Trait d'Union Janvier 2012 - APEL Saint Jean Hulst
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Interview<br />
croisée<br />
Regards<br />
d’enseignantes<br />
sur l’apprentissage de<br />
l’autonomie<br />
Le sujet de l'autonomie est évidemment essentiel<br />
du point de vue scolaire. Nous avons demandé à<br />
Mme de Monts, enseignante en CPet directrice-adjointe<br />
du cycle 1 (maternelle-CP-CE1) ainsi qu’à<br />
Mme Pothelet, enseignante et responsable de niveau<br />
en 6ème, de nous donner leurs avis de professeurs.<br />
I – L’apprentissage de l’autonomie fait-il partie<br />
de vos préoccupations de professeur (ou de responsable<br />
de niveau)?<br />
Madame de Monts: Oui car l’autonomie résulte à la<br />
fois du développement et de l’apprentissage. L’autonomie<br />
ne s’enseigne pas mais l’école participe à<br />
son acquisition. L’enseignant est comme un « metteur<br />
en scène » qui doit proposer des situations qui<br />
vont permettre à l’élève de devenir autonome.<br />
C’est une compétence transversale très importante,<br />
un savoir-faire et un savoir être, que nous travaillons<br />
en classe et qui est évaluée en 1ère page du livret<br />
d’évaluation. L’autonomie est travaillée tous les<br />
jours à travers les différentes activités et apprentissages.<br />
Elle varie et évolue bien sûr selon le niveau<br />
de chaque classe. L’autonomie attendue en CP<br />
n’est pas celle de la PS ni celle du CM2.<br />
Notre mission d’enseignant est de faire de nos<br />
élèves des enfants actifs, qui apprennent à réfléchir,<br />
qui sont investis et partie prenante dans leurs apprentissages.<br />
Nos élèves ne doivent pas devenir<br />
des enfants assistés et passifs dans lesquels on déverserait<br />
le « Savoir ». Outre les apprentissages<br />
scolaires, une des finalités de l’Ecole est de former<br />
des individus « autonomes et responsables ».<br />
Madame Pothelet: Oui, bien sûr, puisque l’autonomie<br />
est une condition de la réussite scolaire!<br />
Le socle commun établit la possibilité d’échanger,<br />
d’agir et de choisir en connaissance de cause, en<br />
développant la capacité de juger par soi-même.<br />
L’école développe la capacité des élèves à apprendre<br />
tout au long de la vie et doit leur permettre de<br />
devenir pleinement responsables.<br />
II – Quel niveau d’autonomie attendez-vous de<br />
la part de vos élèves ?<br />
Madame de Monts: En CP, l’apprentissage de l’autonomie<br />
tient une place très importante. Il prolonge<br />
et approfondit le travail qui a été mené pendant 3<br />
ans de maternelle où le « devenir élève » est un apprentissage<br />
majeur.<br />
L’autonomie pratique et matérielle, objectif de la<br />
maternelle, va être approfondie en CP, dans la gestion<br />
par l'enfant de son matériel scolaire ou de son<br />
emploi du temps.<br />
Elle va être enrichie par le développement d’une autonomie<br />
intellectuelle à travers la capacité de lire,<br />
d’écrire, de compter, mais aussi de savoir coopérer,<br />
défendre son opinion, respecter l’autre.<br />
L'enfant devient peu à peu plus autonome dans son<br />
travail, il apprend à apprendre, à se corriger seul, à<br />
travailler en groupe aussi.<br />
Il doit aussi apprendre à mieux gérer son temps<br />
libre, lorsqu'il a l'occasion de choisir son activité. Il<br />
doit pouvoir assurer une responsabilité choisie en<br />
classe pour la semaine.<br />
Pour les devoirs du soir, dès janvier, il lit lui même<br />
ce qui est écrit dans son cahier de devoirs.<br />
Il est essentiel qu’il essaie de préparer, dans un premier<br />
temps, sa lecture ou sa dictée seul, sans que<br />
sa maman soit assise à côté. Puis, bien évidemment<br />
en CP, l’aide, le soutien ou la stimulation des parents<br />
seront importants pour vérifier, expliquer, encourager<br />
et valoriser. Les bonnes habitudes d’autonomie<br />
prises tôt porteront leur fruit dans les grandes<br />
classes.<br />
Enfin, nous devons créer un climat de classe propice<br />
au développement de l’autonomie affective.<br />
Chaque élève doit oser participer, affirmer son point<br />
de vue, prendre des décisions, et les assumer, ne<br />
pas être dépendant de l’approbation ou du jugement<br />
des autres, savoir recevoir la critique quand elle est<br />
constructive.<br />
Madame Pothelet: En 6ème, un élève doit savoir<br />
s’organiser de manière vraiment autonome. Il doit<br />
par exemple se repérer au collège et s’habituer à<br />
une plus grande diversité d’adultes et d’exigences.<br />
De manière pratique, il doit aussi savoir utiliser son<br />
agenda, préparer son cartable (à partir de son<br />
agenda et de son emploi du temps), tenir correctement<br />
ses cahiers et savoir présenter ses travaux<br />
écrits.<br />
Il faut également qu’il puisse organiser son temps,<br />
utiliser spontanément son dictionnaire et respecter<br />
des consignes précises.<br />
Il lui sera demandé de se concentrer, de mémoriser,<br />
