DUMI2E - ANALYSE 3 CHAPITRE 2 - INTÉGRALES ... - Ceremade
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<strong>DUMI2E</strong> - <strong>ANALYSE</strong> 3<br />
<strong>CHAPITRE</strong> 2 - <strong>INTÉGRALES</strong> GÉNÉRALISÉES<br />
BRUNO NAZARET<br />
1. Introduction et premières définitions<br />
Commençons par un état des lieux de nos connaissances sur l’intégrale. On sait<br />
pour l’instant définir l’intégrale<br />
b<br />
f(x)dx<br />
a<br />
à l’aide d’une primitive de f lorsque<br />
• a et b sont des réels.<br />
• f : [a, b] → R est une fonction continue.<br />
Ceci est malheureusement insuffisant dans beaucoup d’applications. Par exemple,<br />
en calcul des probabilités, les valeurs des paramètres dont on calcule la probabilité<br />
n’ont aucune raison d’être confinées à un ensemble borné. Il existe aussi un certain<br />
nombre de cas, en particulier lorsque nous aborderons l’analyse de Fourier, où les<br />
fonctions considérées peuvent être amenées à prendre des valeurs complexes. Le but<br />
de ce chapitre est de généraliser la notion d’intégrale pour de telles fonctions.<br />
Tout d’abord, faisons une remarque importante qui s’applique en général à chaque<br />
fois que l’on veut étendre le domaine d’application d’un objet mathématique. Que<br />
veut-on dire par ”généraliser” ? En fait, l’intégrale des fonctions possède certaines<br />
propriétés que l’on désire conserver à travers cette extension de la théorie. En<br />
particulier, on veut garder<br />
• La linéarité : <br />
<br />
(f + λg) =<br />
<br />
f + λ<br />
• La relation de Chasles :<br />
c b c<br />
f = f + f.<br />
a<br />
a<br />
On veut de plus que la nouvelle définition coincide avec l’ancienne lorsque les bornes<br />
a et b sont finies et la fonction f est continue à valeurs réelle sur l’intervalle [a, b].<br />
1<br />
b<br />
g.
2 BRUNO NAZARET<br />
Commençons par le plus facile, la généralisation aux fonctions qui prennent des<br />
valeurs complexes.<br />
Définition 1.1. Soit f : [a, b] → C une fontion. On note, pour tout x dans [a, b],<br />
Rf(x) = Re(f(x)) et If(x) = Im(f(x)).<br />
On suppose que les fonctions Rf et If sont continues sur [a, b]. On définit alors<br />
l’intégrale de f sur [a, b] par<br />
b b b<br />
f(x)dx = Rf(x)dx + i If(x)dx.<br />
Exemple: Prenons, pour tout x ∈ [0, π],<br />
a<br />
a<br />
f(x) = e ix = cos(x) + i sin(x),<br />
et calculons π<br />
f(x)dx.<br />
Par définition,<br />
π<br />
f(x)dx =<br />
0<br />
0<br />
π<br />
0<br />
= [sin(x)] π<br />
0<br />
= 2i.<br />
a<br />
π<br />
cos(x)dx + i sin(x)dx<br />
0<br />
+ i [− cos(x)]π<br />
0<br />
Exercice. Montrer que pour tout x ∈ R et λ = 0,<br />
x<br />
e iλt dt = 1 iλx<br />
e − 1 ,<br />
iλ<br />
et retrouver le résultat précédent.<br />
0<br />
L’extension à un domaine non borné ou à une fonction non continue en un point<br />
est bien moins aisée et nous occupera tout ce chapitre. On introduit en premier<br />
lieu le concept d’intégrale généralisée. Le lecteur pourra remarquer que les résultats<br />
de ce chapitre ressemblent beaucoup aux résultats sur les séries. Considérons une<br />
fonction f : [a, b[→ R, continue sur [a, b[, avec a < b ≤ +∞.<br />
Définition 1.2. On dit que l’intégrale de f sur [a, b] est convergente si et seulement<br />
si, étant donnée une primitve F de f sur [a, b[, limx→b− F(x) existe. On note alors<br />
b<br />
a<br />
f(x)dx = lim F(x) − F(a).<br />
x→b− Dans le cas contraire, on dit que l’intégrale diverge.
