Le dépistage du pied diabétique - International Diabetes Federation

S o i n s e t p r é v e n t i o n
Le dépistage du pied diabétique :
comment et pourquoi
y Edgar Peters
Etant donné l’étendue de la pandémie actuelle de diabète,
le nombre de personnes susceptibles de développer des
complications du pied liées au diabète est considérable
et ne cessera d’augmenter. Toutes les personnes atteintes
de la condition sont considérées comme étant à risque,
indépendamment du type ou de la gravité du diabète. Le
dépistage vise à identifier les personnes à plus haut risque
afin qu’elles puissent bénéficier des ressources médicales
limitées. Plusieurs techniques de dépistage simples permettent
de répartir les soins du pied thérapeutiques et préventifs entre
ceux qui en ont le plus besoin. Edgar Peters nous informe.
>>
La neuropathie est fréquente chez les savoir plus sur la neuropathie diabétique,
personnes atteintes de diabète ; elle
reportez-vous aux articles d’Andrew
touche près de la moitié des personnes
Boulton et de Vilma Urbancic-Rovan).
atteintes de la condition. Lorsque la
perception de la douleur et de la chaleur Neuropathie
qui protège normalement nos pieds est Un certain nombre de méthodes ont été
réduite ou perdue, des blessures aux
développées pour tester les troubles de la
pieds peuvent se produire sans même sensation. La méthode la mieux documentée
que les personnes concernées ne se
est celle du monofilament en nylon de
rendent compte du problème. (Pour en Semmes-Weinstein (voir figure). Elle
consiste à appliquer une force de 10 g sur
la peau. Si cette pression n’est pas ressentie
sur au moins l’une des zones prédéfinies
du pied, on considère que l’individu est
atteint de troubles de la sensation.
Un autre instrument, appelé ‘biothésiomètre’,
est utilisé pour tester la perception de
vibrations au niveau du gros orteil. Ce test
peut également être effectué à l’aide d’un
diapason ; celui-ci est moins cher qu’un
biothésiomètre mais aussi moins fiable.
( )
Les infections sont
plus résistantes
chez les personnes
ayant une mauvaise
circulation sanguine.
Maladie vasculaire
En cas de mauvaise circulation du sang
au niveau des pieds (maladie vasculaire
périphérique), également fréquente chez
les personnes atteintes de diabète, les
blessures et les infections ont plus de
difficulté à guérir : l’approvisionnement en
nutriments et en oxygène est perturbé
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et les cellules immunitaires protectrices
ne peuvent atteindre le tissu du pied.
Dans certains cas de mauvaise circulation
sanguine, des ulcères se développent
même en l’absence de neuropathie. Les
techniques destinées à dépister les troubles
circulatoires impliquent l’identification
des vaisseaux sanguins pulsatiles
du pied et la mesure de la pression
sanguine au niveau de ces vaisseaux.
Tous les facteurs de risque mentionnés cidessus
sont généralement présents chez les
personnes qui ont des antécédents d’ulcère
ou qui ont déjà subi une amputation. En
fait, le tissu cicatriciel et les amputations
mineures guéries sont eux-mêmes des
malformations et peuvent entraîner des
altérations de la répartition de la pression
sur la plante du pied lors de la marche
ou de la station debout. Il n’est donc pas
surprenant que les personnes ayant déjà
subi une amputation présentent plus
de risque de développer de nouvelles
complications du pied diabétique.
Classer le risque
Le Groupe de travail international sur le
pied diabétique (IWGDF) a développé un
système d’échelle de risque qui permet
d’identifier les personnes atteintes de
diabète susceptibles de développer des
problèmes aux pieds liés à leur condition.
Des instruments simples et relativement
bon marché permettent de réaliser ces
évaluations. Ce classement (voir tableau)
consiste en quatre groupes allant d’un
groupe de personnes sans facteur de risque
à un groupe ayant des antécédents d’ulcère. 1
( )
Les personnes ayant subi
une amputation sont 100
fois plus susceptibles
de développer un
ulcère du pied.
