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Complications neurologiques liées à l'alcool - Psychologie - M ...

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17-161-B-10<br />

Ces signes peuvent régresser avec l’abstinence, alors que chez d’autres<br />

patients, ils peuvent évoluer vers une réelle démence [70]. L’évaluation<br />

neuropsychologique détaillée révèle de légers troubles cognitifs chez 50 <strong>à</strong><br />

70 % des patients désintoxiqués, anomalies qui persisteront dans 10 % des<br />

cas malgré une abstinence totale.<br />

L’étiopathogénie de cette démence est encore mal élucidée en raison du<br />

manque de critères cliniques précis, du peu d’études anatomopathologiques<br />

et de l’absence de mécanismes pathologiques acceptés. En effet, les troubles<br />

cognitifs de l’alcoolique chronique sont souvent d’origine multifactorielle.<br />

Tout d’abord l’alcool et ses métabolites peuvent léser directement le tissu<br />

cérébral. La malnutrition, qui est souvent liée <strong>à</strong> l’alcoolisme chronique, est<br />

aussi une source de destruction cérébrale sous la forme d’une encéphalopathie<br />

de Gayet-Wernicke, dont le diagnostic est souvent manqué [71, 113]. D’autres<br />

étiologies (traumatisme, hématome sous-dural chronique, artériosclérose,<br />

maladie d’Alzheimer) peuvent aussi rendre difficile l’appréciation de cette<br />

démence.<br />

L’intrication de ces différents facteurs aggravants rend donc difficile<br />

l’appréciation de la toxicité directe de l’alcool sur le cerveau. Cependant, il<br />

est actuellement admis que l’alcool entraîne une détérioration cognitive<br />

souvent paucisymptomatique, caractérisée avant tout par un syndrome<br />

frontomnésique. Cette prédominance frontale est confirmée par les études<br />

radiologiques et anatomopathologiques qui révèlent une atrophie <strong>à</strong><br />

prédominance frontale, affectant aussi bien la substance blanche que<br />

grise [6, 53, 83, 92, 113].<br />

Dégénérescence cérébelleuse alcoolique<br />

Chez la plupart des alcooliques qui souffrent d’une ataxie cérébelleuse, il<br />

s’agit généralement des séquelles d’une encéphalopathie de Gayet-<br />

Wernicke [121]. Cependant, il est également admis qu’une dégénérescence<br />

cérébelleuse peut résulter de la toxicité directe de l’alcool sur le cervelet<br />

[93, 94].<br />

La pathologie révèle une perte des neurones corticaux, principalement les<br />

cellules de Purkinje, surtout au niveau du vermis. Ces images histologiques<br />

sont similaires <strong>à</strong> celles que l’on voit dans l’encéphalopathie de Gayet-<br />

Wernicke, soulignant le fait que ces deux désordres sont souvent intriqués [121].<br />

Cette dégénérescence peut être également visualisée par les examens<br />

neuroradiologiques qui révéleront une atrophie cérébelleuse, avant tout<br />

vermienne. Cependant, il n’y a pas de corrélation entre les signes cliniques et<br />

radiologiques.<br />

Les troubles cérébelleux s’installent généralement progressivement, bien<br />

qu’un début aigu puisse survenir lors d’infections ou d’un sevrage. Les<br />

manifestations cliniques se caractérisent surtout par une ataxie statique avec<br />

un élargissement du polygone de sustentation, une démarche instable et une<br />

titubation du tronc. Des troubles cérébelleux cinétiques sont plus rares, de<br />

même que la dysarthrie. Une hypotonie, une dysmétrie oculaire sont des<br />

signes peu fréquents [121]. En revanche, cette ataxie se combine souvent avec<br />

une polyneuropathie.<br />

En raison des bonnes capacités de réserve du cervelet, l’évolution de cette<br />

ataxie est lente. Il n’est pas rare qu’elle se stabilise, voire même s’améliore<br />

avec l’abstinence et une amélioration de la nutrition [29, 121].<br />

Delirium tremens ou syndrome<br />

de sevrage alcoolique<br />

L’apparition d’un delirium tremens implique une diminution brusque ou<br />

complète de toute consommation d’alcool importante et régulière. Le gradient<br />

cérébral de l’alcool sera déterminant dans l’apparition des symptômes de<br />

sevrage. Ceux-ci seront encore précipités par des facteurs favorisants ou<br />

aggravants tels une infection, de la fièvre, un traumatisme ou une opération.<br />

