Traitement du carcinome intracanalaire du sein
Traitement du carcinome intracanalaire du sein
Traitement du carcinome intracanalaire du sein
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
<strong>Traitement</strong> <strong>du</strong> <strong>carcinome</strong> <strong>intracanalaire</strong> <strong>du</strong> <strong>sein</strong><br />
Eric SEBBAN<br />
241 rue <strong>du</strong> faubourg St Honoré, Paris<br />
INTRODUCTION<br />
20% des tumeurs mammaires malignes appartiennent à la famille <strong>du</strong> <strong>carcinome</strong> intra canalaire<br />
et ne sont pas palpables.<br />
Leur dépistage repose donc sur la mammographie qui les détecte sous forme de<br />
microcalcifications. Le problème principal posé par ces microcalcifications est qu’elles sont<br />
souvent bénignes, et qu’il importe donc de les opérer avec discernement, sans toutefois<br />
méconnaître un cancer.<br />
Nous n’évoquerons pas dans cet article les indications respectives des prélèvements<br />
histologiques type macrobiopsie par Mammotome ou biopsie chirurgicale sous anesthésie<br />
après repérage radiologique, mais nous détaillerons par contre le chapitre consacré au<br />
<strong>carcinome</strong> in situ, notamment le <strong>carcinome</strong> intra canalaire.<br />
MATERIEL ET METHODES<br />
Cette série porte sur 728 patientes qui ont eu un repérage radiologique pré opératoire dont 400<br />
pour des microcalcifications.<br />
Dans la très grande majorité des cas, celles ci ont été découvertes de façon fortuite sur une<br />
mammographie systématique.<br />
CRITERES D’EXERESE<br />
Les critères d’exérèse de ces microcalcifications ont été basés sur la classification de Le Gal<br />
et plus récemment sur l’utilisation de la classification de l’ ACR ( American College of<br />
Radiology ) que nous ne détaillerons pas.<br />
RESULTATS<br />
Les résultats sont les suivants sur la série de 400 microcalcifications opérées :<br />
- 60% de lésions bénignes ( mastose, hyperplasie )<br />
- 40% de lésions malignes<br />
o <strong>carcinome</strong> intra lobulaire ( CIL ) 8%<br />
o <strong>carcinome</strong> intra canalaire ( CIC ) 59%<br />
o CIC micro infiltrant 13%<br />
o Carcinome infiltrant ( CI ) 20%<br />
La définition de la micro infiltration est anatomopathologique : l’infiltration concerne au<br />
maximum 2 mm²
Tableau 1 : <strong>Traitement</strong> des <strong>carcinome</strong>s infiltrants<br />
nombre traitement N<br />
CIC micro infiltrant 20 16 reprises lit tumoral + curage<br />
20 mammectomies curage<br />
2 N+<br />
CIC infiltrant 32 20 reprises lit tumoral + curage<br />
12 mammectomies curage<br />
4 N+<br />
Les résultats retrouvés en cas de cancer invasif sont résumés dans le tableau 1 .<br />
La radiothérapie a concerné 80% des patientes ( 42/52 ).<br />
Tableau 2 : <strong>Traitement</strong> des <strong>carcinome</strong>s in situ :<br />
CIL<br />
CIC<br />
nombre traitement<br />
14 14 tumorectomies ( initiale )<br />
94 56 tumorectomies ( initiale )<br />
16 reprise lit tumoral + curage N-<br />
22 mammectomies curage N -<br />
14 <strong>carcinome</strong>s intra lobulaires ( CIL ) ont été retrouvés et on s’est alors contenté de la<br />
tumorectomie initiale ( tableau 2 ).<br />
Effectivement, l’exérèse était complète avec des lésions de petite taille.<br />
De plus, on connaît leur caractère radio résistant.<br />
94 <strong>carcinome</strong>s intra canalaires ( CIC )ont donc été diagnostiqués ( tableau 2 ): pour 56 d’<br />
entre eux, la tumorectomie initiale a été suffisante ( lésion de petite taille avec index de Van<br />
Nuys faible ).<br />
Dans 16 cas, une reprise <strong>du</strong> lit tumoral a été nécessaire car l’exérèse était non in sano ou<br />
limite avec un index de Van Nuys intermédiaire.<br />
Dans 22 cas, une mammectomie a été décidée : les lésions étaient diffuses avec un index de<br />
