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Les effets pervers de notre système fiscal - Janson Baugniet

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( F o c u s ) E n c o u v e r t u r e<br />

La progressivité <strong>de</strong> l’impôt belge pose question<br />

Max a retrouvé du travail <strong>de</strong>puis quelques<br />

années déjà. Il gagne le salaire minimum<br />

garanti. L’arrivée <strong>de</strong> son aver tissementextrait<br />

<strong>de</strong> rôle, en février 2007, lui a réservé<br />

une bien mauvaise surprise. Il a recueilli en<br />

2005 moins <strong>de</strong> revenus nets que lorsqu’il bénéficiait <strong>de</strong> l’allocation<br />

d’intégration. Son pouvoir d’achat a plafonné à 9.200<br />

euros pour l’année. Sa perte : environ 1.600 euros...<br />

Max est tombé dans un «piège à l’emploi», une <strong>de</strong>s aberrations<br />

<strong>de</strong>s systèmes fiscaux et sociaux belges. Depuis plusieurs<br />

législatures, les gouvernements déclarent vouloir<br />

chasser ces «pièges» mais sans y parvenir. Au fil <strong>de</strong>s années,<br />

toutefois, leur perception s’est affinée. Témoin, ce passage<br />

<strong>de</strong> l’Accord politique <strong>de</strong> la coalition Leterme I er : «C’est une<br />

réalité dans <strong>notre</strong> pays : la plupart <strong>de</strong>s gens qui travaillent<br />

payent trop vite trop d’impôts. Il faut lutter contre les pièges<br />

à l’emploi et rendre le travail plus intéressant en accroissant<br />

le différentiel entre revenus du travail et revenus <strong>de</strong> remplacement.»<br />

Cette analyse, il y a bien longtemps que certains experts<br />

en <strong>fiscal</strong>ité l’ont dressée. Parmi eux, Jacques Autenne, professeur<br />

en droit <strong>fiscal</strong> à l’UCL et avocat <strong>fiscal</strong>iste. «En Belgique,<br />

l’impôt est très peu progressif, confirme-t-il. On pourrait<br />

même dire qu’il s’apparente à un impôt proportionnel, tellement<br />

les premières tranches d’imposition sont étroites et tellement<br />

les taux les plus élevés sont atteints rapi<strong>de</strong>ment.»<br />

Voici quelques années, il a tenté <strong>de</strong> mesurer ce fameux<br />

manque <strong>de</strong> progressivité. Il a calculé le traitement <strong>fiscal</strong> qui<br />

serait appliqué à une cinquantaine <strong>de</strong> contribuables gagnant<br />

entre 4.314 euros et 381.100 euros bruts par an. La réglementation<br />

appliquée (taux d’imposition, barèmes, etc.) est celle <strong>de</strong><br />

l’année 2002, à laquelle ont été ajoutées toutes les mesures<br />

prévues par la réforme <strong>fiscal</strong>e <strong>de</strong> 2001 en effet plein (soit en<br />

appliquant la phase définitive <strong>de</strong> la réforme, en 2005, à l’année<br />

2002). Si l’étu<strong>de</strong> a cinq ans, le paysage obtenu reste toutefois,<br />

dans ses fon<strong>de</strong>ments, i<strong>de</strong>ntique à la situation actuelle,<br />

assure-t-il. <strong>Les</strong> résultats ? Le système <strong>fiscal</strong> comporte apparemment<br />

