La clé des champs urbains en Gironde - Spirit
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Cours & jardins<br />
Halte aux clichés ! Les réflexions coloniopaternalistes<br />
d’un Jacques Chirac ont fait long<br />
feu, g<strong>en</strong>re « Nos amis africains ont le rythme<br />
dans la peau » et ils jou<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> du djembé. Mais<br />
les lieux communs ont la vie longue, et souv<strong>en</strong>t<br />
quand on parle de danse v<strong>en</strong>ue d’Afrique, on<br />
exalte la beauté <strong>des</strong> corps noirs sans vraim<strong>en</strong>t<br />
s’attacher au cont<strong>en</strong>u. Certes, d’aucuns s’impos<strong>en</strong>t<br />
depuis quelques années, et nous avions pu<br />
apprécier récemm<strong>en</strong>t deux magnifiques Sacres<br />
du Printemps, ceux d’Heddy Maalem et Georges<br />
Momboye. Pourtant, il est difficile de r<strong>en</strong>voyer la<br />
tradition dans ses pénates quand notre société<br />
cherche ailleurs l’ « auth<strong>en</strong>ticité » perdue.<br />
Les artistes africains, qui n’ont que faire de nos<br />
préoccupations, développ<strong>en</strong>t depuis longtemps<br />
déjà une expression contemporaine qui a trouvé<br />
ses voies, et bouleversé les co<strong>des</strong> traditionnels.<br />
Du Bénin à l’Afrique du Sud, on pourra<br />
découvrir au Carré <strong>des</strong> Jalles, lors d’une soirée<br />
intitulée l’Afrique danse !, un panel de quelques<br />
artistes à la réflexion originale, pleine d’humour<br />
ou carrém<strong>en</strong>t désabusée, voire qui dézingue un<br />
certain voyeurisme exotique. Quatre spectacles<br />
et trois chorégraphes pour donner un aperçu<br />
de cette scène africaine explosive.<br />
V<strong>en</strong>ue d’Afrique du sud, Nelisiwe Xaba propose<br />
deux pièces assez radicales pour planter le décor.<br />
Le solo Plasticization y va franco… sur le plastique.<br />
Fantastique ou pas, et tant pis s’il gêne le Pape<br />
aux <strong>en</strong>tournures, il fait vraim<strong>en</strong>t partie de notre<br />
vie, de plus <strong>en</strong> plus aseptisée, stérilisée, et sert<br />
de remparts contre les impuretés. <strong>La</strong> danseuse/<br />
chorégraphe, qui travaille avec <strong>des</strong> plastici<strong>en</strong>s…<br />
n’a pas la langue dans sa poche mais s’exprime<br />
via le corps. Son autre pièce, Ils me regard<strong>en</strong>t et<br />
c’est tout ce qu’ils p<strong>en</strong>s<strong>en</strong>t fait référ<strong>en</strong>ce à l’histoire<br />
de Sarah Baartman connue <strong>en</strong> France comme la<br />
Vénus Hott<strong>en</strong>tote, cette femme emm<strong>en</strong>ée du Cap<br />
à Londres <strong>en</strong> 1810, et exhibée à travers l’Europe<br />
comme une curiosité sci<strong>en</strong>tifique. Longtemps<br />
considérée comme le symbole de l’oppression de<br />
la femme africaine, Nalisiwe Xaba se l’approprie<br />
et la considère comme l’allégorie de son propre<br />
périple artistique de Soweto aux scènes d’Europe<br />
ou <strong>des</strong> Etats-Unis. Dénonçant au passage cette<br />
approche voyeuriste du contin<strong>en</strong>t noir. Welcome<br />
to Bi<strong>en</strong>v<strong>en</strong>ue est une double invitation dans<br />
le joli monde de la consommation, accessible<br />
10<br />
Football, érection et autres questions<br />