de raisonner de façon logique ainsi que de développer<br />
sa persévérance.<br />
Un élément important de l’autonomie en 6ème sera<br />
pour l’élève de savoir écouter, de communiquer et<br />
de travailler en groupe.<br />
Il lui faut enfin savoir :<br />
- identifier un problème et mettre au point<br />
la démarche de résolution<br />
- identifier, expliquer et rectifier une erreur<br />
(ce qui est très difficile à leur niveau)<br />
- commencer à s’autoévaluer.<br />
III – Quels moyens mettez-vous en œuvre pour<br />
les aider à devenir autonomes ?<br />
Madame de Monts: Même si l’autonomie se<br />
construit tout au long de la journée à travers les activités,<br />
il est important d’y consacrer des séances<br />
spécifiques.<br />
- Pour l’autonomie d’ «apprendre à apprendre», le<br />
partage des stratégies personnelles des enfants est<br />
riche. « Moi, pour préparer ma dictée, je lis plusieurs<br />
fois, je recopie les mots en les cachant, je les<br />
épelle»... L’enseignant peut compléter en proposant<br />
des « méthodes ».<br />
- Pour gérer son temps libre, un affichage réalisé<br />
ensemble rappelle ce qu’il est possible de faire.<br />
- En début d’année, des moments sont consacrés à<br />
l’organisation et au rangement de son casier qui permet<br />
de gagner du temps quand on<br />
cherche quelque chose. Il en est<br />
de même pour la gestion du cartable<br />
(tout ce qui est dans mon cartable<br />
est-il utile ? Ai-je oublié<br />
quelque chose ? Comment faire<br />
pour penser à rapporter un maté-<br />
riel manquant ?...). Un enfant responsable<br />
est chargé chaque<br />
semaine de rappeler à la classe<br />
ce que l’on doit mettre son cartable.<br />
L’autonomie affective se développe<br />
à travers les séances<br />
d’échanges collectifs (les temps<br />
de vie de classe, les débats, les<br />
séances de découverte) où le rôle<br />
d’arbitre de l’enseignant permet à<br />
chacun de s’exprimer, mais aussi<br />
lors des travaux de groupe où<br />
chacun doit trouver sa place.<br />
Madame Pothelet: Le rôle de<br />
l’éducateur est l’accompagnement.<br />
Nous disposons en 6ème<br />
d’heures qui s’appellent « heures d’aide et d’accompagnement<br />
».<br />
L’adulte donne la main à l’élève pour le guider et le<br />
soutenir afin de l’aider à organiser son temps.<br />
Le professeur donne aux élèves des méthodes de<br />
travail: comment apprendre une leçon, comment<br />
s’organiser.<br />
Nous devons faire comprendre à nos élèves l’écart<br />
qu’il y a entre ce qu’ils sont capables de faire et ce<br />
qu’ils croyaient être capables de faire, entre ce qu’ils<br />
sont capables de faire et ce que nous attendons<br />
d’eux.<br />
IV – Quelles sont les principales difficultés que<br />
vous rencontrez dans cet apprentissage de l’autonomie<br />
?<br />
Madame de Monts: Chaque enfant est différent, est<br />
plus ou moins mûr. Et l’autonomie demandée à la<br />
maison varie selon les familles. Il est sûr qu’une action<br />
conjointe à l’école et à la maison favorisera cet<br />
apprentissage.<br />
De plus, l’acquisition de l’autonomie peut être gênée<br />
quand des enfants ne sont pas rentrés dans les apprentissages,<br />
ou n’en ont pas encore saisi le sens.<br />
Le rôle de l’enseignant sera alors d’aider l’enfant à<br />
prendre conscience qu’il travaille pour lui-même, et<br />
que les tâches qui lui sont demandées sont à réaliser<br />
pour ses apprentissages et non pas uniquement<br />
pour faire plaisir à sa maîtresse. La formation à l’autonomie<br />
suppose une appréciation du développement<br />
de l’élève.<br />
Enfin, la confiance en soi est très importante pour<br />
qu’un enfant ose se lancer et faire seul. Or certains<br />
enfants, peu sûrs d’eux, préfèrent ne pas faire ou<br />
sont trop dépendants de l’adulte. Le rôle du maître<br />
est très important dans la confiance que peut acquérir<br />
l’élève. C’est par cette confiance que l’élève réussira<br />
dans ses apprentissages. C’est pourquoi il est<br />
important de favoriser en classe un climat de sécurité,<br />
de bien-être, où l’erreur a sa place, où l’élève<br />
sait qu’il peut, qu’il a le droit de se tromper.<br />
Madame Pothelet: Les difficultés que nous rencontrons<br />
dans cet apprentissage de l’autonomie peuvent<br />
venir de plusieurs facteurs. Un des tous<br />
premiers peut être lié à des problèmes familiaux, affectifs<br />
ou amicaux. Nous pouvons également nous<br />
heurter à l’anxiété des enfants et de leurs parents.<br />
Le manque de motivation, de curiosité, de confiance<br />
en soi, les problèmes d’attention sont aussi des éléments<br />
qui peuvent représenter une difficulté. Enfin,<br />
les élèves confondent parfois « apprentissage de<br />
l’autonomie» avec «liberté octroyée»...<br />
Flash Flash back back<br />
Propos recueillis par Valentine Bourson<br />
et Astrid le Chatelier<br />
Pique-nique d’accueil<br />
des familles de 6ème,<br />
le 18 septembre 2011