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SOMMAIRE<br />
• Le respect de la fonction. p.2<br />
– Rappel de quelques notions<br />
fondamenta<strong>les</strong>.<br />
• Les mécanismes<br />
de déformation. p.4<br />
• L’examen clinique<br />
de la main traumatisée. p.5<br />
• Traitement :<br />
mobilisation sans instabilité. p.7<br />
– Traitement orthopédique.<br />
– Traitement chirurgical.<br />
– Les lésions déterminent<br />
<strong>les</strong> traitements.<br />
– Le cas du pouce.<br />
– Le cinquième métacarpien.<br />
– Fractures articulaires.<br />
MEDECIN<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
<strong>Pan</strong> <strong>sur</strong> <strong>les</strong> <strong>doigts</strong> !<br />
Fractures des métacarpiens et fractures<br />
des phalanges des <strong>doigts</strong> longs<br />
Dr Eric Roulot* (texte et photos)<br />
Les progrès des techniques<br />
d’ostéosynthèse ne doivent pas faire<br />
oublier que <strong>les</strong> fractures des<br />
métacarpiens et des phalanges<br />
nécessitent, dans environ 85 % des<br />
cas, un traitement orthopédique de<br />
première intention. Il faut choisir<br />
entre restitution ad integrum de<br />
1<br />
MEDECIN<br />
l’anatomie fonctionnelle, donc<br />
l’immobilisation, et lutte contre<br />
l’enraidissement, donc une<br />
mobilisation précoce. Le recours à<br />
des spécialistes de la main évite à ces<br />
patients d’importantes séquel<strong>les</strong>, au<br />
traitement souvent complexe et aux<br />
résultats parfois décevants.<br />
Photo 1. Radiographie de face d’une fracture<br />
consolidée de la première phalange. L’axe de la<br />
phalange semble correct.<br />
Photo 2. L’examen clinique du même patient<br />
permet de constater qu’il existe en fait un cal<br />
vicieux rotatoire important, responsable d’une<br />
gêne fonctionnelle importante au serrage du<br />
poing.<br />
Photo 3. L’intervention réalisée consiste en une<br />
ostéotomie de « dérotation », ostéosynthésée par<br />
une double plaque vissée miniaturisée qui permet<br />
une rééducation immédiate pour éviter tout<br />
accolement tendineux.<br />
2<br />
3<br />
1
LES fractures des métacarpiens<br />
et des phalanges des<br />
<strong>doigts</strong> longs [voir schéma I]<br />
sont fréquentes et responsab<strong>les</strong><br />
d’arrêts de travail parfois<br />
prolongés, sources d’un important<br />
retentissement socio-économique<br />
(la durée moyenne d’arrêt travail<br />
pour une fracture de la première<br />
phalange varie de quatre à huit semaines).<br />
Le principe de leur prise<br />
en charge repose, comme pour<br />
toute fracture, <strong>sur</strong> la réduction et<br />
la stabilisation du foyer fracturaire.<br />
Mais elle impose aussi une mobilisation<br />
précoce, seule capable<br />
de lutter contre l’œdème, <strong>les</strong> adhérences<br />
tendineuses et l’enraidissement<br />
articulaire.<br />
• Les arches métacarpiennes. La<br />
main de l’homme parvient à tenir<br />
correctement une balle, avec un<br />
parfait contact <strong>sur</strong> toute sa <strong>sur</strong>face,<br />
parce qu’elle est en forme de<br />
cupule à double concavité<br />
palmaire, longitudinale et transversale<br />
[voir schéma II].<br />
Cette double concavité est essentielle<br />
à préserver. Elle est le<br />
fait, pour l’arche longitudinale, de<br />
MEDECIN<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
Le respect de la fonction<br />
Rappel de quelques notions fondamenta<strong>les</strong><br />
Les arches transversale<br />
et longitudinale de la main.<br />
ILLUSTRATIONS JEAN CLAUDE RIPA<br />
l’aspect courbe des métacarpiens<br />
<strong>sur</strong> une vue de profil et, pour<br />
l’arche transversale, de la mobilité<br />
des métacarpiens autour de l’axe<br />
fixe médian constitué par le bloc<br />
des deuxième et troisième métacarpiens<br />
avec, en externe, la colonne<br />
du pouce hypermobile et,<br />
en interne, <strong>les</strong> quatrième et cin-<br />
MEDECIN<br />
II<br />
I<br />
Les dix-neuf os des<br />
métacarpiens et des phalanges<br />
qui peuvent se fracturer.<br />
quième métacarpiens mobi<strong>les</strong><br />
dans le plan antéro-postérieur.<br />
Cette configuration permet à la<br />
paume de la main d’adopter une<br />
géométrie variable, allant d’une<br />
position à plat, pour frapper ou<br />
prendre appui <strong>sur</strong> le sol, à une position<br />
en boule pour frapper<br />
poing serré, en passant par la position<br />
de l’aumône (concave pour<br />
transformer la main en cupule).<br />
• Le carpe tolère mal <strong>les</strong> déformations.<br />
Les deuxième et troisième<br />
métacarpiens fixes sont solidement<br />
amarrés au carpe et ne<br />
tolèrent aucune déformation [voir<br />
schéma III]. Tout déplacement<br />
fracturaire doit donc être soigneusement<br />
recherché et traité. Les<br />
quatrième et cinquième métacarpiens,<br />
au contraire, arrivent, grâce<br />
2
III<br />
IV<br />
MEDECIN<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
Les deuxième<br />
et troisième métacarpiens<br />
fixes sont solidement<br />
amarrés au carpe.<br />
Les axes des <strong>doigts</strong><br />
fléchis doivent<br />
converger vers la<br />
base de l’éminence<br />
thénar.<br />
MEDECIN<br />
à leur mobilité, à compenser une<br />
certaine imperfection de réduction<br />
dans le plan antéro-postérieur.<br />
