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JORDI SAVALL OK - Cité de la musique

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DOMAINE PRIVÉ <strong>JORDI</strong> <strong>SAVALL</strong> 32<br />

Georg Friedrich Haen<strong>de</strong>l : une <strong>de</strong>stinée européenne<br />

Si l’on se souvient aisément que Haen<strong>de</strong>l naquit en<br />

Allemagne du Nord (Halle, 23 février 1685) et finit ses<br />

jours en Angleterre (Londres, 14 avril 1759), on oublie bien<br />

souvent que l’Italie l’accueillit entre-temps plus <strong>de</strong> trois<br />

années durant, entre 1707 et 1710. Ce séjour lui permit<br />

<strong>de</strong> parachever son « apprentissage » et <strong>de</strong> confirmer une<br />

réputation grandissante. Ainsi, le chroniqueur romain<br />

Francesco Valesio put mentionner dans son journal, le 14<br />

janvier 1707 : « Il est arrivé ici à Rome un Allemand, excellent<br />

c<strong>la</strong>veciniste et compositeur. Aujourd’hui, il a démontré ses talents<br />

en jouant <strong>de</strong> l’orgue dans l’église <strong>de</strong> Saint-Jean-<strong>de</strong>-Latran et<br />

en provoquant l’admiration universelle ».<br />

Haen<strong>de</strong>l mérite aujourd’hui encore cette « admiration<br />

universelle » car son œuvre couvre toutes les formes <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> <strong>musique</strong> baroque, tant vocale qu’instrumentale.<br />

Il explora tout d’abord dans son Allemagne natale le style<br />

contrapuntique qui fait <strong>la</strong> spécificité du goût <strong>de</strong> sa nation.<br />

Venu s’établir à Hambourg en 1703, il est engagé comme<br />

c<strong>la</strong>veciniste au Theater am Gänsemarkt, où il se lie avec<br />

Reinhard Keiser (1674-1739) et Johann Mattheson (1681-<br />

1764), et joue leurs œuvres. C’est là qu’il produit ses<br />

premiers opéras, qui revêtent alors une forme « hybri<strong>de</strong> »<br />

et s’inspirent autant <strong>de</strong>s modèles français qu’italiens.<br />

Durant toute sa jeunesse en Allemagne, Haen<strong>de</strong>l découvre<br />

et s’approprie les styles, les formes et les goûts les plus<br />

divers. Par ailleurs, il expérimente les principales formes<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>musique</strong> instrumentale : toccatas, fugues, suites,<br />

sonates pour c<strong>la</strong>vier, <strong>musique</strong> <strong>de</strong> chambre, <strong>musique</strong><br />

liturgique luthérienne.<br />

Par <strong>la</strong> suite, durant son séjour italien, il compose <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

<strong>musique</strong> liturgique catholique, <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>musique</strong> pour c<strong>la</strong>vier,<br />

et découvre le style cantabile du bel canto baroque,<br />

composant cantates et opéras italiens. En juin 1710, après<br />

maintes hésitations, il choisit <strong>la</strong> charge <strong>de</strong> Kapellmeister<br />

du Prince <strong>de</strong> Hanovre, qui a été désigné comme l’héritier<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> reine Anne Stuart d’Angleterre. Au mois <strong>de</strong> décembre,<br />

Haen<strong>de</strong>l effectue son premier voyage à Londres, qu’il<br />

renouvellera un an plus tard pour se fixer définitivement<br />

dans <strong>la</strong> capitale britannique. Dans sa nouvelle patrie, il<br />

s’adonne avec un égal bonheur à tous les genres musicaux<br />

Fêtes nautiques<br />

et célébration<br />

monarchique<br />

<strong>de</strong> son temps : <strong>musique</strong> <strong>de</strong> c<strong>la</strong>vier, sonates en duo et en<br />

trio, suites, concertos, sinfonie, opéras italiens, oratorios<br />

ang<strong>la</strong>is, <strong>musique</strong> liturgique (en l’occurrence anglicane)…<br />