plusieurs <strong>effets</strong> <strong>pervers</strong>...<br />

Une progressivité abrupte<br />

Une comparaison entre l’impôt <strong>de</strong>s personnes physiques<br />

en Belgique et en France, pour l’année 2002, indique <strong>de</strong>ux<br />

évolutions très différentes (voir graphique «La progressivité<br />

Comment en est-on<br />

arrivé là ?<br />

La situation actuelle est un<br />

héritage <strong>de</strong> la réforme <strong>fiscal</strong>e<br />

menée en 1989 par un<br />

gouvernement catholiquesocialiste.<br />

Auparavant,<br />

l’Etat pratiquait <strong>de</strong>s réductions<br />

d’impôt. Par exemple,<br />

pour la charge<br />

d’enfants, celles-ci<br />

variaient selon les revenus,<br />

avec un minimum et un<br />

maximum. En 1989, <strong>de</strong>s<br />

exonérations sont décidées<br />

et placées sur le bas <strong>de</strong>s<br />

revenus. Ce sont <strong>de</strong>s raisons<br />

sociologiques et budgétaires<br />

qui gui<strong>de</strong>nt ces<br />

choix. Sociologiques,<br />

parce qu’il apparaît aux<br />

yeux <strong>de</strong>s partenaires <strong>de</strong><br />

l’époque que chaque<br />

enfant doit donner droit à<br />

la même réduction, qu’il<br />

appartienne à une famille<br />

aisée ou non. Le système<br />

<strong>de</strong>s exonérations permet<br />

<strong>de</strong> rencontrer cet objectif.<br />

Budgétaires parce qu’octroyer<br />

<strong>de</strong>s exonérations sur<br />

la partie haute <strong>de</strong>s revenus<br />

aurait coûté trop cher.<br />

Or, la <strong>de</strong>tte publique avait<br />

alors déjà explosé à plus <strong>de</strong><br />

100 % du PIB.<br />

Cette question <strong>de</strong>s exonérations<br />

est extrêmement<br />

controversée. Conseiller<br />

général au SPF Finances,<br />

Christian Valenduc (lire<br />

aussi en page 46) estime<br />

que placer une exonération<br />

sur le haut <strong>de</strong>s revenus,<br />

c’est faire en sorte<br />

qu’un ménage riche bénéficie<br />

pour son enfant d’un<br />

avantage <strong>fiscal</strong> plus élevé<br />

qu’un ménage pauvre.<br />

«Pourquoi l’Etat <strong>de</strong>vrait-il<br />

subventionner les<br />

dépenses plus élevées que<br />

les riches font pour leurs<br />

enfants ? Je m’inscris totalement<br />

contre.»<br />

Pour Jacques Autenne,<br />

cette différence n’apparaît<br />

pas choquante. «Car, par<br />

l’effet <strong>de</strong> la progressivité,<br />

le ménage riche paiera <strong>de</strong>s<br />

impôts normalement plus<br />

élevés.»<br />

Pour le <strong>fiscal</strong>iste, c’est vers<br />

une égalité horizontale<br />

plutôt que verticale qu’il<br />

faut tendre. A savoir, taxer<br />

à la même hauteur <strong>de</strong>s personnes<br />

<strong>de</strong> revenus proches<br />

mais <strong>de</strong> situation sociale<br />

différente : un ménage<br />

avec enfant à charge et un<br />

isolé. «Il faut comparer <strong>de</strong>s<br />

situations comparables»,<br />

soutient-il.<br />

<strong>Les</strong> <strong>effets</strong> <strong>pervers</strong> <strong>de</strong> <strong>notre</strong> système <strong>fiscal</strong><br />

L’inflation s’envole. La perte du pouvoir d’achat inquiète. L’idée d’une<br />

nouvelle réforme <strong>fiscal</strong>e, histoire <strong>de</strong> soulager les portefeuilles, tente le<br />

gouvernement Leterme I er . Mais ce <strong>de</strong>rnier risque bien <strong>de</strong> passer à côté du<br />

vrai problème <strong>de</strong> l’impôt belge : son manque <strong>de</strong> progressivité.<br />

Démonstration en compagnie d’un expert.<br />

❙ Jean-Christophe <strong>de</strong> Wasseige<br />

ISOPIX<br />

<strong>de</strong> l’impôt <strong>de</strong>s personnes physiques en Belgique», en p. 42). <strong>Les</strong><br />

chif fres valent pour une personne isolée sans enfant. En<br />

France, la progressivité est harmonieuse : on compte six<br />

paliers assez bien répartis ; un bel «escalier» se forme ; le<br />

taux d’imposition le plus élevé (50 %) est atteint à partir d’un<br />

JACQUES AUTENNE,<br />

PROFESSEUR EN DROIT FISCAL À L’UCL ET AVOCAT FISCALISTE<br />

«<strong>Les</strong> classes moyennes sont les gran<strong>de</strong>s perdantes, car elles<br />

arrivent très vite à <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> taxation élevés.»<br />

revenu brut imposable <strong>de</strong> 47.131 euros, ce qui est déjà élevé.<br />

Cette situation française n’est toutefois plus d’actualité : <strong>de</strong><br />

nouveaux barèmes ont été introduits chez nos voisins à partir<br />

<strong>de</strong> 2007. Le nombre <strong>de</strong> taux d’imposition est passé <strong>de</strong> six<br />

à quatre (5,5 %, 14 %, 30 %, 40 %).<br />

En Belgique, on compte cinq paliers mais ils portent sur<br />

<strong>de</strong>s tranches <strong>de</strong> revenus nettement plus serrées ; l’«escalier»<br />

est très rai<strong>de</strong> ; on arrive beaucoup plus rapi<strong>de</strong>ment au taux le<br />

plus élevé, celui <strong>de</strong> 50 % : à partir <strong>de</strong> 31.700 euros aujourd’hui<br />

(28.550 euros pour l’exercice 2002 corrigé par la réforme<br />

▲<br />

Trends-Tendances 10 avril 2008 Fo c u s 41


( F o c u s ) E n c o u v e r t u r e<br />

<strong>fiscal</strong>e). Pour les revenus moyens, soit ceux <strong>de</strong> la majorité<br />

<strong>de</strong>s contribuables, la progressivité est ultra rapi<strong>de</strong>.<br />

