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Des femmes qui - Bibliothèque Numérique Marocaine

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<strong>qui</strong><br />

®


4<br />

Boujours à toute l'é<strong>qui</strong>pe de<br />

«Kalima» ! Ce n'est pas la première<br />

fois que je me penche sur cette<br />

revue, mais depuis le premier numéro<br />

jusqu'au dernier du mois écoulé,<br />

Kalima m'a vraiment passionné.<br />

Je souhaite qu'elle gagne l'estime de<br />

tous les lecteurs marocains parce<br />

qu'elle est vraiment intéressante et<br />

intéresse même les hommes. Je<br />

voudrais bien que vous fassiez dans<br />

la rubrique «feu vert» une enquête<br />

sur un fléau, un phénomène social<br />

très grave: la prostitution. Une<br />

enquête avec des interviews de<br />

prostituées ainsi que de médecins<br />

des centres prophylactiques, sans<br />

oublier de nous donner, si c'est possible,<br />

des chiffres indiquant le<br />

nombre de ces <strong>femmes</strong>, afin de<br />

remédier à un problème <strong>qui</strong> - je<br />

pense - ne concerne pas seulement<br />

les <strong>femmes</strong>, mais la société en<br />

général (...)<br />

Notre société traverse actuellement<br />

une phase de mutation, les valeurs<br />

morales traditionnelles s'étiolent.<br />

<strong>Des</strong> images et des valeurs nouvelles<br />

sont importées de l'extérieur. Elles<br />

s'implantent fortement dans notre<br />

Feed-back<br />

La «Kalima» (la parole) assure la<br />

communication, et votre publication,<br />

après les trois premières livraisons,<br />

paraît en mesure d'assurer le «feedback»<br />

permanent entre un public<br />

assoiffé d'écrits originaux et engagés, et<br />

un rang d'écrivains et de chroniqueurs,<br />

conscients des réalités et des peines<br />

d'une société «mi-hypnotisée»,<br />

«mi-acculturée», «mi-aliénée», qu'est<br />

la notre.<br />

«Kalima» (consciemment ou inconciemment<br />

?) s'est tenue prête à combler<br />

le manque et la carence, dont souffrent<br />

plusieurs (ou la presque totalité) des<br />

magazines et revues. D'une part parce<br />

qu'elle traite deux volets de nature différente:<br />

la condition féminine (mais<br />

pas exhaustivement féminine) et la lit-<br />

Prostitution : parlons en !<br />

vie quotidienne et posent de graves<br />

problèmes à l'homme. Il y a des<br />

<strong>femmes</strong> <strong>qui</strong> ont été séduites par des<br />

jeunes puis délaissées, rejettées par<br />

leur famille. Elles font le trottoir. La<br />

prostitution progresse d'une façon<br />

vertigineuse aussi bien dans les villes<br />

que dans les campagnes. Certaines<br />

<strong>femmes</strong> sont peu préparées aux<br />

transformations sociales, leur degré<br />

de résistance morale ne leur permet<br />

pas de dominer toutes les pressions<br />

dont elles sont l'objet et elles sombrent<br />

facilement dans la prostitution.<br />

Le problème de la prostitution se<br />

pose particulièrement dans certaines<br />

régions rurales bien connues. Je cite<br />

ainsi les régions de Beni-Mellal,<br />

Zaouiate Echeikh, Khouribga, Azrou.<br />

Dans ces centres, la prostitution se<br />

fait au su et au vu de tout le monde.<br />

Ce fléau aggrave la situation sociale<br />

surtout sur le plan de la santé parce<br />

qu'il peut donner aux citoyens des<br />

maladies incurables telles que la<br />

blennorragie, le chancre et la<br />

syphilis. Considérées comme des<br />

maladies honteuses, les sujets<br />

atteints se déclarent rarement. Les<br />

services concernés constatent un<br />

térature (surtout maghrébine et<br />

d'expression française). Ce double rôle<br />

(dont souffre notre presse) ne peut être<br />

expliqué que par la longue expérience de<br />

l'é<strong>qui</strong>pe de rédaction de «Kalima».<br />

C'est le jus et la synthèse de «Souffles»,<br />

«Intégra})), «Maroc 2000»,etc.<br />

Les reportages de Kalima présentent un<br />

«goût» cosmopolite et relient ainsi le<br />

passé au présent, le «raconté» et le<br />

vécu, le dialogue entre les deux sexes et<br />

l'illusion au changement. Le tout vise le<br />

changement des mentalités pour un<br />

avenir <strong>qui</strong> doit être gravé par l'abolition<br />

de toute discrimination sexiste ou disparités<br />

ségrégationistes.<br />

Le chemin est long, mais l'efficacité de<br />

la «Kalima» (la parole) des gens de<br />

bonne foi, réaliseront les voeux de<br />

Kalima (le magazine) et de tant de<br />

citoyens.<br />

M. BAAOUI El Houssine<br />

RABAT<br />

accoissement alarmant de ces<br />

maladies, notamment dans les<br />

grandes villes, où elles frappent surtout<br />

les jeunes. Alors comment<br />

combattre ce fléau? Quelles sont<br />

ses causes principales? Est-ce la<br />

pauvreté? Le divorce? Le chômage?<br />

Voilà bien des questions à<br />

poser.<br />

M. LABAIHI Mobamed<br />

El Kalaa Sragbna<br />

Nous sommes heureux de constater<br />

que Kalima vous a intéressé et que<br />

donc, en tant qu'homme,vous participez<br />

au dialogue que nous souhaitons<br />

développer entre les sexes.<br />

La prostitution est sans aucun doute<br />

un problème extrêmement grave <strong>qui</strong><br />

mérite d'être traité avec beaucoup de<br />

sérieux. Il fait partie des thèmes <strong>qui</strong><br />

seront abordés dans les numéros à<br />

venir. Si vous même, vous avez<br />

recueilli des témoignages ou des<br />

informations à ce sujet, envoyez-les<br />

nous. Le débat n'en sera que plus<br />

riche.<br />

Co<strong>qui</strong>llage<br />

Je suis sûre que tu n'as nullement<br />

besoin de publicité car avec tes écrits,<br />

tes thèmes et tes sujets tu as su te faire<br />

une place dans nos coeurs.<br />

En effet, nous avions depuis très 10Rgtemps<br />

besoin d'une telle revue pour<br />

nous faire sortir de notre petit co<strong>qui</strong>llage,<br />

nous inciter à nous exprimer plus<br />

librement et à avoir plus confiance en<br />

nous. D'où notre amour pour toi et<br />

notre impatience de mieux te connaître.<br />

Chère Kalima, à travers tes lignes et<br />

tout au long de tes pages nous découvrons,<br />

numéro après numéro, ton<br />

amour pour nous et ton désir intense de<br />

nous voir FEMMES avec tout ce que<br />

contient ce mot de grandeur, de délicatesse,<br />

de douceur et de défi.<br />

Je te félicite d'avoir pu captiver nos<br />

âmes et nous te resterons éternellement<br />

fidèles.<br />

Mlle NARCI Leila<br />

CASABLANCA


Directeur de la Publication<br />

Noureddine AYOUCH<br />

Directrice D6l6gu6e<br />

Rachida BENNIS<br />

Responl8bles de la Mdaetlon :<br />

Adil HAJJI<br />

Hinde TAARJI<br />

Reportages<br />

Touria HADRAOUI<br />

Chefs de Rubrique<br />

Marie-France ALAOUI<br />

Fanouma BEN ABDENBI<br />

Fatém-Zahra EL BOUAB<br />

Khadija EL ZEMMOURI<br />

Collaborateurs<br />

Chérifa ALAOUI<br />

Amina BODA<br />

Mohamed Fouad BENCHEKROUN<br />

Abderrahim BERRADA<br />

Nejib BOUDERBALA<br />

A'icha CHENNA<br />

Michel CONSTANTIN<br />

Noureddine EL AOUFI<br />

Rachida ENNAIFER<br />

Souad FILAL<br />

Fatéma GALLAIRE<br />

Ghislain RIPAULT<br />

Abdellatif LAABI<br />

Jocelyne LAABI<br />

Abdelaziz MANSOURI<br />

Fatéma MERNISSI<br />

Driss MOUSSAOUI<br />

Amina SAlO<br />

ISKRA<br />

MOURIDE<br />

Directrice Artistique<br />

Karima TAZI CALLy<br />

Photographe<br />

Hamid ZEROUALI<br />

Responl8b1e de la Publicité<br />

Khadija M'BIRKOU<br />

Photocomposition - Impression<br />

IDEALE<br />

Distribution<br />

SOCHEPRESS<br />

KALiMA : 18 Rue Ibn Yala . Casablanca<br />

Tél. : 36.24.89<br />

Dép6t légal nO 4/1986<br />

Accessoires VIA MODA : 19, rue la Fontaine-Casablanca<br />

Sommaire Juin 1986<br />

Dossier de Presse: 4/86<br />

A VOIX HAUTE _<br />

Cinq mois déjà !<br />

FÉMININ-PLURIEL _<br />

Etudiants: Chut, ils bossent<br />

Elles bougent:Jamila Bouayad<br />

La Kahina<br />

Hinde TAARJI<br />

Aicha BENCHEKROUN<br />

Fouad ZAIM<br />

BEAUTÉ-MODE F.Z. EL BOUAB__<br />

Coquetterie sur sable fin<br />

La face cachée des mains<br />

Epilation «gourmande»<br />

ESPACE-VACANCES _<br />

A pied dans le Haut Atlas<br />

Les pépins du plein air<br />

Guide-Vacances<br />

CULTURE<br />

Entretien avec Lucienne Saâda<br />

Lectures<br />

A voix basse: «Etes-vous féministe 7»<br />

Poème : Mot à Mot<br />

Le relais: Abdelkebir KHATIBI & Atika SAMOUH<br />

Festival culturel : «l'été des Orangers»<br />

BOUTIQUE DROIT<br />

Survol du paysage judiciaire marocain<br />

François CHALUMEAU<br />

M.F. Jamal ALAOUI<br />

Amina SAID<br />

Abdellatif LAABI<br />

Abdelaziz MANSOURI<br />

Abderrahim BERRADA<br />

L'ECONOMIE EN QUESTIONS _<br />

Le smig Noureddine EL AOUFI 72<br />

A L'AFFICHE _<br />

Le voyage de Sindbad Négib BOUDERBALA 81<br />

Délires: «Le Prince Charmant» Fatima MERNISSI 16<br />

Femmes sans frontière: Benazir Bhutto Anjum Niaz/AFI 76<br />

Panier à idées : Parfumez vos huiles 79<br />

Infos Pratiques : Révision des loyers Abderrahim BERRADA 80<br />

Courrier des lecteurs 4<br />

Enquête Kalima : Afin de mieux vous connaître 25<br />

3<br />

6<br />

10<br />

20<br />

30<br />

34<br />

37<br />

44<br />

52<br />

54<br />

56<br />

62<br />

63<br />

64<br />

66<br />

70<br />

38<br />

5


,<br />

FEMININ-PLURIEL<br />

-


A la maison, pas moyen d'étudier.--------­<br />

A la bibliothèque, pas moyen de respirer.-------­<br />

Reste la rue et les parcs.-------------------<br />

Martelant inlassablement l'asphalte, ils squattent les coins _<br />

de verdure le jour et élisent domicile sous les lampadaires la nuit.--­<br />

Au vent, au soleil et à la lune, ils confient leurs rêves secrets------où<br />

il est, semble-t-il, beaucoup question de liberté.-------------<br />

«Non, chez nous, ça ne se passe pas du<br />

tout comme ça. On prépare nos examens<br />

soit à la maison soit en bibliothèque<br />

mais jamais dehors». Fourat, un<br />

jeune tunisien inscrit en deuxième année<br />

de sciences juridiques à la faculté de<br />

Casablanca est tout étonné par l'attrait<br />

que les espaces verts exercent sur ses<br />

camarades en période d'examen. Pour<br />

lui, sans une table et une chaise, il est<br />

impossible de se concentrer.<br />

Alors que l'air s'imprègne d'une douceur<br />

estivale et que l'approche de l'été<br />

rend l'humeur vagabonde, les candidats<br />

au baccalauréat et les étudiants du troisième<br />

cycle abordent la dernière ligne<br />

droite <strong>qui</strong> les sépare de la fatidique<br />

copie blanche. Les parcs de la ville<br />

prennent des allures de cour de récréation<br />

pour élèves studieux. Ils sont là,<br />

sans distinction de sexe, le nez plongé<br />

dans leurs fascicules et le regard<br />

accroché aux mots <strong>qui</strong> défilent sur des<br />

lignes sans fin. Voyageant de bancs en<br />

bancs quand ce n'est de bout de gazon<br />

en bout de terre, ils alternent les positions<br />

au gré de leur besoin en concentration.<br />

Pendant des heures, celui-ci restera<br />

immobile à la même place comme s'il<br />

craignait que le moindre mouvement<br />

n'entrave ses capacités de compréhension.<br />

Celui-là, par contre, n'en finit pas<br />

d'aller et de venir et, pour lui, c'est d'un<br />

paquet de kilomètres dans les jambes<br />

que se solde la maîtrise d'un chapitre.<br />

Le spectacle de ces jeunes déambulant<br />

dans les espaces publics, les yeux rivés<br />

sur leurs cahiers, est devenu tellement<br />

courant qu'il ne surprend plus personne.<br />

S'ils viennent là, se dit-on, c'est<br />

qu'ils n'ont pas trouvé d'autre endroit<br />

où aller. Logique. Quand on sait que<br />

certaines familles vivent à plus de dix<br />

dans des deux-pièces minuscules, il n'y<br />

a pas lieu en effet d'ouvrir de grands<br />

yeux étonnés devant ce phénomène.<br />

Nous avons tenu cependant à discuter<br />

directement avec les intéressés de cette<br />

habitude <strong>qui</strong> s'est installée dans leurs<br />

moeurs. Une petite promenade dans des<br />

parcs très fréquentés, de même que dans<br />

certaines ruelles de quartiers «chics»<br />

avoisinants les quartiers populaires<br />

(Anfa/Hay El Hassani) nous a permis<br />

de les rencontrer et de mieux comprendre<br />

leurs motivations.<br />

«Si je ne marche pas,<br />

rien ne me rentre en<br />

tête»<br />

Au cas où vous ne vous en seriez pas<br />

encore aperçu, sachez que nos jeunes<br />

sont super sympas, super cool et super<br />

chouettes (si vous avez d'autres qualificatifs<br />

<strong>qui</strong> vont dans le même sens,<br />

vous pouvez les rajouter à cette liste).<br />

Ouverts à la discussion, ils ont répondu<br />

de bonne grâce à nos questions bien que<br />

nous soyons venus les déranger en<br />

pleines révisions. La parole facile et le<br />

mot pour rire toujours prêt à jaillir, ils<br />

parlent d'eux-mêmes avec beaucoup<br />

d'humour tout en ayant une conscience<br />

claire de ce <strong>qui</strong> les entoure et fait leur<br />

réalité. Ils ne s'étendent pas sur les difficultés<br />

qu'ils peuvent connaitre et,<br />

quand il leur arrive d'y faire allusion,<br />

c'est avec une grande pudeur. D'une<br />

phrase lapidaire, ils vous font comprendre<br />

(quand c'est le cas) que chez<br />

eux, ce n'est pas vraiment l'endroit<br />

idéal pour travailler. «Les circonstances<br />

ne me permettent pas de rester étudier à<br />

la maison» nous dit simplement Jamal<br />

(20 ans) <strong>qui</strong> prépare le baccalauréat<br />

sous un des lampadaires d'Anfa.<br />

Mohamed, même âge, même niveau,est<br />

plus explicite: «Chez moi, il n'y a pas<br />

suffisamment de calme. Je ne vais<br />

quand même pas «réprimer» mes<br />

parents en les empêchant de parler sous<br />

prétexte que j'ai un examen à<br />

préparer».<br />

Mais nous avons eu la surprise de constater<br />

que tous ne venaient pas là contraints<br />

par des conditions de vie difficiles.<br />

Khadija, par exemple, préfère<br />

potasser sa comptabilité dans le parc<br />

bien qu'elle dispose chez ses parents<br />

d'une chambre pour elle toute seule:<br />

«Chez moi,déclare-t-elle, je n'arrive pas<br />

du tout à travailler. Dès que je reste<br />

assise un peu trop longtemps, j'ai envie<br />

de dormir. Ici, au moins, impossible de<br />

fermer l'oeil. Il y a toujours quelqu'un<br />

pour te réveiller». Amina (23 ans)<br />

abonde dans le même sens qu'elle. «Je<br />

me sens oppressée à la maison, nous<br />

dit-elle. Je n'arrive pas à garder un livre<br />

en main plus d'un quart d'heure. D'ailleurs<br />

si je ne marche pas, rien ne me<br />

rentre en tête.»<br />

Marcher, voilà un mot <strong>qui</strong> reviendra<br />

dans toutes les explications <strong>qui</strong> nous<br />

seront données. Contrairement à ce<br />

jeune tunisien <strong>qui</strong> s'avouait incapable<br />

de retenir quelque chose s'il n'était pas<br />

cloué à une table et à une chaise, marcher<br />

est une nécessité pour les étudiants<br />

que nous avons rencontrés. Est-ce en<br />

raison de l'importance de la mémorisation<br />

dans nos méthodes de travail ?<br />

Cela parait assez probable. Comme<br />

nous l'explique Farid (19 ans), s'asseoir<br />

ou marcher dépend de la manière<br />

d'étudier et, bien sûr, de la matière à<br />

étudier. «Quand il s'agit d'apprendre<br />

par coeur, marcher aide beaucoup. Par<br />

contre, pour comprendre et faire la<br />

synthèse de ce qu'on apprend, il vaut<br />

mieux être assis. Pour ma part, je dois<br />

me concentrer sur ce que j'étudie. Donc<br />

je reste assis.»<br />

«Pour moi, le meilleur endroit pour<br />

travailler c'est l'extérieur par rapport à<br />

l'intérieur et le bord de mer par rapport<br />

à la ville.» Mohamed (22 ans) est un<br />

amoureux du plein air. Son esprit<br />

s'ankylose quand des murs emprisonnent<br />

son regard et ils sont nombreux<br />

parmi ses camarades à réagir comme<br />

lui. «A la maison comme à la bibliothèque,<br />

c'est simple, j'étouffe (Omar,<br />

21 ans). Dans un parc, au moins, mon<br />

horizon n'est pas limité. Je ressens une<br />

certaine paix dans le fait de marcher.<br />

Quand je suis fatigué d'apprendre, je<br />

peux lever les yeux vers le ciel ou<br />

admirer la nature. Et surtout, surtout,<br />

je me sens libre de me comporter<br />

comme j'en ai envie !»<br />

«Nous réfléchissons sur<br />

nos cours et nous les<br />

discutons»<br />

L'étroitesse des lieux dans laquelle bien<br />

des étudiants vivent explique aisément<br />

leur besoin d'espace. Espace de liberté<br />

ou liberté de l'espace, le parc représente<br />

tout cela à la fois et plus même encore.<br />

7


Le parc (ou la rue) c'est une certaine<br />

atmosphère, une certaine ambiance de<br />

travail <strong>qui</strong> vous enveloppe dès votre<br />

arrivée. Avec tous ces étudiants <strong>qui</strong><br />

squattent le plus petit fourré, pas de<br />

risque d'y échapper et de se laisser aller<br />

à oublier l'examen. Du coup, même<br />

ceux <strong>qui</strong> bénéficient chez eux de bonnes<br />

conditions de travail préfèrent venir<br />

rejoindre leurs camarades. Ils rompent<br />

ainsi avec la solitude, parfois si décourageante,<br />