• Les phalanges à la bonne longueur.<br />
L’harmonie de l’enroulement<br />
des <strong>doigts</strong> et du serrage nécessite<br />
que la longueur de chacun<br />
des maillons de la chaîne digitale<br />
soit scrupuleusement respectée.<br />
Le traitement devra donc s’attacher<br />
à éviter tout raccourcissement<br />
d’une phalange ou d’un<br />
métacarpien en réduisant notamment<br />
<strong>les</strong> fractures obliques ou<br />
spiroïdes.<br />
• La convergence des <strong>doigts</strong>.<br />
Afin que tous <strong>les</strong> <strong>doigts</strong> puissent<br />
toucher la pulpe du pouce en même<br />
temps (en pince pollici-digitale),<br />
il est nécessaire qu’ils puissent<br />
converger vers l’axe du<br />
tubercule du scaphoïde (relief osseux<br />
palpé dans l’axe de la gouttière<br />
du pouls radial, à la base de<br />
l’éminence thénarienne [voir<br />
schéma IV]). Cette convergence<br />
est un élément fondamental à vérifier<br />
lorsqu’un patient présente<br />
une fracture d’un métacarpien ou<br />
d’une phalange. Il s’agit d’un piège<br />
classique, cause d’erreurs<br />
thérapeutiques fréquentes. En<br />
l’occurrence, il faut se méfier des<br />
déplacements en rotation car,<br />
outre la gêne occasionnée pour la<br />
prise pollici-digitale, un trouble<br />
rotatoire peut avoir des conséquences<br />
catastrophiques : lors du<br />
serrage du poing, par exemple, le<br />
doigt, pour la prise de force, viendra<br />
chevaucher <strong>les</strong> <strong>doigts</strong> voisins<br />
perturbant ainsi gravement l’enroulement<br />
et le serrage [photos 1,<br />
2 et 3]. <br />
* Chirurgien de la main, hôpital<br />
Lariboisière et Institut de la main<br />
(Clinique Jouvenet, Paris).<br />
3
Pour <strong>les</strong> métacarpiens<br />
Les interosseux et <strong>les</strong> fléchisseurs<br />
puissants vont favoriser la<br />
bascule palmaire du fragment distal,<br />
avec un déplacement en f<strong>les</strong>sum<br />
parfois important comme<br />
pour <strong>les</strong> fractures du col du métacarpien<br />
[voir schéma V].<br />
Les interosseux par leurs insertions<br />
vont également produire un<br />
raccourcissement et un déplacement<br />
rotatoire dans le sens de la<br />
pronation pour <strong>les</strong> deuxième et<br />
troisième métacarpiens, et de la<br />
supination pour le quatrième et le<br />
cinquième métacarpien. Le sens<br />
de la spire, au cours des fractures<br />
obliques et spiroïdes, va, lors du<br />
raccourcissement, conditionner<br />
également le sens de la rotation.<br />
Pour le premier et le cinquième<br />
métacarpien, <strong>les</strong> petites fractures<br />
articulaires rompent souvent <strong>les</strong><br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
Les mécanismes<br />
des déformations<br />
Les déplacements<br />
observés au cours des<br />
fractures des<br />
métacarpiens et des<br />
phalanges sont assez<br />
stéréotypés, car <strong>les</strong><br />
insertions tendineuses<br />
y sont nombreuses et<br />
exercent une traction<br />
qui va conditionner le<br />
déplacement et son<br />
caractère souvent<br />
prévisible.<br />
MEDECIN<br />
1<br />
MEDECIN<br />
Sous l’action conjuguée des interosseux et des tendons<br />
fléchisseurs, le fragment distal des métacarpiens se fléchit.<br />
1. Tendon extenseur<br />
2. Interosseux<br />
3 et 4. Tendons fléchisseurs.<br />
V<br />
VI<br />
Sous l’action des interosseux, le fragment proximal<br />
d’une fracture diaphysaire de la première phalange se<br />
fléchit, entraînant une angulation à sinus dorsal.<br />
VII<br />
La fracture de la deuxième phalange située en amont de<br />
l’insertion du tendon fléchisseur superficiel développe<br />
une angulation à sinus palmaire.<br />
1.Tendon du fléchisseur profond<br />
2.Tendon du fléchisseur superficiel.<br />
VIII<br />
La fracture de la deuxième phalange située en aval de l’insertion du tendon<br />
fléchisseur superficiel développe une angulation à sinus dorsal.<br />
2<br />
4
connexions avec <strong>les</strong> solides insertions<br />
ligamentaires qui restent<br />
fixées <strong>sur</strong> le petit fragment en place<br />
et qui as<strong>sur</strong>aient la stabilité articulaire,<br />
laissant le métacarpien<br />
soumis aux fortes contraintes de<br />
traction exercées en haut et en arrière<br />
par le long abducteur du<br />
pouce, pour le premier métacarpien,<br />
et par le cubital postérieur<br />
pour le cinquième métacarpien. Il<br />
s’agit, alors, de véritab<strong>les</strong> fractures<br />
luxations articulaires imposant<br />
une réduction généralement chirurgicale.<br />
Un mécanisme similaire<br />
existe pour <strong>les</strong> deuxième et troisième<br />
métacarpiens, avec un déplacement<br />
en luxation postérieur<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
consécutif à la traction exercée<br />
par <strong>les</strong> tendons radiaux.<br />
Pour <strong>les</strong> phalanges<br />
Les fractures diaphysaires de<br />
P1 se déplacent en recurvatum du<br />
fait de l’action de l’extenseur <strong>sur</strong> le<br />
fragment distal et du rôle abaisseur<br />
exercé par la dossière interosseuse<br />
<strong>sur</strong> le fragment proximal<br />
[voir schéma VI]. Lors des fractures<br />
diaphysaires proxima<strong>les</strong> de<br />
P2, la grande puissance du fléchisseur<br />
superficielle attire le fragment<br />