CHAP. 2 - <strong>INTÉGRALES</strong> GÉNÉRALISÉES 3<br />
Remarque 1.3. Cette définition s’adapte de manière évidente au cas où le problème<br />
se pose en la borne a.<br />
La définition 1.2 couvre tous les cas que l’on voulait traiter. En effet, regardons<br />
en premier lieu le cas où b < +∞. Il y a alors 2 possibilités. Tout d’abord, si f<br />
admet une limite finie en b, alors f peut être prolongée par continuité en ce point<br />
et de ce fait, l’intégrale n’est pas généralisée. Par exemple, prenons le cas de<br />
sin x<br />
f(x) = sur ]0, 1].<br />
x<br />
Il est bien connu que f peut être prolongé par continuité en 0 par la valeur 1.<br />
On obtient donc une fonction continue sur l’intervalle [0, 1] dont l’intégrale est par<br />
conséquent parfaitement définie par la théorie classique.<br />
Ce n’est plus le cas si f tend vers une valeur infinie en b, et là, on doit vérifier<br />
que la définition s’applique. On va étudier ici un exemple qui se révèlera important<br />
par la suite. Soit α ∈ R et soit, pour tout 0 < x ≤ 1,<br />
fα(x) = 1<br />
xα. Pour tout α réel, la fonction est continue sur ]0, 1] et l’on a, pour tout x ∈]0, 1],<br />
<br />
1<br />
1 α−1<br />
x − 1 si α = 1,<br />
Fα(x) = fα(t)dt = 1 − α<br />
x<br />
− ln x si α = 1.<br />
On en déduit la proposition suivante.<br />
Proposition 1.4. (Intégrale de Riemann en 0) L’intégrale<br />
1<br />
dx<br />
0 xα converge si et seulement si α < 1.<br />
Exercice Calculer la valeur de l’intégrale précédente dans le cas où elle converge.<br />
L’autre cas que nous voulions traiter dans ce chapitre est celui où b = +∞. On<br />
reprend l’exemple précédent mais sur l’intervalle [1, +∞[ cette fois-ci. Après un<br />
calcul analogue, il vient en notant cette fois-ci, pour x ≥ 1,<br />
x<br />
dt<br />
Fα(x) =<br />
1 tα, <br />
1<br />
d’où le résultat suivant.<br />
lim<br />
x→+∞ Fα(x) =<br />
si α > 1,<br />
α − 1<br />
+∞ si α ≤ 1,
4 BRUNO NAZARET<br />
Proposition 1.5. (Intégrale de Riemann en +∞) L’intégrale<br />
+∞<br />
dx<br />
xα converge si et seulement si α > 1.<br />
1<br />
Remarque 1.6. Lorsque l’on interprète une intégrale en terme de l’aire (algébrique)<br />
comprise entre la courbe représentative de la fonction et l’axe des abscisses, on voit<br />
que la convergence de l’intégrale généralisée revient à se demander si cette portion<br />
du plan, non bornée dans ce cas, admet une aire finie. D’autre part, il peut être<br />
tentant de supposer que si une intégrale converge en +∞, alors la fonction ellemême<br />
converge vers 0 (ce qui sera la cas pour les séries). Il n’en est rien !!. En<br />
effet, prenons pour f la fonction définie sur [1, +∞[ de la manière suivante. Sur<br />
chaque intervalle de la forme [n, n + 1], où n est un entier, la fonction f est affine<br />
par morceaux et, pour tout x ∈ [n, n + 1],<br />
⎧<br />
4n<br />
⎪⎨<br />
f(x) =<br />
⎪⎩<br />
4 <br />
(x − n) si x ∈ n, n + 1<br />
2n3 <br />
2n − 4n 4<br />
<br />
x − n − 1<br />
2n3 <br />
si x ∈ n + 1 1<br />
2n3, n +<br />
n3 <br />
<br />
0 si x ∈ n + 1<br />
<br />
n3, n + 1 .<br />
On a alors (Faire un dessin !)<br />
N<br />
N−1 <br />
n+1<br />
N−1 1<br />
f(x)dx = f(x)dx =<br />
n2. 1<br />
n=1<br />
n<br />
On a vu dans le chapitre sur les séries que cette suite admet une limite finie lorsque<br />
N → +∞. Malgré tout, la fonction f ne tend pas vers 0 en +∞ puisque<br />
<br />
f n + 1<br />
2n3 <br />
= 2n −−−−→<br />
n→+∞ +∞.<br />
On a néanmoins le résultat suivant.<br />
Proposition 1.7. Soit f : [a, +∞[→ R telle que l’intégrale de f sur [a, +∞[ soit<br />