Ainsi, le premier taux <strong>de</strong> 25 % s’applique actuellement à<br />

partir <strong>de</strong> 7.290 euros (5.350 euros, en 2002 corrigé) et<br />

se poursuit sur une tranche extrêmement étroite. La<br />

tranche suivante, celle <strong>de</strong> 30 %, n’est guère plus large.<br />

De sorte que, finalement, le taux <strong>de</strong> 40 % est vite atteint.<br />

D’où les premières conclusions <strong>de</strong> <strong>notre</strong> interlocuteur :<br />

«<strong>Les</strong> classes moyennes sont les gran<strong>de</strong>s perdantes, car<br />

elles arrivent très vite à <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> taxation élevés.»<br />

Des exonérations mal appliquées<br />

<strong>Les</strong> contribuables peuvent bénéficier <strong>de</strong> plusieurs types<br />

d’exonérations dans le calcul <strong>de</strong> leur impôt. Par exemple,<br />

les 6.150 premiers euros <strong>de</strong> revenus gagnés ne sont<br />

pas imposés (chiffre valable pour les revenus 2008, selon<br />

le CIR, le Co<strong>de</strong> <strong>de</strong>s impôts sur les revenus). Autre exemple<br />

: les personnes qui ont une charge <strong>de</strong> famille disposent<br />

également <strong>de</strong> sommes exemptées : 1.310 euros pour<br />

un enfant, 3.370 euros pour <strong>de</strong>ux, etc.<br />

Toutes ces exonérations <strong>fiscal</strong>es sont à chaque fois<br />

accordées sur la partie basse <strong>de</strong>s revenus. Cela signifie<br />

que l’exemption intervient sur la partie <strong>de</strong>s revenus où,<br />

normalement, les taux d’imposition sont déjà peu élevés<br />

(25 %). Cela a pour conséquence <strong>de</strong> repousser le reste<br />

<strong>de</strong>s revenus taxables vers les taux plus élevés<br />

(30 %, 40 % ou 45 %).<br />

▲<br />

DIDIER REYNDERS,<br />

MINISTRE DES FINANCES<br />

Il vient enfin <strong>de</strong> reconnaître que le<br />

minimum vital exonéré est, <strong>de</strong><br />

manière totalement paradoxale,<br />

inférieur au revenu d’intégration.<br />

Minimum<br />

vital<br />

exonéré<br />

d'impôt<br />

Minimum<br />

vital<br />

exonéré<br />

d'impôt<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

100%<br />

90%<br />

80%<br />

70%<br />

60%<br />

50%<br />

40%<br />

30%<br />

20%<br />

10%<br />

0%<br />

Taux d'imposition<br />

5350<br />

6570<br />

Taux d'imposition<br />

La progressivité <strong>de</strong> l’impôt<br />

<strong>de</strong>s personnes physiques en Belgique<br />

Simulation effectuée par Jacques Autenne sur les revenus 2002<br />

(corrigés pour tenir compte <strong>de</strong>s <strong>effets</strong> pleins <strong>de</strong> la réforme <strong>fiscal</strong>e<br />