Van Nuys élevé et des lésions de comédo <strong>carcinome</strong>.<br />
56 de ces 94 patientes ont bénéficié d’une irradiation mammaire :<br />
- les 16 patientes ayant eu une reprise <strong>du</strong> lit tumoral<br />
- 40 des 56 ayant eu une tumorectomie simple.<br />
PARTICULARITES DU CARCINOME INTRA CANALAIRE ( CIC )<br />
Généralités<br />
Les CIC représentent actuellement 20% des tumeurs mammaires alors qu’ils ne représentaient<br />
que 5% il y a 20 ans, et ceci, grâce aux progrès <strong>du</strong> dépistage notamment mammographique.<br />
La définition est la suivante : il s’agit de la prolifération de cellules ayant tous les caractères<br />
de la malignité mais demeurant encloses à l’intérieur des canaux galactophoriques, sans<br />
aspect de pénétration de la basale en microscopie optique. Il peut prendre son point de départ<br />
en n’importe quel point de l’arbre galactophorique mais naît le plus souvent dans l’unité<br />
terminale <strong>du</strong>ctulo lobulaire.<br />
La relecture des lames par plusieurs pathologistes est parfois nécessaire, compte tenu de<br />
difficultés diagnostiques potentielles avec les hyperplasies atypiques et les lésions de microinfiltration.<br />
Il suscite encore trop fréquemment des mammectomies qui sont souvent inutile, étant donné<br />
l’efficacité <strong>du</strong> couple chirurgie conservatrice et radiothérapie.
Evolution<br />
Le CIC est considéré comme le stade de développement le plus précoce <strong>du</strong> cancer <strong>du</strong> <strong>sein</strong>.<br />
Mais tous les cancers invasifs ne sont pas précédés par un CIC et à l’inverse, un CIC peut<br />
rester en l’état pendant de nombreuses années. Il est impossible de connaître ceux qui sont<br />
susceptibles de dégénérer.<br />
La taille et le type histologique ont un rôle à jouer.<br />
Idées reçues<br />
- La mammectomie est l intervention de référence, avec une survie de 98% à 10 ans, car<br />
il est parfois difficile d’enlever la totalité <strong>du</strong> tissu glan<strong>du</strong>laire et que la récidive est<br />
donc possible.<br />
Elle doit emporter la plaque aréolo mammelonnaire.<br />
On en arrivait au paradoxe d’employer une chirurgie radicale mutilante pour une<br />
lésion de bon pronostic alors que l’on propose des traitements conservateurs en cas de cancer<br />
invasif.<br />
- Le traitement conservateur n’est pas possible : on a longtemps hésité à proposer un<br />
traitement conservateur sur 2 arguments :<br />
o La maladie serait d’emblée multicentrique<br />
o Les CIS seraient radiorésistants<br />
Il est désormais clairement établi que cette maladie se propage de proche en proche, de<br />
façon segmentaire, en suivant le trajet des galactophores ( travaux de Holland )<br />
Il s’agit donc d’une maladie multifocale ( plusieurs foyers dans le même quadrants ) et non<br />
multicentrique ( plusieurs foyers dans d’autres quadrants ).<br />
Index de Van Nuys<br />
Le traitement actuel <strong>du</strong> CIC repose sur l’index de VAN NUYS ( IVN ), et ce depuis la<br />
conférence de consensus de Philadelphie en 1997.<br />
Il prend en compte 3 paramètres qui vont de 1 à 3 et s’additionnent :<br />
- le score histologique selon SILBERSTEIN<br />
- le score de la taille de la tumeur<br />
- le score des marges saines<br />
Tableau 3 : index de Van Nuys :<br />
1 2 3<br />
Score histologique Fonction <strong>du</strong> degré de nécrose<br />
Score taille tumeur 10 mm 11 à 40 mm sup. à 40 mm<br />
Score marges saines sup. à 10 mm 1 à 9 mm Moins de 1 mm<br />
L’intérêt de cet IVN est triple :<br />
- simplicité<br />
- valeur pronostique<br />
- caractère repro<strong>du</strong>ctible<br />
Cet index permet de définir 3 groupes de patientes avec des potentiels de récidive<br />
différents :<br />