Pour la Saint Sylvestre, nombreux <strong>en</strong>tam<strong>en</strong>t l’année <strong>en</strong> se trémoussant.<br />
Mais ceux qui aim<strong>en</strong>t la danse, la vraie, la belle, la création contemporaine<br />
ne seront pas <strong>en</strong> reste, avec <strong>en</strong> ce début d’année une programmation<br />
décoiffante, qui regarde vers l’Afrique, le ballon ou la moto.<br />
seulem<strong>en</strong>t avec un visa tamponné/imprimé<br />
<strong>en</strong> bonne et due forme. Mais ce n’est pas parce<br />
qu’on s’appelle Bi<strong>en</strong>v<strong>en</strong>ue que ce fameux visa est<br />
facile à obt<strong>en</strong>ir. Le chorégraphe Xavier Lot et le<br />
danseur Bi<strong>en</strong>v<strong>en</strong>ue Bazié, racont<strong>en</strong>t l’histoire<br />
d’une r<strong>en</strong>contre parsemée de barrières, de<br />
frontières, de douanes et de petites humiliations.<br />
Alokpa, de Norbert S<strong>en</strong>ou et Ewa Tohinou, deux<br />
artistes d’origine béninoise installés à Bordeaux,<br />
est comme un écho, un défi à l’espace sonore. Un duo<br />
où geste et son s’imbriqu<strong>en</strong>t, et se propuls<strong>en</strong>t<br />
dans un jeu plein de malice et d’élégance.<br />
Plus près de chez nous, Pierre Rigal s’attaque à<br />
un sujet universel : le football. Mais att<strong>en</strong>tion,<br />
ce n’est pas parce qu’il débarque avec <strong>des</strong> pièces<br />
aux noms évocateurs - à Bordeaux avec Arrêts<br />
de jeu et à Gradignan avec Érection - que notre<br />
homme est un gros beauf. Mathématici<strong>en</strong>,<br />
réalisateur, athlète, danseur et chorégraphe, il<br />
réussit le pari improbable de mettre <strong>en</strong> danse<br />
le football. Et si Arrêts de jeu est bi<strong>en</strong> une<br />
chorégraphie nourrie de matches et de télé,<br />
elle n’<strong>en</strong> est pas moins une œuvre à portée plus<br />
globale, une « cérémonie » sol<strong>en</strong>nelle et absurde<br />
qui célèbre l’exploration du « jeu ». Plaisirs,<br />
<strong>en</strong>jeux, paradoxes de la mythologie collective et<br />
du souv<strong>en</strong>ir. En 1982, pour la demi-finale de la<br />
Coupe du monde RFA-France, Pierre Rigal avait<br />
9 ans. Ce match, parmi les plus palpitants de<br />
tous les temps, avait été fatal à la France, victime<br />
<strong>des</strong> prolongations liées aux arrêts de jeu…<br />
Après cette épopée footballistique, Rigal<br />
sera prés<strong>en</strong>t au Théâtre <strong>des</strong> Quatre Saisons,<br />
avec Érection, qui comme son nom l’indique<br />
presque, traite de l’histoire absurde et tragique<br />
de l’évolution humaine, de la position couchée<br />
à la position debout, dans une mise <strong>en</strong> scène<br />
d’Auréli<strong>en</strong> Bory. Le même soir, Comme crâne,<br />
comme culte de Christian Rizzo et Jean-Baptiste<br />
André est une déclinaison de Skull Cut, solo créé<br />
par Rizzo <strong>en</strong> 2002 pour Rachid Ouramdane.<br />
Un motard casqué se retrouve seul, sans sa<br />
moto, défait de son id<strong>en</strong>tité. Une soirée qui met<br />
<strong>en</strong> miroir deux chorégraphies radicalem<strong>en</strong>t<br />
opposées qui étonn<strong>en</strong>t et interrog<strong>en</strong>t.<br />
Autre interrogation, celle de Go on ! par la<br />
compagnie Samuel Mathieu. Quelques pas<br />
à deux, quatre duos qui questionn<strong>en</strong>t la notion de<br />