convergente. On suppose que f admet une limite en +∞. Alors, celle-ci vaut 0.<br />
Preuve. Raisonnons par l’absurde en supposant que<br />
λ = lim f(x) = 0.<br />
x→+∞<br />
n=1
CHAP. 2 - <strong>INTÉGRALES</strong> GÉNÉRALISÉES 5<br />
On peut supposer sans perdre en généralité que λ > 0 (considérer dans le cas<br />
contraire −f au lieu de f). Par définition de la limite,<br />
c’est-à-dire<br />
∀ε > 0, ∃Aε ≥ a; ∀x ≥ Aε, |f(x) − λ| < ε,<br />
λ − ε < f(x) < λ + ε.<br />
On choisit ε = λ<br />
2 . Ainsi, pour tout x ≥ Aε, f(x) ≥ λ<br />
2<br />
A<br />
f(x)dx =<br />
a<br />
≥<br />
Aε A<br />
f(x)dx + f(x)dx<br />
a<br />
Aε<br />
a<br />
Aε<br />
d’où, pour tout A ≥ Aε,<br />
f(x)dx + λ<br />
2 (A − Aε) −−−−→<br />
A→+∞ +∞.<br />
On obtient donc une contradiction avec l’hypothèse de convergence de l’intégrale de<br />
f sur [a, +∞[. <br />
A travers tous ces exemples, on voit que si l’on connaît une primitive de f, la<br />
convergence de<br />
b<br />
f(x)dx<br />
a<br />
se ramène à l’examen d’une limite de fonction. Néanmoins, comme dans le cas<br />
des séries, il n’est pas toujours possible d’exhiber une primitive. De nouveau, il<br />
s’agit de trouver des critères portant sur la fonction f assurant la convergence ou la<br />
divergence de l’intégrale.<br />
Remarque 1.8. Tout ce qui a été présenté ici se généralise à l’aide de la formule<br />
de Chasles à une fonction posédant un nombre fini de singularités. En effet, considérons<br />
une fonction f :]a, b[→ R continue sur ]a, b[ sauf en un nombre fini de<br />
points (ai)1≤i≤n. On écrira alors, au moins formellement, avec a0 = a et an+1 = b,<br />
b<br />
n<br />
ai+1<br />
f(x)dx = f(x)dx<br />
a<br />
k=0<br />
et on dira que b<br />
<br />
f(x)dx est convergente si et seulement si toutes les intégrales<br />
a<br />
ai+1<br />
f(x)dx sont convergentes.<br />
ai<br />
La méthode se shématise ainsi:<br />
• Repérer les points singuliers (±∞ inclus bien évidemment).<br />
• Etudier la nature de l’intégrale au voisinage de chacun de ces points.<br />
ai
6 BRUNO NAZARET<br />
2. Intégrales des fonctions positives<br />
Tout le paragraphe est basée sur la proposition suivante.<br />
Proposition 2.1. Soit f : [a, b[→ R une fonction positive et continue sur [a, b[ et<br />
soit, pour tout x ∈ [a, b[,<br />
x<br />
F(x) = f(y)dy.<br />
a<br />
Alors, l’intégrale de f sur [a, b] est convergente si et seulement si F est majorée sur<br />
[a, b[.<br />
Preuve. Soient x1 < x2 < b. Alors,<br />
F(x2) − F(x1) =<br />
=<br />
x2 x1<br />
f(y)dy − f(y)dy,<br />
a<br />
x2<br />
a<br />
f(y)dy.<br />
x1<br />
Or, x1 < x2 et f ≤ 0 sur [x1, x2] donc F(x2) ≥ F(x1). On en déduit que F est<br />
croissante sur [a, b[ et admet donc une limite finie en b si et seulement si elle est<br />
majorée sur [a, b[. <br />
On peut en déduire directement un premier critère de convergence.<br />
Théorème 2.2. Soient f, g : [a, b[→ R, deux fonction positives et continues sur<br />
[a, b[. On suppose que<br />
∀x ∈ [a, b[, f(x) ≤ g(x).<br />
Alors,<br />
• Si b<br />
a g(x)dx converge, il en va de même pour b<br />
a f(x)dx.<br />
• Si b<br />
a f(x)dx diverge, il en va de même pour b<br />
a g(x)dx.<br />
Preuve. La preuve est analogue à celle du critère de comparaison pour les séries<br />
numériques, puisqu’une fois encore, l’inégalité entre f et g se transmet à leur primitive.<br />
<br />
Exemples:<br />
• On pose, pour tout x ∈ [0, +∞[,<br />
f(x) = cos(x)2<br />
.<br />
1 + x2 f est une fonction continue et positive sur [0, +∞[ et, pour tout x ≥ 0,<br />
f(x) ≤ 1<br />
1 + x2.
