Petit Traité de l'abandon - Seuil
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petit traité <strong>de</strong> l’abandon<br />
plus grand soin ! Peut-être encore plus que maintenant si<br />
c’est possible. » Alors il m’a dit : « Essaie, aujourd’hui, dans<br />
cette gare, <strong>de</strong> prendre soin <strong>de</strong> ton corps comme s’il s’agissait<br />
<strong>de</strong> ton fils. » En éteignant mon téléphone, j’ai littéralement<br />
dansé dans la gare. J’ai soudain compris que mon corps<br />
était comme un enfant à protéger, à chérir. Avant, j’avais<br />
tendance à tirer sur la cor<strong>de</strong>, à chercher à obtenir <strong>de</strong> lui<br />
tous les plaisirs possibles, mais à ne jamais être dans le<br />
repos, le respect <strong>de</strong> ce qu’il m’apporte au quotidien. Dans<br />
cette gare, j’ai compris que le handicap et les blessures qu’il<br />
m’avait laissées étaient comme déposés sur un plateau que je<br />
porterais. L’image <strong>de</strong> mon corps était sur un plateau, et moi,<br />
je ne faisais que le porter. Finalement, quand quelqu’un<br />
rit <strong>de</strong> ce qu’il y a sur le plateau, ce n’est pas mon problème.<br />
Mon problème, ma tâche, mon œuvre, c’est <strong>de</strong> porter le<br />
plateau avec bienveillance. Que l’on éclate <strong>de</strong> rire à la<br />
vue <strong>de</strong> ce qu’il y a <strong>de</strong>ssus, ce n’est pas cela l’essentiel.<br />
Donc, dans le même temps, j’ai compris que je pouvais<br />
nourrir un regard inconditionnel sur le corps et sur mon<br />
être, et que ce que je « présente en vitrine », ce qui est<br />
visible, ce qui saute aux yeux n’est pas forcément tout moi.<br />
Et dire à Augustin : « Tu pourrais mettre le feu à la maison,<br />
je t’aimerais toujours », ce n’est pas l’inviter à faire tout<br />
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