Le delirium tremens se manifeste selon quatre stades successifs de gravité<br />

croissante, pouvant conduire parfois au décès du patient<br />

[5, 80].<br />

Le premier stade se caractérise par l’apparition d’un discret tremblement<br />

d’attitude, une inappétence, des sudations surtout nocturnes. Ce stade peut<br />

souvent passer inaperçu ou être mis sur le compte de la fièvre ou d’une<br />

anxiété.<br />

Au stade suivant, le patient devient réellement anxieux, irritable, insomniaque<br />

avec un tremblement beaucoup plus marqué et qui se généralise. Des<br />

sudations profuses s’accompagnent de nausées et de diarrhées. Au troisième<br />

stade s’installe une confusion avec des hallucinations, généralement <strong>à</strong><br />

composante zoopsique. Le patient devient également de plus en plus agité,<br />

oppositionnel, tachycarde et peut parfois se plaindre de céphalées. Finalement<br />

au dernier stade, on assiste <strong>à</strong> une accentuation de tous ces symptômes avec<br />

notamment des troubles végétatifs et l’apparition de crises d’épilepsie.<br />

Pour évaluer la sévérité du delirium ou de la réponse au traitement, différents<br />

scores peuvent être utilisés. Le plus répandu est l’échelle CIWA-AR (Clinical<br />

Institute Withdrawal Assessment) [109].<br />

Dès les premiers signes de sevrage, il importe de commencer rapidement un<br />

traitement pour éviter toutes complications (infection nosocomiale, crise<br />

page 4<br />

COMPLICATIONS NEUROLOGIQUES LIÉES À L’ALCOOL Neurologie<br />

d’épilepsie, décès), en assurant une bonne hydratation du patient et une<br />

vitaminothérapie. Pour empêcher l’apparition ou diminuer les symptômes de<br />

sevrage, un traitement <strong>à</strong> base de benzodiazépine ou de clométhiazole per os<br />

est préconisé. Les barbituriques, qui ont une longue durée d’action et qui sont<br />

très sédatifs, sont <strong>à</strong> éviter, de même que les neuroleptiques qui sont<br />

épileptogènes et qui peuvent produire une hyperthermie maligne.<br />

Les benzodiazépines demeurent les substances de choix en raison de leur<br />

sécurité d’emploi et de leur efficacité [12, 42]. Mais le choix entre une<br />

benzodiazépine <strong>à</strong> courte ou <strong>à</strong> longue durée d’action demeure encore<br />

controversé. En effet, les résultats de deux études démontrent que les formes<br />

galéniques <strong>à</strong> longue durée d’action protègent mieux la mémoire et certaines<br />

fonctions cognitives que les benzodiazépines <strong>à</strong> courte durée d’action<br />

[98, 127].<br />

Cependant, les préparations <strong>à</strong> courte durée d’action sont plus avantageuses<br />

pour la personne âgée ou lors d’insuffisance hépatique. De plus, leur<br />

utilisation par voie intramusculaire est déconseillée en raison de l’absorption<br />

aléatoire de la substance. Pour débuter un traitement par une benzodiazépine<br />

pour un sevrage alcoolique, il faut utiliser des doses supérieures <strong>à</strong> celles qui<br />

sont généralement prescrites en cas d’anxiété, et la prescription se fera en<br />

fonction des symptômes [100].<br />

Du point de vue pharmacologique, les benzodiazépines, tels le lorazépam, le<br />

témazépam, l’oxazépam, qui sont métabolisées par conjugaison plutôt que par<br />

oxydation, sont bien tolérées lors d’insuffisance hépatique. En revanche, il est<br />

recommandé de diminuer la dose de moitié des benzodiazépines <strong>à</strong><br />

métabolisme oxydatif lors d’hépatopathie. De même, en cas d’insuffisance<br />

rénale, la concentration des métabolites actifs va s’accumuler pour la plupart<br />

des benzodiazépines. Seuls le lorazépam et l’oxazépam n’ont pas cet<br />

inconvénient et peuvent être prescrits dans cette situation. Cependant, il est<br />

recommandé de diminuer la dose de lorazépam de moitié et de 25 % celle de<br />

l’oxazépam si la clairance <strong>à</strong> la créatinine est inférieure <strong>à</strong> 10 mL/min.<br />