CHAP. 2 - <strong>INTÉGRALES</strong> GÉNÉRALISÉES 7<br />
Or, on connaît une primitive de cette dernière fonction. En effet, pour tout<br />
X ≥ 0,<br />
X<br />
dx<br />
π<br />
= arctan X −−−−→<br />
1 + x2 X→+∞ 2 .<br />
0<br />
Ainsi, l’intégrale de f sur [0, +∞[ est convergente.<br />
• Soit, pour tout x ∈ [0, +∞[,<br />
f(x) = 1<br />
1 + x 3.<br />
La fonction f est positive, continue sur [0, +∞[ et ∀x ≥ 1,<br />
f(x) ≤ 1<br />
x 3.<br />
L’intégrale de cette dernière fonction est convergente sur [1, +∞[ d’après la<br />
proposition 1.5, et il en va donc de même pour l’intégrale de f sur [1, +∞[.<br />
On déduit finalement puisque f est continue sur [0, 1] que<br />
+∞<br />
f(x)dx<br />
converge.<br />
• Soit, pour tout x ∈ [0, +∞[,<br />
0<br />
f(x) = x2<br />
1 + x 3.<br />
De nouveau, f étant continue sur [0, 1], il suffit de regarder la nature de<br />
l’intégrale sur [1, +∞[. On a, pour tout x ≥ 1, 1 + x 3 ≤ 2x 3 , donc<br />
f(x) ≥ 1<br />
2x .<br />
La proposition 1.5 permet de conclure cette fois-ci à la divergence de l’intégrale<br />
de f sur [1, +∞[ et donc sur [0, +∞[.<br />
Remarque 2.3. Comme on a pu le voir dans les exemples précédents, il suffit<br />
de vérifier les hypothèses des théorèmes qu’au voisinage des points qui posent un<br />
problème.<br />
Remarque 2.4. Tout ce qui a été dit dans cette section s’applique aussi à des<br />
fonctions négatives, en appliquant les critères à la fonction −f.<br />
On termine cette partie sur l’intégrale des fonctions positives en explicitant le lien<br />
entre séries et intégrales généralisées.
8 BRUNO NAZARET<br />
Proposition 2.5. Soit a > 0 et soit f : [a, +∞[→ R une fonction supposée continue,<br />
positive et décroissante sur [a, +∞[. Alors,<br />
<br />
+∞<br />
f(n) et f(x)dx<br />
sont de même nature.<br />
n>a<br />
La preuve est laissée en exercice (voir feuille de TD). Une application directe de ce<br />
résultat combinée à la proposition 1.5 sur les intégrales de Riemann en +∞ permet<br />
de montrer que la série<br />
1<br />
est convergente si et seulement si α > 1.<br />
3. Un exemple classique : les intégrales de Bertrand<br />
Théorème 3.1. L’intégrale<br />
est convergente si et seulement si<br />
⎧<br />
⎨<br />
⎩<br />
+∞<br />
2<br />
a<br />
n α<br />
dx<br />
(ln x) β x α<br />
α > 1, β quelconque<br />
ou<br />
α = 1, β > 1.<br />
Preuve. Remarquons tout d’abord que la fonction<br />
1<br />
x ↦→<br />
(ln x) β xα étant continue sur [2, +∞[, le problème ne se situe qu’au voisinage de +∞. D’autre<br />
part, cette fonction étant de surcroît positive, on va pouvoir utiliser le critère de<br />
comparaison donné par le théorème 2.2, plus précisément avec les intégrales de<br />
Riemann (voir proposition 1.5).<br />
Supposons que α > 1. Alors, on peut trouver ε > 0 tel que α − ε > 1. Par les<br />
résultats de croissances comparées, on sait que<br />
lim<br />
x→+∞ xε (ln x) β = +∞<br />
et on en déduit que pour x suffisamment grand,<br />
1<br />
(ln x) β ≤ xε et donc<br />
1<br />
(ln x) β 1<br />
≤<br />
xα x α−ε.