distal en flexion et donc la<br />
fracture en f<strong>les</strong>sum [voir schéma<br />
VII]. Par contre, si le trait de frac-<br />
L’examen clinique<br />
de la main traumatisée<br />
MEDECIN<br />
MEDECIN<br />
ture passe en aval de l’insertion du<br />
fléchisseur superficiel, celui-ci agira<br />
<strong>sur</strong> le fragment proximal avec<br />
une déformation fracturaire alors<br />
en recurvatum [voir schéma VIII].<br />
Enfin pour <strong>les</strong> fractures de P3,<br />
si le trait de fracture détache l’extenseur,<br />
il se produit une déformation<br />
en maillet avec arrachement<br />
d’un petit fragment osseux articulaire<br />
dorsal laissant la phalange<br />
soumise aux seu<strong>les</strong> contraintes en<br />
flexion du fléchisseur profond <strong>sur</strong><br />
P3. Une fracture plus distale que le<br />
fléchisseur ne sera, elle, soumise à<br />
aucune contrainte de tractions par<br />
<strong>les</strong> tendons. <br />
L’examen clinique reste fondamental : il permet d’apprécier certains<br />
paramètres qui échappent à tout autre examen. Les déformations des<br />
<strong>doigts</strong> sont souvent diffici<strong>les</strong> à apprécier à cause de l’œdème et de la<br />
douleur, mais vérifier la bonne convergence en flexion des <strong>doigts</strong> vers le<br />
tubercule du scaphoïde et la conservation de l’arche métacarpienne<br />
transversale reste indispensab<strong>les</strong>.<br />
POUR apprécier cette bonne<br />
convergence des <strong>doigts</strong>, il faut<br />
examiner la main fermée, avec<br />
<strong>les</strong> métacarpo-phalangiennes<br />
(MP) et <strong>les</strong> interphalangiennes proxima<strong>les</strong><br />
(IPP) fléchies et <strong>les</strong> interphalangiennes<br />
dista<strong>les</strong> (IPD) tendues ;<br />
<strong>les</strong> <strong>doigts</strong> doivent alors tous se diriger<br />
vers le tubercule du scaphoïde, relief<br />
osseux palpé dans l’axe de la<br />
gouttière du pouls radial, à la base de<br />
l’éminence thénarienne. Cet examen<br />
est parfois difficile à réaliser <strong>sur</strong> une<br />
main douloureuse et gonflée, mais<br />
il reste indispensable, car <strong>les</strong> examens<br />
radiographiques sont systématiquement<br />
pris en défaut dans l’appréciation<br />
des troub<strong>les</strong> rotatoires.<br />
L’explication de cette difficulté à<br />
apprécier un trouble rotatoire à l’aide<br />
d’une radiographie est d’ailleurs<br />
assez simple. Si, par exemple, on imprime<br />
à un manche à balai coupé<br />
transversalement une rotation de l’un<br />
des deux bouts tout en maintenant<br />
un contact parfait au niveau de la<br />
zone de coupe, celui-ci paraîtra tou-<br />
jours parfaitement droit quel que soit<br />
l’angle de vue.<br />
Pour <strong>les</strong> traits spiroïdes, le piège<br />
reste le même puisque, selon le principe<br />
de la spire, la rotation est possible<br />
en conservant un axe droit au<br />
prix d’un petit raccourcissement qui,<br />
à lui seul, n’a rien d’affolant pour le<br />
praticien non averti. L’intégrité de<br />
l’arche métacarpienne transversale<br />
est appréciée en posant <strong>les</strong><br />
deuxièmes phalanges en appui <strong>sur</strong><br />
le plan d’une table lorsque le poing<br />
5
est fermé. Les têtes des métacarpiens<br />
des <strong>doigts</strong> longs doivent alors dessiner<br />
un arrondi harmonieux, sans impression<br />
d’effacement d’une des têtes<br />
métacarpiennes [photo 4].<br />
Une bascule importante du col<br />
d’un métacarpien pourra provoquer,<br />
outre un effacement dorsal de la tête<br />
du métacarpien, une saillie de celle-ci<br />
en palmaire.<br />
On recherchera aussi une plaie<br />
cutanée qui, associée à une fracture,<br />
fera porter le diagnostic de fracture<br />
ouverte et imposera alors la vérification<br />
du vaccin antitétanique, la mise<br />
en route d’une antiobioprophylaxie<br />
rapide, puis le parage et la suture de<br />
la plaie sans délai. L’appréciation de<br />
l’intégrité de l’appareil tendineux et<br />
vasculo-nerveux doit également être<br />
consignée. <br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
4<br />
MEDECIN<br />
Radiographies systématiques<br />
Les radiographies sont systématiques et reposent,<br />
le plus souvent, <strong>sur</strong> de simp<strong>les</strong> incidences de face et<br />
de profil, complétées au moindre doute par des<br />
incidences de trois quarts.<br />
Le deuxième et le cinquième métacarpiens sont<br />
diffici<strong>les</strong> à bien voir <strong>sur</strong> <strong>les</strong> incidences de profil à<br />
cause des superpositions osseuses ; on <strong>les</strong> rend<br />
visib<strong>les</strong> en mettant la main de profil :<br />
— en pronation de trente degrés pour le<br />
deuxième métacarpien ;<br />
— en supination de trente degrés pour le<br />
cinquième métacarpien.<br />
IX<br />
Les traits de fracture :<br />
a = fracture transversale<br />
b = fracture oblique<br />
c = fracture oblique à biseau long<br />
d = fracture spiroïde<br />
e = fracture métaphysaire proximale<br />
f = fracture métaphysaire distale<br />
g = fracture articulaire<br />
h = fracture comminutive<br />
MEDECIN<br />
Photo 4. Examen de l’arche<br />
métacarpienne transversale. Le<br />
poing est examiné fermé et posé <strong>sur</strong><br />
le plan de la table. On constate un<br />
