Consom'Action N° 30
Consom'Action N° 30
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dossier<br />
une assiette bio et gourmande<br />
viande : 20 % dans la viande, contre<br />
8 à 15 % dans les céréales, et 22 à<br />
25 % dans les légumineuses (jusqu’à<br />
35 et 40 % dans le soja). « De plus,<br />
en privilégiant cette association, on a<br />
un apport en fibres et en certains minéraux<br />
qu’on ne trouve absolument pas<br />
dans la viande. Or l’enquête Suvimax<br />
(ndlr : étude scientifique sur la<br />
■ La viande bio, ça change quoi ?<br />
Franck Bardet est responsable de la filière viande de Biocoop.<br />
Quelle différence entre<br />
viande bio et non bio ?<br />
La bio propose des viandes non<br />
dénaturées comme cela a peu<br />
à peu été le cas ces cinquante<br />
dernières années, parce que<br />
l’agriculture industrielle cherchait<br />
à produire plus, tout en<br />
réduisant les coûts. En bio, on<br />
se concentre sur l’état physiologique<br />
de l’animal, son bien-être<br />
et son alimentation. Les abattages<br />
plus tardifs permettent<br />
d’obtenir des viandes finies,<br />
bien persillées, avec du goût.<br />
La bio apporte une garantie<br />
de contrôle. Avec une viande<br />
certifiée bio, c’est l’assurance<br />
que l’animal n’a pas<br />
consommé d’OGM.<br />
Autre différence, en bio, la<br />
prévention est la règle prioritaire<br />
en matière de santé.<br />
Homéopathie, phytothérapie<br />
sont régulièrement utilisées.<br />
L’usage des antibiotiques et<br />
autres médicaments de synthèse<br />
est réservé aux cas exceptionnels<br />
sur prescription<br />
vétérinaire et contrôlé.<br />
Qu’en est-il des prix ?<br />
Les consommateurs disent<br />
que la viande bio est chère<br />
(ndlr : enquête Ifop réalisée<br />
pour Interveb). Certes on peut<br />
trouver des écarts de prix<br />
conséquents, tout dépend de<br />
l’endroit où l’on achète sa<br />
viande. Les bouchers bio qui<br />
travaillent des carcasses entières<br />
et qui cherchent une revalorisation<br />
complète de l’animal<br />
proposent des tarifs très<br />
proches du bœuf label rouge !<br />
Pour la distribution spécialisée,<br />
le problème est plus<br />
grand : la filière de distribution<br />
est jeune, petite, les volumes<br />
faibles, et les magasins<br />
sont réticents à proposer un<br />
produit aussi fragile dans leur<br />
linéaire. Les partenariats entre<br />
les opérateurs d’amont et<br />
d’aval vont petit à petit diminuer<br />
les coûts grâce à des volumes<br />
plus importants, et sur-<br />
8 CONSOM’ACTION<br />
consommation alimentaire de plus<br />
de 13 000 Français entre 1994 et<br />
2002) a bien montré que le Français<br />
moyen est carencé en fibres. Dans l’association<br />
céréales-légumineuses, on<br />
trouve aussi de l’amidon, fournisseur<br />
d’énergie, des sels minéraux – notamment<br />
de la silice, indispensable à la<br />
fixation des minéraux – et des oligo-<br />
tout grâce à l’engouement<br />
des consommateurs pour ces<br />
produits reconnus haut de<br />
gamme.<br />
Et pour la volaille et le<br />
porc, plus couramment<br />
consommés ?<br />
Il y a de forts écarts dans les<br />
poulets. Un certifié AB classique,<br />
abattu au bout de 81<br />
jours, aura le même goût<br />
qu’un poulet label ou fermier<br />
conventionnel, mais il sera plus<br />
cher, parce que son alimentation<br />
à 90 % bio au minimum<br />
aura eu un coût supérieur. Cer-<br />
tains distributeurs comme Biocoop<br />
font le choix de proposer<br />
des poulets aux critères d’élevage<br />
bien supérieurs au minimum<br />
requis par la certification.<br />
Ils sont nourris à partir de<br />
matières premières agricoles<br />
100 % bio, élevés pendant<br />
plus de 91 jours. Quand on<br />
