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survivre dans ce con<strong>texte</strong> précaire et vio<strong>le</strong>nt. Défavorisés par <strong>le</strong> sort, <strong>le</strong>s enfants deviennent<br />

une main-d’œuvre malléab<strong>le</strong> et corvéab<strong>le</strong> à merci. Ils sont massivement enrôlés dans <strong>le</strong>s rangs<br />

des différentes forces en présence : « P<strong>ou</strong>r combattre Foday SANKOH, STRASSER fait<br />

recruter quatorze mil<strong>le</strong> jeunes » (KOUROUMA, 2000 : 166). Cet engagement <strong>le</strong>ur garantit au<br />

moins un repas quotidien même si la qualité reste à désirer et aussi l’impression d’appartenir à<br />

un gr<strong>ou</strong>pe, de ne plus être seuls sur terre. Comme l’explique Birahima sur <strong>le</strong> ton de la<br />

dérision, «quand on n’a plus personne sur terre (…) et qu’on est petit, un petit mignon dans<br />

un pays f<strong>ou</strong>tu et barbare où t<strong>ou</strong>t <strong>le</strong> monde s’égorge, que fait-on ? Bien sûr, on devient un<br />

enfant-soldat, un small-soldier, un child-soldier p<strong>ou</strong>r manger et p<strong>ou</strong>r égorger aussi à son<br />

t<strong>ou</strong>r» (KOUROUMA, 2000 : 94-95).<br />

Il est à noter que l’enrô<strong>le</strong>ment des enfants est la plupart du temps forcé mais il est parfois<br />

volontaire, <strong>le</strong>s enfants se présentant spontanément p<strong>ou</strong>r intégrer <strong>le</strong>s rangs des combattants.<br />

Dans ce descriptif de ce qui fait <strong>le</strong> fondement même de l’enfant-soldat, Birahima ren<strong>ou</strong>e avec<br />

l’hum<strong>ou</strong>r noir en liant naïvement <strong>le</strong>s verbes « manger », besoin fondamental et « égorger »,<br />

acte barbare. On assiste à la mise en exergue de l’absurdité de l’existence des enfants-soldats.<br />

Le narrateur manifeste ainsi son « détachement face à la réalité peu exaltante » (SANON,<br />

1983 : 177) de la guerre. « Armés jusqu’aux dents et t<strong>ou</strong>j<strong>ou</strong>rs drogués » (KOUROUMA, 2000 :<br />

109), ces enfants-soldats servent soit de gardiens, de gardes du corps, d’espions <strong>ou</strong><br />

d’éclaireurs durant <strong>le</strong>s combats. Capab<strong>le</strong>s des pires exactions, <strong>le</strong>s enfants-soldats deviennent<br />

des « sobels c’est-à-dire des soldats dans la j<strong>ou</strong>rnée et des rebel<strong>le</strong>s la nuit » (KOUROUMA,<br />

2000 : 166). Ce mot-valise « sobels » est une tr<strong>ou</strong>vail<strong>le</strong> p<strong>ou</strong>r <strong>le</strong> moins étrange et drô<strong>le</strong> de<br />

Birahima p<strong>ou</strong>r traduire la d<strong>ou</strong>b<strong>le</strong> activité à laquel<strong>le</strong> s’adonnent ces enfants taraudés par la<br />

famine et ém<strong>ou</strong>stillés par la drogue. Ils aspirent t<strong>ou</strong>s à intégrer un j<strong>ou</strong>r <strong>le</strong>s rangs des lycaons,<br />

crème des enfants-soldats, récompensés p<strong>ou</strong>r <strong>le</strong>urs pr<strong>ou</strong>esses par une d<strong>ou</strong>b<strong>le</strong> ration de<br />

n<strong>ou</strong>rriture, des drogues à profusion et un salaire triplé. Le narrateur montre au <strong>le</strong>cteur <strong>le</strong><br />

produit fini de ces enfants exploités par la guerre : des buveurs de sang qui retirent la vie à<br />

ceux qui la <strong>le</strong>ur ont donnée. Les désigner avec hum<strong>ou</strong>r par <strong>le</strong> terme « élite », c’est dénoncer la<br />

finalité du processus d’exploitation de ces enfants à qui la guerre aura fina<strong>le</strong>ment t<strong>ou</strong>t pris.<br />

Une autre conséquence de la guerre décriée sur un ton humoristique par Birahima est<br />

«l’ingérence humanitaire ». Il se tr<strong>ou</strong>ve que <strong>le</strong>s Etats africains ont proposé <strong>le</strong>urs bons offices<br />

p<strong>ou</strong>r mettre un terme aux différents conflits par l’intermédiaire de l’ECOMOG. Mais <strong>le</strong>s<br />

méthodes expéditives de cette dernière engendrent plus de dégâts que la guerre qu’el<strong>le</strong> est<br />

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