effacement net de la tête du<br />
quatrième métacarpien, consécutif à<br />
une fracture avec raccourcissement<br />
de la longueur du métacarpien.<br />
6
CERTAINES fractures sont<br />
d’emblée stab<strong>les</strong>, soit parce<br />
qu’el<strong>les</strong> ne sont pas du tout<br />
déplacées, soit parce<br />
qu’el<strong>les</strong> sont stab<strong>les</strong> au testing<br />
après réduction. D’autres sont<br />
stab<strong>les</strong> après une courte immobilisation.<br />
Certaines, enfin, déplacées<br />
ou instab<strong>les</strong>, nécessitent un<br />
traitement chirurgical qui, après<br />
réduction, peut consister :<br />
— en une ostéosynthèse légère,<br />
souvent sans ouverture du<br />
foyer de fracture, et dont la solidité<br />
reste proportionnelle à la faible<br />
agressivité du traitement ;<br />
— ou, au contraire, en une ostéosynthèse<br />
solide, qui n’est pas<br />
sans risque mais qui autorise une<br />
rééducation précoce, facteur de<br />
bons résultats.<br />
Traitement<br />
orthopédique<br />
• La syndactylie. L’immobilisation<br />
immédiate concerne <strong>les</strong> fractures<br />
stab<strong>les</strong>. Elle est au mieux réalisée<br />
par la mise en syndactylie qui<br />
consiste à fixer le doigt traumatisé<br />
avec le doigt voisin le plus proche en<br />
taille et qui va jouer un rôle de tuteur<br />
dynamique, protégeant le doigt<br />
traumatisé des sollicitations latéra<strong>les</strong><br />
et l’entraînant à se mouvoir en<br />
flexion-extension [voir schéma X].<br />
MEDECIN<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
Traitement : mobilisation<br />
sans instabilité<br />
La mobilisation précoce reste la meilleure méthode pour lutter contre la<br />
séquelle la plus fréquente qu’est l’enraidissement des <strong>doigts</strong>. C’est l’objectif<br />
prioritaire. Mais cet objectif reste soumis à l’obtention d’une stabilité<br />
suffisante du foyer de fracture pour ne pas s’exposer à un déplacement<br />
secondaire. La chirurgie est alors parfois nécessaire.<br />
X<br />
Le foyer de fracture est en principe<br />
suffisamment englué en trois<br />
semaines pour autoriser une mobilisation<br />
libre, mais il faut attendre<br />
six semaines avant d’autoriser<br />
des contraintes norma<strong>les</strong>. La<br />
radiographie est de peu d’intérêt<br />
pour apprécier la consolidation<br />
au début et il ne faut pas attendre<br />
une consolidation radiologique<br />
qui reste très tardive pour débuter<br />
la mobilisation. La radiographie<br />
reste, en revanche, utile pour <strong>sur</strong>veiller<br />
l’absence de déplacement.<br />
MEDECIN<br />
Syndactylisation du doigt fracturé aux<br />
<strong>doigts</strong> voisins.<br />
• L’attelle. L’immobilisation,<br />
quand elle est indispensable, se<br />
fait le plus souvent par une attelle.<br />
Source d’enraidissement important,<br />
elle doit être d’une durée<br />
la plus courte possible.<br />
Les immobilisations en extension<br />
de la main et des <strong>doigts</strong>, particulièrement<br />
dangereuses, sont à<br />
proscrire formellement. De même,<br />
<strong>les</strong> attel<strong>les</strong> de fortune sont fortement<br />
déconseillées, car source de<br />
raideur en extension des métacarpo-phalangiennes<br />
(MP) et en<br />
flexion des interphalangiennes<br />
proxima<strong>les</strong> (IPP) qui, dans <strong>les</strong><br />
formes sévères, interdisent à terme<br />
toute utilisation de la main.<br />
L’immobilisation en position dite<br />
« de fonction » a longtemps été<br />
préconisée. Aujourd’hui, elle doit<br />
pourtant être utilisée avec beaucoup<br />
de prudence, à cause, ici aussi,<br />
d’un risque d’enraidissement encore<br />
trop fréquent. Il est plutôt recommandé,<br />
sauf cas particuliers,<br />
d’adopter une position en flexion<br />
de 80° à 90° des métacarpo-phalangiennes<br />
et en extension complète<br />
des interphalangiennes proxima<strong>les</strong><br />
et dista<strong>les</strong>. Cette position,<br />
dite « intrinsèque plus », évite en<br />
effet la rétraction des puissants<br />
7
XI<br />
XII<br />
XIII<br />
45°<br />
35°<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
80°<br />
MEDECIN<br />
Position d’immobilisation,<br />
dite « intrinsèque plus ».<br />
Plâtre immobilisant<br />
le poignet avec attelle<br />
digitale palmaire.<br />
Plâtre immobilisant le poignet<br />
avec attelle digitale dorsale.<br />
MEDECIN<br />
musc<strong>les</strong> intrinsèques de la main<br />
(ceux qui prennent naissance dans<br />
la main, par opposition aux<br />
musc<strong>les</strong> extrinsèques dont le corps<br />
est antébrachial [voir schéma XI].<br />
Les petites attel<strong>les</strong> en aluminium<br />
malléable, recouvertes de mousse<br />
protectrice, sont adaptées à ce type<br />
d’immobilisation [voir schémas XII<br />
et XIII]. On peut compléter le traitement<br />
par un plâtre ou par une<br />
résine circulaire prenant la main<br />
et le poignet (mais jamais <strong>les</strong><br />
<strong>doigts</strong>) en englobant la partie<br />
proximale de l’attelle, lui évitant<br />
ainsi de tourner.<br />
• La réduction orthopédique<br />
d’une fracture peut, dans certains<br />
cas, être suivie d’une rééducation<br />
précoce, comme pour <strong>les</strong> fractures<br />
de la diaphyse de P1 lorsqu’el<strong>les</strong><br />