Or, puisque α−ε > 1, l’intégrale +∞<br />
pour +∞<br />
2<br />
dx<br />
(ln x) β x α.<br />
CHAP. 2 - <strong>INTÉGRALES</strong> GÉNÉRALISÉES 9<br />
2<br />
dx<br />
xα−ε est convergente et il en va donc de même<br />
A l’inverse, prenons α < 1 et remarquons que l’on peut toujours trouver ε > 0 tel<br />
que α + ε < 1. En utilisant cette fois-ci que<br />
lim<br />
x→+∞<br />
on obtient que pour x suffisamment grand,<br />
ce qui entraine la divergence de +∞<br />
2<br />
x ε<br />
= +∞, β<br />
(ln x)<br />
1<br />
(ln x) β 1<br />
≥<br />
xα dx<br />
(lnx) β x α.<br />
x α+ε,<br />
Reste à traiter le cas α = 1. Soit X ≥ 2. Alors, un changement de variables<br />
permet de voir que<br />
X ln X<br />
dx dy<br />
= .<br />
β<br />
2 x (ln x) ln 2 yβ Cette dernière intégrale admet une limite finie si et seulement si β > 1 (voir la<br />
preuve de la proposition 1.5) d’où la conclusion. <br />
Le cas des intégrales de Bertand en 0<br />
1<br />
2<br />
est laissé à titre d’exercice.<br />
0<br />
dx<br />
(ln x) β x α<br />
4. Absolue convergence et fonctions intégrables<br />
Comme pour les séries, on s’interesse à présent aux fonctions qui peuvent changer<br />
de signe, en particulier celles qui oscillent autour de 0, ou qui sont à valeurs complexes.<br />
On sait déja que, si f : [a, b] → R est continue sur [a, b], alors<br />
<br />
<br />
b <br />
<br />
f(x)dx<br />
≤<br />
b<br />
|f(x)|dx.<br />
a<br />
Cette propriété se transmet en quelque sorte aux intégrales généralisées et conduit<br />
à la notion de fonction intégrable.<br />
Définition 4.1. Soit f : [a, b[→ R, continue sur [a, b[. On dit que l’intégrale de f<br />
est absolument convergente sur [a, b[, ou encore que f est intégrable sur [a, b], si et<br />
seulement si b<br />
|f(x)|dx est convergente.<br />
a<br />
a
10 BRUNO NAZARET<br />
Si une fonction f est intégrable sur [a, b], on note f ∈ L 1 (a, b). Autrement dit,<br />
l’ensemble des fonctions intégrables sur [a, b] est noté L 1 (a, b).<br />
Proposition 4.2. Si f ∈ L1 (a, b), alors l’intégrale de f sur [a, b] est convergente et<br />
<br />
<br />
b <br />
<br />
f(x)dx<br />
≤<br />
b<br />
|f(x)|dx.<br />
a<br />
Comme le résultat sur les séries absolument convergentes, la preuve de cette proposition<br />
repose sur un critère de Cauchy pour la limite d’une fonction que nous ne<br />
présenterons pas ici. Dans la quasi-totalité des exemples que nous traiterons, les<br />
intégrales seront absolument convergentes.<br />
Exemple: Posons, pour x ∈ R,<br />
f(x) = eitx<br />
1 + x2. Cette fonction est continue sur R à valeurs dans C. Les deux points qui posent<br />
problème pour l’intégrale sont donc ici −∞ et +∞. On a, pour tout x ∈ R,<br />
<br />
<br />
|f(x)| = <br />
e<br />
<br />
itx<br />
1 + x2 <br />
<br />
<br />
= |eitx | 1<br />
=<br />
1 + x2 1 + x2. Cette dernière fonction étant paire, il suffit de regarder son intégrale au voisinage<br />
de +∞, et on a vu plus haut que celle-ci était convergente. On en déduit que f est<br />
intégrable sur R.<br />
Théorème 4.3. Soient f et g deux fonctions continues sur [a, b[. Si f et g sont<br />
équivalentes au voisinage de b, alors<br />
f ∈ L 1 (a, b) ⇐⇒ g ∈ L 1 (a, b).<br />
Remarque 4.4. On rappelle que f et g sont équivalentes au voisinage de b signifie<br />
que<br />
lim<br />
x→b− f(x)<br />
