TelQuel n°1 - Contrechamps
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Dans l’Ader<br />
Intérieur, la vie des régions<br />
Tahoua ploie<br />
sous le poids<br />
des exodants<br />
qui refluent<br />
d’Abidjan<br />
Dans l’Ader, les jeunes ont<br />
toujours rêvé d’aller chercher<br />
fortune en Côte d’Ivoire ou en<br />
Libye. Cette fièvre de l’exode sévit dans<br />
tous les foyers. Mais certains exodants<br />
rentrent au pays. Plusieurs ressortissants<br />
des villages d’Afalla, Barmou, Takanamatt<br />
et Toudoumi ont commencé à fuir la Côte<br />
d’Ivoire depuis mars dernier. Il y a donc<br />
dix mois déjà que certains ont compris que<br />
les choses tournaient mal. C’est le cas de<br />
Mahamane Sanda, un tailleur de<br />
Takanamatt. Il a vécu vingt ans à Abidjan,<br />
où il a gagné beaucoup d’argent. Par<br />
exemple, dit-il, “ à la veille de Noël ou du<br />
Nouvel An, tout comme à la veille de la fête<br />
du mouton, il m’arrivait de gagner<br />
100.000 F cfa pendant dix jours de<br />
couture.” Aujourd’hui, il est heureux<br />
comme Ulysse. Il a son atelier de couture<br />
en face du grand marché de Tahoua. En dix<br />
mois d’activité, il atteint à peine sa recette<br />
mensuelle d’Abidjan, mais il est fier de<br />
vivre à côté de ses parents.<br />
Trois natifs du village de Toudouni étaient<br />
eux, respectivement, vendeur de thé,<br />
commerçant en fripes et portefaix à<br />
Abidjan. Depuis leur retour au Niger, il y a<br />
dix mois, tous ont dû renoncer à leur métier<br />
d’exodant pour s’adonner à la pratique des<br />
cultures maraîchères à Adouna. Ils<br />
estiment pourtant avoir “eu de la veine”.<br />
Leurs frères restés en Côte d’Ivoire,<br />
jusqu’à la dernière minute des événements,<br />
l’ont appris à leurs dépens. Certains sont<br />
rentrés au bercail bredouilles, épuisés et<br />
malades.<br />
M. Abba Moussa, chef du canton de<br />
Tahoua depuis 1976, et son cousin Azza<br />
Habi Balé Ibn Issa, déclarent que la<br />
situation des exodants mérite une attention<br />
particulière. Les deux dignitaires de la ville<br />
de Tahoua rappellent aux populations de<br />
l’Ader que les exodants ont largement<br />
contribué au développement de l’économie<br />
rurale dans l’Ader. Maintenant, tout le<br />
monde sait que leurs conditions de vie se<br />
dégradent, là-bas, en Côte d’Ivoire. “Nous<br />
avons donc intérêt à mobiliser nos<br />
énergies pour leur témoigner notre<br />
solidarité et favoriser leur réinsertion<br />
sociale dans l’Ader qu’ils ont beaucoup<br />
aimé. ” C’est en ces termes que les deux<br />
personnalités ont voulu inciter les<br />
Adérawas à accueillir à bras ouverts leurs<br />
frères musulmans contraints d’abandonner<br />
leur seconde patrie. À Badaguichiri, à<br />
Goaram, à Tabotaki, Founfouye et<br />
Alakaye, d’autres habitants sont en plein<br />
désarroi, sans nouvelles de leurs parents<br />
restés en Côte d’Ivoire.<br />
Mahamadou Mamoudou, dit Ravic,<br />
à Tahoua<br />
Dans l’AÏR<br />
Agadez la touristique<br />
réclame son aéroport<br />
«libyen»<br />
Le directeur de la Sobafor se défend d’être responsable du retard<br />
des travaux.<br />
Dans le souci de relancer l’économie<br />
du pays en général et la saison<br />
touristique dans la région<br />
d’Agadez en particulier, l’Etat<br />
nigérien a engagé, depuis le 16 juillet 2001, un<br />
grand chantier à l’aéroport d’Agadez. Pour<br />
permettre à de gros avions de se poser à nouveau<br />
sur la piste de l’aéroport Mano Dayak, il faut<br />
réhabiliter cette dernière aux normes<br />
européennes, sur 3 000 mètres de long et 45 de<br />
large.<br />
Les travaux, confiés à la société nigérienne<br />
Sobafor, devaient prendre fin le 30 décembre<br />
2002. Mais ils accusent un sérieux retard.<br />
Agadez s’impatiente et proteste. L’inquiétude<br />
grandit car la saison touristique à venir est<br />
entièrement suspendue à la réouverture de<br />
l’aéroport. En deux ans, les recettes touristiques<br />
se sont effondrées de 70 % dans la cité de l’Aïr.<br />
Quand l’aéroport Mano Dayak sera-t-il enfin<br />
prêt ? Y’aura t’il des touristes cette année ? De<br />
