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Tous à vos règles à calcul ! Voici<br />
l'énigme bretonne contemporaine<br />
à résoudre : comment remettre<br />
debout le menhir de Prat-Lédan, dans<br />
la banlieue br<strong>est</strong>oise à Plabennec. En<br />
sachant qu'il date de 4 000 à 5 000 ans<br />
et que la pierre mégaiithique pèse ! 8,5<br />
tonnes et mesure 7,30 mètres de hauteur.<br />
Et que -l'importance <strong>est</strong> cruelle-<br />
vous n'avez pas droit au secours<br />
vigoureux de la technologie moderne.<br />
Les grues sont, par exemple, exclues :<br />
que faire?<br />
Il y a deux recettes : ^ancienne et la<br />
nouvelle. La première consiste à faire<br />
appel à Rannou. Une espèce de géant<br />
misogyne, bodybuildé, style Terminator<br />
des temps reculés. D'après la<br />
légende, ce colosse ne supportait pas<br />
les commérages des femmes. Un jour,<br />
il avait piqué sa crise et. pour faire<br />
taire les papoteuses, leur avait jeté des<br />
pierres. Immenses. Enormes. Des<br />
menhirs. Mais Rannou a raté sa cible,<br />
depuis les filles causent toujours... Et<br />
nous, on a les menhirs comme souvenirs<br />
de ces querelles.<br />
Première solution à l'énigme, demander<br />
au colosse de réparer ies<br />
dégâts puis le prier d'aller jouer ailleurs.<br />
Autre recette, celle d'Alphonse Peton.<br />
Pour commencer, vous prenez<br />
<strong>une</strong> cuite avec des copains. C'<strong>est</strong> tout<br />
du moins le premier précepte de ce<br />
professeur br<strong>est</strong>ois de 27 ans de l'association<br />
locale bretonnante Kroazhenî<br />
(« carrefour » en breton). « C'<strong>est</strong><br />
à cause d'<strong>une</strong> soirée où l'on délirait,<br />
raconte le je<strong>une</strong> homme frisé, dans un<br />
sourire, que l'on a eu l'idée de remettre<br />
sur pied le menhir de Prat-Udant. »<br />
Un drôle de personnage que ce<br />
monument. Même les monuments<br />
historiques-et notamment Michel Le<br />
Gossic, archéologue départemental,<br />
qui a planché sur son cas depuis<br />
décembre 83- ne sait toujours pas<br />
pourquoi le menhir a été planté là.<br />
Cuite religieux? Poteau indicateur de<br />
la route de l'Etain ? Marque montrant<br />
la proximité de sources? Mystère...<br />
Ce vieillard millénaire au cœur de<br />
granit possède des pieds d'argile. La<br />
preuve: en 1880, il s'<strong>est</strong> penché d'un<br />
côté. Deux ans plus tard, il s'effondrait<br />
en se cassant en deux, puis trois<br />
morceaux. Et ce n'<strong>est</strong> qu'en octobre<br />
84 que le, symbole local brossé et<br />
nettoyé fut « r<strong>est</strong>auré ». Avec le<br />
concours d'<strong>une</strong> multinationale spécialisée,<br />
Hilti, et surtout, grâce aux<br />
bienfaits d'<strong>une</strong> colle, subtil mélange<br />
de résine et de poussière de granit...<br />
Mais revenons à la solution d'Alphonse<br />
Peton. Une fois les brumes de<br />
la gueule de bois dissipées, le prof à<br />
l<strong>une</strong>ttes veut carrément réaliser <strong>une</strong><br />
première mondiale. Un cocktail de<br />
muscles et d'histoire préhistorique :<br />
« C'<strong>est</strong> la première fois que l'on relèvera<br />