et se stimulent au contact les<br />

uns des autres. Ils s'entraident également<br />

à tour de rôle. «S'il te manque des<br />

cours, tu peux les emprunter, si tu fais<br />

des erreurs, tu peux les corriger et si tu<br />

ne comprends pas quelque chose, tu<br />

peux en discuter» nous résume<br />

Mohamed (22 ans).<br />

Une prise de conscience de l'importance<br />

de la discussion s'est faite jour chez les<br />

étudiants interrogés. Fini le bachottage<br />

bête et stupide. L'avantage fondamental<br />

de la révision en plein air réside<br />

justement dans le fait de pouvoir<br />

échanger tran<strong>qui</strong>llement des points de<br />

vue sur une question sans risquer de<br />

déranger son voisin, avantage dont il est<br />

fait grand usage: «Nous ne nous contentons<br />

plus d'apprendre par coeur.<br />

Nous réfléchissons sur nos cours et nous<br />

les discutons. Le problème chez nous<br />

c'est qu'on base tout sur la mémoire.<br />

Beaucoup d'étudiants (surtout les candidats<br />

au baccalauréat) misent uniquement<br />

là-dessus. Résultat, quand ils<br />

arrivent à l'examen, ils sont complèment<br />

perdus. Ils ont ingurgité des connaissances<br />

mais ignorent comment les<br />

utiliser. C'est au prof d'enseigner au<br />

départ à l'élève une bonne méthode de<br />

travail ... pour que celui-ci ne soit pas<br />

une simple machine <strong>qui</strong> avale ce qu'on<br />

lui donne. Nous ne sommes pas des<br />

machines enfin !»<br />

La raison première <strong>qui</strong> a poussé les<br />

étudiants à sortir préparer leur examen<br />

dehors reste en premier lieu l'insuffisance<br />

et la précarité des structures susceptibles<br />

de les accueillir durant cette<br />

période.<br />

Etudier à la maison est exclu pour la<br />

majorité d'entre eux. Le cadre ne s'y<br />

prête pas, que ce soit pour une question<br />

d'exiguité des lieux ou d'ambiance<br />

inappropriée. Reste donc les bibliothèques.<br />

Elles sont, semble-t-il, surpeuplées,bruyantes<br />

et pauvres en ouvrages.<br />

Une question d'horaire parfois contraignant<br />

et de déplacement coûteux en<br />

temps et en argent pousse également à<br />

leur désertion.<br />

Mais chacun cependant a des raisons<br />

<strong>qui</strong> lui sont propres de les fréquenter ou<br />

de ne pas les fréquenter. Nous avons<br />

ainsi rencontré à Il heures du soir des<br />

jeunes <strong>qui</strong> étudiaient dans la rue bien<br />

8<br />

que la bibliothèque se trouve dans le<br />

quartier et - fait exceptionneldemeure<br />

ouverte toute la nuit. «Il fait<br />

trop chaud, nous ont-ils déclaré, on s'y<br />

endort». S'imposant un rythme de travail<br />

infernal (quatre à cinq heures de<br />

sommeil par nuit), ils ont la hantise de<br />

l'assoupissement et comptent sur la<br />

fraîcheur nocturne pour les garder en<br />

éveil.<br />

La fréquentation des bibliothèques est<br />

également conditionnée par la branche<br />

d'étude suivie. Pour résoudre un problème<br />

de mathématiques, mieux vaut<br />

être bien calé sur sa chaise et posséder<br />

une bonne table. Par contre, pour<br />

digérer la guerre de 14-18, un peu de<br />

chlorophyle ne fait pas de mal. Voilà<br />

certainement pourquoi, lors de notre<br />

petite enquête, nous avons rencontré<br />

bien plus de littéraires que de scientifiques.<br />

Chaque étudiant essaye, dans la<br />

mesure du possible, de s'organiser en<br />

fonction de ses besoins. «Il ne me viendrait<br />

jamais à l'idée d'aller travailler à<br />

la bibliothèque» nous a ainsi déclaré<br />

Rabéa (20 ans, première année de lettres).<br />

La révision en plein air offre certes des<br />

'avantages mais ces mêmes avantages<br />

ont leur pendant en inconvénients. Le<br />

problème des places se pose aussi dans<br />

les parcs. Avec le nombre toujours<br />

croissant d'étudiants <strong>qui</strong> s'y installent,<br />

les bancs sont devenus insuffisants. Il<br />

faut s'assoir par terre ou sur le gazon.<br />

Pas vraiment une solution non plus.<br />

La question du bruit est à prendre en<br />

compte. Quand des enfants hurlent en<br />

tapant dans le ballon, il ne reste plus<br />

qu'à attendre stoïquement la fin du<br />

match. Certains préfèrent plutôt émigrer<br />

vers les ruelles paisibles des beaux<br />

quartiers.<br />

La nuit, le calme s'installe mais le froid<br />

et l'humidité également. Si, à partir du<br />

mois de Mai, les températures deviennent<br />

clémentes, tenir compagnie aux<br />

étoiles, soir après soir, n'en arrange pas<br />

pour autant la santé. «J'ai un ami, nous


aconte Rachid (24 ans), <strong>qui</strong> a attrapé<br />

un rhumatisme au coeur à force de<br />

réviser la nuit près de la mer. Moi, je ne<br />

veux pas perdre ma bonne santé pour<br />

gagner ma licence».<br />

Pouvoir discuter avec ses camarades de<br />

la matière qu'on étudie est certes très<br />

bénéfique mais quand la discussion<br />

dérape sur le film de la veille, un temps<br />

précieux est alors perdu. La nature<br />

offre au regard la possibilité de vagabonder<br />

mais l'esprit en profite souvent<br />

pour s'évader à son tour. Dans un<br />

environnement tel que celui du parc ou<br />

de la rue, l'étudiant doit donc absolument<br />

s'auto-discipliner et faire preuve<br />

d'énormément de volonté pour éviter<br />

d'être distrait. Un climat très particulier<br />

caractérise la période de révision des<br />

examens. Parce qu'ils se mobilisent<br />

pour un même objectif, les étudiants<br />

cultivent un même espoir et vivent une<br />

même angoisse. Ils se rapprochent par<br />

conséquent les uns des autres et communiquent<br />

plus aisément entre eux. Les<br />

barrières s'estompent... comme celles<br />

<strong>qui</strong> séparent les sexes par exemple.<br />

Contrairement à certains lieux publics<br />

comme les terrasses de cafés peuplées<br />

uniquement par les hommes, dans les<br />

parcs, la mixité s'impose au regard.<br />

Garçons et filles sont là, ensemble, discutant,<br />

riant ou étudiant en silence, côte<br />

à côte. Normalement. Naturellement. A<br />

les voir ainsi, on oublie que dans notre<br />

société les univers masculin et féminin<br />

évoluent encore trop souvent en parallèle<br />

et on se met à rêver du jour où ils se<br />

fondront complètement l'un dans<br />

l'autre. Bien sûr, ces étudiants-là sont<br />

loin d'avoir surmonté tous les blocages<br />

et les à priori engendrés par une éducation<br />

basée sur une stricte séparation des<br />

sexes. Leur incompréhension mutuelle<br />

persiste sur bien des points, mais contrairement<br />

à ce <strong>qui</strong> se passait auparavant,<br />

ils ne veulent plus l'occulter. Ils la<br />

dénoncent, et même s'ils jugent toujours<br />

l'autre responsable de la situation,<br />

c'est là un fait nouveau, positif dans la<br />

mesure où il rompt le silence.<br />

«Chacun vient au parc avec un but particulieT»,<br />

nous dit Jamal, 25 ans, étudiant<br />

en troisième année de philosophie.<br />

«Et ce but n'est pas toujours l'étude.<br />

Vous savez bien que chez nous, on est<br />

frustré dans nos relations avec les filles.<br />

On ne parvient pas à établir un rapport<br />

sain avec elles. Quand on essaye de s'en<br />

rapprocher, elles prennent des airs<br />

supérieurs, et nous regardent de haut.<br />

Ces filles-là sont franchement «bouchées»,<br />

«immatures» pour la plupart.<br />

Elles ne font preuve d'aucune compréhension<br />

vis-à-vis de l'étudiant. Elles<br />

n'essayent absolument pas d'aller vers<br />

lui. Elles le répriment dans ses élans. Or<br />

ce type est réprimé en permanence. A la<br />

maison. Dans le derb, partout. A tous<br />

les niveaux possibles. Elles aussi, vous<br />

me direz. C'est bien là le problème».<br />

Driss (25 ans) est moins catégorique<br />

dans son analyse et les entraves à la<br />

communication entre garçons et filles<br />

lui semblent surtout dues à la jeunesse<br />

de ses camarades: «Beaucoup d'étudiants,<br />

explique-t-il, ont entre 18 et 20<br />

ans. Ils sont encore «avides» de sexe<br />

féminin et n'ont pas atteint un degré de<br />

maturité suffisant pour concevoir des<br />

relations de simple camaraderie avec les<br />

filles.»<br />

Mais quel que soit leur degré de


Tout, sauf rester inactive<br />

«Je me suis mariée durant l'été 1950.<br />

J'avais 15 ans et demi, l'année scolaire<br />

avait pris fin et je profitais des trois<br />

mois de vacances pour changer de<br />

statut.<br />

A la rentrée suivante, il m'a fallu une<br />

autorisation spéciale du ministre pour<br />

m'inscrire au lycée. J'étais passée dans<br />

la catégorie des <strong>femmes</strong> mariées et<br />

celles-ci devaient se soumettre à cette<br />

formalité pour continuer leurs études.<br />

J'ai passé mon C.A.P. ménager cette<br />

année là, puis je suis tombée enceinte.<br />

J'étais donc obligée de m'arrêter. En<br />

attendant mon enfant j'ai fait comme<br />

toutes les mamans du monde: je me<br />

suis plongée dans la préparation de la<br />

layette. C'est à cette période là de ma<br />

vie Clue j'ai vraiment appris à coudre.<br />

Grâce au bébé, je me suis préparée sans<br />

le savoir à ma carrière future.<br />

Mon fils est né, ma fille l'a suivi. J'ai<br />

commencé alors à réfléchir sur ma<br />

situation. Je me rendais compte que<br />

petit à petit j'étais en train d'oublier<br />

tout ce qu'on m'avait enseigné à l'école.<br />

C'était dramatique.<br />

Comme je ne voulais pas devenir<br />

comme ces <strong>femmes</strong> <strong>qui</strong> m'entouraient,<br />

je me suis remise à étudier par correspondance<br />

avec l'Ecole Universelle de<br />

Paris. J'ai fait de la comptabilité, de la<br />

gestion, un peu de tout, quoi, l'essentiel<br />

pour moi étant de ne pas rester inactive.<br />

A la maison, j'ai appris tout ce qu'une<br />

femme pouvait apprendre, mais au bout<br />

de quatre ans, je n'en pouvais plus. J'ai<br />

alors décidé de travailler. Après m'être<br />

renseignée à droite et à gauche, j'ai fini<br />

par m'adresser à l'inspecteur de la Jeunesse<br />

et des Sports <strong>qui</strong> recrutait des<br />

monitrices dans le cadre d'un programme<br />

de formation destiné aux<br />

<strong>femmes</strong> défavorisées. C'était mes premiers<br />

pas dans l'action sociale.<br />

Cette expérience <strong>qui</strong> devait durer deux<br />

ans fut très éprouvante mais particulièrement<br />

enrichissante. Je sentais enfin<br />

que je servais à quelques chose. Comme<br />

j'avais fait mes preuves, je me suis vue<br />

12<br />

proposer - une fois que nous eûmes<br />

<strong>qui</strong>tté Fès pour Casablanca - d'assumer<br />

la responsabilité d'une oeuvre sociale,<br />

«l'Assistance par le Travail» <strong>qui</strong>,<br />

jusque-là, était entre les mains des<br />

Français. Notre tâche consistait à<br />

recueillir des <strong>femmes</strong> nécessiteuses et à<br />

leur apprendre le métier de couturière<br />

ou de tricoteuse. Une fois formées, elles<br />

étaient rémunérées. Sur leur salaire,<br />

chaque semaine, nous prélevions un<br />

petit quelque-chose <strong>qui</strong> leur permettait,<br />

au bout d'un certain temps, d'acheter<br />

leur propre machine à coudre et de<br />

s'installer à leur propre compte. Nous<br />

continuions alors à les aider en leur<br />

fournissant du travail à domicile.<br />

Pendant la période où elles travaillaient<br />

à l'usine, nous prenions en charge leurs<br />

enfants en bas âge. Je suis même parvenue<br />

à faire économiser suffisamment<br />

d'argent à trois d'entre elles pour<br />

qu'elles puissent s'acheter leur propre<br />

maison.<br />

Cette activité exigeait un très gros<br />

investissement personnel. Au bout de<br />

deux ans je fus contrainte d'arrêter,<br />

parce que je ne tenais plus le coup,<br />

psychiquement et physiquement parlant.<br />

La création de SECURIT<br />

Durant l'été 63, quelqu'un me proposa<br />

de monter une entreprise de confection.<br />

J'ai accepté. A cette époque là, il n'y<br />

avait pour ainsi dire pas de marché de la<br />

confection au Maroc. Tout le monde<br />

faisait de l'importation. Sur place, on<br />

fabriquait seulement des vêtements<br />

administratifs. Les confectionneurs<br />

étaient, dans leur grande majorité, des<br />

européens. Après les Alami frères, la<br />

première affaire marocaine, Securit<br />

venait, si mes souvenirs sont bons, en<br />

troisième position.<br />

Au départ, nous nous étions répartis les<br />

tâches de la façon suivante: mon<br />

associé devait s'occuper des relations<br />

avec l'extérieur et moi de l'organisation<br />

interne et des problèmes techniques<br />

- l'usine, la direction du personnel<br />

etc... Mais cela n'a pas duré longtemps.<br />

J'ai très vite eu besoin d'établir<br />

un contact direct avec la clientèle parce<br />

qu'en restant confinée dans l'usine,<br />

trop de choses m'échappaient. Mon<br />

premier marché fut celui la Défense<br />

Nationale: 5.000 tenues, vareuses et<br />

pantalons.<br />

L'armée nous donnait les patronages<br />

car elle avait des normes speciales mais<br />

c'est nous <strong>qui</strong> faisions les modèles.<br />

Lorsque les têtes de série furent prêtes,<br />

j'ai été moi-même les présenter aux<br />

intéressés. Le chef du centre, un capitaine<br />

fassi, me reçut, m'écouta attentivement<br />

et à la fin de l'entretien me<br />

déclara : «Madame, permettez-moi de<br />

vous donner un conseil : laissez tomber,<br />

vous n'êtes pas à votre place dans cette<br />

fonction. Je devais par la suite entendre<br />

fréquement ce genre de réflexion, ainsi<br />

que d'autres comme en témoigne<br />

l'exemple suivant: Au moment de la<br />

guerre de Tindouf, un rassemblement<br />

de tous les fournisseurs de l'Armée eut<br />

lieu. La Défense Nationale avait une<br />

quarantaine de fournisseurs, dont une<br />

seule femme, moi. Quand le colonel <strong>qui</strong><br />

nous avait réuni est arrivé, il a été sur-<br />

pris par ma présence au milieu de cette<br />

assemblée d'hommes. Aussi demandat-il<br />

à son adjoint de <strong>qui</strong> j'étais la secrétaire<br />

? Quelle ne fut sa surprise quand<br />

celui-ci lui répondit : «Mon colonel, ce<br />

n'est pas une secrétaire, c'est Madame<br />

Bouayad, l'un de nos fournisseurs».<br />

Comme toutes les <strong>femmes</strong> <strong>qui</strong> démarrent<br />

dans un domaine jusque-là réservé<br />

aux hommes, je faisais vraiment figure<br />

d'oiseau rare. Pendant cinq ans, j'ai<br />

travaillé avec les plus importantes<br />

administrations du pays comme les<br />

Eaux et Forêts, les Forces Auxilliaires,<br />

la gendarmerie etc ... En 1967. j'en ai<br />

eu assez. Fabriquer ce type de produit<br />

n'avait rien d'agréable. De plus les<br />

relations avec les gens laissaient beaucoup<br />

à désirer. Un jour par exemple,<br />

j'obtins un marché très important<br />

(40.000 pièces). Il avait été agrée par le<br />

ministre et il ne me restait plus qu'à le<br />

retirer. Je me rendis à cette fin au<br />

bureau du responsable des marchés.<br />

Celui-ci me reçut comme il se doit mais<br />

dirigea la conversation vers des sujets<br />

n'ayant aucun rapport avec l'objet de


ma visite. Au bout d'un moment, je lui<br />

rappelais que j'étais venue chercher<br />

mon marché. Il me répondit alors:<br />

«Votre marché a effectivement été<br />

signé. Il est là mais je ne peux cependant<br />

pas encore vous le remettre». Puis de<br />

rajouter avec un regard éloquent:<br />

«Mais au fond, ça ne dépend que de<br />

vous». Je fis celle <strong>qui</strong> ne comprenait pas<br />

(c'est la meilleure manière de s'en sortir<br />

!). Il se montra alors encore plus<br />

explicite. Je lui ai laissé mon papier<br />

(qu'il a bien été obligé de me renvoyer<br />

par la suite) et je suis partie.<br />

En 1967, j'ai abandonné les uniformes<br />

pour quelque chose de plus gai : le prêt<br />

à porter. Pris par d'autres activités,<br />

mon associé ne suivait plus les choses<br />

que de très loin. Le seul technicien<br />

étranger que j'avais était parti et je me<br />

suis retrouvée seule à assumer toute la<br />

partie technique. Je prenais des cours<br />

par correspondance, je faisais des stages<br />

en France dans le cadre de la formation<br />

continue bref, je me recyclais complètement.<br />

Mes cinq années de vêtements<br />

administratifs m'avaient cependant<br />

appris énormément de choses. Je me<br />

sentais par conséquent prête pour lancer<br />

une ligne de prêt à porter féminin au<br />

Maroc.<br />

J'ai commencé à aller en France pour<br />

voir les salons et visiter les expositions.<br />

J'achetais en solde des tissus de grande<br />

marque comme Cacharel et je créais des<br />

petites collections <strong>qui</strong> plaisaient beaucoup<br />

aux gens.<br />

Comme la concurrence était particulièrement<br />

réduite - les seuls fabricants de<br />

prêt à porter étant Marvet, deux ou<br />

trois européens <strong>qui</strong> bricolaient et moi<br />

- je pouvais avoir toutes les boutiques<br />

du Maroc comme clientes.<br />

Pendant deux ans, nous avons très bien<br />