<strong>de</strong> 2001 mais hors crédit d’impôt)<br />

15580<br />

9350<br />

La progressivité <strong>de</strong> l’impôt<br />

<strong>de</strong>s personnes physiques en France<br />

Simulation effectuée par Jacques Autenne sur les revenus 2002<br />

(sans tenir compte <strong>de</strong> la cotisation sociale généralisée)<br />

4194<br />

8242<br />

14506<br />

Situation valable pour un isolé sans enfant<br />

Revenus annuels imposables<br />

Situation valable pour un isolé sans enfant<br />

23489<br />

28550<br />

38218<br />

47131<br />

Revenus annuels imposables<br />

Source : <strong>Janson</strong> <strong>Baugniet</strong><br />

100000<br />

Source : Jacques Autenne<br />

100000<br />

Quid <strong>de</strong> la possible<br />

prochaine réforme <strong>fiscal</strong>e ?<br />

BELGA<br />

SHADOW<br />

Une nouvelle réforme <strong>fiscal</strong>e<br />

pourrait être menée par le gouvernement<br />

Leterme I er , même si<br />

le contexte reste très flou. Tout<br />

dépendra <strong>de</strong> la survie <strong>de</strong> la<br />

coalition actuelle au-<strong>de</strong>là du<br />

mois <strong>de</strong> juillet, qui est<br />

l’échéance fixée par les partis<br />

flamands pour obtenir une<br />

nouvelle réforme <strong>de</strong> l’Etat. Mais<br />

aussi <strong>de</strong>s marges <strong>de</strong> manœuvre<br />

budgétaires à l’avenir. Or,<br />

celles-ci seront étriquées, le<br />

gouvernement ayant à rétablir<br />

l’équilibre <strong>de</strong>s finances<br />

publiques perdu l’an passé et à<br />

engranger <strong>de</strong>s réserves pour<br />

faire face aux <strong>effets</strong> du vieillissement.<br />

Dans l’accord <strong>de</strong> gouvernement,<br />

<strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s mesures<br />

sont renseignées. La première<br />

est un relèvement <strong>de</strong> la quotité<br />

exonérée d’impôt. Aucun chiffre<br />

définitif ne semble encore<br />

arrêté mais le ministre <strong>de</strong>s<br />

Finances Didier Reyn<strong>de</strong>rs<br />

assure le passage à 8.400<br />

euros. Sur le plan <strong>de</strong> la progressivité,<br />

cet objectif va dans un<br />

bon sens : augmenter le salaire<br />

net et accroître le différentiel<br />

entre les travailleurs à bas revenus<br />

(soumis à l’impôt) et les<br />

bénéficiaires <strong>de</strong> revenus <strong>de</strong><br />

remplacement (qui ne le sont<br />

pas). Néanmoins, il ne mettra<br />

pas fin à tous les «pièges à<br />

l’emploi», ni au manque <strong>de</strong><br />

transparence dans les situations<br />

<strong>fiscal</strong>es <strong>de</strong>s faibles revenus,<br />

ni aux injustices liées aux<br />

«<strong>effets</strong> <strong>de</strong> seuil». Seul le placement<br />

<strong>de</strong>s exonérations sur le<br />

haut <strong>de</strong>s revenus et non sur le<br />

bas permettrait d’y parvenir.<br />

La secon<strong>de</strong> gran<strong>de</strong> mesure<br />

voulue par la coalition pentapartite<br />

est <strong>de</strong> réduire le nombre<br />

<strong>de</strong> taux d’imposition.<br />

Actuellement, ils sont au nombre<br />

<strong>de</strong> cinq : 25 %, 30 %, 40 %,<br />

45 % et 50 %. Il s’agirait <strong>de</strong> passer<br />

à trois, par exemple. Officiellement,<br />

le gouvernement<br />

ne s’est toutefois engagé qu’à<br />

réaliser un «pas complémentaire»<br />

vers ce but. Sur le fond,<br />

cela permettrait <strong>de</strong> réaménager<br />

la <strong>fiscal</strong>ité pour les classes<br />

moyennes. La réussite dépend<br />

évi<strong>de</strong>mment <strong>de</strong>s barèmes qui<br />

seront accolés à ces taux.<br />

42 Fo c u s Trends-Tendances 10 avril 2008


( F o c u s ) E n c o u v e r t u r e<br />

PHOTO NEWS<br />

Comparaison <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong> l’impôt sur le<br />

revenu dans différents pays européens<br />

Données<br />

Situation familiale<br />

Marié, <strong>de</strong>ux enfants<br />

Autres revenus professionnels<br />

du ménage ou personnels du ménage<br />

Aucun<br />

Nature <strong>de</strong> l’activité<br />

Salariée<br />

Année <strong>de</strong> revenus 2008<br />

Résultats Célibataire Marié, <strong>de</strong>ux enfants<br />

Revenu Impôt Revenu Impôt<br />

taxable (en euros) taxable (en euros)<br />

(en euros)<br />

(en euros)<br />

Belgique 20.000 4.989 20.000 1.341<br />

50.000 19.495 50.000 14.539<br />

100.000 45.774 100.000 40.818<br />

France 20.000 1.243 20.000 0<br />

50.000 8.192 50.000 2.469<br />

100.000 23.937 100.000 11.930<br />

Pays-Bas 20.000 428 20.000 428<br />

50.000 9.647 50.000 9.647<br />

100.000 35.470 100.000 35.470<br />

Royaume-Uni 20.000 2.680 20.000 2.680<br />

50.000 9.591 50.000 9.591<br />

100.000 29.591 100.000 29.591<br />

Allemagne 20.000 3.007 20.000 796<br />

50.000 13.816 50.000 9.012<br />

100.000 35.961 100.000 27.633<br />

Luxembourg 20.000 1.245 20.000 0<br />

50.000 11.146 50.000 4.633<br />

100.000 30.621 100.000 22.293<br />

Note : le calcul d’impôt est estimatif. Il prend en compte les déductions<br />

généralement applicables dans chaque pays, considérant le<br />

revenu comme correspondant à l’imposable ordinaire selon les dispositions<br />

<strong>de</strong> la législation locale. Aucune cotisation complémentaire<br />

n’est calculée (ex. « CSG » en France)<br />

Source : J.-L. Davain, Loyens & Loeff, 01/04/2008.<br />

L’avis <strong>de</strong> Jean-Louis Davain<br />

44 Fo c u s Trends-Tendances 10 avril 2008<br />

«Je partage totalement le<br />

constat d’une progressivité<br />

abrupte, affirme l’avocat <strong>fiscal</strong>iste.<br />

Des comparaisons ponctuelles<br />

montrent que <strong>notre</strong><br />

pays pratique une <strong>fiscal</strong>ité systématiquement<br />

plus élevée<br />

que nos voisins (voir tableau<br />

Comparaison <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong><br />

JEAN-LOUIS DAVAIN,<br />

AVOCAT FISCALISTE<br />

«Notre pays pratique une<br />

<strong>fiscal</strong>ité systématiquement<br />

plus élevée que nos voisins.<br />

Nous sommes taxés très<br />

vite et très fort.»<br />

Chez nous, ce modèle «du bas» été instauré à partir <strong>de</strong> 1989<br />