un menhir avec uniquement les<br />
moyens humains de l'époque, explique<br />
ce sportif intellectuel. // y a d'autres<br />
tentatives, comme celles de l'île de<br />
Pâques dans le Pacifique ou même<br />
dans les Deux-Sèvres... Mais là, c'était<br />
<strong>une</strong> simulation. Ce n'était pas un<br />
menhir...» L'accro à «l'archéologique»<br />
se met au travail.<br />
Il pond un petit fascicule vert,<br />
rempli de photos et de croquis où<br />
valsent les cosinus et les sinus. Les<br />
calculs ? Oui ! Pour déterminer l'effort<br />
nécessaire à soulever les 18 tonnes de<br />
lo hisse et haut le menhir!<br />
l'ancêtre paresseux. «Il nous faut <strong>une</strong><br />
traction constante de la part des gens »,<br />
explique l'enseignant. Ce n'<strong>est</strong> pas un<br />
concours de tirage. En moyenne, à<br />
chaque personne correspondent 25 kg<br />
de traction. Pour le menhir de Prat-<br />
Lédan t, on a calculé qu'il faudrait 300<br />
à 400 personnes pour le tirer. Et ce<br />
n'<strong>est</strong> pas tout. Pour remettre le monstre<br />
sur ses pattes, encore faut-il le<br />
soulever, l'amener sur un chemin de<br />
rippage (voie constituée de traverses<br />
de bois enfoncées dans le sol), creuser<br />
<strong>une</strong> fosse au bout du chemin en<br />
qu<strong>est</strong>ion, faire glisser le menhir à<br />
l'aide de cordes sur son passage réservé.<br />
Et, <strong>une</strong> fois que le menhir a plongé<br />
dans son trou, le redresser afin qu'il<br />
soit bien droit. Avec des cordes et un<br />
portique. Ouf! C'<strong>est</strong> comme cela que<br />
l'on fera le 15 août. En attendant,<br />
Alphonse recuite son équipe de tireurs<br />
pour pouvoir l'entraîner. 11 laisse<br />
son numéro dans la presse régionale,<br />
et fixe la date de la rencontre<br />
amicale: ce sera le 2 juin. Sur un carré<br />
de pelouse, représentant la moitié<br />
d'un terrain de football : le site médiéval<br />
de Lesquelen.<br />
«Allez debout, crachez dedans!»<br />
Paul Tanné, un barbu hirsute de la<br />
commission... technique parle à ses<br />
hommes. Devant lui, deux longues<br />
files indiennes d'environ 50 sportifs<br />
dont les mains se sont refermées sur<br />
deux gros serpents ocre tressés: la<br />
corde. Au milieu des deux groupes,<br />
Yves Prizer. Un gros bonhomme torse<br />
nu, la bedaine sortie de son pantalon<br />
de flanelle grise qui joue les centurions.<br />
Autour la foule transpire...<br />
Avec ce soleil qui cogne depuis près<br />
d'<strong>une</strong> heure, il serait temps qu'on<br />
donne le top de départ. D'autant que<br />
l'adversaire a l'air assez minable : <strong>une</strong><br />
sorte de requin de pierre à qui on<br />
aurait amputé les ailerons et la queue.<br />
Ligoté, il dort sur des traverses de<br />
chêne dans un coin d'ombre.<br />
« Ho, hisse.'», le cri <strong>est</strong> lancé, la<br />
corde se tend. Et les légions se penchent<br />
en vrac... Suspens. Puis, d'un<br />
coup, l'impassible animal glisse<br />
comme <strong>une</strong> fusée pendant cinq secondes<br />
sur cinq mètres. « Ça a marché ! »,<br />
me souffle Alphonse Peton. Mais<br />
l'organisateur veut recommencer.<br />
Avec quarante personnes seulement.<br />