travaillé (1967-1969). Je faisais tout<br />

moi-même, je coupais, je créais les<br />

modèles et je formais les ouvriers (tout<br />

en continuant à me former moi-même).<br />

Mes produits cependant n'étaient destinés<br />

qu'au marché local.<br />

C'est en visitant des salons <strong>qui</strong> se<br />

tenaient à l'étranger que l'idée de produire<br />

'pour l'exportation a germé dans<br />

mon esprit. Mes premières tentatives<br />

d'approche se soldèrent par des échecs.<br />

Les gens me mettaient à la porte en se<br />

disant ... «elle est folle celle-là. Elle<br />

vient du Maroc, elle veut nous vendre<br />

de la confection mais elle n'apporte rien<br />

de nouveau». Il me fallait donc trouver<br />

un «truc» pour pénétrer le marché<br />

européen. C'est à ce moment-là que je<br />

fis la connaissance d'une personne <strong>qui</strong><br />

me proposa un modèle de robe stylisée<br />

fabriquée à partir d'un tissu artisanal.<br />

La solution à mon problème était trouvée;<br />

en utilisant un tissu marocain<br />

j'introduisais une touche d'originalité<br />

dans le prêt à porter occidental.<br />

J'ai ainsi monté toute une collection de<br />

pantalons, sahariennes, vestes, manteaux<br />

etc... en recourrant à la habba <strong>qui</strong><br />

sert traditionnement à la confection des<br />

jellabas. Les années 70 ont vu la vague<br />

hippie déferler sur l'Europe. Aussi les<br />

vêtements un peu délavés que nous<br />

fabri<strong>qui</strong>ons répondaient pleinement au<br />

goût du moment. C'est donc cet<br />

engoument pour tout ce <strong>qui</strong> avait un<br />

côté artisanal et folklorique <strong>qui</strong> me<br />

permit de m'installer enfin sur le<br />

marché européen en commençant par<br />

l'Italie, puis la Hollande, la France et la<br />

Belgique. Pendant deux à trois ans, ça a<br />

très bien marché. Le temps d'une mode.<br />

Une fois celle-ci passée, je décidai à<br />

nouveau de changer de cap en proposant<br />

aux grandes marques françaises de<br />

travailler sous licence avec elles.<br />

Comme le coût de la main d'oeuvre<br />

était beaucoup moins cher au Maroc,<br />

cette proposition séduisit Arilance <strong>qui</strong><br />

me passa en 1971 une commande de<br />

30.000 pièces. Nous avons donc fait du<br />

sport-wear avec des tissus à nous et des<br />

modèles à eux. En 1976, j'ai eu mon<br />

premier marché avec K. Way, ce <strong>qui</strong> me<br />

13


permit d'apprendre à faire du travail à<br />

façon.<br />

Là, je ne vendais plus que de la main<br />

d'oeuvre car même le tissu nous était<br />

fourni.<br />

Nous nous sommes spécialisés dans ce<br />

domaine. Avec le temps, le coût de la<br />

main d'oeuvre a grimpé et le raisonnement<br />

des firmes étrangères s'est modifié<br />

lui aussi.<br />

Plus le temps de fabrication d'un produit<br />

était long, plus le rapport coûtdéplacement<br />

devenait intéressant. Pour<br />

un article <strong>qui</strong> nécessitait 20 mn de<br />

fabrication, le gain n'était pas énorme<br />

une fois qu'on avait décompté le prix du<br />

transport et les frais de douane. Pour 50<br />

mn de fabrication par contre, ça valait<br />

le déplacement.<br />

Tenant compte de cette réalité, j'ai opté<br />

pour la grosse pièce et j'ai complètement<br />

abandonné la chemise et le pantalon.<br />

Je me suis spécialisée dans le<br />

vêtement à manches que personne à ce<br />

moment-là ne savait faire. Pendant au<br />

moins cinq ans, je suis restée pratiquement<br />

seule sur le marché.<br />

Aujourd'hui, 80 0;0 de notre chiffre<br />

d'affaires est assuré par le travail à<br />

façon. Les autres 20 0;0 proviennent des<br />

créations <strong>qui</strong> nous sont propres. C'est là<br />

une petite bouffée d'oxygène apportée à<br />

notre satisfaction personnelle.<br />

Etre une femme dans un<br />

univers d'hommes =======<br />

Au début, il est vrai, je ne passais<br />

jamais inaperçue. Chacun avait une<br />

manière <strong>qui</strong> lui était propre de réagir à<br />

mon égard. Mes proches, pour leur<br />

part, étaient catastrophés. Aucun<br />

d'entre eux n'admettaient ce que je faisais.<br />

Chaque fois que j'étais confrontée<br />

au moindre problème, de santé ou<br />

autre, ils saisissaient cette occasion pour<br />

me dire «... si tu restais chez toi, ça ne<br />

t'arriverait pas». Paradoxalement, le<br />

seul à m'encourager était mon mari.<br />

Jamais il ne m'a créé de difficultés à<br />

quelque niveau que ce soit. Il lui est<br />

arrivé par exemple à maintes reprises de<br />

venir à l'usine et de trouver un billet<br />

d'avion posé sur mon bureau. Ce n'était<br />

que lorsqu'il me demandait à <strong>qui</strong> il était<br />

destiné que je m'apercevais que j'avais<br />

complètement oublié de lui parler de<br />

mon voyage du lendemain.<br />

Ma famille ne comprenait pas pour<br />

quelle raison je m'es<strong>qui</strong>ntais la santé à<br />

faire ce métier alors que financièrement<br />

parlant, je n'en avais pas besoin pour<br />

vivre. Ils ne parvenaient pas à saisir<br />

14<br />

qu'avant toute chose, cet engagement<br />

professionnel m'apportait une satisfaction<br />

personnelle, que mon objectif était<br />

de prouver aux gens qu'une femme au<br />

Maroc pouvait réussir. Je ne dirais pas<br />

«aussi bien qu'un homme» parce que ce<br />

n'est pas vrai. En tant que femme nous<br />

rencontrons tellement plus de problèmes<br />

que lui! Mais ce fait n'est pas<br />

propre au Maroc. Je crois que partout<br />

dans le monde, c'est la même chose: la<br />

société n'accepte pas les <strong>femmes</strong> chef<br />

d'entreprise. J'ai rencontré de nombreuses<br />

<strong>femmes</strong> au cours de mes<br />

voyages et j'ai pu constater d'après nos<br />

discussions qu'elles étaient confrontées<br />

aux mêmes difficultés que moi. Comme<br />

me disait l'une d'entre elles, «il faut<br />

toujours avoir un bouledogue derrière<br />

soi pour vous protéger».<br />

Ceci dit, ne dramatisons pas les choses.<br />

C'est en début de carrière que j'ai rencontré<br />

le plus de difficultés.<br />

Tant au niveau des rapports avec le<br />

personnel que dans le cadre des relations<br />

avec l'extérieur. Je me rappelle<br />

par exemple de l'attitude de ce menuisier<br />

<strong>qui</strong> refusa de travailler avec moi<br />

parce qu'il ne voulait pas «être payé par<br />

une femme».<br />

Mais tout, finalement, se rapporte à une<br />

question de diplomatie et de savoir<br />

faire. A partir du moment où une personne<br />

s'impose et se fait respecter, la<br />

partie est gagnée pour elle.<br />

Aujourd'hui, je n'ai plus aucun problème.<br />

Parmi les gens <strong>qui</strong> m'ont<br />

aggressée au début, certains sont<br />

devenus de grands amis. Etre femme ne<br />

m'a pas empêché d'être nommée, en<br />

1970, secrétaire générale de l'Association<br />

<strong>Marocaine</strong> de l'Industrie et du<br />

Vêtement, une association <strong>qui</strong> réunit les<br />

plus gros capitaux du Maroc, ni à participer<br />

à la création du régime économique<br />

de la douane, ou à celle de<br />

l'Ecole de la formation professionnelle.<br />

C'est avant tout par son comportement<br />

qu'une personne s'impose. Je ne crois<br />

pas qu'il y ait une autre manière de<br />

réussir. Je me rappelle toujours d'une<br />

phrase que me répétait mon père : «Ma<br />

fille, ce n'est pas la peine d'éduquer tes<br />

enfants. Eduques-toi d'abord. !ls te<br />

suivront». J'en ai retenu la leçon suivante<br />

: au lieu de vouloir éduquer les<br />

autres, il vaut, mieux faire un travail sur<br />

soi.<br />

Conclusion<br />

Je ne me serais jamais lancée dans une<br />

telle profession si je n'avais pas toujours<br />

eu au fond de moi la conviction<br />

profonde qu'une femme pouvait<br />

réussir. Or cette conviction c'est à un<br />

homme que je la dois, et cet homme<br />

c'était mon père.<br />

J'ai eu un père extraordinaire <strong>qui</strong>, à la<br />

mort de ma mère - que je n'ai pratiquement<br />

pas connue - est resté très<br />

proche de nous. Il m'a très tôt tracé le<br />

portrait de la femme qu'il voulait que je<br />

devienne. Dans les années 50, il avait<br />

une femme pour avocat. Après chacune<br />

de leurs rencontres il revenait à la<br />

maison plein d'admiration à son égard<br />

et me disait: «C'est comme elle que<br />

j'aimerais que tu sois».<br />

Quand je remportais à la fin de l'année<br />

des prix d'excellence, il laissait sa fierté<br />

éclater publiquement. Il exposait mes<br />

prix dans le salon et appelait ses amis<br />

pour leur dire «regardez ce dont ma fille<br />

est capable». Il me poussait toujours à<br />

mieux faire en me disant «il faut que tu<br />

aies des épaules solides, que tu n'aies<br />

jamais rien à demander à personne». Si<br />

tous les parents se comportaient ainsi<br />

vis-à-vis de leurs filles, ils leur donneraient<br />

la possibilité d'acquérir cette<br />

confiance en soi, ce ressort <strong>qui</strong> permet<br />

d'entreprendre. Je me suis donc toujours<br />

sentie capable de diriger. En 1960<br />

j'ai investi 120.000 DH dans Securit.<br />

Avec cet argent j'aurais pu acheter tout<br />

Anfa car la terre à l'époque y était à<br />

10 DH le mètre. Tout le monde me<br />

disait : «Tu es complètement folle, mets<br />

plutôt ton argent dans des immeubles,<br />

tu cours moins de risques». Je le savais<br />

pertinemment mais je préférais parier<br />

sur l'avenir, un pari sur la vie dont<br />

l'enjeu visait à montrer aux gens qu'une<br />

femme, elle aussi, pouvait réussir.»<br />

Propos recueillis par:<br />

Aïcba Bencbekroun


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d'égal à égal<br />

avec l'bistoire etque les<br />

bommes respectaient<br />

non pour leur beauté<br />

ou pour leurs intrigues<br />

mais pour ce <strong>qui</strong> les<br />

faisaient préférables<br />

tous sexes confondus:<br />

leurs qualités morales,<br />

leur cbarisme, le courage<br />

dont elles étaient<br />

capables.<br />

Dans les Aurès, comme<br />

dans toute l'Ifrikya de<br />

l'époque, on l'appelait AI<br />

Kahina : la «devineresse»,<br />

Ce n'était pourtant là qu'un surnom:<br />

celui que lui avaient donné les Arabes<br />

<strong>qui</strong> lui reconnaissaient ainsi quelques<br />

dons à la divination à l'instar des<br />

kahins de l'Arabie pré-islamique.<br />

Chez les berbères, parmi les siens, on<br />

l'appelait plus souvent - mais<br />

personne n'est sûr que c'est là son<br />

véritable nom: AI Dahya (la Rouée).<br />

Dahyat-al kahina, comme se plait à la<br />

nommer Ibn Khaldoun dans son<br />

«Histoire des berbères»... fut, au<br />

moins cinq années durant, reine des<br />

berbères de l'Aurès. Dans une<br />

Afrique du Nord dominée politiquement<br />

par Byzance (les Rum) mais<br />

confrontée en cette deuxième moitié<br />

du Vile siècle à la poussée arabomusulmane,<br />

elle dirigea, à la tête de<br />

tribus berbères farouchement indépendantes,<br />

la résistance face à<br />

l'armée Arabe chargée par le Khalife<br />

Abd El Malek Ibn Marwan de «porter<br />

la guerre en Ifrikyall.<br />

Dans ce bastion de toutes les résistances<br />

que sont les chaines de<br />

l'Aurès, AI Kahina succédait dans<br />

cette tâche à Kusayla, roi des<br />

Awraba Baranis, chef berbère déjà<br />

mythique <strong>qui</strong> - soutenu par les<br />

Byzantins - avait réussi la gageure de<br />

défaire le grand Uqba Ibn Nafi et de<br />

reprendre (pour en faire une éphémère<br />

capitale berbère) Kairaouan aux<br />

Arabes, avant d'être défait et tué lui<br />

même lors de la bataille de Mems.<br />

Qui était véritablement AI Kahina ?<br />

Quelles forces recelait cette femme<br />

pour mener, dans un univers<br />

d'hommes, en des moments éminemment<br />

graves, un peuple en<br />

guerre? Que sait-on de ses traits et<br />

de ses actes que n'ait déformé le<br />

prisme de la légende ?<br />

Al Kabina : reine berbère.<br />

Autant l'avouer d'emblée, rien n'est<br />

sûr s'agissant d'AI Kahina. Son<br />

épopée ressemble à un puzzle dont<br />

certaines pièces seraient absentes et<br />

où d'autres s'agenceraient difficilement.<br />

Comme la chronologie des<br />

faits, comme parfois les faits eux<br />

mêmes, la généalogie est incertaine.<br />

AI Dahya serait, nous dit-on, la fille<br />

de Talit, ou encore de Matiya<br />

(Mathias) fils de Tifan (Théophane).<br />

Elle serait donc, ce <strong>qui</strong> est très vraisemblable<br />

dans une Ifrikya largement<br />

ouverte depuis des siècles aux<br />

influences humaines et religieuses<br />

gréco-latines, une berbère de sang<br />

mêlé.<br />

Longtemps on crût - Ibn Khaldoun en<br />

était persuadé - qu'elle était juive:<br />

«Une partie de berbères, nous dit-il,<br />

professait le Judaïsme (...) Parmi les<br />

berbères juifs on distinguait les Djeraoua-<br />

tribu <strong>qui</strong> habitait l'Aurès et à<br />

laquelle appartenait la Kahenall. Il<br />

est vrai que, même si le paganisme<br />

était globalement dominant dans<br />

l'ifrikya du Vile siècle, le judaïsme<br />

s'était répandu parmi quelques tribus<br />

berbères. Beaucoup moins cependant<br />

que la religion des Rum, le<br />

christianisme. AI Kahena était - c'est<br />

aujourd'hui la conviction de nombreux<br />

historiens - de confession<br />

chrétienne, comme le laisse penser<br />

sa filiation, sa vie matrimoniale, ses<br />

relations et l'ascendant qu'elle avait<br />

sur les Rum, ainsi que le culte qu'elle<br />

rendait aux images. En des temps où<br />

la versatilité en matière de religion<br />

n'avait rien d'exceptionnel, les Djeraoua<br />

avaient sans dout d'abord<br />

adopté le judaïsme mais s'étaient<br />

convertis ensuite comme beaucoup<br />

d'autres tribus berbères au christianisme.<br />

La famille d'AI Kahina faisait partie<br />

des Djeraoua, composante des<br />

Zenata, eux-mêmes rattachés à la<br />

grande confédération des Butr. Cette<br />

société berbère repose en effet<br />

d'abord sur les liens du sang. La<br />

consanguinité est à la base de la plus<br />

petite unité sociale, «le feu», un certain<br />

nombre de feux constituant chez<br />

les sédentaires un village et chez les<br />

nomades, un «douar». Plusieurs villages<br />

ou douars forment la fraction<br />

<strong>qui</strong> est un état en miniature; la tribu<br />

groupe plusieurs fractions et la confédération<br />

représente une association<br />

temporaire, exigée par des circonstances<br />

graves, le plus souvent la<br />

guerre.<br />

Les Djeraoua comme les Butr sont<br />

essentiellement des pasteurs et des<br />

nomades chameliers contrairement à<br />

leurs voisins, les berbères «Baranis»<br />

<strong>qui</strong>, eux, sont plus généralement<br />

sédentaires.<br />

Au moment où elle fait irruption dans<br />

l'histoire, c'est-à-dire aux alentours<br />

de 693 (an 74 de l'hégire) AI Kahina<br />

- veuve et certainement très<br />

âgée - a, au delà des Djeraoua dont<br />

elle est reine depuis une date indeterminée<br />

(quelques années sans<br />

doute après la mort de Kuseyla en<br />

686). réunifié toutes les tribus Butr<br />

et pris la tête de la résistance dans<br />

les Aurès.<br />

Comment expliquer cette ascension<br />

et comment une tâche aussi écrasante<br />

et tant de pouvoirs ont ils pu<br />

être dévolus, en des moments aussi<br />

graves, à une femme? Le rang et la<br />

puissance parmi toutes les tribus<br />

Bûtr de sa propre tribu, la noblesse de<br />

son sang.? Peut-être. C'est ce que<br />

laisse entendre Ibn Khaldoun selon<br />

lequel les Djeraoua «fournissaient»<br />

des rois et ,des chefs à tous les berbères<br />

descendus «d'El Abter» (Bûtr).<br />

Cela ne saurait pourtant suffir à<br />

expliquer le choix d'une femme? Il<br />

faut donc savoir qu'au sein de cette<br />

société les <strong>femmes</strong> en général ont<br />

une place et des fonctions autres que<br />

marginales. Elles jouissent d'une<br />

considération certaine, sont plutôt<br />

fières et ont l'âme guerrière. Lors des<br />

combats, elles vilipendent l'ennemi,<br />

ravitaillent les guerriers, poussent à<br />

la lutte jusqu'au bout et maudissent à<br />

jamais ceux <strong>qui</strong> se rendent à<br />

l'ennemi. Plus près de nous encore<br />

dans les mémoires, et comme pour<br />

nous le- rappeler, il y a l'épopée des<br />

<strong>femmes</strong> berbères Aït Atta dans la<br />

défense de Djbel Saghro face aux<br />

canons des généraux Catroux et<br />

Giraud (février 1933).<br />

Mais AI Kahina devait ses pouvoirs<br />

avant tout à elle même. Il fallait<br />

qu'elle eut des qualités bien exceptionnelles<br />

pour se voir confier à la<br />

tête de guerriers fiers et prudes la<br />

succession de Kusayla. Elle eut sans<br />

doute des facultés peu communes<br />

pour être respectée et honorée telle<br />

qu'elle le fût, dans toutes les montagnes<br />

de Numedie et de Maurétanie.<br />

Et de fait, le personnage est assuremment<br />

peu ordinaire. Personnalité<br />

complexe, contradictoire et quelque<br />

peu irréelle, AI Kahina tirait une partie<br />

de sa puissance et de son ascendant<br />