(voir encadré «Comment en est-on arrivé là?»). Dans d’autres<br />

pays, c’est un système au top <strong>de</strong>s revenus qui a été retenu.<br />

Avantage ? Cela permet <strong>de</strong> raboter d’autant la tranche <strong>de</strong> revenus<br />

à payer aux taux les plus élevés et donc procurer au contribuable<br />

un net réellement supérieur.<br />

Un effet <strong>de</strong> seuil détestable<br />

L’essentiel <strong>de</strong> la charge <strong>fiscal</strong>e est donc reporté sur la partie<br />

haute <strong>de</strong>s revenus. Dès lors, chaque euro supplémentaire<br />

s’ajoutant à cette par tie supérieure peut être lour<strong>de</strong>ment<br />

imposé, s’il a pour conséquence <strong>de</strong> dépasser le barème en<br />

vigueur. Dans ce cas <strong>de</strong> figure, le contribuable peut subir un<br />

désavantage, ce qui est paradoxal puisqu’il a réussi à gagner<br />

<strong>de</strong>s revenus en plus. «C’est ce qu’on appelle l’effet <strong>de</strong> seuil,<br />

poursuit Jacques Autenne. Prenons l’exemple d’un subsi<strong>de</strong><br />

octroyé pour ai<strong>de</strong>r à honorer la facture du mazout. Admettons<br />

qu’il s’élève à 210 euros et soit offert aux contribuables<br />

dont le revenu n’excè<strong>de</strong> pas 23.281 euros. Si une personne<br />

gagne 1 euro <strong>de</strong> plus, elle perdra son subsi<strong>de</strong>. De telle sorte<br />

que cet euro supplémentaire sera en fait indirectement taxé<br />

à 21.000 % !»<br />

De telles situations sont évi<strong>de</strong>mment injustes. C’est pourquoi<br />

<strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> dégressivité (où l’avantage est gommé par<br />

palier) ont été inventées pour tenter d’atténuer ce passage<br />

d’une tranche d’imposition à une autre d’une partie <strong>de</strong>s revenus.<br />

Cependant, dans les faits, elles ne remplissent que très<br />

imparfaitement leur rôle.<br />

Un crédit d’impôt qui complique tout<br />

Le système du crédit d’impôt, introduit lors <strong>de</strong> la réforme<br />

<strong>fiscal</strong>e <strong>de</strong> 2001, est venu ajouter <strong>de</strong> la complexité. Certes,<br />

l’objectif initial était louable : il est une ristourne accordée à<br />

ceux qui sont proches du salaire minimum. But : améliorer<br />

leur revenu net. Il est versé par le fisc lors <strong>de</strong> l’enrôlement<br />

et inter vient après un calcul très compliqué. En 2002, son<br />

montant maximal était <strong>de</strong> 510 euros.<br />

«La principale critique que l’on peut lui adresser est qu’il<br />

introduit <strong>de</strong> véritables discriminations entre les contribuables<br />

<strong>de</strong>s bas et <strong>de</strong>s moyens salaires», estime <strong>notre</strong> expert<br />

(voir graphique «<strong>Les</strong> <strong>effets</strong> cachés du crédit à l’impôt»), qui a<br />

