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R-2011-1479 Beaudet - Déontologie policière

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MONTRÉAL<br />

COMITÉ DE DÉONTOLOGIE POLICIÈRE<br />

COMITÉ DE DÉONTOLOGIE POLICIÈRE<br />

DOSSIER : R-<strong>2011</strong>-<strong>1479</strong> (10-1148)<br />

LE 16 AOÛT <strong>2011</strong><br />

RÉVISION EFFECTUÉE PAR M e MICHÈLE COHEN<br />

DEMANDE DE RÉVISION DE :<br />

MADAME FRANCINE BEAUDET<br />

DÉCISION<br />

[1] Le 17 mai <strong>2011</strong>, le Commissaire à la déontologie <strong>policière</strong> (Commissaire)<br />

rejette la plainte de M me Francine <strong>Beaudet</strong> après enquête, conformément aux<br />

pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 178 de la Loi sur la police 1 (Loi).<br />

[2] Le 30 mai <strong>2011</strong>, M me <strong>Beaudet</strong> dépose au Comité de déontologie <strong>policière</strong><br />

(Comité) une demande de révision à l’égard de cette décision du Commissaire.<br />

1 L.R.Q., c. P-13.1.


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MOTIFS DE LA DEMANDE DE RÉVISION<br />

[3] Dans sa demande, la plaignante invoque les motifs suivants :<br />

« […] Tout ce que je constate à la lecture de ce rapport, c’est que le<br />

commissaire non seulement n’a pas été à la recherche de la vérité<br />

mais a tout fait pour ternir ma réputation!!!<br />

Dans votre propre dossier d’enquête vous possédez la preuve d’au<br />

moins un parjure de l’agent Dubé en cour municipale mais celui-ci<br />

n’est pas relevé dans le dit rapport non plus d’ailleurs que dans son<br />

rapport de l’événement il affirme lui-même m’avoir traité de folle et<br />

d’hystérique!!! […] » (sic)<br />

[4] Le Comité a invité la plaignante à participer à une audience publique, qui<br />

devait se tenir le 1 er août <strong>2011</strong>, afin de lui donner la possibilité de faire des<br />

représentations au soutien de sa demande de révision. L’avis de convocation à<br />

cette audience décrivait son but comme suit :<br />

« Le but de cette séance est de vous donner la possibilité de faire des<br />

représentations au soutien de votre demande de révision. Veuillez<br />

noter qu’aucun témoignage ne pourra être rendu durant cette séance<br />

puisque, conformément à l’article 184 de la Loi sur la police, la<br />

révision ne doit se faire par le Comité qu’en fonction du dossier<br />

constitué par le Commissaire. »<br />

[5] La plaignante ne s’est pas présentée à cette audience, mais elle a fait<br />

parvenir au Comité par télécopieur, la veille, ce qu’elle déclare être ses<br />

représentations, que nous reproduisons ci-dessous. Soulignons que le Comité a<br />

remplacé le nom des locataires par les lettres AB et CD :<br />

« - Le policier a refusé de rencontrer la locataire (Madame AB) qui<br />

voulait déposer plainte contre Madame CD pour tapage nocturne<br />

à répétition raison pour laquelle Madame AB une dame âgée de<br />

65 ans m’avait demandé assistance et pour laquelle j’ai<br />

moi-même fais l’appel au service de police de Trois-Rivières le<br />

19 août 2009.<br />

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- Le policier m’a injuriée (voir son propre rapport de l’événement<br />