La première fois, on n'avait pas<br />
compté. Nouvel essai. Nouvelle réussite.<br />
Nouvelle euphorie.<br />
Le soleil tape si fort que les organisateurs<br />
'.(confiants» brûlent les étapes.<br />
Ils en oublient l'exercice numéro<br />
2, qui devait permettre de mesurer la<br />
force musculaire des tireurs avec un<br />
dynamomètre posé sur un 19 tonnes.<br />
Le camion rouge rempli de parpaings<br />
<strong>est</strong> oublié dans un coin. Dans le délire,<br />
on a décidé brusquement d'amener<br />
des pelles et des pioches, et certains,<br />
avec leur T-shirt de camionneur, se<br />
mettent à creuser. Ils veulent faire un<br />
trou pour mettre le menhir dedans.<br />
Un must de l'improvisation! A 17<br />
heures, tout <strong>est</strong> bouclé. Une demiheure<br />
plus tard, la pierre se lève<br />
comme <strong>une</strong> drôle de marionnette tirée<br />
par des fils. Dans les rangs, on hurle :<br />
« On a gagné ! On a gagné /».<br />
Menhir: 0. Tireur: 1. Match retour<br />
: le 15 août prochain. La méthode<br />
à Alphonse fait ses preuves.<br />
Xavier BENEROSO<br />
Pendant des séances d'entraînement : l'équipe du professeur Peton devant le menhir de Prat-Ledon.<br />
Le. tnanApont du, mégaLitheA ut un Aujet qui<br />
n'a. paA tefwtné d'en&lammen Lu AmagA.nat4.oonA.<br />
On Aait que. pluAÂ.eufti> "AA.muJLcuU.om>" ont été.<br />
depuis longtempA entsiepsûAeA, notamment AU/I<br />
d'énoftmu blocA de. béton. PaA. cUlleuAA tu<br />
te.ntivU.veA de. AeAtaunation de. monumentA détéAioAéA,<br />
ou. Lu tAanA^entA (c&. Meudon ou.<br />
SaÂ.nt-GeAmai.n] ont peAmÀ\A de. m^eux appx.ecA.eA<br />
en Qfw.nde.uJi Aéelle Lu, d-i^-icultéA que. AUACÂ.tauit<br />
V éAectton du mégal^itheA.<br />
Une. hypothèse, étrange. maÂj> tAéA plauA-ible a<br />
été pAopoAée danA GARMEW GALLÎ (C.G. n" 5],<br />
et a donné Lieu a an commentaÂAe cÀJiconAtancté<br />
Aappelant Lu LimtteA d'<strong>une</strong>, théorie, unique..<br />
Le AéaLité dot etAe pluA complexe et<br />
-impoAeA pluA-ieuAA te.chniqu.eA. Ve. pluA, A-i Le.<br />
tAan&poAt d'un bloc peut paAciïtAe aÂAé, A a<br />
mi&e en place. peut au contAaÂAe AouleveA<br />
d'<strong>imm</strong>enAeA dl^-icultéA•• c'ut Le. COA de. ceAtaÂ.nu<br />
tableA de. fOLMEM, de. dAme.nA4.onA modutu,<br />
maÀA dont l'ajuAtage veAtical panait<br />
extAaoAdinaÂAe. A l'-inveAAe, le. déplacement<br />
horizontal, de. ceAtatn objet&^uA^oAmeA Aeléve<br />
de. La pAoueAAe. MOÀA leuA éAectÀ.on paA pente<br />
-inclinée (<strong>une</strong>. {>olA AéAolue la. dl^lculté de.<br />
tAanAlatlon AUA un plan] n'a paA dû étAe tAèA<br />
dl^lclte. Quant aux "monAtAeA" de. pleAAe<br />
comme Lu -invAalAAemblableA dolmen de. METRAV<br />
ou de. SAUMUR, ou. Lu menhlAA de. L0CMARIA£UER<br />
ou de. PLESSWV, auc<strong>une</strong>, hypothue fLeelle.me.nt<br />
AatiA ^alAante n'a encore été avancée.<br />
Le pAobléme le pluA étnange fiute toute^o-iA<br />
l'ImpoAtance du myenA matéAlelA et humalnA<br />
qu'ont été capables de mettre en oeuvAe Lu<br />
myAtéAleux conAtfLucteuAA de mégaLuthu, Aun<br />
leAquelA ont ne AaÂt nÀ.en, et dont on -ignore<br />
Lu motivation*, fiéellu. A cet égcuid, c'eAt<br />
pluA L ' e-xÂAtence-même deA mégalctheA que<br />
leuA mode d'élection qui conAt^tue le pno-