sur ses compatriotes de ses dons de<br />

devineresse. Chez tous les peuples<br />

de l'anti<strong>qui</strong>té et du moyen âge, une<br />

certaine catégorie d'individus se<br />

voyaient attribuer la fonction<br />

d'entrer en relation avec le monde<br />

surnaturel, le monde des esprits, le<br />

monde de la divinité: «Ils voient ce<br />

21


Coquetterie<br />

Les examens relégués aux<br />

oubliettes (<strong>qui</strong> sait, d'ici l'an<br />

prochain ils seront peut-être<br />

effacés de la surface de la<br />

planète), c'est le moment<br />

de se lancer à l'assaut des<br />

plages et de profiter de ce<br />

merveilleux soleil <strong>qui</strong> nous<br />

fait son plus beau sourire en<br />

ce mois de Juin.<br />

30<br />

Pour vous mettre au diapason,<br />

Kalima vous propose<br />

de pousser cette année la<br />

coquetterie un peu plus loin<br />

et d'enrichir votre attirail de<br />

plage d'un magnifique<br />

paréo (si pratique, n'est-ce<br />

pas mesdames Il et d'un<br />

fourre-tout assorti.<br />

Une véritable prouesse<br />

artistique (très facile à réaliser)<br />

<strong>qui</strong> vous donnera un<br />

air raffiné même les pieds<br />

nus.<br />

Accessoires<br />

Acheter de la popeline de<br />

coton ou une toile fine de<br />

coton en 1m40 de large.<br />

• 1mSO pour le paréo<br />

• 50 cm pour le fourre-tout<br />

• Peinture pour tissus<br />

setacolor de Pébéo.<br />

Exemples de couleurs:<br />

jaune-rouge-orange-vertnoir.<br />

• 5 bols<br />

• 1 rouleau de ficelle fine<br />

• 1 paire de ciseaux<br />

• 2m de corde blanche (ou<br />

de couleurl


sur sable •<br />

'ln<br />

Le Paréo<br />

exemple n° 1<br />

Prendre l'extrémité A (fig 1)<br />

et, 2Qcm plus haut, à peu<br />

près, resserrer bien fort le<br />

tissu avec une ficelle. A 22<br />

cm, refaire une deuxième<br />

ligature (fig 1') et ainsi de<br />

suite en laissant un écart un<br />

peu plus important chaque<br />

fois (de 20 à 35 cm<br />

environ).<br />

Préparer ensuite les couleurs.<br />

Mettre une couleur par bol<br />

(3 bouchons de couleurs et<br />

un bouchon d'eau), tremper<br />

ensuite la première extrémité<br />

de votre «boudin))<br />

dans la première couleur,<br />

puis le deuxième morceau<br />

dans la deuxième couleur et<br />

ainsi de suite. Quand vous<br />

aurez utilisé vos 5 couleurs,<br />

revenez à la première.<br />

Exemple: Jaune - Rouge<br />

- Vert - Orange - Noir ­<br />

Jaune - Rouge ...<br />

Procéder lentement et avec<br />

application de manière à ne<br />

pas tâcher les autres couleurs<br />

avec celle que vous<br />

êtes en train d'utiliser.<br />

31


f-- -- -<br />

)<br />

bien ac<strong>qui</strong>se, il est possible<br />

de la varier à loisir.<br />

exemple nO 2<br />

Prendre un point A (fig 2)<br />

<strong>qui</strong> est le centre du tissu et<br />

faire une ligature à environ<br />

15 centimètres. Faire<br />

ensuite les autres ligatures.<br />

Ce principe donnera un<br />

effet circulaire «cible»<br />

Le fourre-tout<br />

LE FOURRE-TOUT<br />

Couper un rectangle de 23<br />

x 33 cm pour la base du<br />

sac et un rectangle de<br />

1m 12 x 50 cm pour le<br />

sac.<br />

Rabattre sur le haut du sac<br />

5 cm pour l'ourlet.<br />

Coudre le rectangle avec la<br />

base, puis le côté du sac.<br />

Sur le haut du sac, (dans<br />

l'ourlet) faire faire des oeillets<br />

(dans une mercerie)<br />

puis faire passer la corde.<br />

On tire la coulisse et le tour<br />

est joué.<br />

d'impression.<br />

exemple nO 3<br />

Ce principe donnera des<br />

rayures verticales.<br />

Il est le moins difficile parce<br />

qu'il n'y a pas, contrairement<br />

à l'exemple nO 2, une<br />

grosse quantité de tissu par<br />

ligature et le trempage dans<br />

la teinture s'en trouve simplifié.<br />

exemple n° 4<br />

Pour les différents exemples<br />

donnés, si une fois les<br />

ligatures défaites vous<br />

trouvez qu'il y a beaucoup<br />

de «blancs» (zones non<br />

touchées par la peinture),<br />

vous pouvez tirer ce morceau<br />

de blanc et à sa base,<br />

faire une ligature.<br />

Ensuite, tremper le ou les<br />

blancs ligaturés dans différentes<br />

couleurs. Cela peut<br />

aussi donner un effet intéressant.<br />

F.Z. EL BOUAB<br />

33


--cachée âes--<br />

•<br />

---mazns<br />

Qui d'entre nous n'a pas<br />

cherché à lire entre les<br />

lignes de sa main ?<br />

On sait que la ligne <strong>qui</strong> va de la base<br />

du pouce au poignet est la ligne de<br />

vie, la ligne <strong>qui</strong> va de la base de<br />

l'index au côté de la main sous le<br />

petit doigt est la ligne de coeur, celle<br />

<strong>qui</strong> coupe le milieu de la main<br />

verticalement est la ligne de chance,<br />

celle <strong>qui</strong> part d'entre le pouce et<br />

l'index vers le bord extérieur de la<br />

paume est la ligne de tête, et enfin<br />

celle, en diagonale, <strong>qui</strong> va pratiquement<br />

du bas de la ligne de<br />

chance et <strong>qui</strong> se termine à peu près<br />

entre l'extrémité de la ligne de<br />

coeur et de celle de tête est la ligne<br />

de santé.<br />

Et ce, pour les «grandes lignes».<br />

Mais ce sont là des «clés» d'une trop<br />

grande $implicité.<br />

Car dans le détail ça se complique.<br />

La main fourmille d'indications à<br />

l'infini: les arcs (une ligne<br />

imaginaire <strong>qui</strong> relierait la base des<br />

doigts à la paume), les trois<br />

phalanges <strong>qui</strong> marquent, en partant<br />

de la paume les trois états (corps,<br />

esprit, âme), les monts, <strong>qui</strong><br />

vallonnent la paume (si le mont de<br />

vénus, d'où part le pouce, est<br />

souple et développé, c'est signe<br />

d'une grande sensualité)...<br />

En conclusion, lire dans les mains<br />

n'est pas du tout chose évidente.<br />

Car il faut encore pouvoir en<br />

interpréter toutes les subtilités, et<br />

c'est affaire de spécialistes: les<br />

chirologues.<br />

34<br />

Les mains<br />

La forme des mains, comme celle du<br />

visage peut donner des informations<br />

caractéristiques.<br />

Ainsi les mains larges signifient en<br />

général qu'on a affaire à une personne<br />

active, sociable, généreuse<br />

tandis que les mains étroites trahissent<br />

un penchant au repli égocentrique,<br />

à un caractère solitaire.<br />

Une main carrée révèle un esprit<br />

pratique <strong>qui</strong> a le sens des responsabilités,<br />

une main dite «en spatule»<br />

(la paume à hauteur des doigts est<br />

considérablement plus large qu'à la<br />

base du poignet) indique un tempérament<br />

excessivement nerveux<br />

tandis que l'inverse (une main où le<br />

poignet apparaît plus large que la<br />

paume) dénote une énergie appliquée<br />

aux choses matérielles.<br />

Leur beauté<br />

d'été-----<br />

Dépourvues de glandes sébacées<br />

donc de film protecteur naturel,<br />

frottées, mouillées, sans cesse<br />

exposées, les mains se déssèchent,<br />

se tachent et vieillissent plus vite<br />

que le visage.<br />

Au soleil----<br />

Il faut les «soigner» autant que le<br />

visage. Une bonne crême antirides


solaires à indice de protection<br />

élevée (4 ou 6) doit être utilisée<br />

pour cela.<br />

Profitez de chaque application de<br />

crème sur le visage pour bien en<br />

enduire les mains en massant pour<br />

activer la circulation. Bien masser<br />

aussi les ongles et leur pourtour.<br />

Car les ongles aussi ont tendance à<br />

se dessécher au soleil et ils en<br />

deviennent plus cassants.<br />

Profitez de l'été pour les couper net,<br />

au carré. N'appliquer que des vernis<br />

très clairs ou transparents.<br />

Tous les soirs--<br />

Utilisez une bonne crême pour les<br />

mains, bien grasse et nourrissante.<br />

Masser les mains et les doigts. Un<br />

bon massage des mains tous les<br />

soirs avant de dormir active la circulation<br />

et affine les doigts.<br />

Et pour faire pousser les ongles,<br />

bien lisses et bien durs, une recette<br />

de «grand-mère»: après s'être<br />

massée les mains, appliquez (à l'aide<br />

d'un bâtonnet de coton) de l'huile<br />

d'olive tout autour des cuticules et<br />

sous l'ongle. Masser ensuite l'ongle<br />

de la racine vers l'extérieur, en<br />

repoussant les cuticules et en tirant.<br />

Si vous 'Ie faites régulièrement, le<br />

résultat est magnifique.<br />

De même la poignée de main est<br />

révélatrice: la poignée <strong>qui</strong> vous<br />

broie la main veut laisser une forte<br />

impression, la «collante» caractérise<br />

une nature timide, la fuyante se<br />

garde bien des autres. Une main<br />

chaude et humide indique un<br />

caractère sanguin passionné tandis<br />

qu'une main froide et sèche appartient<br />

plutôt à un mollasson. Ainsi,<br />

les mains, outil qu'on a bien souvent<br />

tendance à négliger, sont<br />

pourtant bien «le miroir de l'âme».<br />

Ces mains, <strong>qui</strong> savent tout faire,<br />

tout dire, méritent qu'on les traite<br />

avec considération.<br />

Une fois par<br />

semaine----<br />

On peut se préparer un bain de<br />

paraffine<br />

Chauffer légèrement la paraffine.<br />

Quand elle a fondu - elle doit être<br />

tiède - on y plonge les mains une<br />

minute. Ensuite plonger les mains<br />

dans une eau savonneuse tiède<br />

(mieux que du savon, diluer un peu<br />

de champoing pour bébé dans de<br />

l'eau tiède). Sécher. Appliquez<br />

ensuite une bonne quantité d'huile<br />

d'olive. Bien se masser les mains et<br />

les ongles. Replonger les mains dans<br />

l'eau savonneuse tiède. Essuyer les<br />

mains et appliquer sur le dos de la<br />

main en insistant bien sur les ongles<br />

et le dessous de l'ongle un demi<br />

citron aux trois quarts essoré de son<br />

jus. Le citron a la particularité de<br />

blanchir les mains et les ongles.<br />

Pour les gros fumeurs : se frotter le<br />

bout des doigts porteurs de la cigarette<br />

le plus fréquemment possible<br />

pour éviter le jaunissement des<br />

ongles et des bouts des doigts dû à<br />

la nicotine.<br />

Rincez les mains à l'eau claire et<br />

appliquer une bonne crème.<br />

N.B. : Eviter d'appliquer du vernis<br />

sur les ongles «gras», il n'adhèrerait<br />

pas bien. Tremper seulement . les<br />

ongles dans une eau savonneuse<br />

tiède et bien les essuyer avant de<br />

procéder à la manucure.<br />

Un truc encore pour durcir les<br />

ongles: mettre quèlques gouttes de<br />

formol (vendu en pharmacie) dans<br />

la base où dans votre vernis à<br />

ongles. Et après tous ces bons conseils<br />

vous aiderez vos mains à<br />

passer elles aussi de bonnes<br />

vacances.•<br />

F. Z. EL BOUAB<br />

35


L'ART, LA MANIERE<br />

ET LA MATIERE<br />

L'univers-douceur de la salle de bain Super-Rivella<br />

est une promesse de détente signée JACOB<br />

DELAFON.<br />

Un univers de formes-tendresse et de couleursrepos<br />

: baignoires et lavabos<br />

Super Rivella, une salle de bain prestige, un rêve.<br />

La robinetterie <strong>qui</strong> étl'1ipe cette salle de bain porte<br />

aussi la griffe JACOB DELAFON. Avec elle redécouvrez<br />

Je plaisir de l'eau.<br />

La salle de bain Super-Rivella et sa robinetterie une<br />

création JACOB DELAFON.<br />

Couleurs Super- Rivella : Blanc, bleu floride, sable,<br />

vert mousse, brun bali, caramel, rose nuagé, bleu<br />

nuagé, rose céleste, bleu céleste.<br />

LA PASSION DU SANITAIRE »lJACOB<br />

DELAFON


preCise, d'une part, que la minorité<br />

civile se distingue de la minorité pénale,<br />

et, d'autre part, que celle-ci a plusieurs<br />

niveaux, d'où une responsabilité<br />

modulée et des sanctions différenciées).<br />

Il y a aussi la Haute Cour de Justice<br />

(elle juge les infractions commises par<br />

les membres du gouvernement dans<br />

l'exercice de leurs fonctions, mais elle<br />

n'a jamais eu à tenir la moindre<br />

audience, nos gouvernants étant, Dieu<br />

merci !, la vertu personnifiée, comme<br />

chacun sait).<br />

Il y a par ailleurs la cour spéciale de<br />

justice (<strong>qui</strong> juge les auteurs de èorruption<br />

ou de trafic d'influence, leurs<br />

complices, les bénéficiaires, etc... - instituée<br />

en 1965, elle n'est pas près de<br />

fermer ses portes, le Maroc fournissant<br />

en la matière plus de virtuoses que le<br />

foot-baIl). Il y a, enfin, le tribunal<br />

permanent des forces armées (<strong>qui</strong> juge<br />

les militaires mais aussi, dans certains<br />

cas, des civils).<br />

A côté des juridictions de droit commun<br />

et des juridictions d'exception, il y a,<br />

enfin, au sein de l'organisation judiciaire<br />

au sens large, les juridictions<br />

professionnelles (conseils de l'ordre des<br />

avocats, des médecins, etc. statuant en<br />

matière disciplinaire pour sanctionner<br />

les fautes professionnelles).<br />

Arrêtons-nous à cette vue panoramique:<br />

il n'est question que de voir la<br />

forêt, non les arbres, car, en réalité, les<br />

choses sont plus complexes et demanderaient<br />

beaucoup plus que ces quelques<br />

lignes si elles devaient être regardées<br />

de plus près. Mais, vous vous en<br />

doutez bien - je vous sais intelligents -, il<br />

n'est pas question ici de «faire du<br />

droit». N'attendez donc pas de moi<br />

- l'observation valant pour ce papier<br />

comme pour tout autre relevant de cette<br />

rubrique - que je sois exhaustif, rigoureux,<br />

ou par trop technique : Kalima<br />

veut susciter - en un mot pas en<br />

mille - votre intérêt, votre curiosité,<br />

une réflexion, une émotion. C'est dire<br />

que cette rubrique n'a la prétention ni<br />

d'enseigner (ce n'est pas sa vocation), ni<br />

de donner des solutions à des problèmes<br />

spécifiques (ceux-ci exigent la consultation<br />

d'un homme de loi qualifié).<br />

J'ajoute - mais tout le monde ne<br />

l'a-t-il pas déjà compris? - que<br />

Kalima ne veut ennuyer personne: les<br />

raseurs occupent toute la place depuis<br />

longtemps.<br />

Cela dit, si l'on s'attarde quelque peu<br />

sur les juridictions de droit commun<br />

pour en faire une furtive - et,<br />

espérons-le, digeste présentation, on<br />

apprendra à peu près ceci :<br />

Au bas du site, vous apercevrez une<br />

fourmilière de juges communaux (pour<br />

les communes rurales) et de juges<br />

d'arrondissement (pour les communes<br />

urbaines). Les tribunaux marocains<br />

croulant sous le poids des «petites»<br />

affaires (petites pour <strong>qui</strong>? Pour les<br />

nantis, certes, mais pas pour les autres,<br />

<strong>qui</strong> sont, que l'on sache, l'évidente<br />

majorité des justiciables), le législateur<br />

n'a rien trouvé d'autre à faire que de<br />

créer, en 1974, ces juridictions pour<br />

statuer sur ces «petits» litiges et en<br />

débarrasser les tribunaux de première<br />

instance.<br />

Ces juridictions ont au moins deux particularités<br />

: la première est qu'elles sont<br />

personnifiées en un juge (un seu!), <strong>qui</strong><br />

peut être un magistrat de formation et<br />

de carrière mais aussi toute personne<br />

ayant «des aptitudes lui permettant de<br />

remplir les fonctions de juge». Distinction<br />

fallacieuse puisque, par définitions,<br />

et jusqu'à preuve contraire, celui<br />

<strong>qui</strong> est apte (vraiment apte) à rendre la<br />

justice, c'est précisément le magistrat.<br />

Ou alors, on ne voit pas pourquoi le<br />

système ne serait pas généralisé et donc<br />

étendu à toutes les affaires.<br />

La seconde particularité de ces juridictions<br />

est qu'elles fonctionnent pratiquement<br />

sans règles de droit, ce <strong>qui</strong> est<br />

d'ailleurs naturel, puisque ceux <strong>qui</strong><br />

rendent cette «justice» n'ont en général<br />

aucune formation juridique digne de ce<br />

nom.<br />

En créant ces juridictions, on a voulu,<br />

nous a-t-on assuré, rapprocher la justice<br />

du justiciable (pardonnez la langue de<br />

bois - c'est une citation) et permettre à<br />

celui-ci de l'aborder sans frais (ceci est<br />

vrai, mais y gagne-t-on vraiment<br />

lorsqu'on voit son affaire jugée par<br />

n'importe <strong>qui</strong>, sans garantie de compétence<br />

sinon d'honnêteté ?). En fait, en<br />

instituant ces juridictions au rabais,<br />

l'Etat a simplement voulu économiser<br />

des sous: Bien qu'il paie très mal ses<br />

magistrats (qu'ils ne soient pas tous à la<br />

39


NIXDORF écoute la croissance<br />

des entreprises<br />

NIXDORF a toujours proposé<br />

des solutions informatiques favorisant<br />

la décentralisation du traitement<br />

des données dans toutes<br />

les entreprises.<br />

Les solutions NIXDORF permettent<br />

une organisation informatique<br />

homogène et évolutive. Intégrant<br />

les développements de la<br />

technologie dans ses systèmes,<br />

A l'écoute<br />

NIXDORF garantit les ouvertures<br />

vers l'avenir.<br />

NIXDORF écoute<br />

les utilisateurs<br />

NIXDORF a toujours considéré<br />

que les performances techniques<br />

d'un système informatique ne se<br />

justifient que dans leur adéquation<br />

