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1. Avant propos Henri Olivier - IBR

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Crise financière et IFRS : quelles leçons en tirer<br />

<strong>Henri</strong> <strong>Olivier</strong><br />

La décision d’appliquer les normes comptables internationales pour l’établissement des comptes<br />

consolidés des sociétés cotées sur un marché réglementé dans l’Union européenne a été presque<br />

unanimement saluée comme un progrès significatif. Précédemment limité aux quatrième et<br />

septième directives relatives aux comptes annuels et aux comptes consolidés, le référentiel<br />

européen de l’information financière faisait pâle figure notamment face aux normes américaines.<br />

Les sociétés européennes cotées au New York Stock Exchange se voyaient imposer une<br />

humiliante obligation de réconciliation avec les US GAAP. A juste titre la Commission<br />

européenne estimait nécessaire de développer une stratégie pour mettre fin à cette situation. Cet<br />

objectif majeur fut d’ailleurs atteint moins de trois ans après l’entrée en vigueur du règlement<br />

européen sur l’application des IFRS. Disposer d’un référentiel vraiment international appliqué<br />

dans le monde entier et permettant aux analystes, investisseurs et autres utilisateurs des états<br />

financiers d’accéder à une information financières suffisamment comparable est aujourd’hui une<br />

perspective réaliste.<br />

Ce n’est pas pour autant que les normes comptables internationales soient exemptes de critiques.<br />

L’accent mis dans le cadre conceptuel sur les besoins des investisseurs et l’utilisation croissante<br />

de la référence aux valeurs de marchés, souvent qualifiées de juste valeur, n’est pas admis par<br />

tous. Sans doute, l’influence des États-Unis où l’information financière n’est normalisée que pour<br />

les sociétés cotées en bourse, s’est-elle avérée culturellement dominante. Sans doute, la volonté<br />

de l’IASB d’accélérer un programme de convergence avec les normes américaines a-t-elle<br />

provoqué des réactions critiques en Europe. Mais après tout, n’était-ce pas le prix à payer pour<br />

obtenir l’abandon de la réconciliation et mettre fin à la volonté de grands groupes européens, quel<br />

que soit le pays, d’appliquer sans plus les US-GAAP ?<br />

Le référentiel IFRS suscite des questions fondamentales. L’IASB lui-même a reconnu le besoin<br />

d’une révision du cadre conceptuel. Ceci est d’autant plus vrai que certaines méthodes<br />

d’évaluation largement utilisées dans des normes ultérieures, comme la juste valeur, n’y sont<br />

même pas évoquées. Ce travail est en cours et plusieurs documents de réflexion ont déjà été<br />

publiés. Il est essentiel car l’information financière ne peut pas être une question purement<br />

technique, à la limite une formalité administrative coûteuse, sans impact sur l’environnement<br />

économique.<br />

Les débats qui ont eu lieu récemment à la suite de la crise financière en sont l’illustration. Par<br />

exemple, bien avant la crise financière de 2008, la Revue d’économie financière a consacré en<br />

2003 son numéro 71 à « la juste valeur et l’évaluation des actifs ». La même année, au Pays-Bas,<br />

le NIVRA publiait un ouvrage intitulé « Is Fair Value Fair ? » Des questions telles que l’impact<br />

de ces méthodes d’évaluation sur la stabilité financière ou les risques de volatilité y étaient<br />

traitées alors que l’actualité n’avait pas encore dirigés les projecteurs dans cette direction. Il<br />

existe des théories à la base des méthodes de reporting financier. On doit en être conscient et il est<br />

légitime d’en débattre.<br />

Certains établissent un lien entre les l’évaluation des actifs en juste valeur et la crise financière.<br />

Ils argumentent que la norme IAS 39 sur les instruments financiers et l’utilisation de la juste<br />

valeur qu’elle impose ont joué un rôle accélérateur dans les décisions de dépréciation des actifs<br />

financiers des banques et engendré une volatilité néfaste pour la stabilité du système financier<br />

dans son ensemble. Depuis dix huit mois, l’IASB comme son équivalent américain le FASB et les


égulateurs bancaires, notamment le comité de Bâle, sont mis sous pression pour revoir les règles<br />

comptables et prudentielles afin d’éliminer en partie du moins cet effet d’entraînement. Une<br />

nouvelle norme IFRS 9 a été publiée voici quelques jours mais les Etats-membres de l’Union<br />

européenne sont divisé sur l’opportunité de son application et surtout sur l’utilité d’une procédure<br />

accélérée.<br />

La concentration de toutes les attentions sur le secteur bancaire principalement affecté par la crise<br />

de 2008 présente des risques. Les solutions élaborées pour ce secteur ne sont pas nécessairement<br />

satisfaisantes pour d’autres, par exemple pour le secteur des assurances. On peut certes<br />

comprendre la volonté de prendre des mesures urgentes pour permettre aux établissements<br />

financiers de faire meilleure figure en fin d’année mais cette précipitation a des limites. Les<br />

modifications incessantes des normes coûtent cher. Elles se font au détriment de leur bonne<br />

application. Elles posent des questions sur leur bien fondé.<br />

L’après-midi d’étude organisée par la Section Belge de l’Académie des Sciences et Techniques<br />

Comptables a pour but de faire le point sur la question. La crise financière impose-t-elle la<br />

remise en cause le modèle d’information financière ? Le rôle prétendu des normes comptables<br />

n’est-il pas une excuse bienvenue pour détourner l’attention de questions plus fondamentales, par<br />

exemple en matière de corporate governance ? L’interaction entre la crise et les évaluations en<br />

juste valeur doit-elle s’analyser de la même manière dans les secteurs financier et non financier ?<br />

Telle sont les questions que nous souhaitons débattre au cours de notre session de travail du 23<br />

novembre.<br />

<strong>Henri</strong> <strong>Olivier</strong><br />

Président de la Section Belge de l’Académie des Sciences et Techniques Comptables<br />

Professeur à l’Université de Liège

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