l’impôt sur le revenu dans différents<br />

pays européens). Nous<br />

sommes taxés très vite et très<br />

fort. Le système belge est le<br />

fruit d’une forme <strong>de</strong> consensus<br />

politique qui a cherché à épargner<br />

<strong>fiscal</strong>ement les revenus les<br />

plus faibles. Le problème, c’est<br />

que, en vertu d’une série <strong>de</strong><br />

mécanismes, nous avons<br />

abouti à faire peser davantage<br />

<strong>de</strong> <strong>fiscal</strong>ité sur les autres revenus.<br />

Chez nous, les ren<strong>de</strong>ments<br />

<strong>de</strong> l’IPP se font essentiellement<br />

sur les moyens et les hauts<br />

revenus. Peu à peu, le mon<strong>de</strong><br />

politique prend conscience <strong>de</strong><br />

certains déséquilibres. Seulement<br />

voilà, il hésite à toucher<br />

au système. Il préfère prendre<br />

<strong>de</strong>s mesurettes ponctuelles. Par<br />

exemple, une exonération partielle<br />

du précompte professionnel<br />

sur les salaires <strong>de</strong>s<br />

chercheurs. Finalement, tout<br />

cela ne fait que compliquer<br />

encore la situation.<br />

Aujourd’hui, quel est encore le<br />

contribuable qui peut calculer<br />

lui-même sa charge <strong>fiscal</strong>e ?»<br />

L’avis <strong>de</strong> Thierry Afschrift<br />

«A la question <strong>de</strong> savoir si la<br />

progressivité est satisfaisante<br />

ou non, je préférerais en<br />

poser une autre : faut-il vraiment<br />

un impôt progressif ?,<br />

s’interroge l’avocat <strong>fiscal</strong>iste.<br />

Sur le plan international, ce<br />

débat reste très actuel. C’est<br />

que l’impôt proportionnel,<br />

appelé aussi flat tax, intrigue.<br />

Surtout <strong>de</strong>puis qu’il ne s’est<br />

pas révélé plus injuste dans<br />

les pays qui l’ont appliqué.<br />

C’est le cas <strong>de</strong> nombreux<br />

pays <strong>de</strong> l’Est : <strong>de</strong> la Russie (un<br />

100%<br />

80%<br />

60%<br />

40%<br />

20%<br />

0%<br />

-20%<br />

-40%<br />

-60%<br />

-80%<br />

-100%<br />

0<br />

Taux d'imposition<br />

3.000<br />

Revenus annuels imposables<br />

taux unique <strong>de</strong> 13 %) à la<br />

Lituanie (24 %). Il est d’autant<br />

moins incongru d’ouvrir ce<br />

débat que, chez nous, l’impôt<br />

est très peu progressif et qu’il<br />

ressemble... à une flat tax à<br />

très haut taux ! La courbe <strong>de</strong>s<br />

niveaux <strong>de</strong> taxation monte en<br />

effet très tôt à la verticale<br />

puis reste plate. Tous les<br />

contribuables sont fortement<br />

taxés. Et cela n’est pas près<br />

<strong>de</strong> changer. Car la <strong>fiscal</strong>ité<br />

n’est jamais qu’un volet <strong>de</strong> la<br />

politique budgétaire d’un<br />

pays. Or, tant que les pouvoirs<br />

publics auront un train<br />

<strong>de</strong> vie élevé (pour payer les<br />

administrations, la <strong>de</strong>tte,<br />

etc.), les recettes <strong>de</strong>vront suivre<br />

en conséquence.»<br />

THIERRY AFSCHRIFT,<br />

AVOCAT FISCALISTE ET<br />

PROFESSEUR DE DROIT<br />

FISCAL À L’ULB<br />

«Tant que les pouvoirs<br />

publics auront un train <strong>de</strong><br />

vie élevé (pour payer les<br />

administrations, la <strong>de</strong>tte,<br />

etc.), les recettes <strong>de</strong>vront<br />

suivre en conséquence.»<br />

mené <strong>de</strong>s calculs inédits sur le sujet. On peut les percevoir en<br />

comparant le taux net d’imposition (c’est-à-dire le taux moyen<br />

appliqué à l’ensemble <strong>de</strong>s revenus) et le taux marginal (le<br />

taux auquel est soumis l’euro supplémentaire <strong>de</strong> revenu ; il est<br />

considéré comme un <strong>de</strong>s indicateurs <strong>de</strong> la progressivité <strong>de</strong><br />

l’impôt). Le premier affiche une progression apparemment<br />

harmonieuse. Le second montre, lui, <strong>de</strong>ux faits particulièrement<br />

troublants.<br />

D’abord, le crédit d’impôt bénéficie surtout aux personnes<br />

déclarant entre 3.750 et 5.010 euros <strong>de</strong> revenus imposables<br />

(pour les isolés sans enfant). Entre ces <strong>de</strong>ux montants, chaque<br />

euro supplémentaire <strong>de</strong> revenu est taxé à un taux négatif pouvant<br />

aller jusqu’à - 40 %. A partir <strong>de</strong> 5.010 euros, l’avantage s’estompe.<br />

Et après 5.690 euros, il ne joue plus. Autrement dit, 700<br />

euros <strong>de</strong> revenus supplémentaires peuvent tout changer...<br />

Ensuite, le ca<strong>de</strong>au n’est pas gratuit. Son coût budgétaire a<br />

été récupéré sur d’autres tranches <strong>de</strong> revenus. Ainsi, ce sont<br />