l’hôtelier le plus modeste au “chasse-touristes”<br />
le plus entreprenant, du plus petit artisan aux<br />
plus grandes agences de la place, tout Agadez<br />
attend. “ Cela fait des années que je comptais<br />
sur une saison touristique digne de ce nom pour<br />
récupérer les investissements que j’ai<br />
faits. Nous sommes vraiment dépassés par cette<br />
affaire.” Ces propos de Mme Agaïcha, dite<br />
Bibi, propriétaire du restaurant Orida, illustrent<br />
l’inquiétude qui prévaut actuellement. Pressée<br />
d’accueillir les nouveaux visiteurs, la ville est en<br />
ébullition depuis des mois. Quand les travaux<br />
ont commencé, tous les privés travaillant dans<br />
le secteur du tourisme se sont endettés pour<br />
innover, améliorer leurs structures. “Nous avons<br />
fait des démarches auprès des opérateurs<br />
économiques, et cela fait deux ans que nous<br />
attendons. Nous perdons de l’argent, couvrons<br />
à peine nos dettes sans parler du manque à<br />
gagner fiscal pendant le dépassement du délai,<br />
soit une année”, précise Joula Moussa Akly,<br />
président du syndicat du tourisme du Niger.<br />
“Si, d’ici le mois de février, la société ne nous<br />
fournit pas un courrier spécifiant la date de fin<br />
des travaux que nous présenterons à nos clients<br />
au plus tard en mars, aucun tour opérateur ne<br />
proposera la destination Agadez pour la saison<br />
2003-2004. Et cela serait catastrophique.”<br />
Le préfet d’Agadez, Yahaya Yandaka, renchérit :<br />
“ Nous nous sommes rendus 14 fois sur le site<br />
afin d’accélérer les choses mais hélas, malgré<br />
notre volonté et celle de l’Etat que nous<br />
représentons, l’irréparable a eu lieu. C’est un<br />
énorme gâchis. Cet aéroport est très important<br />
pour le pays. Beaucoup de compagnies, comme<br />
Afriquiah Airways, attendent qu’il soit terminé<br />
Les travaux de construction de la nouvelle piste d’Agadez<br />
pour ajouter Agadez à leurs destinations. ”<br />
Alors pourquoi ce retard ? Il semble que<br />
l’entreprise Sobafor soit bloquée en attendant<br />
la livraison d’une centrale de béton bitumineux,<br />
achetée tout récemment en Libye. Plus de la<br />
moitié des éléments composant cette machine,<br />
six camions sur huit, manquent encore. Principal<br />
accusé de toute cette affaire, Alhousseyni Sidi<br />
Mohamed, le directeur de la Sobafor, se défend<br />
vigoureusement : “ si les travaux ont accusé un<br />
tel retard, ce n’est ni à cause d’un manque de<br />
compétence comme certains le croient, ni<br />
par volonté de sabotage comme d’autres le<br />
pensent. Mais tout simplement à cause d’un<br />
certain nombre d’événements survenus au début<br />
des travaux et qui ont rendu nécessaire<br />
l’allongement du délai imparti.”<br />
“ Au début, il était prévu une piste de 3.000<br />
Une femme de la brousse<br />
de Tahoua a accouché,<br />
dans les derniers jours de<br />
janvier, à la maternité<br />
Tassighi à Tahoua, de<br />
Insolite<br />
mètres de long sur 45 de large avec une<br />
épaisseur de 80 cm de gravier concassé. Mais<br />
par la suite, des modifications ont été apportées:<br />
on a, par un avenant au contrat, augmenté de<br />
30 cm l’épaisseur du revêtement. ” Les camions<br />
arriveront le 5 février au plus tard, affirme le<br />
patron de la Sobafor, précisant que ce type de<br />
machine est rare dans la sous-région. Lorsqu’elle<br />
sera installée, deux semaines plus tard maximum,<br />
il faudra dix à onze jours, à raison de huit heures<br />
de travail par jour, pour achever la piste. “Tout<br />
sera terminé fin février, début mars au plus<br />
tard”, a-t-il promis. En tous cas, ajoute-t-il, “je<br />
n’ai jamais été menacé de résiliation ni de<br />
pénalité. Rien ne m’a été reproché ni sur le plan<br />
technique, ni sur le plan de la collaboration. ”<br />
Ibrahim Manzo Diallo à Agadez et<br />
Hadiza Aouadé<br />
4 têtes pour 2<br />
deux jumeaux dont l’un à<br />
trois têtes.<br />
Elle a été transférée à<br />
Niamey avec ses enfants<br />
dans un état grave.<br />
février 2003 -<br />
TELQueL<br />
7<br />
Photo : D.R.