sont immobilisées dans<br />
une orthèse thermomoulée en position<br />
« intrinsèque plus », avec<br />
mobilisation immédiate des interphalangiennes<br />
proxima<strong>les</strong> comme<br />
pour <strong>les</strong> fractures de col de métacarpien.<br />
Cette mobilisation précoce<br />
protégée limite <strong>les</strong> risques de<br />
déplacements fracturaires, mais<br />
doit cependant être <strong>sur</strong>veillée radiologiquement<br />
au départ. Il en<br />
va de même pour <strong>les</strong> fractures<br />
stab<strong>les</strong> de P2 et de P3 qui autorisent<br />
— sous couvert d’une attelle<br />
courte en extension de l’interphalangienne<br />
distale — la mobilisation<br />
immédiate de l’interphalangienne<br />
proximale.<br />
Le principe directeur est de<br />
n’immobiliser que <strong>les</strong> maillons de<br />
la chaîne digitale indispensab<strong>les</strong> à<br />
la stabilité fracturaire, en évitant<br />
d’immobiliser une articulation<br />
non concernée, <strong>sur</strong>tout lorsqu’il<br />
s’agit d’une articulation aussi essentielle<br />
que l’interphalangienne<br />
proximale, qui a fortement tendance<br />
à l’enraidissement.<br />
8
Traitement<br />
chirurgical<br />
Lorsque la fracture est manifestement<br />
instable, il faut réaliser<br />
une ostéosynthèse. La chirurgie<br />
est pratiquée sous anesthésie régionale,<br />
par bloc axillaire, le malade<br />
étant hospitalisé durant<br />
vingt-quatre heures. Mais le traitement<br />
chirurgical peut être ambulatoire<br />
en cas de fracture isolée<br />
sans gros délabrement des parties<br />
mol<strong>les</strong>.<br />
A travers peau<br />
Le brochage percutané, dans<br />
la me<strong>sur</strong>e où il ne nécessite pas un<br />
abord du foyer de fracture, limite<br />
considérablement <strong>les</strong> risques infectieux<br />
et <strong>les</strong> risques de nonconsolidation<br />
consécutifs au « dépériostage<br />
» du foyer de fracture,<br />
indispensable en cas de chirurgie à<br />
ciel ouvert. La stabilisation obtenue<br />
est ainsi souvent assez médiocre,<br />
mais elle a l’avantage de permettre<br />
une mobilisation précoce, éventuellement<br />
protégée par une orthèse<br />
segmentaire.<br />
Les techniques de brochage sont<br />
nombreuses et obéissent à certains<br />
principes généraux. Il faut éviter<br />
que <strong>les</strong> broches ne traversent ou<br />
6<br />
MEDECIN<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
Photo 5. Fractures multip<strong>les</strong><br />
avec conservation des axes<br />
digitaux et traits de refend<br />
articulaires simp<strong>les</strong> pour<br />
<strong>les</strong> deux<br />
interphalangiennes<br />
proxima<strong>les</strong> ; trait<br />
comminutif pour<br />
l’interphalangienne distale.<br />
La conservation<br />
de la congruence articulaire<br />
et la difficulté prévisible<br />
de l’ostéosynthèse<br />
imposent un traitement<br />
orthopédique, et un début<br />
prudent de<br />
la rééducation dès la fin<br />
de la troisième semaine.<br />
ne bloquent <strong>les</strong> articulations non<br />
fracturaires. El<strong>les</strong> doivent souvent<br />
être positionnées par deux, en croix<br />
ou parallèlement, pour éviter la rotation<br />
autour de l’axe d’une seule<br />
broche. On <strong>les</strong> retire systématiquement,<br />
en général six semaines<br />
après leur pose. El<strong>les</strong> sont souvent<br />
faiblement enfouies dans <strong>les</strong><br />
tissus sous-cutanés pour ne pas<br />
s’exposer à l’infection et rester ac-<br />
MEDECIN<br />
5<br />
cessib<strong>les</strong> à une ablation facile en<br />
consultation.<br />
Pour <strong>les</strong> métacarpiens, <strong>les</strong> brochages<br />
transversaux as<strong>sur</strong>ent une<br />
bonne stabilité, au prix d’un<br />
risque iatrogène faible ; ils permettent<br />
de traiter à peu près tous<br />
<strong>les</strong> types de fracture en stabilisant<br />
le métacarpien fracturaire par le<br />
métacarpien sain voisin. Les bro-<br />
Photo 6. Fracture à deux étages.<br />
— La fracture de la base de P3 soulève, <strong>sur</strong>tout<br />
par son volume, le problème de la congruence<br />
articulaire qui est menacée avec un risque de<br />
subluxation palmaire de la troisième phalange.<br />
— La fracture de la base de P2 s’assimile, en<br />
revanche, à un arrachement de la plaque<br />
palmaire dans le cadre d’une entorse par<br />
traumatisme en hyperextension. Son petit<br />
volume ne la rend pas menaçante pour la<br />
congruence articulaire, le risque étant <strong>sur</strong>tout lié<br />
à l’enraidissement en flexion de<br />
l’interphalangienne proximale.<br />
9
7<br />
chages centromédullaires sont<br />
plus élégants, mais leur stabilité<br />
est moins bonne.<br />
A ciel ouvert<br />
Il est parfois nécessaire de réaliser<br />
une ostéosynthèse en abordant<br />
le foyer de fracture. Cette<br />
8<br />
MEDECIN<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
ostéosynthèse doit être la plus solide<br />
possible : il s’agit de démarrer<br />
la rééducation immédiatement<br />
afin de limiter <strong>les</strong> accolements cicatriciels.<br />
Les différentes techniques pour<br />
ces ostéosynthèses très stab<strong>les</strong><br />
font appel aux vis, aux cerclages,<br />
aux clous centromédullaires,<br />
aux plaques vissées.<br />