les personnes gagnant entre 12.530 et 16.280 euros qui sont<br />

clairement mises le plus à contribution. Certes, leur taux net<br />

d’imposition varie entre<br />

19 % et 23 % environ. Mais<br />

si l’on examine le taux marginal,<br />

tout change. Chaque<br />

euro supplémentaire se<br />

voit frappé à <strong>de</strong>s taux pouvant<br />

aller jusqu’à 60 %.<br />

<strong>Les</strong> <strong>effets</strong> cachés du crédit d’impôt<br />

Simulation effectuée par Jacques Autenne sur les revenus 2002<br />

(sans tenir compte <strong>de</strong> la cotisation sociale généralisée)<br />

Contribuables principaux<br />

bénéficiaires du crédit d’impôt<br />

Situation valable pour un isolé sans enfant<br />

Taux d’imposition net<br />

3.241<br />

3.672<br />

3.751<br />

4.167<br />

4.392<br />

5.011<br />

5.350<br />

5.690<br />

7.074<br />

7.806<br />

9.350<br />

10.827<br />

12.223<br />

12.490<br />

13.187<br />

Taux d’imposition marginal<br />

(taux d’imposition appliqué au <strong>de</strong>rnier euro perçu)<br />

Contribuables principaux contributeurs<br />

du coût budgétaire du crédit d’impôt.<br />

▲<br />

Source : Jacques Autenne<br />

14.429<br />

16.097<br />

22.887<br />

27.737<br />

32.587<br />

47.690<br />

67.120<br />

87.120<br />

197.120<br />

<strong>Les</strong> remè<strong>de</strong>s<br />

possibles<br />

Selon le professeur Jacques<br />

Autenne, il conviendrait <strong>de</strong> :<br />

> Supprimer les exonérations<br />

d’impôt sur le bas<br />

<strong>de</strong>s revenus et les placer sur<br />

le haut.<br />

> Retravailler les barèmes<br />

fiscaux et les taux d’imposition<br />

avec pour objectif<br />

d’élargir les tranches d’imposition<br />

et <strong>de</strong> produire une<br />

échelle <strong>de</strong> progressivité<br />

plus harmonieuse.<br />

> Démanteler ou à tout le<br />

moins réduire le mécanisme<br />

du crédit d’impôt.<br />

> Soumettre les allocations<br />

sociales à l’impôt,<br />

tout en les augmentant. Par<br />

ce fait-là, les revenus, qu’ils<br />

soient tirés du travail ou <strong>de</strong>s<br />

allocations, seraient mis sur<br />

un pied d’égalité. Ajouté<br />

aux trois premières mesures,<br />

cela permettrait <strong>de</strong> se<br />

débarrasser <strong>de</strong>s «pièges à<br />

l’emploi».<br />

Trends-Tendances 10 avril 2008 Fo c u s 45<br />

PHOTO NEWS


( F o c u s ) E n c o u v e r t u r e<br />

Le fisc se défend<br />

Si les <strong>fiscal</strong>istes semblent<br />

unanimes à dénoncer les<br />

incohérences du système<br />

belge, en face, l’administration<br />

<strong>fiscal</strong>e gar<strong>de</strong> sa vision.<br />

Conseiller général au SPF<br />

Finances et maître <strong>de</strong> conférences<br />

aux FUCAM et à l’UCL<br />

(FOPES), Christian Valenduc<br />

répond point par point aux<br />

critiques.<br />

Sur la progressivité<br />

<strong>de</strong> l’impôt<br />

«Il faut d’abord définir ce<br />

qu’on entend par progressivité.<br />

Pour beaucoup <strong>de</strong><br />

mon<strong>de</strong>, c’est le barème progressif<br />

et l’effet <strong>de</strong>s tranches<br />

exonérées. On arrive alors à<br />

une fausse interprétation du<br />

concept : on confond la progressivité<br />

avec la hauteur<br />

<strong>de</strong>s taux marginaux (Ndlr,<br />

taux d’imposition appliqué<br />

au <strong>de</strong>rnier euro perçu).<br />

Même si les notions sont<br />

intimement liées, le taux<br />

marginal n’est pas en luimême<br />

une mesure <strong>de</strong> la progressivité.<br />

Il est plus exact<br />

<strong>de</strong> l’évaluer par la distribution<br />

<strong>de</strong>s charges <strong>fiscal</strong>es <strong>de</strong>s<br />

ménages autour d’une<br />

charge moyenne.<br />

Il reste vrai que l’échelle<br />

barémique est particulièrement<br />

abrupte à <strong>de</strong>s niveaux<br />

<strong>de</strong> salaire relativement bas :<br />

avec les cotisations personnelles<br />

<strong>de</strong> sécurité sociale, il y<br />

a <strong>de</strong>s travailleurs qui, tout en<br />

se considérant à juste titre à<br />

bas salaires, voient leurs<br />

PG<br />

augmentations <strong>de</strong> salaires<br />

bruts, leur prime <strong>de</strong> fin d’année<br />

brute ou leur pécule <strong>de</strong><br />

vacances brut, amputé <strong>de</strong> 45<br />

à 50 %. Cela provient en fait<br />

<strong>de</strong> la non-in<strong>de</strong>xation <strong>de</strong>s<br />