- score à 3 : une tumorectomie simple suffit<br />
- score de 4 à 7 : il faut effectuer une reprise <strong>du</strong> lit tumoral avec irradiation sur le <strong>sein</strong><br />
conservé<br />
- score supérieur à 7 : il faut recourir à la mammectomie
Il est fondamental qu’apparaisse dans le compte ren<strong>du</strong> anapath les éléments suivants :<br />
- grade nucléaire, nécrose, polarisation et type architectural<br />
- il faut aussi préciser la taille, les limites d’exérèse et la topographie des lésions<br />
- il faut examiner un nombre suffisant de prélèvements afin de ne pas méconnaître un<br />
foyer micro invasif<br />
- d’après Lagios, le risque d’invasion est corrélé à la croissance tumorale : 2% pour les<br />
lésions de petite taille mais 29% pour les lésions de plus de 3 cm.<br />
Qualité de l’exérèse<br />
. L’importance ( et la qualité ) de l’exérèse chirurgicale est fondamentale et il est préférable<br />
de recourir à la mammectomie en cas de volumineuse tumeur supérieure à 4 cm, et ce, quel<br />
que soit l IVN.<br />
. Entre 30 et 40 m, en cas de <strong>sein</strong> de toute petite taille, il faut parfois privilégier la<br />
mammectomie avec reconstruction immédiate plutôt qu’effectuer un traitement conservateur<br />
source de mauvais résultat esthétique.<br />
. En cas de tumorectomie initiale avec marges envahies, il est impératif de proposer une<br />
reprise <strong>du</strong> lit tumoral.<br />
Place <strong>du</strong> curage axillaire<br />
Le taux d’envahissement ganglionnaire en cas de CIC varie de 0 à 2%.<br />
Cela correspond aux cancers micro invasifs ou invasifs passés inaperçus.<br />
On peut l’effectuer en cas de :<br />
- lésion micro invasive associée<br />
- lésion invasive associée<br />
- volumineux comédo<strong>carcinome</strong><br />
- CIC supérieur à 40 m<br />
Dans ce cas, il s’agit d’un curage axillaire inférieur et on ne prélève que le 1° étage de Berg.<br />
En pratique, un curage limité est conseillé uniquement en cas de mammectomie.<br />
La procé<strong>du</strong>re <strong>du</strong> ganglion sentinelle n’est pas encore validée en cas de CIC.<br />
Kauber a publié en 2000 une série de recherche de ganglion sentinelle pour CIC chez 76<br />
patientes dont 12% présentaient des micrométastases : quelle attitude adopter ?<br />
Place de la radiothérapie<br />
La chirurgie exclusive est source de nombreuses récidives et c’est la raison pour laquelle il est<br />
souhaitable d’y associer une radiothérapie.<br />
CIC : traitement par tumorectomie exclusive<br />
Nb patientes suivi % récidives<br />
Lagios 1997 79 11 ans 18%<br />
Ottesen 1992 112 5 ans 15%<br />
Schwatz 1992 72 4 ans 27%<br />
Fischer 1998 407 8 ans 26%<br />
- La chirurgie exclusive sans irradiation n’est possible que dans le cadre d’essais<br />
contrôlés, pour des petites tumeurs avec marges saines et faible IVN.
Tableau 4 : étude NSABP et EORTC sur l’intérêt de la radiothérapie<br />
B17 <strong>du</strong> NSABP Tumorectomie Tum + radiotherapie p<br />
N = 403 N = 411<br />
Survie sans récidive<br />
A 8 ans ( % )<br />
62 75
Résumé des choix thérapeutiques selon l’ ANAES<br />
Taille histologique Bas grade Grade intermédiaire Haut grade<br />
2.5-4 cm mastectomie Mastectomie + CA Mastectomie + CA<br />
1 à 2.5 cm Tum + radioT Tum + radioT Tum + radioT + CA<br />
< 1 cm Tum + radioT Tum + radioT Tum + radioT<br />
CONCLUSION<br />
Le traitement conservateur est possible et doit être la règle en cas de <strong>carcinome</strong> intra<br />
canalaire.<br />
Il doit être associé à la radiothérapie.<br />
On n’insistera jamais assez, comme toujours en chirurgie carcinologique, sur l’importance<br />
d’une exérèse complète avec des marges saines.<br />
En cas de volumineux CIC, il est préférable d’effectuer une mammectomie, avec éventuelle<br />
reconstruction initiale.