Le matériel miniaturisé<br />
peut souvent être<br />
définitivement laissé en<br />
place, mais son volume<br />
gêne parfois la bonne<br />
coulisse des structures<br />
tendineuses, rendant<br />
alors l’ablation du matériel<br />
indispensable. Cette<br />
ablation doit en principe<br />
être différée d’au moins<br />
six mois.<br />
Photo 8. La même fracture<br />
après déplacement.<br />
Remarquez la luxation de la<br />
base du premier<br />
métacarpien et l’importante<br />
fermeture commis<strong>sur</strong>ale,<br />
responsable d’un handicap<br />
fonctionnel majeur.<br />
MEDECIN<br />
Photo 7. Fracture de la base de P1<br />
(fracture de Bennett). Le<br />
fragment de petite taille est<br />
trompeur. Il s’agit de fractures<br />
très instab<strong>les</strong>. El<strong>les</strong> se déplacent<br />
très volontiers et ont des<br />
conséquences redoutab<strong>les</strong>. El<strong>les</strong><br />
sont très chirurgica<strong>les</strong>.<br />
La stabilisation par minifixateur<br />
externe reste à part. Elle<br />
permet une stabilisation fiable,<br />
sans qu’on ait besoin d’aborder le<br />
foyer de fracture. Elle rend donc<br />
de grands services, mais elle est le<br />
plus souvent réservée, étant donné<br />
son encombrement et la nécessité<br />
de soins fréquents, aux cas<br />
diffici<strong>les</strong> ou aux gros délabrements<br />
cutanés, avec risque infectieux<br />
important interdisant toute<br />
mise en place de matériel.<br />
Les lésions<br />
déterminent<br />
<strong>les</strong> traitements<br />
• La prise en charge des fractures<br />
diaphysaires est uniquement<br />
conditionnée par la nécessité<br />
de respecter l’axe du doigt et du<br />
métacarpien, sans laisser persister<br />
de troub<strong>les</strong> rotatoires ni de raccourcissement.<br />
• Les fractures articulaires<br />
sont, quant à el<strong>les</strong>, soumises à la<br />
nécessité d’une restitution parfaite<br />
de la congruence articulaire,<br />
sous peine de laisser persister une<br />
marche d’escalier <strong>sur</strong> la <strong>sur</strong>face<br />
cartilagineuse, responsable par la<br />
suite de douleurs et d’arthrose.<br />
L’attitude thérapeutique est donc<br />
très chirurgicale en cas de déplacement.<br />
Cependant l’importance et la<br />
fréquence des enraidissements articulaires<br />
observée avec ce type de<br />
10
9<br />
chirurgie, la difficulté de réaliser<br />
une ostéosynthèse de qualité <strong>sur</strong><br />
des fragments généralement très<br />
petits et souvent multip<strong>les</strong> incitent<br />
à beaucoup de prudence. Si<br />
chirurgie il y a, elle doit être hautement<br />
spécialisée [photo 5].<br />
L’attitude sera d’autant moins interventionniste<br />
qu’il s’agit d’une<br />
interphalangienne distale, car son<br />
arthrodèse, en cas de douleurs résiduel<strong>les</strong>,<br />
reste peu invalidante et<br />
de réalisation secondaire facile.<br />
Au contraire, en cas d’incongruence,<br />
une atteinte de l’interphalangienne<br />
proximale ou de la<br />
métacarpo-phalangienne donnera<br />
plus souvent lieu à un traitement<br />
chirurgical, étant donné l’importance<br />
capitale de ces articulations<br />
dans la fonction de la main.<br />
• Quant aux petits arrachements<br />
osseux qui ne compromettent<br />
pas vraiment l’intégrité de la<br />
<strong>sur</strong>face articulaire, leur traitement<br />
dépend de la structure anatomique<br />
qu’ils soutiennent (ligamentaire,<br />
tendineuse ou capsulaire).<br />
Selon <strong>les</strong> cas, leur prise en<br />
charge peut davantage relever du<br />
cadre de l’entorse ou de la luxa-<br />
MEDECIN<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
tion, voire de l’arrachement tendineux<br />
(mallet finger ou rugby finger)<br />
que de la fracture. En général,<br />
un arrachement osseux de<br />
plus du tiers de la <strong>sur</strong>face articulaire<br />
(seuil de volume fracturaire)<br />
fait passer le problème de la fracture<br />
au premier plan. Au-delà de<br />
Dans la fracture de Bennett, le premier métacarpien se<br />
déplace en haut et en arrière sous l’action du long<br />
abducteur du pouce (1). Le même mécanisme se retrouve<br />
pour <strong>les</strong> fractures articulaires de la base du cinquième<br />
métacarpien sous l’action du cubital postérieur (2).<br />
XIV<br />
MEDECIN<br />
Photo 9. Fractures non déplacées et<br />
consolidées des quatrième et<br />
cinquième métacarpiens. Ces<br />
fractures attirent l’attention et ont<br />
fait méconnaître la luxation carpométacarpienne<br />
des quatrième et<br />
cinquième rayons dont le pronostic<br />
est, de loin, bien plus sévère.<br />
ce seuil, se pose le risque d’incongruence<br />
arthrogène ou d’instabilité<br />
articulaire [photo 6].<br />
Le cas<br />
du pouce<br />
• Les fractures de la base du<br />
premier métacarpien, quand<br />
el<strong>les</strong> ne détachent qu’un petit<br />
fragment interne, ne doivent pas<br />
abuser le praticien. Le petit fragment<br />
en question correspond en<br />
réalité à la zone d’amarrage des<br />
solides ligaments stabilisateurs de<br />
l’articulation trapézo-métacarpienne<br />
(fracture de Bennett [photo<br />
7 et schéma XIV]). Ces frac-<br />
11
17<br />
tures entraînent quasi systématiquement<br />
un déplacement en luxation<br />
dorsale externe du métacarpien<br />
(par la traction exercée par le<br />