à un besoin réel des utilisateurs.<br />

NIXDORF s'applique toujours<br />

à proposer des solutions<br />

plutôt que des produits.<br />

Les systèmes sont conçus p:>ur<br />

répondre aux exigences de !Ouplesse<br />

de communication €1tre<br />

les individus et les groupe: <strong>qui</strong><br />

sont les moteurs des entreprses.<br />

NIXDORF écoute le savoirfaire<br />

des professionnels<br />

Les logiciels spécialisés SOIt réalisés<br />

avec des hommes deerrain<br />

<strong>qui</strong> connaissent parfaitemnt les


A pied dans le<br />

Haut Atlas<br />

L'été arrive, l'été est là ... vous rêvez de<br />

plage et de flots bleus, de sable et de<br />

soleil, d'écume et de vagues ... Pourquoi<br />

pas de sentiers d'altitude des montagnes<br />

de l'Atlas, de hautes vallées en<br />

fête en leurs somptueux villages, de cols<br />

haut perchés où l'horizon bascule?<br />

D'un monde fascinant, irréel et pourtant<br />

si proche de vous ?<br />

Si l'aventure vous tente, si la montagne<br />

représente pour vous autre chose qu'un<br />

terrain de jeux pour glissades mécanisées<br />

ou qu'un accident géographique<br />

toujours pénible à contourner et à fortiori<br />

à escalader, alors lisez la suite !<br />

Vous êtes mûr pour troquer votre<br />

planche de surf et votre maillot de bain<br />

contre une boussole et un sac à dos !<br />

Quelle<br />

montagne?<br />

Le domaine altimontain marocain, celui<br />

dont le relief dépasse 2.000 mètres<br />

d'altitude, couvre un espace de 100.000<br />

km2, recèle urie population de 3 millions<br />

d'habitants et abrite un réseau de<br />

plusieurs milliers de kilomètres de<br />

sentiers muletiers bien entretenus!<br />

L'espace, donc, ne manque pas!<br />

Le Haut Atlas, dont les plus prestigieux<br />

sommets se déroulent d'Argana à<br />

Midelt sur près de 500 kilomètres<br />

constitue la pièce maîtresse de cet<br />

ensemble montagneux.<br />

Par son altitude élevée, ses vallées<br />

profondes et pittoresques, ses belles<br />

rivières toujours fraîches et claires, la<br />

.... Canon:<br />

En rem)ntant le canon de la Tassawt.<br />

beauté de ses sites naturels et les traditions<br />

ancestrales de ses populations, le<br />

Haut Atlas est la montagne de prédilection<br />

du randonneur estival. C'est lui<br />

que nous vous invitons à découvrir ici,<br />

par le moyen le plus naturel, le moins<br />

polluant et le plus économique <strong>qui</strong> soit :<br />

la marche à pied.<br />

E<strong>qui</strong>pement<br />

Vous voilà donc décidé à sauter le pas !<br />

Vous êtes dans une grande ville, disposant<br />

d'un budget limité mais décidé à<br />

faire avec!<br />

Les chaussures : pièce maÎtresse<br />

de l'é<strong>qui</strong>pement, elles doivent être<br />

confortables, supporter l'eau et sécher<br />

rapidement. J'opte, en été, pour la<br />

chaussure type «jogging» à épaisse<br />

semelle amortie. Les chaussettes seront<br />

de laine, pour le contact et contre les<br />

ampoules.<br />

Le sac: un sac à dos est indispensable.<br />

On en trouve partout dans les<br />

villes mais de fabrication trop légère.<br />

Un passage chez le cordonnier de votre<br />

quartier s'impose donc après l'achat:<br />

doubler toutes les coutures, placer des<br />

pièces de renfort aux attaches des bretelles,<br />

poser une ceinture ventrale.<br />

Le sac de couchaRe: les<br />

modèles en vente sur le marèTié marocain<br />

ne sont pas conçus pour la montagne<br />

mais plutôt pour le camping de<br />

plaine et de bord de mer. Néanmoins ils<br />

vous dépanneront si vous n'avez rien<br />

d'autre mais il faudra prévoir un survêtement<br />

chaud pour le nuit.<br />

Matériel divers: ne pas<br />

oublier anorak, chapeau, lunettes de<br />

soleil, gourde (1 litre minimum), couteau,<br />

lampe de poche, bougies, ficelle,<br />

carnet, crayon, toile de plastique fort (1<br />

m x 2 ml, petite plaque de mousse (120<br />

cm x 50 cm x 4 cm), popotte, couverts,<br />

petite pharmacie, crème solaire, linge de<br />

rechange, appareil photos, films, ...<br />

Accès<br />

Le voyage d'accès, de Casablanca par<br />

exemple au point de départ de la randonnée,<br />

est à lui seul une expédition et<br />

ne sera sans doute pas le moment le<br />

moins pittoresque de votre é<strong>qui</strong>pée !<br />

L'aventure commence ... à la C TM!<br />

Car nous partons du principe que vous<br />

ne disposez pas forcément d'un véhicule<br />

personnel.<br />

A la C T M, vous mettez le cap sur le<br />

piémont atlassien, au terminus du goudron.<br />

Là, comme il vous faudra le plus<br />

souvent parcourir quelques dizaines de<br />

kilomètres de piste avant d'atteindre<br />

votre base de départ, vous êtes bon pour<br />

la benne du camion ! Ne vous in<strong>qui</strong>étez<br />

pas, vous ne serez pas seul ! Outre la<br />

bonne trentaine de passagers jovials <strong>qui</strong><br />

vous accompagneront, moutons, poules<br />

et lapins ramenés du souk seront du<br />

voyage, en semi-liberté dans la benne ce<br />

<strong>qui</strong>, au gré des ornières et des dos<br />

d'ânes, vous promet des contacts<br />

disons, inhabituels ! Mais le camion,<br />

c'est aussi la solidarité vraie, celle des<br />

marins d'un même navire, le pain et le<br />

45


thé toujours partagés, les cinq dirhams<br />

vite rassemblés pour permettre à celui-là<br />

de continuer sa route avec vous, les<br />

souffles et les forces unis quand il<br />

faudra, si jamais il le faut, pousser,<br />

tirer, soulever l'engin afin qu'il puisse<br />

vous porter plus haut. Une expérience à<br />

ne pas manquer .. ,<br />

Les camions assurent le ravitaillement<br />

des hautes vallées et roulent donc en<br />

fonction des dates de souks. Il est donc<br />

indispensable de connaitre ces dates<br />

avant d'entreprendre le voyage. Par<br />

exemple, le souk de Zawyat Ahansal<br />

ayant lieu le Dimanche, vous savez<br />

qu'en vous postant à Wawizaght ou à<br />

Aït M'hamed le Samedi, vous aurez un<br />

camion <strong>qui</strong> vous amènera à destination.<br />

Inversement, si votre randonnée se<br />

termine à Zawyat Ahansal, il faudra<br />

faire en sorte d'y arriver le Dimanche<br />

pour prendre les camions de retour.<br />

Il existe une formule plus souple et un<br />

peu plus coûteuse: le taxi «Land<br />

Roven> collectif (l0 places, en principe<br />

...). Cette formule se développe<br />

depuis quelques années dans les villes et<br />

gros bourgs du piémont. Il est même<br />

possible de fixer des rendez-vous au<br />

chauffeur <strong>qui</strong> pourra vous récupérer au<br />

point d'arrivée de votre périple et vous<br />

ramener sur le goudron.<br />

46<br />

Déplacement,<br />

portage<br />

En été et pour des randonnées dépassant<br />

trois jours, le mulet est indispensable<br />

pour le portage du gros des<br />

bagages et des provisions.<br />

Si chacun doit avoir son propre sac<br />

pour une raison évidente d'autonomie<br />

personnelle, celui-ci ne doit pas<br />

dépasser la douzaine de kilos au risque<br />

de tra.nsformer la balade en un véritable<br />

chemin de croix !<br />

La location d'un mulet est donc à envisager<br />

dès le départ. Une bête porte<br />

environ 100 kg soit le gros matériel de<br />

six randonneurs environ.<br />

Outre le confort qu'il procure, ce<br />

système est un gage de sécurité pour<br />

votre randonnée. Le muletier <strong>qui</strong> vous<br />

accompagnera se montrera un auxiliaire<br />

irremplaçable, réglant les problèmes<br />

d'itinéraires, de choix des bivouacs<br />

(sources, points d'eau), d'hébergement<br />

chez l'habitant.<br />

En cas de défaillance de l'un des participants<br />

(fatigue, maladie, blessure) le<br />

mulet s'avèrera d'un grand secours en<br />

assurant le portage de la personne<br />

diminuée.<br />

En été il est bien sûr préférable de marcher<br />

le matin et en fin d'après midi, en<br />

vous organisant pour passer les heures<br />

les plus chaudes au bord d'un torrent.<br />

Mais à 2.000 m d'altitude et souvent<br />

plus, la chaleur n'est jamais insupportable.<br />

Votre tenue sera légère mais protectrice.<br />

Il est important d'être décemment vêtu<br />

aux abords des villages et durant leur<br />

traversée (pantalons longs, pas de torse<br />

nu ni de chemise ouverte) afin de ne pas<br />

choquer la population par une attitude<br />

<strong>qui</strong> serait interprétée négativement. De<br />

même obtenez l'accord des habitants<br />

avant de les photographier et envoyer<br />

leur une photo, en souvenir de votre<br />

rencontre, à votre retour en ville.<br />

D'une manière plus générale, sachez<br />

que le Haut Atlas s'ouvre doucement au<br />

tourisme montagnard et que ses é<strong>qui</strong>libres<br />

traditionnels risquent, de ce fait,<br />

d'être menacés si l'intrusion est anarchique<br />

et mal vécue. Sachez donc que de<br />

votre comportement présent dépendra<br />

l'attitude future de l'habitant à votre<br />

égard. Cela mérite d'y réfléchir ...<br />

Mulets:<br />

Sur les hauts plateaux de Tafrawt.<br />

Hébergement<br />

En principe, il est inutile, l'été, de vous<br />

encombrer de matériel de camping.<br />

Vous installerez en général votre<br />

bivouac sous les étoiles, auprès d'un<br />

ruisseau et autour d'un grand feu. Si<br />

l'orage menace, un «azib» (bergerie de<br />

montagne) vous accueillera.<br />

Vous pourrez, si vous n'êtes pas nombreux,<br />

être hebergés dans les villages.<br />

Les traditions d'hospitalité des marocains<br />

en général et des montagnards en<br />

particulier sont connues et appréciées de<br />

tous. Aussi n'en abusez pas et s'il est<br />

évident que vous accepterez volontiers<br />

le thé de bienvenue, ne contraignez pas<br />

votre hôte à nourrir tout le groupe !<br />

Il conviendra, au moment du départ, de<br />

rétribuer aussi discrètement que possible<br />

le maître de maison pour le<br />

dérangement occasionné (le muletier<br />

vous donnera alors une estimation de<br />

cette rétribution).


Ravitaillement<br />

Vous achèterez avant de partir (ou au<br />

terminus de la ligne d'autobus) les provisions<br />

de base: sucre, café, pain,<br />

pâtes, riz, conserves, oranges, biscuits,<br />

fromages ... Ne pas oublier la part du<br />

muletier! Prévoyez des emballages<br />

séparés et des sacs solides pour les<br />

accueillir, le tout devant aller dans les<br />

«chouaris» du mulet.<br />

Vous pourrez vous ravitailler dans les<br />

villages traversés en oeufs, poulets,<br />

légumes, sardines et plus largement si<br />

vous arrivez le jour du souk. Si vous<br />

êtes pêcheur, vous régalerez la compagnie<br />

de truites farios du Haut Atlas,<br />

grillées au dessus des braises et simplement<br />

salées (la truite est un poisson<br />

gras). N'oubliez pas alors votre carte de<br />

pêche.<br />

Il n'est pas nécessaire d'emporter de<br />

réchaud à gaz. Il y du bois ou des petits<br />

épineux partout en montagne et les<br />

cuissons s'effectuent à la flamme vive<br />

ou sur les braises.<br />

Ne <strong>qui</strong>ttez jamais votre bivouac sans<br />

avoir éteint le feu et brulé ou enterré vos<br />

déchets.<br />

Les<br />

"iO •<br />

precaut'lons<br />

à prendre<br />

Il est sans doute beaucoup moins risqué<br />

de traverser le Haut Atlas à pied que le<br />

boulevard Mohamed V à Casablanca,<br />

même dans un passage protégé ! Mais<br />

quelques risques existent et il faut bien<br />

les connaître pour les éviter tout à fait.<br />

Voici donc, sous forme de «commandements»,<br />

quelques conseils de base à<br />

respecter (il y en a 10, mais c'est un pur<br />

hasard !)<br />

1<br />

Préparez soigneusement<br />

votre randonnée, tant sur le<br />

plan de la forme physique<br />

• que sur celui de l'itinéraire<br />

et de l'intendance.<br />

2.<br />

Ne partez jamais seul! Ni<br />

en groupe trop nombreux.<br />

Le chiffre idéal se situe<br />

entre trois et huit participants.<br />

Land Rover :<br />

Approche du Mgoun Sud par Imin-Woulaoun.<br />

3<br />

Evitez de <strong>qui</strong>tter le chemin<br />

muletier, sauf si l'itinéraire<br />

est évident et sans danger.<br />

• Rappelez-vous notamment<br />

que la présence d'une chèvre sur un<br />

sentier n'est pas une preuve de sa<br />

viabilité pour les bipèdes que nous<br />

sommes ! D'une manière générale, ne<br />

prenez aucun risque inconsidéré. Une<br />

cheville foulée sur un stade de Casa ou<br />

de Rabat est sans conséquence. Ce <strong>qui</strong><br />

ne serait pas le cas au beau milieu dl.\<br />

plateau des Aït Abdi !<br />

4.<br />

5<br />

6.<br />

Ne<br />

Ne stationnez pas sous des<br />

falaises ou des barres<br />

rocheuses par grosses pluies­<br />

(risques de chutes de<br />

pierres).<br />

Ne vous abritez pas sous un<br />

arbre isolé en cas d'orage<br />

• (foudre)<br />

vous engagez pas dans<br />

un passage en canon si le<br />

temps n'est pas sûr. Une<br />

crue subite de l'oued peut<br />

faire monter les eaux, dans un passage<br />

étroit, de plusieurs mètres en quelques<br />

instants!<br />

7<br />

Ne tentez pas de traverser à<br />

pied un oued en crue.<br />

Attendez la décrue ou<br />

• cherchez un pont solide<br />

dans le voisinage.<br />

8.<br />

Inspectez systématiquement<br />

l'intérieur de vos<br />

chaussures avant de les<br />

remettre et manipulez avec<br />

circonspection grosses pierres et pièces<br />

de bois (gare aux petites bêtes).<br />

9.<br />

Hydratez-vous régulièrement<br />

(3 litres d'eau de<br />

source par jour en<br />

moyenne) et protégez-vous<br />

du soleil (chapeau de toile régulièrement<br />

mouillé).<br />

10.<br />

Prenez contact<br />

systématiquement.<br />

avec l'autorité locale<br />

du lieu que vous<br />

traversez pour lui faire part de vos<br />

projets et avisez-la si un problème<br />

quelconque survenait. En particulier s'il<br />

fallait envisager l'évacuation rapide<br />

d'un des participants à la randonnée.<br />

47


ces derniers continuant à cheminer sur<br />

le sentier longeant l'oued. L'Ahansal se<br />

trouve bientôt verrouillé par de gigantesques<br />

barres rocheuses que l'on peut<br />

contourner, mais en remontant assez<br />

haut par le sentier. Mieux vaut passer<br />

carrément dans l'oued en nageant si<br />

besoin est. Il est donc indispensable<br />

d'être en tenue légère, sans sac ni objet<br />

craignant l'eau. On débouche enfin non<br />

loin de Tamga, au pied de la célèbre<br />

«cathédrale» du Mastfran où l'on<br />

retrouve le mulet. La vallée est magnifiquement<br />

boisée de pins d'Alep. Une<br />

mine est en exploitation sur un promontoir<br />

dominant l'oued et on peut<br />

ainsi trouver facilement un camion pour<br />

regagner Wawizaght et le goudron.<br />

• Horaire moyen:<br />

Bou Taghrar - Tiranimine : 6 heures<br />

Tiranimine - Tighemt-n-Aït<br />

Ahmed<br />

Tighemt-n-Aït Ahmed ­<br />

Tabannt<br />

Tabannt - lzourar<br />

lzourar - Tizin Tahramt<br />

Tizi-n-Tahramt ­<br />

Zawyat Ahansal<br />

Zawyat Ahansal - Tamga<br />

• Cartes: Qalaat Mgouna<br />

Ahansal 1/100.000.<br />

: 9 heures<br />

: 5 heures<br />

: 5 heures<br />

: 6 heures<br />

: 3 heures<br />

: 7 heures<br />

- Zawyat<br />

Imilcbil.Zawyat<br />

Abatlsal8 jours<br />

• Accès: emprunter l'autocar jusqu'à<br />

El Ksiba (ou au delà) puis un camion<br />

(ou un taxi) pour lmilchil.<br />

• Déroulement : prendre une journée, à<br />

l'arrivée, pour «visiter» le plateau des<br />

lacs. lsli et Tislit sont là pour rappeler le<br />

célèbre moussem des fiancés, <strong>qui</strong> a lieu<br />

à l'Automne.<br />

Depuis lmilchil, descendre l'Assif Melloul<br />

jusqu'à Oulghazi en suivant la piste<br />

automobile <strong>qui</strong> traverse de beaùx villages<br />

de terre à l'architecture présaharienne.<br />

En aval d'Oulghazi, la<br />

vallée se resserre et s'encaisse: c'est le<br />

début des gorges de l'Assif Mellou!. Le<br />

mulet montera en rive droite et ne<br />

redescendra dans la rivière qu'à Batli, à<br />

plusieurs heures en aval. Les randonneurs<br />

<strong>qui</strong>, en été, continueront par le<br />

fond des gorges devront donc emporter<br />

leur matériel de bivouac car si la descente<br />

est beaucoup plus pittoresque et<br />

agréable les pieds dans l'eau, elle est<br />

aussi beaucoup plus longue ! .<br />

A Batli, deux possibilités:<br />

1) gagner Zerkan (Zerekane sur la<br />

carte) par le Kousser puis l'Aqqa-n­<br />

Tiflout (Aqqa-n-Taouet sur la carte)<br />

2) franchir le Tizi-n-Dari, redescendre<br />

dans l'Assif Melloul puis gagner le plateau<br />

des Aït Abdi et en suivre la bordure<br />

jusqu'à la passerelle de Zerkan.<br />

Remonter ensuite l'oued par le fond,<br />

dans une ambiance magnifique,<br />

jusqu'au village de Tafrawt (troglodytes<br />

dans les falaises), le mulet suivant sur le<br />

plateau, en rive gauche.<br />

Puis gagner le Tizi-n-Tafrawt (3120 m,<br />

point le plus haut de la randonnée) d'où<br />

le panorama est grandiose sur le cirque<br />

de Taghia les hauts plateaux et l'Aqqa-<br />

N.B. - Kalima demeure à la disposition des amateurs motivés <strong>qui</strong> voudraient en savoir plus et<br />