Les personnes ayant des antécédents
d’ulcère sont en fait 34 fois plus susceptibles
de développer un nouvel ulcère dans un
délai de trois ans par rapport à celles qui
n’ont aucun facteur de risque. Sur cette
même période de trois ans, les personnes
qui ont subi une amputation sont 100 fois
plus susceptibles de développer un ulcère
du pied par rapport aux personnes sans
facteur de risque. 2
Prévention
En Amérique du Nord, en Europe et en Inde,
des études ont démontré qu’une gestion
agressive des complications du pied liées
au diabète pouvait prévenir les ulcères et
les amputations. La réduction du nombre
d’amputations oscille entre 48 % et 79 %.
Grâce à ces programmes de prévention,
le nombre d’amputations a diminué
mais également les hospitalisations, les
consultations en urgence, les prescriptions
d’antibiotiques, les opérations aux pieds
et les jours de congé-maladie.
Une étude suédoise a calculé que le coût
direct total d’une amputation se situait
entre 16.500 USD et 66.000 USD, tandis
que le coût direct du traitement d’ulcères
du pied infectés oscillait entre 1.000 USD
Figure : Application du monofilament de
Semmes Weinstein
Le monofilament est appliqué sur les trois
zones indiquées de la peau pendant une
seconde puis retiré. Si au moins une de ces
applications n’est pas sentie, le pied est
considéré comme ayant une sensibilité réduite. 1
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Tableau : Système d’évaluation des risques de complications du pied diabétique (Groupe de travail international sur le pied diabétique)
Catégorie Profil de risque Fréquence de l’examen
0 Sensations intactes Une fois par an
1
2
Sensations réduites
Circulation intacte, pas de déformation du pied comme des orteils en
marteau ou en griffe
Sensations réduites
Troubles de la circulation ou déformation du pied comme des orteils en
marteau ou en griffe
Tous les six mois
Tous les trois mois
3 Antécédents d’ulcère ou d’amputation Tous les un à trois mois
et 17.500 USD. Il a été calculé que les
programmes intensifs de gestion du pied
étaient rentables lorsque plus de 25 % des
ulcères étaient évités. (Pour en savoir plus
sur l’économie des complications du pied
diabétique, reportez-vous à l’article de Jan
Apelqvist et de Gunnel Ragnarson Tennvall.)
Une étude réalisée en Inde a révélé que
les personnes atteintes de diabète qui
réussissaient à suivre les conseils d’un
prestataire de soins affichaient un taux plus
faible de problèmes aux pieds (5 %), par
rapport à celles qui ne parvenaient pas à se
conformer à ces recommandations (25 %).
y Edgar Peters
Edgar Peters est médecin et résident en
médecine interne au sein du Département
de médecine interne du HagaZiekenhuis, La
Haye, et du Leiden University Medical Centre,
Pays-Bas.
Une baisse de la consommation de
soins de santé entraîne une réduction
du coût global des soins de santé.
Différents domaines d’intervention sont
importants dans le cadre de la prévention.
L’accent doit être mis principalement
sur l’éducation aux soins du pied pour
les personnes atteintes de diabète et les
membres de leur famille ainsi que sur l’arrêt
du tabagisme. Comme le décrit Margaret
McGill dans ce numéro, l’éducation doit
inclure des cours pratiques sur la façon de :
inspecter ses pieds et ses chaussures
choisir des chaussures adéquates
avertir immédiatement un prestataire
de soins si une coupure, une ampoule
ou une plaie se développe.
En outre, une inspection régulière des pieds
par un professionnel de la santé permet la
détection précoce d’éventuels problèmes.
Pour être efficaces, ces examens doivent
être suivis, le cas échéant, de la consultation
d’un spécialiste approprié. L’extraction de
peaux mortes et de durillons (débridement)
par un chirurgien ou un podologue doit être
effectuée régulièrement, en particulier chez
les personnes à haut risque. Avant tout, de
vastes études ont démontré qu’un contrôle
optimal de la glycémie était crucial pour
la prévention des problèmes aux pieds.
Références
1 International Consensus on the Diabetic Foot and
Practical Guidelines on the Management and the
Prevention of the Diabetic Foot. International Working
Group on the Diabetic Foot, 2003, Amsterdam, the
Netherlands, on CD-ROM (www.idf.org/bookshop).
2 Peters EJ, Lavery LA. Effectiveness of the diabetic foot
risk classification system of the International Working
Group on the Diabetic Foot. Diabetes Care 2001; 24:
1442-7.
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