tendon long abducteur du pouce),<br />
avec une fermeture commis<strong>sur</strong>ale<br />
aux conséquences très<br />
graves pour la fonction de la main<br />
[photo 8]. Ces fractures sont<br />
donc chirurgica<strong>les</strong>. Il en va de même<br />
de la plupart des fractures de<br />
la base du premier métacarpien et<br />
un avis chirurgical reste indispensable<br />
dans tous <strong>les</strong> cas.<br />
• Les fractures de la base de<br />
P1, lorsqu’el<strong>les</strong> détachent un petit<br />
fragment externe ou interne, sont<br />
assimilées à des entorses des liga-<br />
18<br />
MEDECIN<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
ments latéraux internes ou externes.<br />
L’attitude doit être chirurgicale<br />
en cas de laxité importante,<br />
sous peine de voir cette laxité, au<br />
traitement difficile, se chroniciser.<br />
• Les autres localisations fracturaires<br />
<strong>sur</strong> le pouce se rapprochent<br />
du mode de prise en charge<br />
des <strong>doigts</strong> longs.<br />
Le cinquième<br />
métacarpien<br />
• Pour <strong>les</strong> fractures de la base,<br />
le mode de raisonnement est directement<br />
inspiré de celui du pou-<br />
MEDECIN<br />
Photo 17. Fracture articulaire « en<br />
miroir » de l’interphalangienne<br />
distale, avec perte de la bonne<br />
congruence articulaire. Dans la<br />
me<strong>sur</strong>e où il s’agit d’une<br />
articulation distale, le traitement<br />
peut être orthopédique car, en<br />
cas d’arthrose, <strong>les</strong> conséquences<br />
fonctionnel<strong>les</strong> sont moins graves<br />
et mieux tolérées que pour une<br />
interphalangienne proximale.<br />
ce, avec une attitude très chirurgicale<br />
pour <strong>les</strong> petits arrachements<br />
osseux de la partie externe de l’articulation.<br />
Cette fois, le déplacement<br />
est postéro-interne en raison<br />
de la traction exercée par le tendon<br />
extenseur lunaire du carpe.<br />
• Pour <strong>les</strong> fractures plus étendues<br />
de la base du métacarpien,<br />
il faut se méfier de l’association<br />
très fréquente à une luxation carpométacarpienne<br />
du cinquième<br />
rayon, de diagnostic radiologique<br />
souvent difficile et de traitement<br />
toujours chirurgical [photo 9].<br />
Pour <strong>les</strong> fractures du col, le<br />
déplacement en bascule palmaire<br />
Photo 18. Fracture séparationenfoncement<br />
de la base de P2, avec<br />
non seulement une perte importante<br />
de congruence articulaire mais, en<br />
plus, une subluxation dorsale de la<br />
deuxième phalange au pronostic<br />
fonctionnel redoutable. L’intervention<br />
chirurgicale est nécessaire, mais reste<br />
difficile.<br />
12
MESSAGES CLES<br />
Les fractures des métacarpiens<br />
et des phalanges sont fréquentes<br />
et leurs conséquences<br />
<strong>sur</strong> la fonction de la main souvent<br />
sévères en cas de mauvais<br />
traitement initial.<br />
Les fractures du col du cinquième<br />
métacarpien et de la<br />
houppette phalangienne sont de<br />
traitement assez systématiquement<br />
orthopédique et peuvent<br />
tolérer un petit défaut de réduction.<br />
Toutes <strong>les</strong> autres fractures<br />
déplacées imposent une<br />
réduction, puis une immobilisation,<br />
et il faut être particulièrement<br />
vigilant à détecter par<br />
l’examen clinique tout déplacement<br />
rotatoire qui passe volontiers<br />
inaperçu <strong>sur</strong> <strong>les</strong> radiographies.<br />
Certaines fractures, par leur<br />
petite taille, peuvent être faussement<br />
ras<strong>sur</strong>antes, tel<strong>les</strong> que <strong>les</strong><br />
fractures de Bennett du premier<br />
métacarpien ou leur équivalent<br />
<strong>sur</strong> le cinquième métacarpien, et<br />
<strong>les</strong> fractures-arrachements tendineux<br />
ou ligamentaires qui sont<br />
très souvent en fait synonymes<br />
de lésions graves et très souvent<br />
chirurgica<strong>les</strong>.<br />
Les fractures articulaires sont<br />
de traitement difficile et de pronostic<br />
réservé, <strong>sur</strong>tout quand<br />
el<strong>les</strong> touchent <strong>les</strong> interphalangiennes<br />
proxima<strong>les</strong> et <strong>les</strong> métacarpo-phalangiennes<br />
; leur traitement<br />
impose un avis spécialisé.<br />
Compte tenu de la sévérité<br />
fonctionnelle des séquel<strong>les</strong> possib<strong>les</strong><br />
en cas de traitement inadéquat,<br />
il reste de bonne pratique<br />
de prendre un avis<br />
spécialisé plutôt par excès que<br />
par défaut.<br />
MEDECIN<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
est souvent bien toléré, et d’autant<br />
mieux que le patient possède une<br />
articulation métacarpo-phalangienne<br />
souple en extension, lui permettant<br />
de compenser facilement le<br />
f<strong>les</strong>sum fracturaire. Il faut alors impérativement<br />
se méfier d’un possible<br />
trouble rotatoire associé, que<br />
seul l’examen clinique peut déceler<br />
et qui impose une réduction. La<br />
limite de tolérance de la bascule<br />
palmaire est aux environs de 40°,<br />
mais varie selon <strong>les</strong> patients. On<br />
peut, dans tous <strong>les</strong> cas, réduire orthopédiquement<br />
ce déplacement<br />
sous anesthésie locale. L’immobilisation<br />
fait ensuite appel à une<br />