En 1712, le prince <strong>de</strong> Hanovre hérite <strong>de</strong> <strong>la</strong> couronne<br />

d’Angleterre. Dès lors, sous le règne <strong>de</strong> Georges I er , « il caro<br />

Sassone » (le cher Saxon) <strong>de</strong>vient le véritable musicien<br />

officiel <strong>de</strong> <strong>la</strong> nouvelle dynastie régnante.<br />

Les <strong>de</strong>ux œuvres présentées ce soir forment, en quelque<br />

sorte, <strong>de</strong>s archétypes <strong>de</strong>s « compositions <strong>de</strong> circonstance »<br />

inspirées par <strong>la</strong> nouvelle maison royale. Leur nature relève<br />

à <strong>la</strong> fois <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>musique</strong> <strong>de</strong> cérémonie, du divertissement<br />

et du panégyrique. En effet, les fastes sonores qu’elles<br />

déploient sont entièrement dévolus à <strong>la</strong> glorification<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> monarchie ang<strong>la</strong>ise.<br />

Pour ce qui concerne <strong>la</strong> Water Music, diverses sources<br />

remontant jusqu’en 1715 évoquent le goût du nouveau roi<br />

pour <strong>de</strong> somptueuses promena<strong>de</strong>s en bateau sur <strong>la</strong> Tamise,<br />

donnant lieu à <strong>de</strong>s divertissements musicaux. L’usage était<br />

alors <strong>de</strong> disposer <strong>de</strong>s musiciens le long <strong>de</strong>s berges, voire<br />

<strong>de</strong> leur faire escorter le roi dans d’autres embarcations qui<br />

<strong>de</strong>vaient alors l’environner. En juillet 1717, un « rési<strong>de</strong>nt »<br />

prussien venu en ambassa<strong>de</strong> à Londres, Friedrich Bonet,<br />

re<strong>la</strong>te avec minutie l’une <strong>de</strong> ces fêtes nautiques<br />

qu’affectionnait tant Georges I er . Le roi avait remonté<br />

<strong>la</strong> rivière <strong>de</strong> Whitehall jusqu’à Chelsea, où il al<strong>la</strong>it souper<br />

chez Lord Rane<strong>la</strong>gh. Bonet explique qu’à côté <strong>de</strong> <strong>la</strong> barque<br />

du roi « naviguait celle <strong>de</strong>s musiciens, environ au nombre <strong>de</strong><br />

cinquante, qui jouaient <strong>de</strong> toutes sortes d’instruments, à savoir<br />

<strong>de</strong>s trompettes, <strong>de</strong>s cors, <strong>de</strong>s hautbois, <strong>de</strong>s bassons, <strong>de</strong>s flûtes<br />

alleman<strong>de</strong>s [traversières], <strong>de</strong>s flûtes françaises [à bec],<br />

<strong>de</strong>s violons et <strong>de</strong>s basses, mais il n’y avait aucun chanteur.<br />

La <strong>musique</strong> avait été composée spécialement par le célèbre<br />

Haen<strong>de</strong>l, originaire <strong>de</strong> Halle, principal compositeur à <strong>la</strong> Cour<br />

<strong>de</strong> Sa Majesté. Le Roi accueillit l’œuvre avec enthousiasme,<br />

et <strong>de</strong>manda même qu’elle fût reprise trois fois, quoiqu’elle durât<br />

une heure à chaque reprise, à savoir <strong>de</strong>ux fois avant et une fois<br />

après le souper ».<br />

Les <strong>musique</strong>s composées à cette occasion par Haen<strong>de</strong>l<br />

furent ultérieurement publiées sous différentes formes :<br />

orchestrale, réduite pour diverses formations <strong>de</strong> chambre,<br />

voire pour le c<strong>la</strong>vecin seul. Une tradition ancienne les<br />

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