MAQ PETIT BULLETIN_GRENOBLE - Le Petit Bulletin
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P05 — LE <strong>PETIT</strong> <strong>BULLETIN</strong> N°691 — DU 05.12 AU 11.12.12<br />
CINÉMA<br />
— RÉTROSPECTIVE —<br />
Notre oncle Charlie<br />
STAR MONDIALE, FIGURE LÉGENDAIRE, ICÔNE CHEAP, CHAPLIN EST-IL INÉPUISABLE,<br />
OU BIEN DÉFINITIVEMENT ÉPUISÉ ? ET SI, AYANT CÔTOYÉ PLUSIEURS FOIS LA MORT,<br />
SON ŒUVRE ÉTAIT FAITE POUR RESSUSCITER ? ÉLÉMENTS DE RÉPONSE À L’OCCASION<br />
DE LA RÉTROSPECTIVE QUE LUI CONSACRE L’INSTITUT LUMIÈRE. JÉRÔME DITTMAR<br />
<strong>Le</strong> cinéma a forgé sa mythologie la plus criarde autour<br />
de quelques stars brillant par-delà les films où on les<br />
admire, comme si tout ce qui comptait c’était d’abord<br />
le plus concret, un visage et un corps. La politique<br />
des acteurs serait-elle finalement plus démocratique<br />
que celle des auteurs ? Figure monstre de l’histoire<br />
du cinéma, Chaplin a quelque chose de définitif et<br />
supplémentaire dépassant l’aura d’une Marilyn ou<br />
d’un Bruce <strong>Le</strong>e qui, eux aussi, finiront en poster Ikea.<br />
Mythe complet avec son personnage emblématique<br />
et des films d’une mise en scène éblouissante, Chaplin<br />
est devenu une incarnation du cinéma, de ses prémisses<br />
à son âge d’or et ses déclins successifs. Il fut<br />
la quintessence de l’art du XX e siècle, l’épousant dans<br />
sa trajectoire jusqu’à se faire absorber par lui et en<br />
illustrer aussi la mort, cette mort du cinéma qu’on<br />
annonce sans cesse pour mieux le voir revivre.<br />
WORKING HERO<br />
Pour briller si haut, Chaplin fut comme John Ford ou<br />
Griffith, un pionnier. Il a été là au début, à une époque<br />
où sous contrat avec des studios désormais disparus,<br />
l’on pouvait enchaîner les petits films à un rythme fou.<br />
Quand l’immigré anglais passe, très vite, à la réalisation,<br />
il multiplie les tournages et réalise en quelques<br />
années (1914-1918) des dizaines de double bobines<br />
lui permettant de se faire la main et rapidement perfectionner<br />
sa mise en scène comme son personnage. Qui,<br />
aujourd’hui, peut travailler dans de telles conditions<br />
et explorer un si vaste champ d’expérimentation ? La<br />
grandeur du classicisme est le fruit d’un travail dont<br />
Chaplin fut l’un des maîtres besogneux. Quelques<br />
unes de ses œuvres de jeunesse comme Charlot<br />
au music-hall ou Charlot vagabond imposent progressivement<br />
son génie du burlesque, de la pantomime,<br />
de la chorégraphie et de la satire sociale. <strong>Le</strong> travail sur<br />
le rythme, l’espace, le comique, l’observation, se peaufinent<br />
alors à une vitesse ahurissante. Cette période<br />
culmine avec l’aboutissement des premiers longs<br />
métrages qu’on ne présente plus : <strong>Le</strong> Kid, La Ruée vers<br />
l’or, <strong>Le</strong>s Lumières de la ville. Trois œuvres d’anthologie<br />
où l’auteur jouit d’une liberté incroyable pour toucher<br />
plus profondément au mélodrame et à une certaine<br />
quintessence du muet.<br />
CRÉPUSCULE DES IDOLES<br />
<strong>Le</strong>s réticences de Chaplin pour le parlant sont célèbres,<br />
et serviront de matière humoristique aux Temps<br />
modernes, avec sa bande-son faite de borborygmes.<br />
Charles Chaplin dans “Monsieur Verdoux” (1947)<br />
Mais cette crainte de quitter le muet est symptomatique<br />
d’un travail touché par le déclin et la mort.<br />
Vers 1936 une page se tourne. On situe la fin de<br />
l’âge d’or hollywoodien aux années 50, c’est oublier<br />
que les années 30 sont une période de changement<br />
aussi symbolique (La Chevauchée fantastique est<br />
déjà un western nostalgique). Si le sonore n’empêche<br />
pas Chaplin de culminer avec son chef d’œuvre sur<br />
la mécanisation de la vie, après <strong>Le</strong> Dictateur une<br />
nouvelle rupture a lieu, et l’auteur rentre dans une<br />
ère où les films deviennent plus sporadiques et difficiles.<br />
Chaplin a mieux résisté à son temps que Buster<br />
Keaton ou Harold Lloyd, génies du burlesque plus<br />
abstraits et qui, sans l’humanisme universel de<br />
Charlot, sont souvent passés au second plan. Pourtant<br />
les dernières productions de Chaplin (Monsieur<br />
Verdoux, <strong>Le</strong>s Feux de la rampe, Un roi à New-York)<br />
sont aussi marquées par la rupture. Après le parlant,<br />
Chaplin assiste à un second déclin d’Hollywood, qu’il<br />
finira par fuir pour l’Europe. Ses films regardent alors<br />
en arrière et sont plus introspectifs, sans perdre leur<br />
regard sur le monde, mais un monde que l’auteur<br />
préfère quitter, jusqu’à finir par se réfugier en Suisse.<br />
Ce destin de retraité helvétique, au pays de la neutralité,<br />
n’aurait-il pas fini par déteindre sur une filmographie<br />
qu’on croirait désormais muséifiée ?<br />
DEAD CAN DANCE<br />
Car que reste-t-il aujourd’hui de Chaplin sinon un<br />
déguisement d’une ringardise absolue ? Même son<br />
humanisme est à ce point avalé par tous, qu’il est<br />
devenu inoffensif. Pour sortir de cette stérilisation<br />
chaplinesque et de la prosternation académique, il<br />
faut d’abord rappeler que l’œuvre n’est pas dénuée<br />
de cynisme ni de noirceur – il en fallait pour anticiper<br />
la réalité du Dictateur. Ensuite, si comme Keaton<br />
il semble avoir peu d’héritiers, Chaplin a malgré<br />
tout profondément influencé le travail de l’acteur à<br />
l’écran, notamment celui du film d’action – Jacky<br />
Chan, entre autres, n’a cessé de le citer. Cette place,<br />
parfois oubliée, rappelle que le génie figuratif de<br />
Chaplin, ce rapport d’un corps à l’espace, pas seulement<br />
sa maîtrise mais sa mutation complète, reste une<br />
chose inestimable et à relire. Il est peut-être temps<br />
d’en finir avec le culte de Charlot pour jouer avec le<br />
cadavre de Chaplin, seule façon de le maintenir en vie.<br />
> Rétrospective Charlie Chaplin<br />
À l’Institut Lumière, jusqu’au dimanche 6 janvier<br />
DR<br />
Locations : Fnac, Carrefour,<br />
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BELLEVUE SAS - Siret 751 743 618 00025 - Licences n°1-en cours, n°2-1058566, n°3-1058567 - © D.Michalet -/ Käfig - M. Cavalca / S.Eicher JB. Mondino<br />
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