attelle en position « intrinsèque<br />
plus », prenant <strong>les</strong> quatrième et<br />
cinquième <strong>doigts</strong> en syndactylie et<br />
laissant <strong>les</strong> interphalangiennes<br />
proxima<strong>les</strong> et le poignet libres.<br />
Fractures<br />
articulaires<br />
Lorsque <strong>les</strong> fractures articulaires<br />
concernent un petit fragment<br />
osseux arraché, el<strong>les</strong> correspondent<br />
en général à une lésion à<br />
MEDECIN<br />
Les associations<br />
lésionnel<strong>les</strong><br />
type d’arrachement ligamentaire<br />
et relèvent du mode de prise en<br />
charge des entorses. Quant aux<br />
arrachements de la face dorsale de<br />
la base de P2 ou aux arrachements<br />
de la face palmaire de la base<br />
de P3, s’il s’agit d’arrachements<br />
tendineux, le traitement est alors<br />
toujours chirurgical, avec réinsertion<br />
du fléchisseur profond <strong>sur</strong> la<br />
base de P3 (rugby finger) et de la<br />
bandelette médiane de l’extenseur<br />
<strong>sur</strong> la partie dorsale de la base de<br />
P2 (sous peine de déformation<br />
progressive en boutonnière).<br />
Lorsque le fragment est volumineux<br />
(menaçant la congruence ou<br />
la stabilité articulaire), le traitement<br />
est souvent difficile et chirurgical<br />
: soit parce que le fragment<br />
est déplacé et nécessite une<br />
réduction [photos 17 et 18], soit<br />
parce que, bien que non déplacé,<br />
il relève d’une synthèse pour permettre<br />
une mobilisation très précoce.<br />
Un avis chirurgical reste<br />
dans tous <strong>les</strong> cas indispensable,<br />
car <strong>les</strong> séquel<strong>les</strong> sont fréquentes<br />
et redoutab<strong>les</strong> et leur traitement<br />
très incertain. <br />
Dr Eric Roulot<br />
Les gros délabrements relèvent toujours d’une prise en charge<br />
en milieu spécialisé.<br />
Les fractures avec ouverture cutanée, même punctiforme, sont<br />
des fractures ouvertes et nécessitent à ce titre, et indépendamment<br />
de l’aspect de la fracture, une prise en charge spécialisée,<br />
avec, pour <strong>les</strong> ouvertures franches, un parage, une stabilisation de<br />
la fracture et une antibioprophylaxie.<br />
13
Les métacarpiens des<br />
<strong>doigts</strong> médians. Le quatrième<br />
métacarpien, mobile, peut<br />
tolérer un déplacement en bascule<br />
palmaire d’une vingtaine<br />
de degrés. En revanche, <strong>les</strong><br />
deuxième et troisième métacarpiens<br />
sont fixes et ne peuvent<br />
compenser un déplacement<br />
en f<strong>les</strong>sum ; ils ne tolèrent<br />
donc aucun déplacement<br />
[photos 10 et 11].<br />
10<br />
Photo 10. Fractures spiroïdes des<br />
troisième et quatrième métacarpiens.<br />
Le déplacement rotatoire du troisième<br />
métacarpien n’est pas tolérable et<br />
impose l’intervention chirurgicale.<br />
11<br />
Photo 11. Les<br />
deux fractures<br />
ont été<br />
synthésées par<br />
des microvis et<br />
par une même<br />
voie d’abord.<br />
La rééducation<br />
peut être<br />
immédiate.<br />
Les fractures de la diaphyse<br />
de P1 requièrent le plus souvent<br />
un traitement orthopédique<br />
par plâtre de Thomine.<br />
Mais sa réalisation technique<br />
reste difficile et au mieux réalisée<br />
sous courte anesthésie pour<br />
obtenir une réduction correcte<br />
et un moulage parfait du plâtre<br />
[photos 12 et 13].<br />
MEDECIN<br />
Dossier du généraliste n° 2137 - mardi 18 septembre 2001<br />
Cas particuliers<br />
12<br />
Photo 12. Fracture oblique courte<br />
déplacée en recurvatum. Le traitement<br />
orthopédique est possible avec<br />
réduction puis immobilisation des<br />
métacarpo-phalangiennes. La<br />
mobilisation immédiate des<br />
interphalangiennes proxima<strong>les</strong> évite<br />
l’enraidissement des <strong>doigts</strong>.<br />
13<br />
Photo 13. Fracture après consolidation<br />
sans cal vicieux. Le résultat<br />
fonctionnel est de ce fait excellent.<br />
Les fractures de la diaphyse<br />
de P2 sont chirurgica<strong>les</strong> lorsqu’el<strong>les</strong><br />
sont déplacées et instab<strong>les</strong><br />
après réduction.<br />
Les fractures extra-articulaires<br />
de P3 doivent être le plus<br />
souvent traitées orthopédiquement,<br />
une petite attelle en tuile<br />
immobilisant uniquement l’interphalangienne<br />
distale. Les fractures<br />
très comminutives de<br />
la houppette phalangienne<br />
peuvent alors évoluer vers une<br />
pseudarthrose, souvent asymptomatique,<br />
aboutissant paradoxalement<br />
à une bien meilleure<br />
conservation de la fonction que<br />
lors d’une prise en charge chirurgicale<br />
[photos 14, 15 et 16].<br />
MEDECIN<br />
14<br />
Photo 14. Luxation unguéale presque<br />
toujours associée à une fracture de P3.<br />
15<br />
Photo 15. La radiographie retrouve<br />
effectivement une fracture non<br />
déplacée de la houppette<br />
phalangienne, à trait transversal. Elle<br />
peut être traitée orthopédiquement<br />
une fois la luxation unguéale réduite.<br />
16<br />
Photo 16. Même fracture de face<br />
après consolidation. Le trait de<br />
fracture reste visible très longtemps<br />
et il ne faut pas attendre la<br />
consolidation radiologique pour<br />
rééduquer, car la radio est toujours<br />
très en retard <strong>sur</strong> la clinique.<br />
14