personnaliser leurs randonnées. Ecrivez-nous, nous vous répondrons.<br />

n-Tazaght, l'Ayouy (Aroudane) et<br />

l'Azourki (3677 m).<br />

<strong>Des</strong>cendre enfin sur Toughad et Zawyat<br />

Ahansa!.<br />

• Horaire moyen :<br />

lmilchil - Oulghazi<br />

Oulghazi - Batli<br />

(par la rivière)<br />

Batli - Zerkan<br />

Zerkan - Tafrawt<br />

Tafrawt - Tizi-n-Tafrawt<br />

Tizi - Zawyat Ahansal<br />

• L'itinéraire<br />

6 'heures<br />

15 heures<br />

5 heures<br />

8 heures<br />

5 heures<br />

3 heures<br />

Celui-ci doit être établi avec précision<br />

avant le départ, à l'aide des documents<br />

à votre disposition (cartes d'état major,<br />

livres, topos...) ou de renseignements<br />

que vous avez recueillis auprès de randonneurs<br />

connaissant le terrain.<br />

Essayez d'en évaluer les difficultés et<br />

d'en prévoir les étapes: bivouac possibles<br />

et agréables, sources, villages à<br />

traverser, date des souks etc...<br />

Sur le terrain, en pratique, la théorie<br />

peut s'avérer fausse! Alors adaptez la<br />

cadence au rythme du groupe!<br />

N'oubliez pas que vous êtes en vacances<br />

et qu'en montage il n'est de compétition<br />

que contre soi-même!<br />

N.B. : Kalima demeure à la disposition<br />

des amateurs motivés <strong>qui</strong> voudraient en<br />

savoir plus et personnaliser leurs randonnées.<br />

Ecrivez-nous, nous vous<br />

répondrons.<br />

Les horaires et la durée globale mentionnés<br />

ne sont qu'indicatifs. On ne<br />

peut qu'inciter le randonneur à<br />

s'attarder en des lieux aussi remarquables<br />

et à approfondir les contacts qu'il<br />

aura pu nouer avec la population.<br />

François CHALUMEA U<br />

5 1


Les beauxjours sont là, les vacances aussi !<br />

Finis les réveils à l'aube, le patron mal luné et la course à la montre.<br />

Respirer à pleinspoumons, se laisser porterpar les flots et caresserpar le soleil, voilà<br />

en règle générale à quoi se résument nos envies.<br />

Mais attention, amoureux du plein air, la Nature n'est pas toujours tendre. Alors<br />

prenez vos précautions pour les cas où '"<br />

Les plaies<br />

par entaille: (lame de couteau<br />

-ciseaux, morceau de<br />

verre)<br />

par plqure: (clous,<br />

aiguilles)<br />

par contusion: (coup de<br />

bâton)<br />

par dilacération: (avec<br />

déchirement des tissus)<br />

morsure de chien<br />

52<br />

A) Les premier<br />

secours<br />

Pour stopper l'hémorragie,<br />

il faut, après avoir enlevé<br />

les corps étrangers lautour<br />

ou dans la plaie) faire un<br />

gros pansement avec une<br />

serviette et bien appuyer à<br />

l'endroit touché.<br />

Si les débris encastrés rendent<br />

impossible la com-<br />

pression ou si l'hémorragie<br />

est trop forte, il faut comprimer<br />

l'artère en amont de<br />

la plaie. Il y a quatre points<br />

de compression principaux.<br />

1. Au niveau du cou (il faut<br />

être très vigilant car<br />

comprimer l'artère carotide<br />

contre la colonne<br />

vertébrale peut entraîner<br />

la syncope).<br />

2. Au niveau de l'épaule on<br />

comprime l'artère sous<br />

c1avière sur la première<br />

cÔte.<br />

3. Au niveau du bras.<br />

4. Au niveau de la cuisse,<br />

en appuyant au milieu de<br />

l'aine, au niveau du col<br />

du fémur.<br />

B) Nettoyer la plaie<br />

De l'intérieur vers l'extérieur<br />

avec de l'eau bouillie, du


savon et une compresse.<br />

On désinfecte avec de l'eau<br />

oxygénée ou du mercurochrome.<br />

S'il yale<br />

moindre signe d'infection<br />

«rougeur, chaleur, gonflement)<br />

aller chez le médecin.<br />

Risques d'infection:<br />

tétanos, notamment avec<br />

les plaies de piqûres (épines<br />

de rosier, clou). Faire une<br />

injection de sérum antitétanique<br />

à titre préventif.<br />

Les brûlures<br />

- Brûlures du 1er degré :<br />

une simple rougeur - un<br />

léger gonflement puis le<br />

sujet «pèle»<br />

- Brûlures du 2 e degré:<br />

douleur insupportable,<br />

cloques avec parfois<br />

li<strong>qui</strong>de limpide<br />

- Brûlures du 3 e degré :<br />

graves plaques noirâtres<br />

de tissu dévitalisé, longue<br />

cicatrisation.<br />

Traitement<br />

- 1er degré: utiliser une<br />

pommade commercialisée<br />

- 2 e degré: nettoyer la peau<br />

avec du mercurochrome<br />

par exemple. Percer les<br />

cloques avec une aiguille<br />

stérilisée et appliquer des<br />

pansements aux corps<br />

gras (tulle gras - huile<br />

gomenolée).<br />

- 3 e degré: aller à l'hôpital.<br />

Les morsures<br />

de serpent<br />

Les enfants présentent une<br />

faible résistance au venin.<br />

D'abord il faut reconnaître<br />

les serpents à la forme de<br />

leur tête.<br />

La vipère:<br />

peut varier de 30 à 80 cm<br />

de long.<br />

Sa tête est triangulaire,<br />

couverte de petites écailles,<br />

celle de la couleuvre est<br />

plus étroite et ses écailles<br />

sont plus grandes.<br />

La morsure de la vipère est<br />

caractéristique: deux<br />

petits trous bien nets, distants<br />

l'un de l'autre d'un<br />

centimètre. Un peu rouges,<br />

ces points se tuméfient et<br />

provoquent une douleur<br />

aigue. La morsure de la<br />

couleuvre par contre est<br />

formée d'une série de petits<br />

points <strong>qui</strong> ne grossissent<br />

pas et ne sont pas douloureux.<br />

A) Gestes d'urgence<br />

La personne mordue ne doit<br />

pas bouger et rester calme<br />

(l'angoisse et' la station<br />

debout accélèrent la circulation<br />

du sang, donc du<br />

poison dans l'organisme)<br />

Pratiquer immédiatement<br />

une ligature de fortune avec<br />

une cravatte, un lacet, un<br />

mouchoir. Le garrot sera<br />

fait en amont de la morsure<br />

: cela ralentit la circulation<br />

du sang.<br />

B) Traitement<br />

Se munir si possible d'un<br />

sérum antivenimeux, (ou<br />

aller l'acheter immédiatement<br />

en pharmacie). A<br />

défaut sucer le sang sortant<br />

de la blessure, (à condition<br />

de ne pas avoir de petites<br />

plaies sur les lèvres) et le<br />

recracher. Puis, bien se<br />

rincer la bouche. Appliquer<br />

de la glace sur la plaie : le<br />

froid ralentit l'absorption du<br />

poison.<br />

Transporter d'urgence le<br />

malade chez le médecin, en<br />

prenant soin, au cours du<br />

transport de laisser pendre<br />

le membre mordu et de<br />

continuer à sucer le sang.<br />

Injection de 10 à 40 cm 3 de<br />

sérum antivenimeux: antiviperin<br />

E R intramusculaire<br />

(0,1 cm3 de sérum sous la<br />

peau puis, en l'absence de<br />

signes alarmants, 0,25<br />

cm3 de sérum de 1/4 h en<br />

1/4 hl. Prévenir le médecin<br />

des réactions allergiques<br />

possibles.<br />

Il faut rester sous surveillance<br />

médicale 48 h.<br />

L'intoxicatioll<br />

a fi111entaire<br />

Avec les grosses chaleurs, il<br />

est parfois difficile de bien<br />

conserver les aliments.<br />

C'est l'époque des intoxications<br />

<strong>qui</strong> se déclarent 12<br />

ou 24 h après le repas.<br />

Signes: la nausée, suivie<br />

de vomissements. Parfois<br />

s'ajoute une diarrhée. On se<br />

sent affaibli. La fièvre peut<br />

s'élever jusqu'à 39°. La<br />

cause en est souvent une<br />

crème, une glace contaminée<br />

par un staphylocoque,<br />

ou par un germe<br />

appelé salmonella.<br />

Soins: il faut faire attention<br />

à la déshydratation.<br />

Dans ce cas, le médecin<br />

consulté aura tendance à<br />

hospitaliser le' patient.<br />

Dans tous les cas où les<br />

vomissements importants<br />

sont associés à un malaise<br />

général il faut appeler le<br />

médecin, seul juge de la<br />

conduite à tenir.<br />

Les pieds héritent des<br />

piquants de ces animaux<br />

marins. Ils sont difficiles à<br />

enlever et provoquent facilement<br />

"des infections douloureuses.<br />

Le mieux à faire<br />

est d'appliquer une bonne<br />

couche de vaseline pour<br />

ramollir la peau. Recouvrir<br />

d'un pansement et laisser<br />

toute la nuit. Le lendemain,<br />

on retire à la pince à épiler<br />

les piquants. Recommencer<br />

l'opération autant de fois<br />

que nécessaire.<br />

L '1.Jydrocution<br />

Est un choc au contact de<br />

l'eau, dû à la différence<br />

brutale de température<br />

avec l'extérieur ou à une<br />

relation allergique. Elle peut<br />

entrainer la noyade.<br />

Pour l'éviter: être prudent<br />

avec une eau inférieure à<br />

20°. S'y baigner progressivement<br />

et déjà mouillé en<br />

évitant, au préalable, les<br />

longues stations au soleil et<br />

les repas copieux.<br />

Les rayons ultra violets, <strong>qui</strong><br />

nous font bronzer, causent<br />

des dégâts: vieillissement<br />

de la peau, coups de soleils,<br />

brûlures. Donc attention,<br />

allez y progressivement et<br />

protégez toute la peau.<br />

L'insolatioll<br />

Elle commence par un fort<br />

mal à la tête et au coeur. La<br />

desydratation peut être<br />

catastrophique chez<br />

l'enfant. Il faut boire de<br />

l'eau un peu salée si possible<br />

et remplacer l'alimentation<br />

lactée de l'enfant par<br />

une soupe de carotte salée<br />

s'il a la diarrhée.•<br />

53


Guide Vacances<br />

Azzemour (Août)<br />

Moussem - Pélerinage en mai au tombeau<br />

de Rebbi Abraham Moul Niss<br />

vénéré par juifs et musulmans (chants,<br />

musique, théâtre).<br />

Asilah<br />

- Festival Culturel (Juillet/Août)<br />

-Moussem El Aouina (Juillet).<br />

Azrou (Août)<br />

Moussem.<br />

Chechaoun (Août)<br />

Moussem de Sidi Allal El Hadj.<br />

El Jadida (Juillet)<br />

Moussem de Moulay Abdellah (fantasias<br />

splendides) : vestiges de l'ancienne<br />

cité de Tit avec un ribat du XIIs.<br />

Essaouira (Mai)<br />

- Moussem Sidi Megdoul (Saint de la<br />

ville <strong>qui</strong> rappelle l'ancien nom de la<br />

cité).<br />

- Zaouiya El Kattania (Octobre).<br />

Immouzer du Kandar (Juillet)<br />

Fêtes des pommes.<br />

Larache (Juin)<br />

Moussem de Moulay Abdelkader Jilali.<br />

Marrakech (début Juin)<br />

- Folklore.<br />

- Festival National de la Fantasia (Juil/et).<br />

Mehdia (Août)<br />

Moussem de Sidi Boughara.<br />

Moulay Bousselham (Juillet!Août)<br />

Moussem religieux - Moulay Bouselham<br />

serait le soufi égyptien Abou Saïd venu<br />

au Maroc au Xs. Dans une grotte voisine,<br />

serait enterré le fils d'Aristote!<br />

<strong>Des</strong> pèlerins entrent dans la grotte sucer<br />

un stalactite sacré.<br />

Nador (Juillet)<br />

Semaine touristique.<br />

54<br />

Oujda (fin d'été)<br />

Moussem de Sidi Yahia Ben Younes,<br />

Saint patron d'Oujda invoqué par<br />

musulmans, juifs et chrétiens. Serait<br />

selon la légende St Jean Baptbte.<br />

Ourika (Août)<br />

Moussem de Setti Fatna (zaouiya)<br />

3 jours de fête.<br />

Rabat (Août)<br />

Moussem de Dar Zhour.<br />

Sefrou (Juin/Juillet)<br />

- Fête des cerises. 3 jours de fête: fantasia,<br />

retraite aux flambeaux.<br />

- Moussem Sidi Lahcen Lyoussi (Août).<br />

Sidi Ifni (Fin Juin)<br />

Moussem.<br />

Tanger (Juil/et)<br />

Festival musical du détroit.<br />

Tan Tan (Mai ou Juin ou Juil/et)<br />

Moussem des hommes bleus. Rassemblement<br />

de toutes les tribus. Moussem à<br />

caractère religieux et commercial.<br />

Danse de la guedra.<br />

Tiznit (Fin Août)<br />

Moussem de Sidi Abderrahman.<br />

Tazeroualt (Août)<br />

Moussem de Sidi Ahmed Moussa.<br />

Moussem à caractère religieux <strong>qui</strong> dure<br />

5 jours à partir du 3ème Jeudi d'Août.<br />

Moulay Idriss, Fès (Août)<br />

Moussem en l'honneur de Moulay<br />

Idriss, fondateur de la 1ère dynastie<br />

arabe du Maroc. Saint le plus vénéré.<br />

Moussem religieux. Festivités d'importance<br />

exceptionnelle.<br />

Moulay Bouzerktoun (près de Safi)<br />

1 des 7 saints regraga. Une particularité<br />

de ce Moussem : un mari ne peut retenir<br />

sa femme si elle veut y participer. Elle<br />

est libre de circuler à son gré parmi les<br />

hommes.<br />

Ketama (Août)<br />

Moussem Sidi Hadj Yacoub.<br />

Agadir (Imouzzer des IDA) (Mai)<br />

Fête du miel. Le plus grand rûcher collectif<br />

du monde. En instance de classement<br />

parmi les sites historiques.


ENTRETIEN--­<br />

AVEC----==--====<br />

LUCIENNE SAADA<br />

Pourquoi vous êtes-vous intéressée à la<br />

Geste hilalienne ?<br />

Eh bien, parce que cette geste explicite<br />

des problèmes que j'ai côtoyés. Ils sont<br />

contenus dans les thèmes principaux de<br />

cette épopée: la faim, l'errance, la<br />

condition d'étrangère, la condition<br />

féminine, la défaite ...<br />

L<br />

ucienne Soda, née à Sousse, en Tunisie, est<br />

habitée par la passion de la poésie qu'elle vit comme un<br />

carrefour de communication. Pour elle comme pour Ungareti<br />

parlant de Garcia Lorca, la poésie «est le lieu épique où<br />

. l'homme est à la fois étranger et autochtone, et où il remplit la<br />

première condition de la vie légendaire: être tout ensemble enveloppé de<br />

solitude et lié au sort de chacun ...» Bilingue (elle est licenciée d'arabe), de<br />

formation pluridisciplinaire (comme l'était son oncle Gaston Bouthoul, juriste,<br />

sociologue et politologue <strong>qui</strong> contribua à faire connaître Ibn Khaldoun en<br />

Occident), et chercheur au CNRS, sous l'égide duquel elle a mené à bien ce travail<br />

de très longue haleine, Lucienne Saada est elle-même partie sur les traces du<br />

grand historien et d'une mémoire vieille de neuf siècles: la Geste hilalienne.<br />

Mohamed Hsini est le creuset de cette mémoire. Né en 1933 dans le village de<br />

Bou Thadi, non loin de la ville de Sfax, il appartient à une famille de poètes, de<br />

musiciens et de chanteurs : neuf générations depuis deux siècles et demi ont<br />

récité la Geste. Ayant à son tour hérité du texte, qu'il tient de son grand-père,<br />

Mohamed Hsini se veut un lointin descendant des hilaliens dont il chante la<br />

Geste. Ces tribus de guerriers et de pasteurs nomades partis du désert des origines<br />

(le Nejd dans la péninsule arabique), puis de la Haute-Egypte, fuyant la<br />

famine à partir du XIème siècle, parvinrent étape après étape jusqu'en Ifrikiya,<br />

en {(quête de printemps» et de pâturages pour leurs immences troupeaux, conduits,<br />

dit-on, par 6.000 bergers. Dans sa jeunesse, Mohamed Hsini, aède de la<br />

tribu des Mathalith <strong>qui</strong> occupent la moitié du Sahel tunisien, fut lui-même<br />

berger. Jusqu'à ce jour, ce sont des milliers de vers qu'il a en tête.<br />

La rencontre puis la collaboration entre Lucienne Saada et Mohamed Hsini ont<br />

permis que ce chef-d'oeuvre de la littérature orale contant la marche vers<br />

l'Ouest (taghriba) des Béni Hilal devienne un texte littéraire de portée universelle.<br />

La Geste hilalienne est parue chez Gallimard dans la traduction de<br />

Lucienne Saadà, <strong>qui</strong> a rédigé une importante introduction. L'appareil critique<br />

. ainsi que l'index accompagnant l'ouvrage se révèlent indispensables tant aux<br />

passionnés de poésie qu'aux chercheurs. Souhaitons que la Geste hilalienne,<br />

dont le rayonnement s'étend des rives méditerranéennes aux zones subsahariennes<br />

et de la Syrie au Maghreb et jusqu'en Andalousie, suscite rencontres<br />

et colloques et trouve son public (grâce à la version en arabe à paraître)<br />

dans les pays mêmes où elle continue d'imprégner les consciences et les imaginaires.<br />