dans lequel il affirme m’avoir traitée de folle et d’hystérique…)<br />

- Le policier m’a dit de manger de la merde devant témoin et ce<br />

moins de cinq minutes après mon arrivée sur les lieux.<br />

- Le policier refuse toute discutions, et exige que je “décrisse”.<br />

- Alors que j’obéis et m’assoie côté passager de mon véhicule il<br />

s’approche de la portière et continu de me narguer, je lui demande<br />

de décliner pour la seconde fois son identité et son matricule ce<br />

qu’il fait. Je prends ses coordonnées en note et au moment de<br />

démarrer il me demande de mon permis de conduire. Je refuse.<br />

- De par la loi je ne suis tenue de m’identifier que dans des<br />

circonstances très précises qui ne sont pas présente.<br />

- Il m’ordonne de sortir de mon véhicule, je refuse.<br />

- Il me dit alors que je suis en état d’arrestation, je lui demande pour<br />

quel motif, “Refus de t’identifier”.<br />

- Je sors de mon véhicule.<br />

- En sortant je me dirige vers le balcon de la locataire (Madame CD)<br />

qui est la cause de mon appel de service et lui dit que je la ferai<br />

sortir de mon immeuble.<br />

- Le policier se dirige vers moi avec agressivité, je lui interdis l’accès<br />

à mon terrain sans mandat.<br />

- Il m’empoigne avec force et essaie de m’entraîner hors de ma<br />

propriété.<br />

- Son collègue approche avec calme et me prend par l’autre bras, je<br />

cesse de résister, ils me conduisent vers mon véhicule.<br />

- L’agent Guay se retire aussitôt et s’éloigne d’une quinzaine de<br />

pieds.<br />

- L’agent Dubé me “plaque” violemment contre ma portière, me<br />

menotte pendant que je discute calmement avec mon conjoint<br />

pour qu’il téléphone mon avocat, l’agent Dubé se intervient dans<br />

notre conversation.<br />

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- Il me conduit vers l’auto patrouille et me “plaque” avec violence sur<br />

la valise arrière du véhicule.<br />

- À sa demande je décline mon identité.<br />

- Avec brutalité il me fait assoir dans le véhicule de police sans me<br />

lire mes droits et me laisse seule avec l’agent Guay pendant qu’il<br />

va tenter de provoquer mon conjoint pour la seconde fois. Il ne<br />

réussit pas.<br />

- De retour dans l’auto patrouille, l’agent Guay ne démarre pas. Je<br />

demande pourquoi on ne démarre pas. L’agent Dubé me dit qu’il<br />

est à faire une contravention. Je lui demande pourquoi??? Il me<br />

répond “injures à ta locataire!!!”<br />

- Il sort du véhicule de police, m’ouvre la portière et me demande de<br />

sortir, je refuse alléguant que je suis en état d’arrestation et que je<br />

veux aller au poste de police pour régler cette affaire.<br />

- Il m’oblige à en sortir, me remets une contravention et exige que je<br />

parte sur le champ.<br />

- Dans mon véhicule je constate que la contravention est INJURES<br />

À UN POLICIER DANS L’EXERCICE DE SES FONCTIONS!!!<br />

- Je me dirige immédiatement au poste de police pour déposer une<br />

plainte, on refuse de la prendre et m’informe que je dois déposer<br />

une plainte à la déontologie <strong>policière</strong> ce que je fais.<br />

- Je conteste la contravention en cour municipale. La cause est<br />

entendue plus d’un an après les faits.<br />

- Les deux policiers mentent en cour.<br />

- Dans les minutes du procès vous détenez la preuve d’au moins un<br />

parjure de l’agent Dubé quand il affirme au juge qu’il était dans le<br />

logement de Madame CD lors de mon arrivée sur les lieux, il ment.<br />

Vous savez qu’il était, comme je l’ai affirmé au juge, dehors à<br />

discuter avec deux autres policiers qui étaient dans leur véhicule<br />

de service de l’autre côté de la rue.<br />

- Dans son rapport, le commissaire à la déontologie <strong>policière</strong> ne fait<br />

état d’aucun de ses faits pourtant pour la plupart corroboré par les<br />

témoins de l’événement. » (sic)<br />

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[6] Le Comité constate que ces « représentations » sont plutôt de la nature d’un<br />

témoignage, mais que la plaignante n’y allègue pas de faits qui puissent être<br />

considérés comme nouveaux, par rapport aux déclarations de celle-ci qui se<br />

retrouvent déjà au dossier du Commissaire.<br />

[7] Rappelons que, conformément à l’article 184 de la Loi et suivant<br />

l’enseignement de la Cour d’appel du Québec dans l’arrêt King 2 , la révision ne doit<br />

se faire qu’en fonction du dossier constitué par le Commissaire qui seul a « le droit<br />

de mener l’enquête, y compris celui de recevoir une preuve additionnelle<br />

pertinente », de sorte que le Comité ne peut recevoir de nouveaux éléments de<br />

preuve.<br />

APPRÉCIATION DE LA DEMANDE DE RÉVISION<br />

[8] Par sa décision de 28 pages, le Commissaire rejette la plainte de<br />

M me <strong>Beaudet</strong> portant sur les reproches suivants qu’elle formule à l’égard de<br />

l’agent Jason Dubé, matricule 183 et de l’agent William Guay, matricule 477, tous<br />

deux membres du Service de police de la Ville de Trois-Rivières :<br />

1) Ne pas avoir respecté l’autorité de la loi et des tribunaux, ni collaboré à<br />

l’administration de la justice, en intervertissant l’ordre chronologique des<br />