barèmes, qui a été décidée<br />

en pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> forte inflation<br />

(années 1973-1985). Le<br />

retour <strong>de</strong> l’in<strong>de</strong>xation automatique<br />

<strong>de</strong>s barèmes a<br />

stoppé la dérive mais n’a pas<br />

corrigé la pente.»<br />

Sur l’effet <strong>de</strong> seuil<br />

«Il existe effectivement <strong>de</strong>s<br />

<strong>effets</strong> <strong>de</strong> seuil mais on ne<br />

trouvera pas dans le système<br />

belge <strong>de</strong>s cas où le taux d’imposition<br />

marginal est <strong>de</strong> plus<br />

<strong>de</strong> 100 %. Cela signifierait un<br />

contribuable qui, du fait <strong>de</strong><br />

ses revenus supplémentaires,<br />

perdrait d’un seul coup tous<br />

CHRISTIAN VALENDUC,<br />

CONSEILLER GÉNÉRAL AU SPF<br />

FINANCES<br />

«On confond la progressivité<br />

avec la hauteur <strong>de</strong>s taux<br />

marginaux.»<br />

les avantages liés à son<br />

ancienne situation : une<br />

bourse d’étu<strong>de</strong>, un logement<br />

social, une intervention préférentielle<br />

en soins <strong>de</strong> santé,<br />

etc. De manière plus fondamentale,<br />

ces différents avantages<br />

proviennent d’une<br />

intention louable, c’est-àdire<br />

réserver un traitement<br />

plus favorable aux plus pauvres,<br />

et ils doivent bien se<br />

terminer à un certain seuil.»<br />

Sur le crédit d’impôt<br />

«L’OCDE, l’UE, le FMI vantent<br />

les mérites <strong>de</strong>s crédits d’impôt<br />

ciblés sur les bas salaires.<br />

Il existe nombre d’étu<strong>de</strong>s<br />

d’économistes qui montrent<br />

que ces crédits d’impôt parviennent<br />

à la fois à augmenter<br />

le taux <strong>de</strong> participation<br />

(donc à permettre aux peu<br />

qualifiés, exclus du marché<br />

du travail, d’y revenir) et <strong>de</strong><br />

rendre l’impôt plus équitable.<br />

On gagne à la fois sur<br />

l’efficacité et sur l’équité, ce<br />

qui est suffisamment rare<br />

pour être souligné. Il est vrai<br />

que l’on perturbe l’échelle<br />

<strong>de</strong>s taux marginaux. Mais<br />

l’esthétique d’un barème ne<br />

doit pas primer sur les conséquences<br />

sociales positives.»<br />

«L’esthétique d’un barème ne doit<br />

pas primer sur les conséquences<br />

sociales positives.»<br />

Sur les pièges<br />

à l’emploi<br />

«Certaines étu<strong>de</strong>s relativisent<br />

leur ampleur ou leur<br />

caractère structurel. <strong>Les</strong> avis<br />

sont partagés. La solution <strong>de</strong><br />

soumettre à l’impôt les allocations<br />

sociales serait, en<br />

théorie, une bonne solution.<br />

Leur exonération a été décidée<br />

dans les années 1960,<br />

parce qu’elles étaient<br />

basses. Depuis lors, leur taux<br />

<strong>de</strong> remplacement a augmenté.<br />

Le problème, c’est<br />

qu’il est toujours politiquement<br />

difficile <strong>de</strong> revenir sur<br />

<strong>de</strong>s exemptions catégorielles.<br />

De plus, une telle<br />

mesure augmentera mécaniquement<br />

le taux <strong>de</strong> prélèvement<br />

obligatoire <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux à<br />

trois points <strong>de</strong> PIB. Quel est<br />

l’homme politique qui va<br />

accepter cela ?»<br />

Soit bien plus que <strong>de</strong>s personnes aux revenus supérieurs à<br />

22.887 euros (pour qui le taux d’imposition supplémentaire se<br />

stabilise à environ 45 %).<br />

Des pièges à l’emploi structurels<br />

C’est un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers grands problèmes. A nouveau, il touche<br />

les bas revenus. En Belgique, les allocations sociales <strong>de</strong>vraient<br />

être taxées (d’après le barème) mais sont exonérées. Au niveau<br />

social, cela se conçoit. Toutefois, cette situation, ajoutée à l’effet<br />

d’une progressivité abrupte <strong>de</strong> l’impôt, fait que les revenus<br />

nets <strong>de</strong>s allocataires sociaux sont bien souvent plus élevés que<br />

ceux <strong>de</strong>s détenteurs <strong>de</strong> petits boulots. C’est le fameux «piège<br />

à l’emploi» évoqué plus haut. Ce délicat problème n’a toujours<br />

pas été éliminé. Et pour cause : il est inscrit dans le système !<br />

En effet, quand une personne travaille, la partie <strong>de</strong> ses revenus<br />

qui est exonérée d’impôt s’élève, on l’a vu, à 6.150 euros (CIR<br />

2008). Par contre, un isolé qui entre dans sa première année <strong>de</strong><br />

chômage touchera 13.194 euros par an sans payer d’impôt.<br />

«Toute la différence est là, conclut Jacques Autenne. Le minimum<br />

vital exonéré est <strong>de</strong> manière totalement paradoxale inférieur<br />

au revenu d’intégration. Le ministre <strong>de</strong>s Finances, Didier<br />

Reyn<strong>de</strong>rs, vient enfin <strong>de</strong> reconnaître cette anomalie. Mais que<br />

d’années <strong>de</strong> silence sur cette injustice sociale au détriment <strong>de</strong>s<br />

travailleurs actifs.»<br />

■<br />

46 Fo c u s Trends-Tendances 10 avril 2008

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