Je m'intéressais depuis longtemps à la<br />

poésie et, sur le terrain, en Tunisie, à la<br />

poésie féminine. J'ai interrogé des<br />

hommes et des <strong>femmes</strong> et, dans la<br />

foulée, j'ai recueilli presque toute<br />

l'oeuvre d'un poète de Jerba <strong>qui</strong> n'est<br />

aujourd'hui plus de ce monde. Mon<br />

terrain de travail a toujours été le sud<br />

de la Tunisie. J'ai donc demandé à ce<br />

A. Saïd<br />

poète ce qu'il savait des Béni Hilal<br />

parce que j'avais étudié l'histoire et la<br />

civilisation du monde arabe. Il m'a<br />

proposé une version <strong>qui</strong> n'était pas de<br />

lui mais qu'il avait retenue, et m'a<br />

indiqué une personne <strong>qui</strong> connaissait la<br />

version intégrale. Malheureusement, je<br />

n'ai jamais pu la rencontrer. Mais<br />

j'étais sûre qu'un jour, dans ce même<br />

57


Notes<br />

de chevet<br />

Sei Shônogon<br />

Nous sommes au Japon,<br />

autour de l'an mille. Une<br />

femme d'une trentaine<br />

d'années, extraordinairement<br />

sensible, d'un raffinement<br />

incomparable, un<br />

pinceau à la main, note sur<br />

un papier tiré du bois de<br />

fusain, des scènes vues,<br />

des images, des impressions,<br />

des couleurs, des<br />

sentiments. Sans ordre,<br />

comme cela lui vient.<br />

Dame d'honneur de la princesse<br />

Sadako, Sei Shônagon<br />

vivait au palais<br />

impérial de Kyoto. Elle<br />

appartenait au clan princier<br />

des Kiyowara. Elle n'était<br />

pas belle mais pourvue<br />

d'une voix merveilleuse.<br />

Puritaine, détestant de<br />

toutes ses forces ce <strong>qui</strong> est<br />

impur, vulgaire, bas, elle<br />

pleurait souvent, était<br />

douée d'une curiosité sans<br />

limites, lisait énormé<br />

et adorait les sarcas<br />

ces mots dont on ne se<br />

remet pas. Les «Notes de<br />

chevet» appartiennent au<br />

genre «sôsnλ (écrits<br />

intimes).<br />

Le mot «zuihitsu» duquel on<br />

désigne également ces<br />

écrits . .. ittéralement<br />

«au u pi aw>.<br />

Sei laissait aller e sa<br />

plume à tracer les<br />

et de la vie.<br />

«N t» trouve<br />

50<br />

Chine,<br />

s'a<br />

chapitres: «choses détestables»,<br />

«choses <strong>qui</strong> don·<br />

nent confiance», «choses<br />

<strong>qui</strong> rendent heureux»,<br />

«choses <strong>qui</strong> semblent vulgaires»,<br />

«choses <strong>qui</strong> font<br />

naître un doux souvenir du<br />

passé», etc.<br />

Dans «choses ratissan<br />

ttUn visage d'enfant<br />

siné sur un melon» et «on<br />

prend un joli bébé dans<br />

ses bras, un<br />

pendant q<br />

se<br />

p s'endo. C'est<br />

cieux» Sei, à


tLl-iS------conversations---<br />

'te<br />

Abdelkebir<br />

KHATIBI<br />

66<br />

On ne parle bien qu'à ceux que<br />

l'on aime. Et la qualité de<br />

l'écoute dépend beaucoup de la<br />

sympathie que nous inspire notre<br />

interlocuteur. Ces deux principes<br />

admis, on peut comprendre le<br />

pourquoi de ce «relais». Loin de<br />

l'entretien classique, commandé<br />

le plus souvent par une circonstance<br />

précise et <strong>qui</strong> met face à<br />

face un journaliste et la célébrité<br />

du jour ou de toujours, loin aussi<br />

des feux de la rampe, nous avons<br />

opté ici pour la conversation.<br />

Car au principe de celle-ci, il y a<br />

une confiance réelle. Les règles<br />

de ce dialogue à l'infini que l'on<br />

inaugure sont simples. D'abord,<br />

le choix de l'interlocuteur est<br />

libre - Kalima n'intervient guère.<br />

Ensuite, le duettiste choisi<br />

aujourd'hui doit s'engager à<br />

interviewer à son tour, le mois<br />

suivant, une personne de son<br />

choix. Et ainsi de suite. Une<br />

parole libre donc, conjuguée au<br />

pluriel, s'épanouira dans ces<br />

colonnes.


Ses fruits nous seront-ils une<br />

bonne nourriture ? Nul ne peut<br />

en préjuger. Aujourd'hui,<br />

Abdelkebir Khatibi rencontre<br />

Atika Samouh, une jeune journaliste<br />

pétillante de Fès. Ils parlent<br />

du bilinguisme, de l'autonomie<br />

de l'individu au sein du<br />

couple, de la double culture...<br />

•••<br />

A. Khatibi - Cette série d'entretiens<br />

revient au fait que la revue Kalima, en<br />

principe, donne une place à la parole<br />

féminine (mais pas exclusivement) et<br />

essaie d'engager des discussions,<br />

des entretiens, des connaissances<br />

sur la société <strong>Marocaine</strong>, et la place<br />

du féminin dans cette société.<br />

Alors comme ils m'ont interviewé<br />

moi-même, j'ai pensé que ce serait<br />

bien de créer une chaîne d'entretiens<br />

- je dirai à la fin pourquoi toi en particulier.<br />

Je donne le principe, le<br />

paradigme de l'entretien: libérer<br />

quelque part la parole refoulée entre<br />

les hommes et les <strong>femmes</strong>, les<br />

<strong>femmes</strong> et les <strong>femmes</strong>, les hommes<br />

et les hommes. Je voudrais engager<br />

une discussion sur ce qu'on peut<br />

appeler la langue du féminin, la<br />

question du bilinguisme: est ce qu'il<br />

y a effectivement une langue du<br />

féminin?<br />

Je voudrais engager le dialogue<br />

d'abord sur la langue elle même en<br />

quelque sorte. Alors, la première<br />

question que je voudrais te poser à<br />

propos de la langue du bilinguisme<br />

-quand je parle, je pose la question<br />

comme ça - à quoi penses-tu tout de<br />

suite?<br />

Atika - Je pense au bilinguisme que<br />

je vis moi-même, je pense à l'Arabe<br />

<strong>qui</strong> alterne constamment avec le<br />

Français, dans ma vie quotidienne,<br />

autour de moi, avec les gens que je<br />

connais, dans ma vie intime même,<br />

c'est un véritable va et vient entre les<br />

deux langues. Tiens, la nécessité de<br />

réfléchir à la question de la langue<br />

s'est posée à moi dès l'arrivée de<br />

mon fils <strong>qui</strong> a trois ans, je crois même<br />

t'en avoir parlé il y a quelque temps.<br />

Serait-il plus intéressant que je lui<br />

apprenne le Français en même temps<br />

que l'Arabe ou alors faudrait-il<br />

attendre qu'il fréquente l'école pour<br />

l'apprendre avec une certaine pédagogie<br />

? Parce que je ne te cache pas<br />

que j'apprécie énormément les personnes<br />

<strong>qui</strong> manipulent avec aisance<br />

les deux langues, <strong>qui</strong> saisissent la<br />

pertinence, les méthodes et la cohérence<br />

propres à chacune.<br />

Pour ma part, j'ai encore du mal à<br />

maitriser certains concepts en Arabe<br />

et quand je discute avec des amis sur<br />

des sujets sérieux, je me sens handicapée,<br />

les mots ne me viennent pas<br />

aussi facilement comme quand je<br />

parle en Français; pourtant, j'ai suivi<br />

un enseignement bilingue jusqu'au<br />

Bac, mais depuis, comme j'ai vécu<br />

une dizaine d'années à Paris, je sens<br />

que j'ai à fournir un effort supplémentaire,<br />

mais ça va venir, pas de<br />

panique!<br />

Khatibi - Tu as l'impression qu'il y a<br />

une superposition de langues, qu'il y<br />

a des lieux de vie où tu peux parler<br />

facilement dans telle langue, plutôt<br />

que dans telle autre.<br />

Atika - Tout à fait!<br />

Khatibi - Peux-tu dire des lieux où la<br />

discussion ... ce <strong>qui</strong> te vient à<br />

l'esprit...<br />

Atika - Au marché par exemple, avec<br />

les commerçants, je ne m'exprime<br />

jamais en Français; avec ma famille,<br />

il est hors de question de parler français;<br />

par contre, dès qu'il s'agit de<br />

travail, ça fonctionne en Français...<br />

alors, allez chercher d'où je tiens tout<br />

cela. Est-ce mon séjour en France <strong>qui</strong><br />

a duré assez longtemps? Est-ce mon<br />

attirance, ma fascination - je le dis<br />

tout franchement- pour cette langue<br />

depuis la 6ème au lycée? Est-ce dû à<br />

l'effort de la pratiquer constamment<br />

pour mieux la garder? Je ne sais<br />

pas...<br />

Khatibi - Bon alors, justement, quand<br />

tu étais à Paris, dans l'autre situation,<br />

comment la langue arabe était<br />

elle pratiquée par toi?<br />

Atika - Voilà, je vais te dire une<br />

chose tout de suite. Peut-être que<br />

cela arrive à d'autres personnes... la<br />

nostalgie du pays, de la langue arabe,<br />

remonte en surface dès que je suis à<br />

un kilomètre de l'autre côté de la<br />

Méditerranée.<br />

Khatibi - Peut-on dire que la langue<br />

française pour toi est la langue du<br />

travail? Peut-on dire pour toi que<br />

l'Arabe est la langue de l'affectif, ou<br />

alors c'est tantôt l'une, tantôt<br />

l'autre?<br />

Atika - Dans ce cas précis, je pense<br />

que l'Arabe reste pour moi la langue<br />

de l'affectif, mais ceci dit, je refuse<br />

l'idée que le Français soit la langue de<br />

la raison, de la clarté .. , C'est une<br />

langue affective aussi, c'est une<br />

langue d'amour ...<br />

Khatibi - On a commencé à parler de<br />

ta pratique, de la manière dont tu<br />

apprends à ton fils; tu as dit que tu<br />

lui parlais dans la langue maternelle,<br />

c'est-à-dire dans la tienne maternelle<br />

(tu es à la fois mère et langue maternelle<br />

si l'on peut dire) et gue la<br />

transmission était le premier bilinguisme.<br />

L'enfant,c'est très discuté. Il ya plusieurs<br />

théories. Il y en a une, entre<br />

autres, <strong>qui</strong> dit que la structuration<br />

dans une seule langue c'est bien, et,<br />

après, l'enfant peut apprendre<br />

d'autres langues au fur et à mesure.<br />

Donc là, ton enfant entend, il capte<br />

des messages, c'est bien qu'il en<br />

fasse quelque chose, cela va revenir<br />

dans son apprentissage.<br />

Atika - Il a compris qu'on parlait une<br />

autre langue, et il y accède graduellement.<br />

Khatibi - Est ce une langue secrète<br />

pour lui?<br />

Atika - Je crois bien car, de temps en<br />

temps, il baragouine n'importe quoi<br />

et il a l'impression de parler Français.<br />

En fait, des syllabes accrochées les<br />

unes aux autres. Mais ainsi il engage<br />

à sa façon un dialogue avec nous en<br />

Français.<br />

Khatibi - Donc, il veut accéder lui<br />

aussi à cette langue.<br />

Atika - De plus en plus, mon fils émet<br />

le désir de participer avec nous. Il<br />

nous entend parler entre nous, alors<br />

on lui explique ce qu'on est en train<br />

de dire à son sujet: qu'il est 20 h 30,<br />

par exemple, et qu'il est temps de<br />

mettre le pyjama et d'aller au lit, et il<br />

comprend ... On ne veut pas le harceler,<br />

on ne veut pas non plus qu'il<br />

reste en dehors du coup. Ma foi (rire),<br />

s'il y a des gens <strong>qui</strong> connaissent une<br />

méthode intéressante et efficace<br />

qu'ils me la passent.<br />

Khatibi - Si tu le veux on va essayer<br />

de développer à partir de cette question<br />

du bilinguisme, de langue, du<br />

rapport de l'enfant à la langue, à la<br />

langue secrète, la question par rapport<br />

aux adultes. Au Maroc,<br />

hommes/hommes, <strong>femmes</strong>/<strong>femmes</strong>,<br />

femme/hommes, il y a plusieurs<br />

espaces, il y en a quatre et un<br />

espace plus large. A partir de ce<br />

qu'on appelle le «dialogue», <strong>qui</strong>,<br />

comme tu sais, est problématique<br />

(c'est pour cela qu'on a lancé aussi<br />

cette série d'entretiens).<br />

67


que tu regardais les garçons d'un<br />

regard spécial ?<br />

Atika - Vers 15/16 ans, mais là, côté<br />

garçons, ce n'était pas la joie. Mon<br />

père organisait des «boums» à la<br />

maison. On habitait un magnifique<br />

«riad» où les jeunes couples dansaient<br />

partout (dans les pièces, dans<br />

les petites allées autour des jardins,<br />

parmi les fleurs), et nous, les filles,<br />

on les regardait discrètement danser<br />

sans pouvoir les rejoindre - ce<br />

n'était pas possible -, à cause de<br />

mes parents <strong>qui</strong> s'y opposaient, <strong>qui</strong><br />

nous interdisaient carrément d'aller<br />

«sur la piste». Pour eux, seuls les<br />

autres pouvaient danser; leurs filles,<br />

pas question! Ça aussi c'était du<br />

domaine du tabou.<br />

A partir de ce moment là, je me mis à<br />

mal vivre mon statut'de jeune fille, de<br />

femme. Je ressentais un malaise du<br />

fait de cet apartheid sexuel. <strong>Des</strong><br />

sensations de rage, de révolte montaient<br />

en moi, et les réactions éclataient.<br />

C'est ce qu'on appelle le conflit<br />

des générations, n'est-ce pas?<br />

Conflit de mentalités ...<br />

Khatibi - Et le regard paternel, est-il<br />

resté dans une tolérance?<br />

Atika - Mon père était très discret,<br />

tolérant à sa manière; il respectait le<br />

secret, ne se mêlait pas de très près<br />

des conflits mère/fille; il intervenait<br />

souvent dans le bon sens. Côté éducation,<br />

c'est ma mère, en réalité, <strong>qui</strong><br />

menait la barque. Elle est particulièrement<br />

intelligente et serviable. En<br />

plus, elle avait un atout merveilleux<br />

que j'appréciais énormément quand<br />

j'étais adolescente : elle était couturière<br />

comme je l'ai déjà dit, ce <strong>qui</strong> fait<br />

que lorsqu'on voulait une robe rapidement,<br />

pour une occasion quelconque,<br />

elle passait toute la nuit à la<br />

confectionner, et, le lendemain, la<br />

robe était repassée, suspendue à un<br />

ceintre, prête à être enfilée. Mais,<br />

hélas! pas pour aller danser! (rire)<br />

C'était magique! Et Dieu sait si le<br />

côté vestimentaire est important<br />

chez une jeune fille. Ma mère cultivait<br />

un peu ce côté là pour compenser<br />

le côté «sorties» dont elle<br />

nous frustrait ... peut-être.<br />

Khatibi - A propos, il y a aussi la<br />

double parure, il y avait les vêtements<br />

européens qu'on portait à ce<br />

moment, et les vêtements marocains.<br />

,.<br />

Atika - Je suis de la génération où on<br />

portait surtout les vêtements européens,<br />

mais, dans l'ensemble de la<br />

parure, il y avait la cérémonie du<br />

henné sur les cheveux et c'était tout<br />

un programme: l'application du<br />

hénné, la séance de la terrasse où on<br />

allait déguster des fruits fraîchement<br />

cueillis des arbres du Riad, ou l'on<br />

s'exposait au soleil pour que I.e henné<br />

sèche plus vite et que l'on obtienne le<br />

meilleur reflet, le meilleur résultat.<br />

Khatibi - Dans la parure ancienne, un<br />

exemple <strong>qui</strong> existe encore: le<br />

tatouage. Aimerais-tu être tatouée?<br />

Atika - Pas du tout, car c'est une<br />

parure <strong>qui</strong> n'est pas citadine, et<br />

j'avoue que j'appartiens à une culture<br />

foncièrement citadine. Personne<br />

autour de moi n'était tatouée. Mais<br />

l'occasion ne s'était même pas présentée<br />

pour moi... Par ailleurs, un<br />

«retour» s'est opéré chez moi concernant<br />

certains vêtements traditionnels<br />

comme la jellaba. Je sais que<br />

je n'aimais pas la porter, fut-ce pour<br />

aller au Hammam, alors qu'à présent<br />

j'ai un plaisir fou à la porter dans certaines<br />

circonstances.<br />

Khatibi - Penses-tu que la double<br />

parure correspond à une double langue?<br />

Atika - Eh oui, justement, je trouve<br />

gue le hammam est l'un des espaces<br />

OÙ le port de la jellaba correspond<br />

tout à fait. Avec, on est dans le bain!<br />

Khatibi - En ce <strong>qui</strong> concerne la<br />

double langue, la double parure, les<br />

degrés de tolérance dans la société<br />

marocaine (des hommes en particulier<br />

vis à vis des <strong>femmes</strong> gui sont<br />

dans la double langue, la double<br />

parure), il y a des seuils où l'on con-<br />

sidère la femme tantôt comme<br />

marocaine, tantôt comme européenne<br />

et les hommes n'arrivent pas<br />

toujours à se repérer.<br />

Atika - Nous avons une identité<br />

marocaine tout comme eux sont<br />

Marocains. On ne veut nullement,<br />

nous ne voulons singer ni les françaises,<br />

ni les américaines, ni <strong>qui</strong>conque.<br />

Au contraire, nous affirmons<br />

de plus en plus notre identité.<br />

Moi, je trouve que, au Maroc, les<br />

hommes sont de grands conservateurs.<br />

Par exemple, pour ce <strong>qui</strong> est du<br />

mode d'habillement ou de la coiffure,<br />

leur seuil de tolérance c'est la «nonextravagance»<br />

comme ils l'appellent.<br />

Ils n'aiment pas la fantaisie et c'est<br />

dommage ! Nous fonctionnons souvent,<br />

donc, avec le chiffre deux, mais<br />

eux aussi, ils ont accès à la double<br />

parure, non? Il Y a certaines modes<br />

qu'ils «n'avalent pas» et <strong>qui</strong> amusent<br />

beaucoup les <strong>femmes</strong>.<br />

Mais Abdelkebir, pourquoi faut-il qu'il<br />

y ait tolérance? Pourquoi chacune de<br />

nous ne serait-elle pas libre de se<br />

parer comme elle l'entend? Qu'ils<br />

ne s'in<strong>qui</strong>ètent surtout pas, nous<br />

saurons toujours comment marier<br />

l'une ou l'autre parure!<br />

Khatibi - Je crois qu'on arrive à la fin.<br />

Il ya des espaces à gérer - j'essaie<br />

de résumer la proposition sur laquelle<br />

on a discuté -, on est d'accord<br />

là-dessus. Il y a d'une part l'individualité,<br />

l'autonomie du sujet, soit<br />

masculin, soit féminin. Quand ils ont<br />

une relation, qu'elle soit maritale,<br />

amoureuse, amicale, ou affectueuse,<br />

de toute sorte, il yale troisième<br />

espace à gérer entre eux, et l'espace<br />

social et le monde extérieur.<br />

J'avais demandé à Kalima justement<br />

de lancer une chaîne. Et j'ai pensé à<br />

toi, maintenant je peux te dire pourquoi.<br />

D'une part parce que tu as une<br />

écoute, une attention que j'ai<br />

remarquée à la parole aussi bien des<br />

<strong>femmes</strong> que des hommes. C'est<br />

cette écoute <strong>qui</strong> m'a sensibilisé et<br />

c'est pour cela que j'ai souhaité voir<br />

cette chaîne commencer par toi.<br />

Alors le jeu continuera. Toi-même,<br />

dans toute ton autonomie, tu<br />

relances la chaine, et on va voir<br />

comment va évoluer cette forme de<br />

dialogue.•<br />

69


LA RECHERCHE D'ALLIANCE DANS<br />

L'ARCHIPEL DES GUERRIERES<br />

-L'OEUVRE DE JEAN TUR-<br />

Jan Tur expose au festival des orangers. Une oeuvre plastique en même temps<br />

que livresque.<br />

Méditerranéen et insulaire, puisque Baléare par son père et Corse par sa<br />

mère, jean Tur est comme voué aux i'les et aux formes marines et navales.<br />

Ses deux îles originelles, la Corse et Ibiza, il les a explorées longuement en<br />