événements, en ne disant pas toute la vérité et en se parjurant devant la<br />

cour municipale.<br />

2) Ne pas avoir exercé leurs fonctions avec probité en présentant un rapport<br />

qu’ils savent faux ou inexact.<br />

2 Montour c. King, C.A. Montréal, 500-09-014472-047, 20 juillet 2005, paragr. 57.<br />

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[9] Le Comité souligne que, pour rencontrer son fardeau de preuve à l’égard de<br />

ces deux reproches, il faut que le Commissaire puisse démontrer de façon<br />

prépondérante la fausseté des témoignages des agents Dubé et Guay devant la<br />

cour municipale, ou la fausseté ou l’inexactitude de leur rapport et, en outre, qu’il<br />

puisse démontrer de façon prépondérante que ces policiers avaient connaissance<br />

de cette fausseté ou de cette inexactitude et qu’elle était intentionnelle, délibérée et<br />

visait à tromper 3 .<br />

[10] Or, après étude du dossier du Commissaire, le Comité approuve la<br />

conclusion suivante qu’il tire des diverses déclarations de la plaignante :<br />

« [105] Il est difficile de faire abstraction des exagérations et des<br />

contradictions existantes dans les différentes déclarations de la<br />

plaignante ainsi qu’avec celles données par son ex-conjoint qui de<br />

surcroît, sont largement contredites par les témoins civils. »<br />

[11] Soulignons, à titre d’exemple des exagérations et contradictions de la<br />

plaignante, le fait qu’elle déclare dans un premier temps, dans sa plainte au<br />

Commissaire, que les agents Dubé et Guay l’ont traînée sur le trottoir avec<br />

violence, pour ensuite donner une toute autre version sur ce point lorsqu’elle<br />

rencontre l’enquêteur du Commissaire et un enquêteur de la Sûreté du Québec.<br />

Voici ses différentes déclarations :<br />

Plainte au Commissaire<br />

« C’est alors que l’agent Dubé m’empoigne violemment par le bras<br />

gauche et me “brasse”, je refuse d’avancer. L’autre agent voyant<br />

l’agressivité de son confrère s’avance, me prend par le bras droit et<br />

tous les deux me traînent sur le trottoir avec violence. »<br />

(Soulignement du Comité)<br />

3 Commissaire c. Bélanger, C.D.P., C-2000-2920-2, 2 mai 2002 (décision maintenue en partie par<br />

la Cour du Québec : Bélanger c. Commissaire, C.Q. Hull, 550-80-000045-027, 19 janvier 2004);<br />

Commissaire c. Blémur, C.D.P., C-2004-3187-3, 3 février 2005.<br />

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Déclarations du 7 janvier <strong>2011</strong> à l’enquêteur du Commissaire<br />

« Q- Madame <strong>Beaudet</strong>, je vous rencontre à titre de plaignante dans le<br />