couple comme le rapport scène/salle, dehors/dedans.<br />
Ce projet <strong>en</strong> deux temps, propose une danse<br />
fébrile, très physique, et essaie d’extraire de ces<br />
duos un matériau chorégraphique pour plusieurs<br />
danseurs. Un défi qui allie performance et<br />
virtuosité. À quoi tu p<strong>en</strong>ses ? de la compagnie<br />
Beau Geste se pose aussi pas mal de questions<br />
sur l’art de la danse. Dominique Boivin a travaillé<br />
cette fois avec le réalisateur Joël Calmette<br />
et l’écrivain Marie Nimier, pour cette pièce<br />
étrange au croisem<strong>en</strong>t du langage, du texte et<br />
du mouvem<strong>en</strong>t. Et qui se déploie sur scène<br />
avec écran, images projetées au sol, alors que<br />
les interprètes sont traqués par une caméra.<br />
L’Afrique danse !, jeudi 18 janvier, à 20h30, Le Carré <strong>des</strong> Jalles,<br />
Saint-Médard-<strong>en</strong>-Jalles.<br />
R<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts 05 57 93 18 93 www.carre<strong>des</strong>jalles.org<br />
Arrêts de jeu, mardi 30 et mercredi 31 janvier, 20h,<br />
TnBA, salle Jean Vauthier.<br />
R<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts 05 56 33 36 80 www.tnba.org<br />
Érection & Comme crâne, comme culte, v<strong>en</strong>dredi 2 février,<br />
20h45, Théâtre <strong>des</strong> Quatre Saisons, Gradignan (33710).<br />
R<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts 05 56 89 98 23 www.t4saisons.com<br />
Go on !, Cie Samuel Mathieu, mercredi 31 janvier, 21h<br />
et À quoi tu p<strong>en</strong>ses ?, Cie Beau Geste, samedi 3 février, 21h,<br />
Le Cuvier de Feydeau, Artigues-près-Bordeaux (33370).<br />
R<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts 05 57 54 10 40 www.lecuvier-artigues.com<br />
Barbie vous déshabille<br />
Mari Silès, chorégraphe de la compagnie Strap, dénonce<br />
la mascarade. Celle de la représ<strong>en</strong>tation féminine, lieu<br />
de tous les artifices, mais aussi de l’expéri<strong>en</strong>ce intime,<br />
qui peut se transformer <strong>en</strong> un jeu de rôle perman<strong>en</strong>t.<br />
Pour cela, deux danseuses, Léa Cornetti et Carole<br />
Vergne ; Une diseuse, Katia Feijoo. Quatre femmes<br />
atypiques, à la forte personnalité, pour évoquer la<br />
performativité du g<strong>en</strong>re, les notions du « je » et du<br />
« jeu », la question de l’érotisme qui relève de l’intime<br />
comme de la pose, d’une construction assujettie à une<br />
représ<strong>en</strong>tation. À coup de Barbies et de sex toys, de<br />
poses/prises de position, elles dis<strong>en</strong>t avec beaucoup<br />
d’humour les stéréotypes, et réinv<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t une nouvelle<br />
façon d’être, loin <strong>des</strong> cadres, loin <strong>des</strong> id<strong>en</strong>tités définies.<br />
Cette création 2007, dont on avait déjà pu voir <strong>des</strong><br />
esquisses alléchantes l’année dernière, a quelque chose<br />
de salvateur. Mêlant la provocation, le ludique à une<br />
question très sérieuse. Qui sont les femmes ?<br />
Chair amie, du lundi 29 janvier au v<strong>en</strong>dredi 2 février, 20h30<br />
sauf le mercredi 31 janvier à 15h et 20h30, TNT-Manufacture<br />
de Chaussures.<br />
R<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts 05 56 85 82 81 www.letnt.com