Crises d’épilepsie et alcool<br />

L’alcool serait, pour certains auteurs, la cause exclusive de crises d’épilepsie<br />

ou simplement un facteur déclenchant [28, 72]. Une consommation quotidienne<br />

de 50 <strong>à</strong> 300 g d’alcool multiplie le risque de crises par 10 par rapport <strong>à</strong><br />

l’abstinent [84]. Bien que souvent <strong>liées</strong> au sevrage alcoolique, elles peuvent<br />

être la conséquence d’un traumatisme craniocérébral, d’une infection du<br />

système nerveux, de troubles métaboliques, d’une intoxication ou d’un<br />

sevrage médicamenteux.<br />

Ivresse convulsivante<br />

Au cours d’une alcoolisation aiguë, une crise d’épilepsie généralisée peut<br />

survenir chez les buveurs occasionnels au moment où l’alcoolémie est élevée.<br />

Il s’agit généralement de crises uniques qui ne se répètent pas en dehors d’un<br />

excès d’alcool. Leur mécanisme est inconnu mais on suspecte que l’alcool<br />

diminue le seuil épileptogène chez des sujets prédisposés.<br />

Crises de sevrage<br />

Le sevrage est la cause la plus fréquente de crises d’épilepsie chez<br />

l’alcoolique. Il s’agit de crises d’épilepsie généralisées qui se manifestent<br />

dans les 12 <strong>à</strong> 24 heures qui suivent l’arrêt de la consommation d’alcool,<br />

souvent sous forme de salves de crises [122]. Un état de mal épileptique peut<br />

même survenir dans 1<strong>à</strong>7%descas. Elles seraient provoquées par la<br />

suractivation du système glutamatergique [56]. Selon certains auteurs, la<br />

répétition de ce type de crises pourrait rendre le cerveau plus excitable selon<br />

un processus de kindling [8, 18, 67]. Selon ce modèle, Bartolomei et al ont<br />

développé une classification dynamique de ces crises [7]. Tout d’abord les<br />

crises se manifesteraient essentiellement lors d’un sevrage chez un patient<br />

encore jeune, stade où les complications <strong>neurologiques</strong> sont encore rares.<br />

Avec la poursuite d’une consommation chronique d’alcool, les crises vont<br />

devenir plus fréquentes et non nécessairement <strong>liées</strong> au sevrage. Et,<br />

finalement, les crises pourraient même survenir chez un patient qui serait<br />

devenu un abstinent total et définitif en raison de lésions cérébrales<br />

irréversibles <strong>liées</strong> <strong>à</strong> la toxicité de l’alcool qui diminuerait ainsi le seuil<br />

épileptogène.<br />

Crises idiopathiques<br />

Elles surviennent de façon aléatoire après de nombreuses années de<br />

consommation d’alcool mais indépendamment du rythme d’ingestion. Elles<br />

seraient <strong>liées</strong> aux modifications structurelles du cerveau dues <strong>à</strong> l’alcool. Elles<br />

peuvent disparaître totalement avec l’abstinence.<br />

Il s’agit avant tout de crises d’épilepsie convulsives généralisées, brèves,<br />

souvent <strong>à</strong> prédominance clonique. Si un point de départ focal de la crise est<br />

noté, il convient toujours d’exclure une lésion cérébrale sous-jacente.<br />

Généralement, si les crises ne sont pas secondaires <strong>à</strong> une lésion,<br />

l’électroencéphalogramme intercritique est normal ou perturbé de manière

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