dossier déontologique 10-0373 concernant les allégations<br />

portées contre l’agent Jason Dubé de la police de Trois-Rivières.<br />

Dans un premier temps, je vous présente votre plainte ainsi<br />

qu’une déclaration à votre nom du 19 février 2010. Dites-moi,<br />

après lecture, est-ce bien ce que vous vouliez dire et avez-vous<br />

des modifications à apporter à ces documents?<br />

R- Je veux préciser que dans ma plainte à la page # 3 du<br />

4 e paragraphe de la 2 e ligne, l’agent Dubé ne m’a pas traîné mais<br />

bien essayé de me traîner. Ce n’est que lorsque l’autre policier<br />

est venu l’aider que j’ai avancé de moi-même. […] »<br />

(Soulignement du Comité)<br />

« Q- Dans votre plainte vous relatez avoir été traîné sur le trottoir avec<br />

violence. Racontez?<br />

R.- Sur le gazon, Dubé me tirait et je bloquais avec mes pieds. Je<br />

n’ai pas été traîné parce qu’il n’a pas été capable. Environ une<br />

ou deux minutes du début de cette agression, l’autre policier est<br />

arrivé pour me sécuriser en me prenant de sa main mon bras<br />

droit. Il l’a fait de façon correcte et c’est à ce moment que j’ai<br />

accepté d’avancer. […] » (sic) (Soulignements du Comité)<br />

Déclaration à un enquêteur de la Sûreté du Québec<br />

« L’agent Dubé m’a empoigné par le bras gauche en utilisant ses<br />

deux mains. Il me tirait vers lui afin de me ramener vers la rue. À ce<br />

moment, je ne me débattais pas, je tentais seulement de demeurer<br />

sur place en forçant avec mes deux pieds que je maintenais fortement<br />

au sol. Selon moi ça duré environ 30 secondes, mais ça m’a parue<br />

une éternité. J’ai tellement eu peur que j’ai senti ma dernière heure<br />

venu. Lorsque le plus jeune policier est intervenu, ça m’a rassuré et<br />

j’ai cessé de me retenir. Une fois près de la voiture, le policier Dubé<br />

m’a poussé fortement sur le capot. » (sic) (Soulignements du Comité)<br />

[12] Le Comité est également d’accord avec les doutes exprimés par le<br />

Commissaire sur la crédibilité des déclarations de l’ex-conjoint de la plaignante,<br />

M. Eraldo Gentelletti. Notons, en particulier, que ce dernier répond à la question de<br />

l’enquêteur du Commissaire : « Q- Parlez-moi du ton utilisé par votre blonde sur les<br />

lieux? », en disant : « R- Tout au long de l’intervention, très calme ».<br />

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[13] À cet égard, au paragraphe 98 de sa décision, le Commissaire cite les<br />

témoignages de plusieurs personnes qui ont assisté à une partie de cette<br />

intervention <strong>policière</strong>, lesquels témoignages démontrent que la plaignante était loin<br />

d’être « très calme » :<br />

« [98] […] ▪ “Madame <strong>Beaudet</strong> parlait aussi fort que le policier et<br />

semblait lui demander quelque chose”;<br />

elle avait les poings dans les airs et “elle était vraiment fâchée”;<br />

elle “était agressive au ‘boute’. Elle hurlait et avait l’air d’une<br />

folle”; [sic]<br />

elle criait fort en présence des deux policiers qui essayaient de<br />

discuter avec elle;<br />

elle criait au policier “tu ne connais rien et tu ne viendras pas<br />

m’en montrer icitte. C’est mon bloc ici”; [sic]<br />

la propriétaire criait tout le temps “parce qu’elle ne voulait pas<br />

que le policier ait raison et parlait plus fort que lui”;<br />

lors de l’événement, “ça gueulait pas à peu près” : “la femme<br />

criait et sacrait après les policiers dont j’ai trouvé, qu’ils avaient<br />

été patients envers cette dame”;<br />

“elle était vraiment sortie de ses gonds”;<br />

c’est la femme qui était agressive et “les policiers tentaient de<br />

modéré ses ardeurs mais elle en rajoutait. Pour les policiers, ils<br />

n’ont pas sacré. Je les ai trouvés tolérant”. » [sic]<br />

[14] Dans ces circonstances et à la lumière de tout le dossier du Commissaire, le<br />

Comité considère qu’il est tout à fait raisonnable de la part de ce dernier d’estimer<br />

ne pas être en mesure d’offrir une preuve claire et convaincante d’une version des<br />

faits qui diffère de celle des agents Dubé et Guay, non plus que de faire une preuve<br />

prépondérante de la conduite qui est reprochée à ces policiers.<br />

[15] En conséquence, le Comité n’a pas à intervenir.<br />

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[16] PAR CES MOTIFS, le Comité :<br />

[17] REJETTE la demande de révision;<br />

[18] CONFIRME la décision du Commissaire; et<br />

[19] CLÔT le dossier.<br />

COMITÉ DE DÉONTOLOGIE POLICIÈRE<br />

Michèle Cohen, avocate

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