Kayak, m.ais, comme il n'est pour lui qu'une Mer, et que seuls les archipels le<br />

passionnent, il a voulu, dès l'adolescence, et sur les traces du «Tahiti et sa<br />

c01fronne» de t'Serstevens, parcourir la Polynésie, les Iles du Vent et Sous-le­<br />

Vent, Touamotou, Mar<strong>qui</strong>ses, en goélettes à coprah.<br />

Les monts cyclopéens de Moorea, d'Hiva-Oa, les majestueuses baies d'Opounohou,<br />

de Papetoai; les coupes d'émeraudes des atolls lui révèlent ce monde<br />

d'archipels <strong>qui</strong> gisent en lui et qu'il croit retrouver.<br />

Les premiers guerriers imaginaires apparaissent en janvier 1956, les premiers<br />

navires deux ans plus tard, et bientôt la trame d'un récit se constitue sous les<br />

formes imaginées.<br />

En quelques années, plusieurs centaines de dessins, de lavis, de pastels et de<br />

maquettes font surgir au jour ce monde de cent soixante dix-huit ües qu'est<br />

l'Archipel de l'Argonaute.<br />

&lIeS, libres, autonomes, mères<br />

aussi, presque parfaites, les<br />

<strong>femmes</strong> peuvent-elles l'être<br />

sans la présence continue d'un<br />

homme à leur côté?<br />

Entre Pénélope et l'Amazone, y-a-t-il<br />

place pour un couple où le féminin et<br />

le masculin s'é<strong>qui</strong>librent et s'harmonisent<br />

en toute é<strong>qui</strong>té et différence?<br />

Toute l'oeuvre romanesque (gigantesque)<br />

de Jean TUR explore sous<br />

forme épique cette interrogation<br />

profondément universelle, où une<br />

femme idéale accueille, à l'issue d'un<br />

parcours initiatique, un homme <strong>qui</strong><br />

ne l'est pas moins. Quel parcours et<br />

quel décor! A travers des aventures<br />

aux allures et au rythme d'odyssée,i1<br />

s'agit ici d'une très symbolique<br />

recherche d'alliance entre deux<br />

archipels VOISinS: l'Empire de<br />

MAV AE et le royaume des îles<br />

AGGINS, où les GUERRIERES vivent,<br />

entre <strong>femmes</strong>, et refusent' depuis<br />

plus d'un millénaire toute alliance<br />

avec leurs voisins, plus conformes<br />

quant à eux à l'orthodoxie du couple.<br />

Un jour, cependant, venue d'au-delà<br />

des mers connues, une invasion brutale<br />

menace. <strong>Des</strong> nefs barbares sont<br />

signalées, une guerre dévastatrice<br />

est à craindre dont nul ne survivra si<br />

les deux peuples ne s'unissent. Les<br />

AGGIN, guerrières solitaires, vontelles<br />

accepter l'alliance avec les<br />

MAV AE <strong>qui</strong> seule pourra les sauver ?<br />

TECLA nouvel «Arqonaute» MAVAE<br />

est chargé d'aller gagner la confiance<br />

des AGGIN et signer le traité<br />

d'Alliance. Périple étendu sur plus de<br />

deux années, cette mission capitale<br />

mènera vers ces <strong>femmes</strong> admirables<br />

mais surtout vers son destin et... la<br />

FEMME. Irrésistible chantre du<br />

Monde, messager de la Force<br />

d'Amour, il rejoindra EYAOILLNINN,<br />

liée à ALLONE, symbole Aggin de la<br />

fécondité, et s'unira à elle.<br />

L'oeuvre «imaginaire» de Jean TUR<br />

couvre des milliers de pages et de<br />

dessins. Elle est autant plastique que<br />

livresque, mais je ne suis pas sûre<br />

qu'elle soit aussi imaginaire qu'elle le<br />

paraît! Les moeurs, les rites, les<br />

coutumes des sociétés de ces temps,<br />

leurs modes de vie, leurs logis et<br />

leurs vaisseaux, leur religion, leur<br />

écriture, leur musique même, sont<br />

décrits avec une telle minutie que je<br />

suis intimement persuadée que ces<br />

archipels existent, ignorés du temps<br />

présent, quelque part au fond du<br />

Pacifique, ou derrière les îles Baléares<br />

au creux d'un autre «triangle des<br />

Bermudes».<br />

Jean TUR en est familier. Il les a<br />

visités, il y a vécu, il y retourne<br />

encore de temps en temps sans nul<br />

doute.<br />

A le lire on ne peut que penser aux<br />

nuits de veillée d'un conteur populaire<br />

où tout semble vrai mais un peu<br />

trop fabuleux: les récits d'Ibn Battouta,<br />

au retour de ses voyages,<br />

devaient receler aussi cette profonde<br />

vérité teintée d'irréel; cette étrange<br />

aventure démesurée, attirante,<br />

cosmique et intimiste, à l'image de la<br />

vie <strong>qui</strong> passe, est l'amour d'une<br />

femme pour un homme.<br />

Patine CHAKOUR<br />

JEAN TUR expose à l'occasion de l'ETE DES<br />

ORANGERS 1986, du 13 au 26 juin, 1, rue<br />

Ghazali Diour Jamâa - Rabat.<br />

71


tembre 1985. Une misère.<br />

Tous les deux ans, le<br />

ministre de l'Emploi <strong>qui</strong>,<br />

comme le père Noël, fait<br />

une apparition par an à la<br />

T.V., toujours le 31 Avril au<br />

soir, déclame d'une voix<br />

traînante: «A partir de<br />

demain, 1er mai, le smig<br />

sera augmenté de 10 % ou<br />

de 20 %». Mais quand bien<br />

même on l'augmenterait de<br />

100 %, le smig resterait le<br />

smig, quelque chose<br />

d'effroyablement bas.<br />

Parce qu'il est, à la base,<br />

effroyablement bas.<br />

Lui: Je crois que le smig est<br />

une catégorie découplée du<br />

réel. Il ne correspond plus<br />

aux exigences de la reproduction<br />

de la force de travail<br />

et de son entretien. On<br />

a l'impression qu'il a été<br />

établi à l'intention d'un<br />

travailleur <strong>qui</strong> vit de travail<br />

et d'eau fraîche. Dans une<br />

société où tout est gratuit,<br />

non marchand.<br />

Elle: Je précise d'avantage<br />

mon idée de départ. Au<br />

Maroc le salaire est considéré<br />

comme un coût qu'il<br />

74<br />

faut à tout prix réduire au<br />

niveau le plus bas. Il n'est<br />

nullement envisagé, aussi,<br />

comme une demande qu'il<br />

est nécessaire de chercher<br />

à augmenter afin de réaliser<br />

la production, c'est-à-dire<br />

de vendre plus.<br />

Lui: Tu mets le doigt ici sur<br />

un point nodal. La stratégie<br />

de développement en<br />

oeuvre au Maroc depuis, en<br />

particulier, 1973 est<br />

fondée sur la promotion des<br />

exportations. Dans ces<br />

conditions, le marché<br />

interne n'a pas une fonction<br />

de régulation de l'accumulation.<br />

C'est-à-dire de mise<br />

en relation d'une production<br />

et d'un pouvoir d'achat<br />

principalement domestiques.<br />

Mais d'une production<br />

destinée à l'exportation<br />

et d'une consommation<br />

domestique <strong>qui</strong> porte sur<br />

une production importée,<br />

totalement ou partiellement.<br />

C'est le marché<br />

externe <strong>qui</strong> assure cette<br />

régulation. Dans ces conditions,<br />

le marché interne est<br />

inessentiel. A la limite on<br />

peut le gommer. Et dans le<br />

même mouvement gommer<br />

la demande domestique, les<br />

salaires.<br />

Elle: Et dans ces conditions,<br />

moi je comprends les<br />

majorations du smig<br />

comme un moyen de régulation<br />

sociale et non économique.Fondamentalement.<br />

Lui: C'est surtout l'inflation<br />

<strong>qui</strong> détermine, de<br />

temps à autre, une pulsion<br />

vaporeuse du smig à la<br />

hausse.<br />

Elle: L'inflation est, depuis<br />

le début des années 70,<br />

supérieure à 10 %, annuellement.<br />

Le chiffre est officiel!<br />

On voit sans peine<br />

qu'elle surcompense largement<br />

la hausse du smig.<br />

Certains calculs font ressortir<br />

que pour retrouver le<br />

niveau de 1973 il faudrait<br />

augmenter le smig de<br />

400 % au moins.<br />

Lui: On peut remarquer que<br />

de 1962 à 1971 il n'y a pas<br />

eu une seule revalorisation<br />

du smig.<br />

Elle: L'inflation est, tout au<br />

long de la décennie 60, de<br />

2,5 % en moyenne par an.<br />

Lui: Le smig pour les<br />

<strong>femmes</strong> était inférieur à<br />

celui des hommes.<br />

Elle: L'uniformisation du<br />

smig entre les sexes<br />

n'interviendra qu'en 1975.<br />

Il convient de noter aussi<br />

que le smig variait, avant<br />

1971, d'une région économique<br />

à l'autre. Ce <strong>qui</strong><br />

poussait les gens à aller<br />

chercher du travail dans les<br />

régions où le smig était le<br />

moins bas: Casablanca en<br />

particulier.<br />

Lui: Il y a un argument <strong>qui</strong><br />

est très souvent avancé :<br />

les augmentations de<br />

salaires provoquent l'inflation.<br />

Elle: C'est un argument<br />

théorique, je veux dire abstrait,<br />

formel. On ne peut pas<br />

dire ca concrètement du<br />

Maroé, puisque le partage<br />

salaires/profits est désormais<br />

en faveur des profits.<br />

De plus, dans un système<br />

où les prix ne sont pas<br />

administrés, la répercussion<br />

ne reflète pas exactement


FEMMES SANS FRONTIERES<br />

BENAZIR<br />

BHUTTO<br />

La «Cory» du Pakistan<br />

Décidément, côté politique, un sacré remue-ménage agite<br />

les rangs féminins. Après Corazon A<strong>qui</strong>no <strong>qui</strong>, de gentille<br />

femme au foyer se transforme en passionara de la lutte<br />

des peuples avant de devenir tout bonnement Madame la<br />

Présidente, c'est au tour de Benazir Bhutto de revenir au<br />

pays avec une seule idée: prendre le pouvoir,<br />

A l'ombre des grands hommes, dit-on, se trouve toujours une grande<br />

dame. Si celles-ci se mettent toutes en tête de sortir à la lumière pour<br />

continuer l'oeuvre de leur époux ou de leur père, ça nous promet de<br />

sacrés changements.<br />

Avant de s'amuser à descendre leurs opposants, les dictateurs<br />

auraient intérêt à savoir <strong>qui</strong> se tient à leur côté.<br />

Gare à la multiplication des Cory et des Benazir, auquel cas, c'est la<br />

pagaille assurée pour l'auguste famille politique internationale.<br />

«Une écolière <strong>qui</strong> rongeait ses<br />

ongles», tel est le souvenir de<br />

«Pinky» Bhutto <strong>qui</strong> revient à la<br />

mémoire d'une de ses anciennes<br />

condisciples. C'était il y a vingt ans, à<br />

l'époque où le père de B'enazir Bhutto<br />

était ministre des Affaires étrangères<br />

du Pakistan. Depuis, beaucoup de<br />

choses ont changé ... Ali Bhutto est<br />

tombé en disgrâce puis a refait surface<br />

comme le leader politique le plus<br />

populaire du Pakistan. Il a tenu avec<br />

son parti, le Parti du peuple pakistanais<br />

(P.P.P.), les rênes du gouvernement<br />

de 1970 à 1977. Le coup<br />

d'Etat militaire du général Zia UI HaQ<br />

76<br />

- souvent appelé «le Thermidor de<br />

77» - renversa le Premier ministre<br />

et son gouvernement civil: Ali<br />

Bhutto fut jugé pour meurtre et<br />

pendu en avril 1979 sur les ordres du<br />

général Zia.<br />

Le «bhuttoïsme» a ressuscité en la<br />

personne de Benazir Bhutto, sa fille<br />

âgée de 34 ans, élevée à Oxford et<br />

Radcliffe, <strong>qui</strong> est revenue au<br />

Pakistan le 10 avril dernier après 25<br />

mois d'exil. Exploitant largement la<br />

liberté consécutive à la levée de la loi<br />

martiale intervenue fin décembre<br />

1985 et tirant profit des années de<br />

frustration provoquées par le statu<br />

quo officiel, Benazir Bhutto, presIdente<br />

du P.P.P., soulève les foules.<br />

Dans l'interview exclusive qu'elle a<br />

accordé à Anjum Niaz de l'Agence<br />

Femmes Information, Benazir Bhutto<br />

fait le point.<br />

Anjum Niaz : Quelles sont vos exigences?<br />

Benazir Bhutto: Je veux le départ du<br />

président Zia UI HaQ et des élections<br />

anticipées à l'automne (*). Le peuple<br />

est derrière moi pour souhaiter un<br />

(*) Les dernières élections ont eu lieu en<br />

février 1985,


changement de gouvernement.<br />

Pendant neuf ans, le gouvernement<br />

actuel a conspiré contre mon parti et<br />

ma famille. Ils ont pendu mon père,<br />

ils m'ont emprisonnée et maintenant<br />

le décès de mon frère Shahnawaz en<br />

juillet dernier à Cannes où il vivait<br />

avec sa famille est présenté comme<br />

un suicide. Il y a une conspiration<br />

contre nous. J'en révèlerai les détails<br />

en temps voulu. S'il s'était agi d'un<br />

suicide, les autorités françaises<br />

n'auraient pas été aussi longues à<br />

rendre leur verdict. Maintenant les<br />

Français devront décider de maintenir<br />

la thèse de l'assassinat ou<br />

d'abandonner pour insuffisance de<br />

preuves.<br />

-Pensez-vous être la Cory A<strong>qui</strong>no<br />

du Pakistan ?<br />

- Je n'ai pas la prétention d'être une<br />

Cory. Je ne la connais pas mais<br />

beaucoup de gens font la comparaison<br />

entre nous deux. J'admire sa<br />

ténacité, son courage et sa détermination.<br />

Je pense qu'elle a été capable<br />

d'utiliser efficacement le pouvoir du<br />

peuple pour la démocratie dans son<br />

pays et j'espère pouvoir le faire aussi<br />

utilement dans le mien.<br />

-Avez-vous un programme spécifique<br />

d'émancipation des <strong>femmes</strong>?<br />

- J'ai toujours été persuadée qu'il ne<br />

devait pas y avoir de discrimination<br />

fondée sur le sexe. Mon parti a toujours<br />

considéré que les hommes et<br />

les <strong>femmes</strong> doivent travailler<br />

ensemble pour jouer leur rôle plein et<br />

entier dans la société. Notre gouvernement<br />

dans le passé avait recruté<br />

des <strong>femmes</strong> dans la police, l'administration.<br />

Mais sous la loi martiale,<br />

les salaires et la promotion des<br />

<strong>femmes</strong> en place ont été bloqués.<br />

Cela n'est pas juste. Ce n'est pas ce<br />

que nous voulons. <strong>Des</strong> hommes et<br />

des <strong>femmes</strong> se sont battus pour la<br />

liberté, ont été emprisonnés, torturés.<br />

Ils ont essayé ensemble de<br />

faire face à toutes les situations et je<br />

pense que, dans l'avenir, la société<br />

sera bâtie avec des hommes et des<br />

<strong>femmes</strong> sur un pied d'égalité.<br />

-Avez-vous l'intention d'abolir les<br />

lois promulguées par ce gouvernement<br />

<strong>qui</strong> ne traitent pas les<br />

<strong>femmes</strong> comme des êtres humains<br />

égaux des hommes?<br />

- Nous ne croyons pas aux lois <strong>qui</strong><br />

rabaissent le statut des <strong>femmes</strong>.<br />

Nous ne croyons pas aux lois discriminatoires.<br />

- Vos critiques disent que votre<br />

popularité va probablement<br />

s'éteindre. Selon eux, vous allez<br />

vous brûler les alles parce que vous<br />

n'avez pas suffisamment d'expé-<br />

rience de la politique pakistanaise,<br />

vous avez isolé les personnalités les<br />

plus fortes de votre parti, vous allez<br />

finalement tomber en panne.<br />

- Alors je sais que je vais réussir<br />

parce qu'il ont dit exactement la<br />

même chose de mon père quand le<br />

peuple est descendu dans la rue pour<br />

le soutenir! C'est pourquoi je prends<br />

cela comme des compliments.<br />

- Vous faites des promesses aux<br />

pauvres. Serez-vous en mesure de<br />

les tenir quand vous serez au pouvoir?<br />

- Je ne pense pas avoir fait de promesse<br />

jusqu'à présent. Pourquoi?<br />

Parce que tout ce dont j'ai parlé,<br />

notre parti l'avait déjà fait dans le<br />

passé. Je n'ai rien dit de l'avenir. Les<br />

salaires ouvriers? Nous les avions<br />

déjà fixés quand nous étions au gouvernement<br />

et indexés sur le prix de la<br />

farine. L'agriculture de subsistance?<br />

Nous l'avions déjà créée. C'est le<br />

minimum <strong>qui</strong> doit être fait et sur<br />

lequel on ne peut pas discuter mais<br />

cela illustre bien comment le gouvernement<br />

du président Zia Ul Haq se<br />

soucie peu de son peuple.<br />

-Allez-vous venger la mortde votre<br />

père?<br />

- Je pense que mon père a été vengé<br />

à plusieurs reprises. Par exemple<br />

quand je suis revenue d'exil, ce<br />

n'était pas ma victoire. Ma revanche<br />

n'était pas celle de mon père mais de<br />

tous ceux <strong>qui</strong> sont morts, <strong>qui</strong> ont été<br />

tués et pendus. Je les sentais venir<br />

vers moi, je les sentais marcher à<br />

mes côtés quand j'ai fait le tour du<br />

pays. Partout où il y a eu des rassemblements<br />

populaires, je sentais<br />

que nos martyrs étaient là. Les<br />

choses s'arrangent pour nous à présent.<br />

Il y a cependant toujours une<br />

note de tristesse; je crois que c'est<br />

la meilleure revanche. Vous savez, je<br />

peux moi aussi m'embarquer dans<br />

une politique de vengeance mais je<br />

pense qu'alors le Pakistan serait pris<br />

dans un goulot d'étranglement.<br />

Laissons donc le parti et le Parlement<br />

décider. Laissons la loi suivre son<br />

propre cours mais j'userai de mon<br />

influence pour le pardon et la modération.<br />

- Le président Zia a refusé les élections<br />

que vous demandiez. Ce <strong>qui</strong><br />

sign(fie affrontement?<br />

- Eh bien, s'ils veulent l'affrontement<br />

... Espérons que non. La balle<br />

est dans leur camp.<br />

(Traduction Anne Collet<br />

et Caroline Helfterl<br />

Interview réalisée par<br />

Anjum Niaz / AFI<br />

77


LESIEUR,UNE LARGE GAMME<br />

D'HUILES DE TABLE ET D'HUILES D'OLIVES<br />

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