aime le poulet, on préfère celui-là,<br />
mais pour faire la différence…<br />
il faut goûter ! Le problème,<br />
c’est qu’aujourd’hui les<br />
gens veulent de petites portions,<br />
soit des poulets de<br />
1,2 kg, soit des découpes. Mais<br />
si on ne vend que des poulets<br />
trop jeunes, sans saveur, ou,<br />
pire, que des filets de poulet,<br />
comment le producteur peut-il<br />
s’assurer un revenu ? Que fait-il<br />
du reste ? En conventionnel,<br />
on a inventé les nuggets, et les<br />
ailerons de poulet cuisinés… Et<br />
si les consommateurs étaient<br />
prêts à faire l’effort de cuisiner<br />
les restes d’un poulet un peu<br />
plus gros ?<br />
Pour le porc, la qualité des<br />
produits est là aussi indéniable.<br />
Le travail des éleveurs<br />
bio n’a rien à voir avec l’élevage<br />
industriel. La naissance en<br />
plein air, l’engraissement sur<br />
paille, l’alimentation adaptée<br />
permettent une révélation des<br />
flaveurs les plus subtiles. Se<br />
pose le problème de l’aspect.<br />
Les consommateurs ont l’habitude<br />
d’un jambon ou de saucisses<br />
bien roses… sauf que<br />
cela suppose d’utiliser du sel<br />
nitrité, qui se stocke ensuite<br />
dans le foie et les reins. Biocoop<br />
a demandé à ses fournisseurs<br />
d’en arrêter l’usage,<br />
d’où parfois la couleur un peu<br />
marron de la viande qui peut<br />
malheureusement rebuter certains,<br />
alors que ça n’a rien à<br />
voir avec la fraîcheur ou le<br />
goût ! Une bonne côte de<br />
porc, ou un beau rôti, si c’est<br />
éléments variés, des vitamines B indispensables<br />
au bon déroulement des<br />
métabolismes. »<br />
Les algues, certaines graines<br />
(courge, tournesol), et notamment<br />
celles que l’on fait germer, sont elles<br />
aussi riches en protéines.<br />
Remplacer régulièrement la viande<br />
par des protéines végétales «apporte<br />
une fois par semaine, ça vaut<br />
le coup ! Rien à voir avec un<br />
mauvais jambon polyphosphaté,<br />
ou une rillette dénaturée !<br />
Ces produits ont mis au ban<br />
toute une catégorie d’aliments<br />
qui, consommés avec<br />
parcimonie, complètent très<br />
bien une alimentation variée.<br />
Qu’est-ce que Biocoop<br />
apporte de plus ?<br />
Nous préparons une filière<br />
Biocoop identifiable par un<br />
logo qui viendra compléter<br />
l’approvisionnement local des<br />
magasins. L’objectif, c’est<br />
qu’en travaillant avec nos partenaires<br />
producteurs et transformateurs,<br />
on puisse diminuer<br />
au maximum les charges,<br />
tout en préservant les marges<br />
nécessaires pour que chacun<br />
vive, dans le respect d’un commerce<br />
équitable. Faire de la<br />
qualité tout en déterminant le<br />
prix minimum en dessous duquel<br />
il ne faut pas descendre.<br />
Une des solutions est d’augmenter<br />
les volumes distribués.<br />
Si on vend plus, on peut baisser<br />
les prix. Rien à voir pour<br />
autant avec des schémas<br />
conventionnels de surproduction.<br />
Le fait que la restauration<br />
collective commence à<br />
s’intéresser au bio est une<br />
aide pour la filière, car cela<br />
nous permet de réaliser un<br />
équilibre en écoulant des morceaux<br />
qui seront valorisés par<br />
les cuisiniers alors qu’ils ne le<br />
seraient pas par les particuliers.<br />
N’oublions pas que l’élevage<br />
bio est indispensable à la<br />
biodiversité, il permet de préserver<br />
des surfaces entières,<br />
de reconquérir un environnement<br />
bafoué depuis plusieurs<br />
années par des exploiteurs.<br />
Manger de la viande bio avec<br />
modération participe à cette<br />
reconquête… On ne pourrait<br />
pas avoir d’espaces agricoles<br />
sans animaux !<br />
Propos recueillis<br />
par V. B.-R.