= 1,<br />
g(x)<br />
ce qui suppose que g ne s’annule pas sur un intervalle de la forme ]b − ε, b[.<br />
Preuve. Pour tout ε > 0, il existe η > 0, tel que, pour tout x ∈]b − η, b[,<br />
||f(x)| − |g(x)|| ≤ |f(x) − g(x)| ≤ ε|g(x)|.<br />
En prenant ε = 1,<br />
et le η correspondant, on voit que<br />
2<br />
∀x ∈]b − η, b[,<br />
1<br />
3<br />
|g(x)| ≤ |f(x)| ≤<br />
2 2 |g(x)|.<br />
On peut alors conclure à l’aide du critère de comparaison pour les intégrales de<br />
fonctions positives. <br />
a
CHAP. 2 - <strong>INTÉGRALES</strong> GÉNÉRALISÉES 11<br />
Exemple: Considérons, pour tout x ∈ [0, +∞[,<br />
f(x) =<br />
x 2<br />
2x 4 + 4x + 1 .<br />
La fonction f est continue sur [0, +∞[, et il est facile de voir qu’au voisinage de<br />
+∞, f est équivalente à<br />
1<br />
2x 2.<br />
On en déduit que f est intégrable sur [0, +∞[.<br />
5. Intégrales impropres<br />
Cette fin de chapitre est consacrée à l’étude d’un cas où l’intégrale converge sans<br />
pour autant être absolument convergente. Nous ne ferons pas d’étude générale de<br />
ce type d’intégrales. Soit<br />
f(x) =<br />
sin x<br />
, ∀x ∈]0, +∞[.<br />
x<br />
La fonction f est continue sur ]0, +∞[. On a donc 2 bornes à étudier, 0 et +∞.<br />
Pour la première, en remarquant que<br />
sin x<br />
lim<br />
x→0 x<br />
= 1,<br />
on voit que f est prolongeable par continuité en 0 par la valeur 1, et donc l’intégrale<br />
converge en 0.<br />
Examinons la convergence de l’intégrale au voisinage de +∞. En premier lieu,<br />
nous allons montrer que cette intégrale n’est pas absolument convergente. En effet,<br />
soit n ∈ N, alors<br />
(2n+1)π<br />
1<br />
| sinx|<br />
dx =<br />
x<br />
2n<br />
k=1<br />
(k+1)π<br />
kπ<br />
| sin x|<br />
dx ≥<br />
x<br />
n<br />
(2k+1)π<br />
k=1<br />
2kπ<br />
| sin x|<br />
dx.<br />
x<br />
(L’inégalité précédente signifie qu’on ne prend qu’un terme sur deux dans la somme,<br />
celui correspondant aux valeurs paires de k).<br />
Sur un intervalle de la forme [2kπ, (2k + 1)π], on a<br />
| sinx| = sin x.
12 BRUNO NAZARET<br />
On en déduit que<br />
(2n+1)π<br />
1<br />
| sinx|<br />
dx ≥<br />
x<br />
≥<br />
≥<br />
n<br />
(2k+1)π<br />
sin x<br />
2kπ x dx<br />
n<br />
(2k+1)π<br />
1<br />
sin xdx<br />
(2k + 1)π 2kπ<br />
n 1<br />
(2k + 1)π [cosx]π<br />
n 2 1<br />
0 =<br />
π 2k + 1 .<br />
La divergence de la série harmonique permet alors de conclure.<br />
Nous allons maintenant montrer que<br />
1<br />
k=1<br />
k=1<br />
k=1<br />
+∞<br />
sin x<br />
1 x dx<br />
est convergente. La méthode employée est très analogue à celle que l’on avait utilisée<br />
lors de la preuve du critère d’Abel pour les séries semi-convergentes, et utilise une<br />
intégration par parties. En effet, soit X ≥ 1, alors<br />
X<br />
sin x<br />
<br />
cos x<br />
<br />
X X<br />
cosx<br />
dx = − − dx,<br />
x x 1 x2 = cos 1 − cosX<br />
X −<br />
La fonction cosinus étant bornée, on a<br />
cosX<br />
X −−−−→<br />
X→+∞ 0,<br />
1<br />
1<br />
X<br />
1<br />
k=1<br />
cosx<br />
dx.<br />
x2 et, pour tout x ≥ 1,<br />
<br />
<br />
cosx<br />
x2 <br />
<br />
≤ 1<br />
x2. Il s’ensuit que l’intégrale de<br />
x ↦→ cosx<br />
x2 est absolument convergente sur [1, +∞[ et donc convergente. On en déduit ainsi la<br />
convergence de<br />
+∞<br />
sin x<br />
x dx.