de l’évolution<br />
cl<strong>in</strong>ique réaliser des contrô<strong>le</strong>s de la situation vésicosph<strong>in</strong>ctérienne.<br />
En conclusion<br />
Les troub<strong>le</strong>s vésicosph<strong>in</strong>ctériens, méconnus, sont fréquents chez <strong>le</strong> LIS, jusqu’à 50% des cas.<br />
Ils peuvent être attribués à une lésion du centre pontique mictionnel ou du centre de stockage<br />
ur<strong>in</strong>aire ou des circuits reliant <strong>le</strong>s différents centres mictionnels.<br />
Des cas d’acontractilité peuvent être observés en cas d’atte<strong>in</strong>te protubérantiel<strong>le</strong> postérieure ou<br />
étendue.<br />
Compte tenu de <strong>le</strong>ur fréquence, et des risques de complication à court et moyen terme, la prise<br />
en charge des troub<strong>le</strong>s vésicosph<strong>in</strong>ctériens doit être immédiate et <strong>le</strong>ur évaluation précoce. La<br />
réalisation d’un bilan urodynamique est fortement conseillée. Les troub<strong>le</strong>s sont évolutifs et un<br />
suivi régulier cl<strong>in</strong>ique et paracl<strong>in</strong>ique est nécessaire.<br />
Bibliographie :<br />
1. Kponkton A., Hamonet C., Montagne A.. Complication de la manipulation cervica<strong>le</strong> : une observation de Locked-<strong>in</strong><br />
Syndrome. La Presse Médica<strong>le</strong> 1992 ; 21 : 2050-2052.<br />
2. Dollfus P., Milos P.L., Chapuis A., Real P.,. The Locked-<strong>in</strong> <strong>syndrome</strong> : a Review and Presentation of Two Chroniques<br />
Cases. Parap<strong>le</strong>gia 1990; 28: 5-16.<br />
3. McCuster E.A, Rudick R., Honch G.W., Griggs R.C.. Recovery from the ‘Locked-<strong>in</strong>’Syndrome. Arch.Neurol.1982;39: 145-<br />
147.<br />
4. Haig A.J., Katz R.T., Sahgal V.. Mortality and complications of the Locked-<strong>in</strong> Syndrome. Arch. Phys. Med.<br />
Rehab.1987;68:24-27<br />
5. Katz R.T., Haig A.J., Clark B.b;, DiPaola R.J.. Long term survival, Prognosis and Life care plann<strong>in</strong>g for 29 patients with<br />
Cronic Locked-<strong>in</strong> Syndrome. Arch. Phys. Med. Rehab.1992;73, 403-408